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Des coiffeurs qui se font thérapeutes, un mu-sée parisien qui expose le cheveu et décrypte son langage… Qui a dit que notre chevelure était une part superficielle de nous-mêmes ? Reportage dans un salon de coiffure où l’on pratique l’art de l’écoute et… de la coupe.

Bien dans ses cheveux

en 2013Pendant la semaine, Valérie est huissière à l’Assemblée natio-nale, un métier qui l’oblige à coiffer strictement ses cheveux ondulés. « Le chignon tiré bas sur la nuque signifie le travail et le cadre légal. Le week-end, c’est la liberté ; je lâche mes cheveux et je renoue avec ma féminité. » La

coiffeuse hoche la tête avec empathie. Depuis trente ans qu’elle manie peigne et ciseaux, Annie sait que les cheveux possèdent leur pro-pre langage. « Cette prolongation de

notre tête vibre à l’unisson de nous-mêmes. Nos cheveux

sont notre premier baro-

mètre. Ils reflè-tent notre état

d’esprit, nos

émotions et nos peines. Sou-ples et brillants, ils disent notre équilibre, ternes et plats, ils alertent sur notre alimentation, la prise de médicaments, le coup de blues. En les prenant entre mes doigts, j’entre en lien étroit avec celui qui me les confie. La confian-ce qui se crée amène les confi-dences », explique Annie. Dans notre monde en mal d’humain, son salon de coiffure de l’Essonne est un lieu de parole intime où cheveux riment avec aveux et où il fait bon lâcher prise. La clientèle fidèle s’appelle par son prénom et se tutoie, s’attarde souvent après la coupe pour bavarder et boire un thé. Tous les âges, les milieux et les origines se mêlent dans

par catherine lalanneIllUstratIons elsie

Dans l’ambiance ouatée du salon de coiffure d’Annie Masfaraud, Valérie attend beaucoup

de la coupe énergétique dont ses amies lui ont parlé. « J’espère vivre un vrai moment de déten-te, retrouver de l’énergie et me recoiffer le moral », lâche-t-elle un peu tendue et pleine d’espoir.

vie de famille

Valériea testé la coupe énergétique et partage avec nous son expérience.

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une conversation libre et sans pré-jugés. Cet îlot de bienveillance et de dialogue doit beaucoup aux personnalités de la patron-ne et de ses deux coiffeurs, qui aiment faire du bien aux clients, contribuer à les rendre beaux.

nos cheveux disent tout de nous« Ceux qui viennent ici nous confient leur tête et leurs pro-blèmes familiaux, leurs soucis au boulot. Nous nous mettons à leur écoute pour qu’ils repartent bien coiffés et … mieux dans leur peau ». Trouver son style, sa coif-fure, participe à s’aimer soi-même et beaucoup poussent la porte avec un immense espoir. « Quand

rémi Portrait, coiffeur, s’appuie sur la médecine chinoise. il est l’auteur de Vos cheveux disent tout de vous, Éd. albin Michel.

quelqu’un entre avec une tête qui ne lui convient pas et me prie de l’aider à se trouver ou à se retrou-ver… Je me sens investie par sa demande. » Pour mieux répon-dre à cette attente croissante, Annie a multiplié les formations. « J’avais entendu parler d’un coiffeur qui soignait les maux de ses clients en les aidant à met-tre des mots sur leurs souvenirs enfouis. C’est lui qui m’a formée à la coupe énergétique au rasoir que je pratique aujourd’hui. » Changement de décor. Paris, rue du Mont-Thabor, près des Tuileries. Rémi Portrait nous accueille dans son salon sobre et stylé. Après avoir travaillé pour Alexandre, été le coiffeur person-

nel de la reine Noor de Jordanie, il a inventé sa méthode de décryp-tage capillaire. « Nos cheveux parlent pour nous. Les crimino-logues cherchent leur ADN pour confondre les coupables, les pis-teurs antidopage leur font avouer les substances ingérées par les sportifs. Tout s’imprime dans ces antennes reliées à notre organis-me. » Cette mémoire du cheveu, Rémi Portrait s’y est intéressé de très près : « Ce fil de l’âme prend naissance sous le cuir chevelu dans la papille, une sorte de boîte noire gardienne de notre hérédité, notre état de santé, nos émotions. Chaque fois qu’un cheveu pous-se, notre code intime est répli- qué. » Après avoir étudié la méde-

cine traditionnelle chinoise sous la houlette de Michel Odoul, directeur de l’Institut français de shiatsu, il s’est lancé dans la coiffure-thérapie. Diagnostic psychocapillaire de la nuque, massage shiatsu et coupe au ra- soir sont ses marques de fabrique pour avoir de beaux cheveux tout

en évacuant les tensions. « Sur toute la tête passent des méridiens correspon-

dant chacun à un orga-

yeux, ses traits se détendent. « Ce massage permet d’éva-cuer le stress et bien davan-tage… » Valérie raconte qu’à 6 ans, elle a perdu ses cheveux, à la suite de la mutation de son père, infirmier militaire à Mururoa. « Étais-tu préparée à son départ ? » interroge dou-cement Annie. Valérie répond par la négative. Elle a appris la nouvelle incidemment et a eu peur de ne jamais le revoir. « Quel lien fais-tu entre ton père et tes cheveux ? » demande Annie. « C’était lui qui me les brossait à l’heure du coucher. Ce rituel de tendresse me sécurisait avant d’aller dormir », murmure Valé-rie les larmes aux yeux.

légère comme sa nouvelle coupeLes alopécies sont souvent liées à des chocs émotionnels. « Chez Valérie, c’est flagrant, commente Annie. L’implantation

la couPe ÉnergÉtiQue, ça agit coMMe l’ acuPuncture

ne et à un viscère », explique Michel Odoul, qui a coécrit avec le coiffeur parisien un livre pas-sionnant : Cheveu, parle-moi de moi (Éd. Albin Michel). « Rémi Por-trait utilise son rasoir à la maniè-re d’un archet et fait vibrer les cheveux telles les cordes d’un violon. L’onde vibratoire gagne la boîte crânienne, parcourt le liquide céphalo-rachidien et entre en correspondance avec les points énergétiques des méri-diens. L’effet produit par sa cou-pe est comparable à une séance d’acupuncture. La gêne ressentie par le client à un endroit donne une information sur ses ten-sions et lui permet de relier ses cheveux à des parties de son corps. En médecine orientale, on ne dissocie pas ce dernier de l’es-prit. » Retour à Savigny-sur-Orge. Annie masse doucement le crâne de Valérie en appuyant avec ses pouces sur des points-clés des méridiens. Valérie ferme les

Michel odoul, psychoéner-géticien, directeur de l’institut français de shiatsu, auteur de nombreux livres sur le langage du corps.

Pierre,gérant de garage. « Dans l’univers de la mécanique, je tiens à mon allure soignée. Nuque impeccable, pattes droites, chaque détail compte. Une bon-ne coupe, et je me sens un homme neuf. »

Carla, 9 ans, et ses parents« Notre fille faisait une pelade que les dermatologues ne parvenaient pas à soigner. La coupe énergétique a permis à Carla de se libérer d’un passé familial doulou-reux. Avec la parole retrouvée, les cheveux ont repoussé. »

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vie de famille Bien dans ses cheveux

et la finesse de ses cheveux expri-ment ce choc de la petite enfance, cette peur de perdre qui s’est imprimée en elle. » En partant de la nuque, lieu de la naissance des cheveux, la coiffeuse relève et coupe chaque mèche au rasoir en suivant le parcours des méridiens de la tête. Régulière-ment elle interroge Valérie, allè-ge ou intensifie le mouvement en fonction de son ressenti. Valé-rie émerge de l’expérience avec un visage juvénile et une che-velure tonique. « Durant le massage puis la coupe, j’ai senti l’énergie circuler dans mon corps. Faire ressurgir ces souvenirs m’a libérée. Je me sens légère comme ma nouvelle coupe, en harmo-nie avec moi-même. » C’est bon d’être en accord avec sa coiffure. Notre chevelure est plus qu’une parure. Et si, en nous rendant chez le coiffeur, nous cheminions aussi vers nous-mêmes ? l

La chevelure est-elle l’objet de soins dans

toutes les civilisations ?Tous les hommes ont des cheveux sur le crâne. Cette matière lisse, bouclée ou crépue qui couronne notre visage est un sujet universel qui traverse toutes les cultures.

ils expriment notre désir de beauté ?Ils sont un élément de parure ou de séduc-tion mais participent aussi à la fabrication de la personne humaine. Ils sont au croisement de l’intime et du social, témoignent de la dignité de chacun et des valeurs d’une société.

la façon de les coiffer est un langage ?Bien sûr et selon les époques, la longueur ou la coiffure pren-nent un sens différent. Prenons l’exemple des cheveux lâchés des femmes : en France jusqu’au XIXe siècle, une femme respec- table ne sortait pas cheveux dénoués ; elle devait les attacher dès qu’elle quittait l’uni-vers intime. De nos jours, ce cheveu libre ne fait plus l’objet d’un interdit social. Mais dans d’autres cultures, la cheve-lure n’est montrée qu’au mari tant sa portée éroti-que est grande.

on s’affirme avec ses cheveux ?Ce sont des marqueurs de tran-gression et d’adhésion à un groupe. Prenez la coupe afro des années 1970 : elle exprime la révolte des Noirs américains, affirmant leurs cheveux crépus et leur négritude face à l’esthéti-que blanche, peau claire et che-veux lisses.

cheveux bouclés ou crâne rasé, tout est message ?Le culte de la boucle remonte aux Grecs, à Apollon symboli-sant le Dieu enfant. Les médailles d’Alexandre le Grand, avec sa crinière ondulée, ont véhiculé ce modèle dans toute la Médi-terranée. Les longs cheveux bou-clés sont symboles de puissance. Regardez la chevelure épaisse des Vikings, celle des rois francs, la mode des perruques lancée par Louis XIV à la cour. Le crâne rasé peut représenter le refus de l’or-dre social comme dans le mouve-ment skinhead, ou le châtiment des femmes tondues en 1945. Il dit aussi le renoncement quand on entre dans les ordres ou la libé-

ration quand les femmes, après- guerre, adoptent des coupes garçonnes.

leur couleur est aussi un symbole ?Depuis Apollon, la blon-deur c’est l’enfance, le

soleil, l’or, le symbole de ce qui est précieux. Hollywood a joué sur

Le musée du quai Branly mêle che-velure et culture. hélène Fulgence, directrice des expositions, passe les cheveux au peigne fin.

Les cheveux, tout un symbole

Adrianaartiste peintre. « Avant la maladie, j’étais indifféren-te à mes cheveux. Après la chimio, j’ai compris qu’ils venaient de l’inté-rieur. Prendre soin d’eux m’a aidée à guérir. »

affiche de l’exposition.

Jusqu’au 13 juillet au

musée du quai Branly,

à Paris. En haut :

coiffe du Brésil

mêlant plumes et

cheveux.Ci-contre :

hélène Fulgence.

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ces archétypes en surexploitant la couleur jusqu’à la caricature, : les blondes sages comme Grace Kelly ou infantiles comme Marylin s’opposent à la brune Ava Gardner qui incarne l’intrépidité et une part virile. La sulfureuse chevelure rousse de Rita Hayworth fait d’elle un sex-symbol. Dans l’histoire, le roux, victime de sa rareté, signe le commerce avec le diable. Il symbolise le péché – Marie- Magdeleine est souvent représen-tée avec des cheveux roux – ou la sorcellerie au Moyen Âge.

les cheveux expriment un lien avec l’âme… Le cheveu pousse même après notre mort, il est imputrescible et nous relie à l’éternité. Son terreau c’est le crâne, le siège de la pen-sée, de l’âme pour les croyants. Notre chevelure est imprégnée des pouvoirs de cette intelligence humaine et divine. Une mèche de cheveux reste vivante, reliée à l’es-prit du disparu. En témoignent la mode des cheveux en médaillon en Occident jusqu’au XIXe siècle ou les pectoraux amérindiens faits avec les cheveux des enne-mis tués qui conservent leur pouvoir. Partout l’homme agit sur les cheveux pour participer au deuil, lier le vivant à l’au-delà et pour renaître. l

«Depuis les années 1990, les coupes

plus libres et naturel-les, les cheveux effilés

se plaçant tout seuls et les budgets resserrés

ont réduit la fréquen-tation des salons de coiffure. Avant la crise, les clien-

tes passaient chaque semaine pour un coup de peigne et un brushing. Les coupes plus élaborées nécessitaient notre intervention. Aujourd’hui, elles viennent moins souvent mais pour un vrai moment de détente

et de soins », explique Cathy Monier, directrice artistique

de la marque Saint Algue. « Tout doit répondre à leurs attentes, renchérit Emma Guerri, formatrice

visagiste des coiffeurs de l’enseigne : l’environ-

nement accueillant du salon, l’écoute attentive et

le décodage de la demande, le choix de produits res-

pectueux du cuir chevelu, le conseil en soins capillaires… Nous les chouchoutons et créons une vraie relation de confiance. » Chez Saint Algue, comme dans toutes les grandes enseignes, les coiffeurs savent que le premier vêtement d’une femme, c’est sa coiffure, que ses cheveux parlent d’elle autant que la couleur de ses vêtements, l’or ou l’argent de ses bijoux. « Ici nous n’im-

posons pas sa coupe à la cliente et nous dialoguons longtemps avant de prendre les ciseaux, poursuit Emma. Dans le miroir, nous montrons avant de faire. Après une grossesse, un divorce, un licenciement, la cliente veut souvent couper avec le passé. Mais parfois, elle est hésitante. “Jusqu’où êtes-vous prête à cou-per aujourd’hui ?” est la formule rituelle avant d’agir. »

le volume doit suivre la forme du visageLa forme du visage va détermi-ner le choix de la coupe. Et dans chaque visage, il faudra tenir compte des assymétries, du profil doux et du profil dur. « Nous avons une règle d’or, conclut Cathy : le volume doit suivre la forme du visage et accompagner ses reliefs. » « Un visage en losange avec des pommettes saillan-tes appelle une coupe avec du volume au niveau des joues, un visage rectangu-laire demande de la masse au niveau des angles du front et du maxillaire », traduit Emma. À cela s’ajoute la personna-lité de la cliente : introver-tie, elle portera une frange protectrice, extravertie, elle aimera dégager son visage et le mettre en lumière. « Il y a une coupe pour chacune et c’est au visagiste de participer à sa création avec doigté et atten-tion », conclut Cathy. l

Chez Saint Algue, l’époque des coupes stéréo-typées est terminée. Les coiffeurs-visagistes s’adaptent à la forme du visage et à la person-nalité de chacun. Minileçon de coiffure.

le PreMier vêteMent d’une FeMMe, c’est sa coiFFure

« Jusqu’où êtes-vous prête à couper ? »

emma guerri,

visagiste et formatrice

cathy Monnier,

directrice artistique

saint algue

Quand la coiffure devient

œuvre d’art.

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Les secrets d’une coupe sur mesureUn visage ovale

Un visage rectangulaire

Un visage rond

Un visage carré

Un visage triangulaire

C’est le visage harmonieux, parfaitement équilibré en longueur et en largeur : toutes les coiffures lui conviennent. Évitez les coupes très courtes qui casseraient un peu sa douceur. Ne cachez pas non plus sa jolie forme derrière une frange trop épaisse.

Plutôt étroit et en longueur, ce visage possède souvent des traits fins et gracieux. Une coupe mi-longue, souple, avec de grandes mèches ou une frange et du volume sur les côtés, atténue son aspect longiligne.

Féminin malgré ses angles prononcés il met en valeur des pommettes saillantes. La coupe doit aérer le front, être légèrement structurée, avec du volume sur les côtés, au niveau des joues.

Cette forme de visage douce et agréable est un peu plus large au niveau des joues charnues, qui lui donnent un aspect jeune et frais. Les coupes qui amènent de l’ampleur sur le dessus de la tête et les côtés l’allongent et l’affinent.

Front large, menton étroit, optez pour une coupe avec du volume sur la partie supérieure, une frange bombée et des mèches effilées au niveau des maxillaires. À l’inverse, avec un petit front et de belles mâchoires, dégagez le visage et donnez du volume sur les tempes et au niveau du menton.

Avec un front et une mâchoire prononcés, le visage carré incarne la détermination. Une frange, une coupe mi-longue et floue permettent de l’adoucir.

Un visage en losange