Le présent ouvrage fait suite au quatrième colloque de la pratique contractuelle qui s’est tenu à l’Université de Fribourg le 20 novembre 2014. Comme les précé-dents, ce colloque entendait présenter l’actualité en droit des contrats et livrer quelques analyses de fond en cette matière.
Prenant appui sur les nouveautés jurisprudentielles et légales, les contributions réunies dans ce volume font le point sur divers thèmes. Elles ont pour objet les nouveautés dans le contrat de mandat, celles relatives aux contrats de consom-mation, l’état de la jurisprudence suisse dans le droit de la vente internationale, le contrat de transaction, la licéité et l’effectivité de l’obligation de non-concurrence et la responsabilité contractuelle du conseiller fiscal.
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Edité par
Pascal Pichonnaz Franz Werro
La pratique contractuelle 4
Symposium en droit des contrats
www.schulthess.com
ISBN 978-3-7255-8540-3
B401261-Pichonnaz La pratique contractuelle 4_UG.indd Alle Seiten 30.03.15 13:28
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© Schulthess Médias Juridiques SA, Genève · Zurich · Bâle 2015 ISBN 978-3-7255-8540-3
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VII
Sommaire
Avant-propos V Sommaire VII
FRANZ WERRO / ALBORZ TOLOU Le contrat de mandat : quoi de neuf ? 1
PASCAL PICHONNAZ Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation 37
CHRISTIANA FOUNTOULAKIS La vente internationale – quelques développements récents, notamment dans la jurisprudence des tribunaux suisses relative à la CVIM et à la Convention de Lugano 77
MATHIEU ZUFFEREY Résumés de la jurisprudence récente des tribunaux suisses relative à la CVIM (2009 à 2014) 133
BENOÎT CHAPPUIS La responsabilité contractuelle du conseiller fiscal 165
DOMINIQUE DREYER Obligation de non-concurrence : Licite ? Sans effet ? Illicite ? 207
NICOLAS KUONEN Transaction et quittance pour solde de tout compte : quelques aspects choisis 241
37
PASCAL PICHONNAZ*
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
INTRODUCTION 38
I. Les éléments constitutifs du contrat de consommation 39 A. Le professionnel 39 B. Le consommateur 41
1. Le régime en droit européen 41 2. Quelques aspects récents en droit suisse 43
a) Un prêt d’étude 44 b) La notion de consommateur au sens de l’art. 8 LCD 47
II. Le contrat de consommation et les conditions générales 49 A. Le type de clauses abusives en l’absence de liste grise 50
1. La prolongation automatique des contrats de téléphonie mobile 51 2. La modification unilatérale du contrat 52
B. Le droit transitoire 55
III. Un autre élément de droit matériel : le droit de révocation 59 A. Le champ d’application du droit de révocation 59
1. L’état actuel du droit 59 2. Les modifications envisagées 61
B. Les effets de la révocation 63
IV. Et le contrat de consommation sous l’aspect procédural… 64 A. Une notion trop étroite 65
1. En matière de for interne 65 2. En matière de droit applicable 66 3. Vers une définition plus « généreuse » en cohérence avec le droit matériel 67
B. Le droit de recours des associations : une demi-mesure 68
CONCLUSION 69
Bibliographie 72
* Doyen et professeur ordinaire à l’Université de Fribourg. Je remercie vivement Mme Chiara Bottaro,
assistante à la Faculté, pour l’aide qu’elle m’a apportée dans la préparation et la relecture de cette
contribution.
PASCAL PICHONNAZ
38
INTRODUCTION
La notion de « contrat de consommation » est apparue dans la législation suisse à travers
les règles sur les fors et celles en matière de droit international privé, comme consé-
quence directe de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la com-
pétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (Conven-
tion de Bruxelles)1, telle qu'adaptée par les conventions d'adhésion lors des élargisse-
ments successifs de l'Union européenne. La Convention de Lugano du 16 septembre
1988, puis surtout la Convention de Rome de 1980 ont repris le concept, qui fut ensuite
maintenu par la Convention de Lugano révisée (30 octobre 2007)2 et par le Règlement
44/2001 Bruxelles I3 et le Règlement 593/2008 Rome I
4.
Il n’en reste pas moins que le droit suisse développe de plus en plus de règles de droit
matériel qui portent sur les contrats passés entre un consommateur et un fournisseur, que
l’on peut désigner par le terme de contrats de consommation. Toutefois, comme la notion
même de consommateur5 varie en fonction des domaines (infra I. B.), il est certainement
trompeur d’utiliser une notion monolithique du contrat de consommation en l’état actuel
de la législation. C’est la raison pour laquelle nous n’allons examiner ici que quelques
points nouveaux, qui méritent une attention particulière.
Après un bref examen des éléments constitutifs du contrat de consommation (I.), nous
aborderons quelques questions liées au contrat de consommation et aux conditions géné-
rales (II.), pour évoquer ensuite un élément de droit matériel central dans les contrats de
consommation, le droit de révocation (III.), avant présenter quelques aspects de droit de
procédure (IV.).
1 Accessible notamment à la page: http://curia.europa.eu/common/recdoc/convention/fr/c-textes/_
brux-textes.htm (17.12.2014). 2 RS 0.275.12.
3 Règlement (CE) n°44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la
reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, JO L 012 du 16.01.2001
p. 1-23. 4 Règlement (CE) n°593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi appli-
cable aux obligations contractuelles (Rome I), JO L 177 du 4.7.2008 p. 6-16. 5 Pour des considérations juridico-sociologiques en lien avec la notion de consommateur, cf. ROETHE,
Der Verbraucher.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
39
I. Les éléments constitutifs du contrat de consommation
Nous l’avons dit, le contrat de consommation est défini principalement par ses acteurs. Il
s’agit en principe d’un contrat passé entre un consommateur et un professionnel, four-nisseur d’une prestation de service ou de bien6
. Cela signifie dès lors que pour caractéri-
ser le contrat de consommation, il faut préciser la notion de consommateur (B.) et celle
de professionnel (A.).
A. Le professionnel
La notion de professionnel, fournisseur d’une prestation de service ou de biens, ne fait
l’objet que de peu de difficultés7. En effet, il s’agit, d’une part, d’une entité inscrite au
registre du commerce à titre individuel ou comme entreprise recherchant une finalité
professionnelle ou commerciale (art. 934 CO et art. 36 al. 4 ORC)8. D’autre part, même
non inscrit au registre du commerce, un cocontractant peut être considéré comme un
fournisseur professionnel s’il a une activité qui s’inscrit dans la durée et requiert une
certaine organisation, réalisant par là même un certain chiffre d’affaires mensuel9 ; on
peut penser, par exemple, à un vendeur sur Internet qui exercerait cette activité acces-
soire de manière importante. Ainsi, selon les circonstances, même l’exercice d’un hobby
peut amener à qualifier le contractant comme un professionnel.
Certes, on peut encore se demander si le professionnel doit être toujours considéré
comme tel lorsqu’il agit en dehors de son domaine de spécialité. A ce sujet, il est utile de
relever que le droit français a développé divers critères pour aborder ces cas particu-
liers.
Ce fut d’abord le critère de l’incompétence qui fut choisi : la jurisprudence a ainsi con-
sidéré que n’agit pas en tant que professionnel, le commerçant qui conclut un contrat
pour l’installation d’un système d’alarme10
, ou un maçon qui conclut un contrat
d’assurance de protection juridique11
. Ce critère n’était toutefois pas assez précis ; en
effet, il se posait la question de savoir à partir de quand on pouvait considérer qu’un
contractant agissait en dehors de son domaine de compétence.
6 ATF 132 III 268, consid. 2.2.2 ; SCHWENZER, OR AT, N 46.04 ; MARCHAND, Droit de la consomma-
tion, p. 15. 7 Cf. toutefois pour une discussion, FORNAGE, La mise en œuvre, N 162 ss ; MARCHAND, Droit de la
consommation, p. 19 s. 8 FORNAGE, La mise en œuvre, N 171.
9 FORNAGE, La mise en œuvre, N 173 ; MICKLITZ, MünchKomm. § 14 BGB N 18 ss.
10 Cass civ. Ière, 28.4.1987, Bull. Civ. I, n. 134, p. 103.
11 Cass civ. Ière, 20.10.1992, SemJud 1993 II n. 22007, p. 84.
PASCAL PICHONNAZ
40
Le droit français a alors appliqué le critère du rapport direct. Ainsi, l’art. L 121-22 ch. 4
du Code de la consommation ne protège pas la personne physique qui conclut un contrat
en rapport direct avec son activité professionnelle ou commerciale12
. Comme l’a juste-
ment souligné ANNE-CHRISTINE FORNAGE dans sa thèse sur le sujet, ce critère est source
d’insécurité, car trop imprécis. Ainsi, seule une personne physique qui conclut un contrat
à des fins non professionnelles peut prétendre à la qualification de consommateur 13
.
Le critère qui s’est aujourd’hui imposé est plutôt celui de la finalité, à savoir le fait
qu’une activité entre « dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale
ou libérale » ; c’est d’ailleurs la définition reprise par le projet de Règlement relatif à un
droit commun européen de la vente (Common European Sales Law, CESL)14 :
Art. 2 let. e du Projet de Règlement : «professionnel» : toute personne
physique ou morale qui agit à des fins qui entrent dans le cadre de son activité
commerciale, industrielle, artisanale ou libérale15
.
Cet article a toutefois été précisé par le Parlement européen, qui a adopté le projet le
16 février 201416
, de la manière suivante (en anglais) :
Art. 2 let. e du Projet de Règlement : «professionnel» : toute personne phy-
sique ou morale, qu'elle soit publique ou privée, qui agit à des fins qui, pour les contrats concernés, entrent dans le cadre de son activité commerciale, indus-
trielle, artisanale ou libérale17
.
On peut penser qu’il s’agit là d’une expression plus forte encore de la finalité du contrat
pour le contractant, avec dès lors la question sous-jacente de la compétence.
12
Cass civ. Ière, 24.11.1993, arrêt dossier 91-17.753 ; Cass civ. Ière, 8.7.2003, arrêt dossier 02-
10.518 (dans lequel la Cour de cassation a considéré que le curé qui achète une photocopieuse dans le
cadre de son activité pastorale est un consommateur) ; pour un cas d’application du même critère,
cette fois en relation avec les art. L. 132-1 et L. 133-1 du Code de la consommation cf. Cass. civ.
Ière, 24.1.1995, Bull. Civ. I, n. 54 ; CALAIS-AULOY/TEMPLE, Droit de la consommation, p. 12 ;
RAYMOND, Droit de la consommation, N 36. 13
FORNAGE, La mise en œuvre, N 181 ; CALAIS-AULOY/TEMPLE, Droit de la consommation, p. 13 s. 14
WENDEHORST, in : CESL Commentary, art. 2 N 12. 15
Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un droit commun européen
de la vente, COM/2011/0635 final - 2011/0284 (COD). 16
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2014-0159+0+
DOC+XML+V0//FR (10.12.14). 17
Résolution législative du Parlement européen du 26 février 2014 sur la proposition de règlement du
Parlement européen et du Conseil relatif à un droit commun européen de la vente (COM(2011)0635 –
C7-0329/2011 – 2011/0284(COD)) (Procédure législative ordinaire: première lecture),
P7_TA(2014)0159, Amendement 31.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
41
Il restera à voir ce qu’en fera le Conseil européen, puisque ce Règlement doit être ap-
prouvé par une procédure de codécision entre le Parlement et le Conseil européen18
.
B. Le consommateur
La notion de consommateur varie aussi en droit suisse. Elle est parfois très étroite, en
particulier en matière procédurale (art. 32 CPC, mais aussi art. 120 LDIP), parfois plus
large comme en matière de voyages à forfait, où elle englobe les personnes morales
(art. 2 al. 3 LVF), ou dans la loi sur le crédit à la consommation (art. 3 LCC), où elle
n’est pas limitée à des prestations de consommation courante comme à l’art. 32 CPC19
.
Avant d’examiner quelques points spécifiques du droit suisse (2.), il est utile de rappeler
l’un ou l’autre aspect du régime en droit européen (1.).
1. Le régime en droit européen
Dans le système adopté à l’aune du droit européen, il n’y a que deux qualifications pos-
sibles, soit un contractant est considéré comme un professionnel, soit il est considéré
comme un consommateur. La définition de consommateur et de professionnel est ainsi en
miroir.
C’est la raison pour laquelle le consommateur est le plus souvent défini comme une
personne physique qui conclut un contrat qui n’entre pas dans le cadre de son activité
commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, pour reprendre la définition précédente
en négatif. Toutefois, la notion de consommateur n’est pas monolithique, comme nous
l’avons dit ; elle dépend des domaines, que ce soit en droit européen ou en droit suisse.
Cela impose de prendre garde à trop de généralisation. Ainsi, en matière de voyages à
forfait, le consommateur peut être une personne morale20
, alors qu’en matière de crédit à
la consommation tel n’est pas le cas21
. S’agissant de la Directive 93/13 concernant les
clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, la Cour de justice a
rappelé en 2001 que cette Directive ne s’applique qu’aux contrats conclus avec un con-
18
Sur la procédure de codécision, cf. pour tous les autres, BESSON, Droit constitutionnel européen,
p. 65 ss. 19
FORNAGE, La mise en œuvre, N 43 ss ; HOLLIGER-HAGMANN, Artikel 8, N 9 ss. 20
Art. 2 al. 3 let. a LVF « Par consommateur, on entend toute personne qui conclut ou s’engage à
conclure un forfait ». 21
Art. 3 LCC « Par consommateur, on entend toute personne physique qui conclut un contrat de crédit
à la consommation dans un but pouvant être considéré comme étranger à son activité commerciale ou
professionnelle ». Voir aussi BARNIKOL, Die Schutzinstrumente, p. 24 ss.
PASCAL PICHONNAZ
42
sommateur, à savoir une personne physique22
. Cela tient toutefois au texte de l’art. 2
let. b de la Directive, qui le mentionne expressément.
Comme on le sait, la difficulté de la qualification porte notamment sur les activités mixtes, c’est-à-dire pour des contrats qui entrent en partie dans le cadre d’une activité
commerciale, industrielle, artisanale ou libérale et en partie en dehors. Ainsi, un
professeur qui achète un ordinateur à titre privé va certainement l’utiliser également à
des fins professionnelles (pour préparer des examens, des documents ou d’autres textes),
et non pas seulement pour une activité privée. En se fondant également sur la doctrine, la
jurisprudence européenne a défini la limite de la manière suivante (arrêt Gruber23) :
« Le bénéfice de ces dispositions ne saurait en principe être invoqué par une personne qui conclut un contrat pour un usage se rapportant en partie à son activité professionnelle et n’étant donc qu’en partie seulement étranger à celle-ci »24
.
Dit autrement, n’est ainsi un consommateur que celui pour qui la finalité professionnelle du contrat n’est qu’insignifiante25
au moment de la conclusion du contrat. Cette
approche très restrictive peut peut-être se justifier dans la perspective des règles de for,
comme c’était le cas dans l’arrêt Gruber, puisque le for du contrat de consommation est
une règle d’exception. On peut se demander toutefois si le caractère insignifant n’est pas
excessivement restreint pour une analyse de droit matériel26
.
C’est ainsi que le Parlement européen a précisé la notion de consommateur lors de
l’adoption du projet de Règlement relatif à un droit commun européen de la vente
(CESL) :
Art. 2 let. f du Projet de Règlement : «consommateur», toute personne phy-
sique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commer-
ciale, industrielle, artisanale ou libérale; en cas de contrats à double finalité, lorsque le contrat est conclu à des fins qui n'entrent qu'en partie dans le cadre de l'activité professionnelle de l'intéressé et lorsque la finalité professionnelle
22
CJUE 22.11.2001, aff. jointes C-541/99 et C-542/99 : « La notion de «consommateur», telle que
définie à l'article 2, sous b), de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les
clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens
qu'elle vise exclusivement les personnes physiques. » 23
CJCE 20.1.2005, Gruber c. Bay Wa AG, aff. C-464/01, Rec. 2005 I-439 ss. 24
CJCE 20.1.2005, Gruber c. Bay Wa AG, aff. C-464/01, Rec. 2005 I-439 ss, pt 39. 25
CJCE 20.1.2005, Gruber c. Bay Wa AG, aff. C-464/01, Rec. 2005 I-439 ss, pt 41. 26
Du même avis cf. MARCHAND, Droit de la consommation, p. 18, pour lequel le critère de la prépon-
dérance est préférable.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
43
est si limitée qu'elle n'est pas prédominante dans le contexte global du contrat, cette personne est également considérée comme un consommateur ;27
Reprenant en cela l’approche plus large posée par le considérant 17 de la Directive euro-
péenne 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs28
, le
Parlement entend donc donner une portée plus large aux règles de protection contenues
dans le futur droit commun européen de la vente. Ainsi, dans une activité mixte permet-
tant de maintenir la qualification de consommateur, la part professionnelle ne devra pas
être insignifiante, mais ne devra pas être prédominante compte tenu de l’ensemble du
contrat. Certes, le critère reste d’un maniement difficile, mais il est vrai qu’il y a souvent
des utilisations mixtes qui ne justifient pas a priori une exclusion de toute protection.
Cette compréhension de l’usage mixte devrait permettre une meilleure cohérence de la
définition de consommateur entre les divers actes européens.
2. Quelques aspects récents en droit suisse
Ces développements européens ne sont pas anodins pour le droit suisse. En effet, chez
nous également, il peut y avoir des contrats passés par des contractants dont la part pro-
fessionnelle peut être insignifiante ou alors non prépondérante. Par exemple, on peut se
demander si l’octroi d’un prêt pour une petite rénovation d’une villa dans laquelle se
trouve un bureau pour l’activité professionnelle de courtier d’un conjoint est encore un
prêt octroyé à un consommateur au sens de l’art. 3 LCC. Cet article définit en effet le
consommateur de la manière suivante :
Par consommateur, on entend toute personne physique qui conclut un contrat de
crédit à la consommation dans un but pouvant être considéré comme étranger à
son activité commerciale ou professionnelle.
L’expression « étranger à son activité commerciale ou professionnelle » suppose-t-elle
qu’une utilisation mixte, même partielle, exclut d’emblée d’appliquer la Loi du 23 mars
27
Résolution législative du Parlement européen du 26 février 2014 sur la proposition de règlement du
Parlement européen et du Conseil relatif à un droit commun européen de la vente (COM(2011)0635 –
C7-0329/2011 – 2011/0284(COD)) (Procédure législative ordinaire: première lecture),
P7_TA(2014)0159, Amendement 32. 28
Considérant 17 : « La définition de consommateur devrait englober les personnes physiques qui
agissent à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de leur activité commerciale, industrielle, artisanale
ou libérale. Cependant, en cas de contrats à double finalité, lorsque le contrat est conclu à des fins qui
n’entrent qu’en partie dans le cadre de l’activité professionnelle de l’intéressé et lorsque la finalité
professionnelle est si limitée qu’elle n’est pas prédominante dans le contexte global du contrat, cette
personne devrait également être considérée comme un consommateur ».
PASCAL PICHONNAZ
44
2011 sur le crédit à la consommation (LCC)29
? Tel ne semble pas être le cas. La doctrine
indique comme critère décisif celui de l’usage prépondérant : si l’usage pour une activité
privée semble plus important que celui pour une activité professionnelle (commerciale,
industrielle, artisanale ou libérale), on admettra l’application de la LCC. Le fait qu’un
preneur de crédit utilise parfois le bien acquis à crédit à des fins professionnelles ne
devrait donc pas exclure à lui seul l’application de l’art. 3 LCC.
Pour juger de l’usage prépondérant, il faut prendre en considération le but du crédit tel qu’il était reconnaissable de bonne foi par le prêteur au moment de la conclusion du contrat. Le prêteur doit en effet se rendre compte des obligations légales qu’il devra
respecter s’il conclut un contrat de prêt à la consommation30
.
a) Un prêt d’étude
Dans un arrêt du 26 février 2013 (ATF 139 III 20131), le Tribunal fédéral a dû se poser la
question de la qualification de « consommateur » au sens de la Loi fédérale sur le crédit à
la consommation.
Il s’agissait d’une personne qui avait contracté en septembre 2003 un crédit avec une
banque pour financer ses études de droit à Berne. Le contrat de base s’intitulait : « Bil-dung plus-Kreditvertrag » ; il devait financer durant plusieurs années la formation uni-
versitaire de l’emprunteur et portait sur une somme de Fr. 20'000.-. L’intérêt de 3,25 et
3 % devait être capitalisé jusqu’à la fin de la formation. En novembre 2004, il fut porté à
Fr. 35'000.- et en janvier 2007 à Fr. 37’000.-. Le prêteur n’a jamais effectué d’examen de
la capacité de contracter un crédit au sens de l’art. 28 LCC, mais il avait tout de même
demandé l’établissement d’un budget détaillé avant l’octroi de la limite de crédit en
2004.
À la fin de la période de prêt, l’étudiant indiqua qu’il n’avait pas terminé ses études, qu’il
était endetté de manière trop importante pour pouvoir rembourser. Les parties n’ayant pu
s’entendre sur un remboursement par tranches, l’institution de prêt dénonça le prêt le
7 août 2009 et exigea le remboursement de Fr. 37'939.78 jusqu’au 31 août 2009.
Après la décision du président du Tribunal régional Bern-Mittelland et l’arrêt du Tribunal
cantonal bernois, qui tous deux admettaient une créance de l’institution de prêt à hauteur
de Fr. 37'000.-, représentant le capital prêté, l’affaire fut portée devant le Tribunal fédéral
par la voie du recours en matière civile.
29
RS 221.214.1. 30
CR-FAVRE-BULLE, art. 3 LCC N 12 s. ; BARNIKOL, Die Schutzinstrumente, p. 26 s. ; MARCHAND,
Droit de la consommation, p. 214. 31
SJ 2013 I 389 (rés.).
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
45
La question centrale était celle de savoir si la LCC était ou non applicable, en d’autres
termes, s’il fallait considérer cet étudiant comme un consommateur au sens de l’art. 3
LCC, ce que les instances précédentes avaient nié. En effet, elles ont principalement
considéré que le législateur avait voulu par la LCC protéger les ménages privés contre le
surendettement, ce qui permettait d’exclure les prêts en lien avec une activité profession-
nelle (même future) qui permettrait de rembourser le prêt.
Le Tribunal fédéral constate d’abord que le texte de l’art. 3 LCC ne permet pas de ré-
pondre clairement à la question de savoir si un prêt tendant à financer des études
tombe ou non sous le coup de la LCC. En effet, il relève à juste titre que l’activité profes-
sionnelle dont il s’agit à l’art. 3 LCC peut aussi être future32
; en d’autres termes, un prêt
octroyé en vue de poser les bases d’une activité professionnelle future sort du champ
d’application de l’art. 3 LCC, comme l’a d’ailleurs relevé – certes dans le domaine de la
Convention de Bruxelles– la Cour de Justice de l’Union européenne dans l’affaire Den-talkit33.
Selon le Tribunal fédéral, le législateur voulait surtout protéger les consommateurs qui
n’étaient pas en mesure d’apprécier correctement leur capacité de rembourser un prêt ou
leur situation financière ; en outre, on envisageait aussi le fait que les instituts de crédits
fixaient des taux usuraires et faisaient de la publicité agressive en la matière. Or, pour un
prêt d’étude, la situation est très différente, car il ne s’agit pas d’un prêt classique fondé
sur l’idée « acheter aujourd’hui, payer demain » (ATF 139 III 201 consid. 2.5.4). D’une
part, la décision de conclure un tel prêt n’est pas impulsive, mais repose sur l’idée d’une
planification d’études sur plusieurs années, une profession à venir plus ou moins déter-
minée, partant sur une analyse de la situation souvent minutieuse. D’autre part, le contrat
en question prévoyait justement des conditions particulières avec un taux d’intérêt bas et
une capitalisation des intérêts durant les études. Soumettre un tel contrat à la LCC re-
viendrait pratiquement à en empêcher sa conclusion34
.
Enfin, le prêt constitue un fondement de base pour l’exercice d’une profession future ; il
doit donc être ramené à un prêt qui n’est pas étranger à une activité professionnelle, ce
qui justifie l’exclusion d’un prêt d’étudiant du champ d’application de la LCC.
Cet arrêt est intéressant à plus d’un titre :
i) Une portée aux conséquences potentielles importantes. En effet, cet arrêt a pour
conséquence que tout prêt tendant à financer une formation plus ou moins professionna-
lisante – apprentissage, études gymnasiales ou universitaires ou d’une haute école–, est
32
Dans le même sens not. STAUDER, TDP X, p. 233 nbp 53 ; BK-GIGER, N 534 ; BSK-KOLLER-
TUMLER, art. 3 LCC N 2 ; KOLLER-TUMLER, Konsumkredite, p. 29 nbp 27. 33
CJCE 3.7.1997, Francesco Benincasa contre Dentalkit Srl, aff. C-269/95. 34
ATF 139 III 201/207 c. 2.5.4, qui prend appui sur KOLLER-TUMLER, Konsumkredite, p. 26.
PASCAL PICHONNAZ
46
exclu du champ d’application de la LCC. En d’autres termes, on réduit le champ
d’application de la LCC, en excluant, de facto du moins, les prêts à la formation, en
considérant principalement qu’ils tendent à poser les bases d’une profession et ne sont
donc pas étrangers à une activité professionnelle, commerciale35
.
Cette situation rappelle certes l’arrêt Dentalkit36, où le contrat prévoyait une franchise en
vue de créer et d’exploiter un magasin à Munich ; mais il faut souligner que l’entreprise
considérée était tout à fait déterminée et prévue dans un futur proche. Dans l’arrêt du
Tribunal fédéral toutefois, l’activité professionnelle était encore relativement indétermi-
née, voire incertaine. Le Tribunal fédéral semble d’ailleurs conscient du fait que
l’argument d’une profession à venir n’est pas le plus fort qui soit, puisqu’il l’évoque en
quelque sorte du bout des lèvres à la fin de l’arrêt.
ii) Une définition du consommateur qui dépend du but du contrat. Le Tribunal fédé-
ral n’examine pas si le prêt a une fonction mixte ; on pourrait en effet considérer qu’une
part importante de celui-ci vise uniquement la survie au quotidien (louer une chambre,
manger) de l’étudiant et que seule une part infime du montant vise à financer les études
proprement dites et donc la profession ultérieure. Contrairement à l’arrêt Dentalkit, où le
prêt servait directement à l’achat du matériel et la préparation des locaux pour l’activité
professionnelle, ici l’usage professionnel n’est que très indirect. Le but du prêt est avant
tout de pouvoir survivre au quotidien durant les études en couvrant les besoins essentiel-
lement de base.
L’analyse du Tribunal fédéral passe par la définition de consommateur. Celle-ci se fait
en lien avec le besoin de protection, d’une part, face à des contrats à tendance lésion-
naire, et le besoin d’information, d’autre part, face à des contrats conclus de manière
précipitée, sans réflexions approfondies. Le Tribunal fédéral nie alors ces deux éléments
pour le contrat de prêt d’étude et de formation, excluant ainsi la qualification de con-
sommateur pour un critère matériel, plutôt que structurel.
Cet arrêt montre ainsi bien que la notion de consommateur est en quelque sorte une notion juridique indéterminée, un concept « mou », qui doit permettre de décider – en
l’occurrence pour ainsi dire au cas par cas – si un contrat déterminé doit ou non tomber
sous le coup des règles protectrices considérées. Cette approche « pragmatique » est dans
35
Pour exclure ce type de prêt, cf. ég. BK-GIGER, N 534 ; BSK-KOLLER-TUMLER, art. 3 LCC N 2 ;
SIMMEN, Barkredit, p. 42 ; STENGEL, Anwendungsbereich, p. 26 N 83 ; LUPI THOMANN, Die An-
wendung, p. 29. 36
CJCE 3.7.1997, Francesco Benincasa contre Dentalkit Srl, aff. C-269/95.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
47
la ligne des développements récents de la jurisprudence liée au pluralisme méthodolo-
gique pragmatique37
.
b) La notion de consommateur au sens de l’art. 8 LCD
Ce constat nous amène à nous demander comment définir la notion de « consommateur »
introduite par le Parlement fédéral à l’art. 8 LCD. Cette nouvelle disposition, entrée en
vigueur le 1er juillet 2012, permet notamment un contrôle des conditions générales
« commerciales » abusives.
La notion de consommateur n’est définie ni à l’art. 8 LCD, ni dans la LCD elle-même38
. Le terme est toutefois utilisé à plusieurs reprises dans la loi (art. 3 al. 1 let. n,
art. 10 al. 2 let. b, art. 16 al. 1, art. 19 al. 2 LCD) et renvoie indirectement à la notion
prévue par l’Ordonnance sur l’indication des prix (OIP)39
, qui se fonde sur la LCD. Or,
l’art. 2 al. 2 OIP dispose qu’ « [e]st réputée consommateur toute personne qui achète une marchandise ou une prestation de service à des fins qui sont sans rapport avec son acti-vité commerciale ou professionnelle ». Une telle définition, se trouvant dans une Ordon-
nance, ne saurait s’imposer sans une analyse des exigences requises par l’art. 8 LCD.
Toutefois, elle reprend une caractéristique habituelle, à savoir que le consommateur doit
agir à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle (art. 3 let. b
Directive 93/13). Il nous semble juste dès lors d’avoir une définition autonome de la
notion de consommateur, comme le suggèrent divers auteurs40
.
Une première question qui pourrait se poser en rapport avec l’interprétation de la notion
de consommateur au sens de l’art. 8 LCD est celle de savoir si la limitation prévue par
l’art. 32 al. 2 CPC – qui réduit le champ d’application de cette disposition de droit pro-
cédural aux contrats portant sur une prestation de consommation courante (infra IV.) –
s’applique aussi à cette nouvelle disposition de la LCD. Au vu du but protecteur de cet
article, une telle limitation ne se justifie pas. En effet, le besoin de protection spécifique
qui découle de l’art. 8 LCD induit à favoriser une interprétation extensive de la notion de consommateur41
. Par conséquent, on ne distinguera pas selon que le consommateur
37
Sur une présentation de l’impact du pluralisme méthodologique pragmatique sur le droit des obliga-
tions, cf. not. PICHONNAZ, Le centenaire, en part. p. 205 ss. 38
DUPONT, Le nouvel article 8 LCD, p. 107 ; EISNER-KIEFER, AVB, p. 104 ; KUONEN, Le contrôle des
conditions générales, p. 7 s. 39
RS 942.211. 40
JUNG, in : UWG Kommentar, art. 1 LCD N 36 ; JUNG, Die systematische Stellung, p. 152 ; PROBST,
Die richterliche Inhaltskontrolle, p. 223 ss, en part. p. 246 s. ; contra not. SCHWENZER, OR AT,
N 46.04, qui souhaite simplement appliquer la définition de l’art. 32 al. 2 CPC. 41
Déjà PICHONNAZ, Le nouvel art. 8 LCD, p. 141 ; voir aussi BRUNNER/DÜRR, Die Totalrevision,
p. 275 s. ; B. CARRON, La protection, p. 145 s., N 14 ss ; JUNG, Die systematische Stellung,
p. 152 s. ; KOLLER, Art. 8 UWG : Eine Auslegeordnung, 32 s. ; KUONEN, Le contrôle des conditions
générales, p. 9 ; SCHMID, Die Inhaltskontrolle, p. 9 ; STÖCKLI, Aufbruch, p. 202 ; STÖCKLI, Der neue,
PASCAL PICHONNAZ
48
achète une machine à café pour sa maison, ou qu’il conclut un contrat d’assurance sur la
vie42
.
Ensuite, il faut rappeler que le Parlement a opposé les consommateurs aux entreprises
commerciales («Gewerbetreibende»). Ainsi, sera un consommateur le maître d’ouvrage
qui souhaite construire une maison individuelle, mais aussi celui qui souhaite acquérir
une propriété par étages sur plan43
. Cela vaudra même si certaines pièces sont utilisées
pour une activité professionnelle ; on devra en effet appliquer en la matière le principe de
la prépondérance rappelé plus haut44
.
La question de savoir si une personne morale qui n’agit pas à des fins commerciales ou
industrielles peut invoquer l’art. 8 LCD n’est pas simple. Certains auteurs rejettent
l’idée45
. A notre avis, toutefois, il nous semble conforme à la fois au but visé par l’art. 8
LCD et au besoin de protection spécifique auquel répond cette norme d’admettre que
cette disposition peut s’appliquer à des personnes morales sans but lucratif46
.
Le texte ne permet pas de tirer de conclusion. Il est également difficile de dégager une
solution des seuls débats parlementaires, car le point n’a jamais été thématisé. Lors de
l’ultime séance de discussions après la séance de conciliation, Mme Markwalder (Con-
seillère nationale) a précisé le champ d’application de l’art. 8 LCD en disant: « Der Ständerat hingegen hat einen Kompromissvorschlag ausgearbeitet, der nur die Konsu-mentinnen und Konsumenten, nicht aber den Geschäftsverkehr erfasst»47
, ce qui peut
laisser entendre qu’elle n’envisageait que des personnes physiques. Le Conseiller fédéral
Johann Schneider-Ammann en a fait de même le même jour. Il peut toutefois aussi s’agir
uniquement de l’usage habituel d’une tournure pour désigner le consommateur, sans que
p. 186 ; COENDET, Gesetzgebungsstrategie, p. 60 ; contra : FURRER, Eine AGB-Inhaltskontrolle,
p. 325 ; MARCHAND, Art. 8 LCD, p. 330 ; SCHOTT, Missbräuchliche Allgemeine Geschäftsbedin-
gungen, p. 79 ; HESS/RUCKSTUHL, AGB-Kontrolle, p. 1195. 42
EISNER-KIEFER, AVB, p. 104 s. ; BSK-THOUVENIN, art. 8 LCD N 83 ; contra not. SCHWENZER, OR
AT, N 46.04. 43
STÖCKLI, Der neue Art. 8 UWG, p. 186. 44
Pour tous les autres, FORNAGE, La mise en œuvre, N 188 ss. 45
BSK-THOUVENIN, art. 8 LCD N 82 ; BOHNET, Clauses procédurales, p. 87 s. ; EISNER-KIEFER, AVB,
p. 105 s. ; HESS/RUCKSTUHL, AGB-Kontrolle, p. 1195 ; KOLLER, Art. 8 UWG : Eine Auslegeord-
nung, p. 34 ; SCHMID, Die Inhaltskontrolle, p. 8 s. ; SUTTER/LÖRTSCHER, Klagerecht des Bundes,
p. 99. 46
Déjà PICHONNAZ, Le « consommateur », p. 88 ss ; PICHONNAZ, Clauses abusives et pratiques dé-
loyales, p. 36 s. ; PICHONNAZ, Le nouvel art. 8 LCD, p. 141 s. ; TERCIER/PICHONNAZ, Le droit des
obligations, N 886 ; du même avis, JUNG, Die systematische Stellung, p. 153 ; question laissée indé-
cise KUONEN, Le contrôle des conditions générales, p. 8 s. ; STÖCKLI, Aufbruch, p. 202 s. ; STÖCKLI,
8 UWG, p. 177. 47
BOCN 2011 p. 1227.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
49
l’on doive ici considérer une volonté claire du législateur de restreindre le champ
d’application aux seules personnes physiques.
En outre, l’art. 2 al. 2 OIP ne restreint pas son champ d’application aux personnes mo-
rales48
; la parenté proche entre la LCD et l’OIP pourrait justifier d’envisager qu’une
fondation p. ex. qui construit un immeuble à des fins non lucratives ou non commerciales
puisse invoquer l’art. 8 LCD. En effet, compte tenu du but de la LCD, qui vise avant tout
à « garantir, dans l’intérêt de toutes les parties concernées, une concurrence loyale et qui
ne soit pas faussée » (art. 1 LCD), la restriction de la protection aux seuls consomma-
teurs est une exception qui doit être interprétée restrictivement en l’espèce.
En l’absence d’indication dans le Message du Conseil fédéral sur la notion de consom-
mateur (et pour cause puisque la disposition ne visait pas les seuls consommateurs à ce
stade du processus législatif) et compte tenu du fait que les débats n’ont jamais spécifi-
quement discuté la question, il faut retenir que le but de l’art. 8 LCD commande de
l’appliquer aux contrats passés entre professionnels et consommateurs, par quoi il faut
aussi entendre une personne morale si celle-ci n’agit pas à des fins commerciales. En
effet, on peine à voir pour quelle raison par exemple celui qui conclut une assurance à
des fins non professionnelles serait protégé contre des conditions générales abusives s’il
est une personne physique, mais qu’il ne le serait pas s’il est une personne morale49
.
Certes, la discussion peut finalement s’avérer moins importante qu’il n’y paraît au pre-
mier abord, si l’on part du principe que la mise en œuvre du régime de la clause insolite,
qui permet un contrôle indirect du caractère abusif de conditions générales en présence
de professionnels, risque d’être influencée par la jurisprudence relative à l’art. 8 LCD50
.
II. Le contrat de consommation et les conditions générales
Depuis l’entrée en vigueur le 1er juillet 2012 du nouvel article 8 LCD, il y a eu une im-
portante littérature sur le sujet51
, mais encore peu d’arrêts en la matière. Nous allons
48
PICHONNAZ, Clauses abusives et pratiques déloyales, p. 36 s. ; PICHONNAZ, Le nouvel art. 8 LCD,
p. 141 ; KUONEN, Le contrôle des conditions générales, p. 8. 49
Dans ce sens déjà, WERRO, La responsabilité, N 541. 50
Dans ce sens déjà PICHONNAZ/FORNAGE, Le projet de révision, p. 292 ; PICHONNAZ, Clauses abu-
sives et pratiques déloyales, p. 38 ; ég. pour une discussion, KUONEN, Le contrôle des conditions gé-
nérales, p. 23 ss, en particulier p. 26. 51
Parmi d’autres : BIERI, Qu’apporte le nouvel article 8 LCD ; BIERI, Le contrôle judiciaire ; BOHNET,
Clauses procédurales ; BÜHLER/STÄUBER, Die AGB-Kontrolle ; DUPONT, Le nouvel article 8 LCD ;
FURRER, Eine AGB-Inhaltskontrolle ; HESS/RUCKSTUHL, ABG-Kontrolle ; KOLLER, Art. 8 UWG :
PASCAL PICHONNAZ
50
toutefois reprendre deux aspects qui nous paraissent importants : (A.) Le type de clauses
abusives en l’absence de liste grise et leur fréquence ; (B.) l’application de l’art. 8 LCD
sur les contrats en cours (le droit transitoire).
A. Le type de clauses abusives en l’absence de liste grise
La Directive européenne 93/13/CEE du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives
dans les contrats conclus avec les consommateurs52
contient une « liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives » (Art. 2 al. 3) qui figure en
Annexe de la directive. On parle de « liste grise », dès lors qu’une clause contractuelle
qui figurerait dans cette liste n’est pas encore nécessairement abusive ; il faut analyser la
clause pour déterminer si tel est le cas. Il s’agit toutefois d’un indice fort53
.
Les Etats membres ont repris de telles listes grises54
, parfois en y ajoutant des listes
noires, contenant donc des clauses considérées comme abusives dans tous les cas55
.
Le législateur suisse n’a pas voulu reprendre une telle liste grise. Toutefois, encouragé
notamment par la Commission fédérale de la Consommation, le SECO en charge de la
mise en œuvre de la LCD au niveau fédéral a publié une liste grise informelle qui figure
sur le site Internet du SECO56
. Cette liste reprend les clauses qui pourraient être abusives
selon les diverses législations européennes. Il s’agit là d’une aide importante pour les
plaideurs, qui souhaiteraient envisager leurs chances de succès. En effet, pour chaque
type de clause, il y a des références vers les listes nationales.
Eine Auslegeordnung ; KUONEN, Le contrôle des conditions générales ; SCHMID, Die Inhaltskon-
trolle ; STÖCKLI, Der neue Art. 8 UWG. 52
Directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats
conclus avec les consommateurs, JO n° L 095 du 21.04.1993 p. 0029 – 0034. 53
SCHMID, Die Inhaltskontrolle, p. 15 s. D’un avis plus nuancé, BIERI, Le contrôle judiciaire, p. 54 nbp
21, qui conseille de s’inspirer avec prudence de cette liste grise, puisque pour juger du caractère abu-
sif d’une clause il faudra surtout faire une évaluation globale du contrat et examiner l’ensemble des
clauses. 54
Tous les Etats-membres en repris la liste de l’annexe de la Directive 93/13/CEE, parfois en faisant de
celle-ci une liste grise en tout ou en partie, cf. not. Art. R 132-2 Code (français) de la consommation ;
BGB § 308 ; art. 6.235 Code civil néerlandais (NBW), parfois une liste noire en tout ou en partie.
Pour une analyse détaillée, cf. l’étude sur la question : Consumer Law Compendium, Part 2c, (M.
EBERS) p. 341 ss, en part. 397 ss, accessible à la page : www.eu-consumer-law.org/consumerstudy
_part2c_en.pdf (17.12.2014). 55
Cf. not. Art. R 132-1 Code (français) de la consommation ; BGB § 309 ; art. 6.236 Code civil néer-
landais (NBW). 56
http://www.seco.admin.ch/themen/00645/00653/05171/index.html?lang=fr (17.12.2014).
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
51
1. La prolongation automatique des contrats de téléphonie mobile
Jusqu’au début de cette année 2014, il était usuel de trouver dans les contrats de télépho-
nie mobile des clauses dites de roll-over, à savoir des clauses qui avaient pour consé-
quence que le contrat de téléphonie mobile était renouvelé tacitement s’il n’était pas
dénoncé dans un délai d’avis avant la fin de la période de durée déterminée. Le contrat
repartait alors pour une nouvelle période (le plus souvent de deux ans).
Grâce à l’entrée en vigueur de l’art. 8 LCD, le SKS (Stiftung für Konsumentenschutz), le
magazine Beobachter, la FRC (Fédération Romande des Consommateurs) et l’ACSI
(Associazione cosumatrici e consumatori della Svizzera Italiana) ont obtenu la décision
unilatérale des opérateurs de téléphonie mobile Sunrise et Orange de renoncer à ces
clauses de roll-over57
dès que la première période (généralement deux ans)
d’amortissement d’un appareil subventionné par l’opérateur est échue. Swisscom avait
déjà renoncé à cette clause en 201158
.
Ces modifications sont les bienvenues. En effet, de telles clauses se trouvent sur les listes
grises européennes et sont donc présumées abusives, à moins que le professionnel puisse
démontrer que tel n’est pas le cas, compte tenu de l’ensemble des droits et obligations du
contrat. Ainsi, l’annexe à la Dir. 93/13 ch. 1 let. h contient une indication d’une clause grise (clause potentiellement abusive au sens de l’art. 3 al. 3) dont la teneur est la sui-
vante :
« 1. Clauses ayant pour objet ou pour effet: […] h) de proroger automatiquement un contrat à durée déterminée en l'absence d'expression contraire du consommateur, alors qu'une date excessivement éloignée de la fin du contrat a été fixée comme date limite pour exprimer cette volonté de non-prorogation de la part du consommateur; ».
On trouve évidemment ce type de clauses encore dans de nombreux autres contrats de la
vie courante, comme celui des fitness59
. Il nous semble donc juste d’admettre le carac-
57
Orange, point 10 des conditions contractuelles : « Le Contrat d’abonnement est généralement conclu pour une durée illimitée, sauf si une durée minimale du Contrat a été stipulée dans le contrat d’abonnement. Si le Contrat d’abonnement n’est pas résilié dans les délais, au terme de la durée mi-nimale du Contrat applicable, il est automatiquement reconduit pour une année de plus. » ; Sunrise,
point 11 : « Si le contrat conclu pour une durée déterminée n’est pas résilié, il est tacitement recon-duit pour une durée d’une (1) année. ».
58 Cf. les échos dans la presse : FRC Mieux choisir, No 67 avril 2014 « Clauses abusives: un succès qui
se répercutera sur d’autres branches», Elisabeth Kim ; Beobachter No 6/2014 « Telekomenfirmen
geben endlich nach », Martin Müller ; Medienmitteilung SKS, 14 mars 2014 « Grosser Erfolg in der
Mobiltelefonie », https://www.konsumentenschutz.ch/medienmitteilungen/2014/03/grosser-erfolg-in-
der-mobiltelefonie/ (17.12.2014). 59
Pour un exemple de clause de renouvellement automatique en matière de contrat de fitness, cf. ATF
140 III 401 (4A_475/2013). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral s’est pourtant abstenu de qualifier la
PASCAL PICHONNAZ
52
tère abusif a priori de telles clauses, sous réserve d’une appréciation et de la preuve que
le caractère abusif disparaît en raison d’autres avantages qui ont déterminé et qui justi-
fient la prolongation automatique du contrat. Pour que ces clauses ne soient pas quali-
fiées d’abusives, on devrait à tout le moins prévoir, dans ces conditions générales ou
dans le contrat, un droit de résiliation pour justes motifs (p. ex. en raison d’un départ à
l’étranger, d’une maladie ou de toutes autres situations justifiant une résiliation antici-
pée). Il faut rappeler que ce droit à une résiliation pour justes motifs est reconnu par la
jurisprudence pour tout contrat de durée, indépendamment d’une règle légale60
. Une telle
règle devrait donc s’imposer à tout contrat de consommation également.
Toutefois, indépendamment de l’existence d’un juste motif, la clause de roll-over est déjà
sujette à caution. Pour qu’elle ne tombe pas sous la liste grise et la présomption de clause
abusive, il serait nécessaire que le fournisseur annonce à son client que le contrat va
prendre fin et qu’il a un délai de résiliation à exercer jusqu’à une date déterminée. En
exigeant du partenaire commercial qu’il soit proactif, on rétablit un certain équilibre
contractuel et on permet ainsi de justifier la reconduction tacite.
En matière de contrat de bail (art. 266 al. 2 CO) ou de contrat de travail (art. 334 al. 2
CO), on prévoit certes la possibilité pour un contrat de durée déterminée d’être renouvelé
tacitement, mais ces contrats deviennent alors des contrats à durée indéterminée. Cela
ouvre alors un droit de résiliation ordinaire légale, avec un délai de résiliation connu et
de durée modérée. Or, il n’en va pas de même pour les autres types de contrat. La pro-
longation tacite conduit à un nouveau contrat de durée déterminée, sans possibilité de
résiliation ordinaire. Pour éviter le caractère abusif de ce type de prolongation en cas-
cade, le fournisseur devrait au moins être tenu d’informer son client de l’échéance du
contrat de durée déterminée et du délai pour faire savoir qu’il n’entend pas que le contrat
soit renouvelé pour une nouvelle période déterminée61
; toutefois, même dans cette hypo-
thèse, il faut éviter que le délai de dénonciation soit trop éloigné du terme62
.
2. La modification unilatérale du contrat
Certaines conditions générales contiennent des règles permettant au fournisseur
d’adapter de manière unilatérale le contrat de consommation63
. Du point de vue du four-
clause litigieuse, puisqu’au moment de la prolongation automatique contestée l’art. 8 LCD n’était de
toute façon pas encore en vigueur (cf. infra B.). 60
ATF 133 III 360 consid. 8.1, SJ 2007 I 482*; ATF 128 III 428, consid.3, JdT 2005 I 284 ; cf. ég.
ZEN-RUFFINEN–VENTURI, La résiliation ; ZEN-RUFFINEN–VENTURI, SJ 2008 p. 1 ss. 61
MAISSEN, Die automatische Vertragsverlängerung, N 402 ss; MAISSEN, AGB, p. 259 s. 62
Cf. ég. MAISSEN, Die automatische Vertragsverlängerung, N 325 ss (et les réf.) ; MAISSEN, AGB,
p. 254, p. 256 s. 63
Pour une analyse de telles clauses, cf. not. KUONEN, Le contrôle des conditions générales, p. 14 ss.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
53
nisseur, cela se justifie notamment par le fait qu’il faut assurer une gestion contractuelle
la plus uniforme possible64
. Toutefois, une telle pratique a été condamnée par le Tribunal
fédéral dans l’ATF 135 III 1, en particulier lorsqu’une telle clause de modification unila-
térale n’était pas assortie d’un droit de résiliation immédiat65
. D’ailleurs, le droit euro-
péen a placé de telles clauses de modification unilatérale dans le groupe de clauses qui
sont présumées abusives (Annexe à la Dir. 93/13 ch. 1 let. j), à moins que ne soit mis à
charge du professionnel un devoir d’informer dans un délai raisonnable le consommateur
de la modification et que ce dernier ait un droit de résilier immédiatement le contrat
(Annexe à la Dir. 93/13 ch. 2 let. b, 2e §). Encore faut-il que l’information soit suffisam-
ment claire et qu’elle porte aussi sur le droit de résiliation du contrat66
, le fait que les
conditions générales renvoient à un texte législatif ou réglementaire stipulant les droits et
les obligations des parties n’est pas suffisant67
. Il faut évidemment que le droit de résilia-
tion puisse effectivement être exercé, sinon la clause demeure abusive68
.
Selon le droit français, une telle clause de modification unilatérale est abusive de ma-
nière irréfragable (liste noire). L’article R 132-1 Code (français) de la consommation dispose en effet ce qui suit :
« Dans les contrats conclus entre des professionnels et des non-professionnels ou des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions du premier et du troisième alinéas de l'article L. 132-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : […] 3° Réser-
64
Pour une présentation du problème et de ses enjeux, cf. not. RUSCH/HUGUENIN, Einseitige Ände-
rungsrechte, p. 37 ss. 65
ATF 135 III 1 consid. 3.3, JdT 2011 II 516 « Contrairement à l’opinion de l’instance inférieure, les
recourants ne pouvaient pas, au moment de la conclusion du contrat, s’attendre à ce que les fonde-
ments contractuels changent durant le contrat, sans que la possibilité de résilier le contrat leur soit
alors ouverte. ». 66
CJUE 26.04.2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság c. Invitel Távközlési Zrt, aff. C-472/10, pt. 29. 67
CJUE 21.03.2013, RWE Vertrieb AG c. Verbraucherzentrale Nordrhein-Westfalen eV., aff. C-92/11,
pt. 50. 68
CJUE, arrêt du 21.03.2013, RWE Vertrieb, aff. C-92/11, pt. 64 : « il revêt une importance essentielle
[…] que la faculté de résiliation conférée au consommateur ne soit pas de pure forme mais puisse être
réellement exercée. Tel ne serait pas le cas lorsque, pour des raisons liées aux modalités de la mise en
œuvre du droit de résiliation ou aux conditions du marché concerné, ledit consommateur ne dispose
pas d’une réelle possibilité de changer de fournisseur ou lorsqu’il n’a pas été informé de manière
convenable et en temps utile de la modification à intervenir, le privant ainsi de la possibilité d’en vé-
rifier le mode de calcul et, le cas échéant, de changer de fournisseur. À cet égard, doivent être pris en
compte, notamment, la question de savoir si le marché en cause est concurrentiel, le coût éventuel,
pour le consommateur, lié à la résiliation du contrat, le délai entre la communication et l’entrée en vi-
gueur des nouveaux tarifs, les informations fournies au moment de cette communication, ainsi que le
coût à supporter et le temps nécessaire pour changer de fournisseur. » ; ég. HUGUENIN/MAISSEN, Be-
dingungsänderungsklauseln, 118 ; KUONEN, Le contrôle des conditions générales, p. 15.
PASCAL PICHONNAZ
54
ver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du ser-vice à rendre ; »
L’accord avec les opérateurs de téléphonie mobile que nous avons mentionné précé-
demment a d’ailleurs aussi porté sur les clauses de modifications unilatérales. Doréna-
vant, les clients des opérateurs de téléphonie peuvent mettre un terme au contrat ou
changer de fournisseur si les prix augmentent ou si les prestations (étendue du réseau,
largeur de bande, rapidité) se péjorent, sans devoir accepter une modification unilatérale
du contrat dans certaines hypothèses.
Il reste toutefois dans ce domaine également de nombreuses conditions générales avec un
tel droit de modification unilatéral sans clause de sortie lorsque la modification est im-
portante. A notre avis, ces clauses doivent être considérées comme abusives au sens de
l’art. 8 LCD.
Une clause de modification unilatérale portant sur des éléments mineurs du contrat peut
toutefois elle aussi être qualifiée d’abusive69
. C’est ainsi que le droit français place une
telle clause dans sa liste grise, à savoir qu’il présume le caractère abusif de telles clauses,
comme l’indique la disposition topique du Code français de la consommation :
Art. R 132-2 Code [français] consommation : « Dans les contrats conclus entre des professionnels et des non-professionnels ou des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions du premier et du deuxième alinéas de l'article L. 132-1, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : […] 6° Réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives aux droits et obligations des parties, autres que celles prévues au 3° de l'article R. 132-1 ; ».
Ainsi, le cumul de l’art. R132-1 et R132-2 du Code [français] de la Consommation
amène à retenir qu’une clause de modification unilatérale d’un contrat qui n’est pas
assortie d’une clause de résiliation immédiate doit soit être considérée comme nécessai-
rement abusive si elle porte sur des prestations importantes, ou du moins être comme
présumée abusive pour toute modification du contrat. Les opérateurs de téléphonie mo-
bile l’ont bien compris, puisqu’ils ont accepté – sous la pression des organisations de
protection des consommateurs – de modifier leurs conditions générales sur ce point70
.
69
RUSCH/HUGUENIN, Einseitige Änderungsrechte, p. 52.
70 Cf. supra nbp 57 et 58.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
55
B. Le droit transitoire et l’art. 8 LCD
La question de savoir si l’art. 8 LCD, dans sa nouvelle version, doit ou non s’appliquer
aux contrats conclus avant son entrée en vigueur est débattue en doctrine. Ni la loi, ni le
communiqué de presse du Conseil fédéral du 12 octobre 201171
ne donnent une réponse
claire à ce sujet72
.
Une partie de la doctrine entend appliquer l’art. 8 LCD aux seuls contrats nouvelle-ment conclus, ou plutôt à l’intégration de nouvelles conditions générales au contrat
73.
L’argument principal repose sur le fait que, en l’absence de règles de droit transitoire
spécialement prévues dans la LCD, la règle de base de l’art. 1er TfCC – posant le principe
de la non-rétroactivité de la loi nouvelle – devrait s’appliquer. Cela pose toutefois de
nombreuses difficultés.
- Une nouvelle intégration. En particulier, il faut déterminer quand on doit considérer
que l’on intègre de nouvelles conditions générales au contrat. Faut-il apprécier uni-
quement une approche formelle, ou la moindre modification des conditions géné-
rales est-elle une intégration nouvelle ?
- La portée de l’éventuel examen. En outre, on peut se demander si seules les nou-
velles dispositions doivent être soumises à l’examen de l’art. 8 LCD, puisque les
parties n’ont pas modifié le reste des conditions générales. Ou le changement de
version (nouvelle date des CG) suffit-il à considérer qu’il s’agit de nouvelles condi-
tions générales, même si le contrat de base par exemple n’est pas du tout modifié ?
Il nous semble à tout le moins que, dans un tel cas, il faut considérer que lorsque
l’on change la date des conditions générales, et que la date est postérieure à l’entrée
en vigueur du nouvel art. 8 LCD, toutes les conditions générales (même les clauses
non modifiées) sont soumises au contrôle du caractère abusif.
71
Communiqué de presse 12.10.2011 : Des moyens plus efficaces contre les pratiques commerciales
déloyales, voir http://www.seco.admin.ch/aktuell/00277/01164/01980/index.html?lang=fr&msg-id
=41733 (17.12.2014). 72
EISNER-KIEFER, AVB, p. 110 s. 73
Cf. not. ABEGGLEN (et. al.), Aspekte der AGB-Kontrolle, p. 108 s. ; BIERI, Le contrôle judiciaire,
p. 59 s. ; BÜHLER/STÄUBER, Die AGB-Kontrolle, p. 89 ; HESS/RUCKSTUHL, AGB-Kontrolle,
p. 1211 ; MAISSEN, Die automatische Vertragsverlängerung, p. 197 ; MÖNNICH, AGB und intertem-
porales Recht, p. 287 ss; RUSCH, Schadensabwälzungsklauseln, p. 444 ; SCHOTT, Missbräuchliche
Allgemeine Geschäftsbedingungen, p. 80 ; BSK-THOUVENIN, art. 8 LCD N 148 ss, en part. N 154 ;
VISCHER, Freizeichnungsklauseln, p. 181 s.
PASCAL PICHONNAZ
56
Une autre partie de la doctrine considère plutôt que l’art. 8 LCD doit s’appliquer immé-diatement, également aux contrats en cours
74. L’argument principal repose sur la qualifi-
cation de l’art. 8 LCD en tant que norme établie « dans l’intérêt de l’ordre public et des
mœurs » (art. 2 al. 1 TfCC), ce qui suffirait à en justifier l’application immédiate. En
effet, lorsque le législateur adopte des modifications législatives en vue de mettre en
œuvre un intérêt public important, le nouveau droit s’applique à tous les contrats en
cours (art. 2 al. 1 TfCC), en dérogation au principe de la non-rétroactivité de la loi nou-
velle (art. 1 TfCC). L’effet rétroactif d’une norme légale peut ainsi être admis unique-
ment lorsque la disposition en cause contient un principe fondamental de l’ordre juri-
dique75
.
Les motifs permettant de considérer que l’art. 8 LCD constitue une règle tendant à pro-
téger l’ordre public au sens de l’art. 2 al. 1 TfCC sont divers.
L’argument le plus important repose sur l’interprétation développée par la Cour de jus-
tice de l’Union européenne à propos de l’art. 6 de la Directive 93/13/CEE du 5 avril 1993
de l’Union européenne concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les
consommateurs, qui traite notamment des sanctions des clauses abusives. La Cour a jugé
que cette règle correspond à une « une norme équivalente aux règles nationales qui occupent, au sein de l’ordre juridique interne, le rang de normes d’ordre public »
76. Or,
l’art. 8 LCD étant similaire à la règle européenne quant à sa nature et à sa fonction, il
paraît justifié de considérer que le législateur suisse a introduit une norme tendant elle
aussi à protéger l’ordre public.
D’ailleurs, si le fait pour le législateur d’adopter une règle impérative n’est pas encore le
signe qu’elle soit établie dans l’intérêt de l’ordre public77
, il n’en reste pas moins qu’il
s’agit là d’un indice. Il en va toutefois ainsi dès le moment où le législateur entend, par
l’adoption d’un régime de protection impératif, modifier les comportements de manière
importante78
. Or, c’est bien ce que vise l’adoption du nouvel art. 8 LCD. En outre, il
ressort de la jurisprudence du Tribunal fédéral qu’il existe une tendance à considérer les
74
Déjà PICHONNAZ, Le nouvel art. 8 LCD, 142 s. ; voir aussi EISNER-KIEFER, AVB, p. 110 s. ; JENNY,
Inhaltskontrolle, p. 38 ss ; KOLLER, Art. 8 UWG : eine Auslegeordnung, 78 ss ; RÜETSCHI, Zur An-
wendung, p. 108 ; SCHMID, Grundpfandrechte, 102 ss; cf. cep. ROBERTO/WALKER, AGB-Kontrolle,
p. 61 ; ROBERTO/STEHLE, Zeitlicher Anwendungsbereich, p. 237 s., se fondent plutôt sur l’art. 3 Tf
CC, considérant que ce qui est déterminant est le moment de la survenance de l’évènement créant
l’effet contractuel considéré. 75
ATF 138 III 659, consid. 3.3 ; ATF 133 III 105 consid. 2.1 ; ATF 119 II 46 consid. 1b ; ATF 116 III
120 consid. 3b ; EISNER-KIEFER, AVB, p. 110 s. ; RÜETSCHI, Zur Anwendung, p. 103. 76
CJCE 6.10.2009, aff. C-40/08, Asturcom Telecomunicaciones, Rec. I-9579, pt. 52. 77
ATF 133 III 105 consid. 2.1.3 ; EISNER-KIEFER, AVB, p. 111 s. 78
ATF 117 II 452 consid. 3b ; RÜETSCHI, Zur Anwendung, p. 103 ; EISNER-KIEFER, AVB, p. 112.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
57
normes à contenu socio-politique vouées à protéger la partie faible au contrat comme
étant applicables rétroactivement79
.
Finalement, cette interprétation semblerait également expliquer pourquoi le Conseil
fédéral a retardé l’entrée en vigueur de l’art. 8 LCD par rapport aux autres dispositions
de la même loi. En effet, si la norme n’était pas considérée comme étant d’application
immédiate, il n’aurait pas été nécessaire de laisser un temps supplémentaire aux entre-
prises afin qu’elles adaptent leurs conditions générales à la nouvelle règlementation80
.
Ce point de vue a notamment été critiqué par BENEDICK/VISCHER, qui réfutent le carac-
tère d’ordre public du droit européen, en se fondant sur le droit transitoire prévu par la
directive elle-même81
. Toutefois, c’est bien la jurisprudence qui a reconnu ultérieurement
la nature de règle d’ordre public des règles européennes relatives aux clauses abusives,
comme nous l’avons déjà relevé ; partant, on ne saurait se limiter à examiner les règles
transitoires du droit européen pour apprécier le caractère d’ordre public de la règle.
ROBERTO/WALKER et ROBERTO/STEHLE se fondent plutôt sur l’art. 3 TfCC pour retenir
que ce qui est déterminant est de savoir si les conditions à la naissance d’une prétention
sont remplies avant ou après le changement législatif. Ainsi, toute obligation qui naîtrait
d’un acte ou d’une condition remplie après l’entrée en vigueur de l’art. 8 LCD serait
soumise au nouveau droit82
. Il s’agit là toutefois d’une compréhension différente de la
portée de l’art. 3 TfCC, puisque l’on considère en principe que si la volonté des parties a
présidé à la naissance d’un droit subjectif avant la modification législative, celle-ci
n’affecte pas les obligations qui en découlent, même postérieurement au changement de
loi, à moins que les exceptions des art. 2 et 4 TfCC imposent un effet rétroactif.
Le 15 juillet 2014, le Tribunal fédéral a eu, pour la première fois, l’occasion de se déter-
miner sur un aspect du droit transitoire lié à l’art. 8 LCD83
. L’ATF 140 III 404
(4A_475/2013) ne traite toutefois pas de la véritable question de fond. Il s’agissait en
l’espèce d’un contrat conclu en 2011 avec un centre de fitness pour une durée détermi-
née, dont l’une des conditions générales en prévoyait le renouvellement automatique,
sauf résiliation au plus tard trois mois avant la fin de la durée convenue du contrat. La
question était celle de savoir si le nouvel art. 8 LCD pouvait s’appliquer rétroactivement
à ce contrat, en permettant ainsi au recourant – dans le cas où la clause litigieuse serait
79
Voir p. ex. ATF 117 452 consid. 3b ; EISNER-KIEFER, AVB, p. 112. 80
Pour un exposé complet des arguments, cf. PICHONNAZ, Le nouvel art. 8 LCD, p. 142 s. 81
BENEDICK/VISCHER, Die intertemporale Anwendung, pt 47. 82
ROBERTO/WALKER, AGB-Kontrolle, p. 61 ; ROBERTO/STEHLE, Zeitlicher Anwendungsbereich,
p. 237 s. 83
Pour un premier commentaire de l’arrêt, cf. not. ROBERTO/STEHLE, Zeitlicher Anwendungsbereich,
p. 235 ss ; LEEMANN/ SCHLAGINHAUFEN/VISCHER, Revidierter Art.8 UWG.
PASCAL PICHONNAZ
58
considérée comme abusive – de s’opposer au renouvellement automatique ayant eu lieu
avant l’entrée en vigueur de cette norme.
Le Tribunal fédéral a constaté que, indépendamment de la réponse à la question de
l’application de l’art. 8 LCD dans le temps, au moment de la prolongation automatique
du contrat, l’art. 8 LCD n’était pas encore en vigueur. Il a alors retenu que l’entrée en
vigueur de cette norme ne devait pas pouvoir remettre en discussion le renouvellement
automatique du contrat ayant eu lieu précédemment, même si on admettait que l’art. 8
LCD devrait s’appliquer rétroactivement à tous les contrats en cours84
. Si tel était le cas,
il en résulterait une insécurité juridique trop grande, car tous les renouvellements auto-
matiques ayant eu lieu avant le 1er juillet 2012 seraient remis en cause.
Partant, pour le Tribunal fédéral, un contrat qui a déjà été renouvelé en vertu d’une
clause de conditions générales ne peut être remis en question par le constat a posteriori (p. ex. par application de l’art. 8 LCD) du caractère abusif de la clause de renouvelle-
ment automatique. La sécurité juridique semble alors l’emporter nécessairement sur le
contrôle des conditions générales. On pourrait probablement faire un lien avec l’idée de droit acquis (art. 4 TfCC). La clause de renouvellement ayant déjà produit ses effets,
ceux-ci ne peuvent plus être révoqués85
.
84
ATF 140 III 401 (4A_475/2013) c.4.4 « Zum Zeitpunkt der Verlängerung war der neue Art. 8 UWG
noch nicht in Kraft. Jedenfalls in dieser Konstellation bietet weder Art. 2 noch 3 SchlT ZGB eine
Grundlage für die Anwendung der neuen Gesetzesbestimmung, und zwar unabhängig davon, ob die-
se generell auch für altrechtliche Verträge und AGB gelten soll. » 85
C’est d’ailleurs ce point qui pose problème à ROBERTO/STEHLE, Zeitlicher Anwendungsbereich,
p. 237 s., lorsqu’ils veulent voir dans l’arrêt du TF une confirmation de leur position. A notre avis, le
Tribunal fédéral ne s’est pas vraiment prononcé sur la question de fond ; il retient plutôt que la clause
spécifique fonde un droit acquis, compte tenu de la formulation très spécifique de la clause de renou-
vellement automatique, qui justifiait une confiance accrue des parties dans l’application du droit an-
cien : « Das Vertrauen der Parteien in die gültige Verlängerung des Vertrages ist insoweit zu
schützen, und das neue Recht ist aus diesem Grund jedenfalls nicht auf diese vor seinem Inkrafttreten
eingetretene und abgeschlossene vertragliche Rechtswirkung anwendbar » (mise en évidence de notre
fait) (ATF 140 III 404 c. 4.4) ; la clause indiquait en effet : « Die Mitgliedschaft verlängert sich
automatisch um die gleiche Dauer zu den Bedingungen, welche zum Zeitpunkt der Verlängerung gel-ten » (mise en évidence par nous) ; dès lors, le Tribunal fédéral a considéré que la question était ré-
glée une fois que la prolongation a pris effet (ATF 140 III 404 c. 4.4 : « …jedenfalls nicht auf diese
vor seinem Inkrafttreten eingetretenen und abgeschlossenen vertragliche Rechtswirkung anwend-
bar » (mise en évidence de notre fait).
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
59
III. Un autre élément de droit matériel : le droit de révocation
Nous allons brièvement évoquer l’évolution qui est en cours en matière de droit de révo-
cation, en traitant d’abord de la question discutée du champ d’application du droit de
révocation (A.), pour présenter ensuite l’impact de la jurisprudence récente sur les con-
séquences du droit de révocation (B.).
A. Le champ d’application du droit de révocation
1. L’état actuel du droit
Les art. 40a ss CO, relatifs au démarchage à domicile, ont été adoptés par le Parlement
suisse en 1993, à la suite du rejet par le peuple de l’adhésion à l’Espace Economique
Européen86
. Le paquet Eurolex avait alors été modifié en un paquet Swisslex, dont le but
demeurait une transposition autonome des mécanismes de protection du droit européen
en droit suisse. Ainsi, le législateur suisse avait pris appui sur la directive 85/577/CEE de
1985 concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en
dehors des établissements commerciaux. Toutefois, depuis 1997, le droit suisse en la
matière n’offre plus le même niveau de protection que le droit européen ; le champ
d’application des art. 40a ss CO est aujourd’hui plus réduit que celui de normes compa-
rables dans les 28 Etats-membres de l’Union européenne, puisque l’Union européenne a
étendu en 1997 le droit de révocation à d’autres situations que celles expressément visées
par l’art. 40a ss CO, notamment aux contrats conclus à distance87
. Initialement, le Con-
seil fédéral avait voulu adapter le droit, mais il avait fini par y renoncer en 2005, le con-
sommateur suisse étant suffisamment protégé selon lui par les règles actuelles88
.
De même, la question de savoir si le droit de révocation tel que prévu actuellement
s’applique aussi aux contrats conclus par téléphone n’a pas été clairement résolue. D’une
part, le projet du Conseil fédéral de l’époque évoquait explicitement la possibilité de
révoquer un contrat conclu par téléphone (art. 40a I/a ch. 3 P-CO)89
, mais le Conseil
86
Pour tous les autres, PICHONNAZ, Le centenaire, en part. 137 ss. 87
Suite à l’introduction de la Directive 97/7/CE du 20 mai 1997. 88
Communiqué de presse du Conseil fédéral du 9 novembre 2005 ("Le Conseil fédéral renonce à
réviser la loi"), in: www.admin.ch/cp/f/[email protected] ; cf. ég. PICHONNAZ, La protection
du consommateur, p. 324. 89
Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur l’information des consommatrices et des
consommateurs et sur une loi fédérale modifiant le code des obligations (De la formation des obliga-
tions) du 7 mai 1986, FF 1986 II 360 ss, 411.
PASCAL PICHONNAZ
60
national avait ensuite reformulé le texte et supprimé la référence aux contrats conclus par
téléphone90
. Le Conseil des Etats avait alors repris la version du Conseil national prati-
quement sans la modifier91
. Or, il n’est pas clair si la disparition de la référence aux
contrats conclus par téléphone est le fruit d’une simple simplification de rédaction ou la
volonté d’exclure ces contrats du champ d’application de l’art. 40a ss CO. A tout le
moins, la doctrine est partagée, puisque certains auteurs admettent l’application des
art. 40a ss CO actuels également aux contrats conclus par téléphone92
. Cette interpréta-
tion repose alors sur le fait que dans les contrats conclus par téléphone, l’acquéreur court
le même risque d’être pris de court que dans les contrats de démarchage à domicile93
. La
jurisprudence n’a toutefois pas tranché la question. La question sera toutefois résolue en
cas d’adoption du projet de révision des art. 40a ss CO (infra 2).
Le champ d’application des art. 40a ss CO a pour l’instant plutôt été réduit, ou du moins
précisé de manière assez stricte, par un arrêt du Tribunal fédéral du 24 octobre 2011
(5A_545/2011)94
. Le Tribunal fédéral a en effet précisé la notion de « contrats portant sur des choses mobilières ou des services destinés à un usage personnel ou familial »
contenu à l’art. 40a CO, mais prévu également par les art. 120 al. 1 LDIP et 32 al. 2 CPC
(cf. infra IV.). Il a ainsi précisé que le droit à la révocation est exclu lorsque l’achat vise
des buts professionnels ou se trouve en rapport avec l’activité commerciale de l’acheteur.
En l’espèce, il s’agissait d’un contrat portant sur un programme de formation continue,
dont l’acheteur se servait pour améliorer ses compétences professionnelles. Pour le Tri-
bunal fédéral, il s’agit là déjà d’une activité qui est en lien avec l’activité professionnelle,
ce qui exclut que l’acheteur puisse se prévaloir du droit de révocation95
. Au vu de ce que
nous avons dit plus haut (cf. I.B.), l’approche est relativement stricte.
90
BO 1990 N 572 ss ; ég. les références in : Initiative parlementaire 06.441 (« Pour une protection du
consommateur contre les abus du démarchage téléphonique »), Rapport de la Commission des af-
faires juridiques du Conseil des Etats, du 14 novembre 2013, p. 4. 91
BO 1990 E 307 ss. 92
KOLLER-TUMLER, TDP X, p. 85, en particulier note de bas de page 343 ; BSK-
GONZENBACH/KOLLER-TUMLER, art. 40b CO N 8 ; DORNIER Das Widerrufsrecht, N 343 ; ZK-
DORNIER, art. 40b CO N 70 ; pour le point de vue inverse, cf. notamment CR-STAUDER/STAUDER,
art. 40b CO N 20a ; MARCHAND, Droit de la consommation, p. 170 s. 93
Cf. ég. les références in : Initiative parlementaire 06.441 (« Pour une protection du consommateur
contre les abus du démarchage téléphonique »), Rapport de la Commission des affaires juridiques du
Conseil des Etats, du 14 novembre 2013, p. 4. 94
Arrêt du TF du 24.10.2011, 5A_545/2011. 95
TF 24.10.2011, 5A_545/2011, c. 4.3.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
61
2. Les modifications envisagées
Le 21 août 2006, Pierre Bonhôte a déposé une initiative parlementaire qui fut approu-
vée par le Parlement en 2009, non sans mal96
. Celle-ci demande d’étendre le droit de
révocation au démarchage téléphonique, afin de renforcer la position des consommateurs
en tenant compte des nouveaux modèles commerciaux, mais aussi d’offrir aux consom-
mateurs suisses un degré de protection égal à celui des consommateurs européens. En
effet, les consommateurs de l’Union européenne bénéficient déjà depuis 1997 d’un délai
d’au moins sept jours ouvrables pour se rétracter d’un contrat conclu à distance (art. 6
Directive 97/7/CE), mais depuis l’adoption de la Directive 2011/83/UE relative aux
droits des consommateurs, qui abroge la Directive 97/7/CE, le droit de révocation doit
être exercé dans un délai général de quatorze jours pour tous les contrats conclus à dis-
tance ou hors établissement (art. 9 Dir. 2011/83/UE).
La Commission des Affaires juridiques du Conseil des Etats a alors préparé un avant-
projet du 23 août 201297
, qu’il a ensuite mis en consultation du 17 septembre au 21 dé-
cembre 2012 auprès des milieux intéressés98
. Cet avant-projet fut alors adapté et trans-
formé en un projet99
, qui fut soumis au Conseil fédéral et au Parlement. Il prévoyait que
le consommateur pouvait révoquer son acceptation tant en cas de démarchage à domicile
qu’en cas de contrat conclu à distance (art. 40a P). L’art. 40c P définissait alors un con-
trat conclu à distance à l’aune de l’art. 2 ch. 7 de la Directive 2011/83/UE. L’idée est
ainsi que tout contrat conclu sans que les parties ou leurs représentants soient physique-
ment en présence l’un de l’autre puisse faire l’objet d’un droit de révocation. Sont ainsi
visés les contrats conclus par le biais de n’importe quelle technique de communication à
distance (téléphone, mais aussi Internet, fax ou courrier postal). En revanche, si un con-
trat est seulement préparé à distance, par exemple sur un site Internet, mais ensuite signé
96
Au Conseil national, l’initiative a été acceptée grâce à la voix prépondérante de sa présidente
(77 voix contre 77 et 9 abstentions), voir Initiative parlementaire pour une protection du consomma-
teur contre les abus du démarchage à téléphonique, FF 2014 895. 97
Pour un résumé de la procédure, cf. ég. http://www.parlament.ch/e/suche/Pages/legislaturrueckblick.
aspx?rb_id=20060441. 98
Rapport sur les résultats de la procédure de consultation concernant l’objet 06.441 (Initiative parle-
mentaire Pour une protection du consommateur contre les abus du démarchage électronique), avril
2013, cf http://www.google.ch/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=2&cad=rja&uact=8
&ved=0CCYQFjAB&url=http%3A%2F%2Fwww.parlament.ch%2Ff%2Fdokumentation%2Fbericht
e%2Fvernehmlassungen%2F06-441%2FDocuments%2Fbericht-rk-s-06-441-2013-11-14-f.pdf&ei=
m4iZVLz9IYHuPI6SgNgG&usg=AFQjCNGRShVGOtDGq99rzxy6iW6rI6IHVw&bvm=bv.820013
39,d.ZWU (17.12.2014). 99
Initiative parlementaire 06.441 (« Pour une protection du consommateur contre les abus du démar-
chage téléphonique »), Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats, du
14 novembre 2013, FF 2014 893, et le projet publié in FF 2014 923.
PASCAL PICHONNAZ
62
dans les locaux du fournisseur, on n’est pas face à un contrat conclu à distance au sens de
l’art. 40c P100
.
Le Conseil fédéral s’est prononcé par un avis rendu le 14 mars 2014101
. Le 18 juin 2014,
le Conseil des Etats, comme 1er Conseil à se prononcer, modifia légèrement le projet, tout
en suivant pour l’essentiel la position de sa Commission des affaires juridiques102
. Le
17 septembre 2014, le Conseil national adopta une attitude plus restrictive103
, en rejetant
pratiquement toutes les propositions d’extension du droit de révocation. Ainsi, il a refusé
d'inclure les achats effectués sur Internet dans le projet de modification du Code des
obligations et a souhaité porter la limite minimale des achats bénéficiant du droit de
révocation à Fr. 200.-. Il a également ajouté l'achat d'appareils électroniques dans les
exceptions au droit de révocation, tout en maintenant le droit de révocation pour les
livres, les CD et les DVD dont l'emballage n'a pas été descellé, alors que le Conseil des
Etats avait exclu les livres de la réforme. Enfin, le Conseil national a admis de justesse
que les biens achetés en leasing, mais qui ont été utilisés, doivent malgré tout pouvoir
être retournés. La seule adaptation claire fut l’adoption de la durée du délai de révoca-
tion, portée à 14 jours.
Le 2 décembre 2014, le Conseil des Etats s’est rallié au Conseil national en excluant
finalement les contrats conclus par Internet du droit de révocation104
. Au vu de ce résul-
tat, le Conseil des Etats a finalement décidé de renvoyer le projet en commission, « afin
de lui préparer un enterrement digne » a ironisé le rapport de la Commission Claude
Janiak105
.
Il est donc fort à parier que la situation du droit actuel ne soit pas du tout modifiée. C’est
fort regrettable à plusieurs égards. D’une part, il ne fait pas sens d’avoir un droit de révo-
cation des contrats à distance qui soit différent en Suisse de l’ensemble des membres de
l’Union européenne, sans parler d’autres Etats étrangers. A l’heure d’Internet, d’un mar-
ché électronique sans frontières, placer le consommateur soumis au droit suisse dans une
situation plus défavorable va inciter les consommateurs à appliquer le droit étranger en la
matière autant que faire se peut. D’autre part, vouloir distinguer les contrats conclus par
téléphone et ceux conclus par Internet est là aussi artificiel et étranger à l’évolution de la
technologie moderne ; il suffit de penser à Skype et aux appels téléphoniques qui passent
100
Rapport, FF 2014 906. 101
Avis du Conseil fédéral du 14 mars 2014 (FF 2014 2883). 102
BO 2014 E 614 ss. 103
BO 2014 N 1576 ss et N 1588 ss. 104
Initiative parlementaire Bonhôte Pierre. Pour une protection du consommateur contre les abus du
démarchage téléphonique, BO 2014 E 1135. 105
Initiative parlementaire Bonhôte Pierre. Pour une protection du consommateur contre les abus du
démarchage téléphonique, BO 2014 E 1138 “mit der Absicht, dass wir dann in der Kommission ein
schickliches Begräbnis machen“.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
63
de plus en plus par l’Internet. L’épilogue n’a pas encore été définitivement écrit, mais il
se laisse entrevoir ; il n’est pas réjouissant pour les consommateurs suisses.
B. Les effets de la révocation
Dans l’hypothèse où un contrat est soumis aux art. 40a ss CO, et en particulier au droit
de révocation, il importe de déterminer quelles en sont les conséquences.
Les conséquences de la révocation sont traitées par l’art. 40f CO, qui prévoit que si
l’acquéreur a révoqué le contrat, les parties doivent rembourser les prestations reçues.
Cette norme n’indique toutefois pas le fondement sur lequel repose la prétention en
remboursement, ni le délai de prescription auquel est soumise l’action en rembourse-
ment.
Toutefois, dans une affaire récente (ATF 137 III 243)106
, le Tribunal fédéral a eu
l’occasion de se prononcer sur cette question ; il a ainsi pu analyser dans le détail la
nature juridique de la prétention en remboursement. En l’espèce, il s’agissait d’un contrat
portant sur une documentation de formation continue d’une valeur de 4’000 Fr. conclu
lors d’une manifestation d’information moyennant payement immédiat. Le lendemain de
la conclusion (31 août 2007), l’acheteur a exercé son droit de révocation et exigé la resti-
tution de la somme payée. Toutefois, il n’a ouvert action en restitution du prix payé que
le 13 novembre 2009. Le défendeur a alors soulevé l’exception de prescription de la
créance en restitution. Statuant sur cette affaire, le Tribunal fédéral lui a donné raison et a
considéré, en suivant une partie de la doctrine ainsi que le Message du Conseil fédéral,
que la créance en restitution de l’art. 40f CO doit se prescrire selon les règles de
l’enrichissement illégitime (67 CO).
Après avoir rappelé les diverses hypothèses d’invalidation du contrat et leurs consé-
quences, le Tribunal fédéral a mis en évidence un critère lui permettant d’établir le délai
de prescription de l’action en restitution dans les différents cas. Le critère est celui de la
validité initiale du contrat107
.
Selon lui, dans les cas où le contrat est initialement valable, mais qu’il prend fin avec ou
sans effet rétroactif pour une cause ultérieure, il y a un rapport de liquidation. Les parties
restent donc liées par un rapport contractuel, mais uniquement dans le but de rétablir la
situation antérieure au contrat. Les prestations qu’elles se doivent sont alors de nature
contractuelle et, partant, soumises au délai de prescription de l’art. 127 CO.
106
ATF 137 III 243, SJ 2012 I 57 (rés.). 107
PICHONNAZ, Le point, p. 193.
PASCAL PICHONNAZ
64
En revanche, dans les cas où le contrat n’a pas été valablement conclu dès le départ, ou a
été conclu sous une condition suspensive qui ne s’est finalement pas réalisée, il faut
appliquer les règles sur l’enrichissement illégitime108
. Cela est notamment le cas dans
l’hypothèse de l’art. 40f CO : L’exercice du droit de révocation est l’expression par le
partenaire contractuel que son consentement initial n’était pas librement formé. En con-
séquence, il faut en déduire que le contrat n’a pas été valablement conclu. Cette situation
présente ainsi pour le Tribunal fédéral une forte parenté avec l’invalidation pour cause
d’erreur (en particulier l’erreur de base de l’art. 24 al. 1 ch. 4 CO) ou la nullité pour vice
de forme109
.
Le critère adopté par le Tribunal fédéral n’est pourtant pas toujours satisfaisant, no-
tamment au vu de la règle posée par l’art. 119 al. 2 CO. En effet, en cas d’impossibilité
subséquente, la loi établit clairement une prétention fondée sur l’enrichissement illégi-
time. Or, en suivant le raisonnement du Tribunal fédéral, tel ne devrait pas être le cas,
puisque dans cette constellation le contrat a été initialement valablement conclu.
Ce point a été reconnu par le Tribunal fédéral qui a toutefois souligné que la règle de
l’art. 119 CO avait été introduite bien avant la reconnaissance de la théorie du rapport de
liquidation par la doctrine et la jurisprudence110
. Toutefois, le choix du Tribunal fédéral
répond-il au besoin de protection de la partie ayant conclu un contrat lors d’un démar-
chage à domicile ? En soumettant l’action en remboursement au délai relatif de un an de
67 CO, le consommateur se retrouve en effet dans une position moins favorable que si
l’art. 127 CO lui était applicable ; est-ce vraiment le but visé par le législateur en ayant
introduit ces dispositions en 1993 ? Certes, le Tribunal fédéral relève de manière con-
vaincante que si les art. 40a ss CO offrent au consommateur un droit de révocation unila-
téral, ils ne doivent pas forcément assurer aussi un délai de prescription plus favorable
pour faire valoir ce droit. Pour le Tribunal fédéral, appliquer l’art. 127 CO reviendrait à
imposer un sacrifice trop grand au vendeur et se révèlerait par là même contraire à la
sécurité juridique111
.
IV. Et le contrat de consommation sous l’aspect procédural…
La notion de contrat de consommation sous l’aspect procédural est plus étroite qu’en
droit matériel ; en fait, elle est trop étroite si l’on veut assurer une adéquation entre le
108
ATF 137 III 243, consid. 4.4.7. 109
ATF 137 III 243, consid. 4.5. 110
ATF 137 III 243, consid. 4.4.7. 111
ATF 137 III 243, consid. 4.5.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
65
droit matériel et le droit procédural (A.). En outre, le droit de recours des associations
n’est pour l’instant qu’une demi-mesure (B.). Force est dès lors de constater que la situa-
tion actuelle n’est pas encore totalement satisfaisante.
A. Une notion trop étroite
Comme on l’a vu, la notion de « consommateur » est centrale en droit contractuel
suisse de la consommation. La définition de consommateur varie pourtant en fonction du
domaine considéré. En droit procédural – notamment en matière de for et de droit appli-
cable –, la notion de consommateur se révèle plus restreinte qu’en droit matériel. Cela
aboutit selon nous à une situation juridique peu satisfaisante en pratique112
.
1. En matière de for interne
Aux termes de l’art. 32 al. 2 CPC, « [s]ont réputés contrats conclus avec des consom-
mateurs les contrats portant sur une prestation de consommation courante destinée aux
besoins personnels ou familiaux du consommateur et qui a été offerte par l'autre partie
dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale».
Cette définition reprend au mot près l’ancien art. 22 al. 2 LFors ; partant, elle doit être
interprétée de la même manière113
. Il en résulte que la jurisprudence du Tribunal fédéral
relative à l’ancien art. 22 al. 2 LFors peut être reprise afin de mieux comprendre la portée
de l’actuel art. 32 al. 2 CPC.
Dans l’ATF 132 III 268, le Tribunal fédéral a retenu que la norme procédurale en ques-
tion présente un but de protection spécifique, et doit en ce sens être interprétée restric-tivement114
. La disposition ne s’applique ainsi qu’aux destinataires privés et aux presta-tions de consommation courante115
.
La question de savoir qu’est-ce qu’on entend par prestation de consommation courante
est controversée. Selon le Tribunal fédéral, deux facteurs sont importants : le type ou
112
BOHNET considère incomplète la protection offerte aux consommateurs en matière de for, cf.
BOHNET, Clauses procédurales, p. 69 s. 113
Message relatif au Code de procédure civile suisse du 28 juin 2006, FF 2006, pp. 6841 ss, en part.
p. 6884. 114
Cela est contesté à juste titre par une partie de la doctrine, cf. not. MÖHLER, Konsumentenverträge,
N 71 s. ; déjà PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la consommation, p. 56. 115
Le Tribunal fédéral utilise aussi le terme de « besoins usuels » (arrêt du TF du 8 février 2008,
4A.232/2007, c. 4.2.2), cf. DUPONT, Le nouvel article 8 LCD, p. 108 nbp 33 ; MÖHLER, Konsu-
mentenverträge, N 47 et les réf.
PASCAL PICHONNAZ
66
but de la prestation et la valeur de celle-ci116
. Cette dernière doit en effet être modeste117
.
Toutefois, en matière d’opérations bancaires et contrats d’assurance, il n’est pas toujours
facile de déterminer une valeur limite. On pourrait toutefois prendre comme valeur de
référence le montant maximum des crédits à la consommation, soit 80'000 CHF. Il ne
s’agirait pourtant que d’une présomption, et le consommateur pourrait tout à fait démon-
trer qu’une opération bancaire portant sur un montant plus élevé remplit néanmoins les
exigences de l’art. 32 al. 2 CPC118
. On peut dès lors faire une analyse en fonction des
divers contrats à usage privé119
.
2. En matière de droit applicable
Aux termes de l’art. 120 LDIP, on entend par contrats conclus avec des consommateurs
« [l]es contrats portant sur une prestation de consommation courante destinée à un usage
personnel ou familial du consommateur et qui n'est pas en rapport avec l'activité profes-
sionnelle ou commerciale du consommateur ».
L’art. 120 LDIP présente ainsi la même exigence que l’art. 32 al. 2 CPC en ce qui
concerne le critère de prestation de consommation courante. Il ressort de la jurispru-
dence du Tribunal fédéral que cette notion doit encore une fois être interprétée restricti-
vement120
. Mais là aussi, il faudrait protéger de manière plus efficace les consomma-
teurs ; en particulier, lorsqu’il s’agit de consommation de masse121
.
L’art. 120 LDIP présente toutefois quelques légères différences par rapport à l’art. 32
al. 2 CPC. D’une part, cet article désigne l’auteur de l’offre faite au consommateur par le
terme de « fournisseur ». Cela ne semble donc pas exclure que le fournisseur soit une
personne privée n’agissant pas dans le cadre d’une activité professionnelle. La doctrine
116
ATF 132 III 268, consid. 2.2.3 : « Ainsi pour les contrats de prestations de services financiers, il ne
suffit pas pour savoir si l’on est en présence de la prestation d’un besoin courant, de porter une ap-
préciation uniquement selon le genre et le but de l’affaire. Au contraire, le volume de l’affaire est
aussi important. » ; ég. arrêt du TF du 8 février 2008, 4A.232/2007, c. 4.2.2. 117
Ainsi, ne relèvent pas du champ d’application de l’art. 32 al. 2 CPC l’achat d’une maison indivi-
duelle, d’une voiture d’une valeur de 190'000 Frs., ou encore d’une assurance vie, en particulier dans
un but d’épargne. Pour plus d’exemples, cf. BSK-KAISER JOB, Art. 32 CPC N 7. 118
Arrêt du TF du 8 février 2008, 4A.232/2007, c. 4.2.2 s. ; PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la
consommation, p. 52 s. 119
Pour une telle analyse, cf. MÖHLER, Konsumentenverträge, N 53 ss. 120
Arrêt du TF du 12 janvier 2006, 5C.222/2005, consid. 2.2 = SJ 2006 I, p. 416 (rés.). 121
PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la consommation, p. 56.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
67
précise néanmoins à cet égard que le fournisseur ne pourrait être qu’un profession-nel122
.
D’autre part, l’art. 120 LDIP ajoute que l’objet du contrat ne doit pas être en rapport avec
l’activité professionnelle ou commerciale du consommateur. Pour certains auteurs, cet
ajout est superflu123
. En tout cas, si l’usage est mixte (en partie professionnel et en partie
privé), il faudra utiliser le critère de la prépondérance124. C’est seulement si le lien
avec l’activité professionnelle est marginal qu’on pourra considérer que l’art. 120 LDIP
s’applique125
.
3. Vers une définition plus « généreuse » en cohérence avec le droit matériel
Si les définitions liées au for spécial et au droit applicable présentent l’exigence d’une
prestation de consommation courante, le droit matériel fonde sa conception de consom-
mateur sur un autre critère, notamment celui du déséquilibre structurel entre la situation
du consommateur et celle du fournisseur126
, comme nous l’avons déjà relevé ci-dessus.
Le manque de cohérence entre la définition de droit matériel et celle de procédure ou de
droit applicable peut poser différents problèmes. Si on prend par exemple la définition de
consommateur au sens de l’art. 3 LCC, on s’aperçoit que cette norme utilise une notion
classique de consommateur et le définit ainsi en tant que personne physique agissant
pour un but étranger à son activité commerciale. Or, au moment de déterminer le for
d’une éventuelle action, pour que cette personne puisse bénéficier du for spécial de
l’art. 32 al. 2 CPC il faudra encore que l’objet du contrat soit une prestation de consom-
mation courante.
Cette dissonance est curieuse et difficile à justifier. En effet, à notre avis, l’absence du
caractère de consommation courante d’une prestation ne devrait pas déjà justifier une
exclusion du champ d’application des règles procédurales. Tant que le déséquilibre struc-
122
Pour tous les autres, KELLER/KREN KOSTKIEWICZ, ZKomm., Art. 120 LDIP N 13 et N 30; DUTOIT,
CR LDIP, Art. 120 LDIP N 3 ; ég. ATF 121 III 336/342, JdT 1996 I 78 consid. 5d, qui souligne tou-
tefois que les parties ne sont pas sur un pied d’égalité. 123
KELLER/KREN KOSTKIEWICZ, ZKomm., Art. 120 LDIP N 13. 124
DUTOIT, CR LDIP, Art. 120 LDIP N 2; ég. Arrêt du TF du 27 avril 2004, 4C.20/2004, qui admet
qu’un contrat de chèques de voyage peut tomber sous le coup de l’art. 120 LDIP, mais exclut
l’application au cas concret, compte tenu du caractère professionnel (203 chèques de voyage pour des
achats professionnels en Inde). 125
PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la consommation, p. 54 ss. 126
BARNIKOL, Die Schutzinstrumente, p. 10 ; PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la consommation,
p. 56 ss.
PASCAL PICHONNAZ
68
turel entre consommateur et fournisseur existe, le consommateur devrait pouvoir bénéfi-
cier du régime spécial des art. 32 al. 2 CPC et 120 LDIP.
Le choix du législateur de limiter l’application d’un droit procédural plus favorable au
consommateur à la condition que l’objet du contrat relève d’une prestation de consom-
mation courante pose la question de savoir s’il existe en réalité deux catégories de droit contractuel de la consommation dans l’ordre juridique suisse. La première serait liée
à la procédure et au droit applicable, la seconde au droit de fond127
. Un tel résultat n’est
certainement pas satisfaisant. De plus, on devrait alors admettre qu’il n’existe pas une
véritable catégorie de contrat de consommation en droit suisse, mais plutôt un but de
protection accrue dans certaines situations128
.
B. Le droit de recours des associations : une demi-mesure
En vertu de l’art. 10 al. 2 let. c LCD, « les actions prévues à l'art. 9, al. 1 et 2, peuvent
en outre être intentées par: […] b. les organisations d'importance nationale ou régionale
qui se consacrent statutairement à la protection des consommateurs; ».
On peut donc être surpris de voir le peu d’actions intentées par ces organisations (en soi
au nombre de quatre : la SKS - Stiftung für Konsumentenschutz, la FRC - Fédération
Romande des Consommateurs, l’ACSI - Associazione consumatrici e consumatori della
Svizzera italiana et le kf - Konsumentenforum). Pour améliorer leur potentiel, les princi-
pales organisations de consommateurs de Suisse italienne (ACSI), de Suisse romande
(FRC) et de Suisse alémanique (SKS) ont fondé, en juin 2010, l'Alliance des organisa-tions de consommateurs afin de mieux défendre les intérêts des consommateurs au
niveau national129
.
Il n’en reste pas moins que pour ces organisations, il demeure difficile d’agir sur la base
de l’art. 10 al. 2 let. c LCD. En effet, même si elles agissent en soi pour défendre l’intérêt
public au même titre que le SECO, lui aussi en charge de la supervision de la LCD, et
donc de l’art. 8 LCD sur les clauses abusives notamment, le droit de recours n’est ici
qu’une demi-mesure, puisque ces organisations doivent assumer les risques ordinaires de
procédure. Le risque financier est ainsi important130
, alors qu’il n’en va pas de même
pour le SECO, si celui-ci introduit une procédure similaire. Pour assurer un début de
127
Pour une analyse détaillée des problèmes et de la manière possible pour les surmonter, cf. avant tout
FORNAGE, La mise en œuvre, passim. 128
PICHONNAZ, Le contrat dans le droit de la consommation, p. 64. 129
http://www.bag.admin.ch/themen/ernaehrung_bewegung/05245/07232/13432/index.html?lang=fr
(06.01.2015). 130
FORNAGE, La mise en œuvre, N 1835 ss ; GORDON-VRBA, AGB-Kontrolle durch Verbandsklagen,
p. 265 ss, en part. p. 283 s.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
69
mise en œuvre collective efficace de l’art. 8 LCD, tout en évitant des abus potentiels, il
faudrait adapter le régime131
. On peut envisager trois hypothèses :
i) Une sorte d’appréciation a priori des chances de succès du recours des organisations (à
la manière de la mise à l’assistance judiciaire), qui pourrait alors justifier de leur octroyer
l’absence de frais de procédure et un éventuel soutien financier aux associations, qui
agiraient à ce moment-là comme quasi-représentant du SECO.
ii) Une règle de procédure qui prévoirait par exemple que le SECO approuve la procé-
dure, ce qui constituerait alors une sorte de délégation de la procédure aux associations ;
les frais seraient alors pris en charge.
iii) Le développement d’une action en restitution des profits obtenus en violation des
règles de la LCD ; cela permettrait indirectement de financer les actions de ces associa-
tions ; toutefois, cela pose de nombreux problèmes de mise en œuvre, sans parler de
l’absence de base légale pour ce faire132
.
Certes, comme dans d’autres domaines, on pourrait aussi considérer que l’octroi d’un
droit de recours n’implique pas de soutien financier à ces organisations. Il faut toutefois
constater que les études en Europe ont montré que les consommateurs n’agissent que très
rarement en justice, compte tenu de la faible valeur litigieuse et des frais d’avocats no-
tamment133
. Partant, lutter contre des clauses abusives de manière efficace suppose une
agrégation des requêtes, que ce soit par une action des associations de protection des
consommateurs ou par un système analogue aux actions de classe (collective redress),
pour cette dernière il reste encore du chemin à parcourir134
.
CONCLUSION
Comme nous l’avons vu, le « contrat de consommation » n’est pas une notion mono-lithique, puisqu’elle dépend directement de la définition de ces deux éléments constitu-
131
Pour ce constat et une analyse détaillée, cf. avant tout FORNAGE, La mise en œuvre, N 1835 ss. 132
FORNAGE, La mise en œuvre, N 1854 ss. 133
Eurobaromètre Spécial publié en octobre 2004 par la Commission européenne, Les citoyens de
l’Union européenne et l’accès à la justice (http://ec.europa.eu/consumers/redress/), qui a entraîné un
développement très important à la fois de la procédure européenne de règlement des petits litiges (cf.
notamment https://e-justice.europa.eu/content_small_claims-42-fr.do?init=true, 17.12.2014) et des
actions collectives (cf. notamment http://ec.europa.eu/consumers/solving_consumer_disputes/
judicial_redress/index_en.htm (17.12.2014)). 134
Cf. toutefois le rapport du 3 juillet 2013 du Conseil fédéral sur l’ « Exercice collectif des droits en
Suisse: état des lieux et perspectives », disponible sous : https://www.bj.admin.ch/dam/data/
bj/aktuell/news/2013/.../ber-br-f.pdf (17.12.2014).
PASCAL PICHONNAZ
70
tifs que sont le professionnel et le consommateur. Or, la notion même de consommateur est plus ou moins restrictive selon les lois ou les domaines.
Ce qui frappe toutefois est de voir que la définition, même variable, du droit matériel est bien plus large que celle qui découle des art. 32 CPC et 120 LDIP, qui exigent encore que le contrat porte sur une prestation d’usage courant. Cette dissonance entre règles de fond et règles de procédure ne se justifie toutefois pas vraiment, puisqu’un droit matériel n’a de sens que s’il peut être invoqué en justice de manière efficace. Or, c’est précisé-ment le rôle des règles spéciales de for ou de droit applicable en matière de contrats de consommation que de permettre une mise en œuvre du droit qui soit plus effective, compte tenu des circonstances spécifiques aux contrats de consommation.
Certes, le résultat n’est pas toujours sans difficulté en droit matériel non plus. Ainsi, suite à l’ATF 139 III 201, il faut bien constater que tout prêt tendant à financer une forma-tion plus ou moins professionnalisante est exclu du champ d’application de la Loi sur le crédit à la consommation. La solution du Tribunal fédéral peut se justifier dans une perspective matérielle. D’un point de vue structurel toutefois, le Tribunal fédéral n’examine pas du tout le fait que le but du prêt est avant tout de pouvoir survivre au quotidien durant les études en couvrant les besoins essentiellement de base. Pourquoi, dans ce cas, faudrait-il exclure a priori un tel prêt du champ d’application de la LCC ? L’approche matérielle (absence de besoin de protection et de besoin d’information) sui-vie par le Tribunal fédéral plutôt qu’une analyse structurelle (inégalité dans l’information et dans la possibilité de négocier) montre combien la notion de « consommateur » est une notion juridique indéterminée qui permet de décider presque au cas par cas si un contrat déterminé doit ou non tomber sous le coup de règles protectrices.
C’est avec ce constat présent à l’esprit qu’il faut définir le « consommateur » au sens de l’art. 8 LCD. Nous sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait retenir qu’il pouvait aussi s’agir d’une personne morale, pour autant qu’elle n’exerce pas d’activité à but lucratif, mais qu’elle agisse pour un but non commercial ou professionnel.
De même, les actions des associations de protection des consommateurs ne sont pas encore un moyen efficace de faire valoir tous les droits des consommateurs. L’une des difficultés pour ces associations tient à la charge financière et au risque financier que présente une telle action en justice. Il faudrait dès lors faire preuve d’innovation dans ce domaine ; nous avons suggéré trois pistes distinctes afin de soutenir une procédure des associations de protection des consommateurs.
Au final, le droit de révocation, dont nous avons rappelé quelques éléments saillants, est un moyen qui permet d’obtenir des résultats plus efficaces pour les consommateurs individuels, même s’il faut alors agir rapidement en restitution des prestations, compte tenu du délai de prescription relativement court.
Quelques nouveautés liées aux contrats de consommation
71
Enfin, nous avons présenté la manière dont l’art. 8 LCD peut être mis en œuvre en lien
avec certaines clauses typiques. Encore faut-il que le Tribunal fédéral admette que
l’art. 8 LCD ait un effet rétroactif sur tous les contrats en cours, sans qu’il soit néces-
saire de modifier complètement (ou partiellement) les conditions générales du contrat
considéré. La portée d’ordre publique de la disposition et l’art. 2 TfCC justifient une telle
mesure incisive, afin de garantir une mise en œuvre effective de la protection des con-
sommateurs, confrontés de plus en plus à des conditions générales, qu’ils doivent accep-
ter sans avoir la possibilité de les négocier.
PASCAL PICHONNAZ
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