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Monsieur Georges Gallais-HamonnoMonsieur Pedro Arbulu

La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992In: Economie et statistique, N°281, 1995. pp. 3-30.

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Gallais-Hamonno Georges, Arbulu Pedro. La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992. In: Economie et statistique,N°281, 1995. pp. 3-30.

doi : 10.3406/estat.1995.5927

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1995_num_281_1_5927

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AbstractThe Actual Return on Stock Market Investments from 1950 to 1992The actual return on equity investments over the forty-three year period from 1950 to 1992 is evaluatedby transforming the stock market indices into portfolios. The study presented here uses a newmethodology for bond portfolios and is based on the strong hypothesis of reinvested annual income.Two results confirm the findings of previous studies: gold has provided a mediocre return while shareshave again proved to be the highest performing investment over a long period of time. However, for thefirst time since 1914, bond investments have maintained the purchasing power of the savings invested.Listed securities therefore emerge as profitable although the earnings on them are erratic, or risky, dueto sometimes severe stock market fluctuations. There is no alternative to this risk-return link. The onlystrategy is patience. The longer the investment is held, the more price volatility is smoothed and movestowards the lowest fluctuation rate, which nevertheless remains high at 15% for shares and 4% forbonds.

RésuméLa rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992La rentabilité réelle des placements entre 1 950 et 1 992, soit sur une période longue de quarante-troisans, est évaluée en transformant les indices boursiers en portefeuilles. Les travaux présentés ici, baséssur une méthodologie nouvelle pour le portefeuille obligataire, sont réalisés sous l'hypothèse forte duréinvestissement du revenu annuel. Deux résultats confirment ceux des études antérieures : l'or a euune rentabilité médiocre, alors que les actions s'avèrent, une fois de plus, le placement le plusperformant sur le long terme. Par contre, pour la première fois depuis 1914, le placement obligataire apréservé le pouvoir d'achat de l'épargne investie.Ainsi, d'une part, les actifs cotés se révèlent rémunérateurs, d'autre part, leurs résultats sont aléatoiresou risqués car les fluctuations boursières sont parfois extrêmement brutales. Il n'existe pas d'alternativeà ce lien rentabilité-risque, mais seulement une stratégie : la patience. Plus la durée de détention estlongue, plus la volatilité des cours diminue et converge vers un degré incompressible de fluctuation quireste toutefois élevé : 15 % pour les actions et 4 % pour les obligations.

ResumenLa rentabilidad real de los activos bursâtiles de 1950 a 1992La rentabilidad real de las inversiones entre 1950 y 1992, o sea en un periodo largo de 43 ahos, sepondéra aquf al cambiar los indices bursâtiles en carieras. Los estudios que publicamos, se basan enuna nueva metodologia en cuanto a la cariera de obligaciones y se realizan siguiendo la hipôtesisfuerte de la reinversiôn de la renta anual. Dos resultados confirman los de los estudios anteriores : eloro tuvo una mediocre rentabilidad, pero las acciones resultan ser, una vez mâs, la inversion quemayor rendimiento da a largo plazo. En cambio, por primera vez desde 1914, la inversion enobligaciones ha mantenido el poder adquisitivo del ahorro invertido.De este modo, los activos cotizados se revelan, por un lado, remuneradores, por otro lado, losresultados son aleatorios o arriesgados por ser a veces sumamente violentas las fluctuacionesbursâtiles.No existe alternativa al nexo rentabilidad-riesgo, sino tan solo una estrategia : la paciencia. Cuanto mâslarga es la detenciôn, tanto mâs disminuye la volatilidad de los cursos y converge hacia un gradoincompresible de fluctuaciôn, el cual permanece alto sin embargo : el 15 % en cuanto a acciones y el 4% en cuanto a obligaciones.

ZusammenfassungDie tatsâchliche Rentabilitât der bôrsennotierten Vermôgenswerte zwischen 1950 und 1992In diesem Artikel wird die tatsâchliche Rentabilitât der Anlagen zwischen 1950 und 1992, das heiBtwàhrend eines Zeitraums von dreiundvierzig Jahren, durch die Umwandlung der Bôrsenindizes inPortefeuilles bewertet. Die hier vorgestellten Arbeiten, die auf einer neuen Méthode furSchuldverschreibungs-Portefeuilles beruhen, sind unter der starken Annahme durchgefùhrt worden,da(3 der Jahresertrag wieder investiert wird. Zwei Ergebnisse bestâtigen diejenigen, die bei vorausge-gangenen Untersuchungen erzielt wurden: Gold hat eine mittelmâBige Rentabilitât, wâhrend sich die

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Aktien einmal mehr als die Anlagen mit der langfristig hôchsten Ertragskraft erweisen. Dagegen habendie Anlagen inSchuldverschreibungen zum ersten Mal seit 1914 die Kaufkraft der investierten Spargelder bewahrt.Einerseits erweisen sich die bôrsennotierten Vermôgenswerte somit als recht rentabel, und andererseitssind ihre Ertrâge aufgrund der manchmal extrem gro3en Bôrsenschwankungen mit Unsicherheiten oderRisiken behaftet. Zu dieser Verbindung zwischen Rentabilitât und Risiko gibt es keine Alternative,sondern lediglich eine Stratégie, und zwar die der Geduld. Je langer die Laufzeit ist, desto mehr nimmtdie Volatilitat der Kurse ab und nâhert sich einem nicht reduzierbaren Schwankungsgrad, der jedochhoch bleibt: 1 5% bei den Aktien und 4% bei den Schuldverschreibungen.

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PATRIMOINE

La rentabilité réelle

des actifs boursiers

de 1950 à 1992

Georges Gallais-Hamonno et Pedro Arbulu*

* Georges Gallais- Hamonno est Professeur à l'Université d'Orléans et directeur- adjoint de l'Institut Orléanais de Finance (IOF) et Pedro Arbulu est doctorant à l'IOF.

Les auteurs remercient pour leurs critiques cons- tructives : un rapporteur anonyme et Roselyne Kerjosse de la revue, le Professeur Anne Lavigne, Jean Berthon, Gérard Athias et André Le Saux, respectivement président et trésorier de l'Association française d'épargne et de retraite (AFER), et les membres du groupe de travail de l'Insee réunis autour de Jean-Marie Calliès, tout spécialement Paul Le Fillâtre, Jean-Jacques Malpot et Madeleine Dangu.

Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d'article.

La rentabilité réelle des placements entre 1950 et 1992, soit sur une période longue de quarante-trois ans, est évaluée en transformant les indices boursiers en portefeuilles. Les travaux présentés ici, basés sur des calculs nouveaux pour le portefeuille obligataire, sont réalisés sous l'hypothèse forte du réinvestissement du revenu annuel. Deux résultats confirment ceux des études antérieures : l'or a eu une rentabilité médiocre, alors que les actions s'avèrent, une fois de plus, le placement le plus performant sur le long terme. Par contre, pour la première fois depuis 1914, le placement obligataire a préservé le pouvoir d'achat de l'épargne investie.

Ainsi, d'une part les actifs cotés se révèlent rémunérateurs, de l'autre, leurs résultats sont aléatoires ou risqués car les fluctuations boursières sont parfois extrêmement brutales. Il n'existe pas d'alternative à ce lien rentabilité-risque, mais seulement une stratégie : la patience. Plus la durée de détention est longue, plus la volatilité des cours diminue et converge vers un degré incompressible de fluctuation qui reste toutefois élevé : 15 % pour les actions et 4 % pour les obligations.

Cet article présente une vision d'ensemble des évolutions boursières de la période de

quarante-trois ans qui nous sépare de la fin de la « reconstruction d'après-guerre » et met à jour la dernière étude de l'Insee sur ce thème qui s'arrêtait en 1980 (Fabre, 1981) (1). Un panorama de l'évolution des cours est réalisé pour les trois actifs cotés à Paris : les actions, les obligations et l'or.

Pour savoir si les différents placements boursiers ont préservé le pouvoir d'achat du capital investi, les indices Insee ont été transformés en portefeuilles indiciels (parfois appelés « indices de performance ») par le

ment du revenu annuel et de son avoir fiscal (ou crédit d'impôt) (2). Les séries de portefeuilles indiciels utilisées ici sont donc originales, tout spécialement dans le cas du placement obligataire.

1. Étude qui, elle-même, mettait à jour les recherches antérieures de l'Insee faites par Laforest (1969, 1971, 1973 et 1974) et par Laforest et Sallée (1977). 2. Les éléments de base de cette recherche doivent être publiés sous la forme d'un document technique et d'une disquette comprenant les séries mensuelles collectées ou construites pour cette étude.

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3. Les taux présentés sont systématiquement (sauf indication contraire) des taux d'intérêt composés. Les taux et les indices sont arrondis.

L'évolution boursière depuis 1950

Les évolutions des indices nominaux représentatifs des actions, des obligations,

de l'or et des prix sur cette période de quarante-quatre ans peuvent être expliquées, au moins partiellement, par le contexte politique ou économique. Quatre évolutions très contrastées se dessinent (cf. graphique I).

Les prix : de l'inflation à la stabilisation

L'évolution de l'indice des prix de l'Insee (base 1980 ramenée à 100 au 31 décembre 1949) indique six phases.

De 1950 à 1952, une très forte inflation est induite par les guerres d'Indochine et surtout de Corée. L'indice passe de 100 à 142 en vingt- six mois (décembre 1949-février 1952), soit au taux de 17,5 % par an (3).

Pendant la seconde période, de 1952 à mi- 1957, « l'inflation coréenne » est stoppée par le gouvernement de M. Pinay. Cette stabilisation dure jusqu'à la fin du premier semestre 1957 (l'indice est toujours à 142).

De mi-1957 à mi-1958, la guerre d'Algérie et des tensions sociales et politiques font brutalement passer l'indice à 168 en juin 1958, soit une hausse de 1 8 % en un an. Cette inflation ouverte est arrêtée par la deuxième stabilisation Pinay,

Graphique I Évolution de la Bourse de 1 950 à 1 993 (indices nominaux) * Échelle semi-log. 10 000

1 000

100

10

- IVe République

Octobre 1957 Bataille d'Alger 1956 Indépendance Maroc Tunisie Crise de Suez

1952 Stabilisation Pinay

Guerres de •• Corée Indochine

Général de Gaulle

Avril 1962 Accords d'Évian retour de plus d'un million de Français d'Algérie

Pompidou 1973 1er choc

pétrolier guerre du Kippouf

Giscard d'Estamg

r4 521

Août 1993 Marges de fluctuations duMSMEà15% I I I I I I I I i! I I I I I I I I I I I1 I I I I ill I I I I I I i!i I I I I I I I I I I I

Mitterrand Août 1990 OctobreKoweit 1987 krach

Années (5) Obligations (1) Actions (2) Or (3) Prix (4)

1. Obligations : indice des valeurs françaises à revenu fixe (VFRF) de l'Insee de 1950 à 1992 et indice CNO pour 1993. Ce dernier n'est pas directement comparable à l'indice VFRF car il réinvestit les coupons distribués, mais seul disponible au moment de la rédaction de cet article, il permet de prolonger la série jusqu'à fin 1993. 2. Actions : indice des valeurs françaises à revenu variable (VFRV) de l'Insee de 1950 à 1993. 3. Or : cours du napoléon (pièce de 20 francs). 4. Prix : indice mensuel des prix à la consommation de l'Insee (100 = moyenne de 1980). 5. Le trait sur l'axe des abscisses correspond au mois de décembre. * Indices nominaux mensuels (base 100 au 31 décembre 1949). Source : Bulletin mensuel de statistique (BMS).

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4. Il sera converti en octobre 1973 en un emprunt 4,5 %, toujours indexé sur la pièce de 20 francs mais qui ne bénéficie plus de l'exonération des droits de succession.

ministre des Finances du gouvernement du Général de Gaulle.

De 1959 à 1973, une inflation rampante s'installe : la hausse des prix est continuelle, au rythme de 4,5 à 5 % par an. L'indice s'élève à 346 en 1973.

La phase suivante couvre la période de 1974 à 1985. Les deux chocs pétroliers accélèrent l'inflation. Malgré les politiques de stabilisation, la hausse annuelle moyenne des prix pendant ces douze années est de plus de 10 %. L'indice est à 1 113 à la fin de 1985.

Depuis 1986, les prix sont stabilisés. Après vingt-huit ans de hausse permanente, les prix n'évoluent plus qu'à un rythme inférieur à 3 % par an. Fin 1993, l'indice s'élève à 1 389.

Les obligations : de l'indexation à la domination

L'évolution de l'indice Insee des valeurs françaises à revenu fixe (VFRF) cotées à la Bourse de Paris s'explique essentiellement par la réaction des émetteurs (État, sociétés publiques et sociétés privées) à l'évolution des prix. C'est pourquoi il n'y a en fait que deux sous-périodes : celle avec inflation et celle avec stabilité des prix.

De 1950 à 1981: la protection vis-à-vis de l'inflation

Les épargnants souhaitent préserver la valeur réelle de leur épargne, aussi les émetteurs proposent-ils des formules plus ou moins protectrices.

Les emprunts d'État sont connus : emprunt Pi- nay, 3 %, 1952-1958 indexé sur le napoléon (4) ; emprunt Ramadier de 1956 indexé sur le cours des valeurs françaises à revenu fixe et variable ; emprunt Giscard d'Estaing de 1973 émis à 7 % avec une indexation sur le change (rapport entre le poids d'or officiel du franc et le poids d'or de l'Écu) ; emprunt Barre de 1977 indexé sur l'Écu. De même, les entreprises publiques utilisent diverses formes d'indexation liées à leur activité productrice comme, par exemple, les obligations de la SNCF à lots-kilométriques, où des titres tirés au sort donnent à leurs détenteurs des montants gratuits de kilomètres. L'émission la plus importante de ce secteur est celle des obligations indemnitaires de la

Caisse nationale de l'Énergie données aux détenteurs d'actions des sociétés privées d'électricité et de gaz expropriés à la Libération pour créer EDF-GDF. Si son taux d'intérêt nominal n'était que de 3 %, ce titre bénéficiait d'une indexation remarquable : le montant du coupon et de l'amortissement annuel était représenté par 3 % du chiffre d'affaires des deux sociétés ; or, le prix de l'électricité suit l'évolution générale des prix et la production double tous les dix ans.

Parallèlement, les sociétés privées proposent, à côté des obligations classiques et dont la durée de vie se raccourcit, des obligations plus protectrices vis-à-vis de l'inflation : des obligations convertibles et, surtout, des obligations à taux variables (5).

L'évolution de l'indice général des obligations françaises (6), entre 1950 et 1980, montre que ces différentes modalités de protection n'ont pas été vaines. Certes, elles ont été insuffisantes puisque l'indice est systématiquement inférieur à l'indice des prix (7). Néanmoins l'indice suit à peu près la hausse des prix jusqu'en 1963, décroche de 1963 à 1974 puis augmente brutalement, passant de 190 à la fin de 1976 à 345 en 1979, soit une progression annuelle de 16 %. Une telle hausse, tout à fait inhabituelle pour des obligations, est due au jeu des différents mécanismes d'indexation et, tout particulièrement, à l'effet de l'envolée du napoléon sur l'emprunt Pinay, plus grosse capitalisation boursière obligataire à l'époque.

5. Pour les différentes sortes d'obligations ou d'actifs hybrides, voir Pilverdier-Latreyte (1988). 6. De 1950 à 1980, l'indice VFRF, calculé par l'Insee, est composé de cinq sous-indices : rentes perpétuelles (3% et 5% héritées du XIXe siècle et qui seront remboursées en 1987), rentes amortissables, secteur public industriel à revenu fixe, secteur public indexé et secteur libre (les sociétés privées). De 1981 à 1992, trois sous-indices le composent: emprunts d'État, emprunts du secteur public garantis par l'État et sociétés. Chaque sous-indice est calculé à partir d'un échantillon de titres et son poids dans l'indice d'ensemble correspond à la part de la capitalisation boursière de chaque sous-secteur dans le marché obligataire. 7. Le sous-indice « secteur libre » ne comporte que des obligations classiques et pas de convertibles ou de taux variable. Cette exclusion s'explique par le fait que ces obligations étaient « classées » dans les portefeuilles d'investisseurs institutionnels (Sicav, caisses de retraite, compagnies d'assurance) et, en conséquence, ne connaissaient pas ou peu de transactions. Ce choix technique a pour conséquence de sous-estimer l'effet de la protection.

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Depuis 1982 : un marché moderne et dominant

Les années 1982-1985 entraînent une rupture radicale dans cette évolution car les circuits monétaires et financiers sont modernisés et déréglementés. La stabilité des prix, inconnue depuis 1952-1956, rend inutile toute forme d'indexation, mais des déficits budgétaires très importants conduisent à l'augmentation de la dette publique dont la gestion devient primordiale.

La gestion de la dette publique est donc modernisée. Au lieu d'emprunts ayant des caractéristiques différentes et émis à des dates irrégulières, l'État émet de manière permanente des titres homogènes, les obligations assimilables du Trésor (OAT). Il s'agit de la reprise de la technique des rentes perpétuelles du XIXe siècle mais avec la caractéristique du remboursement prévu et daté. Les OAT sont des obligations classiques, remboursables in fine et ayant une durée de vie longue (elle va jusqu'à trente ans). Selon ses besoins, l'État émet des tranches successives d'une même OAT, ce qui les rend assimilables aux anciennes obligations, mais le prix d'émission est différent car il correspond au taux prévalant sur le marché.

Les entreprises publiques et privées reviennent aux obligations classiques mais avec un remboursement uniquement in fine et dont la durée de vie s'allonge. Certaines entreprises publiques bénéficient de la garantie de l'État. Mais cette garantie est de plus en plus rare car les emprunteurs n'apprécient pas sa contrepartie : une petite diminution du taux de coupon annuel. De leur côté, les sociétés privées profitent de la loi Delors de janvier 1982 qui donne aux emprunteurs la possibilité d'inventer librement des actifs financiers ; d'où l'apparition d'actifs hybrides - mi-obligations, mi-actions - et d'actifs à éléments conditionnels (obligations à bons de souscription en obligations, OBSO, ou en actions, OBSA).

Depuis la stabilisation des prix de 1986, l'indice obligataire se maintient au niveau des 400 points. Les titres un peu anciens, émis en 1981 et 1982 avec des taux de coupon très élevés, s'apprécient avec le reflux des taux d'intérêt à long terme à partir du maximum historique de 17,8% atteint en 1981.

Mais cette évolution n'indique pas le fait majeur : le marché obligataire est devenu le marché boursier le plus important, tant par le

volume d'émissions que par l'importance des transactions. À l'instar des autres grands marchés financiers étrangers, le marché obligataire français a toujours eu un montant d'émissions plus important que le marché des actions pour deux raisons. D'une part, les obligations procurent le revenu recherché par les ménages à la retraite ; d'autre part, les entreprises préfèrent émettre des obligations plutôt que des actions parce que le coupon annuel des premières fait partie des frais financiers fiscalement déductibles.

Le phénomène le plus nouveau est l'extraordinaire développement du marché obligataire en tant que « marché secondaire », et tout particulièrement celui des emprunts d'État. En effet, le marché obligataire est devenu le marché boursier ayant le plus grand nombre de transactions, alors que jusque-là c'était celui des actions. Cette situation est due à l'importance quantitative de la dette publique, à l'existence de mécanismes de protection vis-à-vis des fluctuations de taux d'intérêt qui utilisent justement des emprunts d'État (8) et à la présence de très nombreux gérants de fonds obligataires.

Les actions : du déclin au renouveau

L'évolution du cours des actions est très heurtée, mais le fait le plus saillant de la période est certainement leur renaissance après une période de déclin d'environ dix-sept ans. Rétrospectivement, quatre phases se distinguent.

De 1950 à avril 1962: la hausse suit la croissance économique

Pendant douze ans, les actions connaissent une forte hausse accompagnant la croissance économique. L'indice Insee des valeurs françaises à revenu variable (VFRV) passe de 100 à la fin de l'année 1949 à 774 en avril 1962, soit une progression au taux moyen de 18 % par an.

Cette hausse n'est pas continue mais est, au contraire, entrecoupée par des périodes de stabilité ou de baisse : en 1951 avec la première stabilisation Pinay ; en 1955 et 1956 en raison

8. Il s 'agit des instruments de couverture permis par l'ouverture en 1985 du Marché à terme international de France (Matif) (Aftalion et Poncet, 1991) et en 1987 du Marché des options négociables de Paris (Monep) (Berthon et Gallais-Hamonno, 1994).

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9. Cette date coïncide avec les Accords d'Évian et le retour de plus d'un million de Français d'Algérie. Des inquiétudes (finalement non fondées) sur l'intégration de ces rapatriés par l'économie française auraient pu légitimer une baisse momentanée des cours mais n'expliquent certainement pas cette baisse continue pendant cinq ans.

des incertitudes politiques et internationales (dissolution de la Chambre des députés par M. Edgar Faure et élections de 1956, problèmes d'outre-mer - indépendances du Maroc et de la Tunisie, début de la guerre d'Algérie - et, fait certainement majeur, nationalisation du canal de Suez par Nasser) ; crise économique et politique de 1958.

Cette longue période de hausse accompagne et suit l'utilisation de la Bourse par les entreprises pour financer leurs investissements. Entre 1949 et 1959, le nombre annuel d'émissions d'actions a été multiplié par sept et les montants investis par trois.

D'avril 1962 à décembre 1978 : la traversée du désert

De façon assez inexplicable, cette progression des actions s'arrête brutalement en avril 1962 (9). Pendant cinq ans, les cours vont baisser de manière continue, et au point bas de juillet 1967 l'indice est à 419, soit une chute de 54 %, au taux moyen de 1 1 % par an.

Les onze années suivantes (1967-1978) se caractérisent par une série de petites hausses aussitôt reperdues par une série de petites baisses - à l'exception de l'année 1974 que l'on peut baptiser du nom de « krach oublié » puisque, en phase avec la Bourse américaine et sa réaction au premier choc pétrolier, l'indice chute de 24 %.

L'insuffisance de croissance économique ne constitue pas une explication puisque les années 1962-1973 font, au contraire, partie des « trente glorieuses » et les terminent. L'explication peut se trouver du côté des comportements. La politique économique, surtout dans le domaine industriel, utilise davantage les subventions et la fiscalité, et non plus l'épargne. Ceci peut être illustré par deux citations connues du Général de Gaulle : le plan « ardente obligation » et « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille ».

Modification, également, du comportement des entreprises qui se détournent de l'appel à l'épargne par l'intermédiaire de la Bourse et préfèrent financer leurs investissements en s'endettant auprès des banques ; endettement lui-même facilité et encouragé par les pouvoirs publics qui utilisent les bonifications d'intérêt. Les émissions d'actions diminuent en nombre et en montant de manière extrêmement forte.

En fait, le seul point positif de cette période, en ce qui concerne la Bourse, est l'apparition en mars 1964 des sociétés d'investissement à capital variable (Sicav). Ces dernières ainsi que les fonds communs de placement (FCP), à vocation générale créés en 1978, vont donner naissance, en trente ans, à une véritable industrie financière qui est aujourd'hui la deuxième au monde, derrière celle des États-Unis mais devançant largement celle du Japon. Elle représente à elle seule le poids des organismes de placement collectif de valeurs mobilières (OPCVM) dans le reste de la Communauté européenne. Ce nouvel instrument a permis une véritable démocratisation des placements boursiers et a participé activement à la renaissance du marché des actions (Gallais-Hamonno, 1995).

De 1979 à septembre 1987 : les quatre-vingt rugissants

Par analogie avec l'expression The Roaring Twenties qui décrit le boom des actions américaines de 1922 à 1929 (10), les années 1979 à 1987 peuvent être qualifiées de « quatre- vingt rugissants » pour les actions françaises. Le marasme boursier commencé en 1962 est interrompu en 1978 par l'incitation fiscale imaginée par M. Monory, ministre délégué aux Finances du gouvernement de M. Barre : tout ménage peut déduire de son revenu imposable 5 000 F (plus 1 000 F par enfant à charge) à condition de les placer en actions françaises et de les conserver pendant cinq ans. Les Français profitent de cet avantage fiscal dès le quatrième trimestre 1978, ce qui fait repartir à la hausse les actions pendant deux ans.

Cette relance est brutalement stoppée par l'élection de M. Mitterrand (les actions perdent 25 % entre avril et juin 1981) mais reprend ensuite en raison d'un double phénomène. Un effet de rattrapage d'une part : les intervenants prennent conscience que les cours boursiers sont très en retard par rapport à la valeur des sociétés cotées et à l'augmentation de leurs bénéfices. Un « effet d'entonnoir » ensuite : les nationalisations de 1982 entraînent la radiation des actions des sociétés les plus grosses alors même qu'une épargne importante et nouvelle cherche à se placer en Bourse. Cette épargne provient de trois sources : la réorientation d'une partie des flux qui se dirigeaient vers

10. L'indice Dow Jones passant de 70 à presque 400.

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11. Le Second Marché est l'adaptation française d'une invention anglaise : le Unlisted Securities Market ouvert en 1980. Il s'agit d'un marché organisé ouvert aux entreprises de taille moyenne et pour lequel les conditions d'introduction sont minimales. 12. L'OPA est le fait pour une société (« l'attaquante ») de proposer aux actionnaires d'une autre société cotée (« l'attaquée ») de leur acheter tout ou partie de leurs actions, à un prix déterminé supérieur au cours de Bourse, afin de prendre le contrôle de ladite société. Une OPE est généralement moins agressive et concerne surtout des opérations de simplification des structures d'un groupe industriel. La société- mère propose aux actionnaires d'une filiale cotée d'échanger leurs actions contre celles de la société-mère afin que ladite filiale soit détenue à 100 % et radiée de la Bourse.

13. L'indice Insee des VFRV s'arrête en dé

cembre 1993. Il a été chaîné avec l'indice SBF-250pour 1994.

l'immobilier en raison d'un moindre attrait de l'acquisition de logement ; le nombre de petits contribuables qui profitent de l'avantage Monory ; un changement de mentalité qui découvre les vertus de l'entreprise et du marché. D'où une série de hausses impressionnantes : 58 % en 1983, 22 % en 1984, 38 % en 1985 et 53 % en 1986.

On assiste donc à un véritable renouveau du marché des actions. Les entreprises redécouvrent son rôle de « marché primaire » pour financer les investissements ; les émissions d'actions et les introductions en Bourse reprennent. Ce mouvement est d'ailleurs amplifié par la création en 1983 du Second Marché (11) qui ouvre les mécanismes boursiers à des sociétés de taille moyenne. Phénomène nouveau en France, les entreprises utilisent également la Bourse pour leurs opérations de restructuration industrielle : les offres publiques d'achat (OPA) et les offres publiques d'échanges (OPE) se multiplient (12).

Depuis 1987 : krachs et incertitudes

Les spécialistes s'accordent à dire que les hausses de 1986 (53 %) et du premier semestre 1987 (23,6 %) n'étaient plus reliées à des anticipations sur les éléments fondamentaux de la croissance des entreprises mais correspondaient à une « bulle spéculative ». Le lundi 19 octobre 1987 la bulle explose. La Bourse de Tokyo réagit la première avec une baisse de 2,35 % ; puis Paris et Londres baissent de 10 % ; enfin New- York termine (par rapport à Paris) la journée avec une baisse de 22 %, les premières cotations s' effectuant vers midi alors que la Bourse ouvre à 10 heures. Le lendemain, le séisme continue à se propager de place boursière en place boursière : Tokyo, Sydney, Hong-Kong ; puis de nouveau Paris, Londres, Francfort et New-York. En définitive les actions françaises perdent 14 % en octobre et 18 % en novembre. Au point bas de janvier 1988, l'indice des actions aura perdu 36 %.

Certes, les cours remontent en 1988 (+ 40 %) et en 1989 (+ 27 %). Mais l'invasion du Koweït par l'Irak entraîne un mini-krach : - 13 % en août et - 11 % en septembre 1990. Les années 1991 et 1992 sont médiocres ; l'année 1993 est nettement meilleure, 27 % de hausse grâce au retour des taux longs au-dessus des taux courts qui passent de 11,41 % en janvier à 6,32 % en décembre ; mais, l'année 1994 a été mauvaise avec une baisse de 17 % (13).

Mais le phénomène inquiétant est représenté par la nette diminution des émissions d'actions et des introductions de sociétés cotées ainsi que la quasi-disparition des OPA. Ce changement d'attitude serait dommageable s'il devait conduire au retour du désintérêt des années 1962- 1978. Par contre, il serait un bien s'il signifie que les épargnants ont compris que la Bourse n'est pas un casino mais, au contraire, est liée à la croissance des entreprises ; et qu'en conséquence le placement en actions demande le long terme et de la patience.

L'or : du refuge à la relique ?

La Bourse de Paris a toujours été un des marchés les plus actifs de l'or. Pas moins de dix-sept actifs « or-métal » y sont cotés : la barre de dix kilos, le lingot d'un kilo et surtout quinze pièces, deux françaises et treize étrangères (cf. encadré 1). Mais ce sont le lingot et la pièce d'or de 20 francs, appelée le napoléon, qui constituent des marchés très actifs et très liquides.

Les Français considèrent l'or comme la valeur- refuge par excellence, à la fois par sa durabilité, son anonymat (14) et l'absence de droits de succession qui s'y rattachent en fait (mais non en droit). Les Français détiendraient environ 5 000 tonnes d'or, détention qui serait répartie entre un tiers en lingots et deux tiers en pièces, essentiellement des napoléons.

L'évolution du cours du napoléon (transformée en indice base 100 le 31 décembre 1949) semble être assez bien expliquée par l'interaction de deux phénomènes antagonistes. D'une part, les craintes lors des crises qui poussent à sa détention (l'aspect valeur « refuge ») et, d'autre part, l'attraction des placements (actions et obligations) qui, contrairement à l'or, distribuent un revenu annuel. La stabilisation Pinay et la hausse des actions qui s'ensuit font délaisser l'or dont l'indice est à 59 en juillet 1955, soit une baisse de 41 % en cinq ans et demi. Mais les problèmes coloniaux, la crise de Suez et la crise politique de 1957-1958 font regagner à la pièce de 20 francs sa valeur de départ, l'indice étant à 98 en novembre 1957. Une phase d'augmentation lente et régulière suit jusqu'en mai 1968 où l'or retrouve son rôle de refuge : en un an, d'avril 1968 à avril 1969, le napoléon gagne 38 %.

14. L'anonymat a été supprimé en 1982 mais rétabli en 1986.

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De même, la libération du marché par la suppression de la convertibilité du dollar en or, le premier choc pétrolier et la guerre du Kippour le font littéralement s'envoler, et l'indice culmine à 698 en novembre 1974.

Après une période calme de quatre années durant lesquelles l'indice oscille entre 500 et 600, il s'envole à nouveau, sans doute à cause de l'augmentation du dollar, du deuxième choc pétrolier de juin 1979 et de l'invasion soviétique en Afghanistan en décembre 1979. L'indice passe de 623 à la fin de 1978 à un maximum historique de 2 178 en septembre 1984. La hausse est de 350 % en trente-trois mois, soit un taux annuel de 58 %.

Depuis cette apogée, l'or est en baisse. Fin 1993, l'indice est revenu à 967, soit une chute

de 56 % en un peu plus de douze ans au rythme annuel de 6,5 %. Une partie de cette baisse est due a des arbitrages au profit des actions et des obligations plus rémunératrices. Mais plus symptomatique paraît l'absence de réaction du marché de l'or entre août 1990, crise du Koweït, et février 1991, fin des opérations militaires de « Tempête du Désert » : l'indice est à 91 1 à la fin de juillet 1990 et à 937 à la fin février 1991. L'or continue de baisser alors que la situation internationale ne s'est guère stabilisée depuis 1 99 1 . On peut se demander si cela ne reflète pas l'arrivée d'une nouvelle génération qui n'a pas les mêmes réflexes que ses aînés. L'or semble être en train de devenir une matière première comme les autres, dont le marché est le fait des industriels concernés. Si cette impression se confirmait, cela constituerait un tournant majeur dans l'histoire de la mentalité française.

Encadré 1 L'OR COTE A LA BOURSE DE PARIS

La Bourse de Paris négocie dix-sept actifs or-métal. Sont également cotés :

La barre de spécification internationale

-Poids : compris entre 10,8862 kg et 13,3744 kg d'or fin.

- Titre : au moins égal à 995/1 000e. - Cours : kilo d'or fin (c'est-à-dire que le prix d'une

barre déterminée est égal au cours du kilo multiplié par le poids de la barre multipliée par son titre).

- Cotation : quotidienne.

Le lingot - Poids : compris entre 995 et 1 005 g. - Dimension la plus courante : 3,56 cm de large, 9 cm

de long et 1 ,5 cm d'épaisseur. - Titre : au moins égal à 995/1 000e. - Cours : kilo d'or fin (cf. ci-dessus). - Cotation : quotidienne.

Le napoléon - Pièce française de 20 francs frappée pour la pre

mière fois en 1792. Depuis, 516 561 779 napoléons ont été frappés.

- Poids : 6,5 g dont 5,80644 d'or fin. - Diamètre : 21,2 mm. - Épaisseur : 1 ,2 mm. - La pièce courante est en général une pièce (posté

rieure à 1848) « Napoléon III » ou un « Coq » (pièce de la IIIe République). À partir de cette base, des pièces à l'effigie du Premier consul, de Napoléon Ier ou de Louis XVIII peuvent, en fonction de leur rareté et de leur qualité, être cotées de 1,3 à 10 fois le cours de bourse du napoléon ordinaire.

- Cotation : quotidienne, pour des pièces de qualité moyenne.

- Le demi-napoléon : pièce française de 1 0 francs ; cette pièce étant rare, sa cotation est hebdomadaire.

- Treize pièces étrangères, dont les plus négociées sont la pièce américaine de 20 dollars, le 50 pesos mexicain et le souverain de Grande-Bretagne.

Mais le seul marché actif et liquide est celui de la pièce de 20 francs.

La cotation de l'or entraîne l'existence d'une prime dont l'origine est la prise en compte de tous les éléments expliquant la qualité supérieure (ou inférieure dans le cas d'une prime négative) d'une pièce par rapport à une pièce courante ou de qualité moyenne : travail du fondeur, celui de l'orfèvre, travail de frappe, rareté, phénomènes de mode, etc. La prime est définie comme la différence entre le cours effectivement atteint par une pièce d'or et le prix auquel elle aurait été payée si ce cours était uniquement fonction du poids d'or contenu dans la pièce. La prime est généralement positive. Prime = (cours effectif - cours théorique) / cours théorique, avec : cours théorique = cours lingot x poids d'or de la pièce / 1 000.

Exemple du napoléon le 5 mai 1992 : Cours théorique : 60 350 x 5,80614 / 1 000 = 350,42 Prime : (340 - 350,42) / 350,42 = - 0,0297 soit - 2,97 %. Ce jour-là, la prime était négative !

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1

Page 11: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

L'évolution boursière depuis 1950, qui vient d'être brièvement décrite, pose une question : quelle a été la rentabilité du placement boursier en termes réels ? Elle soulève également un problème, celui du risque que représentent ces actifs.

tion le cas des Sicav et des fonds communs de placements (FCP), celui des investisseurs institutionnels (compagnies d'assurance ou caisses de retraite), et celui des futurs fonds de pension.

Évaluer la rentabilité réelle des placements

Les ménages ne possèdent pas, en général, un seul titre mais un ensemble de titres,

c'est-à-dire un portefeuille. C'est par défini-

Prendre aussi en compte les revenus annuels

Les titres de ces portefeuilles cotés ou non, produisent deux types de revenus annuels : des coupons pour les obligations et des dividendes pour les actions. De plus, ces revenus bénéficient d'une fiscalité spécifique qui aboutit à

Encadré 2 REVENUS MOBILIERS, AVOIR FISCAL ET CRÉDIT D'IMPÔT

Les revenus annuels des valeurs mobilières sont de deux types : - le coupon, versé chaque année par l'obligation est déterminé par le contrat d'émission. Il est obtenu en faisant le produit du taux d'intérêt nominal (ou facial - le taux de coupon) par le montant nominal de l'obligation, généralement 2 000 ou 5 000 francs ; - le dividende, distribué par les sociétés à leurs actionnaires au titre de leur quote-part dans les bénéfices réalisés.

Les corrections fiscales Les pouvoirs publics ont mis en place deux mécanismes pour corriger l'incidence de deux impositions antérieures sur le revenu distribué des valeurs mobilières.

Le procédé correcteur le plus connu est l'avoir fiscal des actions. Il a été créé en 1965 pour neutraliser la double imposition que subit le dividende. En effet, les bénéfices des sociétés sont d'abord soumis à l'impôt sur les sociétés (en 1994 au taux de 33,3 %) et la partie distribuée aux actionnaires est ensuite soumise à l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). L'avoir fiscal de 50 % du montant du dividende signifie que l'État rétrocède ce qu'il a prélevé au niveau de la société. Le contribuable est imposé à l'IRPP sur le montant cumulé, dividende reçu plus avoir fiscal, mais l'avoir fiscal vient en déduction du montant d'impôt à payer. Si le solde est créditeur, il est remboursé par l'administration. Lors de sa création en 1965, le taux de l'impôt sur les bénéfices des sociétés (IS) était de 50 %, aussi l'avoir fiscal de 50 % ne permettait-il qu'une neutralisation partielle. Depuis 1992, le taux de l'IS est de 33,3 % ; l'avoir fiscal étant toujours de 50 % du dividende, la correction est totale (exemple :

fices = 100, soit 33,3 d'IS ; le reste est distribué : 66,7 avec un avoir fiscal de 50 % soit 33,3 ; le dividende « global » est 66,7 + 33,3 = 100).

Le second procédé correcteur est celui du crédit d'impôt des obligations. Il a été mis en place pour neutraliser le prélèvement effectué au niveau de la société émettrice appelé « retenue à la source ». Cette dernière était la règle générale pour les titres à revenu fixe (à l'exception des emprunts d'État) émis avant 1987. Le crédit d'impôt ouvrait (comme l'avoir fiscal) une créance sur l'État d'un montant égal à la somme prélevée à la source et empêchait donc ce prélèvement de se transformer en impôt supplémentaire.

Cette retenue à la source ayant été supprimée pour les revenus des émissions d'obligations et titres assimilés à partir du 1er janvier 1987, les revenus de ces émissions ne bénéficient plus d'un crédit d'impôt. Ce mécanisme disparaîtra donc de lui-même lorsque les émissions antérieures à 1987 auront été définitivement amorties. Si ces deux corrections ne sont pas négligeables, elles ne sont pas du même ordre de grandeur.

Toutes les actions, sauf celles des sociétés bénéficiant de la transparence fiscale (les Sicomi) bénéficient de l'avoir fiscal. Son effet est bien d'augmenter de presque 50 % le taux de dividende de l'ensemble des actions françaises.

Par contre, le crédit d'impôt ne joue que pour les obligations classiques des sociétés publiques et privées et non pour les emprunts d'État et les obligations indexées. De plus, cet effet diminue avec l'inclusion d'émissions postérieures à 1986 dans les échantillons servant de base aux indices. En conséquence, le crédit d'impôt ne représente que 2 à 3 % du coupon du portefeuille d'ensemble des obligations françaises.

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15. Ce qu'on appelle la capitalisation des revenus. Cette dernière est automatique avec les Sicav de capitalisation et est discrétionnaire avec les Sicav de distribution qui proposent à leurs actionnaires le réinvestissement sans frais.

16. Le décalage d'environ un an qui sépare la perception du revenu mobilier de l'imputation fiscale de son crédit ou avoir correspondant n'est donc pas pris en compte. Ce réinvestissement prématuré conduit à des résultats un peu surestimés.

augmenter le revenu perçu : les coupons bénéficient du crédit d'impôt et les dividendes de l'avoir fiscal (cf. encadré 2).

L'existence de ces revenus annuels pose le problème de leur prise en compte. En effet, dans la majorité des cas, et tout spécialement dans celui des obligations qui sont acquises pour leur coupon annuel, les ménages consomment ces revenus. Quelle valeur peut-on leur attribuer alors qu'il est impossible de mesurer l'utilité subjective (ou le bien-être généré) d'une consommation ? Cette difficulté est contournée en regardant l'utilisation alternative que le détenteur peut faire de ces revenus : au lieu de les consommer, il peut les réinvestir en Bourse en rachetant le même actif (15). Ceci mesure bien ce que le détenteur « a perdu » en consommant son coupon ou son dividende.

Il est important d'insister sur ce problème et sur sa solution. Psychologiquement, de très nombreux ménages détenteurs de Sicav ou de FCP ne considèrent que l'évolution nominale de leurs titres et oublient complètement d'intégrer les dividendes perçus au fil des années. Un certain nombre de déceptions provient uniquement de cette attitude. Mais, la solution adoptée n'est nullement triviale : l'hypothèse du réinvestissement des revenus modifie radicalement les résultats obtenus par un placement boursier. Dans les calculs qui suivent, les crédits d'impôt et les avoirs fiscaux sont réinvestis en même temps que les coupons et dividendes (16).

Transformer les indices en portefeuille

La capitalisation annuelle des revenus perçus transforme l'indice Insee en portefeuille. Le principe est le suivant. L'échantillon qui sert de base à l'indice est considéré comme une Sicav, et l'indice mesure la valeur liquidative d'un titre unitaire représentatif du portefeuille-échantillon. Chaque année le revenu produit par ce titre unitaire est réinvesti sous forme de l'acquisition de titres, ou fractions de titres, supplémentaires. Le portefeuille est donc constitué par un nombre croissant de titres détenus, et sa valeur varie en fonction de la valeur liquidative mesurée par l'indice.

Le portefeuille-actions est simple à constituer (cf. encadré 3). Tous les mois, l'Insee calcule un taux de dividende y compris avoir fiscal appelé taux de rendement. Ce taux est mesuré par la somme du dernier dividende perçu pour chacune des actions de l'échantillon - c'est-à-dire

que le dividende de l'année précédente est utilisé jusqu'à la perception du dividende de l'année courante - cette somme étant divisée par la valeur de l'échantillon en fin de mois. Comme la quasi-totalité des sociétés françaises distribuent leur dividende entre le 15 mai et le 15 juillet, le taux retenu est celui de juillet. Ce taux est appliqué à la valeur de l'indice de juillet pour mesurer le dividende distribué par le portefeuille. Au lieu d'être consommé, ce dividende est réinvesti sous la forme de l'achat de l'indice de fin juillet.

La construction du portefeuille obligataire est nettement plus complexe. C'est d'ailleurs sur ce point que le présent travail est original et diffère des précédentes publications sur ce thème dans la mesure où le coupon effectif et le « coupon couru » de chaque échantillon indiciel ont été calculés pour chacune des quarante-trois années (17). Le contrat d'émission d'une obligation à taux fixe détermine le montant du coupon annuel. En conséquence, chaque jour de détention rapporte un coupon couru journalier égal au coupon annuel divisé par 365 jours. Le coupon couru est la somme de ces coupons journaliers depuis la dernière distribution. C'est pourquoi la valeur d'un portefeuille obligataire augmente chaque jour de l/365e du coupon (18). Au bout d'un an, le coupon annuel est distribué, et la valeur du portefeuille diminue brutalement du montant du coupon.

La méthode consiste donc à calculer pour chaque année et chacun des échantillons des sous- indices de l'indice général des obligations françaises : le montant du coupon couru au 3 1 décembre, le montant du coupon annuel que les obligations détenues en fin d'année distribueront et le montant du coupon couru mensuel (coupon annuel divisé par 12). Chaque fin de mois, puisque l'indice général est mensuel, la valeur liquidative du portefeuille est égale à l'indice plus le coupon couru. Quand le coupon couru est supérieur ou égal au coupon annuel, ce dernier est distribué et sert à acquérir des titres supplémentaires sur la base de la valeur de l'indice ex-coupon distribué. Comme pour

17. Les travaux précédents de l'Insee utilisent le taux actuariel de rendement de chaque échantillon. En période de stabilité des taux d'intérêt, cela fournit une bonne approximation des taux de coupon. Mais en période de fortes variations, l'estimation est plus contestable carie taux actuariel intègre la variation du cours de l'obligation. 18. En supposant la stabilité de la valeur « nue », ou de la valeur « pied de coupon », c'est-à-dire la valeur de l'obligation abstraction faite du coupon couru.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 11

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Encadré 3 TRANSFORMATION DES INDICES EN PORTEFEUILLE

L'échantillon servant de base à l'indice est considéré comme une Sicav dont la valeur liquidative est la valeur de l'indice Insee correspondant, sur lequel tous les calculs sont calés. Le portefeuille est constitué par un nombre croissant de titres. Portefeuille actions

Le portefeuille-actions représente le réinvestissement fin juillet du dividende généré par l'indice. Ce dividende est égal à la valeur de l'indice de juillet multipliée par le taux de rendement (y compris l'avoir fiscal) du mois de juillet calculé par l'Insee dans le Bulletin mensuel de statistique (BMS). - Dividende et avoir fiscal unitaire (DAF_U) de l'année t : DAF_U( t) = Indice de juillet (t) * Taux de rendement de juillet ( t ) - Dividende et avoir fiscal globaux reçus par le portefeuille constitué des titres acquis antérieurement (NT) et détenus au 31 décembre de l'année précédente : DAF_G(t) = DAF_U(t)* NT(t-1 ) - Réinvestissement correspondant au nombre de titres acquis au moyen des dividendes reçus ( NTD) en juillet de l'année t :

NTD( t) = DAF_G (t)/ Indice de juillet ( t) - Nombre de titres dans le portefeuille après réinvestissement : NT(t) = NT(t-Jl ) + NTD(t) - Valeur du portefeuille jusqu'au mois de juillet suivant :

PORT {mois m) = Indice (mois m) * NT(t)

avec Indice ( mois m ) variable et le nombre de titres NT(t) constant. Portefeuille obligataire

Le portefeuille obligataire réinvestit également le revenu annuel. Le taux de coupon de chaque sous- échantillon indiciel a été calculé. Ce qui implique de calculer au 31 décembre de chaque année, pour chaque échantillon représentatif de l'année suivante (t + 1 ), en montant et en pourcentage de la valeur boursière de l'échantillon (pour avoir un taux) : le coupon nominal annuel (CA), le coupon couru mensuel (CCM), le coupon couru en décembre (CCD) et le crédit d'impôt (Cl).

Le coupon indiciel et son crédit d'impôt sont obtenus par le produit de l'indice au 31 décembre (t - 1 ) et du taux de coupon ou du taux de crédit d'impôt calculés pour l'année (t). Ces deux éléments sont réinvestis le mois de distribution. Ce mois est celui où la somme

des coupons courus (incluant celui de décembre) est égal ou supérieur au coupon nominal.

Mois de distribution quand : CDD CCM = CA

- Les différents taux de coupon sont appliqués à la valeur de l'indice au 31décembre de l'année (t - 1 ) afin d'obtenir les montants unitaires : CAJJ , CI_U , CCM_U , CCDJJ .

- Pour tout mois m de l'année t , avant le mois de distribution, la formule générale de la valeur du portefeuille est :

PORT( m ) =

Indice (m) + CCDJJ + V CCM_U *COC(t)

* NT(t-1 ) avec j = janvier.

La partie entre parenthèses représente la « valeur liquidative » de l'échantillon indiciel ;

COC( t ) , le coefficient de chaînage pour le passage de l'échantillon de l'année (t - 1 ) à celui de l'année t si les deux échantillons sont différents ; COC(t) = Indice (échantillon ancien) + CCD ancien Indice (échantillon nouveau) + CCD nouveau

* COC(t-î )

au 31 décembre de l'année (t - 1 ) ;

NT( t- 1 ) , le nombre de titres unitaires détenus depuis la dernière distribution durant l'année (t - 1 ). - Le mois de distribution (md), le coupon annuel (c'est-à-dire le coupon annuel unitaire CA_U et le crédit d'impôt unitaire CI_U reçus) est réinvesti. Le cours de réinvestissement est le cours diminué du coupon distribué.

Soit : NTD = ( CA_U + CI_U) * COC( t) * NT(t-i)

(Indice(md) + CCC_U(md)) * COC(t) m=d

CCC_U(md) = CAJJ - CCD U + CCM U m=1

NT(t) = NT(t-i) + NTD

12 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281 ,1995-1

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PORT(md) = (Indice(md) + CCC_U(md))

* COC ( t ) * NT ( t )

La valeur du portefeuille est inchangée avant distribution et après réinvestissement.

Les mois suivants, le coupon couru mensuel au titre de l'année suivante s'accumule à nouveau :

PORT( m ) =

Indice (m) + CCC_U(md) + / CCM_U md+ 1

* COC(t) * NT(t)

On a bien l'égalité entre les deux coupons courus du même échantillon au 31 décembre de l'année (t- 1 ) et au 31 décembre de l'année t.

Pouvoir d'achat des placements - Les séries de portefeuilles nominaux sont transformées en portefeuilles réels par la formule :

PORT réel (m) = PORT nominal( m ) * 100 Indice de prix ( m )

Les deux séries doivent avoir une même origine et l'indice des prix est l'indice Insee base 1980. - Les taux de rentabilité annuels :

nominaux : RENT nominale ( t) =

PORT nominal décembre ( t) PORTnominal décembre ( t - 1 )

réels :

RENTréelle(t) = PORT réel décembre ( t )

PORT réel décembre ( t- 1 )

* 100

\ \J\J

- Les taux de rentabilité pluriannuels (Rg) sont des taux d'intérêt composés (sur données nominales ou réelles).

(T *100

19. Les modifications de composition de l'échantillon indiciel sont prises en compte en appliquant le principe de l'autofinancement de l'indice : l'ancien indice (par exemple 318) achète le nouvel indice (par exemple lors d'un changement de base) 100 ; l'ancien indice sert donc à acquérir 3,18 titres du nouvel indice. Techniquement ceci prend la forme d'un « coefficient d'ajustement ».

20. La valeur nominale étant divisée par l'indice des prix.

le portefeuille-actions, le portefeuille obligataire se compose au fil du temps d'un nombre croissant de titres (19).

L'évolution en termes réels des portefeuilles

La prise en compte du réinvestissement du revenu annuel, et de son avoir fiscal, modifie radicalement les conclusions qui auraient pu être tirées des évolutions nominales étudiées ci-dessus en ce qui concerne le résultat d'un placement.

Placement or : un très mauvais choix

Sur la période étudiée, le placement or s'avère avoir été, en termes réels (20), un très mauvais choix (cf. graphique II). Pendant vingt-quatre ans, la détention de napoléons procure une rentabilité réelle négative, l'indice ne franchissant la barre des 100 qu'en décembre 1973. Puis, grâce aux deux envolées successives, de 1972- 1974 et 1978-1981, le prix réel de la pièce d'or de 20 francs est multiplié par six (l'indice réel passant de 49 à 291) ; pendant une courte période de quatorze ans et demi, le napoléon procure donc à ses détenteurs une rentabilité

réelle positive. Mais, en mai 1988, il repasse en dessous de la barre fatidique des 100.

Ce résultat met en lumière, a contrario, l'importance du réinvestissement. C'est parce qu'il ne procure aucun revenu que l'or a des performances aussi mauvaises.

Actions : le placement le plus performant

Pour le placement en actions, les enseignements de l'évolution en termes réels sont quadruples. Tout d'abord, le réinvestissement du revenu annuel atténue les accidents de la conjoncture amplifiés par la hausse des prix. Si l'indice actions n'a pas encore retrouvé, à la fin 1994, sa valeur réelle d'avril 1962 qui était de 394, le portefeuille, par contre, avait retrouvé cette valeur (623) dès décembre 1983.

Par ailleurs, l'évolution du portefeuille a été systématiquement supérieure à la hausse des prix, sauf durant l'année 1950. Compte tenu des doubles fluctuations boursières et des prix durant cette période, ce résultat n'est pas négligeable, même si ce constat demanderait à être affiné (les dates d'entrée et de sortie pouvant induire des gains ou des pertes réels, cf. ci-après).

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 13

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Graphique II Évolution en termes réels des portefeuilles d'actifs cotés de 1950 à 1992 Échelle semi-log. 10 000

1 000

100

10

IVe République

Octobre 1957 Bataille d'Alger

1956 Indépendance Maroc Tunisie Crise de Suez

1952 Stabilisation Pinay

Général de Gaulle

Avril 19i Accords d'Évian retour de plus d'un million de Français d'Algérie

Mitterrand

^ ' 558

Guerres de Corée Indochine

I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I h I I I I I I I I

Juillet 1992 Chute du dollar hausse des taux allemands I I I

Obligations Actions Or Années (1)

1. Le trait sur l'axe des abscisse correspond au mois de décembre. Source : calculs des auteurs (cf. encadré 3).

Tableau 1 Rentabilité réelle des placements boursiers de 1950 à 1992

En%

Nombre d'années Actions - Indice - Portefeuille (1) Obligations - Indice - Portefeuille (1) Or - Indice Inflation

De 1950 à 1992 43

2,3 6,9

-2,7 4,1

-1,3 6,3

De 1950 à 1961 12

10,3 14,6

-1,9 2,8

-5,6 5,7

De 1962 à 1967

6

-9,5 -6,7

-3,1 1,3

0,2 3,5

De 1968 à 1977 10

-6,5 -1,4

-4,9 0,5

8,2 7,8

De 1978 à 1981 4

-0,6 6,4

-1,6 5,2

15,6 12,2

De 1982 à 1992 11

10,1 14,7

-2,3 9,2

-10,6 4,6

1 . Réinvestissement du revenu annuel et de l'avoir (ou crédit) fiscal correspondant. * Taux d'intérêt composé. Lecture : ce tableau présente le pouvoir d'achat des placements boursiers en reprenant les différentes phases de l'indice (nominal) des actions. Le résultat réel de l'indice seul y figure également afin de mesurer l'impact du réinvestissement. On constate que les rentabilités réelles des actions sont extrêmement différentes selon les sous-périodes. Source : calculs des auteurs.

14 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

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21. Sur la période 1965- 1992, ces résultats sont corroborés par les résultats effectifs des placements en Sicav obligataires (Gallais- Hamonno et Leguen, 1992).

La rentabilité d'ensemble des actions a été prodigieuse : 6,9 % par an, ce qui implique une multiplication réelle par dix-sept (cf. tableau 1). Mais elle a été extrêmement différente selon les sous-périodes.

Enfin, le placement en actions est le plus performant sur longue période. Ses résultats sont largement supérieurs à ceux du placement obligataire.

Obligations : une rentabilité sous conditions

Si le résultat du portefeuille-actions corrobore toutes les études antérieures, celui du portefeuille obligataire est tout à fait novateur et surprenant. À condition de réinvestir le coupon et le crédit d'impôt, le placement obligataire a eu une rentabilité réelle positive sur toute la période (sauf au moment de l'inflation pendant la guerre de Corée en 1951-1953).

Cette rentabilité réelle reste même positive entre 1955 et 1965, période durant laquelle les taux de coupon des obligations étaient faibles, en comparaison de ceux de la période suivante, et durant laquelle le crédit d'impôt n'existait pas. L'inflation qui suit le choc pétrolier de 1974 ne modifie pas cette situation, et la période 198 1- 1992 aux taux réels anormalement hauts ne fait qu'accentuer ce phénomène. Cette situation prévaut également pour le portefeuille de la sous-catégorie des obligations privées qui n'est composé que de titres à taux fixe (21).

Ce résultat contredit l'histoire du placement obligataire pendant la première moitié du XXe siècle, de 1914 à 1949, où l'inflation a entraîné « l'euthanasie des rentiers » selon l'expression de Keynes.

De plus et contrairement au cas des actions, le moment de l'entrée (date de l'achat) ou le moment de la sortie (date de vente) importe moins car les variations de la valeur du portefeuille sont très faibles. Par contre, cette rentabilité réelle est nettement plus faible que celle des actions : le portefeuille obligataire termine à 558 tandis que le portefeuille-actions est à 1 763, soit un rapport de un à trois.

Ce résultat inattendu est basé sur l'hypothèse du réinvestissement du revenu annuel ; or les ménages détiennent des obligations justement pour consommer ce revenu. Cette contradiction entre les deux objectifs, conservation du pouvoir d'achat et utilisation du coupon, est latente

pour le placement obligataire. Mais, pour la période 1950-1992, elle se révèle a posteriori seulement partielle : à condition de réinvestir 65 % du revenu annuel (coupon et crédit d'impôt) et, donc, d'en consommer 35 %, la valeur du portefeuille obligataire suit l'évolution de l'indice des prix.

Ceci étant, le résultat des obligations est étonnant. Elles ont eu une rentabilité réelle positive pendant chaque sous-période et une rentabilité globale de 4 %, signifiant une multiplication par cinq et demi en termes réels.

Le risque des placements boursiers

La raison principale pour laquelle un certain nombre de ménages récusent la

Bourse comme moyen de placement est son caractère risqué. Les fluctuations de cours sont parfois extrêmement brutales et peuvent entraîner une rentabilité négative. Les fluctuations des rentabilités annuelles, de la prime de risque et des taux d'intérêt sont examinées ici, sur cette période de quarante-trois ans, pour évaluer le risque des placements à la Bourse.

Les instruments de la statistique descriptive permettent de visualiser et de mesurer les fluctuations boursières. La donnée de base est la variation annuelle en pourcentage de la valeur du portefeuille (revenus réinvestis) entre deux mois de décembre - sa rentabilité annuelle ; la moyenne arithmétique de ces rentabilités indique pour le financier la rentabilité qu'il peut espérer de son placement sur longue période ; F écart-type précise le degré de risque de ne pas obtenir cette moyenne.

Actions et or : un degré de risque 4 fois plus grand que les obligations

Les fluctuations annuelles du portefeuille- actions et du napoléon ont été extrêmement élevées (cf. tableau 2). L'écart-type de leurs variations annuelles, ou degré de risque, est d'environ 25 % (les écarts-types des rentabilités nominales ou réelles sont très proches). Les fluctuations des cours sont encore plus fortes parce que les indices ne bénéficient pas de la sorte de « coussin amortisseur » créé lors des baisses par le revenu annuel et son avoir fiscal.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 15

Page 17: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

22. Les variations de prix ne se soustraient pas mais divisent la variation nominale. En 1951, le coefficient de variation nominale du portefeuille obligataire (1,103) divisé par le coefficient de hausse des prix (1,216) donne 0,907 soit, après arrondi, -9,1 %. En cas de baisse des cours, le résultat réel est amplifié parla hausse des prix.

En revanche, le degré de risque du portefeuille obligataire est bien moindre : à peine 6,5 %. L'existence de ces variations doit néanmoins être soulignée : les obligations ont cessé d'être le placement de « père de famille » du XIXe siècle car elles sont soumises au risque de taux d'intérêt. Les fluctuations du taux d'intérêt des obligations à l'émission se répercutent sur la valeur des obligations anciennes qui tendent à monter si le taux baisse mais, surtout, qui tendent à baisser si le taux monte (Audiffren etalii, 1993).

Le risque boursier prend la forme de variations annuelles très importantes. Les valeurs minimales sont tout à fait catastrophiques. En variations réelles (22), le portefeuille-actions diminue de 30 % en 1974 et de 27 % en 1987 ; le portefeuille obligataire baisse de 9,1 % en 1951 à cause des 21,6 % « d'inflation coréenne » ; la valeur du napoléon chute de 30,5 % en 1981. Ces baisses dramatiques, qui peuvent d'ailleurs durer plusieurs années, entraînent une contrainte forte pour le détenteur de valeurs mobilières : il ne faut pas « sortir » - c'est-à-dire liquider son placement - quand la conjoncture boursière est trop mauvaise.

Évidemment le contraire de ces chutes est la remontée foudroyante. Les actions augmentent de 66 % en 1954 (croissance dans la stabilité) et de 54 % en 1983 et en 1986 (rattrapage puis emballement spéculatif). Les obligations ne sont

pas en reste, soit à cause des mécanismes d'indexation soit parce que le taux d'intérêt long baisse : 15,9 % en 1986, 12,2 % en 1955. En ce qui concerne l'or, les deux envols du napoléon ont déjà été décrits : 73 % en 1973 et 77 % en 1979. Mais les individus donnant, en général, un poids psychologique plus grand à une baisse qu'à une hausse de même ampleur - phénomène baptisé « aversion pour le risque » - l'existence de ces belles années boursières ne compense pas celle des mauvaises.

Obligations et actions : une rentabilité nominale positive, en général

La distribution des rentabilités nominales (23) du portefeuille-actions présente une non- symétrie favorable puisque les années de rentabilité positive sont plus nombreuses que les années négatives : 31 contre 12 (cf. graphique III). Par ailleurs, il existe des « queues » très prononcées, à droite et, surtout, à gauche, correspondant à des variations anormalement élevées : les krachs. Enfin, les fluctuations boursières des actions peuvent être très brutales d'un mois

23. Il s'agit de variations nominales car les variations réelles résultent de l'influence des variations de prix sur les premières ; en conséquence, les variations nominales futures ressembleront, sans doute, à celles des années 1950-1992, même si les variations de prix sont très différentes.

Tableau 2 L'instabilité de la rentabilité annuelle des portefeuilles de 1950 à 1992 *

Actions - Nominale - Réelle Obligations - Nominale - Réelle Or (napoléon) - Nominale - Réelle Indice des prix

Moyenne (%)

16,0 9,2

10,6 4,2

7,7 1,1 6,3

Écart-type (%)

25,6 24,0

6,5 6,4

28,8 24,7 4,7

Maximale

(%)

68,1 66,0

28,6 15,9

97,7 76,9 21,6

Année

1983 1954

1980 1986

1979 1979 1951

Minimale

(%)

-24,8 -30,0

1,5 - 9,3

-21,9 -30,5 - 2,0

Année

1987 1974

1956 1951

1975 1981 1953

'Revenus annuels et crédit ou avoir fiscal réinvestis. Pour les calculs de la rentabilité voir encadré 3. Les années extrêmes ne sont pas forcément les mêmes pour les rentabilités nominales et réelles caries variations du taux d'inflation sont prises en compte. Les données annuelles figurent dans les annexes I-A et I-B. Source : calculs des auteurs.

16 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

Page 18: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

24. Ces variations mensuelles seraient encore plus fortes si elles étaient calculées du 1er au 30 du mois puisque l'indice Insee est une moyenne hebdomadaire.

à l'autre. Par exemple, l'indice action a augmenté de plus de 15 % au cours du mois d'avril 1978 et chuté de 18 % an novembre 1987 (24).

Sur les quarante-trois années étudiées, les rentabilités nominales du portefeuille obligataire sont toujours positives grâce au coupon annuel. Une rentabilité allant de 3,5 à 12,25 %, correspondant aux taux de coupon qui ont prévalu sur la période, est obtenue pour 26 années. La très longue queue de droite allant jusqu'à 28 % montre l'impact des variations de taux d'intérêt.

À l'inverse, les variations nominales du napoléon sont non seulement très concentrées

tour de 0 % mais encore la moitié d'entre elles (20 sur 43) sont comprises entre 0 % et - 22 %. Quand elles sont positives, les rentabilités sont soit inférieures à 14 %, soit extrêmement élevées.

Le risque inévitable des dates d'entrée et de sortie

Un dernier risque mérite d'être mentionné, celui d'investir « au plus haut » et de revendre « au plus bas ». Pour évaluer ce risque, on peut distinguer les résultats positifs des résultats négatifs en fonction de leur durée : un an, cinq,

Graphique III Distribution des rentabilités annuelles nominales de 1950 à 1992 * A - Portefeuille-actions B - Portefeuille obligataire Nombre d'années

Rentabilité en %

Nombre d'années

Moyenne: 10,5% Écart-type : 7 %

-26 -19, -13 -6,5

C - Napoléon Nombre d'années

m o to m ?2 S2 S 32,5 m in in m m co h-

Rentabilité en % m in

o 1-" co in

D- Indice des prix Nombre d'années

m m m m m in in cm_ f-_ in cm_ i"-_ in cm_ ^ocvT^in'h"" oï T-c\f ^ <d oo CO-r-1-f-i-T- ,- CUCSÎ CMCMCM Rentabilité en %

Taux en % * Intervalle de classe : 1/4 de l'écart-type arrondi. Source : calculs des auteurs.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 17

Page 19: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

dix, quinze ou vingt ans (cf. annexe II). Ce risque est inévitable. Même sur une durée aussi longue que vingt ans, 15 % des placements-actions terminent en perte, au taux réel annuel moyen de -1,28 % soit -23 % en valeur réelle ; de même 5 % des placements en obligations du secteur privé terminent avec une perte réelle moyenne de 0,23 % par an, soit une perte

de 5 % en valeur réelle. Il faut attendre trente ans pour avoir la quasi-certitude de ne jamais terminer avec une rentabilité relie négative. À défaut d'une telle durée, la seule solution, quand elle est possible, est de conserver, au moins partiellement, son investissement jusqu'à ce que la situation boursière soit plus favorable.

Tableau 3 Distribution des primes de risque des portefeuilles-actions entre 1950 et 1992*

En%

Par rapport au taux court Moyenne Écart-type Maximum Minimum Nombre d'observations Par rapport au portefeuille fonds d'État Moyenne Écart-type Maximum Minimum Nombre d'observations

Primes positives

19,0 12,4 16,8 0,02

297

17,2 11,2 48,1 0,01

274

Primes négatives

-14,6 11,2

- 0,11 -51,3 208

-16,8 12,6

- 0,06 -58,0 231

Total

5,2 20,4 56,8

-51,3 505

1,7 20,7 48,1

-58,0 505

* II s'agit de placements d'un an en glissement, les taux sont continus et les portefeuilles réinvestissent le seul revenu annuel. Source : calculs des auteurs.

Graphique IV Évolution des primes de risque mensuelles du portefeuille actions de 1950 à 1992 Points de base/ 100

1978 Loi Monory 1979 2 e choc pétrolier

-60 -

Années (1) Par rapport au taux court Par rapport au fonds d'État

1. Le trait sur l'axe des abscisses correspond au mois de décembre. Source : calculs des auteurs (voir annexe III).

18 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281 ,1995-1

Page 20: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

25. Plutôt que de présenter la prime de risque calculée sur quarante- trois placements annuels, de décembre à décembre, il a paru préférable d'utiliser l'ensemble des données mensuelles et d'effectuer des calculs correspondant à une durée d'un an en glissements (la première prime correspond à la période décembre 1949-décem- bre 1950, la seconde à janvier 1950-janvier 195 1 et ainsi de suite).

Prime de risque : le rôle des anticipations

L'analyse moderne de la Bourse utilise souvent le concept de prime de risque, c'est-à-dire le supplément de rémunération reçu par un actif risqué par rapport à la rémunération procurée par un actif sans risque. Ce supplément de rémunération est à la fois normal et légitime puisqu'il existe un actif sans risque, celui émis par l'État, qui ne peut pas faire faillite, et qui procure une rentabilité certaine et connue à l'avance. Sans ce supplément de rémunération, les épargnants n'investiraient pas dans un actif comme l'action qui, non seulement n'apporte pas une rentabilité certaine à cause de ses fluctuations, mais encore court le risque de faillite de son émetteur.

La prime de risque relève des anticipations : l'épargnant achète des actions parce qu'il pense qu'elles seront plus rémunératrices qu'un placement sans risque dans le futur. A posteriori, on peut seulement constater si ces anticipations

se sont avérées justes ou non. Empiriquement, il s'agit donc de mesurer la rentabilité des actions par rapport à celle d'un placement sans risque. La difficulté pratique est de définir ce placement dans la mesure où les placements d'État ont une durée de vie différente et inférieure à celle des actions (dont la durée de vie est infinie). Pour un épargnant le choix est simple, c'est celui du Livret A de la Caisse d'épargne. Mais les professionnels préfèrent utiliser soit le taux d'intérêt des placements courts soit la rentabilité obtenue sur les emprunts d'État, représentés ici par le sous-portefeuille « Fonds d'État».

A posteriori, la prime de risque présente une très grande volatilité (25). Toutefois, celle-ci est assez logique puisqu'on soustrait un taux qui ne varie pas, ou peu, à la rentabilité très fluctuante des actions. Les différents pics observés sur la période correspondent aux mois de fortes variations du portefeuille-actions (cf. tableau 3 et graphique IV).

Graphique V Évolution des taux d'intérêt court et long de 1 950 à 1 992 Taux en %

20

15

10

IVe République

Octobre 1957, Bataille d'Alger

1956 Indépendance Maroc Tunisie Crise de Suez

» '

Stabilisation Pinay I I I I I I I

Général de Gaulle

Mai 1968

J I

Pompidou Mitterrand

Août 1990 Koweït

Novembre 1991 Spéculation contre le franc Septembre 1992 Sortie de la Livre duSME

1971 Finvdela convertibilité du dollar en or I I I I

Taux court (1) Taux long (2) Années (3)

1. Taux courts (TMM) - voir annexe III. 2. Les taux des placements longs ont également été relevés dans le BM S ; 1 950- 1 955 : taux à l'émission des obligations émises dans le mois ; 1956-1959 : idem « non indexées » ; 1960-1992 : taux moyen à l'émission des obligations émises dans le mois, émissions garanties et assimilées (TMEOG). Les mois sans émission, le dernier taux connu a été utilisé. 3. Le trait sur l'axe des abscisses correspond au mois de décembre. Source : calculs des auteurs.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281 , 1995 -1 19

Page 21: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

26. Le fait que les moyennes et les écarts- types à la hausse et à la baisse soient très proches fait penser que la série des primes possède la caractéristique appréciée par les statisticiens appelée « stationnante ». Ce qui renforce la crédibilité des chiffres trouvés (mais ne les explique pas).

27. Dans le graphique III, le portefeuille- actions a une rentabilité moyenne de 16% pour un risque de 26 % et le portefeuille obligataire rapporte 10,5 % pour un risque de 7 %. La prime de risque des actions par rapport à l'ensemble des obligations (et non les seuls fonds d'État) est (16 -10,5)/ (26 -7) = 0,30 % de rentabilité par « point » de risque, im

pliquant une rentabilité différentielle de 1,65 % [(16 -10,5)' 0,30%].

La distribution des primes de risques suggère quatre réflexions. Tout d'abord, les primes du portefeuille-actions par rapport au taux court sont très proches de celles calculées par rapport aux fonds d'État. En fait, la fluctuation de la rentabilité des actions atténue la différence entre les taux courts du marché monétaire et les taux longs des emprunts d'État. Dans plus de 40 % des cas, la prime est négative. Le degré de fluctuations du montant de cette prime est très important puisque les valeurs maximales à la baisse et à la hausse dépassent 50 %. D'où une dispersion totale de plus de 20 % (26). Enfin, la signification de la valeur « moyenne » devient ambiguë. Comme on n'achèterait jamais des actions si on supposait qu'elles allaient rapporter moins que l'obligation d'État, les chiffres significatifs sont ceux relatifs aux primes positives. En ce cas, la prime positive moyenne de 17 % par rapport aux OAT est manifestement trop grande et peu crédible. Inversement la prime de 1,7 %, calculée sur les 505 placements d'un an, est trop faible. Pourtant, ces résultats correspondent à ceux présentés précédemment (27).

Les fluctuations des taux d'intérêt

La théorie comme la logique voudraient que la prime de risque et le cours des actions soient dépendants des variations du taux d'intérêt long, celui des obligations à leur émission. Ceci semble vrai à court terme, mais guère à long terme (cf. graphique V).

L'évolution des taux d'intérêt n'a connu que deux périodes. Une période de stabilité de 1952 à 1966 durant laquelle les taux courts ont évolué autour de 3,5 % et les taux longs autour de 6 %. C'est la période du contrôle étroit des taux, par la Banque de France pour le court terme et par la Caisse des Dépôts pour le long terme. L'efficacité de ce contrôle explique la stabilité de l'écart entre les deux taux, ou prime de liquidité. La seconde période est celle de l'instabilité des taux. Elle commence dès le début de 1967 alors que, généralement, on attribue le début des variations de taux à la fin de la convertibilité-or du dollar en août 1971. De plus, l'amplitude des variations est importante. Les pics des taux courts sont généralement dus à des spéculations sur le marché des changes contre le franc ; par exemple, fin 1968 et surtout fin 1969 (dévaluation), mai- juin 1981 (dévaluation), septembre 1992 (sortie de la livre anglaise du Système monétaire européen).

Plus inattendue est l'apparition à plusieurs reprises d'une situation où le taux court reste durablement supérieur au taux long : de juillet 1969 à décembre 1970, de juillet 1974 à mai 1975 (après le premier choc pétrolier), d'octobre 1989 à octobre 1990 et de novembre 1991 à dé

cembre 1993 (ces situations apparaissent en grisé sur le graphique V).

La patience nécessaire

Les résultats précédents conduisent à un paradoxe : d'un côté les actifs cotés se

révèlent rémunérateurs mais, de l'autre, leurs résultats sont aléatoires ou risqués. La solution réside dans une stratégie simple à mettre en œuvre mais plus difficile à accepter psychologiquement : mettre le temps de son côté en comptant sur la durée pour faire disparaître l'effet des baisses boursières sur la valeur du portefeuille.

Cette influence de la durée de détention peut être étudiée sous deux angles : sur les variations boursières qui sont la cause du problème et sur la valeur finale des portefeuilles détenus.

Plus la durée de détention est longue, plus la volatilité des cours est faible

Les fluctuations des cours des actifs boursiers, ou volatilité, sont mesurées par l'écart-type des variations de cours, quotidiennes, hebdomadaires ou mensuelles (28). L'analyse de l'influence de la durée de la détention est réalisée en découpant la période de 1950 à 1992 en différentes durées de placement. Toutefois, cette période est trop courte pour permettre un découpage en durées ne se chevauchant pas (par exemple, il n'y a que quatre placements de dix ans et deux de vingt ans). Aussi, les durées retenues se chevauchent-elles (périodes en glissements).

Plus la durée du placement est longue, plus le degré de fluctuations des cours diminue (cf. tableau 4). Dans le cas des actions, le passage de un à cinq ans divise la volatilité par deux, et à vingt ans elle est presque divisée par quatre. La chute de la fluctuation des cours est du même

28. La volatilité est calculée ici à partir des variations réelles et non des variations nominales. Les indices défiâtes par la hausse des prix sont utilisés même si, engénéral, la volatilité estcalculée sur les cours nominaux.

20 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

Page 22: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

29. Comme il est probable que les variations mensuelles du napoléon ne sont pas « station- naires », leur moyenne et leur écart-type n'étant pas constants dans le temps, les résultats du tableau 5 sont certainement non significatifs. C'est la raison pour laquelle l'annexe II n'en donne pas le détail (les données sont disponibles, sur demande, auprès des auteurs).

30. Le détail des résultats figure en annexe II.

ordre de grandeur pour les obligations. Elle est un peu moindre pour le napoléon (29). Sur trente ans, l' écart-type du placement annuel des actions comme des obligations est divisé par dix.

Mais ces divisions font seulement converger la volatilité vers sa moyenne, c'est-à-dire vers un degré incompressible de fluctuations qui reste relativement élevé : 15 % pour les actions et, tout de même, 4 % pour les obligations.

La rentabilité tendancielle atteinte en dix ans...

La même méthode de périodes en glissements est utilisée pour étudier le résultat des placements boursiers (mesuré par le taux d'intérêt composé) en fonction de leur durée. Cette durée va de un an à trente et trente-huit ans. Ces deux dernières durées correspondent approximativement aux durées durant lesquelles les salariés capitaliseront pour leurs retraites si les fonds de pension sont créés, la durée effective étant déterminée par leur âge à l'entrée et à la sortie de la vie active.

Cette problématique du financement de la retraite explique l'apparition d'un nouveau

portefeuille à côté des actions, des obligations et de l'or : le portefeuille des obligations privées. Le sous-indice du secteur privé (voir note de bas de page 6) est composé uniquement d'obligations à taux fixe, non protégées vis-à- vis de l'inflation. Si la stabilité des prix continue, l'utilisation du portefeuille d'obligations générales risque de surestimer les résultats futurs, et les résultats du portefeuille d'obligations classiques privées deviennent plus vraisemblables.

... un constat pour le portefeuille obligataire

Les résultats obtenus pour les actions et les obligations générales sont triples (30). Si la durée de placement la plus longue est celle qui permet d'obtenir la rentabilité tendancielle, en ce cas cette dernière est atteinte dès la dixième année. Ceci est très net dans le cas des deux portefeuilles obligataires (général et secteur privé) où les taux des placements à dix ans (4,11 % et 2,82 % respectivement) sont très proches des taux à trente-huit ans (4,03 % et 3,07 %) (cf. graphique VI et tableau 5). Cela l'est moins pour les actions où les placements d'une durée

Tableau 4 Influence de la durée du placement sur la volatilité des cours boursiers entre 1950 et 1993 *

Actions 1 an 5 ans 10 ans 20 ans 30 ans Obligations 1 an 5 ans 10 ans 20 ans 30 ans Napoléon 1 an 5 ans 10 ans 20 ans 30 ans

Moyenne (%)

14,3 15,2 15,1 14,9 15,1

3,7 4,0 4,0 3,9 4,2

12,0 13,6 14,5 16,1 16,1

Écart-type (%)

4,8 2,4 1,9 1,3 0,5

2,1 1,5 1,3 0,6 0,2

7,9 6,3 5,5 3,2 0,3

Maximum (%)

30,5 21,9 19,4 17,3 15,9

11,5 6,9 5,9 4,9 4,7

40,5 25,6 24,3 19,2 16,8

Minimum (%)

3,9 11,3 12,4 13,3 14,2

1,0 1,7 1,9 2,7 3,9

1,8 4,0 6,0 9,5

15,0

Nombre d'observations

517 469 409 289 169

517 469 409 289 169

517 469 409 289 169

* // s'agit de placements d'un an en glissements à partir des indices Insee divisés par l'indice des prix (base 1980) in BMS (cf. graphique I). Source : calculs des auteurs.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 21

Page 23: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

Graphique VI Rentabilité réelie des portefeuilles selon la durée du placement *

En% 60 50 40 30 20 10

-10 -20 -30 -40

Actions : moyenne + 2 écarts-types

Actions : moyenne Obligations : moyenne + 2 écarts-types

Actions : moyenne - 2 écarts-types , Obligations : moyenne

^Obligations : moyenne - 2 écarts-types

1 3 5 7 9 11 13 15 17 19 21 23 25 35 37 38 Nombre d'années

* La rentabilité réelle des portefeuilles d'actions et d'obligations est le taux d'intérêt composé sur une durée de placement allant de 1 à 38 ans sur des données en glissement. Remarque : la rupture entre vingt-cinq et trente ans de détention semble indiquer que le phénomène de réduction de la dispersion des résultats n'est pas stable ; si la tendance existe bien, la mesure de son importance est imparfaite. Source : calculs des auteurs.

Tableau 5 Rentabilité réelle du portefeuille selon la durée du placement entre 1950 et 1992 *

En%

Actions - Moyenne - Écart-type

Obligations du secteur privé - Moyenne - Écart-type

Obligations (VFRF)(1) - Moyenne - Écart-type

Or - Moyenne - Écart-type

Nombre déplacements

Durée du placement

1 an

9,3 22,3

3,2 7,9

4,2 6,5

2,0 27,6

505

5 ans

9,8 13,2

3,3 4,5

4,3 4,0

2,7 9,9 457

10 ans

8,1 9,8

2,8 3,4

4,1 3,9

4,4 8,5

397

20 ans

4,9 4,6

2,0 1,4

3,2 2,5

4,4 4,3 277

30 ans

4,6 1,9

2,1 1,2

3,5 1,4

2,7 1,7

157

38 ans

7,1 3,9

3,1 1,0

4,0 1,2

0,4 0,2 61

1 . Valeurs françaises à revenu fixe. * Taux d'intérêt composé du placement avec réinvestissement du revenu et du crédit d'impôts (Cl) ou de l'avoir fiscal (AF) ; périodes en glissement de décembre 1949 à décembre 1992. Source : calculs des auteurs.

22 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

Page 24: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

de vingt à trente ans ont pâti du « creux » des années soixante-dix.

Mais, l'enseignement essentiel est l'extraordinaire diminution de la dispersion des résultats quand la durée du placement s'allonge.

Pour une durée inférieure à cinq ans, la dispersion des taux de rentabilité est dramatique pour les obligations puisque l'écart-type des rentabilités de 6,6 % dans le cas d'une durée d'un an, signifie que la rentabilité était comprise entre -9% et +17%. Cette dispersion reste très importante pour les actions en dessous d'une durée de dix ans puisque sa valeur absolue est de 10 % et bien que ce chiffre soit moitié moindre de ce qu'elle est pour une durée d'un an.

En fait l'essentiel de la réduction de la dispersion des résultats est obtenu avec une durée de quinze ans. À partir de trente ans de détention, l'écart-type des 157 résultats devient très faible : 2 % pour les placements-actions et 1,5 % pour les placements obligataires. De ce fait, les rentabilités pour les portefeuilles d'actions et

gations sont toujours positives en valeurs réelles. Par exemple, sur trente ans, le moins rentable des placements-actions a néanmoins rapporté 3,82 % par an et le moins rentable des portefeuilles d'obligations privées 0,87 % par an.

Par contre, le fait que ces résultats soient toujours positifs ne suppriment pas la nécessité de choisir un gérant « performant », ou de répartir ses fonds entre plusieurs gérants. En effet, sur une très longue durée, une faible différence de taux d'intérêt entre le taux minimum et le taux maximum entraîne une forte différence dans la valeur terminale du placement. En prenant l'exemple de 100 francs placés pendant trente- huit ans, les taux extrêmes des actions, 5,06 % et 7,99 %, entraînent une valeur finale respectivement de 652 francs et 1 856 francs en valeurs réelles, soit une différence du simple au triple. De même, les taux extrêmes des obligations du secteur privé, 2,25 et 3,28 %, dont la différence n'est que de 1 %, produisent respectivement 233 francs et 341 francs en valeurs réelles soit une différence de près de 50 %. □

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ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281 , 1995 -1 23

Page 25: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

ANNEXE I Rentabilité annuelle des indices et des portefeuilles de 1 950 a 1 992 A- Rentabilité nominale * En%

Ar-inAûQ rW II IUCQ

1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992

Moyenne Écart-type

Obligations -0,60

4,33 10,51 -0,70

5,54 8,74

-2,83 1,73 1,47 6,90 5,24 4,40 4,30 0,48

-0,38 -0,77 -3,19

1,69 1,18

-3,20 0,60

-1,13 4,61

-0,50 4,92 5,56 2,90 9,08

10,91 21,14 23,71 -6,80

5,47 6,31 5,17 4,60 5,30

-3,10 5,20

-4,40 -2,60

5,70 2,00 3,48 5,89

Indices Actions

-13,00 55,19 9,30

19,86 60,36 8,86 4,07

29,64 -14,07

51,80 3,95

19,70 3,70

-15,81 - 7,22 - 8,40 - 7,82 - 1,02

3,99 31,53

- 4,10 -14,80

23,89 - 3,70 -24,30

28,40 -16,35 - 4,60 45,92 16,06 7,04

-17,80 4,76

57,89 22,20 38,40 53,10

-27,10 40,20 27,40

-23,10 8,90 0,60

11,01 24,38

Napoléon - 9,88

12,84 -11,63 -19,46 -14,40

7,92 17,98 23,13

-15,57 2,72

10,62 4,69

- 2,29 5,12

- 2,58 9,50 8,26 5,15

29,10 0,16

-15,32 1,42

27,08 87,71 95,60

-21,85 2,51 7,39 6,75

97,68 69,84

-20,90 - 6,43 - 1,08 - 8,43 -12,65 - 0,62

5,55 -13,67 - 4,32 -11,87 - 8,17 - 8,57

7,65 28,82

Inflation

12,50 21,60

1,52 -2,00

1,53 1,01 1,49 9,80 9,38 5,71 3,86 4,09 4,29 5,82 2,27 2,53 2,78 3,60 5,22 5,79 5,47 2,62 6,98 8,48

15,03 9,76 9,84 8,96 9,68

11,73 13,74 13,89 9,69 9,29 6,69 4,70 2,12 3,12 3,08 3,56 3,39 3,11 1,98 6,27 4,67

Portefeuilles (1) Obligations

5,20 10,32 16,12 4,61

10,84 13,36 1,45 6,59 6,30

11,55 9,80 8,83 8,75 4,69 4,06 3,60 1,49 6,73 6,37 1,89 6,08 3,22

10,84 5,70

11,45 11,59 8,69

14,98 16,62 26,24 28,55 7,58

19,94 21,05 19,73 18,51 18,32 7,58

16,08 5,76 8,34

15,77 11,68 10,62 6,51

Actions - 8,00

63,88 15,55 26,74 68,61 12,20 7,56

33,21 -11,05

55,82 5,99

21,77 5,45

-14,24 - 4,80 - 5,37 - 3,93

4,10 9,03

37,37 0,24

-12,58 29,32 0,92

-19,42 37,37

-10,55 2,71

54,93 22,94 13,65

-10,26 13,98 68,11 29,24 44,07 57,10

-24,75 45,09 30,64

-21,05 12,81 4,24

16,02 25,58

1 . Les portefeuilles mesurent le réinvestissement des revenus annuels : coupon et crédit d'impôt pour les obligations ; dividende et avoir fiscal pour les actions.

* Rentabilité nominale de l'indice de l'année t = [((Indice nominal de décembre de l'année t)/ (Indice nominal de décembre de l'année t- 1)) - 1 ]. La rentabilité nominale du portefeuille est calculée de la même manière. Sources : Bulletin mensuel de statistique (BMS) pour les indices et calculs des auteurs pour les portefeuilles.

24 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

Page 26: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

ANNEXE I (suite)

B - Rentabilité réelle En%

M-

1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992

Moyenne Écart-type

Indices

Obligations - 11,64 - 14,21

8,85 1,33 3,95 7,66

- 4,26 - 7,35 - 7,23

1,12 1,33 0,30 0,01

- 5,05 - 2,59 - 3,22 - 5,80 - 1,84 - 3,84 - 8,49 - 4,62 - 2,35 - 2,22 - 8,28 - 8,79 - 3,83 - 6,32

0,11 1,12 8,42 8,76

- 18,17 - 3,85 - 2,73 - 1,43 - 0,10

3,11 - 6,03

2,06 - 7,69 - 5,79

2,51 0,02

- 2,49 5,78

Actions - 22,66

27,62 7,66

22,30 57,94 7,77 2,54

18,07 -21,44

43,59 0,09

15,00 - 0,56 - 20,45 - 9,27 - 10,66 - 10,31 - 4,47 - 1,17

24,34 - 9,08 - 13,87

15,81 - 11,23 - 34,19

16,98 - 23,84 - 12,44

33,04 3,87

- 5,90 - 27,83 - 4,49

44,47 14,54 32,18 49,92

- 29,30 36,01 23,02

- 25,62 5,61

- 1,35 4,70

23,10

Napoléon - 19,90 - 7,21 - 12,96 - 17,82 - 15,69

6,85 16,24 12,13

- 22,80 - 2,83

6,51 0,57

- 6,30 - 0,66 - 4,74

6,80 5,33 1,50

22,69 - 5,31 - 19,71

2,73 18,79 73,04 70,05

- 28,80 - 6,67 - 1,44 - 2,67

76,93 49,31

- 30,54 - 14,69 - 9,49 - 14,17 - 16,57 - 2,68

2,36 - 16,25 - 7,61 - 14,76 - 10,95 - 10,34

1,12 24,67

Portefeuilles (1) Obligations - 6,49 - 9,28

14,38 6,74 9,17

12,23 - 0,05 - 2,93 - 2,82

5,52 5,72 4,55 4,28

- 1,07 1,76 1,04

- 1,25 3,02 1,10

- 3,68 0,58 3,17 3,61

- 2,56 - 3,11

1,67 - 1,05

5,52 6,33

12,99 13,01

- 5,54 9,34

10,76 12,22 13,19 15,86 4,33

12,61 2,13 4,80

12,28 9,51 4,27 6,34

Actions - 18,22

34,77 13,82 29,32 66,07 11,08 5,98

21,31 - 18,67

47,40 2,05

16,99 1,12

- 18,96 - 6,91 - 7,71 - 6,52

0,48 3,63

29,86 - 4,96 - 9,88

20,88 - 6,97 - 29,95

25,16 - 18,56 - 5,74

41,26 10,03

- 0,08 -21,21

3,91 53,81 21,14 37,60 53,83

- 27,03 40,76 26,14

- 23,64 9,40 2,22 9,42

24,02 1 . Voir annexe I - A.

* Rentabilité réelle de l'indice de l'année t = [((Indice réel de décembre de l'année t) / (Indice réel de décembre de l'année t- 1)) -1 ]. La rentabilité réelle du portefeuille est calculée de la même manière. Sources : Bulletin mensuel de statistique (BMS) pour les indices et calculs des auteurs pour les portefeuilles.

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 25

Page 27: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

ANNEXE II Mesure du risque « d'entrée-sortie » dans différents portefeuilles indiciels en valeur réelle de 1950 a 1992 *

Durée du placement

Placements de 1 an Nombre de placements Nombre de résultats négatifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Nombre de résultats positifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Placements de 5 ans Nombre de résultats négatifs Résultats négatifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Nombre de résultats positifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Placements de 10 ans Nombre de résultats négatifs Résultats négatifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Nombre de résultats positifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Placements de 15 ans Nombre de résultats négatifs Résultats négatifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Nombre de résultats positifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Placements de 20 ans Nombre de résultats négatifs Résultats négatifs - Moyenne (%) - Écart-type (%) Nombre de résultats positifs - Moyenne (%) - Écart-type (%)

Portefeuilles

Actions

505 180

-13,30 8,90 325

22,19 16,97

457 116

-5,28 2,94 341

12,04 9,12

397 107

-1,30 0,89 290 8,53 6,90

337 58

-1,92 1,34 279 5,62 3,78

277 43

-1,28 0,62 234 4,90 2,90

Obligations

505 129

-3,72 3,22 376 7,02 4,90

457 33

-0,37 0,23 424 4,57 3,65

397 0

397 3,79 3,15

337 0

337 3,35 2,42

277 0

277 3,06 1,68

Obligations du secteur privé

505 144

-6,26 4,68 361 7,13 5,16

457 116

-1,41 1,17 341 4,68 3,91

397 68

-1,21 0,94 329 3,30 2,66

337 44

-0,66 0,37 293 2,45 1,48

277 13

-0,23 0,14 264 1,99 1,10

Napoléon

505 314

-11,36 8,87 191

23,88 33,46

457 236

-6,54 4,74 221 8,61 0,13

397 205

-3,78 3,85 192

7,89 5,68

337 121

-2,77 1,45 216 6,18 3,08

277 39

-2,04 0,78 238 4,47 2,31

* Placements en glissements. Source : calculs des auteurs.

26 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 - 1

Page 28: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

ANNEXE III Influence de la durée du placement sur la rentabilité réelle des portefeuilles entre 1 950 et 1 992 A- Obligations françaises **

Durée en nombre d'années

1 2 3 4 5 6 7 8 9

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 30 35 38

Moyenne (%) 4,17 4,33 4,35 4,37 4,34 4,26 4,24 4,20 4,17 4,11 4,02 3,93 3,86 3,77 3,66 3,54 3,44 3,35 3,28 3,25 3,23 3,21 3,17 3,17 3,19 3,47 3,80 4,03

Écart-type (%) 6,55 5,18 4,54 4,28 4,03 3,88 3,92 3,97 3,96 3,91 3,78 3,67 3,60 3,51 3,35 3,14 2,94 2,75 2,57 2,46 2,37 2,25 2,08 1,97 1,89 1,42 0,89 0,78

Maximum (%)

24,09 19,20 15,75 14,62 13,50 11,23 10,66 10,62 10,17 9,42 9,34 8,74 8,67 8,62 8,51 8,28 7,71 7,36 6,79 6,30 6,18 6,03 5,79 5,37 5,20 4,46 4,29 4,30

Minimum (%)

-13,04 - 9,13 - 3,37 - 1,63 - 0,95 - 0,89 - 0,50 - 0,27 - 0,17

0,07 0,05 0,07 0,22 0,20 0,39 0,52 0,77 0,43 0,63 0,65 0,63 0,81 1,18 1,42 1,52 2,02 2,94 3,43

Nombre de cas

505 493 481 469 457 445 433 421 409 397 385 373 361 349 337 325 313 301 289 277 265 253 241 229 217 157 97 61

* Taux d'intérêt composé des placements en glissements. ** Portefeuilles constitués sur la base de l'indice Insee des valeurs françaises à revenu fixe (VFRF).

ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995 -1 27

Page 29: La rentabilité réelle des actifs boursiers de 1950 à 1992

ANNEXE III (suite)

B - Actions françaises :

Durée en nombre d'années

1 2 3 4 5 6 7 8 9

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 30 35 38

Moyenne (%) 9,33 9,62 9,78

10,09 9,77 9,37 9,19 8,80 8,59 8,11 7,47 6,91 6,34 5,92 5,59 5,18 5,01 4,94 4,89 4,88 4,80 4,72 4,59 4,40 4,31 4,60 6,36 7,06

Écart-type (%)

22,33 17,12 15,05 14,55 13,20 11,86 11,33 10,67 10,42 9,77 8,95 8,35 7,42 6,71 6,19 5,31 4,96 4,81 4,69 4,62 4,47 4,38 4,15 3,70 3,37 1,89 4,08 3,86

Maximum (%)

79,90 58,05 45,31 40,92 34,63 29,54 26,26 23,62 22,22 19,74 18,13 17,19 16,80 14,39 13,84 10,89 10,89 9,74 9,44 8,68 8,43 8,28 8,31 7,48 7,30 5,91 8,04 7,99

Minimum (%)

-39,60 -23,59 -13,98 -16,16 -11,72 - 8,63 - 6,85 - 6,78 - 4,48 - 3,40 - 3,56 - 4,26 - 3,86 - 3,89 - 4,85 - 4,35 - 3,39 - 2,20 - 2,53 - 2,63 - 1,90 - 1,14 - 0,58 - 0,96 - 0,73

3,15 3,82 5,06

Nombre de cas

505 493 481 469 457 445 433 421 409 397 385 373 361 349 337 325 313 301 289 277 265 253 241 229 217 157 97 61

* Portefeuilles constitués sur la base de l'indice Insee des valeurs françaises à revenu variable (VFRV). Source : calculs des auteurs.

28 ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 281, 1995-1

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ANNEXE III (fin)

C- Secteur Privé*

Durée en nombre d'années

1 2 3 4 5 6 7 8 9

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 30 35 38

Moyenne

3,21 3,40 3,45 3,43 3,34 3,20 3,13 3,05 2,96 2,82 2,63 2,43 2,30 2,24 2,18 2,11 2,06 2,00 1,95 1,95 1,97 1,96 1,93 1,92 1,96 2,15 2,62 2,93

Écart-type

7,89 6,31 5,43 4,97 4,55 4,18 4,07 3,93 3,70 3,45 3,07 2,58 2,24 2,11 1,98 1,81 1,68 1,54 1,40 1,37 1,36 1,29 1,20 1,16 1,19 1,19 0,79 0,67

Maximum

24,75 20,71 16,70 15,62 14,69 11,85 11,53 10,77 10,25 10,04 10,04 8,47 7,17 5,96 5,90 5,60 5,18 5,18 4,31 3,85 3,86 3,93 3,91 3,60 3,46 3,30 3,40 3,28

Minimum

-16,56 -13,09 - 8,20 - 5,46 - 4,81 - 3,51 - 3,22 - 4,14 - 3,82 - 2,68 - 2,09 - 1,80 - 1,98 - 1,67 - 1,25 - 1,00 - 0,71 - 0,64 - 0,49 - 0,44 - 0,11

0,04 0,43 0,11

- 0,28 0,87 1,60 2,25

Nombre de cas

505 493 481 469 457 445 433 421 409 397 385 373 361 349 337 325 313 301 289 277 265 253 241 229 217 157 97 61

* Portefeuilles constitués à partir du sous-indice Insee des obligations du secteur libre, puis du secteur commercial. Source : calculs des auteurs.

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ANNEXE IV Prime de risque annuelle du portefeuille-actions entre 1950 et 1992 Points de base / 1 00

Années

1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972

Par rapport au taux moyen

mensuel (TMM)

-10,43 61,18 11,74 22,69 65,02 9,04 4,38

30,08 -14,59

52,25 2,35

18,32 2,06

-17,49 - 8,71 - 9,36 - 8,21 - 2,20

1,20 26,80

- 9,57 -18,59

23,00

Par rapport aux Fonds d'État

-11,84 57,69

- 9,59 23,83 60,84 3,26

12,12 30,89

-23,75 43,64

- 0,27 14,58

- 2,18 -16,44 - 6,24 - 8,49 - 1,46 - 3,55

1,37 35,69

- 0,69 -13,57

17,70

Années

1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992

Moyenne Écart-type

Par rapport au taux moyen

mensuel (TMM) - 9,33 -33,95 26,47

-21,03 - 8,72 43,96 11,62 0,03

-28,10 - 3,96

52,21 15,21 32,39 48,27

-33,41 36,11 20,69

-31,57 2,15

- 7,20

7,97 25,86

Par rapport aux Fonds d'État

-10,88 -44,03

33,30 -22,39 -21,74

35,50 -35,89 -50,16 -20,59 - 9,54 45,54 7,73

26,23 40,54

-34,02 26,61 23,64

-30,27 - 4,82 - 7,34

3,51 27,11

Sources : les taux des placements courts ont été relevés dans le Bulletin mensuel de statistique (BMS). 1950-1956 : argent au jour le jour; 1957-1972 : taux sur effets publics ; 1 973-1 987 : taux sur effets privés ; 1988-1992 taux moyen mensuel (TMM). Cestauxmen- suels sont capitalisés sur un an (taux d'intérêt annuel continu) ; Rc = Exponentiel (somme log (1 + taux mensuel) / 12). Pour les actions, il s'agit du taux d'intérêt continu pour un placement dans le portefeuille-actions avec réinvestissement du seul dividende (sans avoir fiscal) ; pour les Fonds d'État, du taux d'intérêt continu pour un placement dans le portefeuille des seuls emprunts d'État (avec réinvestissement du coupon, les emprunts d'État n'ayant pas de crédit d'impôt). Le taux continu est mesuré par un taux composé : Rp = log (portefeuille de décembre de l'année (t) /portefeuille de décembre de l'année (t-1)) x 100. La prime de risque est la différence du taux du portefeuille actions avec soit le taux court, soit le taux du portefeuille obligataire. Comme les taux s 'expriment en %, les taux sont mesurés « en point de base » (Pb), mais la différence est divisée par 100, la prime étant implicitement exprimée en %. Exemple : Rp = 18,5 %, soit 1850 Pb, Rc = 4,5 % soit 450 Pb alors Pr (t) = (1850 - 450) / 100 = 14.

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