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Les indégivrables Xavier Gorce

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LaHaye (Pays-Bas)Correspondance

Vu de LaHaye, c’était «un peucomme une prise d’otage»,raconte une employée de laCour pénale internationale(CPI) peu après la libération,le lundi 2 juillet, de quatre

fonctionnaires de la Cour emprisonnés enLibye pendant plus de trois semaines :«Leursphotosfiguraientsurl’intranet,avecun compteuraffichant les jours,minutes etsecondespassés enprison…»

Après vingt-cinq jours de détention,l’avocate australienneMelindaTaylor, soninterprètelibanaise,HélèneAssaf, lejuristeespagnolEstebanPeralta et l’ex-diplomaterusseAlexanderKhodakov ont été libérés.Ils ont atterri le 2juillet à l’aéroport de Rot-terdam,dansunavionaffrétédepuisTripo-li par l’Italie.

Prèsd’unmoisplustôt, le7juin,MelindaTaylor rencontrait Saïf Al-Islam Kadhafi,incarcéréàZintan(ouestdelaLibye)depuis

le 20novembre2011. Le fils deMouammarKadhafi est poursuivi par la Cour pour cri-mes contre l’humanité mais la Libyebataille pour conduire elle-même le pro-cès. Faute, pour Saïf Al-Islam Kadhafi, depouvoir désigner un avocat, MeTaylor estchargéepar laCourdeveiller sursesdroits.

Visaenpoche,arméed’un laisser-passerdesNationsunies,d’unedécisiondesjuges,MeTaylor vient donc voir son client, com-me elle l’avait fait troismois plus tôt.Maiscette fois, la rencontre tournemal. Le com-mandantdelabrigadedeZintan,AlajmiAliAhmed Al-Atiri, accuse l’avocate d’avoirtransmis au détenu une lettre «codée»signée de son ancien bras droit, Moham-medIsmaïl,enfuitedepuislachutedurégi-me, et l’arrête, avec son interprète libanai-se, pour «atteinte à la sécurité nationale».Les deux autres employés décident de res-ter sur place par solidarité. Ils sont à leurtour incarcérés.

A Tripoli, c’est la cacophonie. CertainsresponsablesduConseilnationaldetransi-tion et du gouvernement assurent que lesquatrefonctionnairesserontlibérésrapide-ment, d’autres accréditent la thèse de l’ac-

cusation. Le procureur général de Libyeannonce une détention provisoire de45jours. A un mois des élections, le com-mandant Al-Atiri se pose enmaître du jeuet affirme que l’avocate sera libérée si elleindique où se trouve Mohammed Ismaïl.«Comme si une Australienne de 36ansavaitplusd’informationsque lesservicesderenseignements libyens…», tempête un deses collègues à LaHaye. Aussitôt, la Courmetsurpiedunecellulede crise.Uneéqui-pe est envoyée sur place pour négocier lalibérationdesquatre fonctionnaires.

Dans un communiqué, la CPI rappelleTripoliàsesobligations: laCouraétésaisiedes crimes commis en Libye par le Conseilde sécurité des Nations unies finfévrier2011.Decefait, laLibyeal’obligationde coopérer, et les employés de l’institu-tion bénéficient de l’immunité. Les prési-dents des tribunaux internationaux, lesassociations internationales d’avocats, etAmnesty International demandent à leurtourla libérationimmédiatedes«quatre».Dansunetribune,l’ancienprocureurdutri-bunal pour l’ex-Yougoslavie, RichardGoldstone,dénonceun«kidnapping».

Mais s’il est question d’un kidnapping,quel a été le montant de la rançon? Plu-sieurs juristes jugent qu’il a été très lourdpour la Courpénale internationale. Le jourde la libération, lundi 2juillet, le présidentde la Cour, Song Sang-hyun, s’est rendu àZintan, pour faire acte de contrition. Il aassuré «regretter profondément l’épiso-de»,ajoutantqu’ils’excusait«pourlesdiffi-cultés qui ont surgi en raison de cette séried’événements», avant d’assurer que laCour enquêterait sur cette affaire et sanc-tionnerait, lecaséchéant, l’avocate.Puis lesZintanisont offertun repas à la délégationde la Cour et aux anciens prisonniers, visi-blementbien traités.

PourquoilaCoura-t-ellechoisides’enga-ger sur le terrain politique plutôt qued’avoir recoursauxarmes légalesdontelledispose, si légères soient-elles? LaCPI pou-vait signaler aux Nations unies, par unedécision judiciaire, la violation, par laLibye,desesobligations.«Mais laFrance, leRoyaume-Uni et les Etats-Unis ne souhai-taient pas une condamnation trop fermeàquelques jours des élections [généralesdu 7juillet]et l’ontfaitsavoiràlaCour», affirmeunresponsablequipréfèregarder l’anony-mat et constate: «Nous sommes face à desEtats puissants qui ne veulent pas nousaider, et de petits Etats, qui ne peuvent pasgrand-chose.»

UnelettreduprésidentdelaCourpénaleinternationale est adressée à New York,maisilfautl’interventiondelaRussie,dontl’un des ressortissants, Alexander Kho-dakov,compteparmilesdétenus,pourquele Conseil réagisse et, dans un communi-

qué daté du 15juin, rappelle Tripoli à sesobligations.LaLibyey répond,détaillant laprocédureen cours. ANewYork, on attendune libération proche, mais elle n’arrivepas.Pendantce temps, laRussie, l’Espagne,leLibanet l’Australietentent,sur leterrain,d’obtenir la libération de leurs ressortis-sants.

Fraîchementnomméministredesaffai-res étrangères en Australie, Bob Carr veutdonner l’impression qu’il joue un rôlemajeur dans l’opération. Après une visiteéclairàTripoli le 17juin, ildemandeaupré-sidentde laCourdeprésenterdes excuses,ajoutant encore à la confusion. AmnestyInternational s’y oppose, lance une péti-tionpour la libérationdesquatre fonction-naires, tandis que la Cour publie un com-muniqué dans lequel elle promet de sanc-tionnerses employéss’ils ont commisunefaute.

Des spécialistes du droit internationalregrettent le recul de la Cour. «Les jugesdevaientordonneràlaLibyederelâcherTay-lor, estime ainsi Kevin JonHeller, de l’uni-versité deMelbourne. La Cour ne peut pasêtre légitime si elle permet que son person-nel soit détenu alors qu’il conduit unemis-sionen sonnom.»

Les manœuvres australiennes ont-ellespayé?Pasvraiment, assure-t-on.LaRussie,l’Espagneet le Libanontmené le travail defond.De sources diplomatiques, on assureque l’intervention discrète de la France etduRoyaume-Uni a permis le dénouementplus rapidede l’affaire.

Beaucoupattendaientqu’unjugelibyenconclue l’affaire. Mais le jour de la libéra-tion, le responsable libyen des relationsavec la Cour, Ahmed Jehani, déclarait à latélévision australienne, avoir compris«depuisledébutquesielle [MelindaTaylor]était présentée devant un juge libyen, ill’aurait relâchée parce qu’elle bénéficie del’immunité».

Côté libyen, le vice-ministredes affairesétrangèresetleprocureurgénéraldeLibye,qui s’était rendu à LaHaye le 22juin pourrencontrerleprésidentdelaCour,auraientété très actifs dans la négociation, danslaquelle le ministre de la défense, OsamaJuwaili, aurait joué un rôle central, assureune source à Tripoli. Originaire de Zintan,M.Juwaili avait participé à l’arrestation deSaïf Al-Islam Kadhafi. Il s’oppose aujour-d’hui au Conseil national de transition,auquel il reprochede lui avoir ôté unepar-tiede sesprérogatives.

Mishana Hosseinioun, étudiante àOxford et amie de Saïf Al-Islam Kadhafi,estime qu’à Zintan, «ils vont l’utiliser pourobtenir le soutien du public, pour rallier lesgens autour de leur drapeau». Pour elle,«onne saura jamaisquel aété leprix».

LaprocédurecontreSaïfAl-Islamdevantla CPI est toujours en cours. Lesmagistratsdoiventdire si la Libye à la capacité logisti-queet lavolontépolitiquede juger sur sonsol le fils de l’ancien dictateur libyen. S’ilsrépondent par l’affirmative à ces ques-tions, l’affaire sera renvoyée.Mais l’affaireTayloraruinétoutepossibilité,pourTripo-li,d’obtenirl’avaldesjuges,estime,commed’autres, Marek Marczynski d’AmnestyInternational. Pour lui, Saïf Al-Islam «nerecevrapasunprocèséquitables’il estpour-suivi en Libye». Depuis plusieursmois, lesautorités libyennes tentent d’obtenir de labrigade de Zintan le transfert de SaïfAl-IslamKadhafi vers uneprisondeTripo-li. Envain.p

StéphanieMaupas

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L ui, «chefdesarmées», aplon-géau largedeBrest, dans leplusmodernedes sous-

marinsnucléaires français lan-ceursde labombe,LeTerrible.Aucunprésidentde laRépubliquene l’avait faitdepuisValéryGis-cardd’Estaingenoctobre1974, afait savoir l’Elysée. FrançoisHol-landeaconsacréuneaprès-midicomplèteà ladissuasionnucléai-re,mercredi4juillet.Auneheurede la côte,parmerbelle, le chefdel'Etata étéhélitreuillépourrejoin-dre lebâtimentde la forceocéani-questratégique,qui rentraitde sasecrètepérégrinationaprèssoixante-quatrejoursdemission.«Leprésidentde laRépubliques’est renduaujourd’hui, en tantquechefdesarmées, au largede laBretagne,auprèsde l’équipagedusous-marinnucléaire lanceurd’en-gin (SNLE)LeTerribleavant sonretourdepatrouille»,a révélé lecommuniquéofficiel publiévers17heures.

Non loinde là, aumêmemoment, àBrest, leministrede ladéfense, Jean-YvesLeDrian,effec-tuaità terreunevisitede labasedesSNLE, le sited’assemblagedestoutnouveauxmissiles interconti-nentauxM51 (52 tonnes, six têtesnucléaireschacun) etdubassindemaintenanceàL’Ile-Longueoù il apu,pour lapremière foisen tantqueministre,maispour laquatriè-mecommebreton,monteràbordduTriomphant.

La continuité affichéeCettedouble séquencen’a pas

été assortie d’undiscoursprési-dentiel pour formuler la doctrinenucléaire française avec lesmotsdunouvel exécutif.M.Hollandel’a déjà fait, en décembre2011puis enmars2012, pendant lacampagneélectorale, affichant la

plus grande continuité.«Par saprésence, il a souhaité réaffirmerl’attachementde la Franceà sa for-ce dedissuasion», a expliqué lecommuniqué.

Le chef des armées, concentrésur le symbole, n’a pas vouludejournalistes, se condamnantausilenceavec lesmarins les plusdiscretsdumonde. Leministreétait, lui, accompagnéde lapres-se, pourdémentir que l’initiativeavait pour but de contrecarrer ledébat relancé il y a quelquesjoursparMichel Rocard (ancienpremierministre) puis PaulQuilès (ancienministrede ladéfense). Le premier a jugé la dis-suasion inabordable – elle pèse3,5milliardsd’eurospar an, soit20%dubudgetd’investissementde la défense. Le second remet encause sonutilitémême.

«Le président voulait le faireavant le 14juillet parce que c’étaitle débutde sonmandat», a indi-quéM.LeDrian. Leministre a pré-cisé: «La concomitancede cesdeuxdéplacementsa une valeursymboliqueet elle est unedémons-trationpolitique, nous sommesdans le creuset denotre sécurité.Nos sous-marins en sont lesgarantsultimes.Notre force dedis-suasionnouspermetde tenirnotre rang international.» Seulsles Etats-Unis, la Russie et la Fran-cemaîtrisent ces technologies,a-t-il été rappelé.

Leministrede ladéfenseadmetque le contextea changédepuis laguerre froideetque lesmenacesontévolué.«Mais les principes res-tent lesmêmes.»Lesmotsnepou-vaientêtreautres, devant les équi-pesde la forceatomique,concen-tréexceptionneldecompétencesetd’engagementnational.p

NathalieGuibert(Brest, Envoyée spéciale)

L’avion ramenant les quatre fonctionnaires de la CPI, dont l’avocate australienneMelinda Taylor, aux Pays-Bas a fait escale à Rome, lundi 2 juillet. GIAMPIERO SPOSITO/REUTERS

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Président : Louis DreyfusDirectrice générale :Corinne Mrejen

FrançoisHollandeetladissuasionsilencieuse

ATripoli,c’estlacacophonie.CertainsresponsablesduConseil

nationaldetransitionetdugouvernementassurentquelesquatrefonctionnairesserontlibérésrapidement,d’autres

accréditentlathèsedel’accusation

«LaFrance,leRoyaume-Uni,etlesEtats-Unis

nesouhaitaientpasunecondamnationtropfermeàquelquesjoursdesélections[du7juillet]»,

affirmeunresponsable

Récit Lesquatre salariésde laCourpénale internationale emprisonnés enLibyependant 25 jours ont été libérés le lundi 2juillet. Leprésidentde laCPIadû faire actede contritionalorsmêmequeTripoli avait violé sesobligations

LesfonctionnairesdelaCPIsontlibres,maisàquelprix?

0123Vendredi 6 juillet 2012

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