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POLITIQUE 14

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et l’onU«L’erreur ne devient pas vérité parcequ’elle se propage et se multiplie ; lavérité ne devient pas erreur parce que nulne la voit.» - Gandhi. Le calvaire que legrand capital assoiffé de pétrole et deprofits fait vivre au peuple ivoirien est uneimmense injustice qui est d’autant plus in-tolérable qu’elle se produit dans l’indif-férence d’une grande partie de mescompatriotes québécois. Depuis bientôtcinq mois, malgré toute ma bonne volontéet mes efforts personnels pour sensibiliseren particulier la classe politique et les mé-dias, j’observe impuissant les Ivoiriens,admirables résistants, se battre seuls con-tre l’argent des maîtres du monde et lesfusils de leurs valets. Je pleure et je meréveille la nuit en les entendant gémir, ap-peler à l’aide.

Une multitude de blogs, de pages Face-book, de canaux Twitter et de sites Webivoiriens et africains sont parcourus decris d’indignation et de hurlements dedouleur qu’efface sans peine le vacarmeassourdissant de la machine de guerre oc-cidentale. A peine audibles, les lamenta-tions des victimes de Duékoué, deGagnoa, de San Pedro, d’Abidjan et dureste de la Côte d’Ivoire se perdent dansles abysses cybernétiques, tandis que lesvampires qui boivent goulûment le sangdes Africains perpètrent tranquillementleurs crimes sous un déluge de média-mensonges. Avez-vous remarqué le si-lence de Radio-Canada depuis quel’affaire est prétendument réglée ? Avez-vous remarqué comme cette bande dejournalistes à gages se tient coite depuisl’enlèvement de Laurent Gbagbo par lesFrançais, qui l’ont remis à de sombresbrutes pour qu’il soit humilié et séquestréavec sa femme, Simone ? Pourtant, les re-belles poursuivent leurs massacres, jouis-sent de l’impunité et se tuent même entreeux, ce qui est très embarrassant pourRadio-Canada, qui nous présentait Alas-sane Ouattara comme le grand démoc-rate désigné comme vainqueur par la«communauté internationale». Les élec-tions fédérales tombant à point nommé,Radio-Canada a donc changé de sujet.

Elle se désintéresse du conflit au momentoù il vient de faire des milliers de morts.Quel contraste avec ce qui s’est passéentre décembre et mars ! Radio-Canadanous avait alors habitués aux quelquescentaines de morts des statistiques plusou moins fictives de l’Onu pour accablerLaurent Gbagbo de tous les maux. Lechaos et la terreur engendrés par l’Onu etla France, qui disaient vouloir protéger lescivils, règnent partout sur le territoireivoirien. Il y aurait deux millions de dé-placés. Les gens se terrent dans les plan-tations ou dans leur maison, en ville. Ilsmanquent de nourriture. Les voyousdrogués et sans âme recrutés par Ouat-tara tuent, pillent, violent et saccagent.Les cadavres jonchent les rues. L’Onuci,force des Nations Unies en Côte d’Ivoire,tire avec ses canons sur les civils de lavaste commune de Yopougon, en pleincœur d’Abidjan. Les jeunes hommes sansarmes sont systématiquement «arrêtés»,sous prétexte que ce sont des miliciens.S’ils résistent, ils sont tués. Les casquesbleus restent sagement dans leurcaserne, à Duékoué, pendant qu’à troiskilomètres de leur camp, des dozo san-guinaires massacrent plus de huit centscivils innocents en deux jours, dans lescris d’horreur. Mais, soudainement, Radio-Canada à des choses plus importantes ànous dire que de nous parler de latragédie provoquée par la soi-disant«communauté internationale», toutcomme Radio-Canada occulte constam-ment le rôle machiavélique de la soi-dis-ant «communauté internationale» dans ledrame haïtien. Je veux aujourd’hui quemes compatriotes québécois prennentconscience d’un scandale abominable etde la nature diabolique de ceux qui ensont la cause. Pétrole de l’île d’Anticostiou pétrole du golfe de Guinée, gaz deschiste de la vallée du Saint-Laurent oucacao ivoirien : même avidité et mêmemépris pour l’humanité. Je n’aurai derepos que lorsque les Québécois descen-dront dans la rue avec l’Afrique et lesautres peuples meurtris pour réclamer lajustice. Je n’aurai de repos que lorsquechaque peuple s’apercevra qu’il n’est pas

seul et cessera de croire ce que lesmenteurs au service de la ploutocratieracontent à propos des autres peuples.Ivoiriens, Haïtiens, Serbes, Congolais,Afghans, Irakiens, Palestiniens, Cubains,Français, Étasuniens et Québécois doiventcesser de se voir les uns les autres à tra-vers le filtre des grands médias et doiventse parler directement. Quand la maisondu voisin brûle, on peut bien faire sem-blant que le problème ne nous concernepas, mais un jour viendra peut-être où cesera la nôtre qui sera en feu. Il n’y ad’avenir pour l’humanité que dans la soli-darité. De la naïveté à la complicité. Si ladésinformation est responsable de l’ap-athie du citoyen lambda, comment se fait-il tout de même que les plus politisésd’entre nous se laissent endormir de lasorte ? Les fabrications mensongèresqu’on essaie de nous implanter dans lecerveau sont d’une grossièreté qui sauteaux yeux. Et nous nous sommes fait fairele coup des dizaines de fois avant, àchaque guerre ou opération impériale desupposé «maintien de la paix». Commentpouvons-nous être dupes des mêmesmensonges ? Comment pouvons-nouscroire que la propagande se conjugueuniquement au passé, dans les manuelsd’histoire ? Comment nous, les Québécois,pouvons-nous nous imaginer qu’il n’y a dedésinformation que lorsque nous ensommes les victimes ? Nous dénonçons leQuébec bashing ou la dissimulation desreculs du français, mais en même temps,nous croyons sans discernement ce queles médias nous racontent au sujet desguerres impériales. A entendre parlerbeaucoup de gens supposément intelli-gents, Obama, Sarkozy, Harper et leurspions menteurs onusiens, qui tiennent la«communauté internationale» en laisse,éprouveraient soudainement une grandepassion pour la démocratie en Afrique. DuGabon à la Tunisie en passant par leRwanda, ils entretiennent depuis bellelurette des relations tout à fait cordialesavec des dictateurs qui tantôt «s’ac-crochent au pouvoir» depuis des décen-nies, tantôt commettent des massacres àgrande échelle. On sait bien pourquoi