Le Cœur d’Amour éprisgravures et textes
Aude de Kerros
Illustration de la Bible traduite par André Chouraqui
Traduire les écritures de l’hébreu au françaisTraduire une traduction en Images
André Chouraqui venait de publier sa traduction de la Bible de l’hébreu vers le français lorsqu’il fit la commande à Aude de Kerros d’une série de gravures pour l’illustrer. C’était pour lui, une démarche secrète... Il recherchait un reflet, une vision, une correspondance à son œuvre… une traduction dans un autre langage, celui en images.
André Chouraqui a traduit les Écritures à partir de l’hébreu ressuscité, sa langue du quotidien, en français sa langue maternelle. C’était une aventure, un défi, une victoire. La première traduction de la Bible avait eu lieu il y a deux mille ans. Elle avait été faite par des érudits juifs d’Alexandrie. L’hébreu était alors leur langue liturgique et le grec leur langue maternelle.
Aude de Kerros fût frappée par le rythme, la forme inédite et étrange de ce texte. Œuvre érudite certes, mais écrite dans la langue des poètes. Elle répondit à sa sollicitation. Le traducteur avait déjà rompu les barrages séparant les deux Testaments, le graveur se laissa emporter par le grand fleuve épigraphique qui court de la Genèse à l’Apocalypse. Les 22 eaux fortes, autant que de lettres de l’alphabet hébreu, devinrent les emblèmes de cette navigation.
Sur les rives du texte, les deux « traducteurs » ont connu quelques combats et joutes contradictoires... En opposition à la tradition millénaire, André Chouraqui avait traduit le mot unique qui initie les Écritures - « Bereschit » - par « En tête », et non par « Au commencement ».
En réponse Aude de Kerros nomma les 22 images: « Le Cœur d’Amour Épris ». Chaque gravure devint à la fois l’écho formel de ce poème-traduction et une réponse. Dans ce dialogue, fruit d’une amitié, la forme répondit au verbe. Il a usé des mots, elle a répondu en images.
L’unité du texte et de la forme se fit cependant autour du Nom secret de Dieu. Là est le cœur de la brûlante, violente et charnelle traduction menée à bien par André Chouraqui. Le graveur en déclina les formes : Cœur, Matrice, Flamme, Oreille et Œil… et le Nom apparut dans le silence héraldique des images.
De la main du graveur le métal a reçu les formes de l’âme.
À l’acide et au burin il a creusé ses emblèmes. Sur le bouclier, sur le miroir, en son cœur, surgit la forme du « yod », semence de l’arbre textuel. Comme d’une plaie, d’une matrice, d’une source, le monde s’échappe, déborde et se multiplie.
Au prononcement de « Berechit »le graveur trace un portique. Le visible surgit de l’Invisible
Le chaos est saisi par la forme La voix de Dieu a ouvert la brècheSa résonance a crée les mondes
L’Alliance de Feu
Écoutezmes Yeux
Le Verbe informe en secretla multiplicité des mondes L’Unique dresse face à lui une créature à son Image
S’élève alors une supplication : « Écoute Israël ton Dieu et tends l’oreille »
Un cœur attentif a recueilli chaque mot. Une main habile a tracé l’alphabet. Un texte s’épanche comme le flot d’un fleuve. Des lettres, un texte, mais point d’images.Les yeux se sont fermés afin de mieux entendre.
Dieu se penche vers sa créature, L’Illimité converse avec la limite.
L’Éternel veut entendre son Nom dans la bouche des hommes.
Quatre consonnes « Yod – Hé – Vav – Hé » Prononcées – Dieu est là !
Le Temple fut ruiné,Le peuple dispersé, le Nom oublié… Dieu s’est tu ! Comment faire une image?
Ezéquiel, vint au secours du graveur Il a vu ! Un Char de Feu
La Roue de l’Ange porte en son cœur le « Yod »La semence du Verbe Le Principe d’où tout procède et s’écoule en fleuves
L’Ange
La Roue du Taureau porte la lettre « Vav »Tel un « Yod »Enraciné dans les profondeurs
Le Taureau
La Roue du Lion porte à nouveau la lettre « Hé » Le Souffle descendu dans les profondeurs, Remonte l’offrande de toutes choses vers le Principe.
Le Lion
La Roue de l’Aigle porte la lettre « Hé »Elle blasonne le Souffle qui relie tout
L’Aigle
La Source Tourbillonnante
L’Éclair Fulgurant
La Colombe au creux du Rocher
L’Éclair Fulgurant
Du milieu du char monte un grand feu
Manteau de pourpre de l’Être Inconnaissable,
Les mondes attendent.
Un souffle… Toute matière, tout son, toute forme
S’embrase et s’illumineIl prépare la Transsubstantiation
en secret
Une colombe s’est blottie dans la fente d’un roc
Elle est lumière et forme qui informe
Un éclair déchire l’obscurité L’espace, le temps, la matière et l’être sont crées.
Entendre ne suffit pasL’amoureux veut voir l’Aimée
Au milieu du ciel, il aperçoitL’Image héraldique de son Nom
L’Étoile Polaire,L’amoureux et le monde Autour d’elle tournent
L’œil Des Profondeurs
L’Étoile Polaire
L’œil a vu le Buisson Ardent Il flambe sans se consumer
Il a vu le Char de Feu monter vers le TrôneIl a vu la Colombe au creux du RocherIl a vu le Fils de l’Homme Couché dans la crèche, dressé sur le gibet
L’Œil étoilé
Signe de contradiction voici la Pierre. Dure, inerte, pesante matière. Brute elle
sert au lynchage, taillée elle sert de fondement, jetée ou rejetée elle s’édifie en Temple à son tour détruit et rebâti encore. Dans les cœurs attentifs la Pierre rejetée a trouvé refuge. Elle y fonde en secret le dernier sanctuaire.
La Pierre de Fondement
Sept Foyers
Le Visage veut voir le visage
Le psalmiste s’interroge :« Pourquoi Dieu a-t-il crée le Monde ? »
Son chant court de verset en verset
La réponse résonne : « Parce que le Visage veut voir le visage… » Voici la créature, voici son chantDieu tend l’oreille
Jacob lutte avec l’Ange.Face à face !
Comment a t-il osé ?Il a vu la faiblesse de Dieu.
Feu sur Feu
Le Nom de Dieu est
une échelle sonore.
Prononcé dans le
cœur, il monte en vo-
lutes, en tourbillons,
en flammes. Il opère
ses métamorphoses.
L’échelle de Flammes
Au pied du Temple l’architecte a dressé quinze marches Pour chaque degré le psalmiste a composé un chant Le Temple a disparu Encore les cœurs résonnent
Graduel
Les anges dînent dans la maison d’Abraham
Ils sont trois et la même Personne.La table est dressée, le pain rompuet le vin versé Image silencieuse de son Nom
Toutes mes Sources sont en Toi
Le cœur est l’Arche qui traverse les Mondes
Il vogue du visible à l’InvisibleAffronte incendies et déluges Malgré la lance, malgré la brèche
L’Arche
Le Buisson Ardent recèle l’offrande du Nom divinA l’Arbre de la Croix est cloué le Nom incarné
Au pied de ces arbres, une créature Elle a porté dans sa chair et son cœur ce Nom sans mourir
Dans le feu crépite l’aveu d’un Nom. Dés lors, entre Créateur et créature,Ce sera Confidence pour confidence. Chant pour chant.
Le Buisson Ardent
Deux cœurs amoureuxUne même chair, un supplice
La Vie se répand en fleuves d’eau et de sangLes cœurs ont été débridés par la lance de Longin
L’Arbre de Vie
L’échelle inscrite dans le cœur
a rempli son office. S’estompent enfin limites et frontières. Le Nom a un Visage, un regard, un sourire
Le Ciel Ouvert
Le Ciel et la Terre se sont épousés Pierre, arche, arbre, temple, cœur, porte,
échelle, coupe… Les belles images qui ont porté le Nom
aux mille facettes Se recomposent en un Visage
De chacun - Il prononce le nom
Nom pour nom
Ciel Nouveau Terre Neuve
Polices du livreTitres * Trajan Pro | Lettrines * Pacioli | Textes * Roboto
Création et mise en pageInstitut de l’Internet et du Multimédia (La Défense)
1er livre réalisé avec la police Roboto de Google
2011-2012