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7/28/2019 Ecoutes téléphoniques : Big Brother version mauricienne (2)

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Dossier 

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No 112 24 MARS 2012

EQUIPEMENTS ET PRODUITS AGRICOLES VOLÉS

Deux pompes à eau et quinze sacs de semences de tomates dʼune valeur de Rs 96 000 ont été volés le mardi 20 mars à

11h00 à Pamplemousses. Le directeur de la compagnie agricole a rapporté que le vol sʼest produit entre le jeudi 15

mars et le lundi 19 mars. La police mène lʼenquête.

Pierre, étudiant en journalisme : « Desagents en civil sévissent »

« J’ÉTAIS JOURNALISTE stagiaire aumoment des élections générales de 2010.

 J’accompagnais mon collègue qui couvrait le dépôt des candidatures à Quatre-Bornes. Nous étions dans la cour de l’école lorsque les candidats du Blok 104 sont sortis de la salle de vote où ils avaient déposé leur candidature en tant que «

 Mauriciens ». Mon collègue ainsi que d’autres  journalistes se sont précipités pour les interviewer. Moi j’étais à côté de lui pour tenir le micro. C’est là que j’ai vu ces deux types, qui n’étaient pas des 

 journalistes, mais qui étaient là depuis le matin,dans la cour de l’école, sans rien faire, juste à 

observer. Ils se sont approchés aussi, mais ce n’était  pas pour interviewer. Ils ont profité que les  journalistes demandaient leurs coordonnées téléphoniques aux deux candidats, pour noter ces numéros rapidement sur un petit carnet. Je les ai vus gribouiller les numéros sur le carnet. Je n’ai aucune certitude, bien entendu, mais il me semble assez évident que c’étaient des agents encivil qui ont relevé les numéros de ces candidats du Blok 104 pour les mettre sur écoute par la suite. »

Harish Boodhoo :« Une frayeur dans les yeux … »

« IL Y a une frayeur qui s’est installée dans les 

 yeux des Mauriciens. Même des hauts gradés de la  police me disent, "bhai Harish, sa téléphone la  pa kapav koze". Même aux Télécoms, on vous dit de faire attention quand vous parlez autéléphone. Est-ce que c’est justifié ou non ? Je ne sais pas, mais il y a cette perception, et la 

 perception c’est encore plus dangereux que la réalité. » (Interview parue dans le Journal duSamedi n°109 du 03 mars 2012)

Fatimah, enseignante :« Que par sms … »

« AVEC MA copine, on se parle par sms seulement, parce que mon mari qui est responsable de communication dans une grosse 

entreprise et qui est assez proche du gouvernement, m’a dit que je suis sur écoute. Je ne sais pas si c’est vrai, s’il raconte ça pour me faire 

 peur, mais de toute façon avec ma copine, on ne  parle que de nos vies privées, on ne dit du mal de  personne. »

CE QU’ILS EN PENSENT …

DANS SON rapport de 1983intitulé « Tapping of telephone.Evidence to prove tapping », le chef- juge sir Maurice Rault décrivait déjà ce sentiment généralisé selon lequel« pratiquement tout le monde à 

 Maurice est convaincu que les téléphones sont sur écoute ». Il relevait, associée à cette perception, la croyance selonlaquelle cette pratique tiendrait del’amateurisme, et aurait plus à avoiravec des méthodes à la Dupont etDupond dans Tintin qu’avec JamesBond.

Sir Maurice Rault explique que

cette hantise d’être sur écoute aurait à voir avec ce que nous appelonsaujourd’hui le ‘noubanisme’ : il y aurait d’abord, «le frisson de s’imaginer que l’on est entouré de forces occultes qui épieraient nos moindres faits et gestes»,et ensuite, la tendance (corrective) quiviserait « à se rassurer que NOUS sommes plus intelligents qu’EUX ». Il enrésulte, concluait sir Maurice Rault,«une autosuggestion de masse qui 

 fabrique la croyance selon laquelle nos téléphones sont sur écoute, mais qu’ils sont mis sur écoute par des clowns».

Ecoutes et ʻnoubanismeʼ

DANS LE cadre de son projetintitulé « The Spyfiles », Wikileaks a entamé depuis décembre dernier, la publication d’une vaste banque de

données sur l’industrie de la surveillance de masse. Cette industriesecrète, dont la croissance a explosédepuis le 11 septembre 2001, existedans plus de 25 pays. Les fournisseursd’outils technologiques de surveillancemassive aident les agences derenseignement à espionner desparticuliers et des groupements à grande échelle.

Spyfiles met en ligne des centainesde documents provenant de près de160 entreprises de renseignement del’industrie de la surveillance de masse.

Certaines, comme le sud-africainVASTech, vendent des équipements

permettant d’enregistrer de manièrepermanente les appels téléphoniquesd’un pays entier. D’autres peuventenregistrer la position de tous lestéléphones portables d’une ville. Des

entreprises comme SS8 aux États-Unis, Hacking Team en Italie et Vupenen France fabriquent des virus quipeuvent prendre le contrôle

d’ordinateurs et de téléphones à distance et d’enregistrer lesmouvements, sons et images dans la pièce où ils se trouvent.

L’américain Intelligence IntegrationSystems Inc . (IISI) commercialise unlogiciel «d’analyse basée sur la position» appelé Geospatial Toolkit quipermet de corréler instantanément dessignaux téléphoniques et desempreintes vocales, pour déterminerl’identité et la position d’individus.

D’autres sociétés, comme Phoenexia en République Tchèque, collaborentavec les militaires pour créer des outilsd’analyse de la voix, qui permettent

d’identifier les individus endéterminant leur genre, âge, niveau destress et de les suivre ainsi grâce à leur«empreinte vocale».

DANS SES réponses à la PQ B/748 d’Adeel Ameer Meea, le 18

octobre 2011, sur « National Security Service and telephone tapping », lePremier ministre Navin Ramgoolamdevait expliquer que lors de sonpremier mandat, «il n’y avait aucune instruction pour mettre qui que ce soit sur écoute» et que «j’avais reçu la 

 garantie qu’il n’y avait aucune écoute».Il avait donc décidé de faire démontertous les matériels d’écoute : «Il n’y avait alors plus aucune possibilité 

d’écoute tout ce temps», jusqu’à l’affairede l’évasion de Sabapathee et des

émeutes de 1999, où il avait alors prisla décision de faire réinstaller leséquipements d’écoute. Mais, expliquele PM, « les équipements ne sont 

 pas arrivés à temps. J’ai perdu les élections de 2000. Les équipements sont arrivés entretemps, et le nouveau

 gouvernement a décidé, à juste titre, que ces équipements devaient être installés (…) ».

 A une question d’Alan Ganoo

affirmant que la National Security Service « surveille quotidiennement les 

communications dans le pays », NavinRamgoolam devait répliquer qu’enraison du coût, c’est impossible : « Ils ne le font pas et ce n’est pas possible de le 

 faire. Tout ce que nous pouvons avoir,comme je l’ai expliqué, c’est le ‘qui a appelé qui’». Ce à quoi Paul Bérengerdevait conclure : « L’honorable Premier ministre nous dit qu’il n’y a pas d’écoute 

 par la NSS. Nous croyons le contraire. »

Les tables dʼécouteet Navin Ramgoolam

Un monde sous surveillanceWikileaks :

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