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CHAPITRE 12 LE CINÉMA STRUCTUREL Le bond en alant le PIus significatif du cinéma d'avant-€iarde américain' depuis la vogue des formes mvthopoétiques du début des annéessoixante'collsista en i;é-oig"r,." "t l" ctér'elôppement de ce que j'ai âPPelé le cinéma structurel' Les opéradlons à I'ceuvredans le travail de Mava Deren se sont réPercutées' comme le l"ai nrontré,clans le moul'enent du cinéma d'arvant-garde américainen son entier de la fin des arurées quarante jusclu'au nlilieu des années soixante; au niveau le plusélémentâirH on Peut clire clLle c était lln mouYement vers tlne comPlexilé cinématogr.rphiqtre à" pl.'s eri plus gr.rnde Des cinéastes tels qr-re Cregory vortopoilot, siaiev Peterson, Kenneth Anger,Stan Brakhageet Peter Kubelka' pour nâ citer que les plus en vrre,ontélaboré cles formes de plus en plus complexes et condensées. Depuis le milieu cles années soi\ante, Plusieurs ciné'rstes ont.énrer8é dont l'appàche est assez diftérer.tte, bien que diaiectiquement apP'lrenté à Ia sensibilité a"'t'"u,. pr"a"."rteurs. Michael SnotiGeorge Lando\'v, Hollis.FramPton' Paul SÀorit,ion" Corrracl, Ernie Cehr et Jol'ce Wieland ont produit un nombre ,o-ntl"uL.f" a" iilns, apparemment à l'àpposée du couranL [orm'rliste Le leur est un ânéma forl.tésur là struchrre dansleqrrel Lr iornre d'ensenlble' Prédéterminée et simptifiee, corr'titr re t'inlPression principale produitr'par le film' -'i-" â"!*" tt^,.t.,rel insistecla.'aniage sirr l'r [ornrc tlrrestlr le contenu'minimal et accessoire. Les qtlatre caractéristiques du cinéma structurel sont: plan fixe fi-age fixe d., poi,'ttdc vue du spectatiur), effet de clignoternent' tirage en boucle àa."it-ug" cllécran. Très rarement on trotlvera ces qÛatre caractéristiques ,oss"mbléé e,t.u. seul film et il v a même des fitnrs structurels qui modifient ces éléments de base. Quelle est cloncalors la clifférence entre le cinéma lvrique analvséauParavant et li cinérnastrttcturel ? Quel rapport ctrtretiennent-ils ? Le film lvrique aussi rr:mplace lc rnricli.ttetrr par la preierrce nLcrLle de la caméra On voit ce qLle le , i.ii,.," "o't, lr's rcactitrns tlc- I.rcanréra et le montagesont ré\'élatrices de ses rdptrnscs a s.r vi\ion. Au <iÉtrLrt.le Mr:s/ics rrf tht Aftarnottn <l'IHammidet Deren se ir.it, "'r, L"t lacitrcs c1u cinenr.r à la première Pe$onne: la Première aPProche et ,,lrit" d" lu ntoi.on "st filmée drr point de vrre de l'énigmaticlue Protagoniste Mais immédiatement cettepuissanteouverture est temPérée - ou médiatisée - en rnontrunt le visuge ,le lâ protagonistc clans les séquences successives En créant le linéma lvriq.,e,5ton Briôage acccptales limites de cctte séquence d'ouverture .o-À" ÉutJ po". "n",.to.t,.ll" iorme En jouant sur teseJfets d'oPtiques et les métaphores des mouvelrùrlls ( rrfPolelspar la gestuellt'de la caméra' il affirme le 319

Visionary film, The American Avant-Garde

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Chapitre 12, LE CINEMA STRUCTUREL- Sitney Anger

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CHAPITRE 12

LE CINÉMA STRUCTUREL

Le bond en alant le PIus significatif du cinéma d'avant-€iarde américain' depuis

la vogue des formes mvthopoétiques du début des années soixante' collsista en

i;é-oig"r,." "t

l" ctér'elôppement de ce que j'ai âPPelé le cinéma structurel' Les

opéradlons à I'ceuvre dans le travail de Mava Deren se sont réPercutées' comme le

l"ai nrontré,clans le moul'enent du cinéma d'arvant-garde américain en son entier

de la fin des arurées quarante jusclu'au nlilieu des années soixante; au niveau le

plus élémentâirH on Peut c l i re c lL le c étai t l ln mouYement vers t lne comPlexi lé

cinématogr.rphiqtre à" pl. 's eri plus gr.rnde Des cinéastes tels qr-re Cregory

vortopoilot, siaiev Peterson, Kenneth Anger,Stan Brakhage et Peter Kubelka'

pour nâ citer que les plus en vrre,ont élaboré cles formes de plus en plus complexes

et condensées.Depuis le milieu cles années soi\ante, Plusieurs ciné'rstes ont.énrer8é dont

l'appàche est assez diftérer.tte, bien que diaiectiquement apP'lrenté à Ia sensibilité

a"'t '"u,. pr"a"."rteurs. Michael SnotiGeorge Lando\'v, Holl is.FramPton' Paul

SÀori t, ion" Corrracl, Ernie Cehr et Jol'ce Wieland ont produit un nombre

,o-ntl"uL.f" a" i i lns, apparemment à l 'àpposée du couranL [orm'rl iste Le leur

est un ânéma forl.té sur là struchrre dans leqrrel Lr iornre d'ensenlble' Prédéterminée

et s impt i f iee, corr ' t i t r re t ' in lPression pr incipale produi t r 'par le f i lm'-'i-"

â"!*" tt^,.t.,rel insiste cla.'aniage sirr l'r [ornrc tlrre stlr le contenu'minimal

et accessoire. Les qtlatre caractéristiques du cinéma structurel sont: plan fixe

fi-age fixe d., poi,'tt dc vue du spectatiur), effet de clignoternent' tirage en boucle

àa."it-ug" cllécran. Très rarement on trotlvera ces qÛatre caractéristiques

,oss"mbléé e,t.u. seul film et il v a même des fitnrs structurels qui modifient ces

éléments de base.

Quelle est clonc alors la clifférence entre le cinéma lvrique analvsé auParavant

et l i cinérna strttcturel ? Quel rapport ctrtretiennent-i ls ? Le fi lm lvrique aussi

rr:mplace lc rnricli.ttetrr par la preierrce nLcrLle de la caméra On voit ce qLle le

, i. i i ,.," "o't,

lr 's rcactitrns tlc- I.r canréra et le montage sont ré\'élatrices de ses

rdptrnscs a s.r vi\ion. Au <iÉtrLrt.le Mr:s/ics rrf tht Aftarnottn <l'IHammid et Deren se

ir.it, " 'r,

L"t lacitrcs c1u cinenr.r à la première Pe$onne: la Première aPProche et

,,lrit" d" lu ntoi.on "st

filmée drr point de vrre de l'énigmaticlue Protagoniste Mais

immédiatement cette puissante ouverture est temPérée - ou médiatisée - en

rnontrunt le visuge ,le lâ protagonistc clans les séquences successives En créant le

linéma lvriq.,e,5ton Briôage acccpta les limites de cctte séquence d'ouverture

.o-À" ÉutJ po". "n",.to.t,. l l"

iorme En jouant sur tes eJfets d'oPtiques et les

métaphores des mouvelrùrlls ( rrfPolels par la gestuellt' de la caméra' il affirme le

319

LE CINË\IA VISIO\\AIRE

rôle du cinéaste comme première personne 1.1'r. ic1ue. Sans ce haut falt et sonér,olution postérieuro,il serait difficile d'imap;ir.rc,r la piospérité ctr cinéma struchrrel.,

Parmi de noml.reux changements subtils,les quatre techriques énoncées plushaut sont celles les plus é\,identes pour clistinguer le cinéma structurel ducinéma lvrique, dans la tentative dLr cinem.,r struciurel t le ,éparer la ntÉtaphorecinématographique de la conscience de celles de la vision et ctu mouvementcorporel ou au moins de réduire ces c.-rtégories qui sont prédominante5 dans lesfi lms.et la théorie de Brakhage. Dans l,art c1e Brakhage,la perception est unecondition particulière de la vision,plus souvent reprdsentée comme uneinterruption de la persistance rétiniL,nne (p.rr eremple, le* f lrshes blancs despremiers films lvriques ou le final cie Dog Sfnr ,\,4ttn). Dan-ç le cinéma sh,uctûrel,cependanLles stratégies d'aperception viennent au prenlier plan. C,est tc cinémade l'esprit plutôt que de l'ceil. Il peu t, à premièrt, vuel senrblr; Ltue le Lrrecurseùr leplus important du cinéma structurel soi t Brakhage. lv l , Is c,est ine\act . Lcsréalisations de Kubelka et de Breer et .tr,.-rnt errr deç irerniers mâitrc\ du cinémagraphique ont tout autant leur part d,importance àans le clér,elopperrent ducinéma structurel. Celui-ci est en partje Llne rt,nthèsc tlrr cinemi gr.tp)riqrreformaliste et du cinéma lvrique romantiqrré. Mais cette clescnPtron esthrstoriquement incomDlète_

Au milieu des années soixante les apports cles cjnéD1as lvrique et graphiqueavaient été complètement assimilé par l,avant earcle. I ls faiiaient partie cluvocabulaire acquis par le jeune cinéaste qui fréqrrentaii 1es séances cie la Film_Makers' Cinematheque ou de la Canvon Cinem.r Cooperative. C,était dans l,air dutemps. Les nouveaux cinéastes ne répondaient pas à ces formes dialectiquement,parce qu'i ls se situaient dedans,peu inporte Ies fi lns qu,i ls préféraieni et ceuxqu'ils reietaient.

Le principal précurseur du cinérna structurel ne fut ni Brakhage, ni Kubelka,ni Breer Ce fut Anch' 14rarhol. Warhol vint au cinéma d,ar ant,garcle"cl,ur-re manièretout à fait singulière. I l était au somnlet de son succès clani la peintrrre,l,art leplus lucratif en Amérique. Artiste accompli dans un mérliurn, i l entra dans unautre,non pas en amateltr,mais en s.t, investissant corrplètement. I l contmençatout de suite à produire des ceuvres ntajeures. pendant des .1nnées, i l soutint unrythme de production d'une intensité sans fail lcs,créant en peu de temps autantde fi lms majeurs qui auraient demandé une \' ie entière à Ll,autrcs citréastes; puis,après Thc Chenlsco Gi s (1966), son déclin comùe ciné.rste fu t rapide.

Warhol, cléjà clevenu un mvthe, commcnca à s,intéresser au cinéma cl,avantgarde en 1963. Il se familiarisa \. ite atec les derljcrs i i lms cle Brakhage,Markopoulos, Aneer et surtout Jack Smith (lui eut une intluence clirecte sur lrù.Sur un nil 'eau au moins - et c'est le seul niveatr qui nous intéresse ici _ \{rarholretouma son génie pour la parodie et Ia réduction contre le cinéma d,avar1t-sarcieaméricain lui-même. Le premiet f i lm clarrs lcquel i l s,tngagea sérieuserrJnt ctpersonnellement rcprésentait une monumentale ir-rversion rle la traclition oninqu,:au sein du cinéma d'avant-garde. Ce fi ln), Sl.c|, r1,était ni un i i lm cle transe nr unrê\,e mythique, mais six heures d'un homme rlui clort. (ll devait drlrer huit heures,mais quelque chose ne marcha pas.) Il faisait explcrser en même temps le mlthe cle

tt0 j i l

LÊ CLr-EivlA STRUCTUREL

la compression et le mvthe du cinéaste- Des théoricicns comme Brakhage et

Kubelka souterraient le fait que, d.rns un {ilm, Pas une image ne doit être Perue et

que le cinéaste doit pouvoir contrôler toutes les étaPes de Ia création. Warhol fit de

là profusion .les images tournées le factetlr central de tous ses Premiers films et il

affichait son indifft<rence conplète envers la nise en scène,le toumage et l'éclairage

Il appuyait simplement sur le bouton de la caméra puis s'en allait. En bref,Warhol

affichait la plus grande indifférence envers tout l 'héritage romantique drr cinéna

d'avant-earde américain.Voici ce que dit Stephen Kocl.r à ce sujet:

Lejeu de Dudramp consistant à donner unc \ alcur esihéiique ÂLrx obi€ts pàr le serrl fait de les

considérer d'ur regar.l cle eure toujours eÉticac€,encore qtlil ne s'agisse Pas là de cette Poli'mique

de l'anti-ari à laquclle on l'associe trop souYent .

I l est possibl€ i l 'aPt)réhen( ler cet tc exPérience esthét ique Part icul ière co, ] lmc la forme

mét.rphoiique, au nilcau co:rsciellt,cl'une PercePtion d'ensembl!'oùr res choses différentes que

I 'on compaie et que I 'on rel ie rùPrésentent lc soiet le monde..- C'esi I un des procédt<s les plus

importants du modrrnisme qui débouche sur la cré.rtion métaPhoriqre et il est ânti-ronântique

en cc qu' i l s ihre la r ichcsse du mond€'de l 'ar t non Plus dàns l 'Ai l leurs baudÈlair ien, mais dans

un " ic i et mnintenant" bearrcoup plus proche de n(JLrs Enf in,Pr lsque

\\hrhol va Plus Io i r r . I l \ 'eut deYenir lu i -même trn otr jet , i l reut t rès exPl ic i tement s 'abstraire

dlrs act ions et dps interact ions de c€ ûonde humain s i dangereur et 8énérateLrr d 'anxiété,se

fondre dans la plénitudc sereine de la sphère esthéiicluc non fonctionnelle:.

Warhol dorurait une définition " anti-rou1ântique, de son art. Le Pop a ,surtoutcomme il l 'entendait, était un reniement des processus, théories et mythes de

l'Expressionnisme abstr.l i t, école romantique. Les tous premiers i i lms de l^/arhol

montraient d'abord combien les autres fi lms de l 'a!an!8ardc se ressemblaient et

en 1, re5;ardant cle plus près corrrbien i ls étaient ronranti. lues. Cepcndant, que la

position anti-rornilniique puisse ou non échapper à la dialectique du romantisme,

c'est une autre qLrestion à laquelle Koch sen'\ble réPondre Par la négative:

En se tr.insiorùJnt rn obici dc cÉlébrité,\\'arhol suiYit à h leitre h ' résolution de ne Pas être

ému- t raudel . l i r ionnu unc tontnt iv! de se bloi t i r d ins lc Placent.r t rânslucide dLr ro|aumc

esthi t iqre, lo in de là \ ' io lenclr et r les Émotions dc cc mon! lc c le 1 '€sPacc ct dLr temP\ ' 1\ 'Àrhol ,

f inalement,est donc lLr i au.s iun romant ique.

L'origine dc trois des quatre cléfinitions qui caractérisent le cinéma structurel

pcut être rcpérée dans les pretniers tra\aux de \4hrhol l l rendit célèbre le PIanfixe darrs 5/,t? (Dormir,1963) tlui comprend une deni-douzaine de plans pour

un filnr de sir hcrrrcs. It)ur altLrindre cette élon€lation dLr temps,il fit tirer en boucle

l'cnscmble rie Ia ct'rrt.r ine de prises (de deux nlinutes trente chacune) et, à la Éin, f it

geler un ar.rêt sur image de lâ tête du dormeur' Ce procédé de gel cle l ' image

donnc drr gr.rin à l ' image et de la platitude à l ' image comùle si refi lmée sur un

écran- Les fi lns qrl i l réalisa imrnédiatelrent aPrès collent encore Plus fortement

à l 'aspect singuiier et inébranlablc: Ënt (N'langer, 1963), quarante-cinq minutes

d'un homne qui mante un clt.tnrpignon; Err4rirc (196'l),hLrit heures en continu

dc l 'Empire State Bûilding, rlc la Iùrit à l 'aube; Hnrltt l (1965), t l l ] iableau Vi!ant cie

LE CIN E\1.\ \ ' I5IO\\AIRE

soixante-dix minutes avec commentnirc hors champ; B.?llt l l ,t ' l (1965), une scènede lit avec des voi\ hors et dans le ch.rnpr durant soixante-di\ minutes. Justeaprès,i l développa la technique dtr trépied fixe, réconcil iant la stase et lemouvement de caméra. Dans Poo/ Litfld Rich Girl : Pnrty ScLltk, ." (pau\.re Fetite filleriche: la fête 1965), Htdy (7966\ eTTht Clrcniscn Girls (1966), il rrtilise des mouYemenrsde canréra, sr-rrtout le zoom, sur l'axe d'un trépiecl fixe s.rns jamais arréter ta caméraavant la fin de la bobine. Cependant, \\hrhol en tant qu'.lrt istr ' pop est à l 'opposé,en esprit, des cinéastes structurels. S.r canréra fi\e était d'aborcl outrageuse.puis plustard ironique, jusqu'à ce que le contenrr de sc's iilms de\'ienne si contraignant qu,ilI'obligea à abandonner la caméra fixe lrçru1u11r-' 5611p cL'montage calnéra. Dans letravail de Michael Snou' et Ernie Geht la canréra est f i\e clans la contcmplationmvstique d'une portion d'espace. D'un point de \ 'ue spirituel,la d15r.rl lce qutsépare ces pôles ne peut être rétablie.

Dans son anah,se minutieuse des pr.emiers films de tr\,arhol, Kocl-r les enr is.tseavec le même tvpe d'intensité et de but clue les cinéastes sttucturels donnent àleur trar.ail. l l voit en eux la base d'un cinénta d'aperceDtion. À la fin d,H,?ir.. l l(1963), oir le con-boy sur sa chaise pi\ otante, t a rfa itcnren t imrnobile, le rcsardsemblant pénétrc'r dans la caméra, est pris soudain cl 'urre sorte de quinte de riremuette juste avant le passage au lr]altc tot.rl de l 'écrar-r,i l \ 'oit "le dramecinématographique du regard atteignùnt sa forù.re rrlt inre et réf,léchie".

C'est l ' instant d 'unÈ lente repdse cle ' :ùr \c ience ct de ln dl tcoLrrer ie de la plus anodine ci tx

comédies comédie qui n 'er t pas à prendre nU \en! d un rr l rq l r rSÈ i r t r r r iqLre. n]r i . qui procèdetoutes proportions 8.rrdées, d Lrne sorte de cndcùce à 1a I'yosÈiérl\,l.r fin d Lrn slrftilè.re. C,cst encela que nous nous rendons comptc que,coùnrre tous lei autres prcmiers filnrs dc 1\'.1rhol, Hrrtlirlse raPport€ à lâ nÀhre hYpDot ic loe'du res.rrLl e i nu pou\ oir de l 'à. i i : t€ rrrr ce rc. tnRl, .

Koch entrevoit que derrière l 'aspect é\' idelnment .tgressif et ironicpe despremiers films de lvarhol et peut-être à cause de cela - se cache une ontologieconsciente de l 'expérience visuelle. Ce que Ie crit ique ne dit pas esttpe ie<mécanismes d'aperception sont latents ou passiis dans 1e tr.r\ail cle \!arhol. pourles cinéastes qui ont vu pour la prenière fois ces fi lnrs au nril ieu des annéessoixante (ceux qui n'en ont pas eu peul ), ces Inécanismes latents ont dir sLlg,térerd'autres prolongements, conscients et délibérés: \4hr.hol leur a servi cl, inspirationen ou!rant un territoire ontologique encote vicrse,un cinénra actir.entent engagédans la production de métaphores poltr l'expérience visueJle ou plutôt perceptile.

Ainsi le cinéma structurel n'est pas sculentent Lrne e\croiss.lnce du cinémalvdque. C'est une tentative pour répLndre à l'attatlue de \\i]l.hol en conr, ertrssantses tactiques en tropes de la réponse. Au palntarès d€.s str.rtégies spatiales ducinéma structurel doit être aiouté lc catleau tenporel cle \\arhol la durée. Il futle premier cinéaste à tenter de faire des fi lms qui aûrajent clépassé le stacie init ialde perception du spectateur. À force unicluement tl'attente,le sÉectateur pelsé\,érantaltèrera sa perception devant l'unifor.ntite de I iù.rgc ctncnrat,grapluqLrè. BrakhageaYait fait un très long hlrn,Thc Ai t of ltirirr]l, doni il s'excusait: pour dire ce qdil .ryaità dire, proclamait-i l , le f i lm devait durer quatre her.rres et p.rs une minute de plus.Ken Jacobs avait été plus audacierlx ou Plus honnête ell ( lécri lant 1,erpérience

LE CINÉ\1A S'TRLCTUREL

sans fin et en lrelpétuelle désintégration cle 1.1 Prcjection de Stnr SPiùgltLl to Drofh'

\ lais cela aussi de\ ait être tlne exPe3rience orchestrée de toutes Pièces du début

à la fin.\{arhol brisa le t.rbou théorique le plus austère en faisant des films qui lançaient

unpari à la câPacité clu sPectateur cle suPPorter le vide ou l 'u niformité l l insist.rit

même pour cllte ch'1que fi lnl si lellcieux soit Projeté à 16 images par seconde L'ien

qu'i l aiiétéfi lméà 2.1. La durée de ses fi lms était celle d'un lent déplacement Le

grand pari,ens!l ite,du cinéma structurel consistera à orchestrer cette duréej

comment permettre cette attention baladcuse qtti c1éclenche la cotrsciellce

ontologique en regardani les fi lms de l\tarhol et er1 mêlre tenPs fixer trn blrt à

cette Prise de consciellceTous les filn-rs strrrcturels ne sont pas à la hauteur de leurs défis. Les cinéastes qui

l sont aûivés et dont les débuts se situent dans d'autres formes cinématograPhi{lue\

ônt tendance à utilisel la canléra [ixc,lc tirage en borrcle, L'effet de clignotenrent et

le refi lmage pour clorrner de nortvelles dimensions artx procédés Préalâblcmerltétablis dans leurs piemiels fi lms.

Dans quelle mesure, aPproxirnati|ement au l]1êlne nlc)mcnt, des cinéastes comnle

Stan Brakhage, Gregon' N'larkoPoulos, Brucc llaillie ct Kcn Jacobs se sont errS'rges

dans la même direction,i l est di{t ici le de lc cléterminer tr!ec précision La soudiine

remise en questiou par lVarhol de l 'esthétiqrre du cinéma d'avant-tarcle v est

certaincment pour qtrelclue chose et i l en va de ménTe pour des cirléastes conrrne

l\l ichacl Snorr', Paul Sharits, George Landol' et Holl is Frampton dont le trar ail

app.rrtir 'nt erl er,rnde partie au tlolnairle rlu cinénla stntcturel.'

I l ichacl Snou,lc. doven des cinéastes strtlcturcls, t lt i l ise dans !\ 'di 'd' ' l l i /?t(Longuour cl 'ontlc) la tension cle l ' image fixe et la souplesse du trépied l l s agit en

fait cl'un zoonr rlc rltr.rrante-cinq minutes, avec Lltlel(lues arrêts occasionnels' rtlalisé

en phrsieurs tcnrPs sibien que le jour et la ntl it. l l tcrnent dans le mouvement'

Ùne polarité persistant(] c1ùrir€- sa forme au filnr' Ttttrt du long,la caméra exPlore

une pièce, un gr.1r1d atelict sorie clt' chamP sPatial, suiet aux é\'énements arbitraires

du monde ertérieur tant que lt'zt)om Permet de voir les fetêtres et Par conséc]uent

la rue. La pièce se resserrc Progrrssivement dans l 'espact' (pendant le jour,la nuit,

f i lmés sur cli i férentes sortes cle pell iculcs, avec dcs fi l tres, et méme Parfoi\ err

négatif) qrrand Ie zoom s'aPProche dù mur du fond et cle l ' image finale épinglée

au mur - Llne photoE;raphie de rtrgues. C'est l 'histoire cl 'urr espace cltri dirrir lue

dnns sa purc prrtentialité. La Pénétratioll clc cet esPace,ct imPlicitement du cinéma,

cl t f r \ t (nt i ( l l , r r r ( r r l t tn, t r i r r t r t , . lLt c inLlnl l * l lL lchlrc l .

do, t . r ' t , , " noie Pour 1.1 Quatr iè lnc CoûrPét i t ion Internat ionale elu Fi ln l

Expér imental , o i r i l reçut le Prcnl ier Pr ix, Snor! décr i t le i i ln :

l l i r . rLr , .q l r t n ét i f i l t lé en Lrne selnainc err déccmbre 1966,PrÉcédé d'uno annéc Llc not€s

réf ler ions t i t Srrrnrrrrel lenrents. l l . r été monié et l ' fo icté Pour l . r Prc i i l ro io is en nlai 196;- Ie

r 'ouLr is fa i ru ûnc sotrnle de morr s\ ' \ tème ner!rLr\ ' de nles oPinion( rel iSictrscs Plutôt \ agues

et d(' mcq idées cithéiictues. \lt)n inientiorl (iLlit d'élaboret un nlonunrcni icm+)rcl Pour cÉlébrer

l I t c.rutÉ et ld l r is tc.sc de léq i ! . r lcncc, i t P(rns.r is r ' \snv€r de Lr i re unein()ncint ion de Pure\ t làceet tcmpr f i lmique, un équi l ibre d ' - i l lLr t ion - ct de ' f . r i t " , lckrutccntré\ur l ' r ! iç ion L ' ( 'ç t ) ' rc l ]

commenceà l ' (Èi l L l ! ' la c ' l l l rér ' r (du sPr( tùt t \ r r ) L 'st 'cùrstnr i t t t r r le\ idc ' ' f 'u iss ' r r l i l ' r ' lnctdin\ l '0.r . rn ( l ' .sPr i t ) .

LE CINE\IA VISIO\\A1RÊ

. Le f i lm estun zoon1 in interrompu de qlrarante-cinq nr inRtcs quj passE . l ,un plan Lrrge à un

plan resserré, final. ll a été filmé a*ec une canléra fire elans rrn .rteiier de \.intt ci;(.] mètres,d,unbout à!n autre,une rangée de fenêtres et 1.r rue. Cela, l€ l ieu et l , . rct ion qui s,v deroulent sontéquivalents sur le plan cosmique. Latelicr (ct lL, zoom) sont irlte.ronlprrs p.rr.luatre e|enemmtshumains,dont une mort. Dans c€s .r.âsions,le sorl est lvnchronc, mrisiqrrt, et àialogues, et s unità un son électronique, rr ne onde sinumid.rle qui,en quarânte minutes,p.rsse cle sa note la pll.ls basse(50 hertz pâr seconde) à celte la plus haute (12 000lrertz par secorrcle). C,est un glissanclo complelalors que le film est un cÉscendo et un spe,ct.e désagrété clui tente cle s€ ser(ir des dons deprophétie et de mémoire qLte seuls Ie cinémù et ln nrrsique peurent nous offrir..

Snow simplifie l'ambiguité essentielle du film en décrivant l,un des é\,énementscomme la mort de quelqu'un. L ordre des actions est progrcssif et en corrélation:une femme supervise le déplacement d'une armoire; pius iircl, elle revient avec uneautre femme; elles écoutent la radio (quelques plrr.rsei cle Shrarvbern, Fielcls,,uneversion pop de scepticisme ontologique) sans parler. Nou< rommes aiors au débutdu fi lm et I 'action ne semble mener nulle p,rri; un peu plu\ tard, un honme b seses lun€ttes.(entendu hors champ) en ouvrant uire porte qu,on ne voit pas etmonte l'escalier (c'est ce que nous entendons); il entrrl dans i;atelier et tomùe surle sol, mais l 'objectif de la caméra a déjà parcouru la moitié de la pièce et on nepeut que l 'apercevoir; le zoom passe au,dessus de lui. plus tarcl dans le fi lm,unefemme revient, se dirige vers Ie téléphone, qui se trou\.e près du mur du fond,bien en r.r:e et dans un moment drâmatique qui ramène Jes ér,énements précédentsdu fi lm à un novau narratif, appelle un homnre, . Richard ,, pour lui dire qu,i l ya un mort dans la pièce. Elle précise que l 'honme n,est pas saoul, mais mort,etdit qrlelle l 'attend cn bas. Elle s'en va.

Le fi lm se serait alors terminé qu'i l aurait répondu, ar.ec l, image de mort,àl 'énergie et à l 'attente potentielle construite toirt au long du fi lni Mais SnorvPréfère approfondir. Un écho visuel \c pré\ente, une itn.rge fantôme en noir etblanc surimpressionnée à des images internlittentes de là femme qu1 entre, seretoume vers le corps, téléphone et s'etr I'a. puis le zoom continue, pend,rnt que leson se fait de plusen plus perçant,jusqu'à l ' inrage statique de la mer épinglée aumur, métaphore à la puissance^ de torrte I 'expérience <i,i l lusion spatiale.

Les é\,énements de Wr.'?lcrgftf appar.ri5seni cl abord comjne cles actiorrs discrètesou des performances irréductibles. l\.fais le coup de téléphone essenticl établit unpont entre les événements clos du fi lm et l,r narratiori. D:rns itr/nt,ry'crtr, lrf,snorvexpose ses matériaux cinématographiques (encore plus dans son film 1--osterieuçdont le titre est <- >") comme des états pass.rgers du tralail. Les mirclues descollures,les éclats de lumière,les filtrt's,les différèntes sortes de pelliculcs utiliséeset les objets mis en ét' idence dans la pièce (la chaise jarrne contie le mur du fond,par exemple) créent un calcul c{'états phYsiques et mentaux, distincts desé\.énements humains, qui font autant partie dtr corps drr f i lm que les actronsdécrites au-dessus. Des choses arrivent dans l.r pièce de hlrir. ierrçlrt et cles chosesarrivent au fi lm cle la pièce. La convergence cles deux et leuimétantorphoscultérieure créent pour le spectateur un changement continrr dans I,expérience deI' i l lusion et de l 'anti-i l lusion cinématographiclue.

ArLnefte Michelson voit daru; ce film trne nrétapl-rore de Ia conscience elle-même.Son commentaire convaincant témoigne de son lien a\.ec la phénoménotogte:

Il

li.{

LE CI\ÉN1A STRUCTUREL

\ous avançons d' in.ert i tude en incert i tude, atr fur et à nlesure que Ia càméra resserr€ son

champ d'act ion, augmentant Puis dissiPant l . r iension clui résÙlte de notre PerPlcxi té sur son

but ui t ime, décr i ! ant , à t ravers Ia Purcté unique de son moulenlent Ient et unique, la not ion

d'"horizon,, caractérisiiclùe de tout Processus subjectif qui est fond.lmentalctn€nt un trait cle

l ' intùnt jonnat i té. Ce mou\ 'enrent cont inu en à\ . r nt . a!ec sPs sLrr impr! \s ions ses É! 'énements

passant de derr ièrc la caméra dans le chanp,Puis rePassant d€rr ière el le ' i l lustr ' la remaque

ide Husser l l selon hquel l€ "à chaque percePt ion aPPart jcnt touiours r tn halo de PerccPt ionspassées qu' i l faut conceloir comme une Potent ia l i té de sou\ enirs susc€Pt ib les d 'être rapPelés,

et , ; cha. lue souvenir lu i 'méme aPP.rr t ient , en tnnt que " halo " , l ' intent ionnal i té mt l i ' l iÂte ct

cont inue de souçcnirs Possi t tcs (réâl i \âbles Par moi act i feûent) , sou{en;rs qui s 'é 'helonncnt

iusqdà ma percept ion âctuel le- . Au tur et à mesurc que la càméra cor l t inue son mouv€ment

en avant à un r \ thnlc constnnt, construisant unc tcnsion qui s 'atrroi t en raisoù inverse c1e la

r€str ict ion du chârrLr v isuel ,nous rcconr l a i ssons, a \ 'ec une cL'r ta in€ sLrrPr lsc, ct 's ' hortzons"

comme déf in issant les coniours de la nàrrai ion, de la forne narrat ive ar l imé€ de temPoral i té

qui s€ dépl ie, tr.lns tornlant 1.1 connâiss.rnce en ré\élation .

La très erande instabilité du mouvement en a!ant et son infime tressautement,

néanmoini perceptible, confirme l'analvse de Michelson Lune des tactiques les

plus intéressanies riti)isées par Snow est 1a surimpression, en Position légèrement

àr,ancée du zoom,du prochain plan sur celui tlue 1'on est en train de voir,la durée

de cette surimpression offrant une image statique du Processus temPorel. Son

emploi le plus efficace se sittre vers la fin du fi lm cluand, après un lorrg plan vide,

1a photogiapirie cles vagues, encadrée dans le mur oir elle est épinglée, partage

so;dain -so; espace écranique avec lrne vue agrar'\die de la photographie. On

anticipe,et quarlLi le plan précédent disparaît,on fait l 'exPédence de l ' i l lùsion de

profondeur de la l igne de iuite se prolongea:rt ir 'rsr1u'à la met statique.Le cinéma struchrrel et lA/nl'clt'trgi/l en serait la suprême démonstlation formelle -

enrretient le mênre rapPort avec les premières fornles du cinéma d'avant-garde

que le s.ymbolisme aYec son origine,le romantisme. La rhétorique de l ' insPiration

a cédé la place arr langage esthétique; le héros Prométhéen s'écroule face à la prise

de conscience de l'ego dans laquelle sa rePrésentation même devient Problématique;Ia quête d'une innocence réclemptrice devierrt rechcrche d'une Pureté des images

et d'une immobilisation du tenPs. Tout ceci \'.rut autant Pour le cinéma structurel

ouc pour le svmbolisme.'PourSnc,\ ',fair.unfi lmconsisteà.formulerdescllrestiollsausujetducil léma".

Dans un entretien, i l déclare:

le ponsais qrrL' pflrt-atrc lts qtrcshons n'a! aient Pa: été fornrulées clrirement en ce (lu i cÙrlceme

le cinéma cte L1 nrênlc façon ct c't'si Pr('tenticlL\ dc dire ceLa - qtre PoLtr Céz.rnne, P'1r etemPlc,

établ issant un équi l ibre enire l ; l Pâte coloréc ( lu ' i l ut i l isai t ,et c 'est ce que volrs Io\ 'è7 sr \ îÙ\ le

regarclez dans ce scns,et les formes que |ous |ovez clans l'esP.rce illusoire.. l'ess'r\'àis de fair€

quelque chose dL' trèt pLrr tt clui iraite (le ce Senre de réalitét aLr cinéma .

Et dans uue lcttre suivant le mômc entretien, i l ajoutait:

l 'a i ! r .1r lÉ c l ( 'Cér.rnnc cl . rns Lrn ct)ûnxl l tn i rc nu sujet de l 'équi l ibre entru i l lL ls ion et ré ' l i té

r tans I 'ar t de l . pcinture- Bi€n que ( lL ' nonlbreu\ âLLtres Peintres.r i tnt t ( )u\ 'É IeLlr( ProPr€sdut ions,mâ8ni ique5,àce"Problènrr . jePcns€qu' i l€stk 'p lLrstrandetqt l i lestunert3férencepàrcL'quc sorr tra\ àjl cst fi!}]r.1tii. l-'ongnsc ent comPlext'dc sn PcrcePti()n Lle ln ré.rl iti' c\téneu re,

LE CINÉ\ I , \ \ ' ISIO\\AIIIE

sâ création .l'un trar nil qui à lâ fois ,'1p,.\.,r11 et fji quclqlr€ chor€. L]ùr. sL.lr équi]itrre cntre espritet motif et son respoct polrr tortr's sortes dr l1itc.ru\,sr)nt e\cnrFl.tifts poLrr moi. \lon tra\'àilest tiijuratif, même s'il ria pas grancl chosc dc cérânne\(lue.1\iirtùrS/'l rt < > sont plus prochL\de VeerNer (ie l'esDèrc) .

La confrontat ion directe de Sno\\ ' i1\ 'ec l 'elrr lurance estl lét ique s'exprime dansOnc Stcttnd it Motturrl (1969)oir une trentaine cle photogr:.rphies cle jarclins couvertscle neige restent sur l'écran pendant de très Jorrg;ttes périodes. La fonne du film cstun crescendo-diminuendo - mênr( ' si le prerr icr plan est très lon[t ]e r letrxiènreencore plus long et ainsi de suite jusqrlau nrilieu du film et à partir de là les duréescommencent à raccourcir.

OttL'Secottd ir l Moll f , ' . /r / est l 'un cles t luelqrres f i ]ms structrrrels qui eInpiètentsur le donraine du cirréma graphiclue. On perrt dire que l \r i fc[ ' rr ] / i t jette un pontentre les pôles subjecti i et graphiqrle en zocrnrant t lans 1a profol ldeur de la piècejusqu'à la plat i tr .rde de 1a photo. Daûs C)rrr ' SL'cr ' t t , l i r , \10' i /r 'd|, Sno\\ ' inYerse lespréoccupations rvthmiclues de KuL-elka ou de Bleer en orgarrisant son f i l rr autourde différences temporelles à peine percePtiLrles parcc c}re l'atterrtion ctr spectateurs égirre el chànge drrranl le< longt rr ' - | r ' i -es

Dans < > (1969) et La R(tio,r ccrt.nl (1971) le cinéaste ttar aille sur la métaphoredu déplacement de caméra comme inri tat ion cle Lr conscience. Le sujet cL'ntral de< > est la vitesse. La caméra est en nrouYenrent pe.rpétue1, clc gauche à droitc etde droite à gauche,p.assc devant un colt.rirr nomL'rc c1'"ér énelrlents" (lui delicnnentdes métaphores e'r't personne pour les ch.rngements droite g.rrrche. Chaqrrc activitéa sa propre unité nthmiclue, renferrrée sur ellc-méne et reliét' à 1'activité suivanteseulement par le fait qu'ellcs sc procluisr'nt dans le mêrre espace. EIles fournissentune échelle vivante porrr les vitesses tlu nlouleurent de calnéla et introduisent desiormes sol ides d.rrrs le champ d'énergie clue lc lranoramiclue t ire de l 'espace.

I- autre n'thme de < > dépend cle la litesse à lacluelle la caméra balale l'espacede droite à gauche ou de haut en bas. Parei l lenlent, le r lLame non t léguisé clel lntelcnght se produit dans un espace clos, l 'avancée dr.r zoorn. Le contenuspécif ique des deu\ f i lnls est I 'esp.ice ! icle ou cle's pièces \ ' i t ie. C'est la natule et lastructure des é\ 'énenrents dans Ies pi i .ces qui cl i f fc3rencient les deux f i lnrs.

Darrs la lettre déjà citée, Snou' c1écrit < > .1f il eitait .rlof s en traill de terminer:

Comrne rrn cléplacenrent des problénit iqLres dc I\ rrrL)r. t /r i , <-> s . l t i ique dar.rnt ige ,rumou\'eûent qu'à Ia lul11ière. ll v aura moinç de p.rmllo\r et d'une certàin(' f.çon Dloirrs de dr.rmeque tlans les autres iilrns. C'est plus - c(rncrÈt - ct phrs objectii. < > r'st sculptrual. C'c'i dussiunc sorte de drsmonstrdi;on où de leçon \Lrr h f'erccl'tion r't sur les conccpts L{e l(ri et !ibrdreet co mcnt lcs transcender C'est dans ./ de Lr clescripliorl d'unc sùlle ele classe. Ie È'ensc'qutnpcut lc roir comm€ I.r présenLrt ion d'unÈ rL' lat ion di i iércni(r,si pLr\siL. lo nouvcl lc, i lu sPectateurà l'imaiic. Mes films sont (pour moi) des uss.rir porrr prof'oscr à l *prit un ccrt.rirl Éht ou L.crhinsétats cle conscicn(.È. \îs s(Jlrs c!'t angle, !î sûrt d* dr0gLre.. < => scr a n1(,ins dÈs.ripfii et (rlljriqueque lcs autres. \ trr.rs rr 'ûtes pds cledan\. i l n 'e-t pns cn ! ous, \ ous ates dfvant lui < > ortsculpt lrrÀl pdrce que I.r luûrière qui l ' i lhrnrir lr ' \ ient de l 'e\ lL.r ieLrr nutolrr ciLr tr lur (sol icle) quiest rrarlscendé / spiritu,rlis( p.1r le tenlpsrrir)u\ cnleni nld \ que dans 1\;:i r /() r,,,'/r I rlle est d.rv.rntirgetransccndée D.rr lt tpnlrrslurnièr!' .

Dans le f i lm,la carnéra panoramirlue cle gauche à droite à l 'extérieur t1'une sal lede classe pendant qu'un emplo\ 'é la t lar-erse, en lral.r lant, ele clroitc à g.ruche. Le

LE CINÉ\'1A STITUCTUREL

reste du fi lm, d'utre durée totale' de cincluante minutes, se situe à l ' iutérierrr de lapièce. Pendant les trente-cinq Prenières minutes du fi lm,la caméra balavc sans

arrêt des é\'érements ou . opérations ", pou r rePtendre le vocalrulaire c1e la danse

contemporaine, séparés en général les uns des a(rtres Paf des balavages de la piècelide: une femrne lit près de la felrêtre,une classe s'installe dans laquelle aPP.lraitle t itre symbole' inscrit au tableau noir. un couple joue att ballon,l 'emplové balayele sol,deux lronmes luttent en s'amusant, quelqu'un nettoie rù carreau à l'extérieur

et un policier jette un <æil à f irrtérieur. La vitessc de Ia camét a 1'arie à chacluc

é\'énement, Par f()is pour souligner et parfois Pour mas(luer le rvthme et l 'a\e de

l'activité; en outre,des acteurs entrent soit Par la Porte ou aPParaissent et

dispâraisselrt soudain en ionction du motttage.Vers le milieu clu fi lm,les ér'énements cessent. La c.lméra accélère, broù i l lant

les objets d.rns l.r pièce, jusclu'à ce qûe la Prcforldeur spatiale qui d'une façon

significative était asvmétrique la caméra se trouvant Plrrs Près d'uIr rnur que de

l'autre - s'aPlatisse t 'n deur dimeûsions. Au Point maximal de f itesse,la direction

change et atlopie la lerticale Ptl is Progressivement ralentit i ttsclu'à s'ârrêter' Le

ii lm semble ternriné; le gérrérique cle fir l est Projeté. Puis,la substance du fi lm est

récapitulée, en coda.Lc panoramirlue incessant de la caméra crée un rlthme aPparcnt en corlf l i t

aYr'c la temPorali ié proprre à chacun des ér'énenents Dans la coda dtl f i l t l l .récapitulation de tous les événements ciu fi lm sans en resPecter l 'ordrc et en

surimpression nrulti lT le,les i l lrrsions cl ' ir-rtégrité temPorelle se dissoh ent en une

image de contrepoint rvthirl ique atemporel qualld toutes les directions et toutesles parties clrr f i lrr apparaisseut simultanément.

Dans la leftre citée, Snorr' écfi t : "Si I^/d.r'/r/lsrl est ln nlétaPh1'sitlue, .rlors Eycdl!/ Edr Co,rF,rr/ cst la pl.ri losophie et < > la phvsitlut'." Plus loin i l explit lue ceqn'i l veut dire p,rl là. Pour tui,Ncir' ) 'orl EtF ntul Etr Ctttttrtt l (Contrôle aùdio-\ ' isuelde Neu York) an.rlr 'se ries mocles d'action,l.r philosophie étant un ensemble de

disciplines cltri lont de l 'éthicltre à la logiqtrc. La nrétaPhvsicltre, qui en Pst exclue

et qui rcste potlr Snorv le lieu cle la dimension religieuse. aperceptive et Paradoxale,relèr'e du dom.rine sPécifique de l4hlcl rrt/rf. La bril lante anah se du fi lm parMichelson rre Prencl pas en compte son aura tr anscenclanta le, qtl i vient,je pense,de ln tensi(nr enh e l ' intentionnalitrr du motllem€'nt en â\'ant et la fixité sttr-hrtm.riue

et invisiLrlc clu ir 'épied qrri 1ui sert de pivol. Cctte'ter.rsion rej.ri l l i t et s' intensifie àson tolrr dùlls l '()pposition correspondante eùtrc les sons nattrrels et le crescendoélcctroniqr-re. Et cettc teûsio11 t1où\'e son apogée dalls l ' incluiétant plongeon final

du mur plat à I ' i l lusion de Profondeur dù Pavsage marirl immobile. Snorr'écritque,pour qne l 'on puisse \ 'oir la rue derrière les fenêtres,i l a Placé sa caméra et letrépied sur uir piédestal et a ainsi " découvert que le grand angle a une qualitépar-de.-rr . toLr i l \ r i ( lue et d i \ i l ] ( .

Le balalage presgue mécaniqLrc de < -> (i l i i t cles essais avec l lne machinecapable dc iaire glisser la canrérn d'avant en arrière), fouclé sur lc nrodèlc- dt' Iaperception humaiue et se rl i 'Pltrçant selon les lois de la phvsique, nie ainsi .rrrr( '\ 'éneùrent\ humains clu'i l [ 'alale la cohésiotr interne de leur récit. A lcur toutles i'r'énenrents hunlains rfiusrnt à la cauréra le privilc\ge d'une Pcrspectile fictive

LE CINÉ\I . \ \ ' ISIO\NA]RE

ou transcendantale. Ainsi,le cinéâste compare le mrrl i iple à 1a phr,sique et peutclir€, "Vous n'êtes pas dedans, il n'est pas en vous, vous êtcs devant lui.. CependanLceci n'exclut pas la possibilité d'un c1ér,eloppement illterne au sein même drr film.Dans un texte sur I t Rigion ccntralt,, i l répète et expose ses analogies:

J'aidi tavant,etpeufêtrejepeuxme(i ter- \ r :a,) i , r tErrr :nrrdt , r rCtrr l r t ' le5t laphi lo\ophie,tlhi,.ic,r.llrt Ia métaph] si.luc €t <-> lâ phrsjllue. " Lc dcnicr signifie 1à con\ersion dr Lr matiirEen énergie. E=mi. ld Rr'.g,o,r continue dans cette roie ct derient simuli.rnémer1t micrlr et mâcro,cosmico-planétaire.russi b ien qu'atomi. lue. Là total i té est r ta l i \ée en terrnes cle crc les plutôtqu'en a€t ionet rénct ion. C'cstsI | / çâ"-

Je comprends l 'analogie de. la contersion de la n-t . l t ière en énergie" comme

une description de l 'apogée de < > (luand l ' .rccélération de la caméra permetla transition de l'horizontale à la verticale et finalement la sirruJtanéité des espaceset des événements dans les surimpressjons de la coda.

Ln Régiotr cerrfr-nlc réconcilie les métaphorcs structulelles de Wda'elclqlf et de<--->. La région cenirale du titre est un plateau presque aride,sans aûcun signe devie,et cette régon est également le ciel au-dessus du platearr, que la caméra balaveà 360 degré91'explorant en spirales concentriques olr cxce,ttri(lues,en pan(rrnmiqueszigzagants, en gros plans flous sur le sol près du pied et en plans télescopiquessur I 'horizon lointain; nlais c'est aussi l ' in., ' isiblc espact' sphédque que la caméra,malgré son ingénieux pied hémisphérique qui peut parcoLrrir mécanicluementplus de mouvements que l 'astucieuse caméra tenue à la main par le cinéaste, nepeut pas voir puisque c'est elle-même. L espace lisible,le ciel et Ia terre qui s'étenddu pied de caméra (l. lont l 'ombre est ', ' i5i l.r le) jusclu'à l 'horizon, devient lacirconférence intérieure d'une sphi're dont lc centre est l 'autre réeion centrale: lacaméra et i 'espace de son <soi>. Rien de ce qui est f i lnré par la caméra ne trahitsa présence, même indirectemeût; cependatlt, le f i lm en son entier décritmétaphoriquement la séparation rcrmirnticlùe de la nature; la totalité cle sesmouvements baroclues cherche en r.ain une image dans la région centrale ,, isiblequi en i l luminerait l ' invjsible.

Curieusement, ce film tout à fait unictue résulne la ouête de deux cinéastes trèsdifférents,stan Brakhage et Jordan Bel:on. L'imagcrie et ie dvnamisnre de lfRdgior centmlr ren! oie à AttticipntioÙ L1f ir. Niq/ri dâns lccluel 1'ombre de Brakhageelle-même der.ient l 'ombre du pied cie caméra. Son cxpioration à travcrs lemouvement de canléra de la prise de conscience de l'enfant s'ér'eillant trouve soncorollaire clans la spiralc d'ouverture du fi lrn cle Snorv quand l 'espace tlui seral'objet d'étude du spectateur dans les trois heurr.s suir.antes se ciér'oileprogressivement, l ' image passant du sol trùs Lrroche, f lou, à l 'horizon. L'rmageriecoincide dans les visions des "jeux cle lune " ; le ntouvenent de caméra, clans lesdeux fi lms, fait d.rnser la lune dans le ciel nocturne. Brakhage ternti lte par uneaube vaincue; Snor| incorpore une nrriu': t1agnifique au milieu de son fi lm. C'està plusieurs points de vue l 'une des plus spectaculaires des seize parties quecomporte le fi lm, dont les durées varie'nt de trois à trente minutes et qui sontséparées par une croix jaune bril lant sur fonrl noir. D.rns la scène oir le jour selèr'e,la lumière qtri filtre lentement dclaire très progressi\ ement le pavsae€' et notrs

LE CINÉTIA STRUCTUREL

permet en même temps de percevoir les mouvements de caméra. La camérainlestigatrice de Brakhage, à l'inverse de Sno\\i est complètement humanisée. Lesirrégularités cle ses mouvements sont les indices de la présence humaine derrièreelle. La vision désincarnée du mouvement de Ld Rigiol ce,rf,'nlc rappelle celle deSottntlhi ou de Wor[?. La question crucia)e qui sépare le point de vue désinc.rrnéde Snow de celui de Belson est,bien entendu, f i l lusionnisme. Les fi lms de Snowcomportent toùiours une connaissance âperceptive des matériaux et des procédéscinématographiques. Dans son article pour Lr? RrgioI cdll,TIc, il éclit:

La plupart de mcs films accëpte la situation théâtrale trÀditionnelle. Le plrblic est ici,l'écranlà bas. Ce qui rend possible la concentration et la contemplation. Nous sonrnes assis en face eton embrasse... Le rectangle seul peut contenir pleirl de choses. Dans La Rasio,r,lc cadre est trèsimportant car f image ne cesse de couler à t(a\'ers. Le cadle est une paupière. Cela pelrt semblcrtr iste que pour €xister une forme doive avoir des bornes, des l imi tes, un décor et un l ieu. Lecontenu du rectângle peut être précisément cela. Dans Ln Rryiù, .e,'|rnlp le cactre souligne lacontinuité cosnique magnifique,nlais tragi(lue: cela continue sans nous".

l . 'art de Belsorr i lous fait toujours passer de l ' immédiateté des matériauxl'écran rectangulaire, le trépied,la mise au point de l 'objectif - à une participationillusoire, alors que le transcendantalisme de Sno$' trouve toujours sa raison d'êtredans un dialogue entre l ' i l lusion et son dévoilement.

L'apogée rnétaphysiqÛe de Wnz,elcng,lrt se situe au moment où l'on pénètre dansla surface photographique; le point " phvsique' culminant de <---> est laconversion de I'espace en pur mouvement- Une conversion similairc a lieu dansla demière partie de La Rtgîùlcc h'ile-La caméra tounre si vite que le déplacementn'est plus du tout [l comû1e mouvcmer]t de caméra et lc pavsage lui-même sembles'envoler. Comnlc la vitesse s'accélère,la terre filmée devient une balle tournantejusqu'à ce qûe la dernière image du fi lm définissc 1a région centrale comme uneplanète dans 1'espace, é\'oquant la même métaphorc' pour la conscience que dansl DluDart des fi lns de Belson.

; . . ,Les films cle Paul ShariG sont depoun'us d'images mYstiques ou cosmologiquetmâis i ls aspireût à déclencher des changements de conscience pour leursspectateurs:r. Eclivant à propos de son fi lm à clignotement 1c plus fameux,\:O:T:H:l:N:c (Rier1, 1968), i l emprunte le langage du bouddhism.' t ibétain I

Lc film se dÉL'an.rrser.r dc trrLrtc rhLrle (ioutes les définitions cour,rntes de .quelque chosc")qr i prétendrai l ! i , \Lrb5t i tu€r à sâ prnpre rénl i té, touie chose qui cmpôcherai t Ic spect. l teùr de

t.enitrcr dc nor! ruLrx ét.rts de conscicnce. I-e sujet clL! tra\'âil, si l'on peui appe!cr cel un sujet, estdr'se confronter'au non intelligible,à l'impossitrll:,dlùre facpn solidemeni et préciément struchùee.Le tilm ne - signiiipra " pas qrr/trc chose - il " sisnifiera -,d'une n'lânière très concrète, riir.

L0 filnl met l .iccent et se corlcentre sur deu\ images et leur dé\cloppr.meni h.rutement linéairerni ic i l logique ct / ou in iervert i . L im.rge pr incip. i le est cel le d 'unc ampoul€ qui d 'abord re v idede n's râ\ons lumincu\; sur l 'anlpLrulL 'qui sc ' \ , ide: l 'âmpolr le. tcr ient noire et , paraclo\ . lcment,échire l '€space autoLrr d '€ l le. L dDrpoulo Émct un éclat c le lumièrc noire ct comnrence à tondrc ià la f in du f i ln l ' . rmpoule est une f laquc noire en t as t le l 'écran. Lautre image (notez que lefilln cst composé, à k)us hs nivc.u\, (lo duâlités) esi ccllc d'Lrne chaise,srrr fond grillager, tonrbantcn arrière sur l('sol (cn init,ell. i()nrll| (ontre et aftime lt'bLrrel du cadre); cctte sé.tu€nce sun ientau mi l icu du ai l ! r1, d i r 1.1 \ . . t i , , r1 . th i r 1e " de \ :or ' r r t | : r : \ : ( , . L ' t 'nsemble elu f i lm esi en rvthmes

3i')

LE CI\E\I , \ \ ' ISIO\NA]RE

énergie-couleur hâutcmpnt vibratoires; lcs changenrents de couleurs sont en partie fondés surle mandala t ibétain des Cinq Dvani dLr Bouddha,ut i l isé dans la mé<l i tat ion pour at te indreleniveâu Ie plus hâut dc conscience intérieure, sagesse infinie, irÂnscendantale (svmbolisée parVairocana étreinte par la Mère Divine de l'E\pace Bleu Infini). Cettc compositjon prvcholo$co-formelle vibre de plus en plus intensément (pâr les cL)ulelrrs svmboliques: le blanc,le jaune,lerouge et Ie vert) à l'apprcche du centre ctu nlandala (le centre ét.rnt le -rhig !e" ou point \.ide,contenant toutes les formes, à la fois début et iin dc la cLrnscience). La deuxièrne r.artic du filmest,en un s€nt l'in\'erse de Ia première; c'crt à dire, rFres etr€ pas5e âu ccntrc du vkjc, orr rc|ourn€à ùn état oidinaire renfermant la richesse clc I expérience réïélatricc du .thig le"_ Les formesvirtuelles avec lesquclles i'a' travâillé (créLt$ par ntrernances râpidcs er morifs àe monochromescouleurs) trouvent dans ce travail leur pertincnce comme inc{iqué dans ce passage de l,L/forilrftt5i,.'irsi'rfnlr: "En pratiquant la méditâtion,ru pourras voir en im.rginntjon des foÀes ressemblantà la neige, aux cr istau\, à la fumée, au feu, à lâ f . 'udLe au. tucroTis, au sotei t , à ta tune. E[es \onrIe signe que tu es sur 1e chemin de la ré\'él.rtion du Br.rhmane. "

La symbolique mvstique du bouddhisme ne m,iniéresse absotumcnt pas,saufdâns sa grandecapacité à créer.intuitivement des imates. Dàns un sens,te suis plos jntéressé par le mantra qui,à l'invers€ des Jormes du mandâla et du v.rntra pleincs cle sYnlbolei de cette sorte,est sou!,entPresque pur non sens - et cependant 1e n1antra possùde une aorte puissance ph!siologique,ps) cholodqùe et esdrétique. Celui utilisé pour .ncindre Ie " thit Ie. clu mandata àes Cinq Dr:anidu Bouddha est simplement <Om> boùrdomenleut stable ei r.ibratoire. À urr cerrarn nrleau,j 'a iessavédeconstruirelecentrede^-:rr : r :H:t : \ :c,comnleÏ i 'çLâl is.r t iondecetef fet5onor€.

Kubelka a défini,avec Antulf Rninci., le pôle absolu des "articulations fortesn,collision à la seconde près de valeurs opposées,blanc et noi4 son blanc et silence.Dans Tlrc Flickar,Tonv Conrad a élargi cette technique vers une sorte c1e cinémaméditatif en orchestrant de doux passages entre le blanc et le noir et en gardantleson perçant toujours au même nileau. Faute de posséder les modulations rntemesd'Arrulf Roircr,Thc Flickcr uhlise la vitesse agressive de l,effet de clignotementpour_suggérer l'arrêt clu mouvement ou bien des changements très progressifs.

. A l 'époque de ses premiers fi lms à clignotements de couleurs _ RnrT Grrrr Virris(1,966) et Picce Matttlala lEntl Wat (7966) - Paul Sharits atténuait davantage lesarticulations fortes inhérentes aux films. Les couleurs pures rapidement altemeesont tendance à se mélangetà pâlir et ù r irer au blanc. Àrrir e à \:o:T:HJ:\:G,il a\.aiteu le temps d'apprendre comment maîtriser ces changenents apparents etregrouper ses éclats de couleurs en phrases majeures et rnineures ar ec, disons,parfois un bleu pâle qui domine, d'autre fois un jaune. Dès le début 1,écran crépitecle couleurs,la bande-son suggérant un code télégraphique, des bavardages rru lepetit bruit sec qui accompagne le changenent soudain de chaîne de télér,ision.

_ L'image d'une chaise animée en positif ei en négatif surgit arr nil ieu deschangements de couleurs. Elle flotte en descendant iécran et-clisparait clans leprcsque néant des couleurs s'effaçant mutuellement. L,intermède est accontpasnèd'un bruit de sonnerie téléphonique. Depuis le début pratiquement,le fi im estconstamment interrompu, pendant de brè\'es périodes, par l, image en deuxdimensions d'unc ampoule perdant son énergie !itale.

Sharits modèle l 'attention du spect.lteur etl i ponctlre en incorporant dans sesfi lms à clignotements de couleurs appârenlment circulaircc (le m.rndala est Jaforme qu'i l a choisi) des signes l inéaires qui indiquent le temps passé du fi lm et letemps qui reste à s'écouler. l"ampoule qui fuit est une horloee de ce tvp€.; on

LE CI \..ÉIJ A STRUCTU It E L

anticipe le fait que le fi lm se ternrinera quand elle sera vidc Ken Jacobs nous

montrc en prcrrier l'original Tort,,lb,r, l/te /)il)r'r-'-s Sori, afir-r quc nous Ptlissions juger

de la longueur de ses variantes, n]ais Pour en fin de comPte nous tendre un Piègece que fait également Nelsorl cluancl i l nent au sujet de la vraie durée de Blcrt

s/firJ. Sharits, cluatlt à lui, sembie vottloir maintenir la Ptlreté de la relatiot entre la

durée de ses fi lms et les attentes et ialons internes qu'i ls génèrent

Dans T,o,u,c,H,t,\-,G (1968), i l épelle le titre,lettre Par lettre, commençant Par le

T et terminant par le G. Ici,les images fixes ont le même poids que le cliSnotement

de couleurs. Des plans comPosés de Photogrammeç d'Ltn ieune homme torse nll

alternent en positif et en négatif, à la fois eû couleur et en noit et blanc Dans

certains, i l t ient sa langue dans une paire de ciseattx comme s'i l s'apprêtait à la

couper; dans d'autres, des ongles cle femme déchirent son l'isage. Deux sortes de

déchirures, en nontage raPide, testent la tendance du sPectateur à les relier

ensemble dans une il lusion de monvement Au beau milieu de ces icônes de

violence s'intercalent la photographie d'une oPération chirurgicale en couleur et

un gros plan d'otganes génitaur en noir et blanc La bande-son du film consiste en

la répétit ion par une !oix d'homme du nlot " destro\' " (destruction). Parfois,

l 'oreil le refuse d'entendre ce mot et en perçoit d'âutrcsSharits a fait ttne uti l isation identique du mot " exochorion " dans son fi lm

suivant S:TRE\\r:sis:ECTIo\:s:Ec'TIo\:s:s:EcrroNED (1970), mélangé à la nlanière L1'une

fugue à d'autres mots similâires et Prononcés par dcs voix féminines. Pour la

prcmière fois dans r-ur film de Sharits,on voit sur l'écran une image en mouvement

- l 'e.ru d 'un rui . .eau qui coule.Les surimpressions d'images d'eau décroissent, passant de six à une eD trois lois,

alors que les ra\!rcs verticales attgmentent réguliùrement à raison dt'trois à chaclue

fois. Le spectaterrr mesure le fi lm en folrction de son .rttente: quand il n'y aura

ptus de place sur l ' inlage Pour trois rayures suPPlémentaires,le fi lm se terminera.

La surimpression multiPle de l 'eau qui coulc dans différentes directions donne

d'abord une image très plate. Mais les ravures ulrérieures, profondes, Plongeantdans la couleur de l 'émulsior-r jusqu'au support blanc et charriant souvent sr'rr

leurs bords des résidus de matière fi lmicluc, affirment 1e caractère l ittéralement

pJat de l ' image cL font aPParaître l 'eaLl, P,rr contr.r5te, com nlt ' profonde.

Le dilemme de 1'art de Sharits réside tlans l 'échec de son imagerie à s'imposer

dans la t rès puissante matr ice des structures qu' i l net en place Sa quête de

métaphores et d'icônes dans ses fi lms n'esl Pas autant cotlronnée de quccè\ qLle

sa capacité à inYenter des rePères portl rcfléter la durée de scs fi lnrs l)ans

\:o:T:Èril:N:cl, la chaise vide, en cléséquil ibre et l 'amPoule lumineuse se vidant font

allusion à l 'expérience flottante, PresLltre eniYr.rnte re\sentie P.]r lc sPect.rteut

assis, après une longue exposition aux clignotemcnts de couleurs dé\'ersés par la

lampe du projecteur. Les métaçrhores de T,o,u,c,H,l,\,G additionnent leç thùmes

suicidaires et se\uels de Rnv Grrrr Vints et Piccc lt ltndtr/a/Èrrd l!h;.et représentent

l 'expérience optic}re comme une violence érotique Curieusemcllt, dan5 s::s:s::s::s:5

il eipose, involontairement bien sûr,la métaphore que Kubelka se pl.rit à détail)er

pour la stmctule de Sr'/ttû c/rni,'r', cFrand, dans ses conférences, il comPare touiours

cc i i lm à un cotrrs cl 'c.rrr. Dans le fi lm clc Sharits aussi,les flux d'eau contrariés