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Winston Churchill : « La démocratie est le pire des régimes, à l’exception de tous lesautres ».

IntroductionEn mai 1940, alors que les combats de la Seconde Guerre mondiale commençaient à faire rage, Winston

Churchill, alors Premier ministre du Royaume-Uni, annonçait à son peuple : « Je n’ai rien d’autre à offrir que dusang, de la peine, de la sueur et des larmes. » Chef du gouvernement d’un pays dont le régime était monarchiquemais qui se trouvait résolument démocratique, il fut aussi un acteur important lors de la Conférence de Yalta ettémoin de la l’opposition des « démocraties populaires » et des démocraties libérales.

Comment expliquer que les régimes démocratiques, quoique critiqués, aient connu une expansion continuejusqu’à aujourd’hui ?

I – Le paradoxe démocratique moderne : un système en expansion mais des régimes contestés1) Des régimes démocratiques contestés

L’inefficacité démocratique- Critique du système représentatif, éloigné des réalités, justifiant la distinction « pays légal, pays réel » introduitepar Charles Maurras, l’auteur d’Enquête sur la monarchie (1900), intellectuel d’extrême-droite qui émettait deviolentes diatribes contre la IIIème République naissante et qui militait en faveur de la monarchie.- Non renouvellement des élites qui restent éloignées des enjeux réels.- Individualisation des pratiques politiques : l’individu a pris le pas sur le citoyen. On ne vote pas pour desreprésentants mais pour ses représentants. Tentation du communautarisme.- Développement de l’Etat de droit qui s’accompagne de nouvelles exigences formelles (consultation, évaluationdes politiques publiques). Or ce sont de nouvelles contraintes qui pèsent en termes d’efficacité. Craintes que l’espritrationalisé de la démocratie ne fasse disparaître la parole et les traditions.- Cacophonie démocratique : en vertu de l’isegoria (égalité de la parole), la parole sage est dévalorisée.Amplification des critiques sur la démocratie plus que sur tous les autres régimes politiques car elle permet ledébat, et donc ces critiques.- Inefficacité du régime démocratique : John Kenneth Galbraith dénonce dans les années 1950-1960 la prise depouvoir, au sein des entreprises et de la cité, par une caste d’ingénieurs et de managers au nom d’une efficacitééprouvée.

Déclin et faiblesses des valeurs démocratiques- Corruption : scandales de la IIIème République (scandale de Panama en 1892, affaire Stavisky en 1933).- La démocratie se résumerait à « du pain et du crique » (Paul Veyne, historien de la Rome républicaine).

2) Du développement continu des systèmes démocratiques

La diffusion de la démocratie dans le monde- Causes : décolonisation, implosion de l’URSS, rôle retrouvé de l’ONU, hyperpuissance des Etats-Unis,mondialisation.- La prise de conscience date des années 1970 avec les « nouveaux philosophes » (André Glucksmann, Bernard-Herny Lévy, Jean-Paul Dollé, Jean-Marie Benoist) et le choc de la publication de L’Archipel du Goulag dudissident Alexandre Soljénitsyne : les valeurs bourgeoises et formelles de la démocratie représentative prennentalors un sens réel, puisqu’elles représentent des régimes de liberté par rapport au totalitarisme soviétique.- Années 1980-1990 : accession des démocraties populaires aux régimes démocratiques, puis intégrationeuropéenne. Echec a contrario des régimes totalitaires, même si certains s’affublaient de cette dénomination de« démocraties populaires ».

Renforcement du système onusien et de la démocratie internationale- Création de l’ONU en 1945, Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948. Constitution d’un ordrejuridique mondial.- Francis Fukuyama, La Fin de l’Histoire et le Dernier Homme (1992). La démocratie, une fois implantée, ne peutque se perpétuer (fin des dictatures et du communisme).

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(Transition) Pourtant, ce succès critiqué révèle de nombreuses ambiguïtés.

II – L’ambiguïté du succès démocratique1) De l’idéal démocratique à l’effectivité de normes justes

L’existence d’un idéal démocratique- Mythe d’Antigone : le combat d’Antigone contre Créon, son oncle à la tête de Thèbes, devient un idéaldémocratique parce qu’elle considère qu’il y a des lois morales qui sont supérieures aux lois de la cité.- Exemple contemporain : les révolutions arabes.

Une société démocratique née du discours- La démocratie est l’affirmation la plus poussée du zoon politikon d’Aristote (l’homme est un « animalpolitique »). Le langage permet la vie en société. La vie démocratique est rythmée par le discours.- Mais risque d’excès : sophisme et démagogie. Inflation législative (régulièrement dénoncée par le Conseil d’Etat).- Or, les normes qui naissent de la démocratie peuvent paraître ineffectives. A quoi sert-il de multiplier des droitss’il est impossible de les faire respecter ?- Edmund Burke : ressemblance étrange entre la démocratie et la tyrannie (Réflexions sur la Révolution en France,1790). Il annonce une révolution qui va déboucher sur une dictature militaire.- Les Droits de l’homme n’existent pas et sont seulement un instrument de pouvoir. Karl Marx s’attache àdémontrer le caractère formel de ces droits (Sur la question juive, 1844). Critique de l’universalité des Droits del’homme aujourd’hui.

2) L’euphorie démocratique et ses dangers

Un idéal démocratique mais une pluralité de régimes démocratiques- Pluralité des régimes : démocratie parlementaire, présidentielle,…- Pluralité des sociétés démocratiques : le corps social est déterminé par des paramètres qui dépendent de l’histoired’un pays, de sa géographie (Rousseau, Du contrat social, 1762).

Les dangers de l’uniformisation- L’uniformité démocratique peut donc constituer au final une forme d’uniformisation totalisante. Sous laRévolution française, tentation d’unifier un pays au risque de faire disparaître certaines spécificités locales oupropres à un corps social.- Aujourd’hui, le juridisme peut constituer une atteinte paradoxale aux libertés fondamentales. Le culte de la Raisondevient totalitaire, car la Raison n’admet aucune alternative puisqu’elle est porteuse de vérité (thèse retenue parTheodor W. Adorno dans La Dialectique de la Raison, 1974).- Besoin d’une morale civique menacée par la division du travail selon Emile Durkheim. Les régimesdémocratiques, fondés par et pour la solidarité, sont donc les plus menacés par les atteintes du monde moderne quiremettent en cause les mécanismes de solidarité. Cf : distinction faite par Benjamin Costant dans son discours de1819 De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes. La liberté des Modernes est la garantie des« jouissances privées », l’indépendance individuelle étant « le premier des besoins modernes ».

ConclusionAu moyen de cette citation, Churchill cherche donc à faire comprendre que face à la démocratie, aucun

autre régime ne semble de taille. C’était particulièrement le cas en 1940, au moment d’un combat crucial contre lesfascismes. Cela l’était tout autant en 1938 au moment du « lâche soulagement » de Munich dont Churchill acritiqué les accords. Ce constat semble toujours d’actualité, malgré les nombreuses critiques, à une époque oùDaesh semble vouloir abattre la démocratie.