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Correction Khôlle Thème La monnaie Semaines des 6 et 13 novembre 2017 1. Présenter les conceptions de la monnaie neutre (approche dichotomiste de la monnaie) (argument 1) L’approche dichotomiste de la monnaie considère que l’accroissement de la quantité de monnaie n’a pas de conséquence sur l’activité économique. Pour le dire autrement, la hausse de la masse monétaire ne fait pas augmenter la production. (argument 2) Dans cette approche les effets de la hausse de la quantité de monnaie sont nominaux, pas réels. La hausse de la quantité de monnaie ne peut produire qu’une accélération de la hausse du niveau général des prix. (argument 3) Cette conception dichotomiste est ancienne en économie, puisqu’on la retrouve déjà chez J.Bodin qui considère que la hausse de l’inflation en Europe au 16 ième siècle est la conséquence de la hausse de la quantité d’or et donc de monnaie métallique. Au début du 18 ième siècle, J.B.Say considère que cette neutralité fait de la monnaie un simple voile transparent (sans effet) « jeté » sur l’économie (recouvrant l’activité économique sans en changer la nature). Pour J.S.Mill la monnaie est « insignifiante ». David Hume illustre cette neutralité en imaginant l’exemple suivant : admettons qu’une nuit, la quantité de monnaie soit multipliée par deux. Comme il n’est pas possible en 1 nuit de multiplier la production par deux, alors cette hausse de la quantité de monnaie a pour conséquence de faire tous les prix nominaux par deux. (argument 4) Cette relation quantitative entre la quantité de monnaie et le NGP est formalisée au début du 20 ième siècle par I.Fisher sous la forme M.V=P.T Avec M :masse monétaire, V : vitesse de circulation de la monnaie ; P : NGP ; T : volume des transactions. Quand M augmente plus que proportionnellement que T alors P augmente (on fait aussi l’hypothèse que V est stable). L’inflation est donc uniquement produite par une hausse de la quantité de monnaie qui dépasse la hausse du volume des transactions. 1

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Correction Khôlle Thème La monnaieSemaines des 6 et 13 novembre 2017

1. Présenter les conceptions de la monnaie neutre (approche dichotomiste de la monnaie)

(argument 1) L’approche dichotomiste de la monnaie considère que l’accroissement de la quantité de monnaie n’a pas de conséquence sur l’activité économique. Pour le dire autrement, la hausse de la masse monétaire ne fait pas augmenter la production. (argument 2) Dans cette approche les effets de la hausse de la quantité de monnaie sont nominaux, pas réels. La hausse de la quantité de monnaie ne peut produire qu’une accélération de la hausse du niveau général des prix. (argument 3) Cette conception dichotomiste est ancienne en économie, puisqu’on la retrouve déjà chez J.Bodin qui considère que la hausse de l’inflation en Europe au 16 ième

siècle est la conséquence de la hausse de la quantité d’or et donc de monnaie métallique. Au début du 18ième siècle, J.B.Say considère que cette neutralité fait de la monnaie un simple voile transparent (sans effet) « jeté » sur l’économie (recouvrant l’activité économique sans en changer la nature). Pour J.S.Mill la monnaie est « insignifiante ». David Hume illustre cette neutralité en imaginant l’exemple suivant : admettons qu’une nuit, la quantité de monnaie soit multipliée par deux. Comme il n’est pas possible en 1 nuit de multiplier la production par deux, alors cette hausse de la quantité de monnaie a pour conséquence de faire tous les prix nominaux par deux. (argument 4) Cette relation quantitative entre la quantité de monnaie et le NGP est formalisée au début du 20ième siècle par I.Fisher sous la forme M.V=P.TAvec M :masse monétaire, V : vitesse de circulation de la monnaie ; P : NGP ; T : volume des transactions. Quand M augmente plus que proportionnellement que T alors P augmente (on fait aussi l’hypothèse que V est stable). L’inflation est donc uniquement produite par une hausse de la quantité de monnaie qui dépasse la hausse du volume des transactions. (argument 5) La position des monétaristes est plus subtile. Milton Friedman considère en effet qu’une variation de la quantité de monnaie provoquée par une politique monétaire expansionniste peut avoir des effets à court terme, mais ces effets disparaissent à long terme. En effet, dans un premier temps, la hausse de la quantité de monnaie se traduit par une inflation que les agents, notamment les consommateurs ne perçoivent pas : il y a situation d’illusion monétaire. En conséquence, ils confondent hausse nominale de leur salaire et hausse réel (hausse pouvoir d’achat). Mais cette illusion se dissipent et la « découverte » de l’inflation les poussent à demander des hausses de salaires qui produisent un choc d’offre négatif : la hausse du coût de production fait baisser de la rentabilité des entreprises qui réduisent leur offre. La hausse de l’activité liée à l’illusion monétaire disparaît avec la fin de cette illusion. A long terme ne reste plus que l’inflation. Milton Friedman compare la création monétaire trop expansionniste à l’usage excessif de l’alcool. La période d’euphorie passée, il ne reste plus que le mal de tête.

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2. Présenter les conceptions de la monnaie active (j’ai rajouté l’argument du keynésianisme de la synthèse)

(argument 1) La monnaie est considérée comme active lorsque la variation de la quantité de monnaie en circulation a des conséquences sur la production de biens ou services, ce que l’on appelle parfois l’économie « réelle » ; (argument 2) Il existe deux grandes traditions qui s’inscrivent dans une conception active de la monnaie: celle de l’école keynésienne et celle de l’école autrichienne. (argument 3) Pour Keynes, l’économie fonctionne comme dans un circuit où s’enchaînent la production, la distribution de revenus et les dépenses. Ce circuit a un point de départ qui est la production. Le crédit bancaire joue alors un rôle essentiel  : il permet de financer la production en fonction des anticipations des entrepreneurs. Il agit comme une avance de production, c’est-à-dire un revenu qui sert financer l’investissement et qui est remboursé plus tard. Le crédit bancaire est donc au cœur de la dynamique des investissements. Keynes prolonge ici les apports de Tooke qui défend la thèse de la banking school dans le première moitié du 19ième siècle. (argument 4) Hyman Minsky prolonge cette idée en introduisant la notion de cycle de crédit. Les anticipations des acteurs, investisseurs et banquiers, sont soit très optimistes, soit très pessimistes. Durant la phase d’optimisme, de plus en plus de projets sont financiers. L’économie est alors en plein paradoxe de la tranquillité : les projets les plus fragiles obtiennent des financements qu’ils n’auraient pu avoir en temps normal. Ces projets sont les premiers à faire défaut, la hausse des défaillances transforme l’optimisme en pessimisme et les banques ferment le robinet du crédit (credit crunch). (argument 5) Pour Keynes, la monnaie peut être active pour une seconde raison : elle peut être thésauriser, c’est-à-dire conserver sous forme liquide. Elle est donc « retirée » du circuit des dépenses ; cela a une conséquence sur le fonctionnement de l’économie : une partie des revenus provenant de la production n’est pas utilisée pour alimenter la demande. Une crise de surproduction apparaît alors. (argument 6) Le keynésianisme s’est développé après la seconde guerre mondiale en mélangeant des principes keynésiens (le rôle de la demande et du court terme) et des principes néoclassiques et quantitativistes (dans le domaine monétaire). Pour ce keynésianisme dit de la synthèse, l’hypothèse d’incertitude de l’avenir n’est pas utilisée. En conséquence, les agents économiques ne s’appuient pas sur des anticipations pour agir. Leurs décisions sont plus « mécaniques » : elles répondent à des impulsions données par la politique monétaire. En l’occurrence, en situation de chômage, la banque centrale réagit en baisser ses taux d’intérêt pour stimuler le crédit, l’activité et l’emploi. L’impulsion monétaire donnée par la banque centrale fait de cette approche une conception exogène de la monnaie qui s’éloigne du rôle que Keynes donne aux croyances des investisseurs dans l’avenir.(argument 7) Il existe un troisième courant de la monnaie active : le courant autrichien. Pour von Mises, la thèse de la monnaie neutre est une ineptie économique. Il s’oppose à « l’idée hérétique de la prétendue neutralité de la monnaie ». La démonstration d’Hayek est la suivante. Les projets d’investissement peuvent être financés soit, sur le marché des fonds prêtables, soit, par le crédit. Sur le marché des fonds prêtables se rencontrent une offre de capital (l’épargne) et une demande de capital (le financement des investissements). L’épargne des offreurs exprime les préférences des ménages pour la consommation présente et avenir : si l’épargne es faible, c’est que les ménages veulent consommer beaucoup aujourd’hui, si elle est élevée c’est qu’il veulent consommer beaucoup demain. La fixation du niveau de l’épargne indique donc les préférences des agents pour le présent ou pour l’avenir. La rencontre de l’épargne et de la demande de

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financement sur le marché des fonds prêtables aboutit à la fixation d’un taux d’intérêt naturel, concept introduit par K.Wicksell. Pour Hayek, le financement de l’économie doit passer par ce marché des fonds prêtables qui permet l’allocation de l’épargne. Mais il existe aussi un financement par le crédit. Or, dès que le taux d’intérêt des crédits passe au-dessous du taux d’intérêt naturel, les projets d’investissement vont être plus nombreux à être financés. Les investissements réalisés vont alors dépasser le volume de ceux qui le sont par le marché des fonds prêtables. Pour Hayek, cela est problématique car cela revient à investir au delà de ce que les agents sont prêts à consommer demain. Cette situation provoque alors à terme une crise de surproduction. Pour Hayek, dans cette situation le taux d’intérêt du crédit envoie un « faux signal » aux investisseurs.Pour Hayek, afin d’éviter que cette crise ne se déclenche, il faut que le taux d’intérêt du crédit qui découle de la politique de la banque centrale ne passe jamais au-dessous du taux d’intérêt naturel.

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3. Présenter les conceptions de la monnaie exogène (argument 1) Dans la conception exogène de la monnaie, l’offre de monnaie par la banque centrale est à l’origine de l’évolution de la quantité de monnaie en circulation. (argument 2) Cette relation entre l’offre de monnaie centrale et la quantité totale de monnaie en circulation peut être interprétée à partir du modèle du multiplicateur de monnaie. Lorsque la banque centrale finance une banque commerciale pour un montant de 1000, que cette banque commerciale sait qu’elle doit conserver 20% de ce montant en réserves obligatoires, elle peut alors octroyer un financement à un de ses clients pour un montant de 800. Ce financement permet au client de réaliser des dépenses, qui deviennent de nouveaux dépôts. La banque doit alors conserver 20% de ces nouveaux dépôts en réserves obligatoires et peut prêter les 80% restant. Un nouveau financement pour un montant de 640 apparaît et, ainsi de suite. A chaque étape, la constitution des réserves obligatoires réduit le montant du prêt que la banque peut octroyer. A chaque étape, les dépôts permettent de nouveaux crédits, mais cette dynamique est décroissante. Pour connaître, le montant totale de monnaie en circulation il faut alors multiplier la monnaie centrale de départ par l’inverse du coefficient de réserves obligatoires. Dans notre exemple, 1000x(1/0,2) = 5000. (argument 3) Le modèle du multiplicateur permet de comprendre que c’est l’action de la banque centrale qui est à l’origine de l’évolution de la quantité de monnaie totale en circulation. En augmentant le taux de réserve obligatoire ou le taux directeur la banque centrale freine l’activité de crédit, et inversement. (argument 4) Cette conception de la monnaie exogène est partagée par de nombreux courants théoriques : la théorie quantitative de la monnaie, la théorie monétariste et la théorie autrichienne. (argument 5) Pour les quantitativiste et les monétaristes, la banque centrale doit faire en sorte de créer une quantité de monnaie correspondante à la hausse de la production, et donc des transactions. Si la création monétaire est plus que proportionnelle à celle de la production, l’inflation va apparaître. Ce qu’il faut éviter. (argument 6) Pour les autrichiens, la banque centrale doit maintenir un taux directeur égal ou supérieur à celui du marché des fonds prêtables pour éviter de donner un faux signal aux investisseurs et provoquer une crise de surproduction.

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4. Présenter les conceptions de la monnaie endogène (argument 1) Dans la conception endogène de la monnaie, la demande de monnaie par les agents économiques, c’est-à-dire les entreprises et les ménages qui investissent (nb : l’achat d’un appartement peut être considéré comme un investissement), est à l’origine de l’évolution de la quantité de monnaie en circulation. Les agents économiques s’adressent aux banques commerciales, qui satisfont cette demande par le crédit bancaire. (argument 2) Cette relation entre la demande de monnaie centrale et la quantité totale de monnaie en circulation peut être interprétée à partir du modèle du diviseur de monnaie. La quantité de monnaie centrale est un diviseur de la quantité de monnaie scripturale créée par les banques commerciales. Si l’ensemble des banques créent 5000 unités monétaires, et qu’elles anticipent un pourcentage de fuites hors circuit (on peut remplacer dans le raisonnement par les réserves obligatoires) de 20%, elles savent qu’elles doivent se refinancer auprès de la Banque centrale pour 5000x0,2=1000 unités monétaires. Ce refinancement correspond à la quantité de monnaie centrale. (argument 3) Les conceptions de la monnaie endogène sont toujours associées à une approche « active » de la monnaie. on y retrouve les auteurs d’inspiration keynésienne, ou qui ont inspirés Keynes sur ce point (Marx, Malthus pour l’effet de thésaurisation et Tooke pour l’idée de circuit monétaire de production et du rôle du crédit comme avance monétaire) et Minsky (cycle de crédit) qui est un post-keynésien (je ne développe pas ici, car on rentre dans la question de la monnaie active; remarque : les autrichiens ont aussi une approche active de la monnaie mais pour eux la dynamique de la création de monnaie est de nature exogène car la Banque centrale à la main sur le rythme de création).

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5. Présenter le rôle de la politique monétaire pour les économistes du circuit monétaire de production

(argument 1) Les économistes qui s’inscrivent dans une logique de circuit monétaire de production sont ceux qui défendent une conception à la fois active et endogène de la monnaie. (argument 2) Ils font des anticipations des agents et de leurs représentations de l’avenir le point de départ de la création monétaire. (argument 3) Finalement, l'action de la banque centrale sur les crédits n'a pas vraiment d'impact, ce qui se résume par la citation suivante, souvent accordée à Keynes : « on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif ». Dit autrement, une hausse du taux d’intérêt ne freine pas nécessairement les désirs d’investissement et le crédit, tandis qu’une baisse du taux d’intérêt ne provoque pas non plus automatiquement une hausse de l’investissement, notamment quand l’économie se trouve en situation de trappe à la liquidité (je reprendrai ce concept plus tard). (argument 4) La création de monnaie (rôle du crédit) est donc liée à l'activité économique et aux croyances des investisseurs. C'est le point de vue de Keynes et des post-keynésiens (Minsky). Quelle politique monétaire peut alors pratiquer la banque centrale ? Puisqu’elle est peu efficace pour orienter le volume des crédits, sont action va plutôt consister à surveiller la qualité des prêts accordés et la capacité des banques à ne pas rencontrer des problèmes de solvabilité. Elles peuvent ainsi imposer des règles qui permettent de vérifier que les crédits octroyés sont de bonne qualité, ou que les banques auront les réserves nécessaires en cas de crise. L'action de la banque centrale est ici une action de supervision.

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6. Présenter le rôle de la politique monétaire pour les économistes qui s’appuient sur une conception exogène de la monnaie

Il y a parmi les économistes qui défendent une conception de la monnaie exogène trois approches de ce que doit être la politique monétaire. (argument 1) Pour les quantitatitivistes, la politique monétaire doit permettre de créer suffisamment de monnaie pour que le niveau général des prix reste stable. Dans cette conception neutre et exogène de la monnaie, la seule et unique conséquence d’une création excessive de monnaie est l’inflation. Il y a création « excessive » quand la masse monétaire croît plus vite que le volume des transactions, c’est-à-dire la hausse de la production. Pour Milton Friedman, il faut que la banque centrale se fixe une règle de hausse automatique de la masse monétaire qui soit proportionnelle à la croissance de l’activité qu’elle anticipe, c’est la règle du k%. (argument 2) Pour les autrichiens, qui ont une conception exogène mais active de la monnaie, la politique monétaire a pour objectif d’éviter toute crise de surproduction. Il y a en effet un risque de voir la banque centrale fixer le taux d’intérêt monétaire au dessous du taux d’intérêt naturel incitant les entreprises à s’endetter. La BC agit sur le taux d'intérêt (ou les réserves obligatoires) pour que l'augmentation de la quantité de monnaie provoquée par le crédit soit proportionnelle à l'augmentation de la production et des biens échangés.(argument 3) Les keynésiens de la synthèse ont également une conception exogène et active de la monnaie mais ils se distinguent nettement des autrichiens en ce qui concerne les objectifs de la politique monétaire. Ils pensent que la création monétaire a un impact sur le niveau d'activité : en stimulant les crédits, la banque centrale va stimuler les investissements et la production. La Banque centrale peut donc faire baisser le chômage en faisant baisser le taux d’intérêt. Cette conception "active" de la monnaie les rapproche des keynésiens. Mais ils considèrent aussi que l’offre de monnaie de la banque centrale joue sur le crédit et donc la masse monétaire. ils ont donc une approche exogène de la monnaie dans laquelle la masse monétaire est un multiple de la base monétaire. A la différence des keynésiens, ils ne raisonnent pas à partir de la notion de croyance dans l'avenir. Ils s’éloignent donc de l’approche endogène de la monnaie de Keynes et se rapprochent de la conception quantitativiste de la monnaie. C’est pour cela que l’on qualifie cette approche de keynésianisme de la synthèse.

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7. Présenter la thèse « fonctionnaliste » sur la nature de la monnaie

(argument 1) La monnaie possède des fonctions économiques : elle sert d’unité de compte, d’intermédiaire de l’échange et de réserve de valeur. Tous les économistes sont d’accord sur l’existence de ces trois fonctions. (argument 2) La théorie fonctionnaliste va plus loin. Elle explique comment ces trois fonctions permettent à la monnaie de rendre l’échange plus pratique que dans le cadre du troc. La monnaie fait donc baisser les coûts de transaction. Le fait que la monnaie soit apparue comme réponse aux limites du troc implique une seconde conséquence : l’échange marchand existe avant que la monnaie ne soit créée. Il pré-existe à la monnaie. (argument 3) En effet, en tant qu’unité de compte, la monnaie permet de faire disparaître un problème posé par l’échange d’un bien contre un autre : plus le nombre de produits augmente, plus le nombre de prix relatifs explose, ce qui rend les comparaisons des prix entre produits de plus en plus difficile. (argument 4) En tant qu’intermédiaire de l’échange, la monnaie est une réponse au problème de l’absence de double concordance des désirs. La monnaie permet de dissocier l’acte de vente de celui d’achat. (argument 5) En tant que réserve de valeur, la monnaie permet de conserver une partie de la richesse sous forme totalement liquide, c’est-à-dire de pouvoir s’en servir à tout instant pour régler une dette.

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8. Présenter la thèse de la monnaie comme bien collectif

(argument 1) La thèse de la monnaie comme bien collectif a pour point départ une critique de l’approche fonctionnaliste de la monnaie. Dans cette dernière, la monnaie apparaît comme une réponse aux limites du troc dans une société où les échanges marchands existent déjà. La première critique qui est adressée à l’approche fonctionnaliste concerne sa portée heuristique : il n’existe pas de société marchande sans monnaie. Les travaux de l’anthropologue Maurice Godelier sur les papous Baruya montrent que même dans les sociétés traditionnelles, tout échange marchand s’appuie sur une monnaie, en l’occurrence le sel. Dans cette société, il n’y a pas d’échange marchand entre ses membes ; le sel est utilisé pour sa dimension symbolique. Par contre, dès que les baruya échangent avec d’autres tribus pour se procurer des biens qu’ils ne produisent pas, ils utilisent du sel comme monnaie. Historiquement, on constate que les premières formes de monnaie jouant le rôle d’unité de compte apparaissent dès l’an 6000 avant JC en Mésopotamie. (argument 2) La nature de la monnaie ne peut donc se résumer à ses fonctions et ses capacités à résoudre des problèmes posés par le troc. Les travaux de Karl Marx (Le Capital, vol.1, 1864) vont ouvrir une autre piste creusée en France par des économistes contemporains comme Michel Aglietta (La Monnaie entre dettes et souveraineté, 2016). Pour Marx, la distinction société traditionnelle et société moderne est primordial pour comprendre le rôle de la monnaie : dans les premières, les positions sociales sont figées et le travail de chacun possède une valeur connu de tous avant même qu’il ne soit exécuté. Dans les secondes, au contraire, la division du travail au sein de la société s’est approfondie, les positions sociales sont ouvertes à tous, et la valeur du travail de chacun n’est pas prédéterminée. La monnaie joue alors le rôle d’ « équivalent général » (K.Marx) : c’est l’instrument par lequel tous les membres de la collectivité découvre la valeur de leur travail. La monnaie fournit le « langage numérique commun » de la valeur (M.Aglietta). La monnaie est donc l’instrument qui permet aux sociétés modernes de se développer. C’est la monnaie qui permet l’essor de l’échange marchand. Dans cette approche, il n’y a pas de société marchande sans monnaie. La monnaie possède donc une dimension collective : c’est le médium par lequel s’expriment les valeurs de toutes les actions individuelles. Elle est utilisée par tous les membres d’une société pour exprimer sur une même échelle la valeur du travail de chacun et pour réaliser cette tâche elle n’appartient à personne. (argument 4) L’usage de cette monnaie collective nécessite cependant la confiance de ceux qui l’utilisent. Cette confiance est triple selon Aglietta. Elle est d’abord méthodique car elle découle de l’usage quotidien qu’en font les agents économiques. Elle est ensuite hiérarchique car l’émission de monnaie est rattachée à la banque centrale dont la mission est d’assurer la bonne réalisation des paiements et le bon fonctionnement du système bancaire et financier. Elle est enfin éthique puisqu’il existe une politique monétaire dont les citoyens attendent qu’elle permettent la croissance et le prospérité.

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