Formation du vendredi 2 février 2018, pôle PEJS, collège Clémenceau, p.1
LES ELEVES PRESENTANT UNE DEFICIENCE AUDITIVE
MIEUX LES CONNAITRE POUR MIEUX LES SCOLARISER
1. Déficience auditive : de quoi parle-t-on ?
1.1. Définition
On recense en France 4 000 000 personnes malentendantes et 500 000 personnes sourdes (OMS
et enquête HID 2002). Les personnes sourdes peuvent utiliser des modes de communication qui leur
sont propres comme la langue des signes française (LSF) et/ou la langue orale avec l'aide du langage
parlé complété (LPC).
On regroupe sous le terme de déficience auditive différents degrés de perte d'acuité auditive.
C'est un handicap qui peut survenir à n'importe quel moment de la vie. Chez le jeune enfant, lorsque
l'atteinte est bilatérale, elle perturbe l'acquisition et le développement du langage oral et écrit. Dans
tous les cas, elle modifie la communication et les relations sociales.
1.2. Les niveaux de surdité
Déficience auditive légère
La perte tonale moyenne est comprise entre 21 et 40 dB. La parole est perçue à voix normale,
elle est difficilement perçue à voix basse ou lointaine. La plupart des bruits familiers sont perçus.
Déficience auditive moyenne
La perte tonale moyenne est comprise entre 41 et 70 dB. La parole est perçue si on élève la
voix. Le sujet comprend mieux en regardant les mouvements labiaux du locuteur. Il existe une gêne
selon le bruit et l'éloignement de la source sonore.
Déficience auditive sévère
La perte tonale moyenne est comprise entre 71 et 90 dB. La parole est perçue à voix forte près
de l'oreille. Les bruits forts sont perçus.
Déficience auditive profonde
La perte tonale moyenne est comprise entre 91 et 100 (premier degré), entre 101 et 110 dB
(deuxième degré), entre 111 et 119 dB (troisième degré). Aucune perception de la parole. Seuls les
bruits graves très puissants sont perçus. Ils sont rarement identifiés.
Déficience auditive totale
La perte moyenne est de 120 dB. Rien n'est perçu.
1.3. Les types de surdité
Les surdités de transmission sont dues à des atteintes de l'oreille moyenne et/ou
externe. Elles sont fréquentes avec une perte auditive inférieure à 60dB. Beaucoup sont accessibles
à un traitement médical et/ou chirurgical.
Les surdités de perception qui sont dues à une atteinte de l'oreille interne (cochlée) ou
du nerf auditif.
On parle de surdité mixte lorsque les deux atteintes sont associées.
Elles peuvent être légères, moyennes, sévères ou profondes. La surdité peut être isolée ou associée à
d'autres troubles ou déficits qui doivent être diagnostiqués et traités de manière spécifique.
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1.4. L'appareillage
Tous les enfants sourds ou déficients auditifs graves sont porteurs de prothèses auditives. On
distingue deux types de prothèses :
Les appareils classiques se portent derrière ou dans l'oreille. Les sons sont amplifiés et
filtrés sur les fréquences importantes de la voix humaine pour être transmis via le tympan dans l'oreille
moyenne.
Les prothèses par implant cochléaire nécessitent une intervention chirurgicale,
consistant à introduire dans l'oreille interne des électrodes recevant leurs impulsions d'un
microprocesseur porté en externe. Ces derniers appareils réagissent directement sur le nerf auditif.
1.5. Difficultés rencontrées
La réception du message oral
- Pour les jeunes sourds de naissance ou qui ont une surdité acquise, les problèmes de communication
résultent de la difficulté de réception du message vocal et par voie de conséquence l'expression peut
être déficiente faute d'un modèle acoustique reçu dans sa totalité. Ceci entraîne une difficulté dans
l'acquisition et la maîtrise du français à l’oral comme à l'écrit, en compréhension comme en
expression.
- En ce qui concerne les jeunes dont la surdité a été acquise après l'apprentissage du langage, il leur
est plus facile de reconnaître ce qu'ils connaissent déjà. Leurs connaissances et expériences
linguistiques associées à la lecture labiale leur permettent éventuellement de deviner ce qu'ils n'ont
pas perçu.
- La qualité de la réception du message oral est essentielle. Les systèmes d'amplification ne pouvant
être pleinement satisfaisant, il faut veiller à ce que le jeune sourd puisse bénéficier
complémentairement de la lecture labiale. Ceci demande aux professeurs d'être particulièrement
attentifs à parler en face et à faire un effort d'articulation et de rythme de parole.
- Si la lecture labiale est indispensable pour communiquer, elle ne lui est malheureusement pas
toujours suffisante pour saisir la totalité du message. Il lui faut faire de la suppléance mentale, ce qui
nécessite un bon niveau de connaissances générales et culturelles et un bon niveau de langue.
- Cet exercice réclame beaucoup de résistance : ne pas perdre un mot de l'enseignant suppose de ne
jamais le perdre du regard ; l'effort constant de compréhension et de suppléance demande une très
grande capacité d'attention et de concentration. Cela entraîne une fatigabilité et des fluctuations dans
leurs capacités de compréhension.
La compréhension du message oral ou écrit.
La surdité de naissance ou de la première enfance provoque, généralement, un retard plus ou moins
important dans l'acquisition et la maîtrise de la langue. Ce retard peut avoir des conséquences sur les
apprentissages ainsi que sur la vie relationnelle et sociale.
Dans le cadre de la classe, la difficulté de compréhension doit être analysée ; il peut s'agir :
- d’une difficulté dans l'apprentissage conceptuel,
- d’une méconnaissance des termes lexicaux utilisés,
- d'un niveau linguistique globalement insuffisant,
- d'un manque de connaissances générales et de références culturelles.
Quelquefois une reformulation ou une ré explication suffisent ; dans d'autres cas il est fait appel soit
à un codeur Langage Parlé Complété (LPC), soit à un interprète ou à une interface en Langue des
Signes Française (LSF), soit à un soutien pédagogique d'un enseignant spécialisé utilisant une
communication bimodale.
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2. Quelques conseils pour accueillir et accompagner un élève présentant
une déficience auditive
Informer vos élèves sur les particularités de leur camarade sourd. La surdité engendre des
aménagements que les autres élèves ne doivent pas considérer comme des privilèges : mobilité (besoin
de vérifier des informations), attention particulière de l’enseignant, présence d’un codeur, aide d'un
enseignant spécialisé...
L'enseignant
La lecture labiale et l’expression du visage sont deux éléments essentiels pour la réception et
la compréhension du message.
Adopter une attitude expressive, mimer au besoin ce qui peut l'être.
Se placer face à la lumière.
Ne pas trop circuler en parlant.
Eviter d'arpenter la classe et de disparaître du champ de vision de l'élève sourd.
Attirer son attention avant de parler.
Rester face à l'élève lors des explications orales.
Donner les consignes dans l'ordre chronologique.
Eviter de parler avec les mains devant la bouche
Ne pas parler en écrivant au tableau.
Articuler sans exagération, conserver un niveau de langage, un débit et une intensité de parole
naturels.
Parler de façon ni trop lente, ni trop rapide, avec un débit modéré.
Soigner l'écriture au tableau.
Eviter de porter des lunettes teintées ou qui brillent trop.
Eviter de regarder ailleurs en parlant, le regarder dans les yeux.
Etablir en classe des conditions optimales de réception des messages : silence, tour de rôle de
parole, se signaler à la prise de parole.
La classe
Les bruits de fond divers sont très amplifiés par les prothèses auditives. Ils sont une
perturbation pour la réception, la discrimination et la compréhension de la parole. Un équipement FM
peut améliorer la perception auditive.
Elle doit être calme et bien éclairée.
Elle doit disposer d'un grand tableau, bien visible, qui ne luise pas.
La place de l'élève
Il n'y a pas de règle absolue, il est souhaitable de placer l'élève le dos à la lumière, non loin du
tableau.
Le premier rang est préconisé pour la lecture labiale mais déconseillé pour la participation aux
échanges avec la classe. Le deuxième rang est idéal pour lui permettre de voir tout le tableau, le visage
de l'enseignant, les réactions des autres élèves.
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3. Difficultés générales rencontrées par les élèves malentendants du point de vue de la
communication, de l’accès aux apprentissages et de son bien être en tant qu’élève.
DIFFICULTES POUVANT ETRE RENCONTREES PAR LES ELEVES
ADAPTATIONS ET PISTES PEDAGOGIQUES PROPOSEES
CO
MM
UN
ICA
TIO
N
L’élève sourd ou malentendant, même bien appareillé, n’entendra jamais comme un élève entendant. - Mauvaise perception des messages : bruits dans l’environnement de l’élève, acouphènes, difficultés à percevoir certaines fréquences, mauvaise identification de la source sonore, du locuteur. L’élève sourd ou malentendant est très gêné par les bruits parasites. - Lecture labiale (sur les lèvres) : nécessaire mais fatigante et non suffisante (sosies labiaux comme chapeau/chameau, sont invisibles sur les lèvres comme ceux qui se forment à l’arrière de la gorge - « r », « k », « g »). Pour beaucoup, la lecture labiale ne permet pas de comprendre une partie significative du message. Certains élèves ne l’utilisent pas. Il arrive que des mots, même simples, ne soient pas connus de l’élève sourd ou malentendant. - Déficit lexical : trop faible confrontation aux mots, manque de verbalisation quant aux situations vécues. - Mauvaise connaissance des structures syntaxiques : intentions du message (interrogations, ordres…).
Aménagements matériels - Organiser la classe en U si possible ou placer l’élève au 2èmerang. En maternelle, veiller à ce que l’élève soit placé de face et à proximité de l’enseignant. − S’assurer que l’éclairage est suffisant, attention aux contre-jours. − Diminuer les bruits de fond (feutres ou balles de tennis sous les pieds de chaise, de tables ; éloignement du rétroprojecteur…). − Multiplier les supports visuels. − Vérifier le bon fonctionnement des prothèses ou de l’implant (piles/batteries). − Si l'élève utilise un micro HF, préciser les activités et les cours où l'élève en a besoin. Éviter le port du micro HF par l'enseignant toute la journée, surtout chez les plus jeunes. A partir du collège, le jeune élève sourd ou malentendant est en général capable de dire lui-même dans quels cours il souhaite que le professeur porte le micro. Posture de l’enseignant − Organiser le débat : faire respecter le tour de parole, pointer celui qui parle et donner le prénom, aménager des pauses ; si l’élève a un micro HF, celui-ci peut être utilisé comme bâton de parole. − S’adresser à l’élève ou à la classe : attirer son attention ; être proche, bien en face, éclairé, ralentir son débit, parler plus fort et articuler sans excès, être expressif, mimer au besoin ; être proche de l’objet d’étude ou le déplacer ; ne pas masquer son visage ; utiliser des phrases courtes, avec un vocabulaire accessible ; reformuler, donner des exemples en cas d’incompréhension... − Répéter ce qui vient d'être dit par l'un des élèves de la classe car l'élève sourd ou malentendant n'a pas nécessairement perçu l'intégralité du message.
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DIFFICULTES POUVANT ETRE RENCONTREES PAR LES ELEVES
ADAPTATIONS ET PISTES PEDAGOGIQUES PROPOSEES A
CC
ES A
UX
AP
PR
ETN
ISSA
GES
L’élève sourd ou malentendant « écoute en regardant » − Il a souvent besoin de regarder le locuteur pour compléter la réception du message auditif par la lecture labiale. Il ne peut donc pas écouter et effectuer une autre tâche simultanément (écrire, prendre des affaires…). − Il arrive que l’élève sourd ou malentendant dise qu’il a compris même si ce n’est pas le cas. L’élève sourd ou malentendant manque souvent de confiance en lui − Pour compenser d’éventuelles difficultés de réception ou de compréhension du message, l’élève sourd ou malentendant peut avoir recours, plus souvent que d’autres, à l’imitation, à la vérification et à l’apprentissage par cœur. Accès souvent plus difficile à la conceptualisation − Déficit d’expériences, de verbalisation des situations vécues. − Difficultés à réfléchir, à exprimer des idées, à catégoriser induite par le déficit lexical. − Difficulté à appréhender les relations de cause à effet. − Difficulté à se repérer dans l’espace et le temps. Maîtrise de la langue Difficultés fréquentes à : − situer le contexte, anticiper ; − accéder à la richesse de la langue : polysémie, métaphores, sens propre/figuré, beaucoup de contresens ; − comprendre les consignes. − Bain linguistique insuffisant : la structure des phrases ne s’acquiert pas naturellement. − Souvent peu d’imaginaire : manque de compréhension des contes, des dessins animés, l’élève se réfugie dans ce qu’il maîtrise.
Accepter et valoriser toute communication même non verbale (regards, gestes, sourires, mimes…) A l’oral, toujours privilégier les accroches visuelles − Laisser le temps d’écouter avant d’agir, de regarder le document avant de commencer l’analyse (pas de double tâche). − Faire reformuler, demander ce qu’il a compris ou donner un exemple (Eviter : « Tu as compris ? »). Éventuellement, reformuler de façon plus simple ou donner des explications complémentaires. − Annoncer le programme, le plan, les changements de thème. − Ne pas hésiter à donner des explications même sur des expressions qui nous semblent évidentes, des mots courants ; verbaliser ; mimer… En fonction de l’âge de l’élève, de la classe dans laquelle il est accueilli et de son profil, quelques pistes pédagogiques possibles − Privilégier les activités permettant de créer du lien, de catégoriser, de trier, de ranger ; − Insister sur la méthodologie permettant de relever les informations pertinentes (dans une leçon, sur une image…) ; − Favoriser la manipulation, l’ancrage des concepts par l’expérience, les échanges entre les élèves ; − Pour l'apprentissage de la lecture, la méthode Borel-Maisonny est souvent bien adaptée aux difficultés des élèves sourds ou malentendants ; − Multiplier les supports visuels durant les séquences d’apprentissage : recourir aux dessins, pictogrammes, schémas, frises, plans, calendriers, agendas, répertoire des mots nouveaux, dictionnaires visuels… Le support visuel est important dans tous les domaines, y compris pour préparer une sortie ; − Donner un support écrit dès que possible et en fonction des besoins (photocopies, clé USB) ; − Ecrire le plan ; − Penser aux affichages, aux fiches ressources pour le vocabulaire nouveau, les notions de grammaire (fiches de référence avec modèles de phrases), de conjugaison. Permettre à l’élève de se servir de ces outils. Apprentissage d’une langue vivante étrangère Penser à la qualité des documents sonores et aux conditions d’écoute (micro H-F ; casque spécifique pour écoute différée si possible) ; utilisation d’une clé USB pour retravailler le cours à la maison. Si la réhabilitation auditive est importante, privilégier l’écrit. Dans certains cas des aménagements d’examen peuvent être demandés. Etablir un lien avec l'orthophoniste, le service de soin lorsqu’il intervient Pour permettre une prise en compte rapide des besoins de l’élève, connaître ses difficultés spécifiques, les points d’appui.
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DIFFICULTES POUVANT ETRE RENCONTREES PAR LES ELEVES
ADAPTATIONS ET PISTES PEDAGOGIQUES PROPOSEES B
IEN
VIO
VR
E SA
VIE
D’E
LEV
E
- L’élève sourd ou malentendant a besoin de regarder autour de lui pour vérifier qu’il ne manque pas une information (fonction d’alerte à l’environnement). − Mauvaise interprétation de situations. − Fatigue très importante (efforts permanents pour avoir accès à l’information) qui peut se traduire par des comportements inappropriés (impulsivité, repli sur soi…) − Refus possible du port de prothèses (regard de l’autre), d’évoquer sa différence. − Risque d’isolement lorsque l’élève utilise la langue des signes et n’a pas d’interlocuteur parmi ses pairs. − Peur de l’obscurité, de tout ce qui ne permet plus d’avoir des repères visuels. − Un élève sourd ou malentendant perçoit moins d’indications du danger. Ce n’est pas parce que l’élève n’entend pas ou mal, qu’il ne peut pas découvrir le monde sonore.
Accepter que l’élève décroche régulièrement son regard. Ce n’est pas nécessairement le signe d'un déficit de concentration. Cependant, être attentif aux indices d’incompréhension : regard ou expression. − Eviter d’entrer brusquement dans son champ visuel (lui tapoter l’épaule, attirer son attention par un geste, l’appeler). − Penser à verbaliser les situations qu’il n’a pas nécessairement comprises (irruptions dans la classe, bruits extérieurs, rires...). − Tenir compte de la multiplicité des partenaires, des lieux, des activités autour de l’élève. − Sensibiliser l’équipe éducative et les élèves au handicap auditif (possibilité de faire appel aux services de soin ou au médiateur pédagogique du PEJS pour une information relative à la surdité) ; possibilité d’organiser un atelier d’initiation à la langue des signes… − Eviter les situations d’obscurité complète (sieste en maternelle ou classe transplantée). − Etre vigilant quant à la sécurité lors de sorties et en particulier lors d’activités qui nécessitent d’enlever l’appareillage (piscine…). − S’intéresser au monde sonore (activités d’écoute, instruments, lotos sonores, attention portée à des bruits du quotidien, de l’extérieur qui sont verbalisés…). Dans les classes maternelles tout particulièrement : faire découvrir l’aspect sonore de son environnement et développer l’intérêt pour cela. Passer également par le toucher, la vibration…
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4. Les difficultés liées aux activités pédagogiques et aux supports utilisés
Il est souhaitable que le jeune sourd ait un maximum d'informations visuelles. Illustrations,
croquis, écrit pour remplacer, compléter tout ce qu'il ne peut pas recevoir auditivement.
La prise de notes
L'élève sourd ne peut suivre en même temps la lecture sur les lèvres de l'enseignant qui parle
et le texte à écrire. La prise de notes est très problématique. L'élève sourd doit disposer d'une
photocopie ou recopier les notes d'un camarade placé à côté de lui.
Les documents sonores, disques, enregistrements magnétiques (ils doivent être de très bonne
qualité)
L'élève doit pouvoir disposer d'une transcription ou d'une explication de ces documents.
La projection de diapositives
Dans le noir l'élève sourd ne peut bénéficier du commentaire oral. Pour lui permettre de suivre
sur les lèvres, le professeur doit penser à éclairer son visage, de manière satisfaisante quand il donne
des explications.
La projection de films
Lorsque cela est possible, il est préférable de choisir un film sous-titré. Dans le cas contraire,
le jeune sourd doit recevoir un maximum d'information, pour pouvoir comprendre.
La problématique de l’oral
Le cours oral
Certains élèves sourds ne peuvent intégrer qu'environ 1/3 du message oral. Il faut penser à écrire
autant que possible au tableau pour compléter les informations données, les structurer (plan du cours),
pour lever les ambiguïtés phonétiques.
Le cours oral à partir de l'étude de documents
Que ces documents soient exposés au tableau ou à la disposition des élèves, l'élève sourd ne peut dans
le même temps les consulter et lire sur les lèvres du professeur les commentaires ou l'explication
donnée. Il est donc conseillé de respecter une alternance de temps entre l'étude de ces documents par
l'élève et les explications orales.
L'exposé ou l'interrogation orale d'un autre élève
Pour que l'élève sourd puisse suivre cet échange, il faut que l'enseignant désigne du doigt l'élève
interrogé pour qu'il soit identifié par l'élève sourd. L'élève interrogé et l'enseignant doivent être placés
face à l'élève sourd.
Le débat
L'élève sourd ne peut suivre les échanges et y participer s'il ne voit pas ses camarades et si des règles
strictes de prises de parole ne sont pas instaurées.
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5. Pour approfondir sur les difficultés liées à la construction de la langue chez les
enfants malentendants et leurs incidences sur l’ensemble des apprentissages.
Difficultés rencontrées fréquemment
Propositions d’aménagements pédagogiques facilitant les apprentissages
Un principe de base : privilégier le « visuel »
Un déficit souvent important en
vocabulaire :
Avoir toujours cela à l’esprit : les
difficultés de compréhension, à l’oral
comme à l’écrit, sont très souvent
dues (au moins en partie) à des
lacunes lexicales. On est très souvent
surpris de constater que tel ou tel mot
qui nous parait très simple, n’est pas
véritablement connu.
Ce déficit s’explique très bien quand
on sait que le vocabulaire de base
s’acquiert dès l’âge de 2 ans. Entre
2ans et demi et 5ans, l’enfant
mémorise en moyenne entre 30 et 40
mots nouveaux par jour ! Or la surdité
n’est pas toujours détectée à cet âge,
elle peut aussi apparaître plus
tardivement, et même si l’enfant a
déjà été appareillé, il faut en général
plusieurs mois, de réglages et de
rééducation, avant qu’il puisse
vraiment tirer profit de son gain
prothétique.
D’autre part, l’enfant n’est jamais
certain d’avoir déjà entendu tel ou tel
mot ; il lui est plus difficile de faire des
rapprochements pour connaître un
mot dans ses différentes acceptions.
L’enfant entendant acquiert
« naturellement » un mot, parce qu’il
l’aura entendu dans de nombreuses
phrases, situées dans des contextes et
situations diverses, y compris dans des
discours qui ne lui étaient pas
adressés. Ce qui est évidemment
beaucoup moins possible pour un
enfant sourd.
A l’oral comme à l’écrit, penser à s’assurer de la
connaissance du vocabulaire, y compris même des mots qui
semblent très simples !
Cela risque de prendre du temps ; il est donc souvent nécessaire
et préférable de prévoir, surtout au début, des histoires,
racontées ou lues, de niveaux plus modestes et de longueur
réduite.
Pour aider à la compréhension d’un mot, on peut :
- En montrer une image, ou mieux, plusieurs ! (Les enfants sourds ont tendance à prendre ce qui n’est qu’un exemple pour la notion complète [voir ci-après])
Par exemple, pour le mot « bouteille » : on peut montrer diverses bouteilles en verre, en plastique mais aussi la bouteille d’oxygène ou d’air comprimé du plongeur !
(=> Polysémie des mots)
- Dessiner et/ou représenter schématiquement le mot, la situation.
- Utiliser le mot dans différentes phrases, différents contextes permettant de voir différentes acceptions.
- Accompagner ses explications de mimes. - « Théâtraliser », mettre en scène la phrase, la situation.
(Les acteurs peuvent être les enfants eux-mêmes, ou des poupées, des marionnettes ou même dessinés au tableau.)
Penser à être très expressif lorsqu’on raconte ou lit une histoire : l’intonation, l’expression faciale, aident déjà beaucoup à la compréhension ; on peut aussi mimer en même temps que l’on raconte.
- Travailler très tôt sur la formation des mots, constituer des familles de mots (préfixe/racine/suffixe) (but : montrer les liens entre les mots)
Exemple : boire => j’ai bu => buvable => imbuvable
NB : Les différentes formes d’un verbe, comme ici « boire » et « bu »,
ne sont pas évidentes pour un enfant sourd.
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Enfin, ce manque d’entraînement
naturel à comparer les mots, à jouer
avec eux, à faire des rapprochements
entre eux, etc… fait que très souvent la
mémoire auditive est moins
performante (« la fonction fait
l’organe »). Il leur est donc plus difficile
de retenir les mots, de les réutiliser,
donc de les mémoriser suffisamment
pour qu’il fasse partie de leur
vocabulaire actif.
Certains mots sont encore plus
difficiles à comprendre pour les
enfants sourds.
A. C’est le cas par exemple des
mots génériques :
L’enfant sourd a souvent du mal à
comprendre que derrière un seul mot
se cache toute une « collection », un
ensemble. Il a tendance à considérer
qu’à un mot ne correspond qu’un seul
« objet ». Par exemple, si on lui
montre une banane en lui disant
« c’est un fruit », il est probable que
pour lui le mot fruit ne s’appliquera
qu’à la banane.
- Donner (ou montrer) toujours plusieurs exemples : « Un fruit c’est par exemple une banane, une poire, un abricot, … - Demander à l’enfant sourd de continuer la liste. - Donner des contre-exemples : le chocolat n’est pas un fruit, la carotte non plus, etc… afin de préciser les limites ! (Car tout ce qui se mange n’est pas forcément un fruit !) - Lui demander d’autres contre-exemples - Faire des exercices spécifiques sur ces termes, par exemple des tris d’images : on fait le paquet des fruits, le paquet des légumes….
Attention à être soi-même au clair avec les notions abordées !
Ainsi, la tomate est considérée comme un légume (rangée dans
le magasin dans le rayon des légumes) mais c’est un fruit, elle
peut donc aller dans le paquet des fruits et des légumes !
- Constituer des boîtes étiquetées « fruits », « légumes » … Pour pouvoir les compléter à l’occasion et revenir sur la notion de temps en temps (Tiens, au fait, qu’y a-t-il dans cette boîte ?)
Penser à cela dans toutes les matières ! Par exemple :
- En maths, faire un ensemble de carrés (de différentes
dimensions et orientés de différentes manières), de triangles
(quelconques, isocèles, équilatéraux ou réguliers), d’opérations (
+ - x : ), de parallélogrammes, des multiples de 2, de 3, … , de
nombres entiers, de nombres décimaux, etc …
- En géo, un ensemble de cours d’eaux et ses sous-ensembles
(fleuves, rivières, ruisseaux, torrents), de continents et ses sous-
ensembles (pays) et ses sous sous-ensembles (régions,
départements, communes, …)
- En sciences, des liquides, des solides, des gaz (ou mélanges
gazeux) …
Ne pas oublier que ces notions de catégorisations sont essentielles dans les apprentissages !
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B. C’est également le cas des « petits mots » : déterminants, pronoms, mots-outils)
Beaucoup de petits mots sont très
difficiles à comprendre pour les es, et
cela pour plusieurs raisons :
1. Ces mots n’existent pas pour eux (à l’oral) car ils sont particulièrement inaudibles (de, me, je, que, … n’ont pas de grande consistance sonore et sont quasiment invisibles sur les lèvres, noyés au milieu du discours, d’autant plus qu’ils sont très nombreux)
2. Du coup, ils sont insignifiants (au sens premier du terme), ils n’ont pas de sens, et ne sont donc pas importants. A l’écrit, ils n’y accordent souvent pas d’attention, d’où des difficultés de compréhension en lecture, et une expression écrite « petit nègre ».
3. La plupart de ces mots n’ont pas de significations propres (à la différence des noms, des verbes, des adjectifs ou encore des adverbes). Ils n’ont de sens qu’une fois utilisés dans une phrase, et en plus ils n’ont pas toujours le même sens !
Ainsi, le mot « de » n’a pas le même sens dans les phrases suivantes :
- Je viens de Paris. (Provenance) - Je viens de perdre mon stylo. (Passé proche) - Il me parle de ses vacances (sujet du discours). - Le chien de mon voisin aboie sans arrêt. (Appartenance) - J’ai mangé de la salade. (Partitif)
- Donner (oralement et par écrit (*)) plusieurs exemples de chaque type de phrases où l’un de ces mots est utilisé :
Ainsi, pour reprendre l’exemple du mot « de » :
Je viens de Paris. J’arrive de Marseille. Je suis un garçon (une fille) de la Drôme. Je reviens du
Portugal. Je reviens d’Allemagne.
(Montrer que « de » se transforme en « du » ou « d’» n’est pas
inutile car ce n’est pas forcément évident pour un élève sourd.)
Je viens de perdre mon stylo. Je viens (à l’instant) d’entendre la sonnerie. Je viens (juste) de comprendre. Il me parle de ses vacances Il me demande d’arrêter de parler. Il me dit de faire attention. Il m’informe des règles du jeu Il m’informe du règlement de l’école.
Le chien de mon voisin aboie sans arrêt. Les règles du jeu sont simples. Le chien des voisins aboie sans arrêt. La patience de la maîtresse a des limites. La poupée de ma petite sœur parle.
J’ai mangé de la salade. J’ai bu du lait. J’ai mangé du gâteau. J’ai repris de la viande. J’ai bu du jus de pomme.
- Etiqueter (ou faire étiqueter) ces « paquets » de phrases :
- à l’aide de mots (provenance, passé proche, sujet du discours…)
- à l’aide des questions correspondantes (D’où on vient ? De qui,
de quoi on parle ? …)
- à l’aide de dessins ou schémas
- Donner et afficher des contre-exemples [avec dessins et schémas] :
J’ai mangé du gâteau (= un morceau) ≠ J’ai mangé le gâteau ( = tout le gâteau)
Je viens de Paris ≠ Je vais à Paris
- Mimer, « théâtraliser » la notion (Je viens de Paris / Je vais à Paris.)
(*) Ecrire et afficher
des mots et des
phrases avant même
que l’élève soit
lecteur n’est pas
stupide ; cela lui
permet d’abord de
comprendre que ce
qui se dit s’écrit, et
inversement ; c’est
d’autre part un appui
visuel sur lequel on
peut se référer pour
lever un doute et
procéder à des
corrections.
=> Principe : C’est dans un grand nombre
d’occurrences que ces mots pourront peu
à peu prendre tout leur sens.
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C. C’est encore le cas des expressions au sens figuré :
D’une manière générale, les élèves
sourds ont du mal à distinguer le vrai
du faux. (Ainsi, quand on lit une
histoire, il n’est parfois pas inutile de
préciser que c’est un conte, donc que
ce n’est pas vrai !)
Les expressions au sens figuré, si elles
ne sont pas appréhendées comme
telles et peuvent rendre un récit
complètement incompréhensible !
Casser les oreilles ! ( ?)
Etre une poule mouillée ! ( ?)
Donner sa langue au chat ! ( ?)
Marcher sur des œufs !
Poser un lapin !
Perdre la tête !
Avoir du pain sur la planche !
Par contre, lorsqu’ils les ont comprises,
les élèves sourds aiment en général les
utiliser et en apprendre d’autres.
« Les petits mots »
- Faire régulièrement (oralement et/ou par écrit) des exercices d’imprégnation grammaticale :
Sur les déterminants.
Exemple : Cette trousse est à moi => C’est ma trousse …
Sur les pronoms et autres reprises anaphoriques.
Exemples : J’ai perdu ma trousse. Elle est bleue.
Situations-problèmes : Que représente tel ou tel
pronom dans un texte ?
NB : En mathématiques, attention aux petits mots comme « chaque, chacun », dans les consignes ou dans les énoncés des problèmes. Que signifient-ils ?
Penser à les repérer dans un texte et à bien préciser
que " ce n’est pas vrai ".
Donner le sens de l’expression, en y ajoutant si
possible, plusieurs exemples.
Mimer la scène.
Formation du vendredi 2 février 2018, pôle PEJS, collège Clémenceau, p.12
D. Enfin, c’est le cas des questions :
On retrouve dans certaines questions
le problème des petits mots
difficilement perceptibles, comme le
mot « que » : Que fais-tu ? Que
répond-il ?
D’autre part, l’inversion du sujet et du
verbe perturbe l’élève sourd.
Certaines questions comme
« Pourquoi ? » ou « Comment ?» sont
au début encore plus difficiles à
comprendre.
- Pour les plus jeunes, formuler autrement la question :
Par exemple, plutôt que de dire « Que fais-tu ? », il est préférable de dire « Tu fais quoi ? ». De même, dire : Tu vas où ? Tu veux quoi ? On parle de
qui ? etc….
Plus tard, à l’écrit, il sera peut-être nécessaire de passer par une
phase intermédiaire, pendant laquelle les 2 formes seront
présentes :
Par exemple : Que répond le loup ? ( = Le loup répond quoi ?)
- Aider à comprendre le sens de la question en commençant (oralement au moins) la réponse et en donnant le choix entre plusieurs réponses possibles :
Par exemple : Pourquoi Boucle d’Or ne boit-elle pas le bol du
petit ours ?
Parce qu’il est froid ? Parce qu’il n’est pas bon ? Parce qu’il est trop chaud ?
Là encore, c’est par la répétition de ces types de questions (grand nombre d’occurrences) et de leurs réponses possibles
que les mots interrogatifs prendront du sens.
Dernières remarques :
Ces adaptations nécessitent de repenser la mise en œuvre des séances d’apprentissage mais ne sont pas
pour autant très difficiles à mettre en place et qu’elles ne peuvent en aucun cas nuire aux autres enfants !
Il est bon d’avoir à sa disposition un stock d’images (photos et dessins) que l’on peut acheter (« Imagier du Père
Castor » par exemple), ou se constituer peu à peu grâce à Internet où il existe de nombreux sites de téléchargement
gratuit d’images (Cliparts).