BIOCHIMIE STRUCTURALE ET REGULATION ENZYMATIQUE
Introduction
Les enzymes sont des catalyseurs biologiques très importantes puisqu’elles sont
présentes dans la majorité des réactions métaboliques. En effet, elles ont pour rôle
principal d’augmenter la vitesse de celle-ci. De plus ce sont les meilleurs
catalyseurs existant à ce jour.
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REGULAT ION ENZYMAT IQUE
I. Buts et moyens de l’enzymologie
Connaître la séquence d’étape élémentaires impliquées dans le processus catalytique
(nombre de complexes intermédiaires, ordre d’entrée des substrats, ordre de sortie des
produits)
Déterminer les vitesses de chaque étape élémentaire
Identifier les structures de chaque complexe intermédiaire.
Moyens mis à disposition de l’enzymologiste pour ce faire :
Études cinétiques.
Détection et isolement d’intermédiaires.
Cristallographie à rayon X ou RMN
Modification des enzymes (mutagénèse ou juste modification chimique).
II. Facteurs responsables de l’efficacité enzymatique
A. Formation du complexe de Michaelis
Théorie de l’état de transition mis en évidence en 1935 par Eyring.
Prenons comme support une réaction : 𝐴+𝐵→𝐶+𝐷
On remarque que pour activer la réaction il faut fournir une certaine énergie (énergie d’activation)
qui va permettre aux réactifs de passer à un état intermédiaire (complexe d’activité). Cette énergie
est principalement sous forme d’agitation thermique.
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En effet, pour qu’une réaction chimique ait
lieu spontanément, nous savons qu’il est
nécessaire que la différence entre les niveaux
d’énergie des réactifs et produits doit être
négative, incidemment que la réaction puisse
libérer de l’énergie. On parle de variation
d’énergie libre de Gibbs.
Il s’agit d’une barrière énergétique qui va
permettre de contrôler la vitesse (nombre de
molécule qui réagissent par unité de temps)
de la réaction : Si l’énergie d’activation
augmente, la vitesse globale de la réaction va
diminuer.
Il est difficile d’établir une vitesse en prenons en compte la vitesse de chaque molécule mais on peut
faire une moyenne qui va se traduire par une température.
Il est évident que les molécules qui vont le plus vite sont les plus susceptibles à donner assez
d’énergie pour activer la réaction. Néanmoins si la barrière énergétique est trop grande la partie
infime de molécule rapide ne suffit plus (il y a trop peu de molécules).
Quand toute l’énergie d’activation est absorbée, la molécule de substrat est dans l’état de transition
(les angles et les longueurs des liaisons chimiques du substrat sont distordues). C’est l’état le plus
instable. La réaction évolue spontanément vers un état énergétique plus faible, la formation du
produit.
Les enzymes et les systèmes biologiques fonctionnent différemment en permettant à une réaction
d’emprunter un chemin énergétique différent, abaissant directement la barrière énergétique. C’est
le principe de réaction catalysée. De cette manière, une enzyme va baisser cette énergie d’activation
en stabilisant l’état de transition (qui est le plus énergétique).
Pour étudier l’évolution d’une réaction, on utilise l’équation de Michaelis et sa représentation
hyperbolique ou en double inverse.
kcat : la constante de capacité de catalyse de l’enzyme considérée (représente l’efficacité de
l’enzyme)
[Et] : l’enzyme total
Vi : la vitesse initiale
Km : constante de Michaelis
[S] : concentration de substrat
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1. Représentation et interprétation graphique
Pour déterminer les constantes 𝐾𝑚 et 𝑉𝑚𝑎𝑥, il faut
faire une étude cinétique.
Une première méthode consiste à tracer le
graphique représentant les Vi en fonction de la
concentration en substrat utilisé. On remarque que
plus on rajoute de substrat plus la vitesse augmente
jusqu’à un seuil maximum.
Cela nous informe que 𝐾𝑚 devient négligeable à [S]
tendant vers infinie donc :
𝑉𝑖 =𝑘𝑐𝑎𝑡[𝐸𝑡][𝑆]
[𝑆]
Ce qui nous donne la valeur de 𝑉𝑚𝑎𝑥 : 𝑉𝑚𝑎𝑥=𝑘cat[𝐸t]
Ainsi à 𝑉𝑚𝑎𝑥, [ES] est égale à [Et] car toute l’enzyme [E] est sous forme [ES], on appelle cette
condition la saturation.
Il est facile de déterminer 𝑉𝑚𝑎𝑥 graphiquement.
Cela va nous permettre de nous donner l’efficacité de l’enzyme, si 𝑘cat est grand alors l’enzyme est
très efficace
Ainsi, à 𝑲𝒎 petit, [ES] est grand donc il y a une haute affinité de [E] pour [S] et à 𝑲𝒎 grand, [ES] est
petit donc [E] grand, il y a une faible affinité.
Pour améliorer la précision de la détermination graphique de ces deux constantes, il existe des
représentations graphiques qui linéarisent les résultats, permettant des extrapolations plus précises.
On utilise alors la représentation en double inverse (donnant une équation de droite 𝑦 = 𝑎𝑥 + 𝑏).
𝑦 =1
𝑉𝑖 𝑎 =
𝐾𝑚
𝑉𝑚𝑎𝑥 𝑥 =
1
[𝑆] 𝑏 =
1
𝑉𝑚𝑎𝑥
Ainsi 𝑎 =𝐾𝑚
𝑉𝑚𝑎𝑥 correspond à la pente de la
droite et 𝑏 =1
𝑉𝑚𝑎𝑥 à l’ordonnée à l’origine
Par ailleurs pour une valeur de 𝑦 = 0, on constate que 𝑥 = −1
𝐾𝑚
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B. Effet de proximité et d’orientation
La vitesse de réaction dépend de la distance
séparant les substrats ((plus ils sont proches,
plus la vitesse est importante) et de
l’orientation de ceux-ci.
On stabilise les substrats (rapprochement et
orientation) et cela influe sur la vitesse de
réaction.
Si on regarde le schéma, par ordre croissant
on retrouve : substrats libres (1), substrats liés
(2, 3, 4), substrats liés avec double liaison (5)
et cycle (6).
C. Catalyse générale acide-base
Mécanisme courant en enzymologie (liaison peptidique, phosphorylation, etc)
Exemple : ribonucléase catalysant la dégradation de l’ARN (coupent l’ARN en fragment au niveau du
phosphate).
Une catalyse acide-base va jouer sur les protons de l’ARN (des acides aminés sont dans le site
catalytique et sont en charge de l’interaction avec l’ARN). Donc l’accélération de la réaction résulte
d’un transfert de proton (le proton vient de l’acide et est récupéré par la base).
Ce proton peut provenir d’un noyau imidazole (histidine) par exemple. Ces enzymes dépendent donc
beaucoup du pH du milieu.
Une base peut également accélérer une réaction.
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Selon la différence de protonation des acides aminés, une cascade de réactions aboutit à un état de
transition (dans l’exemple de la ribonucléase il s’agit du phosphore pentagonal) qui suite à une
hydrolyse, sera clivé par attaque acide-base.
Groupements fonctionnels des protéines pouvant agir en tant que catalyseur acide/base :
▪ Imidazole de l’histidine
▪ Alpha-aminé
▪ Alpha-carboxylique
▪ Thiol de Cys
▪ Carboxylique
D. Contraintes et distorsion du substrat
Exemple : lysozyme (catalyse l’hydrolyse des sucres)
On va tordre le substrat à l’aide de l’enzyme pour faciliter
l’hydrolyse entre deux sucres en jouant sur la conformation des
sucres et leur stabilité (chaise/demi-chaise).
Sous forme de chaise, réaction relativement lente
Sous forme de demi-chaise, bonne orientation pour
accélérer la réaction
L’enzyme va forcer le substrat à adopter la conformation demi-
chaise (plus instable, thermodynamiquement coûteuse) pour favoriser la formation de l’état de
transition (dans ce cas-ci, l’ion carbonium).
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E. Changement d’environnement (en termes de polarité)
Exemple : carboxypeptidase A
Elle agira du côté C-Term en ne reconnaissant non pas un résidu, mais un groupement particulier
carboxyle, et catalysant le clivage de la liaison peptidique en direction N-Term. Une nouvelle
extrémité C-Term sera donc mise à disposition après libération d’un acide aminé, on parle alors
d’enzymes processives.
En effet, on a une attaque d’un atome par un acide aminé polaire induisant le changement de
l’environnement de l’atome générant la stabilisation de l’état de transition via des ions Zn2+ puis
hydrolyse et on obtient le produit.
On constate un changement de position des acides aminés en fonction de la polarité de
l’environnement.
F. Créer un intermédiaire covalent
Exemple : phosphatases, protéases, enzymes à phosphate de pyridoxal (20% des enzymes).
ES’ correspond à l’intermédiaire covalent créé (l’enzyme fait un lien covalent avec une partie du
substrat).
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L’intérêt d’une telle formation est de pouvoir réduire
radicalement l’énergie d’activation de la réaction, grâce
à une double stabilisation de la barrière énergétique via
le complexe ES puis ES’ (elle interagit de deux manières
avec le substrat, un complexe michaelien et un complexe
covalent).
On a deux petites barrières énergétiques au lieu d’une
seule plus importante. Ainsi on peut surmonter les
barrières qui seraient ou sinon trop importantes.
Exemple d’enzymes formant des intermédiaires covalents :
▪ Phosphatase : formation d’un intermédiaire (transfert du phosphate sur l’enzyme),
on libère le premier produit, récupération du phosphate et libération de l’enzyme.
▪ Les protéases à sérine (endopeptidases : chymotrypsine/trypsine) : toujours le
même site actif composé d’une triade catalytique. En effet, la sérine 195 (sert
d’intermédiaire covalent) est l’acide aminé qui réagit avec le substrat, alors que
l’histidine 57 (catalyseur acide base) et l’acide aspartique 102 contribuent à rendre
la sérine particulièrement réactive (souvent sous la forme O-).
▪ Les enzymes à phosphate de pyridoxal : Formation d’une base de Schiff entre
l’acide aminé donneur et le phosphate de pyridoxal (aldimine), puis on a le départ
du proton α de l’acide aminé suivi d’une stabilisation par résonnance résultant par
la formation de la cétimine et l’hydrolyse de la cétimine produit le phosphate de
pyridoxamine et un α-cétoacide. Lors de la dégradation des acides aminés, il est
nécessaire de séparer le groupement alpha aminé du squelette carboné. La
première étape de ce catabolisme est assurée par les réactions de transamination.
▪ Les enzymes intervenant dans le mécanisme d’ubiquitylation, nécessitant de l’ATP.
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Néanmoins est-ce-que ce système (à intermédiaires covalences) obéit à la loi de Michaëlis ?
Oui. On part de l’équation de départ :
▪ Expression de la vitesse : 𝑉𝑖 =𝑑𝑃1
𝑑𝑡= 𝑘2[𝐸𝑆] = 𝑘3
[𝐸𝑆’] =𝑑𝑃2
𝑑𝑡 (les deux produits
sont formés à la même vitesse)
▪ Équation de conservation de E : [𝐸0]𝑜𝑢[𝐸𝑡] = [𝐸] + [𝐸𝑆] + [𝐸𝑆’]
▪ Hypothèse de l’état stationnaire : [ES] et [ES’] restent constants (autant de formé
que de détruit).
𝑘1[𝐸][𝑆] = 𝑘−1[𝐸𝑆] + 𝑘2[𝐸𝑆] = ( 𝑘−1 + 𝑘2) [𝐸𝑆]
𝑘2[𝐸𝑆] = 𝑘3
[𝐸𝑆’]
𝐾𝑚 =[𝐸][𝑆]
[𝐸𝑆] 𝑑𝑜𝑛𝑐 𝐸 = 𝐾𝑚
[𝐸𝑆]
[𝑆]
On élimine [E] et [ES] en fonction de [ES’] et des constantes
[𝐸0] = 𝐾𝑚[𝐸𝑆]
[𝑆]+ [𝐸𝑆] +
𝑘2[𝐸𝑆]
𝑘3
[𝐸0] = [𝐸𝑆] (𝐾𝑚
[𝑆]+ 1 +
𝑘2
𝑘3)
[𝐸0] = [𝐸𝑆](𝑘3𝐾𝑚 + 𝑘3[𝑆] + 𝑘2[𝑆])
(𝑘3[𝑆])
[𝐸𝑆] =(𝑘3[𝐸0][𝑆])
(𝑘3𝐾𝑚 + (𝑘2 + 𝑘3)[𝑆])
𝑉𝑖 = 𝑘2[𝐸𝑆] =(𝑘2𝑘3[𝐸0][𝑆])
(𝑘3𝐾𝑚 + (𝑘2 + 𝑘3)[𝑆])
(𝑘2𝑘3)
(𝑘2 + 𝑘3)×
[𝐸0]
𝑘3𝐾𝑚𝑘2 + 𝑘3
=𝑉′𝑚[𝑆]
𝐾′𝑚 + [𝑆]
Sachant que 𝑉′𝑚 =(𝑘2𝑘3)
(𝑘2+𝑘3)[𝐸0] = 𝑘′𝑐𝑎𝑡[𝐸0] et 𝐾′𝑚 = 𝐾𝑚
𝑘3
𝑘2+𝑘3
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III. Enzymes à plusieurs substrats
Jusqu’à présent nous n’avons considéré que le cas des enzymes catalysant des réactions à 1 seul
substrat (ou 2 substrats l’un étant l’eau qui reste constant lors de la réaction).
La plupart des enzymes catalysent des réactions complexes avec le plus souvent 2 substrats et 1,2
voire 3 produits. Lorsqu’une réaction enzymatique implique deux substrats ou un substrat et un
coenzyme libre, les phases de la réaction enzymatique au niveau moléculaire se compliquent : on
parle de cinétique à deux substrats
Pour les enzymes à 2 substrats, il existe différents types de fixation :
Fixation aléatoire
Fixation ordonnée
Fixation ping-pong
La fixation aléatoire et ordonnée sont des réactions enzymatiques impliquant des complexes ternaires (complexe contenant l’enzyme et deux substrats). On parle de mécanisme séquentiel, la réaction enzymatique n'intervient qu'après formation d'un complexe entre l'enzyme et les deux substrats. La fixation des substrats peut-elle même être ordonnée (l'un des substrats se fixant nécessairement en premier lieu) ou se produire au hasard (l'un ou l'autre des substrats se fixant en premier, sa présence pouvant soit ne pas modifier, soit défavoriser la fixation de l'autre)
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A. Fixation aléatoire
Deux substrats, A et B, se fixent de
manière aléatoire sur l'enzyme libre
(c'est-à-dire qu'il n'y a pas de fixation
privilégiée de l'un ou l'autre des deux
substrats). L’enzymes reconnait n’importe
lequel des substrats en premier.
Puis elle a besoin d’être liée au deuxième
substrat pour fonctionner.
Deux chemins possibles selon quel substrat elle rencontre en premier.
Elle libère un ou plusieurs produits.
Le sens est unique pour la formation du produit : non favorable énergétiquement, on s’intéresse aux
vitesses initiales (pas encore de produit formé) donc pas de flèche retour.
B. Fixation ordonnée
Dans un tel système, l'ordre de
fixation est obligatoire : l’enzyme va
forcément lier A d’abord puis B. En
d'autres termes, le substrat B ne peut
se fixer qu'au complexe EA
Dans ces deux types de fixation (aléatoire et ordonnée) on aura toujours la formation d’un complexe
dit « ternaire » EAB.
Démonstration aléatoire et ordonnée :
KA et KB étant les constantes d'équilibres entre l'enzyme libre et les substrats.
𝐾𝐴 = ([𝐸][𝐴])
[𝐸𝐴] 𝑒𝑡 𝐾𝐵 =
([𝐸][𝐵])
[𝐸𝐵]
K’A et K’B sont les constantes de Mickaelis des substrats A et B, c'est à dire les [substrat] pour
lesquelles la vitesse (mesurée à concentration saturante de l'autre substrat) est égale à la moitié de
la vitesse maximale. Si l'on peut faire l'hypothèse du quasi-équilibre pour la fixation des substrats et
s'il n'existe qu'une seule étape cinétique pour la transformation de EAB en E + P + Q. Alors, K’A est
égale à la constante de dissociation de l'équilibre EAB en EB + A et K’B à celle de l'équilibre EAB en
EA + B.
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𝐾′𝐴 = ([𝐴][𝐸𝐵])
[𝐸𝐴𝐵] 𝑒𝑡 𝐾′𝐵 =
([𝐵][𝐸𝐴])
[𝐸𝐴𝐵]
𝐾𝐴 × 𝐾′𝐵 = 𝐾𝐵 × 𝐾′𝐴
Pour déterminer l’équation nous allons également utiliser :
[𝐸0] = [𝐸] + [𝐸𝐴] + [𝐸𝐵] + [𝐸𝐴𝐵]
𝑣 = 𝑘 (𝐸𝐴𝐵)
𝑉𝑚𝑎𝑥 = 𝑘 [𝐸0]
Il nous faut alors déterminer [E], [EA] et [EB] :
[𝐸𝐴] = 𝐾′𝐵
[𝐵] [𝐸𝐴𝐵]
[𝐸𝐵] = 𝐾′𝐴
[𝐴] [𝐸𝐴𝐵]
[𝐸] = ( 𝐾′𝐵 𝐾𝐴 )
( [𝐴][𝐵]) [𝐸𝐴𝐵]
On utilise par la suite l’équation de [E0] :
[𝐸0] = ( ( 𝐾′𝐵 𝐾𝐴 )
( [𝐴][𝐵]) [𝐸𝐴𝐵]) + (
𝐾′𝐵
[𝐵] [𝐸𝐴𝐵]) + (
𝐾′𝐴
[𝐴] [𝐸𝐴𝐵]) + [𝐸𝐴𝐵]
[𝐸0] = {1 + ( 𝐾′𝐵
[𝐵]) + (
𝐾𝐴′
[𝐴]) + (
( 𝐾′𝐵 𝐾𝐴 )
( [𝐴][𝐵]) )} (𝐸𝐴𝐵)
On remplace dans l’équation de la vitesse :
𝑣 = ( 𝑘 [𝐸0] )
{1 + ( 𝐾′𝐵 [𝐵]
) + (𝐾𝐴′[𝐴]
) + ( ( 𝐾′𝐵 𝐾𝐴 )
( [𝐴][𝐵]) ) }
𝑣 = 𝑘 [𝐸0] [𝐴][𝐵]
{[𝐴][𝐵] + [𝐵]𝐾′𝐴 + [𝐴]𝐾′𝐵 + 𝐾𝐴𝐾′𝐵 }
Il est assez simple de montrer alors l’allure michaelienne à A variable et B paramétrique (v=f(A) à B constant) :
Si on divise le numérateur et le dénominateur par [B] dans la formule ci-dessus, on obtient :
𝑣 =𝑘 [𝐸0] [𝐴]
{[𝐴] + 𝐾′𝐴 +[𝐴]𝐾′𝐵
[𝐵] +
𝐾𝐴𝐾′𝐵[𝐵]
}=
𝑘 [𝐸0] [𝐴]
{[𝐴] (𝐾′𝐵[𝐵]
+ 1) + 𝐾′𝐴 + 𝐾𝐴𝐾′𝐵
[𝐵] }
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Si on divise le numérateur et le dénominateur par
(𝐾′𝐵
[𝐵]+ 1) dans la formule ci-dessus, on obtient :
𝑣 =
𝑘 [𝐸0] 𝐾′𝐵[𝐵]
+ 1[𝐴]
{[𝐵]𝐾′𝐴 + 𝐾𝐴𝐾′𝐵
𝐾′𝐵 + [𝐵]+ [𝐴]}
=𝑉𝑚
𝐴[𝐴]
𝐾𝑚𝐴 + [𝐴]
Avec : 𝑉𝑚𝐴 =
𝑘 [𝐸0] 𝐾′𝐵
[𝐵]+1
et 𝐾𝑚𝐴 =
[𝐵]𝐾′𝐴+𝐾𝐴𝐾′𝐵
𝐾′𝐵+[𝐵]
Dans une expérience cinétique, la vitesse est mesurée à partir des concentrations de [A] différentes et en gardant [B] constante, ce processus est répété à d’autres valeurs de B afin de balayer une gamme de variation importante en 𝑣.
La pente (a=𝐾𝑚
𝐴
𝑉𝑚𝐴 ) et l’intercepté (b=
1
𝑉𝑚𝐴) sont ensuite retracé en fonction de
1
[𝐵] (représentation
secondaire) pour résoudre les paramètres cinétiques :
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A partir de ces représentations secondaires, il est possible de déterminer les paramètres cinétiques Vmax, KA, KB et K’A.
Cas particuliers :
▪ KA=K’A : liaison de A indépendante de la liaison de B. Cela signifie que la fixation
d'un substrat sur son site enzymatique ne modifie pas la fixation ultérieure de
l'autre substrat sur son site. Les sites sont indépendants.
▪ Lorsque KA ou KB est infini (très mauvaise affinité et donc l’enzyme n’est pas
capable de lier B) donc mécanisme séquentiel ordonné. Cela signifie que B ne peut
se fixer sur son site enzymatique que si A se trouve déjà fixé.
C. Mécanisme ping-pong
Si la réaction enzymatique ne nécessite pas la
formation d'un complexe ternaire, l'enzyme,
après avoir fixé un des substrats, le transforme et
libère le produit correspondant. L'enzyme
ensuite fixe l'autre substrat, le transforme et
libère le second produit. C'est le mécanisme
ping-pong qui se distingue des précédents par le
fait qu'il intervient, entre les étapes de fixation
des deux substrats, une étape irréversible en
absence des produits de la réaction.
L’enzyme va d’abord interagir avec un des substrats et former un complexe avec celui-ci, puis elle va
transformer ce substrat en un autre, et reformer un complexe avec ce nouveau substrat :
[𝐸0] = [𝐸] + [𝐸𝐴] + [𝐸′𝐵] + [𝐸′]
𝐾𝐴 = ([𝐸][𝐴])
[𝐸𝐴] 𝑒𝑡 𝐾𝐵 =
([𝐸′][𝐵])
[𝐸′𝐵]
[𝐸] = [𝐸𝐴]𝐾𝐴
[𝐴]𝑒𝑡 [𝐸′] =
[𝐸′𝐵]𝐾𝐵
[𝐵]
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𝑉𝑚 = 𝑘1 [𝐸𝐴]𝑚𝑎𝑥 = 𝑘2 [𝐸′𝐵]𝑚𝑎𝑥
La vitesse maximale est atteinte lorsque toute l'enzyme est complexée, soit :
[𝐸0] = [𝐸𝐴]𝑀𝑎𝑥 + [𝐸′𝐵]𝑀𝑎𝑥
[𝐸′𝐵] = 𝑘1 [𝐸𝐴]
𝑘2
𝑒𝑡 [𝐸′𝐵]𝑚𝑎𝑥 = 𝑘1 [𝐸𝐴]𝑚𝑎𝑥
𝑘2
[𝐸0] = [𝐸𝐴]𝑀𝑎𝑥 (1 +𝑘1
𝑘2
) = [𝐸𝐴]𝑀𝑎𝑥 (𝑘1 + 𝑘2
𝑘2
)
𝑉𝑚 = 𝑘1 [𝐸𝐴]max = 𝑘1[𝐸0]𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
[𝐸0] = [𝐸𝐴] (1 +𝐾𝐴
[𝐴]) [𝐸] + [𝐸′𝐵] (1 +
𝐾𝐵
[𝐵])
𝑣𝑖 =𝑘1 [E0]
(1 +𝐾𝐴[𝐴]
) + ((1 +𝐾𝐵[𝐵]
)𝑘1 𝑘2
)
𝑣𝑖 =
𝑘1 𝑘2[E0]𝑘1 + 𝑘2
{[(𝑘1𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
)] [(1 +𝐾𝐴[𝐴]
) + (1 +𝐾𝐵[𝐵]
)𝑘1 𝑘2
]}
𝑣𝑖 =𝑉𝑚
{(𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
) (1 +𝐾𝐴[𝐴]
) + (𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
) ((1 +𝐾𝐵[𝐵]
)𝑘1 𝑘2
)}
𝑣𝑖 =𝑉𝑚
{1 + (𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
) (𝐾𝐴[𝐴]
) + (𝑘1
𝑘1 + 𝑘2
) (𝐾𝐵[𝐵]
)}
On peut simplifier cette équation par les termes suivant :
𝑉𝑚 =𝑘1 𝑘2[E0]
𝑘1 + 𝑘2
𝐾’𝐴 =𝑘2
𝑘1 + 𝑘2
𝐾𝐴
𝐾’𝐵 =𝑘1
𝑘1 + 𝑘2
𝐾𝐵
On obtient alors l’équation suivant :
𝑣𝑖 =𝑉𝑚
{1 + (𝐾′𝐴[𝐴]
) + (𝐾′𝐵[𝐵]
)}
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On fait comme les complexes ternaires v=f(A) à B constant donc on divise par [B] et par (𝐾′𝐵
[𝐵]+ 1)
Si on utilise le mécanisme ping pong : sur la représentation en double inverse, on aura d’abord une
représentation primaire avec des droites parallèles qui nous permettront de définir les constantes
(Km/Vm). La pente est indépendante de [B] et donc la représentation graphique en [B] différentes
donnes des lignes parallèles.
Les paramètres cinétiques : 𝑉𝑚, 𝐾’𝐴, 𝐾’𝐵 sont ensuite déterminés pour le mécanisme à partir de la
représentation secondaire.
Pour résumer ces différents mécanismes :
Mécanisme séquentiel :
▪ Aléatoire : indépendant (Ka=Ka’/Kb=Kb’) ou dépendant(Ka ≠ Ka’/Kb≠Kb’)
▪ Ordonné : Ka ou Kb =0, et du coup si Ka=0, Kb = infini (idem pour Ka si Kb=0).
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IV. Régulation enzymatique
Il existe beaucoup d’enzymes et de voies métaboliques, d’où le besoin de réguler l’activité des
enzymes pour coordonner les voies métaboliques et permettre une adaptation en temps réel. Il y a
deux grandes possibilités de régulation : soit par contrôle de la disponibilité en enzyme, soit par
contrôle de l’activité enzymatique.
A. Conversion zymogène
Certaines enzymes sont synthétisées sous la forme d’un précurseur inactif (aussi appelé proenzyme
ou zymogène). On va donc transformer l’enzyme pour la rendre active (Un clivage de certaines
liaisons peptidiques engendre ensuite une enzyme active).
Ce processus est surtout présent chez les enzymes utilisées par intermittence (protéases digestives,
facteurs de coagulation) qui doivent par exemple être activées dans un environnement particulier,
parfois différent de leur site de production.
Exemple : Activation simultanée de zymogènes pancréatiques au niveau du duodénum (segment
initial de l’intestin grêle) lors du processus de digestion : le chymotrypsinogène est complètement
inactif. C’est l’activation de la trypsine par une entéropepsidase (L'entéropepsidase est une enzyme
du duodénum qui initie l'activation en cascade des zymogènes, en activant le trypsinogène en
trypsine). La trypsine auto-catalyse ensuite son activation afin d'amplifier la réponse. Elle catalyse
aussi celle d’autres enzymes digestives.
B. Modifications covalentes
Certaines enzymes peuvent être régulées par phosphorylation (par une kinase) et
déphosphorylation (par une phosphatase).
C. Stimulations/Inhibitions par des protéines
Exemple : calmoduline.
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D. Interactions allostériques
On parle d’allostérie pour les enzymes ne répondant pas de manière Michaelienne. Elle sont plus
sensible à la concentration de substrat (pas forcément plus affines au substrat).
1. Monotonie des systèmes michaeliens
Pour tous les systèmes qui suivent la loi de Michaelis, il y a une contrainte, pour faire varier la vitesse
de la réaction on doit faire varier la concentration en substrat (on augmente d’un facteur 100 la
concentration en substrat pour augmenter d’un facteur 10 la vitesse de réaction).
Exemple : S’il y a un transporteur sensible à la concentration en sucre, à une concentration de
0.1Mm le transporteur est inactif, mais à 8.1mM le transporteur s’active (ce n’est pas très rentable).
Il existe des systèmes ne suivant pas la loi de Michaelis.
Ces systèmes sont caractérisés par des représentations
sigmoïdes sur graphique (La réactivité de l'enzyme est
assurée par une hausse sensible de l'activité pour une faible
variation de concentration en substrat) et non hyperboliques.
Ils dépendent de trois facteurs :
Vm
Km
nH (le nombre de Hill, permettant de mesurer le degré de coopérativité et donc de
quantifier l’allostérie).
2. Nombre de Hill
Pour avoir une sigmoïde, il faut que l’affinité change, qu’elle s’améliore. Une enzyme allostérique
contient plusieurs sous-unités : au moins 2 sites. Les enzymes allostériques ont une structure
quaternaire oligomérique. Ces enzymes sont sous la dépendance d'effecteurs se fixant au niveau
d'un site allostérique. Il y a en général un site actif et un site allostérique par protomère.
On parle de coopérativité lorsque la liaison à un substrat va permettre de renforcer la fixation au
second (pour des enzymes liant plusieurs substrats).
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La fixation d'une molécule de substrat sur un protomère fait passer celui-ci d’un état à un autre :
transition allostérique. Cette transition se répercute de proche en proche aux autres protomères.
L’enzyme a d’abord une mauvaise affinité pour le substrat (Km élevé), mauvaise réaction (il faut
beaucoup de substrats). Mais une fois que le substrat est entré, le site actif change de conformation.
Ce changement de conformation est transmis à la deuxième sous unité. Ainsi la liaison du substrat
sur la deuxième sous-unité sera donc bien meilleure.
Le nombre de Hill permet de quantifier l’allostérie mais il ne permet pas de comprendre ce qui se
passe en réalité.
Pour comprendre le fonctionnement de l’allostérie dans la régulation enzymatique,
on a mis en place des modèles allostériques. La transition se répercute de proche en
proche aux autres protomères selon 2 modèles :
Le modèle séquentiel (Koshland) : Le substrat se fixe sur un protomère, ce
qui entraine le changement de sa conformation et facilite le changement de
conformation des autres protomères.
Le modèle concerté (Monod) : Le substrat se fixe sur un protomère, ce qui
entraine un changement de conformation de l’ensemble des protomères
simultanément.
L’allostérie peut se résumer par la régulation de l’activité d’une enzyme fonction de la capacité à
fixer un substrat. Celle-ci peut être améliorée (via coopérativité) ou inhibée.
L’hemoglobine, myoglobine présentent des sites de fixations multiples favorisant l’allostérie et donc
la vitesse de réaction.