CAROLINE LAFLAMME
LES MODIFICATIONS LEXICALES APPORTÉES PAR LES RÉVISEURS PROFESSIONNELS DANS
LEUR TÂCHE DE RÉVISION: DU PROBLÈME À LA SOLUTION
Thèse présentée à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programlne de doctorat en linguistique pour l 'obtention du grade de Philosophice Doctor (Ph.D)
DÉPARTEMENT DE LANGUES, LINGUISTIQUE ET TRADUCTION . FACULTÉ DES LETTRES
UNIVERSITÉ LA VAL QUÉBEC
2009
.© Caroline Laflamlne, 2009
Résumé
Depuis quelques années seulement, chercheurs et praticiens en révision professionnelle ont
commencé à décrire ce métier et à expliquer les multiples tâches qu ' il comporte (Bisaillon ,
2005 , 2007a et b; Cloutier, 2005; Leclerc, 2006; Lachance, 2006; Association canadienne
des réviseurs, 2006; Bisaillon, 2007 c). Dans la foulée de ces travaux , j ' ai entrepris une
étude sur les modifications lexicales apportées par six réviseurs au cours d 'un de leurs
mandats de révision afin de préciser la nature et les raisons d'être de ce type de
modifications. Je cherchais entre autres ,à répondre aux questions suivantes: Qu ' est-ce qui
caractérise les modifications lexicales? Quels problèmes les réviseurs ont-ils détectés pour
justifier ces changements et comment les ont-ils résolus? Quelles préoccupations
révisionnelles traduisent ces modifications?
Pour obtenir des données , une partie du travail des réviseurs ad' abord été filmé et ceux -ci
devaient , par la suite, expliquer les changelnents qu'ils avaient faits dans le texte.
Seulement les modifications portant sur des unités lexicales ont été retenues pour ma
recherche et une classification a été élaborée pour les décrire et les analyser.
Les principaux résultats montrent que les unités lexicales visées par les Inodifications sont
le plus souvent remplacées et qu'elles appartiennent deux fois sur trois à une classe ouverte
(nom, verbe, adjectif et adverbe). Les problèmes détectés par les réviseurs ont été classés
dans une vingtaine de catégories différentes, ce qui témoigne bien de la diversité des
difficultés que pose l' elnploi des mots dans un texte. Même si les erreurs de syntaxe et les
erreurs d'orthographe grammaticale sont les plus nombreuses, elles ne comptent que pour
environ 20 % de tous les problèmes détectés et résolus. On remarque également que
quelques modifications lexicales ont été apportées sur la base de pressentiments. Par
ailleurs, il s'avère qu ' une modification sur deux visant une unité lexicale est faite dans une
optique nonnative. Enfin, on observe que certains éléments du contexte de travail, dont le
mandat reçu , la conception de la révision et la fonnation, semblent avoir une incidence sur
les types de problèmes que détectent et corrigent les réviseurs.
Abstract
Researchers and editors have just recently begun describing the work of professional
editors and the numerous tasks involved with this work (Bisaillon, 2005 , 2007a et b;
Cloutier, 2005 ; Leclerc, 2006; Lachance, 2006; Association canadienne des
réviseurslEditors ' Association of Canada, 2006; Bisaillon, 2007c). In these works, 1 studied
lexical modifications performed by six editors (stylistic and copy editors) when editing a
text in order to clarify the nature of these changes and the reasons of their being. l was
loo~ing for answers to these particular questions: What characterizes lexical modifications?
Which problems did the editors encounter related to vocabulary use and how did they solve
them? Which concerns are reflected in lexical changes?
ln order to collect data, the editors were filmed for a two-hour period while editing and
were asked afterwards to justify aIl the changes they made in the text. Only the lexical
modifications were kept for this research and a specific classification (typology) was
created to describe and analyze them.
The main results indicate that the lexical units aimed at by the modifications are most often
replaced and belong for the two thirds of them to the open class of units (noun, verb,
adjective and adverb). The problems detected by editors were classified in about twenty
different categories, thus showing the wide range of problems words used in a text may
create. Even though syntax and grammatical errors are the most frequent problems detected
and corrected, they only represent about 20 % of aIl encountered problems. We also noticed
a few lexical changes were brought about on the basis of a hunch. Furthennore, it was
established that one lexical modification out of two is made with a normativeapproach.
Finally, we note that sorne contextual elements of the editors' work, such as the mandate,
the editing approach and the educational and training backgrounds, seem to influence the
types of problems editors detect and edit.
ii
Remerciements
Wow! C'est le premier mot qui me vient à l'esprit quand je pense à ce doctorat que je
termine. Mais oh, malheur! c ' est un anglicisme ... Ouah! devrais-je plutôt dire, si je me fie
à diverses sources. Je ne peux par contre pas m'en empêcher, c ' est plus fort que IllOi ,
WOW! Quoi qu ' il en soit, je suis à la foi s excitée, contente, enchantée et fière de ce travail.
J ' ai vraiment passé de merveilleuses années à travailler sur ce projet croyez-moi. Surtout
que j ' ai pu le faire à mon rythme et me garder du temps pour la famille. Bien sûr, comme
dans tout, il y a eu des hauts et des bas, mais, heureusement, mon analyse per onnelle
montre que les hauts ont nettement été plus nombreux et importants que les bas! Je dois
pour cela remercier plusieurs personnes qui ont, de près ou de loin, contribué à ma réussite,
à commencer par ma directrice de thèse.
Jocelyne, merci pour tout. Car c ' est d ' abord à cause de toi que j'en suis là. Te souviens-tu
de ton offre alléchante? J'allais te rencontrer pour me renseigner sur les cours offerts en
révision et le certificat en rédaction technique parce que je pensais peut-être m 'y inscrire. Je
suis sortie de ton bureau avec une surprenante proposition de doctorat en révision et
d ' auxiliaire de recherche pour ton projet en révision professionnelle. Difficile de refuser
une telle offre! Merci d'avoir eu confiance en moi. J'ai adoré travailler pour toi et avec toi.
Transportée par ton dynamisme, ton enthousiasme, ta bonne humeur et ta passion pour la
révision, j'ai trouvé mon parcours de doctorante très agréable. Les quelques embûches qui
ont surgi à certains moments en travers de Illon chemin disparaissaient rapidement grâce à
nos rencontres, à tes bons mots et à tes encouragements constants. Je me considère très
chanceuse de t'avoir eue comme directrice.
Pascal; Illon amour, merci d'être là et de croire en moi. Ton amour, ta patience, ton soutien,
ton dévouement, ta gentillesse, ton intelligence, ta débrouillardise et ton humour me
prouvent chaque jour que j'ai fait le meilleur choix de Illa vie en t'ouvrant la porte de mon
cœur.
------ -- - - --
Mille fois mercis à mes deux gardiennes au cœur d'or, ma mère et ma tante. Constance et
Jeanne-Mance, je n'aurais pas trouvé mieux que vous pour s'occuper de mes enfants. Je les·
savais entre bonnes mains quand je préparais ma thèse. Votre bonté, votre énergie et votre
flexibilité d'horaire m'ont évité bien des soucis de jeune maman. Vous trouviez même le
temps de faire quelques tâches ménagères! Maman, tu m'as été d'une aide extrêmement
précieuse pendant toutes ces années et tu le seras certainement encore dans les année à
venir. Je t'aime.
Merci à toi papa pour ta bienveillance et la droiture dont tu as fait preuve toute ta vie. Tu
étais là quand j ' ai commencé mon doctorat, tu nous as quittés avant que je le termine, mais
tu n'es pas parti très loin. Tu veilles sur moi d'en haut maintenant et je crois bien que tu as
de quoi être fière de ta fille.
Merci beaucoup aussi à toi frérot de m'avoir laissé la clé de ta maison pour que je puisse
aller y travailler en toute quiétude. Au cours des trois dernières années, je n'avais qu'à
trimballer mes livres et Inon -portable à quelques pas de chez moi. En plus d'économiser
temps et argent, je pouvais retourner dîner à la maison avec les enfants. Un avantage et un
petit bonheur dont je te suis reconnaissante.
Amis et collègues de l'université, Wim, Anne, France, Sarha, Sophie, Marie-J osée, Julie, je
vous remercie pour les Inoments passés ensemble. J'ai eu beaucoup de plaisir à vous
côtoyer et j'espère que l'on se reverra souvent. Toutes .les discussions, tous les rires et
toutes les occasions de défoulement, de dérision, d'angoisse et d'extase que nous avons
partagés m'ont fait un bien énorme. Les études de deuxième et de troisième cycles nous ont
fait embarquer dans une magnifique galère où l'entraide et la solidarité se sont révélé, je
crois, des motivations importantes pour franchir les différentes étapes de notre périple.
Janick et Stéphane, que j'ai peut-être un peu négligés ces dernières années, Jocelyn,
Martine, Marie-Ève, Dale et Stéphanie, Catherine et Christian, toute mon équipe de
volleyball, je tiens également à vous remercier de votre amitié et de votre camaraderie.
Sachez que je vous dois aussi une part de mon succès. Jacques et Bérengère, mes beaux
parents préférés (!), c'est toujours un plaisir de vous voir et de discuter ensemble. Je vous
remercie pour tous vos encouragements. Vous m'appréciez beaucoup et c'est réciproque.
iv
À Claude Verreault, mon premier mentor, Denise Deshaies, directrice des programmes de
2e et de 3e cycles en linguistique, et Isabelle Clerc, membre de mon jury, j'exprime toute
Ina gratitude. Vous êtes des professeurs extraordinaires et vous avez à cœur la réussite des
étudiants. Merci de votre soutien et de votre intérêt envers mon travail. Merci également à
madame Clémence Préfontaine, professeure à l'Université du Québec à Montréal , qui a
procédé à la prélecture de ma thèse et étai t membre de mon jury, ainsi qu ' à madame Louise
Brunette, professeure à l'Université du Québec en Outaouais, qui a accepté la tâche
d' évaluatrice externe.
Enfin, je veux remercier le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH)
qui m'a accordé une généreuse bourse entre 2004 et 2007. Je remercie également la
Fondation de l'Université Laval pour son soutien financier en 2003-2004. L'absence
d'inquiétude financière tout au long de ces années m'a permis de me concentrer davantage
sur mon objet d'étude et d'avancer plus rapidement.
v
À Aurélie et Jean-Philippe, mes deux trésors nés au cours de ces années d'étude. Que cette thèse, que vous lirez peut-être un jour, soit un exen1ple de persévérance
et vous incite à réaliser tous vos projets.
Il les éclairera sur le caractère de notre langue, sur ses entraves et ses ressources, sa
richesse et son indigence, la sagesse de ses lois et la singularité de ses bizarreries.
Jean le Rond d'Alembert Eloges, d'Olivet
vii
Table des matières Résumé Abstract ii Remerciements iii Table des matières viii Liste des tableaux xii Liste des figures xiv Introduction 1
Chapitre 1 : La révision professionnelle: contexte et démarche 9 1.1 Le contexte de la révision professionnelle 11
1.1 .1 Le mandat de révision 11 1 .1 .1.1 Le type de révision 12 1 .1 .1 .2 Les sous-buts de la révision 13 1 .1 .1 .3 Les caractéristiques du texte 13 1 .1 .1 .4 Le support de révision 14 1.1 .1 .5 L'échéance 14 1 .1 .1 .6 La rémunération 15
1 .1 .2 Le texte à réviser 15 1 .1 .3 L'environnement 16
1 .1 .3.1 L'environnement social 16 1 .1 .3.2 L'environnement physique 17
1.1 .4 Le réviseur 17 1 .1 .4.1 Les caractéristiques professionnelles 18
1) La formation 18 Il) L'expérience 18 III) La conception de la révision 19 IV) Les connaissances 19
1 .1.4.2 Les caractéristiques personnelles 20 1) La motivation 20 Il) Le sentiment de la langue 20 III) Le goût personnel 21 IV) Quelques qualités et aptitudes du réviseur 21
1 .2 La démarche en révision professionnelle 22 1 .2.1 La lecture 22 1 .2.2 La détection des problèmes 24 1 .2.3 La résolution de problèmes 25
1 .2.3.1 Les stratégies de résolution 25 1 .2.3.2 Les résultats 26
1 .2.4 La lecture pour valider les modifications 27
Chapitre 2 : Le traitement des modifications dans les textes : survol des classifications existantes 29
2.1 La classification de Sommers (1980) 30
2.2 La classification de 8ridwell (1980) 31
2.3 La classification de Faigley et Witte (1981 , 1984) 32
2.4 La classification de Monahan (1982)
2.5 Les catégories de Boiarsky (1984)
2.6 La classification de Bisaillon (1997)
34
35
36
2.7 La grille de résolution de problèmes de Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Carey (1987) 37
2.8 La typologie de Bisaillon, Laflamme et Leclerc (2004-non publié)
2.9 La typologie de Cloutier (2005)
40
41
2.10 Des classifications i.nadéquates pour la description des modifications lexicales 44
Chapitre 3 : Les modifications lexicales: définition, éléments de description et finalité révisionnelle 47
3.1 Qu 'est-ce qu 'une modification lexicale?
3.2 Qu 'est-ce qu'une unité lexicale? 3.2.1 Les propriétés de l'unité lexicale
3.2.1.1 La forme 3.2.1.2 Le contenu 3.2.1 .3 La combinatoire lexicale
3.2.2 Les classes d'unités lexicales 3.2.2.1 Le nom 3.2.2.2 Le verbe 3.2.2.3 L'adjectif 3.2.2.4 L'adverbe 3.2.2.5 Le pronom 3.2.2.6 Le déterminant 3.2.2.7 La préposition 3.2.2.8 La conjonction 3.2.2.9 L'interjection
3.3 Pourquoi apporter des modifications lexicales dans un texte? 3.3.1 La qualité linguistique 3.3.2 L'efficacité communicationnelle
3.4 Deux préoccupations émergentes
Chapitre 4 : Méthodologie 4.1 Les objectifs
4.2 La méthodologie 4.2.1 L'expérimentation
4.2.1.1 L'enregistrement de l'activité révisionnelle 4.2.1.2 La verbalisation rétrospective 4.2.1 .3 L'entrevue 4.2.1 .4 La transcription des enregistrements oraux 4.2.1 .5 Les listes de modifications
4.2.2 La constitution du corpus de modifications lexicales ·4.2.3 L'analyse des données
4.2.3 .1 Les caractéristiques des modifications lexicales 1) L'opération d'écriture Il) L'unité lexicale visée III) La dimension linguistique concernée
4.2.3.2 Les catégories de problèmes détectés et corrigés 1) Anglicisme
47
48 49 49 49 51 52 53 53 54 54 54 55 55 55 55
56 56 60
63
65 65
65 66 67 67 68 68 68 70 74 76 76 77 77 79 83
ix
Il) Erreur d'orthographe grammaticale III) Erreur d'orthographe lexicale IV) Erreur de syntaxe V) Formulation inadéquate VI) Imprécision VII) Impropriété VIII) Incohésion temporelle IX) Incompatibilité sémantique X) 1 nexactitude XI) Information non nécessaire XII) Lien manquant XIII) Manque d'uniformité XIV) Mauvais lien XV) Non-respect d'une règle de présentation XVI) Pléonasme XVII) Répétition XVIII) Répétition inutile XIX) Reprise d'information incorrecte XX) Vocabulaire non adapté
4.2.3.3 La résolution des problèmes 4.2.3.4 Les préoccupations reflétées par les modifications lexicales
1) La préoccupation normative Il) La préoccupation communicationnelle III) La préoccupation esthétique IV) La préoccupation personnelle
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales des réviseurs professionnels
5.1 Le contexte et la démarche des réviseurs 5.1.1 La réviseure 1 5.1 .2 La réviseure 2 5.1 .3 Le réviseur 3 5.1 .4 Le réviseur 4 5.1.5 La réviseure 5 5.1 .6 La réviseure 6
5.2 Les caractéristiques des modifications lexicales des réviseurs 5.2.1 Les opérations d'écriture 5.2.2 Les unités visées 5.2.3 Les dimensions linguistiques concernées 5.2.4 Sommaire des caractéristiques des modifications lexicales
5.3 Les problèmes ayant mené aux modifications lexicales 5.3. 1 Les problèmes détectés par la réviseure 1 5.3.2 Les problèmes détectés par la réviseure 2 5.3.3 Les problèmes détectés par le réviseur 3 5.3.4 Les problèmes détectés par le réviseur 4 5.3.5 Les problèmes détectés par la réviseure 5 5.3.6 Les problèmes détectés par la réviseure 6 5.3.7 Vue d'ensemble des problèmes ayant mené 'aux modifications lexicales
5.4 Les solutions aux problèmes détectés 5.4.1 Observations sur les unités modifiées et les unités finales 5.4.2 Observations sur les moyens utilisés 5.4.3 Sommaire des solutions aux problèmes détectés
5.5 Les préoccupations des réviseurs reflétées par les modifications lexicales
x
83 84 84 84 85 85 86 86 86 87 87 87 88 88 89 89 90 90 91 91 94 94 96 99
100
101 101 102 104 106 108 111 112
115 117 118 121 123
124 125 129 137 142 148 152 154
158 159 161 168
168
5.5.1 Les préoccupations de la réviseure 1 5.5.2 Les préoccupations de la réviseure 2 5.5.3 Les préoccupations du réviseur 3 5.5.4 Les préoccupations du réviseur 4 5.5.5 Les préoccupations de la réviseure 5 5.5.6 Les préoccupations de la réviseure 6 5.5.7 Vue d'ensemble des préoccupations des réviseurs reflétées par les modifications lexicales .
Conclusion Bibliographie Annexe A : Modèles de rédaction et de révision Annexe B : Classifications des modifications en autorévision Annexe C : Classifications des modifications en révision professionnelle
Annexe 0 : Extrait de la liste des modifications du réviseur 4 Annexe E : Grille d'analyse des modifications lexicales Annexe F : Correspondance entre les catégories de problèmes et les dimensions linguistiques concernées Annexe' G : Tableaux complémentaires aux analyses des modifications lexicales Annexe H : Grille de résolution de problèmes
xi
169 172 176 182 185 188
190
194 204 214 219 222
223 225
228
229 232
Liste des tableaux
Tableau 4.1 - Expérience des réviseurs et type de document révisé par chacun d'eux 66
Tableau 4.2 - Les catégories de problèmes ayant donné lieu à des modifications lexicales 82
Tableau 5.1 - Pourcentage de modifications lexicales de chacun des réviseurs 115
Tableau 5.2 - Répartition des modifications lexicales des réviseurs selon les opérations d'écriture effectuées 11 8
Tableau 5.3 - Répartition des unités visées par les modifications lexicales des réviseurs 119
Tableau 5.4 - Répartition des unités visées selon les opérations d'écriture etfectuées 120
Tableau 5.5 - Répartition des modifications lexicales selon les dimensions linguistiques auxquelles elles se rapportent 121
Tableau 5.6 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 1 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours 125
Tableau 5.7 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 2 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours 129
Tableau 5.8 - Catégories de problèmes détectés et résolus par le réviseur 3 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours 137
Tableau 5.9 - Catégories de problèmes détectés et résolus par le réviseur 4 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours 142
Tableau 5.10 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 5 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
149
Tableau 5.11 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 6 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
153
Tableau 5.12 - Répartition des problèmes détectés par les réviseurs selon les catégories de problèmes (par ordre d'importance) 155
Tableau 5.13 - Détail des unités visées dans chacune des catégories de problèmes 158
Tableau 5.14 - Répartition des unités modifiées selon les opérations d'écriture effectuées 159
Tableau 5.15 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseure 1) 169
Tableau 5.16 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseure 2) 173
Tableau 5.17 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseur 3) 177
Tableau 5.18 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseur 4) 182
Tableau 5.19 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pour.centage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseure 5) 185
Tableau 5.20 - Nombre de problèmes détectés et réso lus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage" des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseure 6) 188
Tableau 5.21 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (ensemble des réviseurs) 191
Tableau B.1 - La typologie de Bridwell (1980) 219
Tableau B.2 - Les typologies de Sommers (1980) , de Monahan (1982, 1984), de Boiarsky (1984) et de Bisaillon (1997) " 220
Tableau B.3 - La classification de Faigley et Witte (1981; traduit par Laflamme, 2004) 221
Tableau C.1 - Les typologies de Bisaillon , Laflamme et Leclerc (2004) et de Cloutier (2005) pour analyser les modifications des réviseurs professionnels 222
Tableau F.1 - Correspondance entre les catégôries de problèmes et les dimensions linguistiques concernées 228
Tableau G.1 - Répartition des unités lexicales visées par les modifications lexicales des réviseurs selon les classes d'unités 229
Tableau G.2 - Répartition des unités lexicales visées selon les dimensions sur lesquelles portent les problèmes détectés 230
Tableau G.3 - Comparaison des problèmes détectés par la réviseure 2 et le réviseur 3 231
xi ii
Liste des figures .
Figure 1.1 - Modèle de la révision professionnelle , adapté de Laflamme (2007) et de Bisaillon (2007a) 10
Figure 2.1 - La représentation des problèmes, d'après Hayes et ses collaborateurs (1987 : 212) 38
Figure 2.2 - Grille de résolution de problèmes d'un scripteur expert, d'après Hayes et ses collaborateurs (1987 : 231) 39
Figure A.1 - La révision dans le modèle de rédaction de Hayes et Flower (1980) , adapté de Hayes (1998) 214
Figure A.2 - Le modèle de révision de Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Cqrey (1987), d'après Bisaillon (1991) 215
Figure A.3 - Le modèle de révision de Butterfield, Hacker et Anderson (1996) , d'après Laflamme (2004) 216
Figure A.4 - Le nouveau modèle de révision de Hayes (1996) , adapté de Hayes (1998) 217
Figure A.5 - Le nouveau modèle de rédaction de Hayes (1996) , adapté de Hayes (1998) 218
Introduction
La révision professionnelle correspond à l'ouvrage qu'effectue un réviseur sur le texte d ' un
auteur destiné à être publié. TI s'agit « d 'une activité complexe comportant un large éventai l
de tâches rédactionnelles et éditoriales» (Cloutier, 1999). Bisaillon (2005) décrit le travail
du réviseur comme une )
Activité qui consiste à comprendre et à évaluer un texte écrit par un auteur et à y apporter des modifications pouvant toucher les aspects informationnel , organisationnel ou formel dans le but d 'améliorer la qualité [linguistique] du tex te et l'efficacité communicationnelle. Ces modifications se font au moyen des opérations d'addition, de suppression, de remplacement et de déplacement et elles peuvent toucher les diverses unités du texte, du caractère au texte cOlnplet. Elles peuvent donc être mineures -et concerner un détail - ou majeures - et porter sur le contenu et l'organisation du texte. L'activité de révision peut aussi comprendre la réécriture d'une partie d'une phrase ou de longues sections du texte. (p. 13)
L ' Association canadienne des réviseurs (ACR, 2006: 5), reprenant en partie Bisaillon,
définit pour sa part la révision comme « la relecture attentive et méthodique d 'un texte en
vue de l'améliorer, de le modifier ou de le corriger [ ... ] pour assurer la qualité de la langue
et l'efficacité de la communication ». Malgré ces récentes mises au point, il n'en demeure
pas moins que cette discipline reste encore inconnue d'une majorité de gens et est trop
souvent vue « uniquement comme une activité normative dont le but est d ' assurer le respect
des règles du français et, conséquemment, la qualité de la langue» (Bisaillon (dir.), 2007c : 13).
Si l'on s'est peu , penché sur la révision professionnelle jusqu'à tout récemment, c'est parce
que, depuis la fin des années 1970, la révision de textes a essentiellement été considérée
comme une étape du processus de rédaction d'un scripteur, c'est-à-dire de la personne qui
~édige un message. De nombreuses recherches, surtout effectuées en milieu scolaire et
universitaire et principalement dans une perspective didactique, ont confirmé l'importance
de la révision en production écrite et ont permis de faire avancer les connaissances dans ce
domaine (notamment, par ordre chronologique, Sommers, 1980; Hayes et Flower, 1980;
Flower et Hayes, 1981; Faigley et Witte, 1981 et 1984; Scardamalia et Bereiter, 1983;
Introduction 2
Monahan, 1984; Daiute, 1986; Flower, Hayes, Carey, Schriver et Stratman, 1986;
Fitzgerald, 1987; Parks Gaunder, 1987; Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Carey, 1987;
Bisaillon, 1992 et 1997; Fortier et Préfontaine, 1994; Butterfield, Hacker et Albe11son ,
1996). Un des constats qui se dégage est que, pour produire de meilleurs écrits, le scripteur
doit savoir se réviser. Olive et Piolat (2003) , par exemple, dans un article sur l' acti vation
des processus rédactionnels et la qualité des textes, concluent entre autres que, pour mieux
écrire, «le rédacteur a intérêt à se focaliser, au cours de phases de composition nettement
dissociées, sur les traitements de planification et de révision » (p. 203).
Tous ces travaux ont conduit les chercheurs, d'une part, à faire état de leur conception de la
révision (notamment Fitzgerald, 1987: 484 et Alamargot et Chanquoy, 2001 : 100) et ,
d'autre part, à élaborer différents modèles pour tenter de schématiser et d ' expliquer les
composantes et les opérations présentes dans une tâche de révision. Les principaux Inodèles
jusqu'à maintenant sont ceux de Hayes et Flower (1980) et Flow~r et Hayes (1981), de
Scardmnalia et Bereiter (1983), de Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Carey (1987), de
Butterfield, Hacker et Albertson (1996) et de Hayes (1996) 1. Bien qu'ils donnent une bonne
idée de la façon dont la démarche de révision fonctionne, ils ne parviennent pas à rendre
compte de tous les aspects de la réalité professionnelle. Car Inême si la vision du travail
d'un réviseur sur le texte d'un autre comporte de nombreuses sÏ1nilitudes avec celle qu'un
auteur effectue sur son propre texte, elle s'en distingue aussi sur plusieurs points (Cloutier,
2005; Bisaillon, 2007a; Laflamme, 2007).
On compte sur les doigts d'une main les études, récentes, qui ont porté sur la révision
professionnelle ou un de ses aspects (Tremblay, 1994; Bisaillon, 2003; Cloutier, 2005;
Leclerc, 2006). La recherche la plus impo11ante visant à comprendre ce qu'est la révision
professionnelle et à décrire le processus de révision des réviseurs vient d'être complétée par
Bisaillon2 (2004, 2005, 2006, 2007a, b, d et 2008; aussi Bisaillon, Fortier et Préfontaine,
2003 et Bisaillon, Laflamme et Leclerc, 2004-non publié). Il s'agit d'une étude de cas de
six réviseurs professionnels qui ont été filmés alors qu'ils révisaient un texte pour lequel ils
1 Les modèles de Hayes et Flower (1980), de Hayes et ses collaborateurs (1987) , de Butterfield et ses collaborateurs (1996) et de Hayes (1996) sont présentés et décrits à l'annexe A. 2 Cette recherche a été subventionnée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH : 2001-2004). Elle était dirigée par Jocelyne Bisaillon de l'Université Laval (cochercheurs : Gilles Fortier et Clémence Préfontaine, UQAM; assistants de recherche: Caroline Latlamme et Sophie Lec]erc, ULava]).
Introduction 3
avaient reçu un mandat. Les données utilisées pour mon étude proviennent d'ailleurs de
l'expérimentation à laquelle j'ai collaboré. Bien sûr, d 'autres travaux devront être conduits
afin de corroborer les résultats obtenus, mais les données livrées permettent tout de même
de poser les bases de cette discipline.
Tremblay (1994) est, à notre connaissance la première à s'être intéressée à la révi ion
professionnelle. Son mémoire, intitulé La révision: de la correction linguistique à la
réécriture, se présente comme une réflexion personnelle sur la révision en tant qu 'activité
professionnelle. Elle explore en fait une situation réelle de révision qu 'elle a vécue
lorsqu 'elle a été mandatée pour compléter et «mieux écrire » un texte de nature
informative. Dans cette perspective, Tremblay . discute d'abord du but de la ré~ision
(réécriture) et de sa pertinence par rapport à l 'écriture, puis elle cherche à définir cette
activité révisionnelle. Elle souligne notamment qu ' il n ' est pas suffisant de rendre le texte
conforme aux normes linguistiques et éditoriales, mais qu'il faut aussi s'assurer de sa
qualité communicationnelle. Elle aborde ensuite les composantes de la révision qui sont
pour elle les acteurs (auteur, réviseur et lecteur), le contexte (les données du mandat et le
moment de la révision) et l'objet (le tex te). Les étapes que suit le réviseur dans sa tâche de
révision (lire, analyser et critiquer, réécrire puis relire) sont également décrites et le
processus ainsi dégagé est considéré par l ' auteure comme une composante de la génération
de texte (processus d ' écriture). Enfin, elle donne plusieurs exemples d'interventions qu'elle
a apportées dans le manuscrit pour illustrer les mécanismes de la démarche de révision. Les
corrections suggérées ne sont pas catégorisées, mais elles sont justifiées.
Cloutier (2005) a quant à elle rédigé une thèse de doctorat portant sur la rédaction-révision
en milieu professionnel. En analysant des extraits d'un projet de réédition de manuel
, scolaire pour déterminer les raisons d'être des modifications apportées, elle a vérifié si le
principe communicatif de pertinence, tel que définit par Sperber et Wilson (1995), « sous
tend[ait] à la fois l'évaluation de la cohérence et de l'intelligibilité des textes ainsi que les
choix de modifications autres que normatives, conventionnelles ou arbitraires» (Cloutier,
2005 : 10). Sur l'ensemble des modifications examinées, la chercheuse a établi que près de
70 % d'entre elles étaient liées à la recherche de la pertinence. Parallèlement, Cloutier
Introduction 4
s'était aussi donné comme objectif de caractériser les modifications répertoriées dans les
extraits (voir § 2.9).
Leclerc (2006), dans son mémoire de maîtrise, voulait pour sa part montrer comment se
concrétise la prise en compte des destinataires dans le travail de révision de deux réviseurs
professionnels. Pour y parvenir, elle ad' abord recensé les moyens reconnus par des
chercheurs et des praticiens (de la rédaction et de la révision) qui permettent de con idérer
les destinataires dans les textes écrits. Elle a ensuite classé ces moyens selon les a pects
qu'ils touchaient: information, organisation, langue ,et scripto-visuel. Par exemple, sur le
plan de la langue, les chercheurs suggèrent de raccourcir les phrases, d 'adapter le ni veau de
langue au destinataire, de remplacer le vocabulaire vague par des mots précis et de
supprimer les mots inutiles. Enfin, Leclerc a pu déterminer, grâce aux justifications
données par les deux réviseurs, lesquelles de leurs lTIodifications concernaient la prise en
compte des destinataires.
Les principaux résultats de l'analyse de Leclerc montrent que 29 % des modifications du
réviseur A et 50 % de celles du réviseur B ont été apportées pour faciliter la compréhension
du texte par le destinataire. C'est l'aspect langue qui comporte le plus de changements à cet
effet (69 % pour le réviseur A et 59 % pour le réviseur B)et les deux moyens les plus
fréquents ont été de recourir au mot juste et de rendre les formulations plus claires ou
plus cou11es.
Du côté des praticiens, on trouve également peu d'ouvrages traitant de la révision et des
modifications visant des unités lexicales. Jusqu'à tout récemment, il n ' y avait en français
qu'un seul livre qui abordait la révision en milieu professionnel (Horguelin et Brunette,
1998). Celui-ci est par contre principalement orienté vers la révision bilingue, c'est-à-dire
la révision des textes traduits3. Les auteurs établissent bien des parallèles avec la révision
dite unilingue, notamment au chapitre des paramètres de la révision professionnelle (voir
§ 1.2.1) et des principes directeurs qui guident le traducteur-réviseur dans sa façon de
travailler et d 'aborder sa tâche de révision, mais ces données demeurent des
considérations générales.
3 En révision bilingue, le révi seur a accès à ]a fois au texte à réviser (Je texte traduit) et au texte origina1.
Introduction 5
En 2006, Ginette Lachance a décidé de partager sa passion pour son métier de réviseure,
métier qu'elle exerce depuis une vingtaine d'années. En publiant un ouvrage qu'elle aurait
elle-même souhaité trouver quand elle a commencé à travailler dans le domaine, cette
professionnelle veut aider les futurs réviseurs à acquérir une méthode de travail et les
guider dans l'utilisation des bons outils. Elle expose d ' abord les types de fautes à corriger
(ambiguï~és, anglicismes, impropriétés, contre en , faux amis, fautes de grammaire,
pléonasmes, fautes de ponctuation, etc.) ainsi que des éléments perfectibles dan le textes
(répétitions, structures passives, cacophonies, etc.). L'auteure discute ensuite de la façon de
réviser des manuscrits, de faire de la correction d'épreuves et de la révision à ]' ordinateur.
Elle donne également des renseignements utiles sur les qualités d'un bon réviseur et ur le
travail autonome en révision linguistique. Enfin, elle fournit des listes de dictionnaires de
toutes sortes, de grammaires et d'autres outils d'aide susceptibles d'être . consultés par
les réviseurs.
À ces deux ouvrages pratiques s'est ajouté le collectif La révision professionnelle:
processus, stratégies et pratique (Bisaillon (dir.), 2007c). Rassemblant des textes de
rédactologues, de linguistes, d'une psychologue de la cognition et d'une traductologue, ce
livre présente divers aspects théoriques et pratiques de la révision et de la réécriture dans un
contexte professionnel. Il y est notamment question des objectifs que se donnent les
réviseurs lorsqu'ils révisent, des façons dont ils s'y prennent pour réviser et décider des
changements à apporter dans un texte, de la complexité de la tâche et du rôle du traitement
de texte dans leur travail de révision. Cet ouvrage «met en lumière l'exigeant travail
qu'exerce le réviseur professionnel pour améliorer les documents que lui soumettent clients
et auteurs» (Bisaillon (dir.), 2007c : Il).
Comme on le constate par ce bref survol, il existe encore peu de recherches et d'écrits sur la
révision professionnelle. C'est en partie pour accroître et partager les connaissances à
propos de cette profession que j'ai entrepris en 2003 des études de doctorat portant sur les
modifications lexicales4 faites par les réviseurs dans leur tâche de révision. Je dis en partie,
car c'est d'abord et avant tout pour des raisons personnelles que je me suis lancée dans u,n
4 Une modification lexicale est une opération d'écriture effectuée dans un texte à cause d'un problème que pose, pour le réviseur, la présence ou l'absence d'une unité lexicale (voir § 3,1).
Introduction 6
tel projet: le besoin d ' apprendre sur le métier avant d ' en faire carrière, un enthousiasme
évident pour la recherche et une attirance et une cufiosité inexplicables envers les mots de
la langue.
Le choix de m'intéresser spécialement aux modifications liées à l ' emploi des mots dans les
textes vient aussi du fait que ceux-ci sont à la base du discour et de tout me age écrit:
« parler [ et écrire] une langue consiste avant tout à combiner des mots au sein de phrase en
vue de communiquer» (Polguère, 2003 : 15). Je me demandais par conséquent de quelles
façons les réviseurs parvenaient à améliorer la qualité et l'efficacité de la communication
en remplaçant simplement un mot de la chaîne du discours, en en supprimant ou en en
ajoutant un. Une modification lexicale amène-t-elle par exemple une précision, corrige-t
elle une impropriété ou enlève-t-elle un mot inutile? Je m'interrogeais aussi sur les unités
les plus souvent changées: étaient-ce des noms, des verbes, des adverbes? Enfin , j ' avai s
également envie de savoir si ces modifications étaient surtout faites pour respecter des
normes de l'écrit ou pour améliorer la communication et si certaines pouvaient être
~otivées par des raisons personnelles.
À ma connaIssance, aucune recherche, autant en autorévision qu'en révision
professionnelle, ne porte exclusivelnent sur les modifications lexicales. On glane par contre
dans les études quelques données sur les changements effectués sur les mots (Solnmers,
1980; Bridwell, 1980; Faigley et Witte, 1981 et 1984; Monahan, 1982; Boiarsky, 1984;
Hayes et autres, 1987; Parks Gaunder, 1987; Magee, 1995; Bisaillon, 1997; Bisaillon et
autres, 2004-non publié; Cloutier, 2005; voir le chapitre 2). Ces données concernent
principalement les caractéristiques et les justifications des lnodifications. Ainsi, on sait que
les opérations d'addition, de suppression, de déplacement (ou réarrangement) et de
remplacement s ' appliquent aux changements de mots et qu'elles sont communes à
l'ensemble des catégorisations utilisées par les chercheurs. Les mots sont l ' unité
linguistique textuelle la plus touchée par les scripteurs étudiants lors des modifications et ils
sont le plus souvent remplacés. Toutefois, on ne trouve rien à propos de leur catégorie
grammaticale: quelles parties du discours sont les plus touchées par les changements? Est
ce majoritairement des nOlns et des verbes? En outre, quelles dimensions linguistiques sont
Introduction 7
en cause (la sémantique, la morphologie ou la syntaxe, par exémple) et rendent les
modifications nécessaires?
Pour ce qui est des raisons ou des problèmes détectés ayant mené à des modifications
lexicales, quelques-uns ont été identifiés jusqu ' à maintenant par les scripteurs (Parks
Gaunder, 1987 ; Hayes et autres, 1987), dont plusieurs sont en lien avec des règles :
problèmes d ' accords et de temps de verbes, erreurs d ' orthographe, etc. D ' autres rejoignent
davantage des principes d ' écriture, par exemple enlever les adjectifs qui ne sont pas
essentiels, éviter les redondances , employer les bons référents, éviter la langue orale dans
les écrits, etc. Les problèmes détectés par les révi seurs sont-ils les Inêmes? Y en a-t-il
d ' autres? Sans doute que oui si l'on se fie aux catégories de fautes à corriger et aux
éléments perfectibles répertoriés ·par Lachance (2006 [voir ci-dessus]). Quant aux
recherches en révision professionnelle (Tremblay, 1994; Bisaillon 2004 et 2008 ; Cloutier,
2005; Leclerc, 2006) , elles ne fournissent pas de réponses suffi santes ou suffisamment
précises sur cet aspect. Leurs . auteures se sont bien intéressées aux justifications des
modifications, mais pas uniquement à celles des modifications lexicales. En outre, les
catégories dégagées par Bisaillon et ses collaboratrices (2004-non publié) et par Cloutier
(2005), par exemple Faciliter la compréhension du texte, Respecter les règles, Uniformis[er
le] style et Élimin[er] un risque d'ambiguïté ou de confusion , pelmettent de connaître la
finalité ou le résultat escompté par les modifications , mais pas les problèmes à l ' origine de
,celles-ci (voir § 2.8 et 2.9).
Enfin, du côté des solutions appliquées pour résoudre les problèmes détectés dans les
textes, la grille de résolution de problèmes de Hayes et ses collaborateurs (1987) donne
quelques exemples (voir § 2.7), mais on ne connaît pas l ' éventail des recours des réviseurs
professionnels, dont ceux utilisés pour les modifications lexicales.
La thèse que je SOlunets se veut ainsi une contribution de plus à la description et à la
compréhension du métier de réviseur professionnel et elle s'inscrit à l'intérieur de la
recherche dirigée par Bisaillon (2003). En décrivant les caractéristiques des modifications
lexicales, je montre notamment les parties du discours les plus souvent visées ainsi que les
dimensions linguistiques qu'elles concernent. En analysant les justifications données par les
réviseurs, je sonde leurs jugements en ce qui a trait à l'usage du vocabulaire dans les textes
Introduction 8
destinés à être publiés et j'expose les types d'erreurs et de faiblesses qu'ils ont détectés. La
description des moyens elnployés pour résoudre les problèlnes montre pour sa part les
différents éléments mis en œuvre pour corriger et améliorer l ' aspect lexical des tex tes.
Enfin , je démontre aussi, en associant une préoccupation révisionnelle à chacune des
modifications visant une unité lexicale, que celles-ci ne sont pas toutes faites pour des
raisons normatives.
Bien sûr cette recherche comporte ses limites. Tout d ' abord , le travail des six révi seurs
observés ne rend compte que de quelques-unes des situations de révision possibles. Les
types de textes à réviser et leurs buts , par exemple, ou encore les environnements des
réviseurs , représentent une fraction seulement des circonstances de travail des réviseurs et
leurs influences sur les modifications lexicales ne sont pas toutes connues. Également , le
nombre restreint de réviseurs étudiés ainsi que le fait de ne pas avoir observé de tâches
complètes de révision (sauf pour le réviseur 3) limitent les modifications analysées de
même que les observations qui peuvent être faites en lien avec elles. Pour ces raisons , et
d'autres encore, mon étude est avant tout exploratoire et les résultats ne sauraient être
généralisables sans procéder à d'autres recherches semblables.
Malgré ces limites, j'espère que ma recherche permettra, d'une part, de mieux expliciter les
problèmes et les préoccupations des réviseurs à propos de l'emploi des mots dans les textes
qu ' ils révisent et qu'elle fournira, d'autre part, des explications claires sur les façons dont
ils s'y prennent pour améliorer les textes en modifiant le lexique.
Chapitre 1 · La révision professionnelle · contexte et démarche
Dans ce premier chapitre, j ' expose ce en quoi consiste la révision professionnelle. D ' une
part, en présentant le contexte dans lequel les réviseurs travaillent, je spécifie quelques-uns
des facteurs qui influencent leurs décisions d'apporter des modifications dans un texte.
D ' autre part, en décrivant la démarche des réviseurs professionnels pour révi ser les textes,
je situe les modifications , dont les lTIodifications lexicales, dans l'ensemble de la tâche de
révision, ce qui permet de comprendre comment elles sont générées.
Pour connaître les circonstances dans lesquelles les réviseurs exercent leur Jnétier, les
modèles de révision développés jusqu'à aujourd'hui (Hayes et autres, 1987; Butterfield,
Hacker et Albertson, 1996; Hayes, 1996 [voir les figures A.2 à A.4 à l'annexe A]) sont fort
utiles. Ils fournissent des indications pertinentes sur l'activité de révision , mais ils ne
rendent pas compte de tous les aspects de la réalité professionnelle des réviseurs (Cloutier,
2005: 13-24). Heureusement, la récente recherche conduite par Bisaillon (2003) sur le
processus de révision de réviseurs professionnels vient pallier le manque de connaissances
théoriques sur cette profession et en rend possible une première description assez complète.
Les données compilées et analysées dans cette recherche ont non seulement permis
d'observer les similitudes et les différences entre la révision professionnelle et
l'autorévision, mais elles ont aussi mené à une définition de la révision en contexte
professionnel (voir l'introduction) ainsi qu'à un modèle de la révision professionnelle. Ce
modèle, présenté à la figure 1.1, comprend deux parties, l'une exposant le contexte de
révision (Laflamme, 2007) et l'autre, la démarche de révision (Bisaillon , 2007 a et b).
Chapitre 1 : La révision professionnelle 10
CONTEXTE
l\'landat de révision
Texte à révise r Environ nernent
l'~ Sujet
Type de révision But Sous-but(s) de la révision Genre Caractéristiques du te}cte .-< Oe:3tinataires ~up~Ott de réVISion Î Type de publication Echeance ~ Longueur
t--Rémunération
En vi ro nne rn e n t soci al
~,uteurs
Collègues réviseurs Éditeur, ch a r~]é de projet
Envi ro nne rn e nt ph \/si qu e
Bureau et son amé na~lement
Supports de révision Ouvrages de ré fére nc e A.utres 0 uti Is cl' a i de tJ
Qualités linguistiques
Ré dacteur en chef Typog ra phe Infog raphiste Supérieu r (cad re)
la révision
Quai ités c omm un ic atio n ne Iles
caractéristiqUe:~ •••••.•.• ;' .~~~~~~~~ •••.•••.•.. /':aractéri5tiQues professionnelles • DÉMARCHE • pet-sc)nnelles
Formation Expérience Conception de la révi::;ion Connais::;ances éditoriales, linguistiques, du genre, des destinataires Connais::iances !]énérales
Lecture pour co mp r-e r-id re et évaluer
f\,'lotivation Sentiment de la lan!Jue GoCJt per30nnel
Détection de prob lè tOn es :.-•. (5tt-até,~ies et résultats ) Ouvetiure d'esprit ou
a d Cl ptab i lité Réso 1 ution de p rob lè m es (str-atégies et résultats ) f',.o'lémoire de::; détails
Patience Lecture pour valider • • Sens de ror"!;.lanisation
'----________ ~~, •• Ii ••••••••••••••••••••••••••••• II •• ~.ill ............. ~----------1
.. ~......... .. Ill .... .... fit
......... fi·· ,. ........ .
Lecture pour comprendre et évaluer 1
Détection Résolution
,I\nticipation
Comparai:30n basée sur : - Connaissance certaine - Connai%ance incertaine - f".o'léconnai::;sance
Rés ultats
Problème réel Problème potentiel
~;traté'jies
j\,ucune p,) immédiates
Relecture Réflexion R.echerche
B) t"B P entées R.electure F!.éfl e;{io n Recherche
1 Lecture po ur vali der 1
P.és ultats
,6,) immédiats
~,ucune résolution Ré'l.!ision R.é éc ritu re
B) reportÉs
,11,ucune ré::;olution SUI]I~W3tion cl l'auteur Tentative de solution
Figure 1.1 - Modèle de la révision professionnelle , adapté de Laflamme (2007) et de Bisaillon (2007a)
Chapitre 1 : La révision professionnelle 11
Bien sûr, d'autres recherches dans le domaine devront être conduites afin de valider le
modèle ou de l'ajuster, le cas échéant, mais dans l'état actuel des connaissances, il semble
représenter assez fidèlement tout ce qu 'englobe la révision professionnelle. C ' est donc à
partir de ce modèle que je décris le travail des professionnels en la matière.
1.1 Le contexte de la révision professionnelle 1
Chaque réviseur évolue dans un contexte particulier. Par contexte, j ' entend les
circonstances dans lesquelles l'activité révi sionnelle est produite. Le contexte est formé
d'un certain nombre de paramètres dont les éléments qui les constituent caractérisent la
révision et influencent la démarche. Les divers paramètres que la recherche sur le processus
de révision des réviseurs professionnels a permis de dégager sont le mandat de révision , le
texte à réviser, l'environnelnent (social et physique) du réviseur et le révi seur lui-même,
pour des raisons que j'expliquerai plus loin (voir la figure 1.1 et § 1.1.4). Les éléments qui
composent les paramètres sont presque toujours présents d'une activité révisionnelle à une
autre, par exemple le support de révision et la rémunération pour le Inandat, le sujet et les
destinataires du texte à réviser, le client, l'auteur ou les collègues de travail dans
l'environnement social, etc. Ils ne se définissent cependant pas nécessairement de la même
façon. En effet, en ce qui concerne le support de révision, les réviseurs ne sont pas tous
requis de remettre une version électronique de leur travail; certains clients préfèrent
recevoir une version papier. De même, les réviseurs examinent des textes de genres et de
sujets différents pour des destinataires ciblés , œuvrent dans divers Inilieux (PME,
organisme à but non lucratif, maison d'édition, etc.), et travaillent seuls ou collaborent avec
d'autres personnes. De plus, ils n'ont pas tous la même formation ni la même expérience de
travail. C'est ce qui explique que le contexte peut être fort différent d'un réviseur à un
autre , mais aussi, pour un même réviseur, d ' une activité révisionnelle à une autre.
1.1.1 Le mandat de révision Avant de se lancer dans la révision d ' un texte, le réviseur doit connaître la tâche qu ' il aura à
accomplir. Il reçoit habituellement un mandat de révision de la part d ' un client - un auteur, '
un éditeur ou un rédacteur en chef, par exemple -, mandat dans lequel celui-ci fournit les
1 Cette . sec tion reprend en partie un chapitre que j ' ai rédi gé pour le collectif La révision prof essionnelle : processus, stratégies el pratiques (Lafi amme, 2007).
Chapitre 1 : La révision professionnelle 12
renseignements nécessaires au réviseur sur le travail qu'il désire voir accompli. Le mandat
constitue donc une sorte de contrat qui comporte l'information utile au révi seur pour guider
son travail de révision2. Les renseignements donnés dans le lnandat concernent
généralement le type de révision et les sous-buts de la révision, les caractélistiques du texte,
le support de révision , l'échéance et la rémunération.
1.1.1.1 Le type de révision Parmi les éléments que le client doit mentionner au réviseur, un des plus importants, sinon
le plus important, est le type de révision que ce dernier aura à effectuer. Veut-il que le
réviseur fasse une simple révision de forme (révision lingui stique), une révision de fond ,
une préparation de copie ou une correction d'épreuves? L'Association canadienne des
réviseurs (AeR, 2006) a récemment redéfini quelques-unes des tâches que les réviseurs ,
salariés ou pigistes, accomplissent pour les éditeurs de livres et de revues, les sociétés, les
associations, le gouvernement, les universités ainsi que pour de nombreux autres groupes et
particuliers. Voici les principales tâches des réviseurs accompagnées de la description
qu'en donne l'Association:
La révision de forme vise l'amélioration du style du tex te dans son ensemble par l'exploitation judicieuse des ressources syntaxiques et lexicales. Elle comprend notamment la correction des erreurs de syntaxe, de vocabulaire, d'orthographe et de ponctuation (p. 9).
La révision de fond suppose une analyse globale du texte, notamment en ce qui concerne l'intelligibilité, la structure, l'articulation logique des idées, l'exactitude des énoncés et l'adaptation aux destinataires (p. 8).
La préparation de copie consiste à préparer un texte déjà révisé en vue de sa mise en pages. Il s'agit notamment d'appliquer de façon uniforme dans tout le document les règles et conventions en usage, et d'informer le ou la graphiste de toute exigence particulière touchant la production (p. Il).
La con-ection d'épreuves comprend toute vérification qui suit la mise ~n pages. Qu'il s'agisse de la première épreuve ou d'épreuves subséquentes, il faut vérifier notamment la typographie, l'orthographe, la mise en forme du texte et tous les aspects de la présentation visuelle (p. 12).
2 Ce paramètre n'existe pas en situation d ' autorévision , mai s l'étape de la définition de la tâche dans le modèle de Hayes et ses collaborateurs s'y apparente (voir ]a figure A.S à l'annexe A).
Chapitre 1 : La révision professionnelle 13
Dans la pratique, toutefois, les réviseurs s'entendent pour dire que certaines tâches peuvent
se confondre ou intégrer des éléments d'une autre tâche: « les chevauchements sont
inévitables» (ACR, 2006 : 5). Par exemple, lors d ' une révision de forme, la vérification de
l'exactitude du contenu peut s'iInposer (Cloutier, 1999: 144). La révision de fonne peut
aussi inclure la correction des erreurs de typographie et celles contenues dans la
présentation visuelle. On pourrait également parler de la réécriture qui peut s'intégrer dans
la révision de fond lorsqu'il s'agit de rédiger à nouveau certaines parties d 'un manuscrit.
Lachance (2006 : 28) souligne que, dans son cas, la distinction entre révision de fond et
révision de forme « ne s'applique pas vraiment ». Les deux se fondent en un seul type de
révision, la révision linguistique. Elle affirme que les « donneurs d'ouvrage eux-mêmes
connaissent peu ou pas les limites du travail» et qu'ils veulent seulement que les textes
« atteignent la plus grande qualité possible» (Lachance, 2006 : 28).
1.1.1.2 Les sous-buts de la révision Le type de révision demandé pennet au réviseur de connaître, d'une part, les aspects du
texte sur lesquels il devra porter son attention et, d'autre part, le ou les sous-buts de la
révision , par exemple rendre le texte plus clair, améliorer le style ou corriger les fautes. Ces
sous-buts concourent à 1; atteinte du but principal qui est d'améliorer la qualité linguistique
du texte et l'efficacité de la communication écrite (voir § 3.3.1 et 3.3.2).
1.1.1.3 Les caractéristiques du texte Pour améliorer un texte, le réviseur doit en connaître les principales caractéristiques, soit le
sujet, le but (informer, divertir, conseiller, etc.), le genre (rappol1 de recherche, article,
manuel d'entretien, etc.), les destinataires (enfants, universitaires, grand public,
fonctionnaires, etc.), le type de publication (revue scientifique, magazine pour hOlnmes ou
pour femmes , livre, site Web, etc.) et la longueur.3. En situation d ' autorévision, l'auteur est
déjà au courant de ces éléments, puisqu'il a lui-même rédigé le texte qu 'il révise~ le
réviseur professionnel, lui, ne sait pas d'avance quelles sont les attributs du texte qu'on lui
delnande de revoir. Il peut en dégager certains en cours de révision, mais il est préférable
qu'il les ait à l'esprit avant d'entreprendre son travail. Le réviseur est ainsi mieux préparé
3 Ces caractéristiques reprennent certains des éléments pertinents à l'analyse du mandat en rédaction de texte (voir Clerc, 2000 : 29).
Chapitre 1 : La révision professionnelle 14
pour évaluer le texte et l'adapter à la situation de éommunication qui convient. Pour lui
.comme pour son client, le mandat constitue l'endroit tout indiqué pour préciser ces
renseignements. Si ce n ' est pas fait , le réviseur devrait alors poser des questions au client
pour s' assurer que le travail qu ' il effectuera corresponde bien aux besoins de ce dernier et
qu ' il en sera sati sfait. Évidemment, lorsqu 'un révi seur travaille régulièrelnent pour un
même client, un mandat précis' revêt moins d ' importance pui sque le professionnel connaît
déjà globalement les attentes de son client.
1.1.1.4 Le support de révision De nombreuses recherches en rédaction et en autorévision ont fait état des différences
observées selon qu'une personne révise son texte à l' écran ou sur papier (notamment
Daiute, 1986~ Lutz, 1987~ Hass, 1989~ Pi.olat, 1991 a et b~ Piolat et Blaye, 1991 ~ Ran sdell et
Levy, 1994; Bisaillon, 1997 et 1999; Piolat, Roussey et Thunin, 1997). La situation n ' est
pas différente en révision professionnelle: il semble que certains problèlnes soient plus
facilement détectables sur papier qu'à l'écran (voir Piolat, 2007) et chaque réviseur adopte
le support qui lui convient le lnieux. Le client, toutefois, peut désirer obtenir le résultat de
l'activité révisionnelle sur un support plutôt qu'un autre et il devrait alors le spécifier dans
le mandat. Cependant, même s'il demande d'effectuer les changements sur la version
électronique du texte en utilisant l ' outil de révision (suivi des modifications), rien
n'empêche le réviseur de réviser d ' abord sur papier puis de reporter ses modifications à
l'écran. Le support de révision a donc une importance et une influence sur la démarche
du réviseur.
1.1.1.5 L'échéance Combien de telnps le client accorde-t-il pour effectuer la révision d 'un texte? Trois jours?
Une semaine? Un Inois? Quand les six réviseurs ayant participé à la recherche sur le
processus de révision ont été questionnés à ce sujet, certains ont dit que le temps dont ils
disposaient était un facteur pouvant influencer leur travail ou leur démarche de révision. Par
exemple, pour l'un d'eux, cela aura une répercussion directe sur le nOlnbre d'interventions
et de modifications qu'il fera dans le texte. Un autre insérera plus de commentaires et
demandera au client d ' effectuer certaines vérifications parce qu'il n'aura pas eu le temps de
Chapitre 1 : La révision professionnelle 15
les faire alors qu'un autre encore ne fera peut-être pas une lecture complète pour valider ses
changements dans le texte après l'avoir révisé.
1.1.1.6 La rémunération La rémunération du réviseur professionnel est un autre facteur qui devrait être inclus dans
le mandat et pour lequel le client a le plus souvent le contrôle. Même si les réviseurs
interrogés ont dit que leur cachet n ' avait pas d ' incidence sur leur travail , ce n 'est peut-être
pas le cas pour tous les réviseurs professionnels. Comme les chercheurs n' ont pas insisté
sur cet aspect lors des entrevues complétant les expérimentations, il faudrait recueillir plus
de données auprès des réviseurs à ce propos afin de mieux décrire la situation en milieu
professionnel.
1.1.2 Le texte à réviser Le texte est la raison d'être de la révision parce que sans lui le réviseur n ' a pas de tâche à
accomplir. Puisqu'il influence le travail du réviseur de façon primordiale, il est envisagé
comme un paramètre à part entière plutôt que comme un élément de l ' environnement de la
tâche, tel que le conçoivent Butterfield, Hacker et Albertson (1996) dans leur modèle de
révision, ainsi que Hayes (1996) dans son nouveau modèle de rédaction (voir les
figures A.3 et A.5 à l'annexe A).
Bien que les principaux éléments caractéristiques du texte soient présentés dans le mandat
(c ' est -à-dire le sujet, le but, le genre, les destinataires, le type de publication et la longueur),
chaque mot, chaque phrase, chaque paragraphe qui COlTIpOsent le texte peut amener le
réviseur à faire une modification pour une raison ou une autre. Les qualités linguistiques et
communicationnel1es du document de départ déterminent à ce moment -là en grande partie
l'ampleur du travail de révision. Un texte rédigé en «bon » français, comportant un
minimum d'erreurs langagières, atteignant son but et adapté aux destinataires présente
moins d ' exigences pour le réviseur qu'un texte dont la langue et les formulations sont
parfois boiteuses et ne conviennent pas aux destinataires. Ainsi, le réviseur apporte
normalement peu de ITIodifications à un texte dont la qualité linguistique répond déjà aux
exigences de la langue et dont la qualité communicationnelle rejoint les principes de
lisibilité et d'intelligibilité. Au contraire, on s'attend à ce qu'il fasse plus de modifications
Chapitre 1 : La révision professionnelle 16
pour améliorer un texte qUI ne répond pas' aux critères de qualités lingui tique et
communicationnelle espérés.
1.1.3 L'environnement Qu'il travaille au gouvernement, dans une maIson d'édition, un organislne ou une
compagnie privée, ou qu'il soit pigiste et ait son bureau chez lui , tout réviseur œuvre dans
un certain environnement, comme n ' importe quel travailleur d'ailleurs. Cet environnement
se compose d ' individus avec lesquels le réviseur est susceptible d ' interagir ainsi que de
divers éléments matériels. Dans les modèles de rédaction et de révision que je présente à
l'annexe A, le paramètre environnement est soit absent, soit présent, mai défini
différemment. TI n'apparaît pas dans le modèle de révision de Hayes et ses collaborateurs
(1987 [figure A.2]) ni dans le nouveau modèle de révision de Hayes (1996 [figure A.4]) ,
mais il figure dans le modèle de révision de Butterfield et ses collaborateurs (1996 [figure
A.3]). Selon ces derniers, l'environnement comprend la tâche (problème rhétorique) et le
texte à réviser. Dans le modèle de rédaction de Hayes et Flower (1980 [figure A.1]) ,
l'environnement représente encore une fois la tâche et le tex te, mais il s'agit cette fois du
texte déjà écrit. Le modèle de rédaction de Hayes (1996 [figure A.5]) est celui dont je me
suis in spirée pour la _ composante «environnement », puisque celle-ci comprend
l'environnement physique et l'environnement social.
1.1.3.1 l'environnement social L'environnement social peut se composer des personnes suivantes: l'auteur du texte qu'il
doit réviser, d'autres collègues réviseurs, un éditeur ou un chargé de projet, un rédacteur en
chef, un infographiste ou typographe et un supérieur hiérarchique. Leur influence sur la
tâche révisionnelle est variée. Certains réviseurs consultent des collègues afin d'avoir leur
avis sur des problèmes particuliers dans un texte et sur la façon de les régler. D'autres
posent des questions à l'auteur, directement ou par écrit dans le texte, afin de clarifier
certains propos ou certaines idées énoncées; d ' autres encore font quelques fois des
modifications pour faciliter le travail de 1 'infographiste par la suite.
L'éditeur, le chargé de projet, le rédacteur en chef, l'auteur et le supérieur hiérarchique
peuvent être les mandants. Mais, clients ou non , ces personnes viennent parfois en aide au
réviseur pour l'aiguiller sur le choix d'une solution, par exemple lorsqu'il hésite entre deux
Chapitre 1 : La révision professionnelle 17
moyens pour régler un problème récurrent dans un texte. Le réviseur pouiTait aussi
s'adresser à eux (excepté à l'auteur) pour leur signaler un problème majeur qu 'i l a détecté
dans une des étapes finales d'un projet d' édi tion où la décision à prendre sur la façon de
remédier à la situation n'est pas du ressort du réviseur.
En contrepartie, le réviseur n ' a généralement pas de contacts avec les destinataires du texte
qu'il révise, contrairement à l'auteur qui peut en avoir, par exemple dans le cas d ' un
professeur qui rédigerait un manuel scolaire pour des étudiants. Le réviseur doit savoir qui
sont les destinataires pour adapter le tex te en conséquence, mais , à moins d 'exception, il
n'a pas à interagir avec eux. Pour cette raison , les destinataires n ' ont pas été intégrés dans
l'environnement social.
1.1.3.2 L'environnement physique L'environnement physique du réviseur professionnel correspond au milieu de travail de
celui-ci (Bisaillon, 2007b). Ainsi, le milieu est généralement composé d'un bureau à la
maison ou un bureau (à cloisons ou non) dans une entreprise quelconque, ou les deux . Ce
bureau est aménagé d'une certaine façon selon sa forme et sa dimension: il contient une
table et une chaise, une ou des étagères, peut-être un téléphone, un télécopieur, une
photocopieuse à proximité; il peut cOlnporter une fenêtre et avoir un éclairage naturel ou
artificiel. Les supports de révision (papiers et crayons, ordinateur) constituent aussi des
éléments de l'environnement physique du réviseur. Il en est de même des ouvrages de
référence et d'autres outils d'aide. Ces ressources matérielles sont d'un précieux secours
pour le réviseur quand ses connaissances lui font défaut.
1.1.4 Le réviseur J'ai considéré le réviseur comme un paramètre de la révision professionnelle puisqu'il est
essentiel au travail de révision, tout autant que le texte. Si je parlais des éléments
caractéristiques du texte, je parlerai donc des éléments caractéristiques du réviseur.
Hayes (1996) a démontré, dans le cas de la rédaction, que certaines caractéristiques de
l'auteur influencent sa tâche d'écriture. La moti vation et l'affect, par exemple, jouent un
rôle central dans les processus rédactionnels, que ce soit par les buts que le rédacteur se
donne, les prédispositions et attitudes qu'il présente à l'égard de son travail, ou par
Chapitre 1 : La révision professionnelle 18
l ' estimation qu ' il fait des coûts-bénéfices liés à une action plutôt qu ' à une autre. Le même
constat peut être formulé dans le cas de la révision professionnelle: certaines
caractéristiques des réviseurs influencent leur démarche de révision. Dans la pratique, bien
des gens peuvent d ' ailleurs en témoigner: deux révi seurs ayant exactement le même
mandat et travaillant dans le même environnement ne soumettront pas un produit final
identique. Si la démarche générale est semblable d ' un réviseur à l'autre (lecture, détection ,
résolution, voir § 1.2), les elTeurs détectées autant que les stratégies et les moyens utilisés
pour les résoudre, eux , varient.
Les principales caractéristiques du révi seur qui exercent une influence sur son travail se
rapportent à sa profession et à sa personnalité. Pour l ' instant, quatre caractéristiques propres
au réviseur concernant sa vie professionnelle ont pu être dégagées. Pour ce qui est des
caractéristiques personnelles , même si cet aspect n ' a pas été pris en considération lors de la
recherche sur le processus de révision, j ' en ai remarqué trois qui sont susceptibles
d'influencer un aspect particulier de la démarche. À celles-ci s ' ajoutent quelques qualités et
aptitudes du réviseur qui semblent pertinentes panni celles qu ' énumèrent Horguelin et
Brunette (1998 : 80-83).
1.1.4.1 Les caractéristiques professionnelles
1) La formation
La formation des réviseurs professionnels est diverse, mais, souvent, ceux-ci ont fait des
études en lettres (rédaction professionnelle, linguistique, littérature ou traduction) ou en
communication. La spécificité de leur champ d' études a un impact sur leur façon de
réviser: elle peut les amener, malgré eux, à mettre l'accent sur certains aspects de la langue
ou sur le style.
II) L'expérience
L ' expérience constitue un facteur important. Elle permet aux réviseurs de développer des
automatismes et ainsi d'être plus rapides et plus efficaces. Elle façonne également ce que
l'on appelle une habileté révisionnelle. En effet, Bisaillon (2007b : 84) a noté que pour un
même temps donné, les réviseurs plus expérimentés (plus de douze ans de pratique) avaient
-- ---- --------- -------------- ---------,
Chapitre 1 : La révision profess ionnelle 19
fait près de trois fois plus de modifications que les réviseurs moins expérimentés (moins de
quatre ans de pratique). Par ailleurs, en autorévision, comme l'ont montré Haye et es
collaborateurs (1987), les novices et les experts révi sent différemment, les premiers
accordant plus d ' importance aux changements de surface que les seconds.
III) La conception de la révision
La conception ou la représentation que se fait le réviseur professionnel de la révision
s'apparente aux buts que se donne l'auteur lor qu ' il révise son texte (Hayes et autres,
1987 : 186, 192). Si son point de vue est plus normatif, le révi seur se concentrera presque
uniquement sur la forme du texte ; s'i l a plutôt une vision communicationnelle, il se
préoccupera, en plus de la forme, du destinataire, de la structure du texte et de la clarté du
contenu.
Quelle qu ' elle soit, la conception de la révision joue un rôle dans la façon dont le réviseur
aborde son travail (Bisaillon, 2007b: 77-78). En effet, même si les mandats convenus
indiquent le type de révision à effectuer et représentent le point de départ de la tâche des
révi seurs, leur conception de la révision les aInène parfois à en faire plus: dans la recherche
sur le processus de révision, quatre réviseurs à qui leur client avait demandé seulement une
révision linguistique ne se sont pas limités à ce type de travail. Ainsi, on peut dire que
l'activité des réviseurs reflète aussi, dans une certaine Inesure, leur vision de la révision
~Bisaillon, 2007b), c;onstat que Hayes et ses collaborateurs (1987 : 190) avaient d 'ailleurs
établi pour l' autorévision.
IV) Les connaissances
L'état des connaissances du réviseur peut influencer sa démarche. En effet, c'est ce qu ' il
sait et ce qu'il ne sait pas (voir § 1.2.2) qui lui donne plus ou moins de difficulté à
comprendre un texte et qui l'amène aussi à détecter des problèmes qu'un autre réviseur ne
relèverait pas. Un réviseur compétent doit nécessairement « connaître le code de la langue »
(Horguelin et Brunette, 1998: 79), mais aussi les « règles de ponctuation subtiles, [les]
abréviations, [1 ']usage des majuscules, [la] notation des nombres, [la] coupure des mots,
[ ... ], etc. ». À cela se greffent des connaissances sur l'organisation et l'exécution du travail
de révision, le contenu d ' une publication et sa mise en pages (AeR, 2006), sur les genres
Chapitre 1 : La révision professionnelle 20
de textes (rapport, lettre, texte de magazine, dépliant, discours , roman) et le profil des
destinataires cibles.
Outre son bagage linguistique et éditorial, le réviseur doit posséder une excellente culture
générale. Comme le mentionnent Horguelin et Brunette (1998: 79), « en raison de la
diversité des domaines couverts par le travail de révision, on attend presque du réviseur
qu ' il soit une banque de documentation universelle .. . ». Les connais.sances générales sur le
monde et les choses varient souvent selon les champs d'intérêt du réviseur (connaissances
en géographie, en aviation, en art, en chimie, en biologie, en zoologie, etc .). Dans le cas des
réviseurs de la recherche, Bisaillon et ses collaboratrices ont observé que lorsque le sujet du
texte lui est familier, le réviseur est plus enclin à suggérer ou à ajouter de l'information et
des précisions. Au contraire, quand il ne maîtrise pas le sujet du tex te, il peut lai sser passer
quelques petites erreurs4 ou adresser un commentaire à l'auteur s'il n ' est pas certain qu ' il y
a erreur.
1.1.4.2 Les caractéristiques personnelles
1) La motivation
La motivation peut influencer la démarche de révision. Selon les observations faites , cette
motivation est surtout liée au sujet du texte. Elle est de surcroît personnelle: un des
réviseurs moins expérimentés a affirmé que la révision pouvait lui prendre plus de temps si
le sujet ne l'intéressait pas. Un autre, également peu expériInenté, a dit le contraire - il ira
un peu plus vite et fera peut -être un peu moins de réécriture.
Du reste, comIne tout le monde, les réviseurs connaissent de bonnes et de moins bonnes
journées, et leur degré de motivation varie selon leur humeur. Un jour où il est moins
motivé à accomplir son travail , un réviseur pe~t ne pas détecter des problèmes qu ' il relève
normalement ou encore chercher plus 10ngteInps une façon de résoudre un problème.
II) Le sentiment de la langue
Le sentiment de la langue consiste en un jugement, une opinion fondée sur une appréciation
subjective de la langue. Il entre en jeu lorsqu'un réviseur apporte de bonnes modifications
au texte sans toutefois pouvoir justifier ses interventions. Il lui semble, par exemple, que ce
4 D'après les commentaires recueilli s lors des entrevues.
Chapitre 1 : La révision professionnelle 21
n'est pas la bonne façon de formuler une expreSSIon ou qu ' il exi ste une formule plus
courante pour exprimer une idée précise.
III) Le goût personnel
Même si en théorie le réviseur « doit pouvoir justifier toutes ses corrections, notamment en
s'appuyant sur des dictionnaires , grammaires ou ouvrages de référence, et ne [doit] pas
apporter de changements motivés uniquement par des préférences personnelles »
(Horguelin et Brunette, 1998 : 40-41), il semble que ce n'est pas toujours le cas en pratique.
En effet, si les réviseurs peuvent réellelnent justifier la très grande majorité des
modifications qu ' il s effectuent, à l ' occasion , certains di sent préférer leurs propositions
même si les structures modifiées n'étaient pas fautives; d ' autres remplacent un mot par un
autre par simple préférence. Ces modifications - ou suggestions - touchent
particulièrement le style, c'est-à-dire la façon dont s' exprime personnellelnent l'auteur.
Même si le réviseur s ' applique à ne pas imposer ses préférences, il peut aussi parfois faire
des modifications ou des suggestions qui, selon lui, améliorent la phraséologie ou rendent
le texte plus «coulant », par exemple. L'auteur demeure libre d'accepter ou non ce genre
de changements.
IV) Quelques qualités et aptitudes du réviseur
À ces caractéristiques personnelles peut s'ajouter l'ouverture d'esprit quant aux
changements technologiques et linguistiques (par exemple, la nouvelle orthographe et
l'acceptation de certains mots autrefois critiqués). Cette adaptabilité du réviseur a une
incidence sur la façon dont il s'y prend pour réviser (support papier ou électronique), sur
les problèmes qu'il détecte et sur les solutions qu'il applique.
En outre, la mémoire des détails est une aptitude que le réviseur devrait posséder,
puisqu'elle facilite la détection de «petites » erreurs, notamment celles liées à la
typographie et au manque d'uniformité dans un document. Elle réduit également le temps
de révision, car elle favorise le développement d'automatismes, et elle limite parfois aussi
les recherches, le réviseur sachant exactement à quelle source se référer selon les éléments
problématiques décelés.
Chapitre 1 : La révision professionnene 22
Lorsque le texte à réviser est particulièrement long ou qu'il comporte de nombreuses
erreurs récurrentes - parce 'que l'auteur maîtrise mal ' un aspect de la langue ou de la
comlTIunication, ou qu'il n'a pas pris la peine de consulter des dictionnaires et d 'autres
références -, la patience s'avère un bon atout. Le réviseur doit se rappeler que
« l'amélioration des textes fait partie [de son] travail et justifie sa présence; il n'a donc pas
à piquer une colère devant chaque maladresse ou chaque gaucherie» (Horguelin et
Brunette, 1998 : 82).
Enfin , le sens de l'organisation assure au révi seur de trouver une démarche de révision
efficace qu'il répétera ou non selon les mandats qu ' il reçoit, le type de texte qu 'on lui
confie et le temps qu'on lui accorde pour le travail.
1.2 La démarche en révision professionnelles La démarche de révision correspond à ]a façon dont les réviseurs s'y prennent pour
modifier un texte et elle est semblable d'un professionnel à l'autre. En effet, elle peut être
envisagée COlTIme une itération de cycles de modifications comportant les trois mêmes
étapes: lecture, détection de problèmes et résolution de problèmes. Chacune des phases se
réalise par contre de diverses manières selon les erreurs détectées et les moyens utilisés
pour les résoudre. À ces étapes, après la résolution de problèmes, peut s'ajouter une lecture
pour valider les changements faits.
1.2.1 La lectu re Les réviseurs professionnels peuvent avoir deux modes de lecture, soit la lecture pour
comprendre et la lecture pour évaluer le texte, mais certains n'ont recours qu'à la deuxième.
Ces modes figurent déjà dans le modèle de révision de Hayes et ses collaborateurs (1987 :
202-206 [figure A.2]). Lors de la lecture pour comprendre, le réviseur vise simplement à se
construire une représentation interne du sens du texte en ayant recours à divers moyens,
dont le décodage des mots, la reconnaissance des structures grammaticales des phrases et
l'établissement d'inférences factuelles. Dans ce cas, les réviseurs lisent plus souvent un
paragraphe à la fois pour mieux en saisir le sens. Notons cependant que parfois la simple
5 La démarche des réviseurs professionnels a été décrite par Bisaillon et est présentée en détail dans un article récent (Bisaillon , 2007 a; voir auss i Bisaillon , 2007b). Je reprends ici les pri ncipaux éléments de la démarche
que sa recherche sur le processus de révi sion lui a permis de mettre en lumière.
Chapitre 1 : La révision professionnelle 23
lecture pour comprendre mène à la détection de problèmes, notamment des erreurs de
frappe, d'orthographe et de grammaire.
Lorsque la lecture pour comprendre est terminée, une autre lecture, pour évaluer le texte,
cette fois-ci, s'ensuit. Le réviseur lit encore pour comprendre, mais surtout pour détecter et
diagnostiquer des problèmes. En outre, comme elle comporte une part de compréhension ,
certains réviseurs ne procèdent qu ' à la lecture évaluative, souvent par manque de temps.
C'est cette lecture qui pennet au réviseur de repérer les problèmes et les faiblesses du texte.
Elle est momentanément arrêtée lorsque le réviseur résout un problèlne et lit pour valider sa
modification, mai elle reprend aussitôt après , sauf si le réviseur passe à la lecture pour
comprendre d'un nouveau paragraphe.
Quels sont les problèmes que les réviseurs devraient détecter au cours de cette lecture? La
réponse dépend en grande partie du type de révision delnandé (voir § 1.1.1). Horguelin et
Brunette (1998: 36-37) proposent pour leur part cinq paramètres de la révision
professionnelle qui «permettent de vérifier que le contenu du message est transmis au
moyen d'un code intelligible et sous une forme assurant l'efficacité de la communication »
(Horguelin et Brunette, 1998 : 36). Ces critères garantissant la qualité des textes utilitaires6
sont l'exactitude, la correction, la lisibilité, l'adaptation fonctionnelle et la rentabilité.
Même s'ils ont d'abord été établis pour la révision bilingue, les auteurs affirment qu'ils
s'appliquent également à la révision unilingue moyennant quelques adaptations.
L'exactitude est le seul critère qui se rapporte au contenu et c'est sans doute le plus
difficile à vérifier~ i'l permet de s'assurer que l'auteur a dit ce qu'il voulait dire, que ses
propos traduisent bien sa pensée ou celle de son eJnployeur, le cas échéant. Le sujet et le
but du texte peuvent alors aider le réviseur à vérifier l'exactitude du contenu 7. La
correction a trait à tout ce qui concerne le respect du code linguistique, notamment
6 On oppose généralement les textes utilitaires, qui forment d'ailleurs la majorité des écrits , aux textes littéraires. Les premiers (manuel didactique, rapport de compagnie, lettre d'un ministère aux citoyens, article journalistique, etc.) ont des fonctions communicative et éducative et une visée pragmatique. Les seconds (poème, roman, essai, par exemple) ont davantage des fonctions expressive et poétique et une visée esthétique. 7 Ce paramètre s'explique mieux pour la révision bilingue où il s'agit en fait de s'assurer que le texte traduit transmette exactement le message du texte de départ. Pour la révision unilingue, l'exactitude pourrait sans doute également rendre compte de l'exactitude des faits décrits et des dates, de la concordance des pages dans la table des matières et de J'absence de contradictions.
Chapitre 1 : La révision profess ionnelle 24
l ' orthographe d 'usage et d ' accord , les barbarismes et les solécismes . La lisibilité « vise à
assurer la facilité de compréhension d 'un énoncé » (p. 37); elle est évaluée à · partir des
principes de logique, de clarté et de conci sion et appliquée notamment par rapport au choix
des mots, aux cooccurrences, à la redondance ainsi qu ' à la structure, à la longueur et à
l'articulation des phrases. L'adaptation fonctionnelle est un critère qui permet de vérifier
que le bon regi stre de langue est utili sé en fonction des destinataires et que le me age leur
est adapté. Enfin , la rentabilité consiste en l ' évaluation du texte pour s ' assurer qu ' il ne va
pas demander plus de temps et d ' efforts à réviser qu ' à réécrire.
Bisaillon (2003) est également d ' avis que le révi seur doit être à la recherche d 'éléments qui
sont améliorables parce qu'ils ne correspondent pas aux conventions de la langue ou du
texte, ou parce que, s'ils y con-espondent, ils n ' atteignent pas l'efficacité
communicationnelle maximale.
1.2.2 La détection des problèmes Maintenant, comment, en lisant, le réviseur réussit-il à détecter les problèlnes présents dans
les textes? Si en situation d'autorévision la volonté de corriger un problème ainsi que la
découverte d'une idée sont les déclencheurs de la révision (Hayes et autres, 1987), il en va
autrement pour la révision professionnelle. En effet, Bisaillon (2007 a) a plutôt remarqué
que les réviseurs utilisent ce qu'elle appelle des stratégies de détection. Une stratégie de
détection est une opération Inentale combinée à des ressources Inatériel~es qui favorise au
mieux le repérage des éléments du texte améliorables. Deux stratégies ont été mises au jour
pour l'instant: l'anticipation et la comparaison.
La stratégie d'anticipation est mise en œuvre lorsque le réviseur prévoit un problème
possible avec une unité du texte. L'expérience accumulée, la connaissance de l ' auteur et de
son style, la répétition des mêmes en-eurs dans un texte ou même des connaissances
particulières sur un sujet amènent le réviseur à apporter une attention spéciale à un passage.
Cette stratégie conduit à la détection de problèmes potentiels.
La comparaison, elle, prend appui en mémoire sur divers états de la connaI ssance des
réviseurs: la certitude, l ' incertitude et la méconnaissance (Bisaillon, 2007a). Cette stratégie
est employée pour détecter un problème chaque fois qu'un réviseur s'arrête sur une unité du
Chapitre 1 : La révision professionnelle 25
texte et la co.mpare avec un élément tiré de sa banque de co.nnaissances. Selon l'état des
co.nnaissances du réviseur, les pro.blèmes détectés so.nt réels (certitude) o.U po.tentiels
(incertitude et méco.nnaissance).
1.2.3 La résolution de problèmes Les pro.blèmes réels et po.tentiels relevés par le réviseur do.ivent ensuite être réso.lu . Celui
ci co.rrige de faço.n auto.matique de no.mbreux pro.blèmes réels , c ' est-à-dire qu 'au itôt qu ' il
les diagno.stique il mo.difie quasi simultanément le passage po.ur y remédier. Le réviseur
utilise alo.rs so.n savo.ir co.nditio.n/actio.n8, pour utiliser la termino.lo.gie de Hayes et ses
collaborateurs (1987), pour régler ces problèmes, généralement des problèmes
d'o.rthographe, de grammaire et de po.nctuatio.n.
1.2.3.1 Les stratégies de résolution Autrement, po.ur supprimer les pro.blèmes d 'un texte, le réviseur a reco.urs à d 'autres types
de stratégies, so.it des stratégies de résolutio.n, qu'il peut décider d '·appliquer
immédiatement o.U de reporter à plus tard. Une stratégie de résolutio.n co.nsiste en une
o.pératio.n, o.U un ensemble d' o.pératio.ns, pouvant être co.mbinée à l'utilisatio.n de resso.urces
matérielles et dont l' exécutio.n vise à préciser o.U à résoudre un pro.blème réel ou po.tentiel
détecté (Bisaillon, 2007 a : 307). La stratégie est dite simple lo.rsque le réviseur n ' a reco.urs
qu'à une seule o.pératio.n tandis qu'elle est dite multiple lo.rsqu'il co.mbine successivement
plus d'une o.pération. Bisaillo.n a en effet remarqué que dans certains cas l'utilisatio.n d'une
seule stratégie (ou o.pératio.n) n'est pas suffisante po.ur préciser et résoudre un pro.blème.
Les stratégies po.ssibles sont la relecture, la réflexio.n et la recherche.
La relecture a lieu lo.rsqu'un pro.blème est détecté, mais qu'il do.it être précisé. Bien
so.uvent, cette stratégie s'accompagne de la réflexion. Celle-ci est utilisée lo.rsque le
réviseur pense à une faço.n de régler un pro.blème réel et, s'il lui arrive d'en tro.uver plus
. d'une, il se demande laquelle sera meilleure o.U plus efficace. Parfo.is, la réflexion aide aussi
le réviseur à préciser un pro.blème. Elle équivaut dans ce cas à ce que Hayes et ses
co.llaborateurs (1987 : 226) appellent une recherche mémo.rielle; le réviseur cherche dans sa
~ Le réviseur aurait en mémoire une liste de conditions associées à une li ste d'actions à poser. Ainsi , lors de la lecture évaluative, il utiliserait le mécanisme condition/action: lorsqu ' une condition de cette li ste se présente dans un texte, un mécanisme automatique se mettrait en marche.
Chapitre 1 : La révision professionnelle 26
mémoire à long terme les connaIssances pertinentes au diagnostic d ' un problème
pru1iculier.
Pour diagnostiquer un problème et le résoudre, le révi seur peut faire une recherche dans un
ouvrage de référence, un dictionnaire, une grammaire ou Internet par exemple, mai il peut
aussi se référer au texte lui-même pour trouver une réponse, questionner l'auteur ou toute
autre personne. La stratégie de recherche a généralement lieu aussitôt le problème détecté,
mais elle est parfois reportée, surtout quand le réviseur croit qu ' il manque des précisions
dans le texte, qu ' il ne comprend pas ce que l'auteur veut dire ou qu ' il ne di spose pa de la
source d ' information. Il prend alors souvent des notes ou adresse des questions à l'auteur
. qu ' il lui remettra ou lui posera ultérieurement.
1.2.3.2 Les résultats Les différentes stratégies utilisées par les réviseurs , de même que l ' absence de stratégie,
conduisent à six différents résultats selon les types de problèmes décelés ei diagnostiqués et
selon que la résolution est appliquée immédiatement ou reportée.
Quand la résolution est reportée, le réviseur ne fait rien dans le texte (aucune résolution),
sinon une marque pour repérer plus facilement le problème sur lequel il doit revenir plus
tard, ou il intervient en faisant une tentative de solution ou une suggestion à l'auteur. Dans
le cas de la tentative, le révi seur a en tête une façon de modifier le texte, mais elle ne le
satisfait pas et rien d'autre ne lui vient à l'esprit pour l'instant. Il apporte néanmoins une
modification qui luJ donne l ' occasion de poser ses idées, même s'il sait qu'elle n ' est pas
définitive. Si le réviseur marque une suggestion à l'auteur, c'est qu'il est incapable de
régler le problème seul; il n ' est pas sûr de comprendre le problème ou d ' avoir trouvé une
solution adéquate.
Trois types de résolution sont aussi possibles quand la résolution est immédiate: aucune
modification au texte (fausse alerte) , révision et réécriture. Le réviseur n'apporte aucune
modification au texte lorsque le p·roblème détecté ne se concrétise pas en problème réel
(fausse alerte). L'anticipation, la méconnaissance ou une connaissance incertaine entraîne
le réviseur à faire usage d'une stratégie de résolution afin de déterminer si le problème qu'il
croit avoir détecté en est réellelnent un. Quand ce n'est pas le cas, il s'agit d'une fausse
Chapitre 1 : La révision professionnelle 27
alerte. C'est ce qui se passe par exemple lorsqu'il s'alTête sur le Inot hormis, car il doute
qu ' il s'écrive avec un h; il cherche le mot dans le dictionnaire et trouve l'entrée honnis. Le
réviseur est maintenant certain qu ' il n' y a pas d ' en-eur, le mot est bien orthographié dans le
texte. C'est une fausse alerte .
La révision , prise dans un sens restreint, est le résultat d ' une modification qui conserve
intacts le plus de mots possible du texte original (Bisaillon, 2007a : 308 ; Hayes et autres,
1987). li s'agit d ' une correction minimale très souvent apportée sans avoir eu recours à ·une
stratégie (détection-correction automatique) ou faite à la suite de l ' utilisation d ' une
stratégie immédiate.
La réécriture est le résultat d'une modification substantielle qui change la forme du texte de
départ, mais qui en préserve généralement le sens (Bisaillon, 2007a : 308; Hayes et autres,
1987). Elle suit le plus souvent l'utilisation d'une stratégie immédiate. Le réviseur exprime
ainsi l ' idée de l'auteur, mais de façon différente. La réécriture peut dans quelques cas être
la sol ution à la détection de plusieurs problèmes dans un même segment de texte et la limite
n'est alors pas toujours claire avec la révision. Comme l'a souligné Bisaillon (2007e), « il y
a encore de la recherche à faire sur la distinction entre révision et réécriture comme solution
à des erreurs ou des faiblesses détectées ».
Par ailleurs, une autre sorte de suggestion - différente de celle émise lors d'une résolution
reportée - a été observée dans le travail des professionnels; il s'agit de celle liée au goût
personnel du réviseur (voir § 1.1.4.2). Celui-ci ne détecte pas de réel problème, mais il
estime que le texte pourrait bénéficier du changement qu'il propose. Le réviseur suggère
alors une modification - une révision ou une réécriture - pour varier le style ou rendre le
. texte plus « coulant» par exemple, mais l'auteur peut la refuser.
1.2.4 La lecture pour valider les modifications La lecture pour valider les changements faits au texte constitue une étape facultative à la fin
d'un cycle de modifications, mais elle est toujours présente à un moment ou l'autre de la
démarche. Selon la nature de la modification ou des modifications, le réviseur évalue si
cette lecture est nécessaire ou pas. À la fin d'un cycle de modifications, il relit -
habituellement une phrase - afin de valider le ou les changements apportés et de vérifier
Chapitre 1 : La révision professionnelle 28
que ceux -ci n ' ont pas engendré d ' autres problèmes. Il peut aussi attendre la fin de plusieurs
cycles de modifications successifs avant de relire un paragraphe ou une portion du texte
pour s'assurer de la cohérence de l'ensemble des changements qu ' il a effectués . Enfin , il
peut décider d ' attendre à la toute fin de la démarche de révision avant de relire le texte au
complet pour juger de la qualité d 'ensemble de son travail. Cette lecture pour valider ses
modifications peut aussi mener à d ' autres cycles de modifications en cas de détection de
« nouveaux » problèmes généralement mineurs.
Chapitre 2· Le traitement des modifications dans les textes: survol des classifications exista"ntes
Comme on vient de le voir au chapitre précédent, les modifications consistent, dans le
contexte professionnel, en des révisions et des réécritures qui règlent des problèmes
détectés par les réviseurs dans les textes qu'ils révisent. Mais concrètement, à quoi
ressemblent les modifications? De quelle façon les analy e-t-on? Quelle ont leurs
caractéristiques et quels problèmes précis visent-elles à résoudre?
Depuis une trentaine d'années, des chercheurs se sont intéressés à ces questions et ont
étudié les changements apportés dans les textes par des scripteurs novices et expérimentés
ainsi que par des réviseurs. Ils les ont examinés selon différentes approches et les ont
caractérisés en fonction de critères variés. Le présent chapitre est consacré à la description
des principales classifications conçues par les chercheurs en vue de répondre aux questions
posées ci-dessus et de fournir du même coup des données intéressantes sur des façons
d'intervenir dans un texte pour le corriger et l'améliorer. Toutefois, ces classifications
générales ne permettent pas de décrire et d'analyser convenablement les modifications
lexicales apportées à un texte (voir § 2.10). Pour cette raison, j'ai dû élaborer ma propre
classification, ce que j'ai fait en retenant les unités d'analyse et les éléments pertinents des
typologies existantes et en en ajoutant de nouvelles pour répondre à mes critères d'analyse
(voir § 4.2.3).
Pour l' autorévision, les classifications décrites sont celles de Sommers (1980), de Bridwell
(1980), de Faigley et Witte (1981,1984), de Monahan (1982), de Boiarsky (1984) et de
Bisaillon (1997). La représentation des problèmes et la grille de résolution de problèmes de
Hayes et ses collabor~teurs (1987) présentent aussi des données concernant les
caractéristiques et les raisons d'être des modifications. En ce qui a trait à la révision
professionnelle, les changements apportés par des réviseurs ont récemment été anal ysés "et
catégorisés par BisaiHon et ses collaboratrices (2004-noo publié; voir Bisaillon, 2004 et
2008) et Cloutier (2005).
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 30
2.1 La classification de Sommers (1980) Sommers est l'une des premières à avoir catégorisé les modifications lors d 'une
expérimentation visant à examiner le rôle que joue la révision dans le processus de
rédaction. Ses sujets, vingt scripteurs non expérimentés (étudiants universitaires) et vingt
scripteurs adultes expérimentés (journalistes , éditeurs et professeurs d ' université) devaient
écrire chacun trois essais, un expressif, un explicatif et un persuasif, puis les réécrire deux
fois chacun. Pour étudier les changements apportés aux essais, Sommers a compté et classé
les modifications faites dans les deuxième et troisième versions des textes. Elle a défini
quatre opérations d 'écriture, soit l'addition, la suppression, le remplacement et le
déplacement, et quatre niveaux de changement correspondant aux unités textuelles
modifiées, soit le mot, le syntagme, la phrase et le thème (l'énonciation étendue d 'une
idée 1) (voir le tableau B.2 à l'annexe B).
Pour Sommers, l'addition consiste en l'ajout dans le texte d'un mot, d'un syntaglne, d'une
phrase ou d'un thème là où il n' y avait rien auparavant alors que la suppression est
l'effacement d'une de ces unités qui est dans le texte rédigé. Le relnplacement cOlTespond à
la combinaison successive d'un effacement d'une unité et d'un ajout d'une autre unité ou,
encore, d'un ajout d'une unité et d'un effacement d'une autre unité. Enfin, le déplacement
est l 'effacement d'une unité du texte existant pour aller l'ajouter ailleurs dans le texte.
Après la dernière version de chaque essai, les sujets étaient interviewés. Sommers leur
demandait d'interpréter leurs modifications. À partir des transcriptions des entrevues, elle a
ensuite établi une échelle de préoccupations (scale of concerns) pour chacun des sujets. Les
résultats de sa recherche ont montré que l'intérêt prédominant des scripteurs
inexpérimentés lorsqu'ils révisaient leurs textes était le lexique. Ils voyaient la révision
comme une activité de reformulation des mots et ils utilisaient surtout les opérations de
remplacement et de suppression . La répétition des mots était un des éléments qui les
préoccupait le plus. Sommers a aussi dégagé les principales questions que les étudiants se
posaient et qui justifiaient leurs modifications: Est-ce que je peux trouver un meilleur mot
1 Le thème n'est pas 'de la même nature que les autres unités textuelles. Le mot, le syntagme et la phrase sont des composants syntaxiques alors que le thème réfère à un contenu sémantique, normalement exprimé à l'aide de composants syntaxiques.
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 31
ou syntagme? Est-ce que je répète le même mot ou syntagme trop souvent? Est-ce que je
peux enlever des mots inutiles?
Au contraire des scripteurs étudiants, les scripteurs expérimentés portaient leur attention sur
la fonne de leur argument, soit l'organisation de leur texte. Ils étaient aussi plus sensibilisés
au lecteur. Ils effectuaient des modifications sur toutes les unités du texte, mais ils
changeaient plus souvent des phrases. De plus, ils utilisaient les quatre opérations, mais
principalement les opérations d'addition et de suppression . Pour l'ensemble de
modifications, l'opération de remplacement était tout de lnême la plus fréquente.
2.2 La classification de 8ridwell (1980) Dans une étude exploratoire et descriptive, Bridwell a pour sa part cherché à savoir ce que
des élèves de l2e année faisaient lorsqu'ils révisaient leur texte et s'il y avait des
différences entre la façon de procéder des scripteurs dont les textes étaient bien notés et
ceux dont les textes étaient Inoins bien notés. Ses sujets, 171 élèves de l2e année répartis
dans onze classes d'anglais d'une école secondaire, avaient comme tâche d'écrire un texte
décrivant quelque chose qu'ils connaissaient bien en laissant visibles sur les feuilles tous
les changements faits au cours de l'écriture de la première version, de la lecture de cette
version et de l'écriture de la version définitive. Une centaine d'essais, choisis au hasard, ont
par la suite été retenus pour l'analyse.
Afin d~ décrire les caractéristiques générales des modifications, Bridwell a développé une
classification qu'elle dit exhaustive et dont les classes sont mutuellement exclusives
(p. 200). Elle a déterminé les différentes unités textuelles modifiées (surface, mot,
syntagme, proposition, phrase et phrases multiples) et elle leur a associé des opérations
d'écriture, sauf pour les unités de surface (voir le tableau B.l à l'annexe B). Les quatre
opérations d'écriture de Sommers sont communes à l'ensemble des unités textuelles, mais
Bridwell en a distingué de nouvelles qui ne s'appliquent qu'à certaines unités. Par exemple,
pour le syntagme, la proposition, la phrase et les phrases multiples, on trouve les opérations '
d'expansion et de réduction. Ces opérations sont en fait des remplacements, à la différence
qu'au lieu de remplacer une unité de texte par une autre de même nature, elle est remplacée
par une unité plus petite ou plus grande selon le cas. Pour sa part, l'unité de surface est
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 32
plutôt subdivisée selon les types de problèmes de surface possibles (orthographe,
ponctuation, majuscule, forme du verbe, abréviation vs forme complète, etc.).
Bridwell a également pris en compte l'étape de production du texte au moment de codifier
les modifications (pendant l' éCIiture de la première version, pendant la lecture avant la
deuxième version et pendant l'écriture de la deuxième version) . Cet aspect n 'a cependant
pas été intégré dans la classification. On note par ailleurs qu ' il n'est pas pertinent pour
l'étude des modifications lexicales des réviseurs professionnels , puisque ceux-ci révisent
toujours, ou presque, la dernière version du texte de l'auteur.
Parmi les résultats obtenus par cette chercheuse, on retient que l'unité textuelle la plus
souvent modifiée par les élèves a été le mot (31,24 0/0) tandis que les modifications
touchant la surface, et plus particulièrement l'orthographe et la ponctuation, venaient en
deuxième position (24,83 0/0) . Ces deux types de révisions englobent plus de la moitié de
toutes les modifications apportées par les sujets . Les mots ont été plus souv~nt remplacés
aux étapes d'écriture de la première et de la deuxième version de l'essai. Les élèves
hésitaient entre un mot et un autre similaire, ne sachant pas lequel il valait mieux employer,
semble-t-il. Au contraire, pendant la lecture du texte, entre les deux versions, les quelques
modifications de mots consistaient davantage en des additions, des suppressions et des
remplacements visant à préciser certains éléments de la phrase. Enfin, les résultats
laissaient également suggérer que les changements faits sur le plan lexical amélioraient la
qualité d'ensemble de la deuxième version de l',essai.
2.3' La classification de Fa.igley et Witte (1'981, 1984) Faigley et Witte (1981), dont le but était simplement de proposer un nouvel outil de
recherche pouvant servir à l'étude de la révision, ont développé une classification afin de
rendre compte à la fois des effets des modifications sur le sens du texte et des opérations
d ' écriture utilisées (voir le tableau B.3 à l'annexe B). Pour développer leur classification,
ils se sont inspirés des catégories de Bridwell ainsi que du modèle de compréhension en
lecture de Kintsch et Van Dijk (1978). Ils ont d ' abord distingué les modifications qUI
changent le sens du texte de celles qui ne le changent pas. Les modifications qUI
n'apportent pas de nouvelle information ou qui n'en enlèvent pas sont considérées comme
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 33
des changements de . surface alors que celles qui ajoutent du contenu ou en suppriment sont
considérées comme des changements de sens.
Les changements de surface ont ensuite été subdivisés en deux sous-catégories, les
changements formel s (orthographe, ponctuation , genre, nombre, temps de verbe) et les
autres changements qui conservent le sens du texte. Ceux-ci sont souvent des changements
dans les mots, les syntagmes ou les phrases pour exprimer le même concept (par exemple,
le printelnps, pour la n'lajorité des gens, implique ~ le printen'lps implique, pour la
majorité des gens). Ces modifications s' effectuent en utili sant différentes opérations
d ' écriture: l ' addition , la suppression , le rempiace lnent (substitution), le déplacem e nt
(permutation), la distribution et la consolidation. Le déplacement est défini par Faigley et
Witte comme un réarrangement ou un réarrangement avec substitution tandis que la
di stribution et la consolidation correspondent respectivement à l'expansion et à la réduction
de Bridwell.
En ce qui concerne les modifications qui affectent le sens du texte, les auteurs ont classé
d 'un côté les modifications de sens majeures, ou macrostructurelles, et de l'autre les
modifications de sens mineures, ou microstructurelles. Pour différencier les deux , les
auteurs ont expliqué que les premières altèrent le résumé du texte alors que les secondes 'ne
le changent pas et ont peu de conséquences sur l'ensemble du texte. Un changement
macrostructurel serait par exemple la réécriture d'un paragraphe traitant du déclin des
quartiers dans les grandes villes du Texas pour traiter plutôt du déclin des quartiers dans les
grandes villes des États-Unis. Pour illustrer un changement microstructurel , les auteurs ont
donné l'exemple suivant où l'on a ajouté de l'information (p. 405) :
Phrase originale , Barton Springs does not fit an outsider's image ofTexas.lt is an eighth-mile long unchlorin ated pool in a natural1i mestone creekbed .
Phrase modifiée Barton Springs does not fit an outsider ' s image of Texas. 1t is an eighth-mile long, unchlorinated pool in a natural 1imestone creekbed, fed by 27 million gallons of 68-degree water fronl the Edwards' Acquifer each day.
Les modifications micro et macrostructurelles se réalisent avec les mêmes opérations
d 'écriture que les changements qui préservent le sens du texte.
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 34
La typologie de Faigley et Witte ne tient pas compte des unités textuelles touchées comme
c 'est le cas des classifications de Sommers (1980) et de Bridwell (1980) . Ayant
probablement remarqué que l'absence de cet aspect représentait une faiblesse dans leur
typologie, les auteurs ont décidé, en 1984, d' emprunter à Bridwell une partie de sa
classification pour rendre compte des unités du tex te touchées par les modific~tions2 . Ils
n 'ont pas inclus cet aspect à leur typologie, mais il s l ' ont utilisé comme complément pour
décrire une partie des modifications faites par une scriptrice dans les différentes versions
d 'un texte qu 'elle a rédigé. Les auteurs voulaient ainsi démontrer comment s' applique leur
classification pour analyser des modifications.
La typologie de Faigley et Witte a connu du succès puisque des chercheurs y ont recouru
pour étudier et classer les modifications sur le plan sémantique (Daiute , 1986; Ransdell et
Levy, 1994). Toutefois , d ' autres ont indiqué avoir parfois trouvé très difficile de
différencier les changements macrostructurels des changements microstructurels
(notamment Parks Gaunder, 1987 et Magee, 1995). Faigley et Witte ont reconnu ce
problème et se sont défendus en expliquant que la fiabilité de leur typologie dépend en
partie de la façon dont ceux qui l ' appliquent conçoivent la notion de ce que constitue
l'essentiel d'un texte ainsi que de la difficulté des textes analysés (Faigley et Witte, 1984 : 102).
2.4 La classification de Monahan (1982) À l'intérieur d'une étude de cas sur les stratégies de révision utilisées par huit élèves de
12e année lorsqu'ils écrivaient pour différents destinataires, soit leurs collègues de classe et
leur professeur, Monahan a analysé les modifications faites pendant la rédaction. À partir
des recherches de Sommers et de Bridwell, notamment, le chercheur a établi ses propres
unités d ' analyse. Il voulait décrire l'opération d'écriture (addition , suppression,
réarrangement, substitution et enchâssement3) et l'unité textuelle modifiée (surface, mot,
syntagme, proposition, phrase, paragraphe, discours) , préciser le lieu de la modification
dans l' étape de production du texte (à l'étape de la préécriture, pendant la première version, .
2 Les unités repri ses sont les mots, les syntagmes, les propositions, les phrases et le s groupes de phrases . Faigley et Witte parlent aussi de changements graphiques plutôt que de changements de surface . . 3 L ' opération d ' enchâssement paraît ici inutile, car s' il s' agit de l'insertion d ' une unité de texte à l'intérieur d ' une plus grande ; cette opération pourrait tout aussi bien être vue comme une addition ou même un déplacement.
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 35
entre les versions, pendant la deuxième version et après la deuxième version), et connaître
le but des modifications (voir le tableau B.2 à l'annexe B).
Le dernier élément considéré par Monahan pour décrire les modifications constitue une
nouveauté. En effet, il est le premier à présenter dans sa classification les buts recherchés
par les modifications. Pour obtenir des infonnations, il posait aux élèves des questions du
genre «Pourquoi as-tu fait ce changement?» après chacune des parties de
l'expérimentation. Partant des justifications des élèves, Monahan a déterminé les finalités
des modifications en fonction des divers aspects textuels qui préoccupaient les élèves: la
qualité visuelle de la présentation du texte (coslnetic)4, l'observance des règles d'écriture
(orthographe, accords, temps de verbes, etc.) (n1echanical), la transition d'une phrase à une
autre ou d'un paragraphe à l'autre (transitional), l'infonnation contenue dans les textes
(inforn1ational) et le style (stylistic).
Les huit élèves étaient classés dans deux groupes: quatre étaient des scripteurs peu habiles
et les quatre autres étaient des scripteurs compétents. Les changements de mots et les
modifications de surface ont été les plus souvent effectués par les deux groupes, mais les
scripteurs compétents ont fait plus de changements de propositions, de phrases et de
·paragraphe que les scripteurs peu habiles. L'opération la plus fréquente par les scripteurs
peu habiles était le remplacement.
2.5 Les catégories de Boiarsky (1984) Boiarski, qui regrettait que Faigley et Witte n'aient pas cherché à détenniner les raisons
pour lesquelles les rédacteurs effectuaient des modifications qui changent le sens d'une
partie ou de l'ensemble d'un texte, a conduit une recherche afin d'exposer les fonctions que
remplissent les modifications apportées dans les textes. À partir de ses propres versions
d'un essai de 1500 mots, elle a revu toutes ses modifications pour déterminer la fonction de
chacun des changements effectués (par exemple pour réorganiser le contenu ou pour
changer le ton) et l'opération d'écriture réalisée. Après avoir fait l'inventaire des fonctions
et des opérations, Boiarsky a tenté de les regrouper en catégories. Elle a ainsi créé onze
4 Les textes étant écrits à la main , les élèves pouvaient par exemple reformer des lettres ou changer leur calligraphie pour la dernière version, passant ainsi de l'écriture en script à l'écriture cursive.
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 36
catégories qui rendent compte des raIsons des modifications et dan s lesquelles les
opérations d 'écriture se chevauchent (changement de l ' angle du sujet, réorganisation de
l ' information , amélioration de la cohérence, information superflue, amélioration du
vocabulaire , correction de la grammaire, etc. [voir le tableau B.2 à l'annexe B]).
Afin de vérifier que ses catégories s' appliquaient aussi à d ' autres types d ' écrit , l'auteure a
notamment analysé des versions de textes écrits par quatre autres rédacteurs professionnels
et a discuté avec eux de leurs modifications. Ses analyses ont confirmé que leurs
modifications avaient des fonctions similaires à celles qu 'elle avait relevées et que ses
catégories les incluaient. On ne sait par contre pas quelles catégories ont é té les plus
fréquentes.
2.6 La classification de Bisaillon (1997) Afin c;le décrire le comportement scriptural de quatre universitaires avancés en français
langue seconde lorsqu ' ils écrivaient avec le traitement de texte, Bisaillon a conduit une
étude de cas dans laquelle elle a conçu une classification pour codifier les modifications
apportées en cours de rédaction. Cette classification est intéressante, car elle distingue de
nouvelles unités d ' analyse. En effet, outre les principales opérations d 'écriture (addition,
suppression , remplacement et déplacement) et les unités Inodifiées (graphème, Inot, groupe
de Inots - deux et plus -, phrase, groupe de phrases), la chercheuse a identifié les éléments
déclencheurs, c'est-à-dire « les éléments du texte à la source des corrections des
scripteurs » (p. 534), les aspects du texte sur lesquels portent les modifications (contenu ,
organisation, langue - lexique, orthographe, grammaire et syntaxe - , ponctuation et
traitement de texte) et la qualité des modifications (voir le tableau B.2 à l'annexe B).
Les aspects du texte et les éléments déclencheurs apportent de nouvelles informations pour
l ' analyse des modifications. Les aspects pennettent de savoir si les modifications des unités
ont été faites pour améliorer la forme des unités ou leur sens, ou si elles étaient dues à
l ' emploi du traitement de texte, tandis que les éléments déclencheurs (39 en tout) peuvent
être considérés comme les problèmes ou les raisons qui ont poussé les scripteurs à faire des
modifications. Panni ceux-ci, certains pourraient expliquer des modifications lexicales, par
exemple la présence d'un mot de trop, d 'une information non pertinente ou d ' un mot mal
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 37
orthographié, ou le besoin d'un mot plus précis. La codification des éléments déclencheurs
était par contre basée sur l ' interprétation des modifications faite par la personne qui
codifiait plutôt que sur les commentaires des scripteurs sur ce qui les avait incités à
modifier un segment du texte.
Les résultats ont montré que près de la moitié des modifications étaient causées par la non
maîtri se du traitement de texte (erreur de frappes et problèmes de signes - accent , cédilles,
traits d 'union). On ne connaît pas les opérations d 'écriture les plus utili sées, mais les
modifications étaient surtout apportées au niveau du mot. Ces changements étaient répartis
dans tous les aspects à l ' exception de la ponctuation, mais concernaie nt rare ment l 'asp ect
lexical (2,4 0/0) . Enfin , sur l ' ensemble des éléments déclencheurs détenniné , 9 e ont
avérés inutiles et 14 autres représentaient moins d ' un pour cent d ' utili sation.
2.7 La grille de résolution de problèmes de Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Carey (1987)
Selon Hayes et ses collaborateurs (1987 : 207 , 210-213 ~ voir aussi Flower et autres, 1986),
le scripteur qui détecte un problème lors de la lecture pour évaluer le tex te tente d 'en
déterminer la nature. Les auteurs représentent alors les problèmes sur un continuum basé
sur leur degré de précision. Ainsi , ce continuum va de la simple détection de l ' existence
d ' un problème, par exemple si le scripteur dit «je n'aime pas ça », au diagnostic très exact
d 'un problème, par exemple lorsque le scripteur s' aperçoit que le mot autorroute est mal
orthographié (voir la figure 2.1).
Les diagnostics sont ainsi des problèmes reconnus et catégorisés par le scripteur selon les
types de problèmes textuel s possibles. Ceux qui sont très précis concernent généralelnent
des règles de grammaire et d ' orthographe. D'autres sont en lien avec des principes de
rédaction, par exemple enlever les mots inutiles, éviter les répétitions ou adapter le
vocabulaire pour le destinataire ~ d'autres encore, moins précis que les précédents, relèvent
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 38
des intentions du sClipteur entre ce qu'il voulait dire et ce qu'il a écrit, par exemple quand il
trouve que le but n 'est pas atteint ou que les idées ne sont pas énoncées clairements.
Détection Diagnostic
Figure 2.1 - La représentation des problèmes, d'après Hayes et ses collaborateurs (1987 : 212)
Hayes et ses collaborateurs (1987) suggèrent ensuite que les modifications (révisions et
réécritures) peuvent se concevoir comme le résultat de l'application d'une grille de
résolution de problèmes cOlnportant les problèmes et les solutions possibles pour chacun
d'eux (voir la figure 2.2). L'originalité de la grille tient au fait que c'est la première fois
que des chercheurs associent des façons d'intervenir dans le texte aux problèmes à
résoudre. Du côté des problèmes, ils sont tous précisés, à l'exception du Problème en lien
avec les destinataires et du Problème de paragraphe. En outre, quelques-uns peuvent
justifier des modifications lexicales, par exemple une information manquante, une
mauvaise transition, une ambiguïté, une redondance, une erreur d'orthographe ou de
grammaIre.
Du côté des moyens, on constate que plus d'une solution est possible pour régler certains
problèmes. D'après la grille, on peut notamment régler une formulation gauche en divisant
des phrases, en réordonnant les mots ou en améliorant la formulation, et remédier à une
ambiguïté en insérant un qualificatif, en choisissant un mot précis ou un synonyme.
5 Parks Gaunder (1987), dans une étude de cas avec troi s étudiants de niveau collégial, a utilisé les catégories Détection , Intention , Principe et Règle pour classer les rai sons des modifications de ses sujets. Elle voulait savoi r si ceux-ci avaient un modèle de révision lorsqu ' ils composaient avec Je traitement de texte .
Co nstruct ion de phra ses
r---------------II----~--~ ol)
GLOB.A.L
LOCAL
PRO BLÈh"lES
~----------------
""infinitif séparé par un a ch,'erbe
Chapitre 2 : Le traitement des modificat ions 39
tvl0 "'(Er·.J:::;
Figure 2.2 - Grille de résolution de problèmes d'un scripteur expert, d'après Hayes et ses collaborateurs (1987 : 231)
Par ailleurs, les auteurs de la glille ont introduit le report de l ' action et la recherche
d'informations comme moyens de résoudre des problèmes, mais il ne s' agit pas de
vélitables solutions. En effet, le report de l'action garde le texte intact, il n'entraîne pas de
modifications immédiates COlnme c 'est le cas de la création d 'un paragraphe ou de la
combinaison de phrases; la recherche d ' informations est quant à elle une stratégie de
résolution, c ' est un moyen de trouver une solution , mais ce n ' est pas une solution en elle
même (voir § 1.2.3.1).
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 40
2.8 La typologie de Bisaillon, Laflamme et Leclerc (2004-non publié)
Dans le domaine de la révision professionnelle, Bisaillon, Leclerc et moi avons développé
une typologie pour décrire et expliquer les modifications apportées par six réviseurs
professionnels au cours d'une de leurs tâches de révision. Nous avions d'abord examiné les
classifications précédentes et conclu qu'il n'yen avait pas une qui était à la fois descriptive
et explicative, et assez complète pour rendre compte de toutes les modifications qu ' un
réviseur professionnel peut apporter à un texte pour l'améliorer.
La classification que nous avons élaborée caractérise les modifications selon l ' opération
d'écriture (addition, suppression, remplacement, déplacement), l'unité du texte modifiée
(caractère, mot, groupe de mots, propositions, phrase, paragraphe, texte) et son
emplacement (titraille, corps du texte, ensemble du texte, texte complémentaire), de même
que l'aspect du texte concerné (informatif, organisationnel, formel - orthographe, lexique,
gralnmalre, syntaxe, ponctuation, typographie des caractères, typographie de
l ' espacement - [voir le tableau C.l à l'annexe C]). Cela ad' ailleurs amené Bisaillon (2005)
à décrire les modifications des réviseurs professionnels en ces tennes :
[Les] modifications [peuvent] toucher les aspects infonnationnel, organisationnel ou formel [ ... ]. [Elles] se font au moyen des opérations d'addition, de suppression, de remplacement et de déplacement et elles peuvent toucher les diverses unités du texte, du caractère au texte complet. Elles peuvent donc être mineures - et concerner un détail - ou majeures - et porter sur le contenu et l'organisation du texte (p. 13).
De plus, comme nous avions demandé à nos sujets de justifier leurs modifications, nous
avons pu déterminer, à partir des verbalisations, sept objectifs de révision (faciliter la
compréhension du texte, respecter les règles, rendre la formulation plus adéquate, plus
claire ou plus économique linguistiquement, rendre le texte plus agréable ou plus facile à
lire, faciliter son travail de réviseur ou celui du graphiste, se co.nformer à son mandat). En
outre, pour chacun de ces objectifs, nous avons dégagé les moyens possibles pour les
atteindre selon les problèmes ayant pu être détectés. Par exemple, le réviseur peut rendre la
formulation plus adéquate, plus claire ou plus économique linguistiquement:
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 41
1) en formulant de façon plus claire le contenu d ' une phrase qui contient un des problèmes suivants:
- un manque de clarté; - une formulation gauche, lourde ou compliquée, qui ne favorise pas la compréhension; - une formulation longue qui pourrait être raccourcie.
2) en utilisant le bon terme QU le terme le plus approprié dans le contexte (correct et juste). Le révi seur trouve l ' un des problèmes suivants:
- une erreur dans le lexique (impropriété, anglicisme, mot non adéquat dans l ' énoncé, mot dont le niveau de langue n'est pas approprié) ; - une faiblesse dans le lexique (mot imprécis , mot abstrait, mot compliqué ou technique) (Bisaillon et autres, 2004-non publié).
Les catégories de justifications adoptées mettent en évidence l ' objectif que vise le réviseur
lorsqu'il apporte une modification ainsi que le moyen qu'il utilise pour corriger le problème
détecté. Elles ne donnent toutefois pas le problèrne précis à la source de chacun des
changements. On sait seulement que le problème en est un parmi ceux énumérés sous le
moyen utilisé.
Cette étude de cas a montré que les réviseurs 'professionnels ont davantage utilisé
l'opération de remplacement (57,6 0/0) que les autres opérations d'écriture. L'unité la plus
fréquemment modifiée a été le caractère (34,7 0/0), suivi du mot (29,4 0/0) et du groupe de
mots (28,4 0/0) . Plus des trois quarts des modifications relèvent de l'aspect formel (81,6 0/0),
à l 'intérieur duquel la syntaxe (27,9 0/0) et le lexique (23,2 0/0) en regroupent la moitié.
Enfin, le respect des règles a été le principal objectif poursuivi par les réviseurs, puisque
40,3 % des modifications ont été faites dans ce but. Ceux -ci voulaient ensuite rendre le
texte plus agréable ou plus facile à lire (23,6 %), puis rendre la formulation plus adéquate,
plus claire ou plus économique linguistiquement (17,3 % [pour d'autres résultats, voir
Bisaillon, 2007b et 2008]).
2.9 La typologie de Cloutier (2005) Pour ses études de troisième cycle, Cloutier, qui est une professionnelle de la révision, s'est
penchée sur les modifications qu'elle a .apportées au cours de la révision de fond et de la
préparation de copie d'un manuel didactique faisant l'objet d'une réédition. Elle désigne
sous le terme de modification
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 42
"toute opération scripturale qui revient sur du déjà-écrit, qu'il s ' agi sse de mots, de phrases, de paragraphes, de chapitres ou de textes entiers" (Grésillon 1994: 245; Lebrave 2002: 256), ou encore de signifiants graphiques alphabétiques et non alphabétiques tels les lettres de l ' alphabet , les signes de ponctuation , les signes typographiques comme le gras.
Le principal objectif de Cloutier était de vérifier si le principe communicatif de pertinence
(Sperber et Wil son, 1995)6 pouvait expliquer les modifications autres que normatives,
conventionnelles ou arbitraires faites dans un texte explicatif-expositif. Pour y parvenir, elle
a décrit et analysé 749 modifications effectuées dans trois extraits d ' un manuel de
méthodologie des sciences humaines.
Sur le plan descriptif, Cloutier a caractérisé les modifications selon:
• les opérations d'écriture effectuées (ajout, suppression, remplacement, déplacement);
• les éléments tex tuels touchés et concernés, c'est -à-dire ceux qui figurent dans le texte et ceux qui n'y apparaissent pas, par exemple dans le cas d'un ajout. Ces éléments peuvent être un signifiant graphique alphabétique ou non alphabétique -chiffre, lettre, signe auxiliaire, signe de ponctuation, signe typographique, signe de mise en page -, un mot - avec précision de sa catégorie grammaticale - , un syntagme - nominal, adjectival , verbal, prépositionnel, adverbial - , une ou plusieurs propositions, une ou plusieurs phrases graphiques et un ou plusieurs paragraphes;
• les ensembles rédactionnels auxquels appartiennent les éléments textuels touchés et concernés (texte plincipal, texte indicateur, texte organisateur, texte secondaire);
• les diInensions textuelles sur lesquelles portent les modifications faites (informative, organisationnelle, linguistique - phonologie, syntaxe et sémantique -, orthographique et typographique [voir le tableau C.I à l'annexe C]).
En précisant la nature du mot et du syntaglne modifiés, de même que les ensembles
rédactionnels, Cloutier apporte elle aussi du nouveau par rapport aux classifications
précédentes. La précision des catégories grammaticales auxquelles appartiennent les mots
est d ' ailleurs particulièrement intéressante pour l ' étude des modifications lexicales.
Sur le plan explicatif, la chercheuse a analysé les modifications en découvrant leur raison
d ' être puis en vérifiant si elles avaient un lien avec 1) «la recherche de la pertinence au
sens de Sperber et Wilson », 2) «un jugement de cohérence» et 3) «l'un des principaux
6 Selon ce principe, une information communiquée est pertinente si les effets cognitifs qu ' e1le produit sont plus importants que les efforts requis pour son traitement.
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 43
facteurs d'intelligibilité» (Cloutier, 2005: Il). Les raisons d'être des lnodifications sont
mul tiples. Cloutier en a en effet dégagé 33, dont 25 sont en lien direct avec l'une ou l'autre
des catégories de pertinence dégagées (voir le tableau C.l à l'annexe C). Cependant, malgré
leur nombre important, les raisons données renvoient le plus souvent à des catégories
générales. À titre d'exemple, les raIsons d'être des modifications de la dimension
linguistique sont les suivantes (p. 115) :
Application d'une contrainte linguistique, qui sinon entraînerait une agrammaticalité ou une anomalie; Application d'une norme; Uniformisation du style;
• Élimination d'un risque d'ambiguïté ou de confusion; Répétition d'un mot; Fonnulation plus brève d'un contenu informatif; Modification seulement engendrée par une autre; Sans raison.
Comme dans la recherche dirigée par Bisaillon, l'opération de remplacement a été la plus
utilisée par la réviseure, mais dans une proportion beaucoup moins iInportante (34,9 0/0).
Les opérations d'ajout et de suppression suivent de près avec des taux éq~ivalents, soit
environ 30 0/0. Comme dans toutes les recherches sur la révision, le déplacement est
l'opération la Inoins fréquente: il n'a été utilisé que dans 4,8 % des modifications. En ce
qui concerne les éléments textuels touchés, les syntagmes nominaux ont été les plus
souvent modifiés (10,7 0/0), suivi des propositions (9,6 0/0) et des phrases (9,20/0); la
quarantaine d'autres unités répertoriées a été touchée dans des proportions variant de moins
de 1 % à environ 5 0/0. Toutefois, si l'on considère uniquement les grandes catégories
d'éléments touchés - soit les signifiants graphiques, les mots, les syntagmes, les
propositions, les phrases et les paragraphes -, ce sont les signes graphiques qui ont été les
plus touchés (38,3 0/0), suivis des mots (22,7 0/0). Dans l'ordre, les dételminants (4,8 %), les
verbes (3,5 0/0) et les prépositions (3,2 0/0) sont les unités lexicales les plus souvent
modifiées.
Pour ce qui est des raisons d'être, l'application d'une contrainte linguistique (11,8 0/0) a été
celle que la chercheuse a le plus souvent détenninée. L'application d'une convention
graphique vient au second rang (8;8 0/0) et le découpage visuel des infonnations (7,7 0/0), au
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 44
troisième. On ne sait par contre pas qu ' elles ont été les rai sons d' être des modifications de
IllOts puisque les données des catégories Éléments textuel s touchés et Raisons d 'être n' ont
pas été mises en relation. Enfin, sur l ' ensemble dés modifications, la chercheuse a établi
que près de 70 % d'entre elles étaient liées à la recherche de la pertinence (511/749).
2.10 Des classifications inadéquates pour la description des modifications lexicales
Les classifications présentées ci-dessus illustrent bien qu ' il existe différentes façons
d 'envisager et de décrire les Inodifications faites dans les textes selon les objectifs de
recherche que se fixent les chercheurs. Pour mon étude, je m ' intéresse aux modifications
lexicales des réviseurs , ce qui correspond à une portion seulement de toutes les
modifications qu ' ils peuvent appol1er à un texte. De ce fait , les typologies élaborées jusqu'à
maintenant ne conviennent pas au genre d' analyse que je souhaitais réaliser puisqu 'elles
valent pour décrire l'ensemble des modifications d 'un texte. Leur portée est donc trop
grande et certaines unités d'analyse ne sont pas pertinentes ou trop générales. C 'est le cas
par exemple . de la classification de Boiarsky qui ne comporte pas assez de critères
descriptifs pour reconnaître les modifications lexicales. La catégorie Amélioration du
vocabulaire regroupe sûrelnent des modifications lexicales, mais on suppose qu ' il peut
aussi y en avoir dans les autres catégories, notamlnent dans la suppression ou l ' expansion
de l ' information. La typologie de Faigley et Witte n 'est pas plus adéquate pour décrire les
modifications lexicales parce qu'il est improbable que ces modifications soient
macrostructurelles, c ' est-à-dire qu'elles entraînent un changement important dans le sens
du texte.
Aucune des autres classifications décrites ne me permettait non plus de reconnaître toutes
les modifications lexicales des autres modifications parce que je base ces modifications sur
l'unité visée et non l'unité modifiée. En effet , tous les chercheurs ayant considéré les unités
textuelles dans leur classification se sont intéressés uniquement aux unités modifiées, c'est
à-dire les segments du texte qui sont touchés par les changements (Sommers, 1980;
Bridwell, 1980; Monahan, 1982; Hayes et autres , 1987; Bi saillon , 1997; Bisaillon et autres,
2004-non publié et Cloutier, 2005). Ils n'ont pas traité les unités visées, c'est-à-dire les
unités textuelles qui posent problème et qui sont, par conséquent, à l'origine des
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 45
modifications. Un révi seur peut par exemple remplacer un mot par un autre plus précis,
l ' unité visée et l ' unité modifiée sont alors la même - le mot - , mais il peut aussi modifier
(supprimer) une lettre d ' un mot pour coniger une erreur de frappe (dis syn1étrie
~ dissynlétrie), auquel cas l ' unité vi sée est le moe, mais l'unité modifiée est un caractère.
Il pourrait également devoir modifier un groupe de mots parce que l ' un deux cause une
autre sorte de problème (voir § 4.2.2). Même si les unités visées et les unités touchées
semblent le plus souvent équivalentes, il me paraît intéressant de les di stinguer, ne serait-ce
que pour rendre mieux compte des problèmes détectés et voir la variété des olutions
appliquées pour les résoudre.
De même, l ' aspect lexical considéré dans quelques typologies (Bisaillon , 1997 ; Bisaillon et
autres , 2004-non publié; Cloutier, 2005) n ' est pas un élément suffisant pour di stinguer
toutes les modifications lexicales . Les résultats de Bisaillon (1997) montrent clairement que
toutes les modifications de mots ne concernent pas l ' aspect lexical: plusieurs se trouvent
dans les aspects grammatical, syntaxique, orthographique, informatif et même
organisationnel (les mots liens précisément). À titre d'exemples, la correction de la coquille
dans *disssymétrie, se rapporte à l'aspect orthographique, mais il s 'agit d ' une modification
lexicale; un révi seur qui ajoute un adverbe ou un adjectif pour amener une précision ou qui
les supprime parce qu'ils apportent de l ' information superflue fait une modification
touchant l ' aspect informatif, mais la lnodification vise un mot en particulier.
Étant donné ces remarques, il était tout à fait légitime que je conçoive ma propre
classification pour l'analyse des modifications lexicales (voir § 4.2~3). J'ai tout de même
utilisé certaines des unités d ' analyse déjà existantes, dont l'opération d'écriture et l ' unité
modifiée, qui sont présentes dans presque toutes les typologies. Les principales opérations
d ' écriture que j ' ai retenues sont l'addition, la suppression, le déplacement et le
remplacement et, comme Cloutier (2005), j'ai précisé la catégorie grammaticale des unités
visées et des unités modifiées. J ' ai égalelnent adapté les catégories concernant les
dimensions ou aspects textuels (Bisaillon, 1997; Bisaillon et autres, 2004-non publié;
7 La justification donnée par une personne ressemblerait à quelque chose comme : « dissymétrie s'écrit avec deux s , pas trois » ou « il y a une erreur d'orthographe dan s disssymétrie », démontrant ain si que la personne a considéré le mot au complet et pas seul ement un de ses caractères, ou encore ses morphèmes (dys- et symétrie).
Chapitre 2 : Le traitement des modifications 46
Cloutier, 2005) pour tenter de distinguer les modifications qui touchent le sens du texte de
celles qui touchent plutôt la forme. En outre, j 'ai déterminé précisément les éléments
déclencheurs des modifications, c'est-à-dire les problèmes détectés par les réviseurs qui les
ont motivés à intervenir dans le texte (Hayes et autres, 1987; Bisaillon, 1997; Bisaillon et
autres, 2004-non publié; Cloutier, 2005). Ces problèlnes apportent des connaissances
pertinentes sur les choix des réviseurs de faire des changements. Enfin, j ' ai ajouté des
unités d'analyse pour décrire le résultat des modifications ainsi que la préoccupation
reflétée par les modifications.
Par ailleurs, même s'il n'en a pas été question dans la description des classifications, on
note qu ' une majorité de chercheurs a établi des critères et des règles propres à leurs
objectifs de recherche pour découper et dénombrer les modifications (voir aussi Parks
Gaunder, 1987; Magee, 1995; pour des exemples de règles posées par Bisaillon et ses
collaboratrices, voir § 4.2.1.5). De telles mesures légitiment ainsi les choix et les décisions
des chercheurs. Ceux-ci s'assurent également qu'ils analysent uniformément les
changements apportés dans un texte.
Chapitre 3· Les modifications lexicales: définition, éléments de description et finalité révisionnelle
Après avoir situé les modifications dans la tâche des réviseurs (chapitre 1) et fait le tour des
différentes façons dont elles ont été analysées par les chercheurs (chapitre 2), je peux
maintenant cerner l'objet précis de cette étude, c ' e t-à-dire les modifications lexicales des
réviseurs professionnels. Dans les lignes qui uivent, j'explique d'abord ce que j entends
par modification lexicale. Je définis ensuite la notion d'unité lexicale, qui est au cœur
lTIême du concept de modification lexicale, puis je présente les propriétés des unités
lexicales et leurs classes. Enfin, je termine en explicitant les notions liées au but de la
révision professionnelle, soit la qualité linguistique et l 'efficacité communicationnelle d'un
texte, et je mentionne quelques-uns des problèmes visant des unités lexicales qui se
rapportent à ces deux notions.
3.1 Qu'est-ce qu'une modification lexicale? Une lTIodification lexicale est un changement fai t dans un tex te qui est motivé par le
lexique, ou vocabulaire des textes (Polguère, 2003 : 70, 73; Niklas-Salminen, 1997 : 27;
Grevisse, 1993 : § 138). Plus précisément, je définis une n1odification lexicale comme une
«opération d ' écriture effectuée dans un texte à cause d'un problème que pose, pour le
réviseur, la présence ou l'absence d'une unité lexicale » . Une lTIodification ayant lieu si un
problème est détecté et réel , j'ai convenu qu'il était plus pertinent, et même logique, de
déterminer les modifications lexicales d'après leur point d'origine, c'est -à-dire l'uni té
textuelle problématique (l'unité visée) plutôt que d'après l'unité textuelle modifiée.
Les modifications peuvent être de plusieurs types (lexicales, syntagmatiques, phrastiques,
etc.), mais mon intérêt ne s'est porté que vers les lTIodifications lexicales. En effet, c'est
dans une perspective lexicologique que j'ai choisi de caractériser et d'analyser les
modifications apportées par les réviseurs dans leur tâche de révision. La lexicologie étudie
les propriétés des unités lexicales de la langue: leur forme, graphique et sonore, leur sens et
leurs propriétés combinatoires (Niklas-Sahninen, 1997: 5; Lehmann et Martin-BeI1het,
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 48
2000 : xiii ). Parce qu'elle est vue comme une science carrefour, à l'intersection des autres
disciplines lingui stiques que sont la phonétique, la morphologie, la sémantique et la
syntaxe, celles-ci sont au ssi nécessairement prises en compte dans la description des
modifications lexicales. De plus , comme les unités lexicales figurent dans des textes, on
doit également considérer que la lexicologie est en partie liée à la stylistique, définie
provisoirement comme « l ' étude du style, de ses procédés et de ses effets » (NPR-c;D).
Enfin , pour comprendre quelques problèmes que pose la présence ou l ' absence d ' une unité
lexicale dans les textes, il lne faudra parfois recourir à des éléments de la linguistique
textuelle (Adam, 2005). Cette linguistique « théorise et déçrit les agencements d ' énoncés
élémentaires au sein de l ' unité de haute complexité que constitue un texte » (Adam,
2005 : 33).
3.2 Qu'est-ce qu'une unité lexicale? Présentée simplement, une unité lex icale est «une suite de sons (ou de lettres , si on
envisage la langue écrite) qui a une fonction dans une phrase donnée, et qui ne peut se
diviser en unités plus petites répondant à la même définition. » (Grevisse, 1993 : § 136)
Son, déterminant démonstratif servant à marquer l'appartenance à la personne dont il est
question et son « résidu de la mouture du blé» sont considérés comme deux unités
lexicales, de même que verre , « Inatériau transparent cassable» et verre « contenant servant
à boire ». Les groupes de mots croix de guerre « médaille conférée aux soldats qui se sont
distingués à la guerre» et patte-d'oie « petites rides divergentes à l ' angle externe de l' œil »
sont aussi des unités lexicales, car leur sens n'est pas déductible de l'addition du sens de
chacun des mots qui les constituent. Les unités lexicales se divisent ainsi en mots simples,
aussi appelés morphèmes lexicaux ou lexèmes, comme son et verre, et en mots composés,
aussi appelés locutions , comme croix de guerre et patte-d'oie. Il existe plusieurs types de
locutions dont les locutions nominales (nid-de-poule, fer à cheval) , les locutions verbales
(casser la croûte, rouler sa bosse), les locutions adjectivales (d'accord, en panne) , les
locutions adverbiales (d 'autre part, tant ,nieux ) et les locutions prépositionnelles (en bas
de, à propos de). Également, certaines locutions fonnent des expressions idiomatiques, par
exelnple prendre le taureau par les cornes. Les unités lexicales constituent ainsi des unités
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 49
codées dans « la mémoire du sujet parlant qui doit les · reproduire telles quelles , en bloc ,
dans le discours » (Niklas-Salminen, 1997 : 15).
J' ai volontairement considéré le lexique dans son acception la plus large, c 'est -à-dire
« ensemble des unités lexicales - ou mots 1 - d'une langue donnée » (Polguère, 2003 : 70;
Niklas-Salminen , 1997 : 27; Lehmann et Martin-Berthet, 2000 : 3), afin de rendre compte
du plus grand nombre possible de modifications qui peuvent être regroupées sous le
concept de modification lexicale. Ainsi, autant les mots grammaticaux que les mots
lexicaux peuvent être la source de modifications lexicales. Il en est de même avec les unités
lexicales appartenant à d ' autres langues puisque je ne limite pas le lexique à celui de la
langue française.
3.2.1 Les propriétés de l'unité lexicale Une unité lexicale est un signe linguistique, constitué d'une forme (signifiant) et d 'un
contenu (signifié et sens), qui renvoie à une réalité extralinguistique matérielle ou
conceptuelle (réelle ou fictive) communément appelée référent. Elle peut de plus être vue
comme comportant des propriétés de combinatoire qui rendent compte de certains
phénomènes linguistiques (Polguère, 2003 : 37).
3.2.1.1 La forme Sur le plan morphologique, l'unité lexicale présente un signifiant oral (par exemple [liVR]),
correspondant à une image acoustique formée de phonèmes et un signifiant graphique
(livre) correspondant à une suite de lettres fixes représentant un ou plusieurs morphèmes -
la plus petite unité de sens dans la langue.
3.2.1.2 Le contenu Sur le plan sémantique, le contenu d'une unité lexicale, ou signifié, est la signification
évoquée par le signifiant. C'est un concept abstrait qui renvoie à une classe de référents et
non à un référent singulier. Ainsi, au signifiant graphique livre correspond le signifié
« assemblage d'un assez grand nombre de feuilles portant des signes destinés à être lus ».
1 Bien que le terme mot ne fasse pas 1'unanimité parce qu ' il est ambigu et peut porter à confusion (notamment Polguère, 2003), je l'emploie parfois par commodité comme synonyme d ' unité lexicale, à moins d 'avis contraire de ma part. .
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 50
Le sens d 'une unité lexicale est la signification ou valeur particulière que prend le signifié
quand un signe est actualisé dans le discours (Touratier, 2000 : 13). Le sens dénotatif, aussi
appelé sens référentiel ou sens désignatif, correspond au sens établi par le rapport entre le
signe linguistique et le référent. Il rassemble les informations permettant «d'identifier et
d ' isoler une catégorie d ' objets ex tralinguistiques par rapport à d'autres objets » (Lehmann
et Martin-Berthet, 2000: Il) pour référer à un objet particulier. Par exemple, la personne
qui lit Le livre est sur la table sait que livre réfère à un objet particulier de la classe des
livres même s'il ne sait peut-être pas exactement de quel livre il est question (auteur, sujet,
format, etc.).
À côté du sens dénotatif, il yale sens connotatif qui représente « les valeurs sémantiques
secondes qui viennent se greffer sur le sens dénotatif » (Lehmann et Martin-Berthet, 2000 :
12). Ces valeurs sont hétérogènes; elles sont généralement communes, mais elle peuvent
aussi être individuelles. La connotation englobe les registres de langue (soutenu - ou
littéraire -, technique, non marqué, . familier, etc.), les marques stylistiques (vulgaire,
péjoratif, mélioratif) et « tout ce qui relève des associations d ' idées et de l'affectivité»
(Niklas-Salminen, 1997 : 93).
Pour sa part, Ullmann (1975 : 147) regroupe sous le terme valeur affective «tout ce qui ,
dans la langue, déborde dela pensée objective, la communication rationnelle », incluant les
_ figures de style et l'expression de la volonté. En outre, cette valeur est surtout associée au
sens, mais elle n' y est pas exclusive. « Il arrive, en effet, que certains mots produisent des
effets esthétiques agréables ou désagréables par leur substance phonique et
indépendamment de toute signification ou de toute association externe. » (Ullmann, 1975 :
148). Ullmann (1975 : 157-159) emploie ensuite le terme valeur évocatrice pour tout ce qui
relève de la variation linguistique (variation géographique, diachronique, liée aux registres
de langue et liée au domaine d-'utilisation). Ainsi, pavé et brique, par exemple, possèdent
chacun une valeur affective et des valeurs évocatrices: sur le plan affectif, les deux mots
sont employés au sens figuré de « livre très épais »; sur le plan évocateur, en plus de relever
de la langue familière, pavé est un emploi hexagonal tandis que brique est un
emploi québécois.
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 51
3.2.1.3 La combinatoire lexicale2
La combinaison des unités lexicales pour former un discours parlant de la réalité n ' est pas
aléatoire puisqu'il existe « des règles générales qui permettent de combiner les mots de la
langue pour former des phrases» (Polguère, 2003 : 21). «Pour bien utiliser un mot, il ne
suffit pas de le connaître isolément. Il faut aussi savoir comment l'associer avec d ' autres
mots dans toutes s011es d'énoncés. » (Grammaire pédagogique du français d 'aujourd 'hui
(GPFD), 1999 : 378-379)
Les règles d'association viennent des propriétés de combinatoire des unités lexicales. Ces
propriétés sont en fait des contraintes « qui limitent [la capacité des unités] de se combiner
avec d'autres signes linguistiques et qui ne peuvent être déduites ni de [leur] signifié ni de
[leur] signifiant» (Polguère, 2003 : 37). Par exemple, le nom porte, qui doit nécessairement
figurer au singulier ou au pluriel dans un énoncé - il ne peut 'exprimer les deux à la fois
(Pol guère, 2003 : 60) -, est généralement précédé d'un déterminant dans une phrase (La
porte est barrée.). Cette unité est de genre féminin et elle conditionne la forme féminine du
déterminant et, le cas échéant, de l'adjectif qui la modifie (une porte blanche). Le
mécanisme morphologique qui autorise l'emploi grammatical d'une unité lexicale dans une
phrase est appelé flexion et est imposé par la langue.
De même, dans Je téléphone à n'la mère, l'emploi obligatoire de la préposition à est fixé par
les propriétés de combinatoire du verbe téléphoner (verbe transitif indirect). Sur le plan
syntaxique, la préposition n'est plus nécessaire quand on remplace ce verbe par le verbe
appeler (J'appelle 'ma Inère) parce que la combinatoire d'appeler requiert un complément
d'objet direct (verbe transitif direct).
Enfin, c'est encore grâce à des relations de combinatoire lexicale que des liens
syntagmatiques connectent des unités à l'intérieur des phrases. Des restrictions sémantiques
servent alors à formaliser le type sémantique des arguments attendus d'une unité lexicale
pour éviter de produire des phrases sémantiquement anormales, mais grammaticales du
type *le lait boit le chat. Ainsi, boire prend un sujet de type animé et un objet concret.
2 Cette caractéristique du signe linguistique est proposée dans le cadre de la théorie linguistique Sens-Texte, dont le but premier est l'étude et la description des phénomènes internes (structures lexicales et grammaticales) de la langue (Polguère , ] 998 et 2003).
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 52
C 'est également ce phénomène de restriction sémantique qui explique que l'on peut dire
Philippe tOlnba dans un profond sommeil, mais pas * Philippe dégringola dans un profond
son1n1eil. (Polguère, 2003 : 37-38)3.
3.2.2 Les classes d'unités lexicales Les unités lexicales se répartissent selon leur nature en classes grammaticales ,
traditionnellement appelées parties du discours (Niklas-Salminen, 1997: 22; Grevisse,
1993 : § 139). En français , la grammaire traditionnelle distingue huit parties du discours qui
correspondent aux « unités constituantes de la phrase » (Lehmann et Martin-Berthet, 2000 :
3) : le nom, le verbe, l 'adjectif, l'adverbe, le pronom, le déterminant, la préposition et la
conjonction. Dans certaines grammaires, l'interjection forme une neuvième catégorie
grammaticale. La classification des unités lexicales dans l'une ou l ' autre des parties du
discours s'établit selon des critères morphologique, syntaxique et, dans une moindre
mesure, sémantique. Le critère morphologique concerne essentiellement la variabilité ou
l'invariabilité des unités tandis que le critère syntaxique porte sur leurs fonctions possibles
au sein de phrases (Grevisse, 1993: § 139). Le critère sémantique se rapporte au sens
général qu'apportent les mots d'une classe, mais comme celui-ci reste vague et s'applique
parfois à plus d'une classe, il ne permet pas à lui seul une catégorisation adéquate
(Pol guère, 2003 : 83).
Les parties du discours forment des classes ouve11es et des classes fermées. Les classes
ouvertes (nom, verbe, adjectif, adverbe) comportent un très grand nombre d'unités
susceptibles de se renouveler sans cesse (unités porteuses de nouveaux sens ou tombées en
désuétude et remplacées par des néologismes), « sans que cela n'entraîne une modification
importante du fonctionnement de la langue. » (Polguère, 2003: 80). Au contraire, les
classes fermées (pronom, déterminant, préposition, conjonction) rassemblent un petit
nombre d'unités stables, mais elles composent tout de même environ 50 % du discours en
français (Niklas-Salminen, 1997 : 23). Par ailleurs, la distinction entre les unités des classes
ouvertes et des classes fermées correspond à peu près à l'opposition entre les mots lexicaux
et les mots grammaticaux.
3 On parle généralement d' incompatibilité sémantique dans ces cas.
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 53
Mêlne si elles sont largement connues, je présente les principales caractéristiques
morphologiques, syntaxiques et sémantiques propres à chacune des parties du discours.
Celles-ci laissent déjà entrevoir des elTeurs susceptibles d'apparaître lorsque les unités
lexicales sont employées dans le discours, dont certains relèvent de la combinatoire lexicale
comme on l'a vu ci-dessus (§ 3.2.1.3).
3.2.2.1 Le nom Cette partie du discours possède un genre en propre (masculin ou féminin) et varie en
nombre (singulier ou pluriel). Elle est susceptible d'être accompagnée d'un déterminant
ainsi que d'adjectifs la qualifiant auxquels elle donne son genre et son nombre. Le nom
remplit différentes fonctions dans une phrase: sujet - auquel cas il donne aussi sa personne
et son nombre au verbe prédicat -, complément direct du verbe, complément du nom ou
complément de phrase, attribut du sujet ou attlibut du complément direct. Sur le plan
sémantique, le nom désigne généralement un être, une chose ou une émotion et ses traits
sémantiques vont par paires (animé / inanimé, . humain / non humain, comptable / non
comptable, etc. [GPFD, 1999 : 138]).
De plus, il existe deux sortes de noms, les nOlns communs et les noms propres. Ces derniers
s'écrivent toujours avec une majuscule initiale et n'ont pas de sens, sinon celui de désigner
des référents particuliers (personnes, lieux, époques, institutions, mouvements politiques,
etc.) » (Lehmann et Martin-Berthet, 2003 : 5, 169; GPFD, 1999 : 123).
3.2.2.2 Le verbe Le verbe se conjugue et prend ainsi différentes formes selon le mode (indicatif, subjonctif,
iInpératif, infinitif et participe), le temps (passé, présent et futur, simple ou composé),
l'aspect (accompli ou non accompli), la personne (1 re, 2e et 3e) et le nombre (singulier ou
pluriel). Sur le plan syntaxique, il n'a qu'une seule fonction, celle de prédicat: «Il est
l'élément essentiel de la phrase, celui auquel se rattache (directement ou indirectement)
tous les autres éléments (sujet du verbe, complément du verbe, etc.). » (Polguère, 2003 :
80). En outre, selon certaines particularités, on distingue des verbes transitifs et intransitifs,
des verbes attributifs, pronolninaux et impersonnels. La valeur sémantique première du
verbe «est de situer dans le telnps le fait ou l'évènement dont il est question dans la
phrase» (GPFD, 1999: 174). Enfin, il existe différents types de verbes selon ce qu'ils
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 54
expriment. On trouve par exemple, parmi les plus courants, les verbes d'action, de
connaissances, de déplacement, d'existence, d'opinion et de parole.
3.2.2.3 L'adjectif Cette classe regroupe des unités lexicales qui reçoivent un genre (masculin ou féminin) et
un nombre (singulier ·ou pluriel) des noms avec lesquels ils sont en relation, même si
certains adjectifs sont invariables (adjectifs de couleur provenant d'un nom et adjectifs
composés). Dans une phrase, l'adjectif est soit complément du nom, attribut du sujet ou
attribut du complément direct. Sémantiquement, les adjectifs qualifient les noms de façon
positive ou méliorative (bon, agréable), négative ou péjorative (mauvais, buté), ou neutre
(contemporain), ou les classifient selon des caractéristiques reconnues (humain, végétal).
3.2.2.4 L'adverbe L'adverbe est invariable et est souvent formé d'un adjectif auquel s'ajoute le suffixe - ment.
Sa fonction syntaxique est essentiellement celle de lTIodificateur - de l'adjectif, de
l'adverbe, du verbe, du déterminant numéral, de la préposition ou du pronom -, mais il peut
aussi être complément de phrase ou complément indirect du verbe. Par ailleurs, certains
adverbes jouent le rôle syntaxique de marqueur interrogatif (quand, où) ou exclamatif
(comlne), ou de coordonnant (puis) (GPFD, 1999: 227). L'adverbe exprime le temps, le
lieu, l'affirmation, la négation, le doute ou la probabilité, l'intensité, la quantité et la
manière (GPFD, 1999 : 221).
3.2.2.5 Le pronom Cette partie du discours comporte des unités qui peuvent varier en personne, en nombre, en
genre et selon leur fonction (je, n1e, moi, par exemple). Comme le nom, le pronom donne
son genre et son nombre à l'adjectif qui le qualifie ou le classe et sa personne et son
nombre au verbe dont il est sujet. Il y a plusieurs sortes de pronoms - personnel, possessif,
démonstratif, relatif, interrogatif, indéfini et numéral -, et leurs fonctions dans la phrase
sont aussi très diverses - sujet, complément direct, complément indirect, attlibut du sujet,
complément de nom et complément de l'adjectif. On distingue les pronoms de reprise, qui
renvoient « à une idée ou à une réalité [ ... ] exprimée dans le texte» (GPFD, 1999 : 149) et
les pronoms nominaux «dont le sens ne provient pas d'un antécédent» (GPFD, 1999 : 149).
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 55
3.2.2.6 Le déterminant Le détenninant a pour rôle d'introduire un nom dans une phrase et il varie en genre et en
nombre selon ce nom. Les détenninants se divisent en sous-groupes: détenninants définis,
indéfinis, démonstratifs, possessifs (ceux -ci varient aussi selon la personne), interrogatifs,
exclamatifs, partitifs, numéraux et quantitatifs. Us précisent ce que désignent les noms, par
exelnple que le référent du nom appartient à un être ou à une chose (ma tasse) ou qu'il
s'agit d'une quantité nulle, partielle ou précise (aucune pomme, des pommes, trois pommes
[GPFD, 1999 : 140]).
3.2.2.7 La préposition Les unités appartenant à cette classe sont invariables. Elles doivent nécessairement avoir
une expansion à droite pour fonner un groupe prépositionnel ayant l'une des fonctions
suivantes dans la phrase: complément de phrase, du nom, du pronom, de l'adjectif ou
complément indirect du verbe, attribut du sujet ou du complément direct ou encore
modificateur du verbe. De plus, la préposition peut être régie par l'unité qui la précède
(dépendre de) ou qui la suit (monter sur un podiuln, monter à cheval). Certaines
prépositions ont un sens stable et expriment par exemple le temps, le lieu, l'opposition ou la
privation, alors que d'autres changent de sens selon le contexte, ce qui est notamment le cas
des prépositions à, avec, de, en et pour.
3.2.2.8 La conjonction La conjonction regroupe les conjonctions de coordination et les conjonctions de
subordination. Les premières sont invariables et servent à joindre des unités syntaxiques de
même niveau (et, ou, donc) tandis que les secondes, également invariables, introduisent des
phrases subordonnées dépendantes de phrases principales (qui, que, quand, dès que). Les
conjonctions ont donc un rôle syntaxique, mais elles ont aussi généralement un rôle
sémantique: les coordonnants indiquent le sens de la relation établie entre les éléments
coordorynés (addition, cause, conséquence, opposition, etc.) alors que les subordonnants
indiquent le sens de la subordonnée (temps, cause, conséquence, hypothèse, etc.).
3.2.2.9 L'interjection L'interjection est une classe d'unités qui pennet l'expression d'un sentiment (soulagement,
agacement, surprise ... ) ou reproduit un bruit - les onomatopées. Les interjections ne sont
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 56
pas des constituants de 1 a phrase, ce sont plutôt des mots-phrases, d'où le fait que tous ne
les considèrent pas comme une partie du discours 4.
3.3 Pourquoi apporter des modifications lexicales dans un texte?
Un texte utilitaire est une forme de communication langagière dans laquelle un auteur (OU
rédacteur) veut transmettre un message écrit à un lecteur dans un but précis. Il e t composé
d ' une série de phrases, elles-mêmes constituées d 'unités lexicales. Mais, encore faut-il que
l ' agencement de ces unités au sein de phras-es respecte certaines règles et que la uite de
phrases crée un tout cohérent et compréhensible pour le lecteur pour affirmer qu 'il s'agit
d'un écrit communicationnel. Dans cette perspective, 'le but du réviseur professionnel ,
comme on l'a vu dans l'introduction (p. 1), est de polir ce texte écrit par quelqu ' un d 'autre
pour en améliorer la qualité linguistique et l'efficacité communicationnelle.
3.3.1 La qualité linguistique Lorsqu'il est question de qualité linguistique, et plus particulièreluent de celle d'un texte,
rares sont les auteurs, praticiens ou théoliciens qui s'attardent à définir clairement ce dont
ils parlent. Et pourtant, l ' expression est courante. Si certains y voient une adéquation avec
la notion de qualité de 1 a langue, la défi ni tion qu 'on donne de cette dernière s'applique
difficilement à la qualité linguistique. En effet, une langue de qualité en est une «qui
permet d'avoir accès à toutes les facettes de la connaissance, qui permet d'exprimer
clairement sa pensée, de la nuancer. » (Ouellon, 1998: 33). D'autres associent la qualité
linguistique au respect des règles et conventions de la langue décrites dans les ouvrages
normatifs usuels. Un moyen valable d'évaluer la qualité linguistique d'un texte serait alors
de «relev[er] les écarts par rapport à la norme linguistique (dans ses multiples dimensions)
[ ... ], le nombre de fautes qu'il contient pouvant être vu comme un indice de la qualité de la
langue qui y est employée» (Clerc, Kavanagh, Lépine et Roy, 2001 : 2). Le rapport entre
qualité linguistique et qualité de la langue n'en serait donc pas un d'équivalence, mais
plutôt un de cause à effet: la qualité linguistique assurerait la qualité de la langue, du moins
en, partie.
4 Goosse (voir Grevisse, ] 993 : § J 41) réunit les interjections avec certains mots classés traditionnellement comme adverbes , tel s merci, bravo et oui au sein d'une classe appelée mot-phrase.
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 57
Par ailleurs, l'idée que la qualité linguistique d'un texte consiste à respecter les règles et
conventions de la langue décrites dans les ouvrages de référence n 'est pas dénuée d ' intérêt.
Il faut par contre déterminer ce que sont ces règles et conventions de ·la langue et surtout
expliquer sur quelle(s) norme(s) elles reposent. C'est ce que je vais tenter de faire dans les
lignes qui suivent.
« Dans son acception scientifique, [une règle] désigne tout principe d'encodage de 1 énoncé
linguistique que le locuteur perçoit comme grammatical [ou constÏtu tif d'une 1 angue] »
(Aléong, 1983: 262). La description et l'explication du fonctionnement des règles
inhérentes à la langue permettent d ' une part d 'établir des normes objectives systémiques,
selon le terme employé par Houdebine (2002) dans le cadre de sa théorie de l ' Imaginaire
linguistique. Ces normes concernent la conformité des usages aux règles de la ~tructure de
la langue, en dehors de tout jugement de valeur. L'emploi du suffixe -s comme marque du
pluriel , le signifié « récipient à goulot étroit destiné à recevoir des liquides» qu'évoque le
signifiant bouteille, de lnême que les règles de combinatoire lexicales (voir § 3.2.l.3) sont
des exemples d'autorégulation de la langue comme systèlne.
D'autre part, d ' autres normes linguistiques objectives se dégagent à partir de la fréquence
des usages répertoriés. Ces normes, dites statistiques (Houdebine, 2002), présentent ainsi
certains usages comme majoritaires tandis que d'autres sont lninoritaires. L'usage de la
forme féminine professeure, par exemple, est courant au Québec, mais il ne l'est pas en
France. Enfin , les normes objectives sont dites implicites (Aléong, 1983 : 262; Verreault,
1999: 33-34) lorsqu'elles fonctionnent au sein de la communauté sans qu'elles soient
énoncées fonnellement et elles deviennent explicites lorsqu'on tente d'en faire la
description le plus fidèlement possible, par exemple dans un ouvrage linguistique.
À côté de ces normes objectives, il existe diverses normes subjectives qui se rapportent aux
représentations que se font les locuteurs de la langue et qui sont régies par des attitudes
diverses. Selon Houdebine (1993), les locuteurs tendent à avoir une vision fictive de la
langue, celle d'une langue idéale et idéalisée. Parmi les normes subjectivess, les normes
5 Houdebine (2002: ] 4-] 5, 20) distingue des normes subjectives évaluatives, lorsque le locuteur prend conscience de la présence ou de l'absence d'un fait linguistique dans ses propres usages ou ceux des autres, des normes subjectives fictives, qui reposent sur des rationalisations des locuteurs et qui deviennent
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 58
prescriptives, fondées sur des jugements d'ordre esthétique, affectif, historique ou autre,
préconi sent certains usages · et en condamnent d ' autres, recommandent et entérinent des
emplois au détriment de d ' autres. Soutenir, par exemple, que chefferie au ens de
« direction d ' un parti politique» et char au sens de « voiture » sont des impropriétés, ou
recommander l ' emploi de télécopier ou envoyer par télécopie plutôt que faxer, relèvent de
jugements purement prescriptifs. Ces conventions d 'usage - comme on peut les appeler
. pui qu ' il ne s' agit pas de règles à proprement parler - préconisées et explicitées dans des
ouvrages de référence renvoient à un modèle linguistique établi par les autorité de la
langue et sont, de ce fait, investies d ' un certain prestige et imposées socialement même si
elles ne sont pas toutes légitimées par des normes objectives systémiques ou stati tiques.
Bien souvent même, les normes prescriptives ont préséance sur les normes objectives. À
titre d ' exemple, jusqu'à tout récemment encore, le verbe prioriser, conforme aux modes de
formation des verbes en français (norme systémique) et d'un emploi très répandu au
Québec (norme statistique) était considéré comme un anglicisme fautif (Banque de
dépannage linguistique (BDL), 2002-2009); Colpron,' 1998). Ce n'est qu ' en 2006 que
l'Office québécois de la langue française a entériné son usage (Grand dictionnaire
terminologique (GDT), 2002-2009).
Les ouvrages de référence sont représentatifs d'une norme explicite composée d 'un certain
nombre de règles et d'usages relevant de normes objectives systémiques et statistiques et de
conventions d'usage ressorties à des normes subjectives prescriptives. Les règles et usages
répertoriés dans ces ouvrages sont cependant arbitraires et dépendent des divers critères de
description et d ' évaluation utilisés par leurs auteurs, notamment en ce qui a trait au lexique
(Verreault, 1999 : 34-35), ce qui les rend plus ou lTIoins objectifs ou subjectifs. Ainsi, tous
les ouvrages de référence ne tiennent pas exactement le même discours normatif et ne
répertorient pas J' ensemble des règles de la langue et des usages possibles - ce qui cause
parfois de véritables maux de tête aux réviseurs professionnels qui ne savent pas s'ils
prescriptives lorsqu 'elles sont entérinées et véhiculées par les dictionnaires e t les grammaires, e t des normes subjectives communicationnel1es, qui té moignent de la prise en compte du destinataire. « T sekos (2002) propose [ ... ] de compléter le tableau de [ces] normes [ ... ] en ajoutant un cinquième type, les normes identitaires, afin de rendre compte du rôle que joue la langue dans la construction de l'identité ethnique et culturelle d ' une communauté. » (Remysen, 2009).
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 59
doivent cornger · ou non une fonnulation ou un emploi particulier -, mais, de façon
générale, on peut dire que
tout en reconnaissant l 'existence de plusieurs normes linguistiques, force est de constater que dans son usage habituel, ce terme désigne une variété de langue qui , à un moment donné, s'impose et est imposée par tout un appareil prescriptif comme la langue de référence à laquelle doivent se mesurer tous les comportements. [ ... ]
[La norme explicite] s'impose comme l'idéal à respecter dans les circonstances qui appellent un usage réfléchi ou contrôlé de la langue, c'està-dire dans les usages officiels, dans la presse écrite et audiovisuelle, dans le système d 'enseignement et dans l' administration publique. (Aléong, 1983 : 261).
Cela dit, la qualité linguistique d'un texte correspondrait donc à un texte dont les éléments
linguistiques sont confonnes aux normes objectives et subjectives explicitées dans les
ouvrages de référence. Ces éléments sont variés et se rapportent aussi bien à la grammaire,
à la syntaxe, à l'orthographe et au lexique qu'à la typographie et à la ponctuation, puisque
les ouvrages traitent principaleluent de ces aspects. Mais la qualité linguistique d'un texte
ne se résume-t-elle qu'au respect de ses éléments de surface et phrastiques? Comme un
texte se compose de phrases en rappo11 les unes avec les autres pour former un tout
cohérent, il faut aller au-delà de ces considérations puisqu'il est évident que ce n'est pas en
recourant à des règles de syntaxe, ni d'orthographe ou de grammaire, par exemple, que le
réviseur s'assure de la cohérence du texte.
Même si la cohérence est en partie déterminée par « l'habileté personnelle du lecteur à faire
des inférences et à comprendre un texte» (Pépin, 1998: 1), des règles, «qui reposent
essentiellement sur l'intériorisation des caractéristiques propres à la communication écrite»
(Vandendorpe, 1995 : 86), et des principes régissent les agencements textuels d 'unités. Ces
règles et principes sont étudiés par la grammaire du texte, ou grammaire transphrastique
(Gardes-Tamine et Pellizza, 1998; Pépin, 1998; GPFD, 1999), distincte de la grammaire de
la phrase ou grmulnaire traditionnelle (ce qu'on appelle simplement grammaire). En effet,
la grammaire du texte, que certains préfèrent aborder sous le domaine plus vaste de la
linguistique textuelle (Adam, 2005; Vandendorpe, · 1995), «étudie les caractéristiques
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 60
linguistiques visibles du texte qui contribuent à la reconnaissance de sa cohérence » (Pépin,
1998 : xi).
Ainsi, pour assurer la qualité d'un texte, il est nécessaire que le réviseur possède une
connaissance de base de ces règles et principes pour détecter les erreurs et faiblesses dans
l'enchaînemént des phrases et l'organisation générale du texte. Pour Vandendorpe, par
exemple (1995 : 86), six aspects fondent la cohérence textuelle, «à savoir la continuité
thématique, la progression, la cohésion, la gestion adéquate du temps et de l ' espace et
l'ab ence d'ellipse trop fortes ». Pépin (1998) pose pour sa part trois conditions à la
cohérence textuelle, soit la cohésion, la hiérarchisation des énoncés et l'intégration. Bien
que les critères retenus d ' un auteur à l'autre varient en nombre et en dénomination, leur
description se rejoint, de même que les principes qui les sous-tendent. Il est notamment
question de l'emploi des marqueurs de relation et des marqueurs temporels , des
pronominalisations et autres reprises anaphoriques, du fonctionnement des temps et modes
verbaux , de l'ordre de présentation des énoncés et de la structure des textes selon leur type
(séquences nalTative, descriptive, explicative et argumentative).
En fin de compte, la qualité linguistique d'un texte pourrait être définie comme la propriété
d'un texte dont les unités ou éléments constitutifs respectent les règles et conventions
explicitées dans les ouvrages de référence et sont adéquatement choisis et agencés pour en
garantir la cohérence interne. En ce qui · concerne l'emploi des unités lexicales dans un
texte, on pourrait ainsi s'attendre à ce qu'un réviseur améliore la qualité linguistique en
apportant des modifications pour corriger, par exemple, des erreurs d'orthographe lexicale
et grammaticale, des en-eurs de syntaxe, des impropriétés, des barbarismes, des
anglicismes, des mauvais connecteurs et des mauvaises pronominalisations.
3.3.2 L'efficacité communicationnelle Pour Bisaillon (2004 et 2008), l'efficacité communicationnelle est « la caractéristique que
possède un tex te qui est non seulement exempt d'erreurs, mais qui se lit bien et est
cOlnpréhensible pour le destinataire visé. Le texte est efficace sur le plan de la
communication s'il produit les résultats attendus (infonner, provoquer, éveiller, amuser,
etc.) en fonction du destinataire ciblé.
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 61
Tel qu ' il est présenté ici par Bisaillon, le concept d 'efficacité comlTIunicationnelle englobe
la qualité linguistique puisqu ' un texte efficace est aussi « exempt d 'erreurs ». Toutefoi s, cet
aspect est secondaire dans la notion d ' efficacité, la qualité linguistique étant davantage vue
comme une . partie inhérente à l'écrit. « Ce qui est en cause, ce n 'est pas tant que le texte ne
con~ienne pas d ' erreurs , mais qu ' il possède le style adapté aux lecteurs, le ton et le niveau
de langue appropriés. » (Bisaillon, 2004 et 2008). L ' efficacité est donc avant tout centrée
sur le lecteur pour assurer la communication alors que la qualité linguistique est établie en
fonction de normes et de plincipes indépendants du lecteur. Ces normes sont par contre
souvent connues du lecteur, elles lui servent alors de balises et lui rendent le texte plus
li sible (elles facilitent le décodage des mots et des phrases), de là l'idée que la qualité
linguistique participe de l 'efficacité communicationnelle.
Clerc (2002) va plus loin pour expliquer ce qu'est l'efficacité communicationnelle. Elle
définit le concept en s'appuyant sur le principe de pertinence de Sperber et Wilson (1995)
et l' opérationnalise à partir des éléments constitutifs d'une situation de communication.
Selon la chercheuse, dans une communication l ' efficacité est la qualité de ce qui produit un
effet cognitif. À l'écrit, « est efficace un texte utilitaire dont la visée pragmatique est
comprise par sop destinataire (la finalité est donc de faire comprendre le sens voulu dans
l ' acte de communication fOlmulé, non de faire passer à l'action)>> (Clerc, 2002). Pour
atteindre l ' efficacité communicationnelle, soit l ' adéquation entre le sens produit par le
destinateur et celui produit par le destinataire, le rédacteur devrait effectuer une série
« d' opérations matricielles » entre les cinq axes qui, selon Clerc, déterminent l'efficacité
communicationnelle. Ces axes sont le rédacteur (profil et compétences), le processus de
rédaction (étapes de production, analyse de la situation de communication et clarté des
objectifs visés par l ' écriture), le tex te (lisibilité et intelligibilité, contexte d' émission
réception), le processus de lecture (étapes de réception, analyse de la situation de
communication et de la motivation sous-jacente à la lecture) et le lecteur (profil et
compétences). Des opérations de croisement entre les données des divers axes fournissent
au rédacteur les valeurs et spécifications dont il doit tenir compte pour rédiger un texte qui
atteindra un maximum d'efficacité.
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 62
Dans cette perspective, le rôle du réviseur professionnel, qui ne peut intervenir que sur
l'axe du texte une fois celui-ci rédigé, comporte deux volets. Pour assurer l ' efficacité de la
communication, le réviseur professionnel doit d 'abord vérifier, en tant que premier lecteur
du document écrit, que le sens qu'il produit à la lecture du texte correspond bien à celui que
voulait produire le rédacteur en fonction du mandat d ' écri ture reçu. S'il n' y a pas de
correspondance entre les deux - ce qui en théorie ne devrait pas se produire si le rédacteur a
correctement évalué les caractéristiques propres à chacun des axes -, le réviseur peut
décider de ne pas réviser le texte ou de le réécrire en tout ou en partie selon l'entente qu'il
prend avec le client.
S'il Y a adéquation ou adéquation partielle, le réviseur peut ensuite améliorer les qualités
communicationnelles du texte, soit sa lisibilité et son intelligibilité, pour ajuster ou rendre
le sens produit par le rédacteur plus compréhensible, et ce, en fonction du contexte
d'éInission et de réception (les caractéristiques du texte en quelque sorte, voir § l.1.2). La
lisibilité d'un texte peut être définie comme sa facilité de lecture (Beaudet, 2001), alors que
l'intelligibilité d'un texte peut être définie comme sa facilité de compréhension pour un
public donné (Arcand et Bourbeau, 1995~ Préfontaine et Lecavalier, 1996). La lisibilité se
caractérise par des marques de surface visuelle et linguistique et «constitue la porte
d'entrée grâce à laquelle le lecteur accède au sens du texte» (Trudeau, 2003: 35)~
l'intelligibilité «relève d'opérations effectuées dans la structure profonde du texte» et
représente le fond informatif du message transmis (Beaudet et Clerc, 2002~ voir aussi
Trudeau, 2003).
Les recherches en lisibilité et en intelligibilité ont permIS de dégager des pnncIpes
rédactionnels pour faciliter la lecture et la compréhension. On les trouve formulées de
diverses façons dans des guides de rédaction professionnelle, technique et administrative
(notamment Anderson, 1991; Arcand et Bourbeau, 1995; Cajolet -Laganière, Collinge et
Laganière, 1997~ Clerc, 2000~ Billingham, 2002), ainsi que dans les guides de rédaction en
langue claire et simple (voir Trudeau, 2003). Par exemple, on dit d'alléger les formulations,
de clarifier le sens des énoncés, d'éliminer les mots inutiles, de faire ressortir les liens et
d'adapter le texte au lecteur. Ces principes sont le plus souvent accompagnés de conseils
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 63
rédactionnel s sur les façon s de les appliquer et d'exemples qui illustrent chacun d ' eux. En
outre, de nombreux conseils concernent l' emploi des mots dans le texte:
Utili sez des Inots courts ~
Préférez les mots concrets aux mots abstrait s~
Employez de préférence des mots simples et préci s aux mots à la mode et aux néologi smes ~
Employez des mots connus~ employez des mots courants ~
Éliminez les mots inutiles~ Répétez les mots clés ~ employer toujours le même mot pour la même notion ~
Choisissez de préférence des mots qui n 'ont pas de genre propre~
Utilisez des verbes à la place des noms ~
Évitez le jargon et les clichés, les expressions étrangères et les régionalisines;
Évitez les termes techniques ou les définir lorsque vous ne pouvez les éviter;
Éliminez les ambiguïtés.
Ainsi, pour améliorer l'efficacité communicationnelle du texte qu ' il révise, un réviseur
professionnel pourrait apporter des modifications lexicales pour suivre l'un de ces conseils.
3.4 Deux préoccupations émergentes Des notions de qualité linguistique et d'efficacité communicationnelle que je viens
d'expliciter se dégagent deux préoccupations en lien avec les deux conceptions de la
révi sion qu'ont les réviseurs professionnels (voir sous § 1.1.4.1). La première est de nature
normative alors que la seconde est de nature communicationnelle. Ainsi, pour résumer, les
modifications qui corrigent des problèmes liés à des règles et principes linguistiques ainsi
qu'à des conventions d'usage traduiraient une préoccupation normative, tandis que celles
faites pour faciliter la lecture et la cOlnpréhension du texte par le destinataire visé
relèveraient de la préoccupation communicationnelle.
Toutefois, dans la pratique, les modifications des réviseurs, en particulier les modifications
lexicales, rendent-elles tO~ltes compte de ces deux préoccupations? Les réviseurs font-ils
parfois des modifications qu ' il s ne peuvent expliquer autrement que par des choix
esthétiques ou personnels? En outre, les modifications lexicales sont-elles davantage faites
pour rendre un mot ou un segment du texte conforme à une règle ou pour répondre à un
Chapitre 3 : Les modifications lexicales 64
principe communicationnel et tenir compte du lecteur? Ce sont des questions auxquelles je
répondrai en analysant les modifications lexicales de réviseurs professionnels.
Cha·pitre 4· Méthodologie
4.1 Les objectifs Ma recherche vise globalement à mieux comprendre les modifications lexicales faites par
les réviseurs professionnels dans leur tâche de révision 1. Mon objectif général est de
préciser la nature et les raisons d'être de ce type particulier de modifications. Pour y
parvenir, j'apporte des réponses aux questions suivantes: Qu'est-ce qui caractérise les
modifications lexicales? Quels problèmes les réviseurs ont-ils détectés pour justifier ces
modifications et comment les ont-ils résolus? Quelles préoccupations révisionnelles
traduisent ces modifications?
Mes objectifs spécifiques sont donc les suivants:
1) Décrire les caractéristiques des modifications lexicales effectuées par les réviseurs;
2) Préciser et catégoriser les problèmes qui ont amené les réviseurs à faire des modifications lexicales;
3) Produire une grille de résolution de problèmes représentative du travail des réviseurs professionnels sur les unités lexicales;
4) Déterminer les préoccupations révisionnelles des réviseurs.
Je souhaite ainsi démontrer que le travail des réviseurs professionnels sur les mots est plus
complexe qu'il n' y paraît et ne se résume pas qu'à vélifier l'orthographe d'usage et la
grammaire. Cette étude contribue également à faire connaître les préoccupations des
réviseurs à propos de l'emploi des mots dans les textes et fournit des explications sur les
façons dont ils s' y prennent pour améliorer les tex tes en modifiant le lexique.
4.2 La méthodologie Les données que j'ai utilisées pour mon étude proviennent de l'expérimentation faite pour
la recherche sur le processus de révision des réviseurs professionnels (Bisaillon, Fortier et
Préfontaine, 2003) à laquelle j'ai collaboré. Grâce à cette expérimentation, j'ai pu obtenir
des textes originaux et révisés, des verbalisations ainsi que des entrevues. À partir de ce
1 Je rappelle qu'une modification lexicale est une opération d'écriture effectuée dans un texte à cause du
problème que pose, pour le réviseur, la présence ou ]' absence d'une unité lexicale.
Chapitre 4 : Méthodologie 66
matériau, j'ai développé ma propre méthodologie pour analyser les modifications lexicales
des six réviseurs ayant participé à la recherche, et j 'ai rempli mes objectifs de recherche.
Dans les pages suivantes, je présente l'expérimentation, la façon dont les données ont été
recueillies et compilées, puis j'explique en détail comment j'ai bâti et analysé mon corpus
de modifications lexicales.
4.2.1 L'expérimentation Pour coller à la réalité professionnelle, l'expérimentation a été effectuée en situation réelle,
c'est-à-dire que les réviseurs ont révisé, dans un environnement non contrôlé, un texte pour
lequel ils avaient reçu un mandat. Les sujets, 4 femmes et 2 hommes, étaient des réviseurs
professionnels pigistes ou salariés, à temps plein ou à temps partiel. Leur expérience en
révision variait deI an et 7 mois à 23 ans. Chacun avait pour tâche de réviser un texte de
type différent (voir le tableau 4.1). Je donnerai , au chapitre 5, des précisions au sujet des
réviseurs et de leur tâche avant de présenter les résultats pour chacun d'eux (voir § 5.1).
Tableau 4.1 - Expérience des réviseurs et type de document révisé par chacun d'eux
Sujets Expérience Type de document à réviser
Réviseure 1 2 ans Plan d'aménagement
Réviseure 2 18 ans Manuel didactique
Réviseur 3 23 ans Article de magazine
Réviseur 4 12 ans Livre grand public
Réviseure 5 3 V2 ans- Rapport ministériel
Réviseure 6 1 an, 7 mois Guide écologique
L'expérimentation a été réalisée entre mai et novembre 2003. Elle s'est déroulée en trois
telnps, cOITespondant à chacun des modes de collecte des données, soit l'enregistrement de
l'activité révisionnelle, la verbalisation rétrospective et l'entrevue2.
2 Toutes les étapes de l'expérimentation ont d 'abord été réali sées avec un réviseur professionnel , à titre préex périmental, afin de nous assurer de la bonne marche de l'expérimentation et d'apporter des changements au besoin:
Chapitre 4 : Méthodologie 67
4.2.1.1 L'enregistrement de l'activJté révisionnelle U ne assistante de recherche et moi avons d'abord observé et filmé le travail de chaque
réviseur professionnel pendant deux heures3. Cette partie de l'expérimentation avait lieu le
matin. L'enregistrement vidéo a permis d 'obtenir des données sur la nature et l 'ordre des
interventions dans le texte révisé, la nature des modifications, les difficultés éprouvées par
les réviseurs ainsi que les outils utilisés ' (informatiques et papiers). Il a également servi au
moment de la verbalisation (voir § 4.2.1.2).
Nous avons par ailleurs obtenu des réviseurs une copie de la verSIon originale et de la
version révisée de leur texte pour nous aider à mieux repérer les modifications au moment
de la verbalisation et pour faciliter leur compilation par la suite (voir § 4.2.1.5).
4.2.1.2 La verbalisation rétrospective Pour connaître les raisons des modifications faites par les réviseurs lors de la première
partie de l'expérimentation, nous avons utilisé la méthode des protocoles verbaux. Cette
méthode a été lnise au point par des chercheurs pour rendre observables les activités
.mentales (Ericsson et Simon, 1985). Elle consiste à demander aux sujets de décrire à voix
haute ce qu'ils font et ce à quoi ils pensent pendant qu'ils exécutent une tâche particulière
(verbalisation concun~ente ou concomitante) ou après l'avoir exécutée (verbalisation
consécutive, rétrospective ou différée).
La verbalisation rétrospective, enregistrée sur support audio, a été préférée à la
verbalisation concomitante, car nous voulions respecter la situation réelle des réviseurs.
COlnme ils visent la rapidité et l'efficacité dans l'exécution de leur tâche et qu'ils n'ont pas
à dire tout haut ce qu ' ils font et à justifier les changements qu'ils apportent à un texte, il n'y
avait pas d'intérêt à utiliser la verbalisation concomitante. De plus, parce que la révision est
très exigeante sur le plan cognitif, nous ne voulions pas ajouter une activité qui risquait de
perturber ou d'interférer avec la tâche principale.
} Cette durée a été déterminée pour le projet de recherche sur le processus de révision. Le but était d 'observer différents révi seurs à l' œuvre, et comme certaines tâches demandaient plusieurs jours de travail , une limite du temps d 'observation a dû être imposée tout en respectant les contraintes suivantes: l'observation devait durer suffisamment longtemps pour avoir une idée de la démarche des réviseurs et obtenir une variété de modifications, mais pas trop longtemps pour permettre de faire la verbalisation, la compilation et l'analyse des données dans un délai rai sonnable.
Chapitre 4 : Méthodologie 68
Pour minimiser les risques d'oubli et de reconstruction (Gufoni, 1996: 26; Ericsson et
Simon, 1985 : 19), la verbalisation a eu lieu peu de temps après l'exécution de la tâche, soit
environ deux heures après la fin de celle-ci. De plus, pour aider les réviseurs à se rappeler
ce qu ' ils faisaient et ce à quoi ils pensaient au moment de la révision, nous leur faisions
voir l'enregistrement de leur activité (Gufoni, 1996: 28). Chaque fois qu'ils apportaient
une modification, nous leur demandions pourquoi ils l'avaient faite. Les justifications ainsi
obtenues m'ont servi pour détemliner les problèmes détectés par les réviseurs.
4.2.1.3 L'entrevue La dernière étape de l'expérimentation consistait en une entrevue semi-dirigée visant à
obtenir des données sociologiques sur chacun des réviseurs (formation, expérience, etc.),
des renseignements sur leur processus de révision (détection des problèmes, automatismes,
conscience du destinataire, etc.) ainsi que sur, leur environnement (clients, lieu de travail,
etc.). L'entrevue, également enregistrée sur support audio, avait généralement lieu après la
verbalisation ou le lendemain selon la disponibilité des sujets. Les données
complémentaires recueillies à cette étape m'ont surtout permis de mettre en relation des
éléments du contexte de révision propres à chacun des réviseurs avec des comportements
particuliers observés lors de leur travail de révision sur les unités lexicales.
4.2.1.4 La transcription des enregistrements oraux L'autre assistante de recherche et moi avons transcrit les verbalisations et les entrevues des
six réviseurs. Nous n'avons pas employé de protocole de transcription particulier (notation
précise des pauses ou respect de la prononciation, par exemple), car cela n'était pas requis.
Nous avons par contre identifié les interlocuteurs et numéroté les tours de parole des
réviseurs. Par exemple, EXPI : V.60 correspond au soixantième tour de parole de la
réviseure 1 lors de la verbalisation rétrospective et EXP4 : E.80 indique le quatre-vingtième
tour de parole du réviseur 4 lors de l'entrevue.
4.2.1.5 Les listes de modifications Les six enregistrements vidéo ont été visionnés afin de dresser pour chacun la liste des
modifications apportées dans le texte, et ce, dans l'ordre de leur apparition. Les
modifications ont alors été délimitées en fonction de l'opération d'écriture effectuée
(addition, suppression, remplacement et déplacement) et de l'unité textuelle modifiée dans
Chapitre 4 : Méthodologie 69
le texte (caractère, mot4, groupe de mots, proposition, phrase, groupe de phrases,
paragraphe et texte). Nous avons également émis un certain nombre de règles pour borner
. les modifications et simplifier leur décompte, dont quelques-unes se sont imposées au
moment de la codification (Bisaillon et autres, 2004-non publié). Ainsi:
• Quand une modification était annulée dans l'opération suivante, elle n'était pas cOInptée puisque le réviseur revenait tout de suite au texte original. Par contre, si la modification apportée au texte était modifiée après plusieurs opérations, elle était comptée.
• Quand le réviseur copiait un extrait de texte dans un document extérieur et venait le coller dans le document qu'il révisait, nous comptions le copier-coller comme un remplacement si le réviseur effaçait immédiatement après l'extrait qui était remplacé. Par contre, nous jugions ce copier-coller comme un ajout si le réviseur continuait à travailler dans le texte avant d'effacer l'extrait que le copier-coller remplaçait.
• Quand le déplacement n'était pas immédiat, c'est-à-dire qu'une ou plusieurs opérations apportées au texte pouvaient être faites entre l'effacement d'une unité et l'ajout d'une autre unité (ou le contraire), mais que le résultat du travail montrait bien que c'était un déplacement que le réviseur avait fait, nous considérions cette modification comme telle.
• Quand il y avait deux changements pareils ou plus (même opération, unité touchée, aspect du texte et justification) à l'intérieur d'une phrase ou d'un paragraphe, nous comptions cela pour une modification puisque le réviseur voulait régler un problème. Par exemple, le réviseur qui a remplacé trois virgules par des pointsvirgules dans une énumération ve11icale parce que les éléments étaient trop longs pour admettre les virgules (Le guide du rédacteur, 2001 : § 3.1.3). La codification était alors la suivante: l'opération est un remplacement, l'unité touchée est le caractère et l'aspect est la ponctuation.
• Quand il y avait deux changements ou plus nécessitant des opérations différentes sur une unité touchée (par exemple l'ajout d'un mot dans un syntagme suivi du déplaceinent de ce syntagme dans une phrase), nous comptions cela comm~ deux modifications ou plus, selon les cas.
• Quand le réviseur apportait une modification à un segment composé d'une ponctuation et d'un mot, d'un groupe de Inots ou d'une proposition (par exemple, l'ajout du segment souligné dans la phrase suivante: Cet honzme, si bon et généreux, a été accusé de fraude.), nous considérions qu'il n'y avait qu'une modification, soit l'ajout d'une proposition. Dans ce cas, l'unité textuelle dominante n'est pas la double virgule.
4 Le mot était défini comme « la plus petite unité d ' une langue qui puisse avoir une signification par ellemême et qui puisse exister comme unité indépendante d'une phrase »; sa « forme graphique est généralement précédée et suivie d'un blanc dans un texte» (GDT). Cette catégorie incluait également les abréviations (ex. : Mme), les acronymes, qui sont ' des sigles qui peuvent être prononcés comme des mots (ex. : NASA) et les sigles (ex. : OQLF).
Chapitre 4 : Méthodologie 70
Enfin, comme le réviseur professionnel révise constamment le texte de l 'auteur et ses
propres modifications apportées au texte original, nous avons tenu compte des
modifications portant sur le texte original et sur le texte déjà modifié. Dans les deux cas, le
travail est le même: le réviseur veut améliorer les textes (Bisaillon et autres , 2004-non
publié).
Chacune des modifications a été numérotée (1, 2, 3, etc.) et décri te de façon à ce que nous
sachions l'opération d'écriture, la portion de texte modifiée et son résultat, de même que le
numéro de la ligne où se situait la modification dans le texte à réviser (L.1 , L.2, L.3 , etc.)5.
Nous avons de plus ajouté le numéro de la verbalisation dans laquelle le réviseur décrivait
ou justifiait la modification effectuée (V.1, V.2, V.3, etc.) pour repérer plus rapidement les
unités de sens au moment de la codification (L'Écuyer, 1990 : 261). Enfin, d'autres actions
et interventions des réviseurs ont aussi été décrites dans les listes à l'aide de lettre (A, B,
C, etc.), par exemple les recherches dans des ouvrages de référence et la rédaction de notes
pour eux -mêmes ou adressées aux auteurs. Pour avoir une idée de ce à quoi ressemblent les
listes de modifications, j'ai reproduit à l'annexe D les deux premières pages de la li ste des
modifications du réviseur 4. Ces listes ont grandement facilité, d'une part, le repérage des
modifications lexicales et, d'autre part, les étapes ultérieures de codification et d'analyse.
En tout, 1061 modifications ont été décrites et plus de 265 autres actions ou interventions
relatives à la révision des textes.
4.2.2 La constitution du corpus de modifications lexicales C'est à partir des listes de modifications et des verbalisations des réviseurs que j 'ai établi le
corpus de modifications lexicales. J'ai repris chacune des modifications décrites et je n'ai
retenu pour mon analyse que les changements effectués dans les textes à cause d'un
problèlne que causait, pour le réviseur, la présence ou l'absence d'une unité lexicale.
Les modifications dont l ' unité modifiée était une unité lexicale correspondaient à des
modifications lexicales, tout comme celles qui touchaient un ou deux caractères d ' une unité
5 Nous avons numéroté les lignes des versions électroniques des textes avant révision à l'aide de la fonction mi se en page (disposition) et nous avons procédé de façon manuelle pour les copies papier des textes.
Chapitre 4 : Méthodologie 71
lexicale. Ainsi, dans l ' exemple 1, les deux modifications de la réviseure 1 sont de nature
lexicale:
Exelnple 1 (EXPI: M.53 et M.55)
Texte original Le camping du lac du Coq, pour a part, possède 14 emplacements et l' agrandi ssement prévoi~
9 empl acements supplémentaires. Texte révisé Le camping du lac du Coq, pour sa p~rt , comprend 14 empl acements et l 'agrandi s ement prévoi t 9 emplacements supplémentaires.
Dans la première modification, l ' unité visée est la même que l'unité modifiée, soit le verbe
conjugué possède, alors que, dans la seconde, l ' unité visée est aussi un verbe conjugué,
prévoir, mais l'unité modifiée est un caractère (- e) . On pourrait arguer que l'unité visée
dans la deuxième modification est le morphème grammatical -oie [-oit,] , marquant la
troisième personne du singulier des verbes en -oir à l ' indicatif présent, et que, de ce fait, il
s' agit d ' une modification morphologique plutôt que lexicale. Toutefois, comme les
morphèmes lexicaux et grammaticaux sont les constituants des mots, j'ai considéré que les
modifications touchant ces segments sont incluses dans les modifications lexicales. En
effet, rares sont les réviseurs qui pointent immédiatement un morphème comme source de
problème dan s une phrase ~ leur unité d'analyse minimale est généralement le mot, comme
c ' est le cas lorsqu 'on décompose une phrase en ses constituants immédiats.
Les modifications apportées à des groupes de mots qui forment des locutions sont aussi
considérées comme des modifications lexicales puisque le sens de ces locutions ne se
déduit pas de la cOlnbinaison du sens de chacun des m.ots qui les composent (voir § 3.2 et
l ' exemple 2). Les locutions ont été relativement faciles à reconnaître, grâce notamment
aux dictionnaires.
Exelnple 2 (EXP3: M.231)
Texte original Pour renforcer le caractère d ' ensemble du bâtiment, le revêtement du toit de la lucarne reprendJe même matériau et la même façon que la toiture [ ... ]. Texte révisé Pour re nforcer le caractère d ' ensemble du bâtiment, le revêtement du toit de la lucarne reprend en principe le même matériau et la même façon que la toiture [ ... ].
Il est à noter que j ' ai écarté du corpus les modifications apportées à des noms propres, à des
sigles et à des acronymes (par exemple, Sainte-Anne de la Pérade, devenu Sainte-Anne-de-
Chapitre 4 : Méthodologie 72
la-Pérade, EXP4 : M.108). Les premiers ne sont pas , en principe, « des [unités lexicales]
de la langue parce qu'ils n' ont pas de sens. » (Lehmann et Martin-Berthet, 2003 : 5). Quant
aux sigles et aux acronymes, ils forment des noms propres (Lehmann et Martin-Berthet,
2003 : 169).
Trouver les autres modifications lexicales parmi les modifications dont le segment modifié
était plus grand qu 'une unité lexicale, que ce soit un groupe de mots , un syntagme, une
proposition ou une phrase, a demandé plus d ' analyse. J'ai en effet dû recourir aux
verbalisations afin de voir si , pour les réviseurs , c ' était un problème avec une unité lexicale
qui avait causé la modification d'un segment plus important d ' une phrase ou de la phrase
elle-même. Les exelnples 3 à 6 montrent comment, à partir des verbalisati?ns, j ' ai
considéré qu'une modification était de nature lexicale ou non.
Dans l'exemple 3, la réviseure 2 met l'accent sur la locution en plus de; elle la cible
directement en disant que cette unité ne peut pas ' être suivie d 'un verbe à l'infinitif.
L'exemple 4 met en cause le nom époque. Celui-ci ne convient pas pour désigner la
préhistoire selon cette même réviseure . Ces deux modifications sont lexicales.
Exemple 3 (EXP2: M.268)
Texte original En plus d'associer ces deux notions, il [Lipovestsky] accorde à la religion chrétienne une part non négligeable, quoique indirecte , de l' émergence de la mode en Occident. Texte révisé Outre qu'il associe ces deux notions, il [Lipovestsky] accorde à la religion chrétienne une part non négligeable, quoique indirecte, de l ' émergence de la mode en Occident. Verbalisation En plus d 'associer, en plus de avec un verbe à l'infinitif n' est pas français. (EXP2 : V.429)
Exemple 4 (EXP2: M.98)
Texte original Dès la préhi stoire , le désir de se différencier des autres est un impératif incontournable des conduites humaines. À cette époque, on veut d ' abord se di stinguer des animaux , et la modification de l'apparence représente un excellent moyen d'y arriver. Texte révisé Dès la préhistoire, le désir de se différencier des autres est un impératif incontournable des conduites humaines. [O]n veut d'abord se distinguer des animaux, et la modification de l'apparence représente un excel1ent moyen d'y arriver. Verbalisation [la préhi stoire] c' est pas une époque [ . . . ] (EXP2 : V.196); alors ici j'ai remplacé le, j ' ai enlevé À cette époque puisqu 'on vient de dire que c ' était pas une époque (V.197 ).
Chapitre 4 : Méthodologie 73
Par ailleurs, dans l' exemple 5 ci-dessous, le réviseur 4 pointe le complément du nom de
fanûlle comme n 'étant pas nécessaire. Pour lui , c'est l'information qu ' apporte le
complément qui est inutile dans le contexte et pas seulement l ' unité de ou l ' unité f amille.
Cette modification n'est donc pas lexicale. De même, l ' exemple 6 ne concerne clairement ·
pas une unité lexicale. Le révi seur n ' aime tout simplement pas la fOlmulation que l 'auteur a
employée pour exprimer une idée.
Exemple 5 (EXP4: M.156)
Texte original La plupart du temps, à la maison c'était la mère, par foi s le père, qui se chargeai t de couper le cheveux des gens de la maiso n. [ . . . J La mère de famille ne réussissait pas toujours bien [ ... J. Texte révisé La plupart du temps, à la mai son c'était la mère, parfoi s le père , qui se chargeai t de couper le chev ux des gens de la maison. [ ... J La mère ne réussissait pas toujours bien [ ... J. Verbalisation la mère c 'est tout, c ' pas nécessaire de mettre mère de famille (EXP4 : VA2S ).
Exemple 6 (EXP4: M.195)
Texte original Certains barbiers furent de tous méti ers, tel Joseph-André Doyon, surnommé Ti-Fin , qui était forgeron et fabriquait des voitures à chevaux et des voiturettes pour enfants. Texte révisé Certains barbi ers exercèrent toutes sortes de métiers, tel Joseph-André Doyon, surnommé Ti -Fin , qui était forgeron et fabriquait des voitures à chevaux et des voiturettes pour enfants. Verbalisation f urent de tous métie'rs, non , c 'est pas beau c ' est pas, ça me paraît, j 'aimais pas ça, j 'aime pas ça du tout (EXP4 : V.S90); on comprend , c 'est sûr, mais c ' est pas, moi en tout cas, ça me paraît pas beau ça .. Exercèrent toutes sortes de métiers, c'est mieux (EXP4 : V.S92).
Bien sûr, quelques cas ont été plus difficiles à trancher, notamment quand les réviseurs
enchaînaient deux modifications , mais qu ' ils n'en justifiaient qu'une seule. Par exemple, la
réviseure } a remplacé un nOln par un autre de nombre différent (ni à la con(ornûté ~ ni
aux normes, EXP} : M.44) et a, dans le même élan, fait l'accord du déterminant au début
du syntagme (à la ~ aux). Comme elle n ' a pas pris la peine de justifier le changement de
déterminant, j ' ai considéré qu 'elle avait modifié un syntagme (groupe prépositionnel)
plutôt que deux unités une après l ' autre; la modification est tout de même lexicale puisque
l ' unité visée à la base est le nom conformité.
Enfin , j ' ai , à quelques occasions, apporté de légers changements aux listes de modifications
constituées lors de la recherche sur le processus de révision quand j'estimais qu ' une
modification décrite caèhait en fait deux modifications lexicales. L 'exemple sui vant , où le
Chapitre 4 : Méthodologie 74
réviseur donne une rai son pour le changement du verbe et une autre pour celui du nom,
illustre bien le cas.
Exemple 7. (EXP3 :·M.235 et M.235.5)
Texte original On respectera le patron de pose afin de maintenir [M.235] la qualité [M.235.5] de l ' ouvrage. Texte révisé On respectera le patron de pose afin de préserver l'esthétique de l'ouvrage. Verbalisation On avai t ici de respecter afin de maintenir, c 'est maintenir ici que j 'ai changé (EXP3 : V.599)~ parce que le mot me semblait mieux choisi . .. dans le contexte (V.60 1)~ [ ... ] pour maintenir la qualité de l' ouvrage bon ben on parle pas de la qualité de l'ouvrage en termes de solidité ou de . .. (V.603 ) c'est l' esthétique ici là (V.604)~ c'est pas des raisons utilitaires, c'est des raisons esthétiques (V.607).
En revanche, je n ' ai compté qu 'une modification là où nous avions compté comme deux
modifications l ' ajout d'un point final et le remplacement de la minuscule initiale du mot
. suivant par une majuscule quand, par exemple, le réviseur voulait couper la phrase en deux
parce qu ' elle était trop longue. J'ai considéré que ces actions ne formaient qu ' une
modification, car « la majuscule de phrase est un signe complémentaire au point » (GPFD,
1999 : 287). Ces modifications, peu fréquentes, n'ont pas été analysées et elles n 'ont été
pri ses en compte que pour le calcul du nombre total de modifications.
En considérant les divers ajustements apportés aux listes de modifications , j ' ai dénombré
en tout 1064 modifications pour l'ensemble des réviseurs (au lieu de 1061), desquelles 464
visaient une unité lexicale, ce qui représente 43,6 % des modifications.
4.2.3 L'analyse des données Comme je l ' ai expliqué au chapitre 2, j ' ai dû élaborer une classification particulière pour
l ' étude des modifications lexicales étant donné que celles qui existent déjà ne conviennent
pas. Pour décrire chacune des modifications selon les unités d ' analyse que j'ai retenues, j ' ai
bâti une grille de codification avec le logiciel EXCEL (voir la grille à l'annexe E). Je me
suis inspirée de la structure de base de la grille que nous avions produite pour codifier
l ' ensemble des modifications des réviseurs (Bisaillon et autres, 2004-non publié), et j ' ai
repri s certaines des rubriques descriptives, dont les renseignements nécessaires pour
locali ser les modifications dans les textes et les verbalisations correspondantes.
Chapitre 4 : Méthodologie 75
Les données pour repérer les modifications lexicales figurent dans les premières colonnes
de la glille présentée à l'annexe E. On trouve:
• le numéro de la modification qui apparaît dans la liste de modifications (MOD) ;
• l'emplacement de la modification dans le texte à réviser (LI);
• le numéro de la verbalisation correspondante (v);
• le passage du texte avant la modification (AV ANT MODIFICATION);
• le passage du texte après la modification (APRÈS MODIFICATION).
Les unités d'analyse que j'ai précisées pour répondre à mes objectifs de recherche sont
quant à elles les suivantes:
• l'OPÉRATION d'écriture (voir sous § 4.2.3.1);
• l'UNITÉ LEXICALE VISÉE (voir sous § 4.2.3.1);
• l'UNITÉ TEXTUELLE MODIFIÉE (voir sous § 4.2.3.3);
• l'UNITÉ TEXTUELLE FINALE (voir sous § 4.2.3.3);
• le MOYEN SÉMANTIQUE UTILISÉ (OU AUTRE) (voir sous § 4.2.3.3);
• la DIMENSION CONCERNÉE (voir sous § 4.2.3.1);
• le PROBLÈME DÉTECTÉ (voir sous § 4.2.3.2);
• la PRÉOCCUPATION DU RÉVISEUR (voir sous § 4.2.3.4).
Chacune de ces unités d'analyse est explicitée dans la section à laquelle je fais un renvoi et
je définis également les différentes catégories qu'on trouve sous chacune d'elles.
Enfin, pour noter des informations complémentaires sur les modifications, j'ai ajouté quatre
autres ru briques à ma grille d'analyse. La ru brique JUSTIFICATION a servi à inscrire les
verbalisations des réviseurs qui expriment les raisons de leurs modifications lexicales. Dans
la rubrique COMMENTAIRE, j'indiquais parfois des précisions sur le type de problème
détecté (animisme ou elnploi abusif, par exemple), la sous-catégorie de problèmes
(anglicisme lexical ou anglicisme sémantique, par exemple), des références ou toute autre
observation que je jugeais utile sur la façon de codifier. Je marquais, sous la rubrique
modification antérieure (MOD. ANT.), les modifications des réviseurs devenues nécessairesà
la suite d ' une ou de plusieurs autres modifications. La dernière rubrique servait à tenir le
compte des modifications lexicales portant sur des unités déjà modifiées par les réviseurs
(DÉJÀ MOD.).
Chapitre 4 : Méthodologie 76
Ma classification et la codification des données que j'ai faite ont été validées par ma
directrice. En se basant sur un guide que je lui avais fourni, elle a analysé plus de 75 % des
modifications lexicales. Lorsque nous n'arrivions pas aux mêmes résultats, nous anal ysions
ensemble les modifications et nous prenions une décision par consensus.
4.2.3.1 Les caractéristiques des modifications lexicales Pour atteindre le premier objectif de ma recherche, j ' ai choisi de détailler les modifications
lexicales selon l'opération d'écriture réalisée, l'unité lexicale visée et la dimension
linguistique sur laquelle elles portent.
1) L'opération d'écriture
« Les opérations d'écriture sont des actions faites sur le texte ou une partie de celui-ci »
pour le modifier (Bisaillon et autres, 2004-non publié). Je n'ai considéré que les opérations
communes à la majorité des classifications existantes, soit l'addition, la suppression, le
remplacement et le déplacelnent (voir § 2.1 0). J'ai adapté les définitions de celles-ci en
précisant les unités textuelles sur lesquelles les opérations d'écriture sont possibles pour
qu'il s'agisse de modifications lexicales.
L'addition (A) est un ajout de caractères (un ou deux) ou d'une unité lexicale là où il n'y
avait rien auparavant. Comme je l'ai déjà mentionné, l'ajout peut se faire sur le texte
original de l'auteur ou sur le texte déjà modifié par le réviseur.
La suppression (s) est l'effacement de caractères (un ou deux), d'une unité lexicale ou d'un
groupe de lTIotS (par exemple un groupe prépositionnel, un groupe nominal ou une
subordonnée, qu'il soit complet ou non) qui était dans le texte rédigé par l'auteur ou dans le
texte déjà modifié par le réviseur.
Le remplacement (R) correspond le plus souvent à la combinaison succeSSIve d'un
effacement et d'un ajout - ou l'inverse - d'une unité lexicale ou de caractères (un ou deux).
Il peut aussi s'agir de la combinaison d'un effacement et d'un ajout - ou l'inverse - d'un
groupe de mots (rarement une phrase), de la combinaison d'un effacement d'une unité
lexicale et d'un ajout d'un groupe de mots ou de l'effacement d'un groupe de mots et de
l'ajout d'une unité lexicale.
Chapitre 4 : Méthodologie 77
Enfin, le déplacement (D) est vu comme l'effacement d'une unité lexicale existante pour
aller l'ajouter ailleurs dans le texte. Le plus souvent, l'unité est déplacée à l ' intérieur d ' une
phrase.
II) L'unité lexicale visée
Une façon de décrire les modifications lexicales consiste à classer les unités visées selon les
parties du discours auxquelles elles appartiennent (voir sous § 3.2.2)6. Cela donne une idée
des unités qui posent le plus souvent problème dans les textes. J ' ai retenu pour mon analyse
les huit parties du discours traditionnellement reconnues, c'est-à-dire le nom (N), le verbe
(v), l ' adjectif (Al) , l ' adverbe (AV), le pronom (p) , le déterminant (D) , la préposition (PR) et
la conjonction (C).
III) La dimension linguistique concernée
U ne caractéristique des modifications lexicales que je jugeais pertinent d'examiner est la
dimension linguistique concernée par ces modifications. Étant donné que les unités
lexicales visées font partie d'un discours, la justesse de leur emploi peut difficilement
s ' évaluer sans recourir à des éléments de sémantique, de morphologie (particulièrement
flexionnelle) et de syntaxe - la lexicologie ad ' ailleurs des ramifications avec ces
composantes de la linguistique. En outre, la révision étant encore faussement perçue dans
l'esprit de bien des gens comme une activité visant essentiellement à corriger
l'orthographe, la grammaire et la syntaxe (aspects lTIorphologiques et syntaxiques), je me
demandais si cette iITIpression valait dans le cas particulier des modifications lexicales.
À partir des problèmes détectés par les réviseurs (voir les catégories ci-dessous, § 4.2.3.2),
j ' ai donc tenté de déterminer à laquelle des dimensions morphologique (MORPH.),
sémantique (SÉM.) ou syntaxique (SYNT.) les modifications lexicales appartenaient.
Toutefois, comme ces trois dimensions ne convenaient pas pour l'ensemble des
modifications, j'ai ajouté à la description les dimensions stylistique (STYL.) et
typographique (TYPO.).
6 Dans le cas d' une addition, l'unité lexicale visée est l'unité ajoutée dans Je texte.
Chapitre 4 : Méthodologie 78
La dimension morphologique (MORPH.) regroupe toutes les modifications apportées dans la
structure des unités lexicales, c'est-à-dire 'tout ce qui a trait à la forme lexicale ou
flexionnelle des unités.
La dimension sémantique (SÉM.) couvre toutes les modifications ayant permis de corriger
ou d'améliorer le sens des unités linguistiques, c'est-à-dire non seulement de unités
lexicales, mais aussi des groupes de mots (groupe verbal, groupe nominal, etc.), de phrases
et des groupements de phrases qui fonnent un texte (Touratier, 2000 : 9). Lorsqu'il y a une
incompatibilité sémantique, par exemple, ce n'est pas tant le sens d'une unité lexicale qui
est en cause que sa mise en relation avec le sens d'une autre unité.
De plus, alors que certains distinguent la pragmatique, c'est-à-dire l'étude de l'usage qui est
faite de la langue dans le discours et la communication, de la sémantique, qui se voit alors
réduit à l'étude de la signification des unités linguistiques et des phrases (notamment
Moeschler et Auchlin, 2000 et Moeschler et Reboul, 1994), je me range du côté de
Touratier (2000) qui conçoit la pragmatique comrne étant « intégrée, et non pas surajoutée,
à la description sélnantique» (Anscombre et Ducrot, 1983: 20, cité dans Touratier,
2000 : 9). Ainsi, la sémantique tient également compte des indications contextuelles et
situationnelles nécessaires à la compréhension des phrases énoncées. De cette façon, la
correction d'une inexactitude (voir §4.2.3.2), par exemple le remplacement de deux par
trois dans il y a deux pon1nles dans le panier parce qu'en réalité il y en a trois, est
considérée comme une modification de dimension sémantique.
La dimension syntaxique (SYNT.) englobe les modifications faites pour corriger la syntaxe.
Elle concerne la nature grammaticale des unités lexicales et les règles qui servent à
expliquer la présence, l'absence et l'ordre des unités lexicales dans les phrases. Par
exelnple, la phrase *Mon neveu la télévision est asyntaxique puisqu'elle ne comporte pas de
verbe: le groupe verbal prédicat est incomplet. Dans ce cas, l'ajout du verbe regarde
corrigerait la syntax~ défectueuse. *Simon a promis de danser avec Cécile et chanter avec
Julie contient une autre erreur liée à la syntaxe causée par l'absence de la préposition de
devant chanter parce que cette préposition doit être répétée devant chaque nouveau
complément, tout comme les prépositions à et en (Grevisse, 1993 : § 995).
Chapitre 4 : Méthodologie 79
La dimension stylistique (STYL.) rend compte des modifications faites pour donner une
forme particulière à l'expression écrite de ]' auteur afin d 'améliorer ou de varier on style.
Cette forme peut reposer sur l 'application de procédés stylistiques et avoir une portée
esthétique (stylistique de l'expression, Guiraud, 1972) ou être basée sur des choix
personnels du réviseur (stylistique de l'individu, Guiraud, 1972). Relèvent par exemple de
cette dimension les modifications faites parce qu ' une unité lexicale est répétée ou crée un
mauvais effet stylistique (voir § 4.2.3.2).
La dimension typographique (TYPO.) regroupe les modifications lexicales qui touchent la
mise en image des unités dans le texte, par exemple les Croisades ~ les croisades (EXP2 :
M.174) et CÉGEP ~ cégep (EXP5 : M.93)7. L 'emploi de la majuscule initiale et la face
des caractères (italique, gras, romain) étant généralement traité dans la section typographie
des sources que j'ai consultées (BDL, 2002-2009; Ramat, 2004; etc.) - et non pas dans la
section orthographe - , la dimension morphologique ne convenait pas pour rendre compte
de ces modifications.
Enfin , quelques-unes des modifications lexicales n'ont pu être classées dans l'une de ces
dimensions linguistiques. C'était le cas notamment de certaines modifications relevant de
problèmes. pressentis, pour lesquelles les justifications étaient insuffisantes pour préciser
l'aspect concerné, et d'autres dont les problèmes sont demeurés inconnus (voir § 4.2.3.2).
Ces modifications ont été regroupées sous la dimension indéterminée (INDÉT.).
4.2.3.2 Les catégories de problèmes détectés et corrigés Pour concrétiser le deuxième objectif, j'ai relevé les problèmes que les réviseürs ont
détectés à partir des justifications qu'ils ont données. J'ai ensuite classé ces problèmes
selon les catégories et sous-catégories auxquelles ils appartiennent. Ainsi, plutôt que
d'analyser les modifications en fonction de leur finalité et des résultats escomptés, comme
7 l'ai considéré que des modifications de ce genre étaient lexicales et non typographiques, car si j'avais analysé l'ensemble des modifications des réviseurs, la typographie n'aurait pas figuré comme une unité visée. En effet, l ' unité lexicale est un composant textuel syntaxique alors que la typographie concerne la manière dont un texte" est imprimé. Pour avoir des catégories d'unité vi sée qui soient de même nature que l'unité lexicale, j 'aurai s sans doute retenu le groupe de mots , la proposition , la phrase et peut-être aussi le paragraphe, mais pas la typographie.
Chapitre 4 : Méthodologie 80
l ' ont fait Bisaillon et ses collaboratrices (2004-non publié; voir aussi § 2.8)8, j ' ai préféré
décrire les modifications lexicales à partir de leur origine, c 'est -à-dire en précisant les
problèmes les ayant rendu nécessaires. Pour connaître ces problèmes, j ' ai analysé le
contenu des verbalisations . des réviseurs. L ' analyse de contenu est « une méthode de
classification ou de codification dans diverses catégories des éléments du document analysé
pour en faire ressortir les différentes caractéristiques en vue d 'en mieux comprendre le sens
exact et précis» (L'Écuyer, 1990: 50). En procédant de la sorte, je m ' assurais d' avoir le
point de vue des réviseurs , car si j ' avai s seulement comparé l ' avant et l 'après des
modifications, les résultats obtenus auraient en partie reflété ma propre compréhension des
modifications. En effet, j ' avais déjà remarqué lors d ' analyses préliminaires que les raisons
données par les réviseurs pour expliquer certaines modifications ne correspondaient pas
toujours à celles que j ' aurais envisagées. De plus, à quelques reprises, les .réviseurs ont
apporté des modifications où il ne me semblait pas · y avoir de problème9. Je devais alors
nécessairement me tourner du côté des verbalisations afin de connaître leur justification.
J ' ai d'abord isolé dans les verbalisations les unités de sens exprimant les rai sons des
modifications lexicales et je les ai copiées dans la grille de codification sous la rubrique
JUSTIFICATION. J ' ai ensuite déterminé les types de problèmes ayant amené les réviseurs à
apporter des modifications lexicales et j'ai créé des catégories pour les classer. J ' en avais
préalablement identifié quelques-unes, mais la plupart ont été induites et reformulées en
cours d'analyse. Dans la grille de codification (voir l'annexe E), c'est sous la rubrique
PROBLÈME DÉTECTÉ que j ~ ai indiqué la catégorie de problème à la source de chacune des
modifications lexicales.
Après plusieurs essais de codifications, de nombreux ajustements, des discussions avec ma
directrice et des vérifications, j'en suis finalement arrivée à une codification satisfaisante
qui respecte les principales qualités des catégories, soit la pertinence, l'objectivation,
l 'exclusivité et la clarté des définitions (L'Écuyer, 1990).
8 Je rappelle que les catégories de justifications expriment des objectifs généraux que les révi seurs se donnent en utili sant divers moyens pour les atteindre (par exenlple, faciliter la compréhension en regroupant les idées qui vont ensemble ou en donnant l'information exacte). 9 En vertu d ' une entente avec les révi seurs, la pertinence et la qualité des modifications· ne font pas l'objet d 'analyses.
Chapitre 4 : Méthodologie 81
Pour éviter toute interprétation erronée, j'ai créé une catégorie Problème inconnu pour
classer les modifications lexicales sur lesquelles les réviseurs n 'ont pas verbalisé et pour
lesquelles il était impossible de définir exactement le problème, car il pouvait se formuler
différemment selon le point de vue adopté. Par contre, même en l'absence de justification,
j'ai pu classer quelques modifications dans une des catégories lorsqu'il n' y avait aucune
équivoque possible sur le problème détecté (le plus souvent une erreur d'orthographe
grammaticale ou de syntaxe). De même, j'ai aussi réussi à classer la plupart des
. modifications dont les justifications se résumaient à «mot inutile » et « mot manquant ».
Dans les quelques cas où les réviseurs énonçaient plus d'un problème pour justifier une
modification, j'ai alors procédé à une double codification (par exemple à la foi s une
incohésion temporelle et une imprécision).
Les réviseurs ont parfois fait des modifications sur la base de préférences. En effet,
lorsqu'on leur demandait pourquoi ils avaient fait tel ou tel changement, soit ils n'hésitaient
pas à dire qu'il s'agissait d'une préférence,. soit ils ne pouvaient donner aucune raIson
objective puis finissaient par dire qu'ils aimaient mieux ce qu'ils avaient écrit:
J'aime mieux ce mot-là tout simplement (EXP3 : V.688);
J'pense c'est une question de préférence là (EXPS : V.444);
J'aime mieux le métier (EXP4; VIOS) - on aurait pu garder leur, mais j'aime mieux le (V.I 06).
Les réviseurs, dans ces cas, ne détectaient donc pas de problème réel ou, s'il leur semblait y
avoir un problème potentiel, ils étaient incapables de le diagnostiquer et s'en remettaient à
une question de goût pour se justifier. Le plus souvent, leur sentiment de la langue ou un
jugement personnel, à propos du style notamment, les incitaient à choisir un autre mot ou
moyen d'expression. ,Je n'ai pas classé ces cas dans la catégorie Problème inconnu parce
que les réviseurs ont commenté leurs modifications - ce qui n'était pas le cas pour les
problèmes inconnus. Étant donné que les réviseurs ne pouvaient détenniner aucun
problème précis, j'ai classé ces modifications dans une catégorie vague que j'ai appelée
Problème pressenti. J'avais d'abord retenu la catégorie Préférence, mais celle-ci faisant
davantage référence à l'unité textuelle finale (ce que les réviseurs ont écrit et préfèrent)
qu'au problème causé par l'unité visée, je me suis ravisée.
Chapitre 4 : Méthodologie 82
Enfin, pour éviter de produire des catégories ne comportant qu ' un élément, j'ai regroupé
sous la catégorie Autre cas deux modifications dont les raisons données ne pouvaient être
ramenées à l'une des catégories de problèmes sans en forcer le sens.
L 'analyse des justifications des réviseurs m'a permis de répertorier vingt catégories de
problèmes causés par 1 a présence ou l'absence d'une unité lexicale dans le tex tes,
auxquelles s'ajoutent les catégories Autre cas , Problème inconnu et Problème pre senti
(voir le tableau 4.2). Je présente ces catégories par ordre alphabétique et, le cas échéant, les
sous-catégories qu 'elles regroupent. J 'ai formulé les définitions en me basant surtout sur
des grammaires (GPFD, 1999; Grevisse, 1993 ; Riegel , Pellat et Rioul , 2001), mais aussi
des manuels de rédaction (Reichler-Béguelin, Denervaud et Jespersen, 1988; Simard,
2005), des ouvrages de stylistique (Kokelberg, 2000; Marquis, 1998) et d'autres ouvrages
de référence (BDL, 2002-2009; Clamageran, Clerc, Grenier et Roy, 2004; Dubois,
Giacomo, Guespin, Marcellesi et Mevel, 1994; Loubier, 2003). J ' illustre de plus chacune
des catégories au moyen d'un exemple présentant la portion de texte avant et après la
modification , exemple auquel je joins la verbalisation du réviseur qui exprime la raison de
la modification 10.
Tableau 4.2 - Les catégories de problèmes ayant donné lieu à des modifications lexicales
Catégories de problèmes
1) Anglicisme XIII) Manque d'uniformité
Il ) Erreur d'orthographe grammaticale XIV) Mauvais lien
III) Erreur d'orthographe lexicale XV) Non-respect d'une règle de présentation
IV) Erreur de syntaxe XVI) Pléonasme
V) Formulation inadéquate XVII) Répétition
VI) Imprécision XVIII) Répétition inutile
VII) Impropriété XIX) Reprise d'information incorrecte
VIII) Incohésion temporelle XX) Vocabulaire non adapté
IX) Incompatibilité sémantique Autre cas
X) 1 nexactitude Problème inconnu
XI) Information non nécessaire Problème pressenti
XII) Lien manquant Total : 23
10 La portion de texte donnée en exemple peut comporter d 'autres problèmes que les réviseurs ont généralement détec tés et corrigés par la suite.
Chapitre 4 : Méthodologie 83
1) Anglicisme
Emploi souvent critiqué comme emprunt abusif ou inutile d' une unité lexicale de forme ou
de sens appartenant à la langue anglaise, ou emploi d' une unité lexicale appartenant au
français formant une structure syntaxique calquée de l ' anglais (Loubier, 2003) 1 1. Ainsi,
cette catégorie regroupe trois types d'anglicismes:
Anglicisme lexical : emploi d ' une unité lexicale de forme (intégrale ou hybride) et de sens appartenant à la langue anglaise;
Anglicisme sémantique: emploi d'une forme lexicale française dans un sens anglais;
Anglicisme syntaxique: emploi d' une unité lexicale française formant une tournure syntaxique calquée de l ' anglais.
Exemple 8 (EXP2: M.241) Texte original Pendant cette vaste période [Antiquité], chaque société développe un costume qui lui est propre; il est alors possible de reconnaître la nationalité d'un individu par son habillement. Texte révisé Pendant cette vaste période [Antiquité], chaque société conçoit un costume qui lui est propre ; il est alors possible de reconnaître la nationalité d ' un individu par son habillement. Verbalisation Alors développer est un anglicisme dans ce sens-là (EXP2 : VAOI).
II) Erreur d'orthographe grammaticale
Cette catégorie regroupe divers problèmes liés à l'emploi grammatical des unités lexicales
dans les phrases. On y trouve les fautes d'accord (par exemple: mauvais accord d'un verbe
avec son sujet, d'un nom avec un adjectif ou d'un participe passé), les erreurs concernant la
conjugaison des verbes et celles portant sur le genre et le nombre des unités (par exemple:
cas des compléments de collectifs ou formes féminines et plurielles irrégulières).
Exelnple 9 (EXP6: M.30) Texte original On y observe également de nombreux escarpement et des vallées étroites et encai ssées. Texte révisé . On y observe également de nombreux escarpements et des vallées étroites et encai ssées. Verbalisation [ ... ] parce que c ' est supposé être au pluriel (EXP6: V.219) .
Il Les emplois susceptibles d'être des anglicismes selon les réviseurs ont aussi été classés dans cette catégorie (voir en particulier les résultats de la réviseure 2 sous § 5.3.2).
Chapitre 4 : Méthodologie 84
III) Erreur d 'orthographe lexicale
Unité lexicale dont la graphie comporte une erreur, qu'il s ' agisse d ' un problème
d 'homophone lexical , de trait d ' union ou simplement d 'une coquille (par exemple :
omission d 'une lettre, absence d ' un accent ou d 'une cédille, inversion de deux lettres ou
répétition indue d 'une lettre).
Exemple 10 (EXP1 : M.63) Texte original L 'emplacement des campings étant déj à établi s, il est possible de constater que les li eux ne présentent aucune interaction du point de vue de la chasse et que l'influence sur la pression de pêche de la rivi ère Barley et du lac du Coq s' avère mjneure vue la « réserve » de quotas di sponibles dans ces cours d 'eau. Texte révisé L 'emplacement des campings étant déj à établi s, il est possible de constater que les lieux ne présentent aucune interaction du point de vue de la chasse et que l'influence sur la press ion de pêche de la ri vière Barley et du lac du Coq s' avère mineure vu la « réserve » de quotas di sponibles dans ces cours d 'eau. Verbalisation vu , ben c'est v-u (EXPI : V.332).
IV) Erreur de syntaxe
Présence ou absence d'une unité lexicale qui occasionne un enchaînement erroné des unités
dans la construction d 'une phrase (par exemple: solécisme, préposition obligatoire non
répétée, omission d'un pronom obligatoire ou d'une particule de négation, expression mal
employée - d'autre part sans d'une part).
Exemple Il (EXP1 : M.29) Texte original Il paraît donc important de pallier .à ces manques afin d ' assurer le respect des sites et des normes environnementales. Texte révisé Il paraît donc important de pallier ces manques afin d'assurer le respect des sites et des normes environnementales. Verbalisation j ' pas certaine qu ' on dit pallier à, j ' pense que c ' est pallie r quelque chose directement, donc juste pour être certaine eh, j 'vais vérifier. Et j ' avai s raison (EXP J : V .206).
V) Formulation inadéquate
Cètte catégorie comporte deux types de problèmes:
La présence d'une unité lexicale rend une proposition ou une phrase lourde ou longue;
La présence ou l'absence d'une unité lexicale ne crée pas assez d 'effet sur le plan stylistique ou elle ne produit pas le bon effet.
Exemple 12 (EXP2 : M.160) Texte original
Chapitre 4 : Méthodologie 85
Parmi les facteurs qui , à travers le temps, on agi sur la façon de concevoir et de fabriquer le costume et sur les matières utili sées, nous retenons particulièrement le climat et le mjlieu physique, la politique et l'économie, les transformations sociales et technologiques et, finalement, la religion. Texte révisé P armi les facteurs qui , dans le temps, on agi sur la façon de concevoir et de fabriquer le costume et sur les matières utili sées, nous retenons particulièrement le climat et le mjlieu physique, la politique et l 'économie, les transformations sociales et technologiques et, finalement, la religion. Verbalisation Parmi les facteurs qui, à travers le temps, eh, je trouve ça très lourd , c'est dans le temps (EXP2 : V.28).
VI) Imprécision
Emploi d'une unité lexicale dont le sens n'est pas assez précis ou défini pour le contexte
dans lequel elle figure, ou absence d'une unité lexicale qui rend le sens d'une proposition
vague ou indéterminé.
Exemple 13 (EXP3 : M.lS0) Texte original Autre avantage: la lucarne permet de se rapprocher du mur extérieur lorsque la pente des versants est prononcée, ce qui augmente l ' espace utile. Texte ·révisé Autre avantage: la lucarne permet de se rapprocher du mur extérieur lorsque la pente du toit est prononcée, ce qui augmente l ' espace utile. Verbalisation C'est plus précis la pente du toit. (EXP3 : V.328).
VII) Impropriété
Emploi d'une unité lexicale dans un sens qu'elle n'a pas. L'unité lexicale existe bien en
français, mais elle est employée dans un sens qui ne convient pas dans le contexte.
Exemple 14 (EXPI : M.I04) Texte original Les lacs fauniques reploésentent les lacs dans lesquels il est possible de retrouver des espèces de poisson à protéger. Texte révisé Les lacs fauniques représentent les lacs dans lesquels il est possible de trouver des espèces de poi sson à protéger. Verbalisation [ ... ] parce qu'on trouve, c'est ça, on ne trouve pas à nouveau (EXP] : V.473).
Chapitre 4 : Méthodologie 86
VIII) Incohésion temporelle
Emploi d'un verbe à un mode ou à un temps qui n'est pas en harmonie avec ceux des autres
phrases d ' un paragraphe ou d 'une portion du tex te.
Exemple 15 (EXP2: M.236)
Texte original En 1930, dans son ouvrage Le rêveur nu, J . C. Flügel a analysé la mode et son évolution sous]' angle de motivations comme la pudeur et le besoi n de se protéger et de se parer, mais sans réellement s'interroger sur son origine. Thortein Veblen aborde l ' impact de l'économie [ ... J. Texte révisé En 1930, dans son ouvrage Le rêveur nu, J. C. Flügel analyse la mode et son évolution sous l 'angle de motivations comme la pudeur et le besoin de se protéger et de se parer, mais sans réellement s' interroger sur son origine. Thortein Veblen aborde l'impact de l'économie [ ... ]. Verbalisation Je demande le présent de l'indicatif (EXP2 : V.392); pour que ça concorde avec les temps de verbe du paragraphe (V.393).
IX) Incompatibilité sémantique
Emploi d'une unité lexicale dont la combinaison avec une autre unité en un constituant
supérieur est sémantiquement anormale ou impossible (verbe et complément, sujet et verbe,
nom et complément, etc.).
Exemple 16 (EXP5 : M.62)
Texte original Bénéficiant d'une fornlation en soins infirmiers, en relations industrielles, en droit et en communication, Hélène [ ... ] a été amené à agir comme porte~parole , arbitre, conciliateur ou procureur pour différents regroupements [ ... ]. Texte révisé Détenant une formation en soins infirmiers, en relations industrielles, en droit et en communication, Hélène [ ... ] a été amené à agir comme porte-parole, arbitre, conciliateur ou procureur pour différents regroupements [.' .. ]. Verbalisation Je pense qu'on bénéficie pas d'une formation, mais qu 'on la détient (EXPS : V.339).
X) Inexactitude
Emploi d'une unité lexicale dont le sens ne correspond pas à la réalité extralinguistique qui
doit être désignée ou exprimée, ou absence d'une unité lexicale qui rend une ~ormulation
inadéquate pour traduire la réalité extralinguistique.
Exemple 17 (EXP4 : M.82)
Texte original Mais, à partir du mois de décembre, monlent des boucheries, le boucher avait beaucoup moins de travail , et ce, jusqu'à quelques semaines après Pâques, ]a fête pascale était surtout marquée par la consomnlation du jambon préparé par les gens eux-mêmes.
Chapitre 4 : Méthodologie 87
Texte révisé M ais, à partir du mois de décembre, moment des boucheries, le boucher avait beaucoup moin de travail , et ce, jusqu ' à quelques semaines après Pâques, la période pascale était surtout marquée par la consommation du j ambon préparé par les gens eux-mêmes . Verbalisation c 'est pas lafête, la f ête pascale, ça aurait été juste la journée de Pâques elle-même alors que c' est toute la période, on mangeait du j ambon pendant plusieurs jours, la période pascale, ben c ' était 40 jours (EXP4 : V. 235).
XI) Information non nécessaire
Emploi d 'une unité lexicale qui apporte une information superflue et non essentielle à la
compréhension d ' un propos.
Exemple 18 (EXP4: M.61 )
Texte original L 'été et l 'automne, les j eunes fill es all aient cueil1ir les petits fruits sauvages qu 'elles vendaient aux chauffeurs et conducteurs du train. Lorsque le train s ' arrêtait aux gares, ceux-c i les reve ndaient ensuite. Texte révisé L ' été et l'automne, les j eunes fill es all aient cueillir les petits fruits sauvages qu 'elles vendaient aux chauffeurs et conducteurs du train. Lorsque le train s'arrêtait aux gares, ceux-ci les reve ndaient. Verbalisation c 'est pas nécessàire de mettre ensuite (EXP4 : V.169); c'est ensuite ou le lendemain ou deux jours aprè , c 'est pas important (V .170).
XII) Lien manquant
Absence d 'un connecteur pour exprimer ou renforcer une relation logique (conséquence,
conclusion, opposition , addition, etc.) ou temporelle (antériorité, postériorité, simultanéité,
etc.) entre des propositions, des phrases ou des paragraphes .
Exemple 19 (EXP3 : M.281)
Texte original De bons solins doivent être installés à l'angle du toit de la lucarne ou des jouées pour empêcher l' infiltration d 'eau. Ces solins de tôle ou de cuivre, selon le cas, peuvent être rouillés, percés ou dégradés : il faut _ les remplacer par des feuillards de tôle semblables . Texte révisé De bons solins doivent être installés à l ' angle du toit de la lucarne ou des jouées pour empêcher l'infiltration d 'eau. Ces solins de tôle ou de cuivre, selon le cas , peuvent être rouillés, percés ou dégradés : il faut alors les re mplacer par des feuill ards de tôle semblables . Verbalisation c 'est une relati on de causalité là que je voulais renforcer tout simplement (EXP3 : V.735 ).
XIII) Manque d ' uniformité
Présence ou absence d ' une unité lexicale qui crée une asymétrie formelle avec une autre
unité syntaxique (groupe nominal , groupe verbal , etc.) précédemment rencontrée dans le
Chapitre 4 : Méthodologie 88
texte ou située à proximité, sans toutefoi s nuire à la lecture et à la compréhension du
propos.
Exemple 20 (EXPI : M.96)
Texte original Camping proj eté, lac du Coq (L.280) Camping proj eté, lac de la Baie (L.281) Camping projeté, au lac Barley (L.282) Texte révisé Camping projeté, lac du Coq Camping projeté, lac de la Baie Camping proj eté, lac Barley Verbalisation j 'enlève le au pour être unifomle (EXP] : V.436) ; parce que les autre il n ' yen avait pas (V.438).
XIV) Mauvais lien
Emploi d ' un connecteur qui n'exprime pas la bonne relation logique (conséquence,
conclusion , opposition, addition, etc.) ou temporelle (antériorité, postériorité, simultanéité,
etc.) entre des propositions, des phrases ou des paragraphes, ou qui exprime une relation
logique ou temporelle qui n'a pas lieu d'être.
Exemple 21 (EXP3: M.177)
Texte original Une grande variété de lucarnes se retrouve en façade , à l'aplomb des murs. Elles font alors partie intégrante de l'élévation. Certaines lucarnes peuvent toutefois être « rentrantes » ou être « sur le versant », les premières sont aménagées en retrait de l'aplomb des murs , les secondes excèdent Je versant de la toiture. Texte révisé Une grande variété de lucarnes se retrouve en façade , à l'aplomb des murs. Elles font alors partie intégrante de l'élévation. Certaines lucarnes peuvent aussi être « rentrantes» ou être « sur le versant », les premières sont aménagées en retrait de l 'aplomb des murs, les secondes excèdent le versant de la toiture. Verbalisation [ ... ] toutefois vient de disparaître. lei j'ai mis un aussi hein, c'est parce qu'y a pas d'opposition. C 'est ça le problème. Autrement dit y en a qui sont à l'aplomb des murs, pis y en a d 'autres qui sont pas à l'aplomb des murs (EXP3 : V.432).
XV) Non-respect d'une règle de présentation
Emploi d ' une unité lexicale dans une fonne qui contrevient à une convention d'écriture
dans un contexte communicationnel donné (par exemple: emploi d ' un générique féminin ,
présence d'une majuscule initiale pour un nom commun, verbe au passé simple dans un
article de magazine, unité lexicale étrangère en romain).
Exemple 22 (EXP2 : M.97)
Texte original
Chapitre 4 : Méthodologie 89
Dès la Préhistoire, le désir de se différencier des autres est un impératif incontournable des conduites humaines. Texte révisé Dès la préhistoire, le désir de se différencier des autres est un impératif incontournable des conduites humaines. Verbalisation c'est pas une époque y ' a jamais de p majuscule à préhistoire (EXP2 : V.196).
XVI) Pléonasme
Emploi non volontaire d'une unité lexicale en association avec une autre qui exprime la
même idée. TI existe deux types de pléonasmes, soit le pléonasme lexical, lorsque la même
idée est exprimée par des unités lexicales appat1enant à des catégories grammaticales
différentes, et le pléonasm~ grammatical (ou redondance), lorsque la même idée est
exprimée par des unités lexicales appartenant à une Inême catégorie grammaticale
(Grevisse, 1993 : § 15,364).
Exemple 23 (EXP2: M.12S)
Texte original Ces tenues [vêtements austères des religieux] de moins en moins portées rappellent souvent les costumes de l'Antiquité ou du Moyen Âge, ce qui n'est guère surprenant puisqu'un grand nombre de congrégations religieuses ont été fondées à ces époques [ ... ]. Texte révisé Ces tenues [vêtements austères des religieux] de moins en moins portées rappellent souvent les costumes de]' Antiquité ou du Moyen Âge, ce qui n'est guère surprenant puisqu'un grand nombre de congrégations ont été fondées à ces époques [ ... ]. Verbalisation [ ... ] congrégation est toujours religieux donc c'est redondant (EXP2 : V.232).
XVII) Répétition
Reprise d'une même unité lexicale ou d'une même forme dans une séquence rapprochée
sans qu'i l y ait de justification stylistique, par exemple pour donner plus de force ou
d'expression à une idée, ou pour créer une allitération. Dans ce cas, l'unité répétée est
remplacée.
Exemple 24 (EXP2: M.164)
Texte original Les régions froides incitent tout naturellement à vouloir des vêtements ajustés , donc à concevoir des vêtements cousus. Texte révisé Les régions froides incitent tout naturellement à vouloir des vêtements ajustés, donc à concevoir des habits cousus.
Chapitre 4 : Méthodologie 90
Verbalisation alors les habits [a] remplacé parce qu 'on a deux fois le mot vêteme(l ts dans la phrase (EXP2 : V. 289).
XVIII) Répétition inutile
Unité lexicale repri se dans un contexte où elle n ' est pas nécessaire pour assurer la
compréhension d 'un propos. Dans ce cas, l ' unité répétée est supprimée.
Exemple 25 (EXP4: M.56) Texte original L 'été et l 'automne, les j eunes fill es all aient cueillir les petits fruits sauvages qu 'ell es vendaient aux chauffeurs et conducteurs de train. [ ... ] Les jeunes fill s [sic] montaient dans le train , ayant reçu suffisamme nt d 'argent pour payer leur transport [ ... ].
Texte révisé L 'été et l 'automne, les j eunes fill es all aient cueillir les petits fruits sauvages qu 'elles vendaie nt aux chauffeurs e t conducteurs de train. [ . .. ] Les fill s [sic] mo ntaient dans le train , aya nt reçu suffisamment d 'argent pour payer leur transport [ ... ]. Verbalisation c' es t pas nécessaire de mettre j eunes, on l' a déjà dit qu ' elles sont jeunes (EXP4: V.174).
XIX) Reprise d ' information incorrecte
Emploi d ' une unité lexicale où l'information repnse n' est pas la bonne, peut porter à
confusion ou est difficilement repérable, ou absence d ' une unité lexicale servant
d ' antécédent. J'ai ainsi regroupé dans cette catégorie les quatre problèmes suivants :
Antécédent absent: absence d'une unité lexicale servant d ' antécédent à une reprise anaphorique;
Antécédent éloigné: emploi d' une unité lexicale ayant une valeur anaphorique dont l'antécédent est trop éloigné dans le contexte;
Mauvaise reprise: emploi d' une unité lexicale (souvent un pronom) servant de reprise à une autre, mais qui ne la représente pas;
Reprise ambiguë: emploi d'une unité lexicale (souvent un pronom) servant de reprise, mais dont l ' antécédent est difficilement déterminable.
Exemple 26 (EXP2 : M.96) Texte original Ces exemples, et d 'autres encore qui seront commentés tout au long de ce t ouvrage, confirment l ' importance du vê teme nt et des accessoires comme réponse aux besoins de parure qui se rencontre nt dans la plupart des sociétés humaines. Texte révisé Ces exemples, et d ' autres encore qui seront comme ntés tout au long du présent ouvrage, confirment l'importance du vêtement et des accessoires comme réponse aux besoins de parure qui se rencontrent dans la plupart des sociétés humaines. Verbalisation
Chapitre 4 : Méthodologie 91
[ . . . ] le cet ouvrage, le c-e-t va remplacer, renvoie à un ouvrage dont il est question dans les li gnes plus haut alors que c'est absolument pas le cas (EXP2: V.194).
XX) Vocabulaire non adapté
Emploi d'une unité lexicale qui n'est pas appropriée dans le contexte situationnel de
communication en raison de sa connotation. Ainsi, l'unité peut ne pas convenir parce que:
Elle appartient à un registre de langue différent (familier ou littéraire vs non marqué, oral vs écrit) ou à un niveau socioprofessionnel différent de celui des destinataires (vocabulaire courant vs vocabulaires spécialisés);
Elle est marquée stylistiquement (ironique, plaisant, vulgaire, etc.).
Exemple 27 (EXP3 : M.I05)
Texte original Pour mieux travailler une fenêtre , elle peut être enlevée et réparée en atelier ou au sol. Texte révisé Pour mjeux restaurer une fenêtre , elle peut être enlevée et réparée en atelier ou au sol. Verbalisation c'est parce que c 'est un niveau de langue aussi là c'es t la langue parlée ça tra vailler une f enêtre (EXP3 : V.163).
J'ai par ailleurs constaté qu'il y avait généralement correspondance eptre une catégorie de
problèmes détectés et une dimension linguistique, comme le montre le tableau présenté à
l'annexe F.
4.2.3.3 La résolution des problèmes Pour remplir le troisième objectif, j'ai conçu une grille descriptive des problèmes et des
solutions relatifs à ces modifications. Cette grille, plus détaillée que celles de Hayes et
autres (voir la figure 2.2 sous § 2.7), peut servir de complément au modèle descriptif de la
révision professionnelle (voir la figure 1.1 sous le chapitre 1). Elle présente les catégories
' de problèmes et les moyens utilisés pour résoudre ces problèmes, tout en tenant compte des
opérations d'écriture, des unités modifiées et des unités finales. J'avais également considéré
les unités visées, mais comme la grille devenait trop complexe pour être facilement
consultée, j'ai laissé tomber cet aspect.
La grille d'analyse (voir l'annexe E) m'a d'abord pennls de noter la composition
(morpho )grammaticale des unités textuelles touchées par les modifications grâce à la
Chapitre 4 : Méthodologie 92
rubrique UNITÉ TEXTUELLE MODIFIÉE et à ses catégories Caractère (CAR. ), UNITÉ lexicale et
GROUPE DE MOTS OU PHRASE. Pour chacun des problèmes détectés et corrigés, j 'ai ainsi
déterminé si les réviseurs sont intervenus sur un ou deux caractères seulement de l ' unité
visée, sur l'unité elle-même ou sur un groupe de mots à l'intérieur duquel se trouve l 'unité
visée. Lorsque des caractères étaient modifiés, j ' indiquais lesquels. Dans le cas des unités
lexicales modifiées, je précisais lesquelles en reprenant les mêmes parties du discours que
pour les unités visées, soit le nom (N), le verbe (v), l'adjectif (Al) , l ' adverbe (AV), le
pronom (p), le déterminant (D), la préposition (PR) et la conjonction (c). Les groupes de
mots étaient pour leur part décrits selon qu ' ils formaient des groupes nominal (GN), verbal
(GV, incluant le groupe infinitif et le groupe participe), adjectival (GAl.) ou prépositionnel
(GPR) , ou encore des subordonnées (SUB .) . Ces groupes pouvaient être complets ou nOD. J 'ai
ensuite décrit de la même façon les segments obtenus à la suite des modifications sous
UNITÉ TEXTUELLE FINALE.
La comparaison des données dans ces deux rubriques a permis de déterminer ce qui a été
modifié et par quoi. Les réviseurs ont-ils changé une unité lexicale par une autre de même
catégorie - un adjectif par un adjectif par exemple - , ou par une au'tre de catégorie
différente - un adverbe par une conjonction par exemple? Ont-ils remplacé un groupe de
mots par un autre de même catégorie - un groupe verbal par un groupe verbal - ou de
catégorie différente - un groupe prépositionnel par une subordonnée relative, par exemple?
Dans les cas où une unité lexicale était substituée à un groupe de mots, ou l ' inverse, j ' ai
considéré qu ' il y avait même catégorie grammaticale quand, par exemple, un nom était
remplacé par un syntagme norrlÎnal, et qu'il y avait catégorie grammaticale différente
quand, par exemple, un adjectif était remplacé par un groupe prépositionnel.
J ' ai procédé de manière différente avec les caractères modifiés. Ceux-ci sont le plus
souvent remplacés par d'autres caractères, mais il ne lue semblait pas suffisant d ' indiquer
seulement cela. Ayant remarqué que les modifications de caractères sont le plus souvent
associées à des erreurs d'orthographe grammaticale, d'orthographe lexicale ainsi qu'à des
problèmes de présentation, j'ai choisi d'établir la liste des moyens employés pour corriger
ces divers problèmes. Ainsi, p0l:lr rendre l'orthographe et la grammaire conformes aux
normes, les réviseurs ont pu, par exemple, appliquer l'orthographe d'usage, accorder le
Chapitre 4 : Méthodologie 93
verbe avec le sujet, accorder le participe passé employé avec avoir ou être, ou accorder
l ' unité en genre et en nombre avec le nom. De même, pour respecter les règles de
présentation , les réviseurs ont généralement modifié la typographie en utilisant la
minuscule ou l'italique. Pour noter ces indications , j ' ai ajouté une colonne AUTRE MOYEN à
la grille d ' analyse, qui est par la suite devenue MOYEN SÉMANTIQUE UTILISÉ (ou AUTRE)
(voir l'annexe E).
Enfin , j ' ai complété l'analyse des modifications lexicales en tentant de décrire leur résultat
sur le plan sémantique. Je me suis toutefois contentée d 'une analyse sémantique sommaire,
mon but n ' étant pas de décrire toutes les nuances sémantiques possibles. Une analyse trop
fine aurait de toute façon surchargé inutile-ment la grille de résolution de problèmes. Après
plusieurs essais de classelnents, j'ai finalement opté pour trois distinctions sémantiques
principales: sens équivalent, sens plus précis et sens différent. L ' emploi d ' une unité
lexicale ou d'un groupe de mots de sens équivalent peut être un synonyme ou un quasi
synonyme qui tient compte de la variation sociostylistique des unités (conflit pour guerre,
montant pour piédroit), un équivalent français dans le cas d'un, anglicisme (exploitaient
pour opéraient) , un pronom de reprise (celui-ci pour cuir) ou une périphrase (avoir la
priorité pour prioriser). Le sens plus précis renvoie grosso modo à une unité ou à un
groupe de mots qui , employé dans un contexte donné, clarifie une partie d'un énoncé ou
apporte des précisions sur celui-ci par des traits sémantiques particuliers (ouvrir pour avoir
- un commerce en 1904 - ou siéger pour être - à un conseil d'administration). Dans
quelques cas difficiles à analyser, les verbalisations ont été prises en compte, car elles
révélaient les intentions des réviseurs de vouloir préciser en apportant une modification ou
une autre. Les unités et les groupes de mots qui en remplacent d'autres de sens différents
n ' ont quant à eux que peu ou pas de traits sémantiques communs (par exemple, le
remplacement de toutefois par aussi ou de bénéficiant par détenant). C'est dans la rublique
MOYEN SÉMANTIQUE UTILISÉ (OU AUTRE) que j'ai indiqué les distinctions sémantiques.
Une fois chacune des modifications lexicales codifiées dans la grille d'analyse, j'ai élaboré
une grille de résolution de problèmes pour regrouper les données. J'ai calculé et indiqué, à
la fin de cette grille, le nombre d'occurrences par réviseur pour chacun des problèmes et
des moyens employés pour les résoudre afin de savoir lesquels sont les plus fréquents.
Chapitre 4 : Méthodologie 94
4.2.3.4 Les préoccupations reflétées par les modifications lexicales J 'ai complété mon analyse des modifications lexicales et atteint mon quatrième objectif en
associant chacune des catégories de problèmes (ou sous-catégories) à la préoccupation
révisionnelle dont elle rend principalement compte. Cela permet de connaître les
préocc,-:!pations des réviseurs à propos de l ' emploi des mots dans les textes qu 'i ls ont
révisés . J'ai établi que les préoccupations pouvaient être de nature normative,
communicationnelle, esthétique ou personnelle.
Étant donné le but des réviseurs , qui est d' assurer la qualité linguistique et l 'efficacité
communicationnelle des textes, il est normal de penser que la majorité des modifications
lexicales reflètent des préoccupations normative et communicationnelle. La plupart des
catégories de problèmes répertoriées ont d ' ailleurs été faciles à trier en fonction de l 'une ou
de l'autre de ces préoccupations, mais quelques-unes semblaient toucher aux deux
préoccupations. J'ai alors tranché selon la préoccupation la plus apparente d'après les
façons dont les problèmes sont traités dans les nombreuses sources que j ' ai consultées
(Anderson, 1991; Arcand et Bourbeau, 1995; BDL, 2002-2009; Billingham, 2002~
Chartrand, 2001; Clamageran et autres, 2004; Kokelberg, 2000; Labasse, 2001; Marquis,
1998; Reichler-Béguelin et autres, 1988; Riegel et autres, 2001; Simard, 2005).
Par ailleurs, certaines catégories ne se rapportent à aucune de ces deux préoccupations.
Elles sont peu nombreuses et, outre la catégorie Problème inconnu à laquelle je n'ai associé
aucune préoccupation, elles ont trait à une préoccupation esthétique ou personnelle.
1) La préoccupation normative
La préoccupation normative regroupe les catégories et sous-catégories dont les problèmes
sont causés par le non-respect des règles et conventions d'usage explicitées dans les
ouvrages de référence ainsi que de certains principes linguistiques qui assurent la cohérence
interne d'un texte. Les modifications lexicales apportées corrigent ainsi des erreurs dans les
textes pour alnéliorer leur qualité linguistique. Sur l'ensemble des catégories, une dizaine
est en lien avec la préoccupation normative. J'énumère ces catégories et j'explique, au
besoin, leur classement dans cette préoccupation.
Chapitre 4 : Méthodologie 95
Anglicisme (lexical , sémantique ou syntaxique)
Les anglicismes sont · généralement considérés comme des emprunts critiqués , abusifs ou
inutiles parce qu ' il existe déjà dans la langue des équi valents disponibles ou en usage
(notamment BDL, 2002-2009; Colpron, 1998; Loubier, 2003 ; Marquis, 1998). C ' est à ces
emprunts non acceptés que les réviseurs font référence lorsqu ' ils di sent qu 'un mot est un
anglicisme.
Erreur d ' orthographe grammaticale;
Erreur d ' orthographe lexicale;
Erreur de syntaxe;
Impropriété
Les impropriétés sont traitées comme des erreurs de vocabulaire qui porte sur le sens d 'un
mot (notamment BDL, 2002-2009; Multidictionnaire de la langue française (Multi), 2003) .
C 'est dans l'idée d ' assurer la qualité de la langue que les réviseurs ont supprimé ces
problèmes et non dans celle de faciliter la compréhension du lecteur.
lncohésion temporelle
« L 'utilisation adéquate des temps et modes verbaux est un phénomène essentiellement
textuel. [ ... ] Le système verbal joue un grand rôle dans la cohérence d 'un texte : il permet
de situer ce qui est dit par rapport au moment de ]' énonciation et de la réception. »
(Chartrand, 2001.) La cohésion temporelle est donc d ' abord vue comme un él ément d 'un
texte qui témoigne de sa qualité plutôt que comme un élément qui favori se la
compréhension de celui-ci par le lecteur.
lncompatibil~ té sémantique
La compatibilité sémantique de deux unités dépend de diverses règles de combinatoire
lexicale liée à la structure de la langue (GPFD, 1999; Polguère, 2003). S ' il y a
incompatibilité, c ' est qu ' une règle n ' a pas été respectée.
Mauvais lien
Les connecteurs « contribuent à la structuration du texte en marquant des relations
sémantico-Iogiques entre les propositions ou entre les séquences qui le composent » (Riegel
et autres, 2001 : 616). Ils facilitent également la cOlnpréhension du texte par le lecteur, mais
seulement dans la mesure où ils sont bien employés. Comme un mauvais lien est une unité
Chapitre 4 : Méthodologie 96
qui n ' exprime pas une bonne relation logique (conséquence, conclusion , opposition ,
addition, etc.) ou temporelle (antériorité, postériorité, simultanéité, etc. ), il constitue une
erreur de cohérence interne du texte.
Non-respect d ' une règle de présentation;
Reprise d ' information incorrecte: antécédent absent et mauvai se repri se
Comme le mentionnent Reichler-Béguelin et ses collaborateurs (1988 : 70), « en langue
écrite, diverses contraintes normatives pèsent sur l'utilisation des rappels anaphoriques » .
L ' une d'elles est que toute expression anaphorique (totale ou partielle) doit nécessairement
avoir un antécédent verbalisé, à moins d'être disponible sous forme « d"'évidence"
situationnelle » (Reichler-Béguelin et autres, 1988 : 71; voir aussi Riegel et autres, 2001 :
611; Clamageran et autres, 2004: 337). Une mauvaise reprise renvoie aussi à l ' aspect
normatif. Dans ce cas, l'unité servant de reprise comporte généralement une erreur de genre
ou de nombre (syllepse). Il peut toutefois également s ' agir de l'emploi d ' un pronom
personnel thème pour remplacer un complément de phrase, un complément d 'un groupe
nominal ou un complément d'un groupe verbal, ce qui n ' est pas possible dans la langue
(Clamageran et autres, 2004 : 336; Marquis, 1988 : 46; Riegel et autres , 2001 : 611 ).
II) La préoccupation communicationnelle
La préoccupation communicationnelle des réviseurs se traduit par des modifications
lexicales faites pour rendre le texte plus facile à lire et à comprendre pour le lecteur cible.
Elle vise l'efficacité des textes. Les problèmes détectés et les modifications qui en
découlent sont étroitement liés aux principes et conseils rédactionnels qui placent le lecteur
au premier plan de la communication (voir § 3.3.2). Les catégories et sous-catégories de
problèmes en lien avec la préoccupation communicationnelle sont les sui vantes:
Formulation inadéquate (longue ou lourde), Imprécision, Inexactitude, Information non
nécessaire, Lien manquant, Pléonasme, Répétition inutile, Reprise d ' information incorrecte
(antécédent éloigné et reprise ambiguë), Vocabulaire non adapté et Autres cas.
Formulation inadéquate: longue ou lourde
Pour alléger la formulation et ainsi améliorer la lisibilité et l'intelligibilité des phrases, on
suggère souvent de revoir les phrases longues et compliquées (notamment Arcand et
Chapitre 4 : Méthodologie 97
Bourbeau, 1995; Conseil supérieur de la langue française (CSLF), 2000: 40; Fahamu,
2008; Marquis, 1988 : 110).
Imprécision
En employant les mots justes et les termes propres, on confère aux phrases et au tex te une
« clarté d'expression qui facilit~ grandement la compréhension du message par le lecteur »
(Simard, 2005 : 431). On peut entre autres clarifier le sens des mots et des phrases en
employant des verbes expressifs, clairs et précis (notamment Anderson , 1991; Fahamu,
2008 ; Simard, 2005), en préférant les mots concrets aux mots abstraits (notamment
Bourbeau, 1988 : 32; Clerc, 2000 : 99; CSLF, 2000: 35; Développement des ressources
humaines, 1993 : 41; Rédiger ... , 2006 : 23) , et en employant des mots simples et précis
plutôt que des mots à la mode et des néologismes (notamment Clerc, 2000: 99;
Développement des ressources humaines, 1993: 34; Labasse, 2001 : 461; Rédiger . . . ,
2006 : 23 ; Simard, 2005 : 429).
Inexactitude
Les problèmes d ' inexactitude sont d 'ordre référentiel et non linguistique. En effet, ces
problèmes témoignent de contradictions entre ce qui est écrit par les auteurs et la réalité, ou
le monde réel, plutôt que de contradictions à l'intérieur du texte même. La con-ection des
inexactitudes n'améliore donc pas la qualité linguistique du texte et ne peut, de ce fait , se
rattacher à la préoccupation normative.
Les inexactitudes sont détectées d'après les connaissances qu'a le réviseur de l 'univers
évoqué par les auteurs, connaissances que le lecteur peut partager ou non. Comme les
informations véhiculées sur le monde réel (les données sur la situation d'énonciation) font
partie du contexte et aident à l'interprétation du message par le lecteur (Reichler-Béguelin
et autres, 1988 : 43-45), la correction des inexactitudes alnéliore l'intelligibilité des textes.
Information non nécessaire
Il vaut mieux éliminer les mots et les informations inutiles, car ils risquent de nuire à la
compréhension des phrases et du message à transmettre (Anderson, 1991: 22-23;
Billingham, 2002; CSLF, 2000 : 73; Labasse : 2001 : 43).
Chapitre 4 : Méthodologie 98
Lien manquant
L ' ajout de connecteurs aide à lier les idées entre e]]es et à lever des ambiguïtés, ce qui
favorise la compréhension des phrases et du texte par le lecteur (notamment Anderson,
1991 : 220; Billingham, 2002; Bourbeau, 1988: 90-91; Développement des ressources
humaines , 1993 : 28; Labasse, 2001 : 44).
Pléonasme
Le pléonasme est parfois envisagé d ' un point de vue normatif comme une erreur de langue
(pléonasme fautif, vicieux ou perverti: Clamageran et autres , 2004: 134; Kokelberg,
2000: 130; Marquis, 1988: 23; Simard, 2005: 152). Toutefoi s, une sui te pléona tique
(pléonasme et redondance) est aussi considérée comme une répétition inutile (BDL, 2002-
2009; Kokelberg, 2000: 129; Marquis, 1998 : 23) et sa correction permet d ' éliminer des
mots non nécessaires à la compréhension du message. La correction des pléonasmes et des
redondances répond donc à un principe d ' économie de mots et d ' information. C ' est le point
de vue que j'ai adopté pour justifier que les modifications apportées pour résoudre ces
problèmes se rapportent à la préoccupation communicationnelle.
Répéti tion inutile
Comme pour les pléonasmes, la suppression des unités répétées élimine les mots inutiles.
Reprise d'information incorrecte (antécédent éloigné et reprise ambiguë)
Reichler-Béguelin et ses collaborateurs (1988 : 79) expliquent que d ' autres règles à l ' égard
de l'emploi des reprises anaphoriques relèvent « clairement [ ... ] d ' une sorte de déontologie
de l'échange verbal écrit, où le point de vue et les intérêts du destinataire-décodeur sont
privilégiés ». On se positionne ainsi du côté du lecteur pour expliquer les problèmes
d'antécédent éloigné et de reprise ambiguë. En effet, si le lecteur ne peut déterminer
l'antécédent d'un pronom de reprise dès qu'il lit ce pronom parce qu'il ne figure pas dans le
contexte immédiat, la reprise se fait mal et le rythme de la lecture est brisé. Également, le
lecteur fait face à une ambiguïté quand plusieurs groupes nominaux peuvent jouer le rôle
d'antécédent d'un même pronom. À ce propos, Reichler-Béguelin et ses collaborateurs
(1988 : 79) mentionnent:
il ne suffit pas, semble-t-il, que le lecteur "puisse" par un effort de raisonnement comprendre ce qu'a "voulu dire" le scripteur. [Le lecteur]
Chapitre 4 : Méthodolog ie 99
attend de l ' auteur du texte que soient évitées avec soin les ambiguïtés de cette sorte, même si elles ne sont bien souvent que théoriques pour peu que l ' on se donne la peine de recourir au contexte et aux exigences de la vraisemblance.
V ocabulaire non adapté
L ' emploi d'unités lexicales qui conviennent à la situation de communication et qui sont
adaptés au lecteur contribue grandement à produire un texte intelligible, donc efficace sur le
plan communicationnel.
Autre cas
Les deux modifications classées dans Autre cas ont été apportées par les réviseurs pour
clarifier le sens des énoncés, donc pour aider le lecteur à mieux comprendre les phrases.
III) La préoccupation esthétique
La préoccupation esthétique peut être définie par la recherche de la beauté (de la phrase et
de l ' ensemble textuel), le plus souvent en recourant à des procédés stylistiques, mais aussi
en uniformisant la présentation visuelle. Les changements faits dans cette optique ne vi sent
donc pas à répondre à une règle ou à faciliter la lecture ou la compréhension. Il s sont
apportés par les réviseurs pour améliorer l'apparence visuelle du texte, créer des effets et
varier le style. Les réviseurs ont ainsi une préoccupation esthétique lorsqu ' ils font des
modifications lexicales pour corriger des problèmes appartenant à l ' une des trois catégories
suivantes: Formulation inadéquate (manque d'effet stylistique ou mauvais effet
stylistique), Manque d'uniformité et Répétition.
Formulation inadéquate (manque d'effet stylistique ou mauvais effet stylistique)
Le manque d'effet stylistique peut dénoter une méconnaissance de · certains procédés
stylistiques de la part du rédacteur. Un Inauvais effet stylistique est généralement détecté
quand un rédacteur a mal agencé des unités lexicales ou a mal appliqué un procédé
stylistique connu. Dans les deux cas, le réviseur ajuste le style de la formulation pour
améliorer une proposition ou une phrase.
Manque d ' uniformi té
L'asymétrie de forme détectée par les réviseurs entre deux unités syntaxiques ou plus ne
constitue pas une erreur sur le plan de la norme ni ne rend la lecture plus difficile pour le
Chapitre 4 : Méthodologie 100
lecteur. Sa correction vise seulement à améliorer]' esthétique d'une phrase ou d'une portion
du texte.
Répétition
La répétition ne nuit pas à la compréhension d'un propos, mais elle dénote une pauvreté
d'expression et est aussi perçue comme « déplaisante pour la vue et l 'oreille » (Marqui ,
1998: 112; Simard, 2005: 435). Comme l'unité répétée n'est pas supprimée mais
remplacée, il n'y a pas non plus d ' économie de mots qui justifierait le classement de cette
catégorie sous la préoccupation communicationnelle.
IV) La préoccupation personnelle
La préoccupation personnelle est associée aux modifications des réviseurs qui repo ent ur
des impressions, des préférences et des jugements individuels. Elle regroupe seulement les
modifications de la catégorie Problème pressenti (voir § 4.2.3.2). Bien sûr, les jugements
personnels sont souvent de nature esthétique puisque les réviseurs ont dit préférer leur
formulation parce que l'autre n'était pas belle, parce que la leur sonnait ou se disait mieux ,
ou encore avait l'air plus élégante. Toutefois, COlllme les modifications basées sur ce type
de commentaires ne paraissaient répondre à aucun principe stylistique reconnu (stylistique
de l'expression, voir sous § 4.2.3.1) et semblaient dans quelques cas dénoter une habitude
rédactionnelle des réviseurs, j'ai estimé qu'elles reflétaient une préoccupation personnelle
plutôt qu'esthétique. Pour valider ce choix, j'ai soumis une quinzaine d'étudiants d'un
cours de révision 12 à un test de perception. l'ai bâti un court questionnaire dans lequel j ' ai
transcrit les neuf phrases où se trouvaient les modifications lexicales faisant l'objet de ces
commentaires esthétiques. Parfois la phrase originale apparaissait en premier et parfois, en
second. J'ai demandé aux étudiants de dire, pour chacune des paires de phrases présentées,
laquelle leur paraissait plus belle, plus élégante ou se lisait le mieux. Les résultats n'ont pas
permis de faire consensus sur l'amélioration esthétique des passages modifiés. En effet, les
phrases qui semblaient plus belles ou plus élégantes aux yeux et aux oreilles des étudiants
ne correspondaient que dans une faible proportion aux phrases révisées. Les jugements
esthétiques des réviseurs ne représentent pas des jugements collectifs. Les choix
stylistiques des réviseurs sont donc personnels et relèvent de la stylistique individuelle.
12 FRN-22982 Réécriture et révision 11, automne 2006.
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Chapitre 5· Présentation et analyse des modific~tions lexicales des réviseurs professionnels
Ce chapitre décrit et analyse les modifications lexicales faites par les réviseurs selon les
différents critères que j'ai retenus. Les résultats ainsi expo és me permettent de répondre
aux questions posées et d'atteindre mes objectifs de recherche.
Je présente d ' abord brièvement le contexte de révision et la délTIarche de chacun des
réviseurs car ils aident à comprendre les résultats subséquents. Par la suite, je décri s les
caractéristiques des modifications lexicales (objectif 1) et je précise les problèmes qui ont
amené les réviseurs à faire des modifications lexicales (objectif 2). Je présente également
une grille de résolution de problèmes représentative du travail des réviseurs professionnels
sur les unités lexicales (objectif 3). Enfin, je termine . ce chapitre en décrivant les
préoccupations révisionnelles des . réviseurs (objectif 4 ). Je serai alors en mesure de
répondre à mes questions de recherche:
1) Qu ' est-ce qui caractérise les modifications lexicales?
2) Quels problèmes les réviseurs ont-ils détectés pour justifier ces modifications et comment les ont-ils résolus?
3) Quelles préoccupations révisionnelles traduisent ces lTIodifications?
5.1 Le contexte et la démarche des réviseurs Pour chaque réviseur, je donne les principaux éléments du contexte de révision (voir § 1.1)
dans lequel il se situait au moment de l'expérimentation ainsi que la démarche (voir § 1.2)
qu'il a adoptée au cours de la réalisation de son mandat. Comme on le verra dans l'analyse,
certains éléments du contexte et de la démarche ont influencé et expliquent un bon nombre
de modifications lexicales.
~- ----- ---
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 102
5.1.1 La réviseure 1 La réviseure 1 comptait parmi les plus jeunes de l ' expérimenta.tion. Elle possède un
baccalauréat en linguistique ainsi qu 'un certificat en rédaction professionnelle 1 obtenus à
l'Université Laval. Au moment de l'expérimentation, elle détenait presque deux années
d ' expérience en révision. Elle a acquis cette expérience au sein d ' un organisme québécois
voué à la conservation de la faune où elle travaille à temps plein.
Cette réviseure conçoit la révision comme un travail qui consiste l) à structurer un texte en
regroupant les idées pour avoir un contenu clair, 2) à vérifier si les phrases sont claires et
précises et si le vocabulaire est adéquat pour le destinataire, et 3) à enlever les fautes, les
impropriétés et les anglicismes (EXP 1 : E.64). Sa vision de la révision est donc à la foi s
communicationnelle et normative. De plus, pour elle, la révi sion inclut la réécriture: « On
peut faire une réécriture en faisant une révision » (EXP 1: E.65), par exemple en
reformulant des phrases qui contiennent trop de compléments ou une ponctuation
surabondante, qui comportent des éléments n'ayant pas de lien explicite entre eux , ou
encore dont le sens est difficile à comprendre.
Cette jeune professionnelle connaît bien le profil sociodémographique des destinataires des
textes qu ' elle révise. Selon le genre et le sujet des textes, il s ' agit soit de la clientèle de
zones d'exploitation contrôlées (zecs) ou des membres du conseil d'administration de
celles-ci, en bonne partie des gens de 50 ans et plus, soit des fonctionnaires du ministère
des Ressources naturelles (MRN)2. Pour ce qui est des connaissances linguistiques , il est
difficile d'en juger, mais il semble qu'elle en a emmagasiné un bon nombre, en partie grâce
à son certificat en rédaction. En plus des erreurs de grammaire et d'orthographe, elle
reconnaît des solécismes, des janotismes, des anglicisInes et des impropriétés, mais elle
admet qu ' elle trouve difficile de détecter toutes les impropriétés et tous les anglicismes:
des fois on [de] vient tellement habi tué d ' entendre un Inot à toutes les sauces qu'on ne sait même pas qu'il ne faut pas l'utiliser dans un contexte. Comme un congé férié. On entend ça à tour de bras. Faut pas dire ça. Une journée fériée ou un congé tout simplement, mais congé férié ça exi ste pas pis tout le monde dit ça (EXPl : E.70).
1 À l'époque, le certificat s'appelait certÏ:ficat en rédaction technique. 2 Depuis 2005 , il s' agit maintenant du mini stère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 103
La réviseure 1 travaille presque toujours dans les locaux de l'organisme, mai s nou n ' avons
pas pu procéder à l'expérimentation dans ce milieu pour di verses rai sons pratiques. TI a
alors été convenu de filmer la réviseure chez elle dans un bureau aménagé au sou -sol. Ses
seuls ouvrages de référence étaient le Mu,lti et Le Petit Robert, mais elle en a bien d 'autres
en temps normal, dont le GDT, Ternûum et ConjugArt, Le Colpron (Colpron , 1998), le
Ramat de la typographie (Ramat) et Le bon usage (Grevisse, 1993).
Le mandat de la réviseure 1 consistait à faire la révision linguistique . d ' un texte portant sur
l ' aménagement des campings dans une zec. Le contenu du texte avait déjà été examiné et
approuvé par une autre personne. Le document comprenait 26 pages (interligne .et demi ,
police de caractères Arial narrow 12 points). Il s ' intégrait dans le plan de développement
d'activités récréatives de la zec en question et il était destiné à des fonctionnaires du MRN.
La démarche de révision observée correspond bien à celle que la révi seure a dit suivre.
Celle-ci a fait une première démarche sur support papier, même si elle devait remettre une
version révisée en format électronique. Elle a eu recours aux deux modes de lecture: elle
lisait d ' abord un paragraphe pour en comprendre le contenu puis elle relisait chacune des
phrases qui le composaient pour les évaluer. Elle a parfois con~igé des erreurs
d'orthographe, de grammaire et de ponctuation évidentes lors de la lecture pour
comprendre. Elle se concentrait sur les mots et la structure de la phrase, à l'affût de la
moindre erreur ou du moindre problème. La -réviseure portait ainsi son attention à tous les
aspects du texte en même temps. Elle a tenté de régler les problèmes au fur et à mesure
qu'elle les détectait, mais lorsqu'elle n ' y arrivait pas, elle prenait des notes et marquait les
segments de texte qu'elle devait revoir. Lorsqu ' elle terminait un paragraphe dans lequel
elle avait fait de nombreuses modifications, elle le relisait parfois pour vérifier, sinon elle
passait à la lecture (pour comprendre) ·du paragraphe suivant.
Pendant les deux heures d'enregistrement de sa tâche de révision, la réviseure 1 a évalué
avoir réalisé environ le tiers de son travail. Elle a effectué une première démarche de
révi sion sur les 13 premières pages du document (incluant la page titre). Il s ' agit de son
rythme habituel puisqu'elle estime réviser cinq ou six pages à l'heure selon le type de texte.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 104
5.1.2 La réviseure 2 Au moment de l'expérimentation en 2003, la réviseure 2 cOlnptait 18 ans d'expérience et
travaillait pour une maison spécialisée en édition au collégial et à l'université. Elle acceptait
aussi des contrats de révision pour des musées et pour Les publications du Québec, la
maison d'édition du gouvernement du Québec.
Le mandat qu'elle venait de se voir confier quand elle a consenti à participer à
l'expérimentation consistait en la révision linguistique et la coordination du projet d ' édition
d'un livre portant sur l'histoire des vêtements et de la mode. Celui-ci est destiné à des
étudiants du cégep inscrits à un progralnme de design de mode. Au départ , le manuscrit
comptait 500 pages écrites à interligne et demi non justifié à droite (police de caractères
Palatino Il points ou semblable) et comportait 140 illustrations et 50 tableaux.
Le contenu scientifique de l'ouvrage avait été revu et approuvé avant qu'elle en
entreprenne la révision linguistique. Pour cette professionnelle, la connaissance du sujet
n'était donc pas nécessaire parce que cela n'influait pas vraiment sur son travail: « Si on
me dit qu'une orange est bleue, je le crois. Tant que je ne sais pas qu'une orange, c'est pas
bleu» (EXP2: V.455). Lorsqu'elle connaît bien le sujet d'un tex te par contre, elle est
davantage portée à proposer des ajouts sur le plan informatif, Inais elle précise qu'il s'agit
alors de suggestions. L'auteur peut ne pas en tenir compte.
La réviseure se donne comme buts en révision de rendre le texte clair, lisible et le plus
possible sans anglicismes. Sa vision de la révision est essentiellelnent _normative et porte
sur la forme du texte:
Réviser c'est chasser la chenille anglicisante. C'est apporter des corrections pour bonifier un texte, ne pas se substituer à l'auteur, corriger les anglicismes, les fautes de syntaxe, la ponctuation, les participes passés. C 'est aussi reformuler à l'occasion, ça peut aller jusqu'à la réécriture, mais en respectant le style de l'auteur. (EXP2 : E.66)
L'importance qu'elle accorde à la «chasse» aux anglicismes dans les textes est en lien
direct avec sa formation, puisqu'elle détient un baccalauréat en traduction (anglais-
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 105
français). Elle considère d'ailleurs que son domaine d'études lui permet de « déceler plus
facilement des formes fautives anglaises [et] des anglicismes» (EXP 2 :E.23).
Les connaissances générales et linguistiques de la réviseure semblent excellentes , sa longue
expérience lui ayant permis d'en accumuler beaucoup. Elle ad' ailleurs, sur le plan de la
langue, développé de nombreux automatismes au cours des années, que ce soit pour la
correction des ' anglicismes, des impropriétés , des règles d'accord, de la syntaxe ou de la
ponctuation. Par exemple, elle corrige systématiquement un pronom démonstratif suivi
d'un participe (celle offerte devient celle qui est offerte). Elle ne e souvient plus de la règle
précise, mais elle pense qu'il s'agit d'une règle de syntaxe. C'est l'expérience qui lui a
appris qu'elle devait apporter cette correction. Le Petit Robert donne pour sa part cette
construction comme un emploi critiqué.
La réviseure travaille principalement chez elle, Inais elle a aussi un bureau dans les locaux
de la maison d'édition où elle peut réviser. C'est d'ailleurs à cet endroit qu 'a eu lieu
l'expérimentation. Elle avait comme ouvrages de référence Le Petit Robert, Le Petit Robert
des noms propres et le Multi. Chez elle, elle a de nombreux autres ouvrages qu'elle peut
consulter au besoin: Le guide du rédacteur, qu'elle considère comme sa bible, Le Grand
Robert, le Grand usuel Larousse, Le Colpron (Colpron, 1998) et le Code typographique.
A vec Internet, elle a aussi accès au GDT et à d'autres sites consacrés à la langue française.
Cette réviseure d'expérience avoue qu'elle fait une seule démarche de révision parce
qu'elle n ' a pas le temps d'en faire une seconde et que cela coûterait environ une fois et
demie plus cher au client de payer pour deux lectures. Il faut dire que la longueur des textes
qu'elle révise s'y prête également moins bien.
Cette réviseure révise toujours sur une version papier. Elle COlnmence par parcourir le texte
pour voir les grandes divisions et se met rapidement à la tâche. Elle recourt seulement à la
lecture évaluative et progresse phrase par phrase. COlnme elle ne fait qu'une démarche, elle
résout les problèmes au fur et à mesure qu'elle les détecte dans le texte. Parfois, elle justifie
ses modifications à même le texte. Par exemple, elle encercle des mots et les lie pour
signaler une répétition ou une anacoluthe, elle écrit qu'un mot est un anglicisme ou une
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modificat ions lexicales 106
impropriété, ou qu ' une formulation peut porter à confusion , et elle renvoie parfois à des
ouvrages de référence ( << voir dans Robert, c ' est un nl minuscule », EXP2 : V .11 4). Quand
elle ne réussit pas à cOlTiger un problème, elle le signale à l'auteur et peut l'accompagner
d'une suggestion. Une foi s la révision terminée, c ' est l'auteur qui apporte lui-même les
modifications qu ' il juge pertinentes, sauf s' il demande à la révi seure de le faire. Il répond
également aux questions qu ' elle lui a écrites dans le texte.
Une caractéristique notable du travail de cette réviseure est qu ' elle ne revient quasiment
jamais sur les modifications qu ' elle a faites, à moins qu ' elle ne se rende compte que le mot
qu ' elle a écrit est présent quelques lignes plus loin dans le texte. Et si elle ne change pas le
mot, elle modifiera la deuxième occurrence du même mot. Contrairement aux autres
réviseurs , elle ne procède pas non plus à une lecture pour valider ses changements, mais il
lui arrive de temps en temps de devoir relire une phrase pour vérifier une modification. La
réviseure considère sa démarche de révision comme complétée quand la dernière page du
manuscri t est tournée.
La réviseure 2 entamait sa tâche de révision au mOlnent de l ' expérimentation. Elle a révisé
les 32 premières pages du manuscrit (9530 mots) dont deux étaient consacrées à la table des
matières. La réviseure estime qu'elle révise en moyenne entre 8 et 10 pages à l ' heure, mais,
selon la présentation du texte, son rythme peut varier de 4 à 12 ou 15 pages à l 'heure. Dans
ce cas-ci , le texte était très aéré et la révi seure s'est rendue à 16 pages à l'heure.
5.1.3 Le réviseur 3 Les 23 années passées à pratiquer la révision professionnelle font du réviseur 3 le plus
expérimenté des six réviseurs ayant participé à la recherche. Ce réviseur a longtemps
travaillé à temps plein dans le dOlnaine, mais, lors de l'expérimentation, il ne révisait plus
que pour le magazine Continuité puisqu ' il occupe un autre travail lui procurant son
principal revenu. Après avoir été employé par le gouvernelnent, où il révisait
principalement des textes administratifs et stratégiques , le sujet 3 a fait le saut du côté des
magazines.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 107
Ce réviseur conçoit très différemment les concepts de révision et de réécriture. Il a un peu
de difficulté à définir la révision parce que ce n'est plus ce qu'il fait, mais il considère que
« c'est d'abord et avant tout linguistique» (EXP3 : E.89) et que ça concerne le caractère
normatif du texte. En revanche, la réécriture consiste à modifier le texte pour clarifier le
message, le simplifier et lui donner du style:
à partir du moment où tu mets le pied dans cet étrier-là, là du style là, clqrté ou simplicité ou eh, forcément tu réécris [ ... ] parce que je considère que ce que j'ai à vendre c'est pas de la révision, c'est de la réécriture ça fait que il faut que je sois capable de justifier le travail que je fais (EXP3 : E.96).
Les modifications qu'il apporte en réécriture se justifient surtout par leur rapport au
lectorat. La réécriture consiste en fait, selon lui, à être le « Inédiateur entre le lectorat [et]
l'auteur» (EXP3: E.89), à rapprocher ces deux personnes qui veulent se parler. Ce
professionnel se préoccupe donc fortement du destinataire quand il réécrit, son but étant
d'amener le texte au lecteur pour que celui-ci y trouve son compte. Mais il n'oublie pas non
plus la fonction des textes et le rôle du magazine dans lequel ils sont publiés: Continuité
fait de l'écriture d'information et existe pour défendre le patrimoine québécois. Ainsi, selon
les sujets, il va pouvoir insister sur la conservation et la restauration des objets plutôt que
sur leur relnplacement.
La formation du réviseur en littérature - il a obtenu un baccalauréat puis commencé une
maîtrise qu'il n'a pas terminée - le prédisposait selon lui à la révision et à la réécriture
« parce que savoir écrire, c'est savoir lire» (EXP3 : E.31) et que la littérature prépare de
bons lecteurs. Ce réviseur dispose par ailleurs de nombreuses sources en cas de besoin. Il se
réfère le plus souvent au Petit Robert, mais il cherche aussi parfois dans le Grand Robert, le
Multi, le Petit lexique des arts décoratifs (Hiesinger et Marcus, 1997), le GDT et Le
nouveau dictionnaire visuel français-anglais (Corbeil, 2002). Internet l'aide également
pour vérifier certaines informations, dont des adresses de courriel ou de sites qui peuvent
être mentionnées dans les textes.
Pour l'expérimentation, le réviseur avait choisi de réécrire un texte d'environ 1400 mots
portant sur les lucarnes. Il travaille toujours chez lui et il communique par courriel et par
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 108
téléphone avec la rédactrice en chef du magazine, de qui il reçoit les textes. Celle-ci lit
habituellement les textes avant et après la réécriture. Le réviseur ne discute pas avec les
auteurs, mais il peut leur poser des questions dans le texte quand il n 'est pas sûr de
comprendre des aspects techniques. Si besoin est, c 'est la rédactrice en chef qui négocie les
révisions avec l ' auteur3.
La démarche de révision de ce professionnel est la même depuis l'avènement des
ordinateurs. Elle se fait en deux étapes: il fai t d ' abord une première démarche sur une
version papier du texte. Cette étape de « débrous aillage » lui donne l ' occasion de connaître
l'ensemble du texte et de voir s' il y a des problèmes de structure et de formulation , ou
encore des passages à couper. Les modifications les plus importantes sont faites lors de
cette étape. Il modifie un passage dès qu ' il détecte un problèlne, mais, souvent, les
changements qu'il apporte ne restent pas tels quels dans la version définitive du texte.
Parfois, il écrit seulement ses idées et c'est à l'étape suivante qu'il ajuste et fignole la
formulation. Cette deuxième délnarche est faite à l'ordinateur. Le réviseur relit alors le
texte en copiant les modifications écrites sur papier ou en les raffinant. Il apporte aussi de
nouvelles modifications. Lorsqu ' il a terminé, il écrit le chapeau de l'article puis il relit
rapidement le texte pour s' assurer que celui-ci coule bien. S'il accroche quelque part, il fait
les dernières corrections qui sont habituellement mineures. À la toute fin, il utilise le
correcteur de W ord pour vélifier qu'il ne reste pas de coquilles.
Pendant les deux heures d'observation de son travail, le réviseur 3 a complété la réécriture
du texte et rédigé le chapeau de l'article. Après la con"ection d'épreuves, il revoit le texte
une dernière fois pour s'assurer que l'auteur a répondu à ses questions et que les
modifications ont bien été apportées, s'il y a lieu. C'est le réviseur qui a le dernier mot sur
le texte.
5.1.4 Le réviseur 4 Le réviseur 4 révise depuis une douzaine d'années des livres non littéraires pour une
maison d ' édition. Pour l'expérimentation, il a révisé un manuscrit portant sur les métiers
3 Il est intéressant de noter que les auteurs des textes qu ' il révi se travaillent bénévolement. Ce sont des experts dans leur domaine (experts de contenu) , mais ils écrivent généralement les textes rapidement, d ' où la nécessité d'avoir quelqu ' un pour les réécrire.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 109
exercés dans les campagnes québécoises avant 1950. Ce manuscri t se composait de plus
d'une vingtaine de textes indépendants de 5 à 10 pages présentant chacun de gens de
métier qui répondaient aux besoins de la population (le lneunier, le fromager, le boulanger,
la coi'ffeuse , le dentiste , le fossoyeur, etc.).
Ethnologue de formation4 et retraité de l'enseignement, ce réviseur fait d 'abord et avant ·
tout de la révision pour son propre plaisir et pour garder l'esprit alerte. Ses connai sances
en ethnologie et en histoire sont parfois mises à profit pour faire de la révision de contenu,
en plus de la révision linguistique, comme c'était le cas lors de l 'expérimentation:
il y ad' abord eh, la révision linguistique, alors le vocabulaire, la grammaire, eh, la façon de faire des phrases , ainsi de suite~ l'auteure aussi attend un peu plus en ce sens que y' a des, c'était des textes qui sont basés , qui sont fait s sur une base ethnologique et historique alors donc eh , l'auteur s'attend à ce que ou je retranche, ou j'ajoute, ou je corrige certaines affirmations ethnologiques et en histoire même chose parce que y' a des fois que l'auteur veut trop en dire et pis ben il faut la contrôler, la restreindre un petit peu (EXP4: V.1).
Les buts qu'il se donne lorsqu'il révise sont justement d'éviter les longueurs en enlevant les
éléments et les faits qui ne sont pas intéressants et de rendre le texte clair, précis et en bon
français (EXP4 : E.88, 97). Sa vision de la révision est donc à la fois communicationnelle et
normative.
Par ailleurs, ce réviseur trouve que les auteurs manquent de vocabulaire lorsqu ' ils écrivent
et qu'ils ne font pas asSez de liens entre les idées. Ces critiques à l' endroi t des auteurs et de
leurs textes ne sont pas étrangères à la formation qu'il s'est donnée en français. Il croit en
effet que sa licence en lettresS le rend plus exigeant envers les textes sur les plans de la
langue et de la forme (EXP4 : E.31-33). Le style pose également problème selon lui parce
qu'il fait défaut dans plusieurs textes (EXP4 : E.l 00-1 02). Le réviseur souligne par contre
qu'il ne cherche pas à faire trop de réécriture parce qu'il veut que l'auteur garde la
responsabilité de son style, mais cela s'impose parfois quand le texte est «vraiment mal
4 Il détient une maîtrise en arts et tradition populaires ainsi qu ' un doctorat en ethnologie de l'Amérique française. S Cette licence est composée des quatre certificats suivants: littérature française , linguistique française , littérature anglaise et linguistique anglaise.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifica.tions lexicales 110
fichu » (EXP4 : V.90). Cette réécriture, « c'est quand on s' introduit jusqu ' à un certain point
dans le texte » (EXP4 : E.90) , par exemple en remplaçant un paragraphe, en déplaçant et en
ajoutant du texte, mais elle peut aussi des foi s se limiter à rédiger des phrases autrement.
Comme les autres réviseurs, le r~viseur 4 a aménagé un bureau chez lui où il s' installe pour
travailler. Il ne révise que sur support papier. Ses ouvrages de référence sont à portée de
main , dont les principaux: le Multi , Le Petit Robert , Le Grand Robert, Le bon usage
(Grevisse) et un dictionnaire des difficultés du françai s. Il possède également un ordinateur
qu ' il ouvre au besoin pour consulter le GDT, la banque de Noms et lieux du Québec
(Commission de toponymie du Québec) ou d ' autres sites Internet. Il travaille en solitaire,
mais il rencontre parfois les auteurs pour discuter des modifications. Celles-ci sont
négociables, le réviseur affirme laisser le dernier mot à l' auteur, quitte à ce que son nom ne
figure pas dans les pages liminaires si les changements proposés n'ont pas été suffisamment
pris en compte par l'auteur (EXP4 : E.115).
Ce professionnel a lui aussi une démarche de révision en deux temps. La première
démarche constitue « l'effardochage » (EXP4 : E.I06), c ' est -à-dire que le réviseur corrige
le gros des problèmes au fur et à mesure qu ' il accroche sur quelque chose. Sur ce point, sa
démarche est selnblable à celle du réviseur 3. Il s ' attarde alors autant au contenu qu ' à la
fonne. Il garde les idées pertinentes de l ' auteur, mais il peut les reformuler à l ' occasion
pour améliorer le style. Il ne vérifie toutefois pas les ex traits d'ouvrages cités et les paroles
de chansons qui figurent dans les textes: « habituellelnent, je ne touche pas à ça. C'est [à]
l'auteure [ de] prendre la responsabilité d'aller voir si son texte est en concordance avec
l'ouvrage d'où il a été tiré» (EXP4 : V.405). La seconde démarche que le réviseur fait à
tête reposée consiste en une lecture plus cursive. Il s'assure alors que le texte se lit bien et il
repère les erreurs mineures qu ' il n'a pas vues lors de la première démarche. Il considère sa
tâche terminée après cette deuxième démarche.
Au moment de l'enregistrement, le réviseur 4 commençait une première démarche de
révision sur le dernier tiers du manuscrit , selon ce qu'il estimait. Il a révisé 24 pages à
interligne et demi , dont l'équivalent de quatre en 'citations et en extraits de chansons. Les
titres des textes étaient La coiffeuse, Le barbier, Le boucher et Le boulanger.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 111
5.1.5 La réviseure 5 La révîseure 5 détient un baccalauréat et une Inaîtrise en linguistique de même qu 'un
certificat en rédaction technique6. Selon ses dires, la lingui stique lui a permis de mieux
maîtriser la langue françai se et le certificat en rédaction lui a rendu familiers les outils de
révision. Sa maîtrise lui a également apporté la « gymnastique de l'esprit » et une méthode
de recherche qui l' aide dans son métier.
Cette jeune réviseure-pigiste ne cumulait que trois années et demie d' expérience en révision
professionnelle. Elle révisait surtout des textes administratifs (rapports annuels), des textes
sur la fi scalité et des textes techniques (guides d ' utili sateurs, de ressources et de logiciels) .
Ses mandats se limitaient le plus souvent à de la révision linguistique, comme celui qu 'elle
avait commencé pour l'expérimentation. Le document qu 'elle venait de recevoir était un
rapport annuel de gestion d' un organisme gouvernemental québécois. Les membres de cet
organisme et des fonctionnaires du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS)
étaient les principaux destinataires du document.
Les buts que cette réviseure se fixe en faisant de la révision linguistique sont de rendre le
texte « le plus près d'un français standard, correct» et « le plus simple possible, sans être
simpliste », et d'« écrire sans fautes» (EXP5 : E.76). Toutefois, elle est souvent incapable
de ne s'en tenir qu'à ça. Elle reconnaît qu'elle a une propension à reformuler des phrases si
elle juge que celles-ci ne coulent pas bien et qu'elle trouve facilement une meilleure façon
de formuler les idées, mais elle le fait aussi parfois sans raison évidente (EXP5 : E.70). Ce
comportement lui vient de la conception qu'elle a de la révision, qui ne se limite pas à
considérer les aspects normatifs du texte:
la révision, c'est d 'une part vérifier si le texte est adapté au public cible, ça toujours, toujours quand je peux le savoir et ensuite c'est de vérifier là, tous les aspects linguistiques là, et communicationnels, si on peut dire, donc la grammaire, le style, le vocabulaire, les accords. Pis encore là, est-ce que le ton est adapté au public, est-ce que les phrases vont être suffisamment claires, suffisalnment simples. L ' argumentation du discours, est-ce qu ' elle est correcte, est-ce que c'est l ' ordre logique de présentation, etc. (EXP5 : E.69).
6 Maintenant appelé certificat en rédaction profess ionnel1e.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 112
La réécli ture, qui correspond à la reformulation de phrases et de passages complets (EXPS :
E.70) , concerne davantage la stnlcture du texte, mais elle fait aussi partie de la révi sion
selon la réviseure.
La réviseure 5 travaille chez elle, et surtout à l ' écran. Ses principaux outils de révi sion so
en version électronique: Le Petit Robert (NPR-CD), le Multi , le GDT, Ternûun1 et Le guide
du rédacteur. À ces références s'ajoutent d ' autres sources Internet - selon ce qu 'elle
cherche à savoir - et la version papier du Français au bureau (FAB).
Cette réviseure est la seule parmi les six professionnels étudiés qui n' a pas une démarche de
révision constante et linéaire. En effet, la réviseure 5 n'a pas vraiment de façon de révi ser
parce qu ' elle supporte difficilement la routine et qu'elle n ' aime pas beaucoup révi ser ligne
par ligne. Elle affirme tout de même avoir quelques tendances selon le type de révi sion
demandé, la longueur et le genre des textes à réviser. Dans ce cas-ci, puisqu ' il s 'agissait de
la révision linguistique d 'un document assez court (une trentaine de pages), elle préférait
travailler à l'écran. Également, comme la structure du document le permettait, elle sautait
parfois des sections après les avoir lues et corrigées rapidement et y revenait plus tard pour
les réviser plus attentivement. On pourrait donc dire que sa démarche consistait à faire une
première révision sommaire de certaines parties du texte puis à commencer une seconde
révision plus longue et minutieuse sur quelques-unes de ces parties avant de reprendre une
première révision d'autres sections, et ainsi de suite.
Au cours des deux heures d'enregistrement, la réviseure 5 a révisé les dix premières pages
du document - équivalent à huit pages pleines à interligne et demi -, ce qui correspond à
peu près au tiers de l'ensemble (environ 2000 mots). C'est un peu moins que son rythme
habituel de cinq pages (pleines) à l'heure, mais les nombreux commentaires insérés et la
quinzaine de recherches faites dans Internet pour vérifier le nom, la graphie et le sigle de
plusieurs noms propres l'ont un peu ralentie.
5.1.6 La réviseure 6 . De tous ceux qui ont participé à l'expérimentation, la réviseure 6 est celle qui comptait le
moins d'expérience, soit seulement un an et sept mois. Elle a débuté comme réviseure-
Chapitr"e 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 113
pigiste après avoir terminé un certificat en rédaction professionnelle, mais elle possède
également un baccalauréat en linguistique françai se ainsi qu ' un certificat en communication
publique.
Cette jeune révi seure voit la révision comme une activité qui consiste « grosso modo » à
régler certains problèmes présents dans les textes, dont des problèmes de vocabulaire, de
grammaire et de syntaxe. La réviseure mentionne aussi qu ' elle accorde généralement plus
d ' attention à la forme qu ' au contenu des tex tes. Sa conception de la révision met donc
l'accent sur les aspects normatifs des textes plutôt que sur des aspects communicationnels.
Elle di stingue clairement la ~évi sion de la réécriture qu 'elle envisage comme la nouvelle
écriture d 'un paragraphe ou d 'un texte: « la réécrit~re , c 'est quand on met le feu dedans et
qu ' on recommence» (EXP6: E.99). Elle conçoit toutefoi s que la réécriture peut aussi se
limiter à une phrase lorsque celle-ci est reformulée en inversant l ' ordre des idées.
Les mandats qui lui ont été confiés jusque-là ont porté sur des types de textes variés, tels
des documents ministériels, des livres pour des élèves du primaire, des manuscrits et des
guides écologiques. Lors de l ' expérimentation, la réviseure commençait justement la
révision de fond et de forme d'un guide de reconnaissance des types écologiques destiné à
des ingénieurs forestiers et aux étudiants en foresterie de l'Université Laval. Elle devait
notamment veiller à ce que le guide ait la même structure que les autres qu ' elle avait déjà
révisés et dont certains étaient publiés.
L'appartement qu 'habite la réviseure est son environnement de travail. Elle possède une
grande quantité d ' ouvrages de référence parmi lesquels des dictionnaires de langue et de
foresterie , des guides de rédaction , de ponctuation et de typographie et des guides
écologiques. Elle ad' ailleurs consulté plusieurs sources au cours de l'expérimentation , la
plupart à de nombreuses reprises: des guides traitant d'une autre région écologique (plus
d'une vingtaine de fois), Le Petit Robert (6 fois) , le site internet de la Comlnission de
Toponymie du Québec (5 fois) et celui du ministère des Ressources naturelles et de la
Faune (3 fois), une carte des paysages régionaux (3 fois), le Dictionnaire de foresterie
(OIFQ, 2000) (2 fois) et le FAB (1 fois).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modif ications lexicales 114
Pour ce qui est de la démarche, la révi seure 6 procède généralement de la même façon
d 'une foi s à l'autre. Elle fait imprimer les documents qu 'elle reçoit par courrier
électronique, car elle fait une première démarche de révision sur une version papier. Elle
révise paragraphe par paragraphe et apporte des modifications quand elle peut résoudre
assez facilement les problèmes détectés. Autrement, elle poursuit la lecture et revient plus
tard sur les problèmes plus difficiles à régler. Quand il y a trop de changements sur les
feuilles et qu ' elle s' y retrouve mal , elle apporte les modifications à l'écran et fait
réimprimer la nouvelle version pour poursuivre sa première démarche ou en commencer
une deuxième.
Pendant les deux heures d'enregistrement de sa tâche de révision, la révi seure 6 n' a révisé
que les cinq premières pages à double interligne de la partie 1 du guide et un tableau
occupant une demi-page. Cela correspond à moins d~ 1000 mots. Le guide complet doit
comporter plus d 'une centaine de pages, c 'est donc dire qu'elle n'a fait qu ' une infÏIne partie
de sa tâche. Il est à noter que la réviseure n ' a pas paru du tout à l'aise avec ce document
même si elle en avait déjà révisé d ' autres du Inême genre. Il y avait de nombreux passages
qu'elle ne comprenait pas, elle les relisait et cherchait dans divers ouvrages pour essayer de
comprendre. Son vocabulaire du domaine forestier peu développé et son manque
d'assurance, tous deux liés à son inexpérience, expliquent cette situation. De plus , le texte
se présentait différemment de celui des autres guides qu'elle avait déjà révisés, ce qui l ' a
quelque peu déroutée. Elle a passé beaucoup de temps à examiner la structure du guide et à
la comparer avec d'autres guides pour voir comment réorganiser les idées et arranger le tout
pour qu'il soit semblable aux autres. En outre, la réviseure a affirmé qu'elle allait devoir
revoir au complet la partie révisée, voire la réécrire:
toute cette section-là en fait là ce matin ce que j ' ai fait [ ... ] ça m'a pennis de voir c'est quoi qui est à refaire vraiment au complet, de savoir un petit peu comment c ' était euh, comment c ' était écrit là, à quoi ressemble cette section-là. Mais elle est à refaire au grand complet (EXP6 : E.299).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 115
5.2 Les caractéristiques des modifications lexicales des réviseurs
Cette partie est consacrée à la descliption des opérations d' écri ture, des unités visées et des
dimensions concernées par les modifications lexicales des réviseurs professionnels de
l 'étude. Cependant, avant d'aborder ces caractéristiques, je pré ente les nombres et
pourcentages de modifications lexicales apportées par les réviseurs et je formule quelques
observations concernant les résultats obtenus. .
Les six réviseurs ont apporté 464 modifications lexicales sur un total de 1064 modifications
(voir le tableau 5.1). Ils ont obtenu des taux de modifications lexicales variant de 34,6 % à
54,2 %, la moyenne se situant à 43,6 0/0 . La réviseure 1 a la proportion la plus élevée
(54,2 0/0) , mais c'est la réviseure 2 qUI compte le plus grand nombre de modifications
lexicales (135).
Tableau 5.1 - Pourcentage de modifications lexicales de chacun des réviseurs
Nb de Nb total de %de Sujets modifications modifications modifications
lexicales lexicales
Rév1 64 118 54 ,2 Rév2 135 274 49,3 Rév3 100 289 34,6 Rév4 111 230 48,3 Rév5 37 107 34,6 Rév6 17 46 37,0
Total 464 1064 43 ,6
Comme le réviseur 3 a fait de la réécriture, je ne m'attendais pas à ce que les problèmes
détectés visant des unités lexicales représentent une partie importante de ses modifications.
Je voyais juste , car sur]' ensemble des modifications, le tiers seulement visent des unités
lexicales (100/289, 34,6 %) . Même si le nOlnbre de modifications lexicales est le troisième
plus élevé, le pourcentage des modifications lexicales par rapport à l 'ensemble est le moins
élevé, à égalité avec la réviseure 5.
Par ailleurs, le nombre total de modifications fai tes par la réviseure 6 est minime comparé à
celui des autres réviseurs. Le manque d'expérience de cette réviseure, combiné aux .
problèmes de compréhension qu'elle a éprouvés et à la mauvaise structuration du texte,
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 116
expliquent le peu de changements effectués au cours des deux premières heures de révision.
De plus , comme la réviseure s'est d'abord fait une idée du contenu des premières pages du
texte et qu'elle a tenté de le restructurer, on pouvait s'attendre à ce qu'il y ait peu de
modifications lexicales. Le pourcentage de modifications lexicales est d'ailleurs le
deuxième plus faible (37 0/0) après celui des réviseurs 3 et 4.
Si l'on tient compte de l'expérience accumulée par ces professionnels , on observe que ceux
qui en ont moins - et qui sont aussi les plus jeunes - (réviseures l , Set 6) ont apporté
beaucoup moins de modifications que les réviseurs expérimentés (réviseurs 2, 3 et 4), soit
271 modifications contre 793. Malgré cela, les deux groupes obtiennent un mêlue taux de
modifications lexicales, soit 43,5 % pour les réviseurs ayant peu d'expérience (118/271) et
43,6 % pour les réviseurs expérimentés (346/793). Les réviseurs novices n'auraient donc
pas tendance à faire plus de modifications lexicales que les experts. Ces résultats, même
s'ils ne sont pas parfaitement compatibles avec ceux de Sommers (1980), semblent indiquer
une différence importante entre des scripteurs qui s' autorévisent et des réviseurs
professionnels. En effet, selon SOlnmers, l'intérêt prédominant des scripteurs
inexpérimentés lorsqu'ils révisent leur texte est le lexique (les mots du texte) tandis que
celui des scripteurs expérimentés est l'organisation de leur texte, en plus d'être davantage
sensibilisés au lecteur.
L'expérience n'étant pas un facteur déterminant sur les modifications lexicales, à quoi peut
on attribuer la variation des taux de modifications lexicales chez les réviseurs
professionnels? Dans une certaine Inesure, il semble que ce soit le mandat reçu qui explique
les différences de pourcentages. En effet, trois des quatre réviseurs ayant reçu un mandat de
révision linguistique (réviseures 1 et 2), ou comportant essentiellement de la révision
linguistique (réviseur 4) ont un pourcentage de lTIodifications lexicales plus élevé que les
deux réviseurs dont le mandat était de la réécriture (réviseur 3) ou en comportait
(réviseure 6).
Le résultat de la réviseure 5 s'explique autrement. Le faible pourcentage de modifications
lexicales obtenu par celle-ci (34,7 0/0) paraît un peu curieux étant donné le mandat de
révision linguistique. On aurait pu s'attendre à ce que ce pourcentage avoisine 50 0/0, ce qui
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 11 7
aurait été semblable à ceux obtenus par les révi seurs l , 2 et 4 (54,2 % , 50 % et 48,3 0/0 ) qui
avaient eux aussi à faire de la révi sion lingui stique. Mais, en examinant les autres
modifications de cette réviseure, on s ' aperçoit rapidement qu 'une majorité d 'entre elles
·sont des changements de surface qui ont vi sé la ponctuation, les espaces et les interlignes de
même que la présentation des noms propres et de leurs sigles. Ces modifications ne visent
pas des unités lexicales, mai s elles sont aussi du ressort de la révi sion linguistique . .
5.2.1 Les opérations d'écriture L ' opération d ' écriture la plus fréquente pour l ' ensemble des révi seurs a été le
remplacement: plus de la moitié des modifications lexicales ont été faites au moyen de
cette opération (260/464, 56 % [voir le tableau 5.2] ). D ' autres études, autant en
autorévi sion qu'en révision professionnelle, font également état de la prédominance de
cette opération (Sommers , 1980; Monahan, 1984; Cloutier, 2005; Bisaillon 2007b). Dans la
recherche dirigée par Bisaillon, le remplacement a été utilisé pour réaliser 57 ,6 % des
modifications, ce qui semble indiquer que les remplacements d 'unités lexicales sont aussi
fréquents que les remplacements de toutes les autres unités textuelles.
La réviseure 6 est la seule pour qui l'opération de remplacement n ' a pas été la plus utilisée.
Elle a en effet ajouté davantage d 'uni tés (8) dans le tex te qu'elle n ' en a remplacé (5 [voir le
tableau 5.2]). Le peu de modifications lexicalés qu'elle a fait et les difficultés de
compréhension du texte qu 'elle a connues expliquent sans doute cette différence.
D'ailleurs, l'ensemble des caractéri stiques des modifications lexicales de cette réviseure
s'écartent de celles qui sont généralement observées chez les autres réviseurs , sans doute
pour les mêmes raisons.
La deuxième opération d ' écri ture la plus fréquente pour les modifications lexicales est la
suppression (130/464, 28 0/0 ). C 'est plus du quart de ces modifications qui ont été réali sées
au moyen de cette opération. Ce pourcentage est semblable à celui obtenu par Cloutier
(2005) pour l'ensemble des modifications (environ 30 %), mais il est plus élevé que cel ui
obtenu par Bi saillon (2007b) (21 ,1 0/0) . L ' opération d ' addition occupe le troisième rang
(68/464, 14,70/0 ). Enfin, il selnble que le déplacement, qui est peu utilisé de façon générale
en révision - Cloutier (2005) note un pourcentage de 4,8 % tandis que Bisaillon (2007b)
Chapitre 5 : Présentat ion et analyse des modi fications lexicales 118
obtient un pourcentage de 3,1 % - le soit encore moins dans le cas des modifications
lexicales ( l ,3 0/0) . Les réviseurs 4 et 5 n ' ont d 'ailleurs pas eu recours à cette opération, les
autres réviseurs l 'ayant utili sée à une ou deux reprises seulement. >
Tableau 5.2 - Répartition des modifications lexicales des réviseurs selon les opérations d'écriture effectuées
Opérations Sujets Total
Addition Suppression Remplacement Déplacement
Rév1 8 17 37 2 64 (12,5 %) (26,6 %) (57,8 %) (3,1 %)
Rév2 16 29 88 2 135 (11 ,9 %) (21 ,5 %) (65,2 %) (1,4 %)
Rév3 14 35 50 1 100 (14 %) (35 %) (50 %) (1 %)
Rév4 15 34 62 - 111 (13,5 %) (30 ,6 %) (55,9 %)
Rév5 7 12 18 -37
(18,9 %) (32,4 %) (48,6 %)
Rév6 8 3 5 1
17 (47,1 %) (17 ,6 %) (29,4 %) (5,9%)
Total 68 130 260 6 464 (14,7 %) (28%) (56 %) (1 ,3 %)
5.2.2 Les unités visées Les deux tiers des unités vi sées par les modifications lexicales des réviseurs appartiennent à
des classes ouvertes, l' autre tiers regroupant des unités des classes fermées (voir le
tableau 5 .3). Cette répartition deux tiers / un tiers est à peu près la même pour les quatre
premiers révi seurs, mai s les pourcentages se resserrent pour les réviseurs 5 et 6. Ceux de la
réviseure 5 sont de 60 % pour les unités des classes ouvertes et de 40 % pour celles des
classes fermées tandi s que les unités visées par la réviseure 6 se réparti ssent presque
également entre les deux classes (53 % et 47 % [voir le tableau G.l à l ' annexe G].
Les noms, les verbes, les adjectifs et les adverbes étant non seulement beaucoup plus
nombreux, mai s aussi sélnantiquement plus riches et plus « évocateurs» que les pronoms,
les déterminants, les conjonctions et les prépositions, il est normal que les premiers soient
davantage modifiés, ne serait-ce que pour varier le vocabulaire ou avoir le mot juste. En
outre, les unités des classes ouvertes sont des mots variables - à l'exception des adverbes -
ce qui rend leur emploi propice à des erreurs d ' accord de tous genres. D ' ailleurs, en
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 119
répartissant les unités visées selon les opérations d ' écrüure réalisées et en tenant compte
des caractères modifiés, on remarque que les additions et les suppressions de noms et de
verbes , ainsi que les additions d ' adjectifs ont touché en majorité un ou deux caractères
plutôt que l ' unité complète (voir le tableau 5.4), ce qui est en partie dû au fait que les unités
comportaient plusieurs erreurs de nature grammaticale.
Tableau 5.3 - Répartition des unités visées par les modifications lexicales des réviseurs
Unités visées Sujets Classes ouvertes Classes fermées Total
Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
Rév1 8 27 4 7 1 3 11 3 64 (12,5%) (42,2%) (6,2%) (10,9%) (1 ,6%) (4,7 %) (17,2%) (4 ,7%)
Rév2 30 25 15 17 11 16 17 4 135 (22,2%) (18,5%) (11 ,1%) (12,6%) (8,1 %) (11,9%) (12,6%) (3%)
Rév3 19 25 9 18 7 12 5 5 100 (19%) (25%) (9%) (18%) (7%) (12%) (6%) (5%)
Rév4 15 29 11 19 14 11 6 6 111 (13,5%) (26,1 %) (9,9%) (17,2%) (12,6%) (9,9 %) (5,4 %) (5 ,4%)
Rév5 12 5 4 1 2 4 7 2 37 (32,5 %) (13,5%) (10,8%) (2,7 %) (5,4 %) (10 ,8%) (18,9%) (5,4 %)
Rév6 3 2 2 2 1 1 5 1
17 (17,6%) (11 ,8%) (11,8%) (11,8%) (5,9%) (5,9%) (29,3 %) (5,9%)
Total 87 113 45 64 36 47 51 21 464 (18,8%) (24,3 %) (9,7 %) (13 ,8%) (7,8%) (10,1 %) (11%) (4,5%)
309 (66,6 %) 155 (33,4 %)
Même si les unités des classes fermées comptent pour environ la moitié des unités d'un
texte (Niklas-Salminen, 1997 : 23), elles ne représentent que le tiers des unités visées par
les réviseurs. Les problèmes liés à l'emploi de ces unités semblent donc moins fréquents
que ceux des classes ouvertes, mais ils n'en sont pas moins variés, comme je le montrerai à
la section suivante (§ 5.3).
La classe des verbes compte environ 25 % des unités visées par les six réviseurs (113/464,
24,3 % [voir le tableau 5.3]). Cette classe regroupe le plus grand nombre d'unités pour trois
d'entre eux (réviseurs l, 3 et 4) et elle vient au deuxième rang pour la réviseure 2. Dans le
cas de la réviseure l, elle se distingue nettement des autres parties du discours puisqu'elle
compte à elle seule pour 42,2 % des unités visées, ce qui constitue le pourcentage le plus
élevé pour une classe d'unités visées par un réviseur (voir le tableau 5.3) . La classe
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 120
suivante en importance, la préposition , ne rassemble pour sa part que 17,2 % des unités
visées et le pourcentage d'écart entre les classes qui occùpent les première et deuxième
posi tions , so~t 25 0/0, est également le plus grand pour l'ensemble des six réviseurs. Enfin,
on note pour les verbes que près des troi s quarts d'entre eux (81/113 , 71,7 0/0) ont été
remplacés (voir le tableau 5.4).
Tableau 5.4 - Répartition des unités visées selon les opérations d'écriture effectuées
Parties du Opérations Total discours Addition Suppression Remplacement Déplacement
Nom 10 (7*) 21 (11 *) 56 (14*) i 87 (11 ,5 %) (24,1 %) (64,4 %)
Verbe 12 (7*) 19 (10*) 81 (3*) 1 113 (10,6%) (16,8%) (71 ,7%) (0 ,9%)
Adjectif 9 (6*) 17 (2*) 19 (1 *) - 45 (20 %) (37,8 %) (42,2 %)
Adverbe 17 19 25 3 64 (27,7 %) (29,2%) (38,5%) (4,6%)
Pronom 3 12 (1*) 20 (2*) 1 36 (0,1 %) (32,4 %) (56 ,8 %) (2,7%)
Déterminant 7 (2*) 17 (1 *) 23 (2*) - 47 (14 ,9%) (36,2%) (48,9%)
Préposition 8 16 (3*) 27 -51
(15,7%) (31,4 %) (52,9 %)
Conjonction 2 9 9 1
21 (9,5 %) (42,9 %) (42,9%) (4,7%)
Total 68 130 260 6 464 (14,7%) (28%) (56%) (1 ,3%)
, . . , * Les astensques Indiquent le nombre d'unites sur le total dont seulement un ou deux caractères ont été modifiés.
Le nom est la deuxième classe d'unités visées en importance (87/464, 18,8 % [voir le
tableau 5.3]). C'est dans cette classe que les réviseures 2 et 5 ont visé le plus d 'unités.
Comme pour les verbes, les noms ont été majoritairement remplacés (56/87, 64,4 % [voir le
tableau 5.4]).
Les prépositions sont les unités les plus souvent visées parmi les classes d'unités fermées
(51/464, Il % [voir le tableau 5.3]) et elles ont surtout été remplacées et supprimées (voir
le tableau 5.4). On remarque que les réviseures les moins expérimentées (réviseures l, 5 et
6) ont visé plusieurs unités de cette classe comparativement aux unités des autres classes.
En effet, la classe des prépositions est la plus nombreuse pour la réviseure 6 tandis qu'elle
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 121
vient en deuxième posi tion pour les réviseures 1 et 5 (voir le tableau 5.3) . Cette situation
semble par contre fortuite puisque rien ne l'explique. Les problèmes causés par l 'emploi de
ces unités sont assez valiés; même si un bon nombre d ' entre eux sont d'ordre syntaxique et
concernent leur répéti tion ou leur non-répétition, ce n'est pas suffisant pour affirmer que les
réviseurs ayant moins d ' expérience portent une plus grande attention à l'application des
règles de ce genre que les réviseurs plus expérimentés .
5.2.3 Les dimensions linguistiques concernées En répartissant les problèmes détectés selon qu ' ils relevaient de la morphologie, de la
sémantique, de la syn taxe, de la stylis tique ou de la typographie7, j ' ai déterminé les
proportions dans lesquelles les modifications lexicales touchaient chacun de ces aspects
(voir le tableau 5.5).
Tableau 5.5 - Répartition des modifications lexicales selon les dimensions linguistiques auxquelles elles se rapportent
Sujets Dimensions linguistiques concernées Total de
Morphologie Sémantique Syntaxe Stylistique Typographie Indéterminée modifications
Rév1 15 28 11 8 2 1
64 (23,4%) (43 ,8%) (17 ,2%) (12,5%) (3,1%) (1,6%)
Rév2 12 71 30 16 8 4
135 (8,9%) (52,6%) (22,2%) (1 1,8%) (5,9%) (3%)
Rév3 21 49 10 10 1 11
100 (21 %) (49%) (10%) (10%) (1 %) (11 %)
Rév4 15 62 12 14 9
111 (13,5%) (55,9%) (10,8%) (12,6%) (8,1%)
Rév5 2 10 11 3 7 4
37 (5,4%) (27,1%) (29 ,7%) (8,1%) (18,9%) (10,8%)
2 5 6 3 1 Rév6 17
(11 ,8%) (29,4%) (35,3%) (17,6%) (5,9%)
67 225 80 54 18 30 Total 464
(14,4%) (48,5%) (17 ,2%) (11 ,6%) (3,9%) (6,5%)
Les résultats montrent que c'est la dimension sémantique qui est principalement 'mi se en
cause dans les lTIodifications lexicales . En effet, près de la moitié des unités visées par les
réviseurs ont été modifiées parce qu 'elles comportaient ou causaient un problème sur le
plan du sens (225/464, 48,5 0/0) . La dimension syntaxique occupe la deuxième place avec
7 Le no mbre de dimensions relevées es t supérieur au total de modi fications lex icales effectuées puisqu ' une modification permettait parfo is de régler deux problèmes détectés sur une même unité lex icale .
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modif icat ions lexicales 122
moins de vingt pour cent (80/464, 17,2 0/0 ), suivie par la dÏ1nension morphologique (67/464,
14,4 0/0 ).
Le sens des unités, qui donne accès au sens des énoncés, des phrases et du texte, est donc
l ' aspect sur lequel les réviseurs focali sent la plus grande partie de leur attention, et ce, de
façon consciente ou non. En outre, il semble que plu s les réviseurs sont expérimentés, plus
ils détectent et cOIT~gent des problèmes sémantiques, car les réviseurs 2, 3 et 4 ont des
pourcentages plus élevés que les réviseures l , -5 et 6 pour cette dimension (voir le
tableau 5.5). Il est vrai que les réviseurs novices sont sans doute plus enclins à repérer des
erreurs d ' orthographe et d ' accord que des erreurs ou problèmes de sens parce que les
premières sont associées à des règles généralement apprises par cœur tandis que les autres
demandent une connaissance plus étendue du lexique et de la langue, ce que l ' expérience
permet d' acquélir. Le cas de la réviseure 6 illustre bien le propos. Cette réviseure qui a peu
d 'expérience a eu de la difficulté à comprendre des parties du texte et n'a de ce fait apporté
que cinq modifications portant sur l'aspect sémantique (5/17, 29,4 0/0). En comparaison,
l ' emploi syntaxique des unités lexicales et leur forme lexicale et grammaticale ont été la
cause de près de la moitié de ses modifications (8/17, 47,1 0/0 ).
Outre ces trois dimensions, on remarque que près de 12 % des modifications lexicales ont
été apportées pour des raisons · stylistiques (54/464, Il ,6 0/0). Ce pourcentage est
considérable et il est près de celui obtenu pour la dimension morphologique (14,4 0/0 ). Les
réviseurs ont ainsi fait presque autant de modifications lexicales stylistiques (54) que de
modifications lexicales morphologiques (67). La portée stylistique des unités est donc un
élément non négligeable que les réviseurs considèrent dans leur travail sur les unités
lexicales, ce à quoi on ne s'attendait peut-être pas. De plus , contrairement _ à ce que l ' on
serait porté à croire, les modifications qui mettent le style en cause ne sont pas l'apanage
des réviseurs expérimentés, puisque les réviseurs novices et les expérimentés obtiennent
des pourcentages assez semblables pour cette ctÏ1nension (entre 8,1 et 12,6 % sauf pour la
réviseure 6).
Les modifications dont les problèmes n'ont pu être associés à l ' une ou l' autre des
dÎlnensions linguistiques représentent pour leur part 6,5 % de l ' ensemble (30/464). Pour la
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 123
majorité, on y trouve les problèmes pressentis et les problèmes inconnus. Dans le cas de la
réviseure 1, par exemple, celle-ci a préféré l 'emploi de relatives à plutôt que quant à dans il
sera notalnment question de ces nonnes quant à la gestion des eaux usées (EXP 1 : M.1 00),
mais on ne sait pas pourquoi: y voyait-elle une légère nuance de sens entre les deux
locutions ( dimension sémantique) ou n'aimait -elle tout simplement pas le son k? (Auquel
cas il faudrait renvoyer à la dimension phonétique, qui n'a par ailleurs pas été retenue parce
qu ' aucune autre modification lexicale ne concernait cet aspect.) Les réviseurs 3 et 4,
particulièrement, ont plusieurs modifications dans cette dimension. Dans le cas du
réviseur 3, celui-ci n 'avait pas justifié quelques modifications, ce qui n 'a pas permis d 'en
d~terminer les problèmes. Pour ce qui est du réviseur 4, certaines justifications étaient trop
vagues pour détenniner la dimension touchée par les problèmes pressentis.
Des conventions typographiques sont pour leur part responsables de près de 4 % des
modifications, mais ce ne sont pas tous les réviseurs qui ont détecté des problèmes liés à
cette dimension. En effet, les réviseurs 4 et 6 n'ont pas fait de modifications touchant cet
aspect, mais la réviseure 5 en a apporté un nombre considérable si l'on tient compte du
nombre total de modifications lexicales (7/37, 18,9 0/0). Seule la réviseure 2 a fait plus de
modifications lexicales se rapportant à la dimension typographique que la réviseure 5
(8/137) mais, en proportion, cela ne représente que 5,8 % de ses modifications tandis que ce
taux est de 18,9 % pour la réviseure 5.
Enfin, comme on pouvait s'y attendre, les dimensions morphologique, sémantique et
stylistique regroupent Inajoritairelnent les problèmes détectés sur les unités des classes
ouvertes (79,1 0/0, 74,2 % et 72,2 % respectivement) tandis que la dimension syntaxique
compte davantage de problèmes décelés sur les unités des èlasses fermées (71 ,2 % [voir le
tableau G.2 à l'annexe GD. La dimension typographique est pour sa part presque
exclusivement associée à des problèmes visant des noms (16/18 , 88,9 0/0).
5.2.4 Sommaire des caractéristiques des modifications lexicales Cette analyse détaillée des caractéristiques des modifications lexicales des réviseurs
observés a permis de répondre à ma première question de recherche: Qu ' est-ce qui
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 124
caractéri se les modifications lexicales? Je prends quelques lignes ici pour rappeler les
principaux points.
On nGte d ' abord , comme dans d ' autres recherches en autorévi sion et en révi sion
professionnelle (Sommers, 1980; Monahan, 1984; Bisaillon et autres, 2004; Cloutier,
2005), que l ' opération de remplacement a prédominance sur les autres opération s
d ' écriture. C ' est plus de la moitié des modifications lexicales qui ont été faites au moyen
d 'une substitution (56 0/0 ). À l'opposé, l'opération de déplacement n ' a presque pas servi
(1 ,3 %). Les suppressions sont aussi deux foi s plus nombreuses que les additions (28 0/0
contre 14,7 0/0).
Deux lTIodifications lexicales sur trois vi sent une unité d ' une classe ouverte, soit un nom,
un verbe, un adjectif ou un adverbe. La classe des verbes vient au premier rang des unités
visées et elle représente près du quart de celles-ci. Les noms occupent le deuxième rang et
constituent environ 19 % des unités visées. En outre, ces deux classes d ' unités connaissent
les plus hauts taux de remplacement (71,7 % et 64,4 % respectivelTIent [voir le
tableau 5.4]).
Enfin , le sens des unités lexicales est la principale cause des modifications. C ' est près d ' une
modification lexicale sur deux qui est apportéè parce qu ' elle comporte ou cause un
problème sur le plan du sens (225/464, 48 ,5 0/0). La syntaxe et la morphologie sont en cause
dans le tiers des modifications lexicales (17 ,2 et 14,4 % respectivement) et le style est
également à considérer puisqu'environ 12 % des modifications relèvent de cette dimension.
Cela dit, ces résultats valent pour les six réviseurs de mon étude. Il faudrait conduire
d ' autres recherches pour les valider et éventuellement les généraliser.
5.3 Les problèmes ayant mené aux modifications lexicales Dans cette section, je dresse la liste des problèmes détectés de chacun des réviseurs. Je
présente les plus fréquents et je donne des exemples pour les illustrer. Je tente également de
les lTIettre en lien avec les éléments qui ont pu jouer un rôle dans leur détection ou qui
pourraient expliquer leur présence dans les textes. Parfois, je m ' attarde aussi à une
catégorie de problèmes qui ne figure pas nécessairement parmi les premières, mais qui
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 125
souli gne une autre caractéristique du travail d'un réviseur. À la fin, je propose un portrait
global des problèmes détectés.
5.3.1 Les problèmes détectés par la réviseure 1 La réviseure 1 a détecté 65 problèmes qui orÙ conduit à 64 modifications lexicale. Ces
problèmes se répartissent dans les 17 catégories présentées au tableau 5.6. Les trois
catégories les plus importantes totali sent 27 problèmes et représentent à elles seules plus de
40 % de toutes les elTeurs et faiblesses vues et corrigées par cette réviseure.
Tableau 5.6 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 1 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Catégories de problèmes Parties du discours
Total °10 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. Conj.
Erreur d'orthographe 8 3 11 16,9 grammaticale
Erreur de syntaxe 1 2 4 1 8 12,3 Incompatibilité sémantique 1 6 1 8 12,3 Imprécision 3 2 1 6 9,2 Impropriété 3 1 2 6 9,2 Répétition 1 4 1 6 9,2 Problème pressenti 1 2 1 4 6,2 Pléonasme 1 2 3 4,6 Erreur d'orthographe
2 2 3,1 lexicale Inexactitude 1 1 2 3,1
Non-respect d'une règle de 1 1 2 3,1 présentation Vocabulaire non adapté 1 1 2 3,1 Anglicisme 1 1 1,5 Manque d'uniformité 1 1 1,5 Répétition inutile 1 1 1,5
Reprise d'information 1 1 1,5 incorrecte
Autre cas 1 1 1,5
Total 8 28 4 7 1 3 11 3 65
Selon ces résultats, cette réviseure serait surtout encline à corriger des erreurs de grammaire
(11) et de syntaxe (8), des incompatibilités sémantiques (8), des imprécisions (6) et des
iInpropriétés (6), en plus d'éviter les répétitions (6). Elle avait d'ailleurs affirmé que son
travail consistait en partie à enlever les fautes (grammaticales, syntaxiques et lexicales), les
impropriétés et les anglicismes dans les textes. Cependant, il ne faut pas oublier que les
types de problèmes détectés dépendent aussi de l 'état global du texte de départ et, par le fait
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 126
même, des qualités rédactionnelles de l 'auteur. Un auteur qui maîtrise mal la grammaire,
COlnme cela semble être le cas ici (voir les exemples d' elTeur d'orthographe grammaticale
présentés ci-dessous), laisse plus d'erreurs de ce type qu ' un autre qui la connaît très bien.
De plus, comme la réviseure a peu d ' expérience et qu 'elle n'a qu ' un employeur, le fait
qu ' elle précise vouloir enlever ce type · de fautes est peut -être aussi symptomatique des
textes qu 'elle révise dans son milieu de travail.
Dans la première catégorie en importance, les problèmes d'orthographe grammaticale
corrigés par la réviseure 1 n ' ont été relevés que dans des verbes et des adjectifs. Des
modifications ont été apportées pour accorder correctement des verbes avec leur sujet (4) et
des participes passés employés avec être (2), appliquer les bonnes terminaisons verbales (2)
et accorder des adjectifs avec les noms qu'ils qualifient (3). Dans toutes les unités visées,
sauf deux , ce sont des caractères qui ont été ajoutés, supprimés ou remplacés. En voici
quelques exemples:
D'ailleurs, la clientèle qui vient s'établir dans les sites de camping sauvage rechercheru plutôt la plénitude des lieux [ ... ] (M. 124);
[ ... ] il n'en revient qu'aux campeurs de suivreru les bonnes règles de conduite. (M. l26) ;
D 'abord, l'aménagement d ' un camping avec services à proximité d'un lac est confin~ à une réglementation stricte. (M.] 08) ~ est confiné.
Les deux en-eurs d'accord du verbe avec le sujet qui ont 'nécessité le remplacement des
unités lexicales parce qu'il y avait plus de deux caractères touchés (voir § 4.2.3.4) ,
mettaient en cause le verbe être qui était conjugué à la 3e personne du pluriel (sont et
seront) alors qu'il devait être conjugué à la 3e pers. du singulier (est et sera). En voici un
exemple:
Exemple 28 (EXPI : M.66)
Texte original L'ajout de tables de pique-nique et de toilettes est un service qui seront mis à disposition pour desservir les emplace ments supplémentaires et ceux déjà en place. Texte révisé L'ajout de tables de pique-nique et de toilettes est un servicè qui sera mi s à di sposition pour desservir les emplacements supplémentaires et ceux déjà en place. Verbalisation C ' est l' ajout qui est un service qui sera mis. Je l'ai pris , c'est pas les tables pis les toilettes, c 'est l'ajout de ça (EXP 1 : V.336).
---
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 127
Dans la catégorie Erreur de syntaxe, qui figure au deuxième rang à égalité avec la catégorie
Incompatibilité sémantique, trois des huit elTeurs dénombrées découlent de modifications
antérieures apportées par la réviseure. Ces modifications ont entraîné l'ajustement de la
syntaxe, par exemple la suppression · d ' une préposition parce que le régime du nouveau
verbe ne COlTIlTIandait pas cette préposition dans le contexte (offre présentement de 30
emplacen1ents, M.51), et l'ajout d'une conjonction de subordination (il est possible de
c;nstater que les lieux [. .. ) et que l'influence sur la pression de pêche [. .. }, M.62)8.
Les deux adverbes causant des erreurs de syntaxe sont des particules de négation: l'une
manquait alors que l'autre était de trop. Une autre elTeur de syntaxe était un solécisme
occasionné par la présence de la préposition à après le verbe pallier (voir l'exemple Il ,
p.84).
En ce qui a trait aux incompatibilités sémantiques, trois des SIX verbes visés (voir le
tableau 5.6) avaient pour effet de créer des animismes. La réviseure a relevé deux fois le
verbe possède ~yant comme sujet un camping et comme complément des emplacements et
une fois le verbe passer ayant comme sujet un CheITIin (voir l'exemple 29). Elle a
également souligné pour ce dernier exemple que le verbe employé appartenait plutôt à la
langue orale qu'écrite (Vocabulaire non adapté). La modification a ainsi permis de régler
un double problème portant sur une même unité lexicale.
Exemple 29 (EXPl: M.75)
Texte original Le site de camping du lac du Coq est tout aussi facilement accessible en empruntant le chemin Barley qui passe à proximité du camping. Texte révisé Le site de camping du lac du Coq est tout aussi facilement accessible en empruntant le chemin Barley qui se trouve à proximité du camping. Verbalisation Pis le chemin qui passe à proximité du camping là, j'aime pas ça (EXP1 : V.352); C'est trop oral (V.354); C'est quasiment un animisme, selon moi là (V.355).
8 En tout, 5 des 64 modifications lexicales de la réviseure 1 ont été nécessaires à la suite d'autres modifications. Outre les trois erreurs de syntaxe, une est une erreur d'orthographe grammaticale et l'autre se rapporte à un problème d'imprécision.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 128
Trois catégories de problèmes occupent le troisième rang: Imprécision, Impropriété et
Répétition. Panni les imprécisions, deux problèmes ont été détectés en raison de l 'absence
de l'adverbe près. La réviseure 1 ]' a inséré à deux endroits dans le tex te parce qu'elle
estimait qu'il venait préciser la situation géographique de deux campings ([. .. ) des
campings déjà en place près de la rivière Barley (M .48) et [, .. 1 des campings [. .. } près du
lac du Coq (M.49). Un autre problème d'imprécision concernait le sens de la locution
verbale fait mention. Selon la réviseure 1, il n'était pas assez fort pour évoquer ce dont il
s'agissait réellement (voir l'exemple 30). Les campings à aménager ou à réaménager sont le
sujet du document alors la réviseure a remplacé la locution par le verbe conjugué traite, qui
est plus approprié dans le contexte selon elle.
Exemple 30 (EXPI : M.6)
Texte original Le présent document fait mention des campings qui seront aménagés ou réaménagés sur le territoire de la zec des Martres. Texte révisé Le présent document traite des campings qui seront aménagés ou réaménagés sur le territoire de la zec des Martres. Verbalisation parce que je trouve que faire mention , c'est, c'est plus gue ça . Il porte vraiment sur les campings, fague il ne fait pas juste mention des campings, il traite vraiment des campings gui vont être aménagés sur le territoire de la zec des Martres (EXP1 : V.60) .
Pour ce qui est des . impropriétés, la réviseure a relevé trois emplois souvent présentés
comme abusifs: le nom niveau pour parler de la qualité des services offerts, la locution au
niveau de au sens de «en ce qui concerne» et le verbe retrouver employé au lieu de
trouver (voir l'exemple 14, p. 85). En les corrigeant, la réviseure s'est assurée que les
bonnes unités étaient employées dans le sens qui convenait.
Enfin, les problèmes de répétition concernaient surtout les verbes (4/6). Par exemple, deux
fois à l'intérieur d'une même phrase, les verbes comprend et est prévu apparaissaient. Le
nom emplacements figurait également deux fois dans une autre phrase. Dans un autre cas,
la locution conjonctive tout COlnme était employée dans deux phrases consécutives.
Si l'on regarde les parties du discours, on observe que sur l'ensemble des unités verbales
visées, qui sont les plus nombreuses, la moitié (14/28) comportait des problèmes
- - -- ---- - --------- --- - - - --------------- ---- -------- -----------,
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 129
d 'orthographe grammaticale (8) et d ' incompatibilités sémantiques avec les sujets ou les
cOll1pléments verbaux (6) . D 'autres unités étaient répétées (4) et imprécises (3) . Pour ce qui
est des prépositions, la deuxième catégorie d ' unités visées en importance, quatre causaient
des erreurs dans la syntaxe, deux étaient mal orthographiées, deux étaient impropres et
deux autres ont été remplacées sur la base de préférences de la réviseure.
5.3.2 Les problèmes détectés par la réviseure 2 La réviseure 2 a détecté 141 problèmes causés par la présence ou l' absence d 'une unité
lexicale. Ces problèmes sont très variés puisqu ' il s e réparti ssent dans toutes les catégories
de problèmes répertoriées (voir le tableau 5.7). Les huit premières catégories en importance
Tableau 5.7 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 2 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Catégories de problèmes Parties du discours
Total 0/0 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom · Déterm. Prép. Conj .
Anglicisme 2 5 7 9 23 16,3 Impropriété 4 2 1 3 2 3 15 10,6 Erreur de syntaxe 5 2 2 4 1 14 9,9 Incompatibilité sémantique 10 1 11 7,8 Répétition 6 2 1 2 11 7,8
Reprise d'information 7 2 9 6,4 incorrecte
Erreur d'orthographe 2 3 1 2 8 5,7 grammat icale
Non-respect d'une règle de 7 1 8 5,7 présentation
Information non nécessaire 1 1 1 1 2 6 4,3 Formulation inadéquate 1 1 1 1 4 2,8 Imprécision 1 3 4 2,8 Problème inconnu 3 1 4 2,8 Répétition inutile 1 1 1 1 4 2,8
Erreur d'orthographe 2 1 3 2,1 lexicale
Pléonasme 2 1 3 2,1 Problème pressenti 1 1 1 3 2,1 Incohésion temporelle 2 2 1,4 Inexactitude 1 1 2 1,4
Manque d'uniformité 1 1 2 1,4
Vocabulaire non adapté 1 1 2 1,4 Lien manquant 1 1 0,7 Mauvais lien 1 1 0,7 Autre cas 1 1 0,7
Total 30 26 15 20 11 18 17 4 141
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 130
(Anglicisme à Non-respect d' une règle de présentation) totali sent par contre 70 % des
problèmes détectés et résolus (99/141 , 70,2 0/0 ).
La catégorie Anglici sme occupe le premier rang et compte 23 problèmes. Ce résultat ne
surprend par contre pas quand on sait que la réviseure 2 fait la « chasse » aux anglicismes.
Il faut préci ser toutefois que même si le nombre d ' anglicismes est élevé, ce sont souvent les
mêmes unités lexicales qui ont été indiquées comme des anglicismes sémantiques (4 foi s
pratiqueJnent, 3 fois finalen1ent, 2 foi s identifiable( s) et spécifiques - voir l'exemple 31).
Exemple 31 (EXP2: M.135) Texte original De son côté, la société s'accorde le droit d ' imposer des vêtements spécifiques à des individus qu ' elle juge indignes de côtoyer l ' ensemble de la communauté. Texte révisé De son côté, la société s'accorde le droit d ' imposer des vêtements particuliers à des individus qu ' elle juge indignes de côtoyer l 'ensemble de la communauté . Verbalisation [ . .. ] spéc~fiques est un anglici sme dans ce sens-là (EXP2 : V.257).
La plupart du telnps, la réviseure était catégorique quant au statut d'anglicisme sémantique
des unités, comme en font foi les extraits des verbalisations suivants:
Alors spécifiques est un anglicisme dans ,ce sens (EXP2 : V .86) ~
[ ... ] pratiquement, ça veut dire « en pratique » (EXP2 : V.157) ~ pis c'est un anglicisme aussi, hein c ' est practicly (EXP2 : V.] 58) ~
Alors, prévaloir est un anglici sme. On peut se prévaloir d ' une chose, mai s là dans le sens de « dominer » ou eh bon [ ... ] (EXP2 : V.2]5)~
[ident(fiable] qui est un anglicisme (EXP2 : V .247) ~
[ .. . ] des vêtements spéciaux, c't ' un anglicisme [l'adjectif spéciaux ]. (EXP2 : V.258) ~
Alors développer est un anglici sme dans ce sens-là (EXP2 : V.40 1)~
[ ... ] pratiquement au sens de « presque » ou de « à peu près» est un anglici sme (EXP2 : V.407 ).
Cependant, dans le cas de l'adverbe finalement (exemple 32), la réviseure n'a pas
explicitement parlé d ' anglicisme. Elle a d ' abord affirmé que le mot ne lui semblait pas
avoir le lnêlne sens qu'enfin (EXP2 : V.192), puis elle a rapidelnent ajouté: « pis là ça
ressemble tellement à l ' anglais finally que je le change » (EXP2 : V.192). En plus d 'une
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 131
impropriété, la réviseure a donc vu une ressemblance à l'anglais qui l'a confortée dans son
choix de remplacer les trois occurrences de ce mot (M.94, M.129 et M.162).
Exemple 32 (EXP2 : M.162)
Texte original Parmi les fac teurs qui , dans le temps, ont agi sur la façon de concevoir et de fabriquer le costume et sur les matières utili sées, nous retenons particulièrement le climat et le rnjlieu physique , la politique et l'économie, les transformations sociales et technologiques et , final ement , la religion. Texte révisé Parmi les facteurs qui, dans le temps, ont agi sur la façon de concevoir et de fabriquer le costume et sur les matières utilisées , nous retenons particulièrement le climat et le milieu physique, la politique et l 'économie, les transformations soc iales et technologiques et, enfin , la reli gion.
Ce même type de comlnentaire a aussi donné une raison supplémentaire à la réviseure de
remplacer deux déterminants démonstratifs introduisant des reprises lexicales, mais ne
comportant pas d 'antécédent (de cet ouvrage, voir l'exemple 26, p. 90, et de ce chapitre,
voir l'exemple 33).
Exemple 33 (EXP2: M.239)
Texte original De loin la plus convaincante pour expliquer dans quel cont~xte la mode a vu le jour, la thèse de Lipovetsky sert de base à la troi sième partie de ce chapitre. Texte révisé De loin la plus convaincante pour expliquer dans quel contexte la mode a vu le jour, la thèse de Lipovetsky sert de base à la troisième partie du présent chapitre. Verbalisation de ce chapitre, devient du présent chapitre parce que c'est celui dans lequel on se trouve et de ce chapitre ça fait this chapter, c'est anglais (EXP2 : V A01).
Ainsi, même SI la réviseure n'a pas expressément dénoncé ces deux emplois comme des
anglicismes, le fait de mentionner leur ressemblance à des formes anglaises témoigne
autrement de l'importance qu'elle attache à corriger tout ce qui peut être mis au compte de
l'anglais dans un texte9. Curieusement, on ne trouve aucun nom dans la catégorie
Anglicisme même si cette partie du discours a été à l'origine d'une trentaine de
modifications l~xicales. Il est par contre étonnant de constater que 9 des 23 anglicismes
Inettent en cause des déterminants, 7 indéfinis (un, une, des) et 2 démonstratifs (cet et ce,
9 J'ai donc retenu et codifié ces verballsations comme énonçant des problèmes d'anglicismes car ce sont de's informations qui permettent de renforcer un trait caractéristique de cette réviseure. J'avais d'abord créé une catégorie Ressemblance à l'anglais pour les y classer, mais je me suis ravisée parce qu'il n' y avait que cette réviseure qui avait fait des commentaires de ce genre et que je tenais à restreindre le nombre de catégories de problèmes.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 132
voir ci-dessus). Les déterminants indéfini s sont tous employés dans des appositions, comme
à l ' exemple 34, et la révi seure a assimilé leur emploi dans ce type de construction à des
anglicismes syntaxiques (Bob, Q second grade teacher, has ... ).
Exemple 34 (EXP2 : M.21 ) Texte original Que ces personnes soient installées dans le Croissant fertil e ou sur le pourtour méditerranéen, leurs prenliers vê teme nts sont faits de peaux d 'animaux, une mati ère aux qu alités calorifiques incontestables. Texte révisé Que ces personnes soie nt installées dans le Croissant fertile ou sur le pourtour méditerranéen, leur premiers vêtements sont faits de peaux d 'animaux, matière aux qu alités calorifiques incontestables .
D ' après La gramn~aire méthodique du français (Riegel et autres , 2001), l ' emploi d 'un
déterminant semble facultatif en apposition alors que Le bon usage (Grevisse, 1993 : § 570)
mentionne que « l ' article est absent d'ordinaire devant le nom apposé postposé ou devant le
nom attribut lorsqu ' ils expriment simplelnent une qualité » 10. Quoi qu ' il en soit, pour cette
réviseure la formulation anglaise ne fait pas de doute:
je raye le une , c' est une formulation anglaise lorsqu 'on met, on preCIse comme ça entre virgules, ou en tout cas ici, c'est une virgule et un point après là, mais si je dis par exemple, Caroline, une étudiante au doctorat, c'est un anglicisme (EXP2 : V.57).
Par ailleurs, ce n'est pas seulement dans la catégorie Anglicisme que la réviseure a détecté
des problèmes récurrents dans les mêmes unités lexicales. On en trouve aussi dans les
catégories Impropriété, Erreur de syntaxe et Répétition, qui figurent respectivement aux
deuxième, troisième et quatrième rangs des catégories de problèmes les plus nombreuses,
ainsi que dans la catégorie Problème inconnu, qui vient au douzième rang. Ainsi , parmi la
quinzaine d'impropriétés , hormis les trois occurrences de finalen~ent dont il a été question
ci-dessus, on trouve deux emplois du déterminant telle , que la réviseure qualifie de
galvaudés et qui sont fautifs selon elle (EXP2 : V.124, 125), et deux fois le participe passé
relié (et reliés) dans des contextes où devrait plutôt figurer le participe lié (et liées 11).
Également, on peut mentionner que la réviseure 2 a décelé, comme la réviseure 1, les
10 On peut cependant mettre l'article défini pour marquer une identification nettement soulignée (par exemple, M. Michel, le maire de la ville, préfère le restaurant de mes parents à celui de madame Tremblay.). 11 11 Y avait en plus une erreur d'orthographe grammaticale dans le second participe.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 133
maUVaIS emplois de la locution prépositionnelle au niveau de (D'importants progrès au
niveau du filage [ ... ], M.200) et du nom niveau, tuais cette fois dans l'expression à tous les
niveaux (Ces deux conflits [les deux guerres n1ondiales] sont la cause de grandes
privations à tous les niveaux, [ ... ], M.178).
Du côté de la syntaxe, à quatre reprises remploi de la locution adverbiale d'autre part sans
sa contrepal1ie d'une part créait des erreurs (exemple 35).
Exemple 35 (EXP2: ~.183)
Texte original Les Années folles [ . .. ] marquent un changement notable de la mode féminine: pour la première fois , les femmes montrent leurs jambes; pour la prerllière fois, eUes abandonnent le corset et se coupent le cheveux! En résumé, el1es adoptent une tenue vestimentaire où s'exprime à l'évidence un sentiment de liberté. D'autre part, les surplus d'armée envahissent le marché et donnent un caractère militaire aux modes subséquentes, dont certaines perdurent encore de nos jours. Texte révisé Les Années fo]]es [ ... ] marquent un changement notable de la mode féminine: pour la première fois , les femmes montrent leurs jambes; pour la première fois, elles abandonnent le corset et se coupent les cheveux! En résumé, elles adoptent une tenue vestimentaire où s'exprime à l 'évidence un sentiment de , liberté. Par ailleurs, les surplus d'armée envahissent le marché et donnent un caractère mjlitaire aux modes subséquentes, dont certaines perdurent encore de nos jours. Verbalisation on a un D'autre part qui n'a toujours pas trouvé son d'une part (EXP2 : V.306).
Les locutions d'une part et d'autre part forment, pour la réviseure 2, une paIre
d'organisateurs textuels et, de ce fait, ne peuvent s'employer l'une sans l'autre. Le
problème détecté ici est d'ordre syntaxique et non sémantique parce que la réviseure ne fait
aucune allusion au fait que la locution exprime une relation qui n'a pas lieu d'être
(catégorie Mauvais lien). La réviseure applique systématiquement une règle voulant que
«dans une expression alternative, il faille employer les deux éléments corrélatifs»
(Marquis, 1998: 74). Ainsi, la locution d'autre part est remplacée par par ailleurs dans
trois cas et par également dans l'autre cas.
La réviseure a également détecté la répétition 'des mots n10de et vêtenzent à deux reprises
chacune (voir l ' exemple 24, p. 89). Enfin, troi s des quatre problèmes inconnus mettent en
cause le même nom. Les trois fois, la réviseure a indiqué qu'elle a ajouté le mot siècle
parce qu'il manquait après l'adjectif ordinal dans les phrases suivantes:
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 134
Le cuir restera populaire jusqu'à ce que des produits synthétiques aux qualités particulières viennent en partie le remplacer au xxe siècle (M.39).
Tel est le cas des fascistes itali ens et de leurs chemises noires après la Première Guerre mondiale, des chemises rouges des indépendanti stes italiens au milieu du XIX
e siècle et des vêtements à col Mao dans la Chine communiste (M.l33).
À la fin du xvu( siècle en France, après les troubles révolutionnaires [ ... ] (M. 182).
Mais pourquoi manquait-il? Selon Colin (1986 : 698), « l'ellipse du substantif [siècle] est
générale quand le contexte est clair ». La réviseure considérait-elle alors l'ellipse comme
fautive parce quel' adjectif ordinal n'a pas de nom à qualifier et que ce n'est pas explicite
qu ' il s'agit de siècles? ou envisageait-elle seulement un manque de précision parce qu 'on
devine que xV/lf, XD( et x)( réfèrent à des siècles? Les verbalisations ne sont pas assez
précises pour le déterminer.
La quatrième catégorie de problèmes en 'importance, à égalité avec la catégorie Répétition,
représente les incompatibilités sémantiques (11). On observe que celles-ci visent presque
toutes des verbes (10/11 ) et qu'il y a autant de cas d'incompatibilité entre le sujet et le
verbe qu ' entre le verbe et son complément (5 chacun). L'exemple 36 illustre un cas
d'incompatibilité entre un sujet et un verbe.
Exemple 36 (EXP2 : M.122)
Texte original Également, bon nombre de métiers ont choisi et maintenu des façons de se vêtir qui les rendent facilement reconnaissables Texte révisé Également, à un bon nombr~ de métiers sont associées des façon s de se vêtir qui les rendent facilement reconnaissables.
La réviseure a expliqué que «les lnétiers ne peuvent pas choisir» (EXP2 : V.219). Le
verbe choisir implique d'avoir comme sujet un être animé et ce n'est pas le cas d'un métier.
En conigeant, la réviseure a transfonné la phrase de la forme active à la forme passive,
mais, comme elle l'a fait remarquer, il n' y avait pas beaucoup de possibilités: «ben sinon,
il faudrait que je trouve un autre [ ... ] verbe que les métiers peuvent faire et les métiers ça
peut rien faire» (EXP2 : V .224).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 135
La catégorie Reprise d'information incorrecte, la cinquième en importance, comprend
SU110ut des mauvaises reprises (6/9) et des antécédents absents (2/9). La réviseure 2 s'est
ainsi assuré que les pronominalisations étaient bonnes et qu'elles renvoyaient à des
référents clairs. Elle a remplacé six pronoms personnels thème qui remplaçaient des
compléments de groupes nominaux (voir l 'exemple 37) et des cOlnpléments directs même
s'il n 'y avait pas d 'ambiguïté. Elle a également corrigé deux replises lexicales employées
sans antécédents (voir les exemples 26, p. 90 et 33, ci-dessus).
Exemple 37 (EXP2 : M.19)
Texte original Bien que la majorité des peuples de l'Antiquité se soient in stallés dans de régions au climat relativement tempéré, il ne fait aucun doute que la défense contre le intempéries faisait partie de leurs préoccupation. Qu'iliLsoient installés dans le Croissant fertile ou sur le pourtour de la Méditerranée, [ ... J. Texte révisé Bien que la majorité des pevples de l'Antiquité se soient installés dans des régions au climat relativement tempéré, il ne fait aucun doute que la défense contre les intempéries faisait partie de leurs préoccupations. Que ces personnes soient installés dans le Croissant fertile ou sur le pourtour de la Méditerranée, [ .. . J. Verbalisation c'est que le ils ne renvoie pas au sujet de la phrase précédente (EXP2 : V.54); le sujet, c'est la défense, alors Qu'ils soient installés ... ça peut pas commencer par le ils , le ils renverrait à d~fense alors j'encercle le mot défense pour voir le lien, pourquoi j ' ai corrigé (V.56).
Pour ce qui est des catégories Erreur d'011hographe grammaticale et Non-respect d ' une
règle de présentation, elles viennent au sixième rang avec chacune huit problèmes. Sur
l'ensemble. des elTeurs grammaticales, une seule était causée par une modification
antérieure. Six de ces problèmes ont été résolus en ajoutant un caractère (par exemple
l'ajout du s à libre dans alors que la jeune fille les [ses cheveux] laisse libres sur les
épaules, M.114). Les problèmes de non-respect concernaient quant à eux la typographie des
unités lexicales. Les problèmes visaient surtout les noms et venaient de l'emploi d'une
majuscule de signification à· des nOlns communs (par exemple, ~roisés (2 fois), ~roisades,
Merveilleuses et fréhistoire [voir l'exemple 22, p.89]). Une majuscule au début d'un
adjectif a également été remplacée par une minuscule (Empire Romain ~ En1pire romain,
M.253) et, à deux reprises, la locution moderne style, empruntée à l'anglais, a été mise en
italique par la réviseure (M.222 et M.224).
Enfin, les problèmes de la catégorie Problème pressenti, qui n'arrive qu'au quatorzième
rang pour cette réviseure, à égalité avec les catégories Erreur d'orthographe lexicale et
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 136
Pléonasme, montrent une autre caractéristique du travail de cette réviseure. En plus de faire
peu de modifications par goût personnel (3/141 , 2, 1 0/0) - parce qu 'elle ne veut pas se
substituer à l'auteur comme elle le dit elle-même (EXP2 : E.66) - , la réviseure 2 utilise
habituellement la mine de plomb pour indiquer ces changements alors qu ' elle util ise un
stylo rouge pour marquer les « corrections fermes» (EXP2 : V.42). L ' auteur reconnaît ainsi
facil ement les suggestions et il est libre de les accepter ou non. La verbali sation de la
modification présentée à l 'exemple 38 laisse clairement voir que la réviseure a fait une
simple suggestion.
Exemple 38 (EXP2 : M .67)
Texte original A vant même de se vêtir, les hommes préhi storiques transformaient déj à leur apparence au moyen de peintures, de tatouages, de scarifications - marquages rituels symboliques - et même de déformations. Ces coutumes donnaient parfois li eu à des mutil ations que nous jugeons _ excessives . Texte révisé Avant même de se vêtir , les hommes préhi storiques transformaient déjà leur apparence au moyen de peintures, de tatouages, de scarifications - marquages rituels symboliques - et même de déformati ons. Ces coutumes donnaient parfoi s li eu à des mutilations que nou s jugeons aujourd'hui excessives . Verbalisation j 'ai ajouté aujourd 'hui [ ... ] je lui propose, c'est un ajout de ma part tout simplement (EXP2: V.143) .
Les deux autres problèmes pressentis qui relèvent de préférences ont été corrigés au stylo
rouge, mais c ' est peut-être parce que la réviseure n ' a pas pensé à changer le stylo pour le
crayon puisqu'elle a corrigé rapidement et de façon assez automatique. Dans un cas, elle a
remplacé et par ainsi que sans raison évidente alors qu 'elle reformulait une phrase (M .7)
tandis que dans l ' autre, elle a déplacé le pronom nous (exemple 39).
Exemple 39 (EXP2 : M.232)
Texte original Ce bref tour d ' horizon aura peut-être eu le mérite, du moins l 'espérons-nous, de mettre en lumière à la fo is la richesse et la complex ité de J' hi stoire du costume, ell e-même rattachée de mille et une façons à l ' hi stoire des sociétés humaines. Texte révisé Ce bref tour d ' horizon aura peut-être eu le mérite , du moins nous l 'espérons, de mettre en lumière à la fois la richesse et la complexité de l'histoire du costume, elle-même rattachée de mille et une façons à l'hi stoire des sociétés humaines. Verbalisation Ici , eh du moins l'espérons-nous, j 'aime mieux avoir une formulation du moins nous l'espérons (EXP2 : V.3 86); Ques ti on de goût (V.387).
Chapitre 5 : Présentation et ~nalyse des modifications lexica les 137
5.3.3 Les problèmes détectés par le réviseur 3 Les 102 problèmes détectés par le révi seur 3, qui ont conduit à la centaine de modifications
lexicales, se réparti ssent dans toutes les catégories à l' exception de la catégorie Autre cas
(voir le tableau 5.8). Les deux premières catégories regroup~nt plusieurs problèmes
totali sant le quart des problèmes détectés et résolus (26/102, 25,5 0/0 ). Si l ' on tient compte
des trois catégories sui vantes, on se rend à près de la moitié des problèmes (48/1 02,
47,1 0/0 ).
Tableau 5.8 - Catégories de problèmes détectés et résolus par le réviseur 3 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Catégories de problèmes Parties du discours
Total 0/0 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. Conj .
Erreur d'orthographe 1 9 2 5 17 16,7 grammaticale
Imprécision 3 2 2 1 1 9 8,8 Erreur de syntaxe 2 1 1 2 2 8 7,8 Problème pressenti 4 2 1 7 6,9 Vocabulaire non adapté 5 1 1 7 6,9 Formulation inadéquate 2 2 1 1 6 5,9 Information non nécessaire 2 4 6 5,9 Mauvais lien 3 3 6 5,9 Pléonasme 3 3 6 5,9 Problème inconnu 1 1 3 1 6 5,9 Inexactitude 1 1 1 1 4 3,9
Erreur d'orthographe 3 3 2,9 lexicale Lien manquant 3 3 2,9 Anglicisme 1 1 2 2,0 Impropriété 1 1 2 2,0
Non-respect d'une règle de 1 1 2 2,0 présentation Répétition inutile 1 1 2 2,0
Reprise d'information 2 2 2,0 incorrecte Incohésion temporelle 1 1 1,0 Incompatibilité sémantique 1 1 1,0 Manque d'uniformité 1 1 1,0
Répétition 1 1 1,0
Total 19 26 10 18 7 12 5 5 102
Pour ce réviseur qui affirme faire de la réécriture pour clarifier, simplifier et donner du style
au Inessage et qui ne se préoccupe pas trop de la nOlwe (EXP3 : E.96), il Y a une certaine
incohérence à voir figurer parmi les quatre premières catégories de ce tableau les catégories
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 138
Erreur d'orthographe grammaticale (17) et Erreur de syntaxe (8). La situation s'explique
toutefois de façon assez logique. En effet, lorsqu'on examine les problèmes que renferment
ces catégories, on remarque que la majorité de ces erreurs ont été engendrées à la uite
d ' autres modifications faites par le réviseur (12 des 17 erreurs d'orthographe grammaticale
et 5 de 8 erreurs de syntaxe) 12. Ainsi, quand ce professionnel réécrit en remplaçant ou
déplaçant de longs segments de textes (phrases ou propositions) , Inais parfois aus ides
courts, il lui arrive souvent de devoir ensuite aju ter la grammaire et la syntaxe de autres
propositions et phrases liées à celles qu ' il a modifiées. Il anticipe souvent ces changements,
mais comme il ne se rappelle pas les formulations exactes précédant ou suivant ces
modifications, il ne peut faire les modifications d'un seul coup. C 'est en lisant ou relisant
les phrases qu'il COlTIge au fur et à Inesure les petits problèmes d ' accord et de syntaxe qu ' il
détecte.
L ' exemple 40 montre une des séquences de modifications faites par le réviseur 3. Les
modifications 67 à 70 sont nécessaires à la suite de la modification 66 et toutes sauf la
modification 68 sont lexicales. Le réviseur n'ignorai t pas qu'après avoir fait la
modification 66 il lui faudrait ajuster la suite grammaticale pour respecter la langue, mais
ce n'était qu'en lisant la phrase qu'il savait quoi cOlTiger.
Exemple 40 (EXP3 : M.66 à 70)
Texte original Le lanternon ~ le lanterneau se distinguent des lucarnes : tous deux de plan carré et percés de fenêtres sur leurs quatre côtés, il s sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment. Texte révisé (M.66) Le lanternon ou lanterneau se distinguent des lucarnes: tous deux de plan carré et percés de fenêtres sur leurs quatre côtés , ils sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment. . Texte révisé (M.67) Le lanternon ou lanterneau se distingue des lucarnes : tous deux de plan carré et percés de fenêtres sur leurs quatre côtés , il s sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment. Texte révisé (M.68) Le lanternon ou lanterneau se di stingue des lucarnes: il est de plan carré et percés de fenêtres sur leurs quatre côtés, ils sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment. Texte révisé (M.69) Le lanternon ou lanterneau se distingue des lucarnes: il est de plan carré et percé de fenêtres sur leurs quatre côtés, ils sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment.
12 En tout, 25 des 100 modifications ont été faites à la suite de modifications antérieures, dont 17 (68 %) pour corriger des erreurs de grammaire et de syntaxe. Les autres modifications concernent des formulations inadéquates (4) , un mauvais lien et une mauvaise reprise et deux autres modifications se trouvent dans la catégorie Problème inconnu.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 139
Texte révisé (M.70) Le lanternon ou lanterneau se distingue des lucarnes : il est de plan carré et percé de fenêtres sur ses quatre côtés, il s sont installés sur le faîte de la toiture du bâtiment.
L'exemple 41 ci-dessous illustre une autre séquence de modifications où un problème de
syntaxe, cette fois (M.43), survient à la suite de la modification 40. En voulant mettre le
sujet en début de phrase pour simplifier la structure, le réviseur a par la suite dû faire des
ajustements, notamment en supprimant le déterminant de (M.43) . On remarque en outre
que c'est par souci de simplicité et de clarté que le réviseur a apporté la modification 40, de
laquelle découlent les autres changements (M.41 à 43).
Exemple 41 (EXP3 : M.40 à 43)
Texte original Sur le devant de J.Qlucarne s'aménage la fenêtre, les côtés appelés « jouées » demeurant aveugles . Texte révisé (M.40) Sur le devant de La lucarne s'aménage la fenêtre, les côtés appelés «jouées» demeurant aveugles. Verbalisation Bon làj'ai mis mon sujet au début. Notre sujet de la phrase c 'est la lucarne, moi je l'ai mis au début de la .phrase. J'ai simplifié encore la structure de la phrase (EXP3 : V.51). Texte révisé (M.4I) Sur le devant de La lucarne comporte une fenêtre, les côtés appelés « jouées » demeurant aveugles. Texte révisé (M.42) La lucarne comporte une fenêtre sur le devant de, les côtés appelés « jouées » demeurant aveugles. Texte révisé (M.43) La lucarne comporte une fenêtre sur le devant, les côtés appelés « jouées » demeurant aveugles.
Ainsi, Inême si le réviseur a dit ne pas s'attarder à l'aspect normatif de la langue, il a dû
faire un lninimum de modifications pour respecter les conventions d'écriture après avoir
réécrit certains passages. Autrement, comme il l'a souligné lui-même, à moins que ces
erreurs ne lui sautent aux yeux, il ne passe pas trop de temps à les chercher et à les corriger
parce qu'il sait que la correctrice d'épreuves va s'en occuper (EXP3 : E.146).
La catégorie Imprécision occupe le deuxième rang derrière la catégorie Erreur
d'orthographe gramlnaticale. Le réviseur 3 a détecté et corrigé 9 imprécisions et les unités
visées par ce type de problèmes sont variées (3 noms, 2 verbes, 2 adverbes, 1 déterminant
et 1 préposition). À l'exemple 42, le réviseur a ajouté l'adverbe en principe pour rendre
l'affirmation plus juste, plus précise.
Exemple 42 (EXP3 : M.23 l )
Texte original
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 140
Pour renforcer le caractère d ' ensemble du bâti me nt, le .revêtement du toit de la lucarne reprend _ le même matéri au e t la même faço n que la to iture en général: il peut être de tôle à la canadienne, à join t p incé, à baguette ou à motif; en bardeau de bois, d ' ardoise ou d ' asphalte si le bâtiment es t plus réce nt. Texte révisé Pour renforcer le caractère d ' ensemble du bâtinlent, le revêtement du toit de la lucarne reprend en principe le même maté ri au et la même faço n que la to iture en général: il peut être de tôle à la canadienne, à joint pincé , à baguette ou à moti f; en bardeau de bois, d 'ardoise ou d ' asphalte si le bâtiment est pl us récent. Verbalisation en principe hein je raj oute ça parce que y a des exceptions à ça . Y a des formes par exemple de toi ts qui se pretent pas aux bardeaux de cèdre . On peut avoir un lanternon, euh , par exemple e n métal, dont le revêtement est en métal, alors que la toiture est en bardeaux de bo is (EXP3 : V.579) .
Le révi seur a également affirmé aVOIr apporté une petite préci sion en remplaçant la
préposition dans par avec à l'exemple 43. Ce n ' était pas faux de dire dans l 'ensemble, m ais
il lui semblait plus juste de dire avec l 'ensemble.
Exemple 43 (EXP3 : M.291 )
Texte original Ce type d 'aj out détonne dans ]' ensemble et ne contribue nt pas à l' élégance et au décor de la toiture . Texte révisé Ce type d 'aj out détonne avec l' ense mble et ne contribuent pas à l' élégance et au décor de la toiture. Verbalisation ' Ben c'est parce que c ' est pas dans l ' ensemble que ça détonne, ça détonne touj ours, mais c'est avec l' ensemble que ça détonne . C 'est juste une préci sion (EXP3 : V.763).
La catégorie Problème pressenti vient au quatrième rang et comprend 7 problèmes, à égalité
avec la catégorie Vocabulaire non adapté. Il est surprenant de voir cette catégorie occuper
ce rang pui sque, en théorie , on s' attendrait à ce qu ' un révi seur expérimenté fas se peu de
modifications par goût, comme cela a été le cas de la réviseure 2. Si l ' on compare le
nombre de problèmes pressentis détectés par ces deux révis~urs, on s ' aperçoit qu ' en
proportion le réviseur 3 en a trouvé au moins trois foi s plus que la révi seure 2 (6 ,9 % contre
2,1 0/0) . Cette différence s' explique en grande partie par le type de révision demandé aux
réviseurs. En effet, la révi seure 2 a fait de la révision linguistique et changeait le moins
possible le texte de l'auteur tandis que le révi seur 3 a réécrit le texte, ce qui lui conférait
plus de liberté de le lTIodifier à sa guise. Par ailleurs, le réviseur 3 était très à l ' ai se de dire
que certaines modifications consi staient simplement en des préférences. Il ne cherchait pas
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 141
de raison là où il n ' yen avait pas , comme le laisse VOIr la verbalisation de l'exemple
suivant.
Exemple 44 (EXP3 : M.258)
Texte original Comme pour les fenêtres de façade, bien souvent seule la contrefenêtre nécessite un entretien plus important, car c'est elle qui est le plus exposée aux intempéries. Texte nlodifié Comme pour les fenêtres de façade , bien souvent seule la contrefenêtre exige un entretien plus important, car c'est elle qui est le plus exposée aux intempéri es. Verbalisation J'aime mieux ce mot-là tout simplement (EXP3 : V.688 ).
Les problèmes de la catégolie Vocabulaire non adapté (7) se rapportent quant à eux au
registre de langue et au domain~ d'emploi. Dans deux cas, le réviseur a estimé que les
unités lexicales employées relevaient de la langue orale plutôt qu'écrite (voir l'exemple 27,
p. 91) tandis que dans les autres cas, il les jugeait trop spécialisées même si les lecteurs
connaissent le domaine (exemple 45).
Exemple 45 (EXP3: M.90)
Texte original Leurs piédroits de différents profils encadrent la fenêtre et reprennent certains motifs que]' on retrouve sur les fenêtres des façades. Texte révisé Les montants qui encadrent la fenêtre et reprennent certains motifs que l'on retrouve sur les fenêtres des façades. Verbalisation là je vais, vulgariser [les piédroits]. C'est comme euh, modénature tantôt, qui était un terme correct, mais qui est trop savant pour euh, pour le lecteur même si le lecteur finit par le comprendre là (EXP3 : V.I2l).
Cette modification est intéressante parce qu'elle montre une fois de plus le travail de
réécriture de ce réviseur. Plutôt que de simplement remplacer piédroits par montants, le
réviseur a décidé de reformuler la phrase en insérant une relative: Il a ensuite effectué
d'autres modifications pour obtenir le résultat suivant :
Les montants qui encadrent la fenêtre peuvent.adopter différents profils. Ils reprennent certains motifs que l 'on retrouve sur les fenêtres de façade.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 142
5.3.4 Les problèmes détectés par le réviseur 4 Le réviseur 4 a détecté 11 2 problèmes ayant mené à II I modifications, mais, contrairement
à ceux des révi seurs 2 et 3, il s ne se regroupent pas dans toutes les catégories de problèmes
répertoriées (voir le tableau 5.9). Par contre, comme dans le cas des réviseurs précédents,
on trouve la majorité des problèmes détectés dans quelques catégories seulement. En effet,
les cinq premières catégories de problèmes en importance incluent plus de la moitié de tous
les problèmes détectés (62/11 2, 55 ,4 0/0 ).
Tableau 5.9 - Catégories de problèmes détectés et résolus par le réviseur 4 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Catégories de problèmes Parties du discours
Total 0/0 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. Conj.
Problème pressenti 1 4 2 3 4 2 3 19 17 ,0
Erreur d'orthographe 4 3 2 2 1 12 10,7 grammaticale
Imprécision 3 2 5 1 1 12 10,7 Incohésion temporelle 11 11 9,8 Inexactitude 3 1 1 2 1 8 7,1 Erreur de syntaxe 1 3 1 1 1 7 6,3 Formulation inadéquate 6 1 7 6,3 Mauvais lien 5 2 7 6,3 Information non nécessaire 1 2 2 5 4,5 Pléonasme 1 1 2 4 3,6 Répétition 1 1 2 4 3 ,6 Anglicisme 1 2 3 2,7 Incompatibilité sémantique 3 3 2,7
Reprise d'information 1 1 1 3 2,7 incorrecte
Erreur d'orthographe 1 1 2 1,8 lexicale Impropriété 1 1 2 1,8 Lien manquant 1 1 0,9 Problème inconnu 1 1 0,9
Répétition inutile 1 1 0,9
Total 15 30 11 19 14 11 6 6 112
La catégorie Problème pressenti comporte ] 9 problèmes et fi gure en tête de liste des
catégories de problèmes, loin devant les autres (voir le tableau 5.9). Ce nombre élevé est
plus du double de celui obtenu par le révi seur 3 (7). Si les problèmes pressenti s relevaient
de préférences pour ce dernier et s' expliquaient par le mandat reçu, qui était de réécrire le
texte, gu ' en est-il pour les problèmes pressenti s du révi seur 4?
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 143
Selon toute vraisemblance, ces problèmes dénotent aussi de préférences, dont plusieurs
Inettraient en cause le style d' écriture de l'auteure, c'est-à-dire sa façon personnelle de
s' exprimer. Le réviseur ne semblait guère l ' apprécier, puisqu ' il justifiait souvent en
émettant des jugements du type « j ' aime pas ça » (EXP4 : V.239, 553 et 639), ou encore il
indiquait ses préférences en disant « j ' aime mieux ... » (EXP4: V.73 , 83 , 105, 135, 169,
176, 234, 394, 397, 402, 580 et 618). Par exemple, à deux reprises il a remplacé la
conjonction puisque parce qu ' il ne l'aimait pas. La locution adverbiale dépendamnlent de
ne lui plai sait pas non plus. TI l'a remplacée par selon , mais pourquoi? Est -ce parce que
cette locution est d' usage familier (BDL) ou parce que le réviseur la trouvait trop lourde?
En outre, il n ' était « pas fort » (EXP4 : M.400) sur la locution heureusement que.
Dans d'autres cas , ce réviseur basait ses préférences sur des jugements esthétiques (<< c ' est
pas beau ça », EXP4 : V.84; « ça me paraît plus élégant », EXP4 : V.135 ; « c 'est peut-être
un petit peu plus de style que ... », EXP4 : V.504). Les modifications n'étaient pas réalisées
. pour appliquer des procédés stylistiques reconnus, mais les phrases révisées paraissaient
plus belles aux yeux et aux oreilles du réviseur. Celui-ci ad' ailleurs affirmé ceci à propos
du style, qui explique certaines de ses interventions:
le style, ça évidemment chacun peut avoir le sien [ ... ] moi j'ai un style, j 'espère en tout cas, et puis eh j ' essaie d' en donner un petit peu. Maintenant, y' a des, comme je vous ai dit au début, je laisse pas mal à l'auteur la responsabilité, mais là quand c'est vraiment une absence de style total, ben là faut quand Inême en donner un petit peu là, faut lui donner une chance (EXP4 : E.232).
Ainsi , en suggérant des modifications, le réviseur voulait seulement aider l' auteure à
donner du style à son texte. Comme l'auteure était libre d'accepter ou de refuser les
changements proposés par le réviseur, celui -ci s'autoriserait peut -être davantage de
modifications de ce genre. Les exelnples 46 et 47 montrent deux cas où le réviseur croyait
avoir amélioré la formulation.
Exemple 46 (EXP4 : M.45) Texte original Les clientes qui ve naient de Sainte-M ari e et des paroi sses voi sines, prenaient le plus souvent rendez-vous, mai s, on ne les refu sait j amais, on les fai sait attendre.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 144
Texte révisé Les clientes qui venaient de Sainte-Marie et des paroisses voisines, prenaient le plus souvent rendez-vous, mais on ne refusait jamai s personne, on les faisait attendre. Verbalisation Ouais, j'aime mieux ça, c'est plus, ça me paraît plus élégant (EXP4: V.135).
Exemple 47 (EXP4: M.27) Texte original En se mariant, la femme abandonnait le métier ou elle ne coiffait plus qu'occasionnellement. Celles qui faisaient carrière du métier de coiffeuse, comme Mme lrène Bilodeau, une de nos informatrices, qui coiffa pendant quelque 45 ans, restaient célibataires. Texte révisé En se mariant, la femme abandonnait le métier ou elle ne coiffait plus qu 'occasionnellement. Celles qui faisaient carrière dans ce métier [de coiffeuse M.28], comme Mme Irène Bilodeau, une de nos informatrices, qui coiffa pendant quelque 45 ans, restaient célibataires. Verbalisation Ah , moi j'aimais mieux dans ce métier (EXP4 : V.83); carrière du métier, c'est pas beau ça (V.84).
Enfin, à deux reprises le réviseur 4 a pressenti des problèmes avec l'emploi de déterminants
possessifs et effectué des modifications sans pouvoir se justifier autrement qu'en disant que
c'était mieux avec des détenninants détenninés (voir l'exemple 48). On observe; par
ailleurs , qu'à l'exception des adjectifs toutes les parties du discours ont été visées par des
problèmes pressentis (voir le tableau 5.9).
Exemple 48 (EXP4: M.24)
Texte original C'est presque toujours dans la demeure familiale qu'on ouvrait son salon ou dans une pièce attenante. Texte révisé C 'est presque toujours dans la demeure familiale qu 'on ouvrait le salon ou dans une pièce attenante. Verbalisation j'aime mieux le salon que son salon, on ouvrait le salon, c 'es t tout. C'est une question, moi je trouve que c'est mieux (EXP4 : V.73).
Les erreurs d' orthographe grammaticale et les imprécisions sont aussi parmi les problèmes
les plus souvent détectés par le réviseur 4. Elles viennent au second rang et comptent
chacune pour près de Il % de tous les problèmes (12/112, 10,7 0/0). En ce qui concerne les
erreurs d'orthographe grammaticale, on remarque que plusieurs ont été introduites à la suite
d'autres modifications (5 en tout), comme pour le réviseur 3. On note aussi que tous les
problèmes ont mené à des modifications touchant les caractères, comme dans les exemples
suivants:
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 145
Souvent aussi le boucher exerçait d' autres activités ... (M.96);
Certains parents avaient des méthodes « assez connues » . .. (M.IS1);
Un boucher de Sainte-Anne-de-Ia-Pérade fai saiêflt trois livrai sons de glace par semaine chez ses clients .. . (M.I ]0);
Cependant, plus d ' un barbier a lai ssé le souvenir d 'être au fait des nouvelles du jours. (M.196).
Pour ce qui est des imprécisions, le réviseur trouvait que l'auteure ne s'exprimait pas assez
clairement ou de façon suffisamment précise. En remplaçant (9) et en ajoutant (3) des
unités lexicales, le réviseur voulait amener l ' auteure à préciser sa pensée. Il ad ' ail1eurs dit
que 'les idées, c'était l'auteure qui les trouvait; il les gardait, mais il pouvait les formuler
avec des mots plus précis (EXP4 : V.38). Presque tous les problèmes de cette catégorie
visaient des unités des classes ouvertes (11/12), dont cinq adjectifs, trois noms, deux verbes
et un adverbe (voir le tableau 5.9). Dans une même phrase, par exemple, le réviseur a fait
deux modifications pour apporter des précisions (voir l'exemple 49). Il ad' abord remplacé
le nom médecin par chirurgien puis a ajouté l'adjectif ancienne.
Exemple 49 (EXP4 : M.202 et M.203)
Texte original L 'enseigne du barbier fut généralement celle du bâton rouge et blanc symbolisant le bandage posé sur un membre ensanglanté, un signe issu de l'époque _ où le barbier jouait le rôle de médecin. Texte révisé L 'enseigne du barbier fut généralement celle du bâton rouge et blanc symbolisant le bandage posé sur un membre ensanglanté, un signe issu de l'époque ancienne où le barbier jouait le rôle de chirurgien. Verbalisation Ah oui , oui , c'est pour être préci s parce que les barbiers, ah non, les médecins ne voulaient absolument pas que les barbiers soient considérés comme des médecins (EXP4 : V.609); C'était chirurgien et comme j e vous di s, juste pour faire la saignée (V.6] 0); à l'époque ancienne, ben .. . ça remonte assez loin dans le temps, au moins 300 ans et plus (EXP4 : V.614); c'p~rce que de temps en temps l'auteure parle du 1ge siècle, début du 20e
, c'est plus ancien que ça (V .6IS).
En elnployant chirurgien, le réviseur a précisé et clarifié la situation où anciennement, les
barbiers étaient aussi considérés comme des chirurgiens - et non des médecins - parce
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 146
qu'ils pratiquaient les saignées 13. L'ajout de l'adjectif ancienne après le mot époque venait
quant à lui préciser qu'il s'agit d'une époque plus lointaine que le 1ge siècle.
Dans un autre cas d'imprécision, le réviseur trouvait que le nom emploi dans En se mariant,
la fenlme abandonrzait son emploi [. .. ] (M.26) ne décrivait pas tout à fait bien la situation.
Ce n'était pas inexact de dire que quand une femme se mariait elle abandonnait son emploi,
mais le réviseur estimait que c'était plus précis d'écrire qu'elle abandonnait son métier
parce qu'elle mettait alors fin à sa carrière pour devenir femme au foyer et qu'elle ne
retournait pas sur le marché du travail (EXP4 : V.77-79).
En troisième position, on trouve la catégorie lncohésion temporelle (11/112, 9,8 0/0). Parmi
les six réviseurs, le réviseur 4 est d'ailleurs celui qui a le plus corrigé ce type de problèmes
(11/14 [voir le tableau 5.12 sous § 5.3.7]). C'est l'emploi du passé simple dans les textes
pour décrire les actions faites dans le passé qui a amené le réviseur à faire plusieurs
ajustements de temps de verbe: un verbe au présent de l'indicatif (arrivent) et un au passé
composé (est arrivé) ont ainsi été mis au passé simple. Dans un autre cas, un verbe à
l'imparfait (avait) a été remplacé par un autre et mis au passé simple (ouvrit [voir
l'exemple 50]).
Exemple 50 (EXP4 : M.70)
Texte original À Beloeil, le premier boucher connu, Bénoni Gareau dit Saint-Onge, avait son commerce en 1805. Texte révisé À Beloeil, le premier boucher connu, Bénoni Gareau dit Saint-Onge, ouvrit son commerce en 1805.
D'une part, le réviseur trouvait que le verbe avoir était d'emploi trop général (Imprécision)
et, d'autre part, le contexte énonçant une date déterminée, il assumait qu'il fallait situer
l'action du verbe ouvrir dans le passé défini (EXP4 : V.202). Mais, comme le réviseur l'a
dit:
y' a des choses qui peuvent être négociables, c'est elle, c'est l'auteure qui va décider si en 1805, son commerce était ouvert ou bien s'il l'a ouvert en 1805 (EXP4: V.201) ; J'peux pas le savoir moi. Moi, en tout cas, j'assume, je
13 On pourrait plutôt considérer qu'il s'agit d'un problème d'inexactitude puisque les barbiers n'étaient pas des médecins, mais le réviseur explique sa modification en disant qu'il voulait préciser.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 147
pense que eh, surtout avec eh, une date précise comme ça ben, faut que ça soit le passé défini. Si c'était vers 1805 bon làje dirais, j'aurais il avait son COJnmerce là dans les années 1805, un imparfait (V.202).
Dans six autres cas d'incohésion, des verbes au présent de l'indicatif dans des phrases
formant des paragraphes décrivant le monde rural d'avant 1950 ont été mis à l'imparfait
(exemple 51).
Exemple 51 (EXP4: M.66 à 69) Texte original Les habitants se suffisaient en viande [ ... ]. Car, il y ~ toujours un ami ou un parent cultivateur qui fait bouchelie et peut vendre de la viande à ceux qui en font la demande. Texte révisé Les habitants se suffisaient en viande [ ... ]. Car, il y avait toujours un ami ou un parent cultivateur qui faisait boucherie et vendait de la viande à ceux qui en faisaient la demande. Verbalisation c ' est dans le passé hein. y'en a qui utilisent parfois le présent, qu'on appelle le présent historique, il faut d'abord se situer avant, mais pas dans le cas pour ça (EXP4 : V.190); les autres, il faut les mettre au passé aussi (V.191).
La catégorie Inexactitude vient ensuite en quatrième position (8/112, . 7,1 0/0). Parmi les
inexactitudes corrigées, un secret qui n'en était pas un selon le réviseur a amené celui-ci a
remplacé ce mot par le nom n1éthode (exemple 52).
Exemple 52 (EXP4 : M.150) Texte original Certains parents avaient des secrets « assez connus» cependant; ils tournaient simplement un bol à l'envers sur la tête du garçon et coupaient les cheveux qui dépassaient. Texte révisé Certains parents avaient des méthodes « assez connus » cependant; ils tournaient simplement un bol à l'envers sur la tête du garçon et coupaient les cheveux qui dépassaient. Verbalisation Certains parents avaient des secrets, c'pas, écoutez, quand que l'enfant est sur la chaise pis qu'on y met un bol sur la tête pis a coupe autour, c'pas un secret. Tout le monde le regarde, tout le monde savait dans le village comment ça se faisait. C'est plutôt une méthode (EXP4 : V.445).
Dans un autre cas, à la suite d'une autre modification, le réviseur a dû mettre le nom pères
au singulier (à la maison c'était la n1ère, parfois aussi les pères -7 à la maison c'était la
mère, parfois aussi le père, M.148) pour respecter le fait qu'il « y' avait juste une mère pis
juste un père dans chaque maison» (EXP4 : V.427).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 148
"Enfin, une autre caractéristique des problèmes détectés par ce réviseur concerne la
catégolie Formulation inadéquate. Six des sept problèmes de cette catégorie visent le
pronom qui. Le réviseur a affirmé que l' auteure abusait des qui dans les phrases et il les
enlevait le plus possible pour créer des phrases « plus actives» (EXP4 : V.493). Il trouvait
que la suppression du qui dans une phrase comme celle présentée à l'exemple 53 permettait
d~ voir l'action plus directelnent qu ' avec l'emploi du pronom. Dans un seul cas, le
réviseur 4 a justifié la suppression d'un qui en disant que ça alourdissait la phrase (M.I28).
Exemple 53 (EXP4: M.I OS) Texte original Au début du xxe siècle, certains bouchers g1!i coupaient de la glace sur une rivière, s'en faisaient une réserve qu ' il s vendaient durant l 'été à des particuliers au prix de 8,00 $ dollars pour la saison. Texte révisé Au début du xxe siècle, certains bouchers coupaient de la glace sur une rivière [et, M.] 06] s'en faisaient une réserve qu'ils vendaient durant l'été à des particuliers au prix de 8,00 $ dollars pour la saison. Verbalisation là encore une question de , il faut être actif ici (EXP4 : V .222); encore le fameux qui, voyez-vous? (V.295 ); certains bouchers qui coupaient, s'ils s'en faisaient une réserve, c'était parce qu'ils l'avaient coupé (V.297) .
5.3.5 L,es problèmes détectés par la réviseure 5 La réviseure 5 a détecté 37 problèmes qui ont mené à autant de modifications lexicales.
Ceux-ci se classent dans 14 des 23 catégories de problèmes répertoriés (voir le
tableau 5.10). Ces catégories ne sont par contre pas aussi importantes les unes que les
autres puisque seules les quatre prelnières catégories du tableau regroupent plusieurs
problèmes (9, 9, 4 et 3). Au total, elles rassemblent plus des deux tiers de tous les
problèmes détectés (25/37, 67,6 0/0).
Près de la moitié des problèmes détectés par la réviseure 5 sont des erreurs de syntaxe (9) et
de non-respect d'une règle de présentation (9). Les unités visées par les erreurs de syntaxe
sont surtout des prépositions (5). Par exemple, la réviseure a ajouté deux fois la préposition
à dans une phrase parce que celle-ci devait être répétée pour introduire des compléments
différents (exemple 54).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 149
Exemple 54 (EXP5 : M.56 et M.56.5 )
Texte original Sa mi ss io n es t de pro mouvoir les droits des aînés [ . . . ] ainsi que de conseill er le mini stre responsable des aînés sur toute questi o n qui concerne les personnes âgées, no tamment en ce qui a tra it à la solidarité entre les génératio ns,J' ouverture au plurali sme eU e rapprochement interculturel. Texte révisé Sa mj ss io n est de promouvoir les droits des aînés [ . .. ] ainsi que de conse iller le mini stre responsable de aînés sur toute questi o n qui concerne les personnes âgées, no tamment en ce qu i a trait à la olidarité en tre les générati ons, à l'ouverture au plurali sme e t au rapprochement interculturel. Verbalisation Répétiti o n de la prépositio n à qui est nécessaire (EXPS : V. 302) .
Tableau 5.10 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 5 présentées par ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Catégories de problèmes Parties du discours
Total 0/0 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. ·Conj.
Erreur de syntaxe 1 1 2 5 9 24 ,3
Non-respect d'une règle de 9 9 24,3 présentation
Problème pressenti 2 1 1 4 10,8 Pléonasme 2 1 3 8 ,1 Mauvais lien 2 2 5,4 Vocabulaire non adapté 1 1 2 5,4 Formulation inadéquate 1 1 2,7 Imprécision 1 1 2,7 Impropriété 1 1 2,7 Incompatibilité sémantique 1 1 2,7 Manque d'uniformité 1 1 2,7 Problème inconnu 1 1 2,7 Répétition 1 1 2,7
Reprise d'information 1 1 2,7 incorrecte
Total 12 5 4 1 2 4 7 2 37
La préposition se contractait parfois avec le déterminant suivant , comme le deuxième cas
ci-dessus (à le qui se contracte en au) , mais l'unité visée par la révi seure était bien la
préposition si l'on se fie à la verbali sation. Un autre problème avec la préposition à était dû
à son emploi après le verb~ s'impliquer (il s'est ùnpliqué au syndicat -? il s'est impliqué
dans le syndicat, M.72).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 150
,Parmi les erreurs de syntaxe, trois sont apparues à la suite d'autres modifications 14• Dans
l'une d'elles, la réviseure est aussi intervenue sur une unité qu'elle avait déjà ajoutée dans
une phrase (aux, voir l'exemple 55 -M.52).
Exemple 55 (EXP5 : M.24, M.51 et M.52)
Texte original Les travaux du Conseil visent donc à apporter un éclairage aux décideurs eUntervenants de manière à ce qu ' ils orientent leurs actions en fonction d ' une population vieillissante. Texte révisé (M.24) Les travaux du Conseil visent donc à apporter un éclairage aux décideurs et aux intervenants de manière à ce qu 'i ls orientent leurs actions en fonction d ' une population vieilli ante. Texte révisé (M.51) Les travaux du Conseil visent donc à aider les déc ideurs et aux intervenants de manière à ce qu'ils orientent leurs actions en fonction d ' une population vieillissante.
Texte révisé (M.52) Les travaux du Conseil visent donc à aider les décideurs et les intervenants de manière à ce qu'ils orientent leurs actions en fonction d'une population vieillissante,
Une modification mettant en cause la catégorie grammaticale d'une unité a été classée
comme une erreur de syntaxe. Elle visait l'adjectif aidantes (f. .. ) les besoins des personnes
aidantes, [. .. } M.48), mais c'est finalelnent le nom personnes qui a été supprimé pour
régler le problème. Selon la réviseure, aidantes lui semblait fautif parce qu'elle ne trouvait
pas la forme dans Le Petit Robert et le GDT acceptait l'emploi de l'unité en français
québécois, mais sous la forme nominale seulement.
Pour ce qui est des problèmes de la catégorie Non-respect d'une règle de présentation, les
neuf unités visées sont des noms et les modifications consistaient majoritairement en des
changements de Inajuscules de signification en minuscules (6). Dans plusieurs cas, la
réviseure a apporté ces modifications de façon instinctive et elle est revenue sur deux de ses
décisions . Par exemple, elle a mis une Ininuscule à l1ureau québécois de l'Année
internationale des personnes âgées (M.64) parce qu'elle pensait que le nom prenait une
minuscule dans ce cas-là (EXP5 : V'.352). Après avoir vu le nom écrit avec une majuscule
en cherchant une autre information dans Internet, elle a remis la majuscule initiale au mot
(M.95, mais cette Inodification n' a pas été comptée comme une modifiçation lexicale parce
que la réviseure a alors considéré le mot comme un nom propre). De même, à trois reprises,
14 En tout, c'est 5 des 37 problèmes (13 ,5 0/0) qui n'étaient pas dans le texte de départ à réviser. Outre les trois
erreurs de syntaxe, il y a une répétition et un problème inconnu.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 151
elle a mi s un t minuscule au nOln Table (une foi s au singulier et deux foi s au pluriel) dans
les emploi s suivants :
[ . .. ] dix-sept T ables régionales de concertation des aînés (M.IS et M.98);
[ . .. ] membre de la T able de concertation de Chaudière-Appalaches (M .89).
Au pluliel , la réviseure pensait que le nom tables prenait toujours une minuscule (EXP5 :
V.45). Au singulier, elle ne croyait pas, au moment de faire la modification 89, que le mot
était un nom propre. Elle a plus tard remis la majuscule à fable (M.I06, mais non comptée
comme une modification lexicale) , puis a inséré un commentaire pour le client: « Vérifiez .
si ça prend une majuscule (lo.rsque c 'est au singulier. Au pluriel , ça prend une minuscule). »
Le nom Table lui semblait maintenant être un nom officiel , mais comme elle n 'en était pas
certaine, elle préférait que le client vérifie lui-même et fasse les changements nécessaires
(EXP5 : V.517)
parce qu'il n'y a pas de règle pour ça, pour ce mot-là. Faut vraiment que ça soit le nom officiel, mais c 'est difficile des fois de distinguer c ' tu le nom officiel , c'tu une partie de, une partie d'autre chose, on placerait une minuscule. » (EXP5 : V.518)
Dans un autre cas , la réviseure était certaine que la minuscule était de mise au nom syndicat
(Depuis sa retraite du S.y ndicat, M.79). La dernière modification de majuscule concerne le
nom ministre dans Le Ministre de la Santé et des Services sociaux (M.28).
Deux autres problèmes de non-respect de règles de présentation mettent en cause les noms
aînées et aidantes. Employés comme noms génériques après que les noms personnes ont
été supprimés devant (j3crsoJ'll'lCS aidantes, pCrSOl'lI'lCS aînées) , ils devaient figurer au
masculin pluriel et non au félninin pluriel.
Des goüts personnels ont amené la réviseure 5 à faire quatre modifications lexicales, ce qui
place la catégorie Problème pressenti en troisième position. Sa tendance à vouloir réécrire,
même quand elle ne trouve rien de fauti f, est sans doute ce qui explique ces modifications
(voir § 5.1.5). La réviseure a par exemple remplacé le verbe a effectué par a travaillé et
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 152
l'adjectif ilnporfante par bonne sans raison apparente (voir l'exemple 56). Elle a
simplement mentionné que c ' étaient des préférences.
Exemple 56 (EXP5: M.90 et M.91)
Texte original Monsieur Dean a effectué une partie importante de sa vie profess ionnell e dans le milieu sy ndical. Texte révisé Monsieur Dean a travaillé une bonne partie de sa vie profe sionnelle dans le milieu yndical. Verbalisation ' J'pense c'est une question de préférence là (EXP5: V.444); j 'sais pas. Bonne partie plutôt que partie importante, c'est vrai ment tout des préférences là (V.445).
Elle a aussi reInplacé le verbe est par siège dans il est au conseil d 'administration de
l'Association [. .. } (M.79). Dans ce cas, elle doutait que c 'était seulement par goût parce
que, a-t-elle ajouté, «j 'pas sûre si le est est fautif ou pas» (EXP5 : V.407), mais elle était
certaine que l ' emploi du verbe siéger était correct dans le contexte.
La quatrième catégorie de problèmes en importance ne compte que 3 problèmes. Sur les
3 unités supprimées parce qu'elles créaient des pléonasmes, deux étaient des adjectifs. La
réviseure 5 a ainsi supprimé provinciale après le nom Association québécoise de défense
des droits des personnes retraitées et préretraitées, car si elle est québécoise, cette
association est forcément provinciale (M.87). Elle a aussi biffé professionnelle dans
Monsieur Dean a travaillé une bonne partie de sa vie professionnelle dans le nÛlieu
syndical (M .194) parce qu'en disant que la personne a travaillé dans le milieu syndical, on
fait nécessairement référence à sa vie professionnelle et non à sa vie personnelle.
5.3.6 Les problèmes détectés par la réviseure 6 La réviseure 6 a relevé et corrigé 17 problèmes se répartissant dans 9 catégories (voir le
tableau 5.11). La catégorie Erreur de syntaxe regroupe 35,3 % de tous les problèmes (6/17)
et les autres catégories ne comptent qu'un ou deux problèmes. Il y a fort peu à dire sur les
problèmes détectés par cette réviseure, si ce n'est qu'on relnarque que trois des six
problèmes de syntaxe détectés concernent l'omission de la préposition de. Pour une
réviseure débutante comme elle, ce genre d'erreur semble faci'le à détecter et à corriger.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 1 53
Tableau 5.11 - Catégories de problèmes détectés et résolus par la réviseure 6 présentées pàr ordre d'importance avec répartition des unités visées selon les parties du discours
Parties du discours Catégories de problèmes Total 0/0
Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. Conj .
Erreur de syntaxe 2 1 3 6 35,3
Erreur d'orthographe 1 1 2 11,8 grammaticale Impropriété 1 1 2 11 ,8
Répétition 2 2 11,8
Formulation inadéquate 1 1 5,9 Imprécision 1 1 5,9 Lien manquant 1 1 5,9 Mauvais lien 1 1 5,9 Problème pressenti 1 1 5,9
Total 3 2 2 2 1 1 5 1 17
Dans un cas , la préposition devait être répétée pour introduire un nouveau complément du
nom (entre les municipalités de Lachute et de Campbell's Bay, EXP6: M.10). Dans les
deux au tres cas, la réviseure a jugé qu 'elle manquait pour compléter des évaluations
approximatives indiquées au nloyen de deux nombres joints par à (par exemple, 9000 à
1000 mm ~ de 9000 à 100 mn1, EXP6 : M.21)J s.
Outre ces trois ajouts de prépositions, deux participes passés ont égalelnent été ajoutés pour
coniger la syntaxe. D'une part, la réviseure trouvait qu ' il manquait un verbe dans L'unité
de paysage Lac la Blanche au sud-est du territoire est la plus importante en superficie
(EXP6: V.148). Pour remédier au problème, elle a ajouté situé après Lac la Blanche
(M.16). D'autre part, après avoir supprimé une partie de phrase contenant une information
qui n ' était pas à la bonne place et fu sionné cette phrase avec la suivante, la réviseure s' est
aperçue qu ' il lui fallait ajouter un participe pour rétablir la syntaxe (exemple 57 -M.34).
Exemple 57 (EXP6: M.31 à M.34)
Texte original Le relief de la région écologique est accidenté et morcelé en particulier dans les deux unités de paysages les plus au sud (Figure 2.3). Il s'agit surtout de collines et de hautes collines aux versants en pente de modérée à forte . Texte révisé (M. 31) Le reli ef de la région écologique est accidenté et (Figure 2.32, 11 s'agit surtout de collines et de hautes colljnes aux versants en pente de modérée à forte.
15 En fait , on peut introduire le premier nombre par de pour marquer le point de départ de l'estimation, mais on ne le met généralement pas (Grevi sse, ] 993 : § 2324; Hanse et Blampain , 2005, sous à) .
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 154
Texte révisé (M.32) Le relief de la région écologique est accidenté et Il s'agit surtout de collines et de hautes collines aux versants en pente de modérée à forte (Figure 2.3). Texte révisé (M.33) Le relief de la région écologique est accidenté etsurtout de collines et de hautes collines aux versants en pente de modérée à forte (Figure 2.3). Texte révisé (M.34) Le relief de la région écologique est accidenté et formé surtout de collines et de hautes collines aux versants en pente de modérée à forte (Figure 2.3).
5.3.7 Vue d'ensemble des problèmes ayant mené aux modifications lexicales Après cette analyse détaillée des problèmes, je suis en mesure de répondre à la première
partie de ma deuxième question de recherche: Quels problèmes les réviseurs ont-ils
détectés pour justifier les modifications?
Comme on a pu le' constater, les unités lexicales sont la source de nombreux problèmes
dans les textes et de problèmes de nature très variée. Le tableau général présenté ci-dessous
(tabl~au 5.12) montre que les six réviseurs ont en tout détecté 474 problèmes visant ,des
unités lexicales. Ces problèmes sont répartis dans 23 catégories et ont été résolus en
apportant 464 modifications lexicales. On remarque que les réviseurs plus expérimentés
(réviseurs 2, 3 et 4) ont détecté non seulement plus de problèmes que les réviseurs moins
expérimentés, mais aussi que ces problèmes sont plus diversifiés puisqu'ils se classent dans
davantage de catégories.
On observe également que les premières catégories en importance ne sont pas toutes parmi
les plus nombreuses pour chacun des réviseurs. La réviseure 5 n'a en effet détecté aucune
erreur d'orthographe grammaticale ni d'anglicisme et elle n'a détecté qu'une imprécision,
comme la réviseure 6. Ce sont d'ailleurs les deux réviseures qui ont détecté le moins de
problèmes. La réviseure 2 a détecté, à elle seule, presque tous les anglicismes (23/29) tandis
que le réviseur 4 compte la moitié des problèmes pres~entis (19/38) et plus du tiers des
imprécisions (12/33). Le réviseur 3 cumule également plusieurs imprécisions (9) et
problèlnes pressentis (7), en plus des erreurs d'orthographe grammaticale (17). Cela dit, les
cinq . premières catégories de problèmes en importance pour chacun des réviseurs
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modificat ions lexicales 155
rassemblent généralement la moitié ou plus des problèmes qu ' ils ont détectés (voir les
tableaux 5.6 à 5.11 ).
Tableau 5.12 - Répartition des problèmes détectés par les réviseurs selon les catégories de problèmes (par ordre d'importance)
Réviseurs Catégories de problèmes Tota l 0/0
Rév1 Rév2 Rév3 Rév4 Rév5 Rév6
Erreur de syntaxe 8 14 8 7 9 6 52 11,0
Erreur d'orthographe grammaticale 11 8 17 12 2 50 10,5
Problème pressenti 4 3 7 19 4 1 38 8,0
Imprécision 6 4 9 12 1 1 33 7,0
Anglicism e 1 23 2 3 29 6,1
Impropriété 6 15 2 2 1 2 28 5,9
Répétition 6 11 1 4 1 2 25 5,3
Incompatibilité sémantique 8 11 1 3 1 24 5,1
Non-respect d'une règle de 2 8 2 9 21 4,4 présentation
Formulation ·inadéquate 4 6 7 1 1 19 4,0
Pléonasme 3 3 6 4 3 19 4,0
Information non nécessaire 6 6 5 17 3,6
Mauvais lien 1 6 7 2 1 17 3,6
1 nexactitude 2 2 4 8 16 3,4
Reprise d'information incorrecte 1 9 2 3 1 16 3,4
Incehésion temporelle 2 1 11 14 3,0
Vocabulaire non adapté 2 2 7 2 13 2,7
Problème inconnu 4 6 1 1 12 2,5
Erreur d'orthographe .Iexicale 2 3 3 2 10 2,1
Répétition inutile 1 4 2 1 8 1,7
Lien manquant 1 3 1 1 6 1,3
Manque d'uniformité 1 2 1 1 5 1,1
Autre cas 1 1 2 0,4
Total 65 141 102 112 37 17 474
Les comportements différents des réviseurs en ce qui à trait aux problèmes détectés et
corrigés visant des unités lexicales s'expliquent bien souvent par des éléments de leur
contexte de travail , comme je l'ai exposé à quelques-reprises dans cette section. Ainsi, pour
la Inajorité des réviseurs, leurs caractéristiques professionnelles (formation, expérience,
conception de la révi sion, connaissances), le type de révi sion demandé, les caractéristiques
du texte de même que ses qualités linguistiques et communicationnelles, sans oublier les
goûts personnels, ont eu une incidence à un moment ou à un autre sur les détections qu' ils
ont faites . Le COIl1portement des révi seurs 2 et 3, qui s' oppose littéralement, montre
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 156
d ' ailleurs très bien l'influence que peuvent avoir le mandat et la conception de la révision.
En effet, si l ' on compare l ' ensemble des problèmes détectés par ces deux révi seurs, on
s' aperçoit rapidement que les catégories les plus nombreuses pour un comptent peu de
problèmes pour l'autre (voir le tableau G.3 à l'annexe G). On note par exemple des écarts
considérables pour les huit premières catégories - à l ' exception des erreurs de syntaxe - , la
réviseure 2 ayant détecté beaucoup plus d ' anglici smes , d'impropriétés, d ' incompatibilités
sémantiques, de répétitions, de reprises incorrectes et de problèmes de présentation que le
révi seur 3. Au contraire, celui-ci a davantage détecté de mauvais liens, de vocabulaire non
adapté, d ' imprécisions, de pléonasmes et d ' inexactitudes que la révi seure 2. Si on se
souvient bien, la réviseure 2 faisait de la révision linguistique tandis que le réviseur 3 avait
comme mandat de réécrire le texte. Également, la réviseure 2 a un net penchant pour le côté
normatif alors que le réviseur 3 met toute son énergie à améliorer l 'aspect
communicationnel.
Les deux catégories qui comptent le plus de problèmes se détachent des autres parce
qu'elles sont les seules à regrouper plus de 10 % de l'ensemble des problèmes détectés
(voir le tableau 5.12). Il s' agit des catégories Erreur de syntaxe (52/474, Il %) et Erreur
d'orthographe grammaticale (50/474, 10,5 0/0 ). À première vue, le nombre d ' erreurs de
syntaxe et de gramlnaire relevées dans les textes paraît important puisqu'il représente une
modification lexicale sur cinq, mais plusieurs de ces erreurs ont été créées par les réviseurs
eux-mêmes alors qu'ils apportaient des changements. En effet, sur les 52 erreurs de
syntaxe, 17 sont causées par des modifications apportées au texte par les réviseurs , soit
32,7 0/0 , et 19 des 50 erreurs d 'orthographe gramlnaticale sont également causées par des
modifications faites par les réviseurs, ce qui représente 38 % de ces erreurs 16. Si on ne
tenait compte que des problèmes apparaissant dans les textes originaux, les erreurs de
syntaxe (35) et de grammaire (31) seraient presque similaires en nombre aux imprécisions (33).
La catégorie Problème pressenti occupe une surprenante troisième place avec 38
problèmes. Cela est surprenant parce que cette catégorie indique que les réviseurs ont
modifié plusieurs unités lexicales sans qu ' elles comportent ou causent de véritables
16 Au total , 64 problèmes sont apparus dans les textes à la suite d ' autres modifications. De ceux-ci , plus de la moitié correspondent à des erreurs de syntaxe et de grammaire (36/64, 56,3 0/0 ).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 157
problèmes dans les textes. Il faut toutefois préciser que le réviseur 4, à lui seul , a fait la
moitié de ces modifications (19/38, voir sous § 5.3.4). De plus , certaines d'entres elles sont
vues comme des suggestions à l'auteur, celui-ci étant libre de les retenir ou non.
Les trois catégories suivantes en importance (Imprécision, Anglicisme et Impropriété)
compteNt pour près de vingt pour cent des problèmes détectés (90/474, 19 0/0 ). Une
douzaine ~e catégories , soit environ la moitié (Anglicisme à lncohésion temporelle),
regroupe entre 3 % et 6 % des problèmes. Ces taux sont faibles, mais ils témoignent de la
diversité des problèmes décelés dans les textes. Ensemble, ces catégories totalisent 50 % de
toutes les erreurs et maladresses relevées et corrigées par les réviseurs (245/474, 51 ,7 %).
Les autres catégories de problèmes représentent moins de 3 % des problèmes détectés
(Vocabulaire non adapté à Autre cas).
Enfin, si l'on jette un coup d' œil sur les unités visées par les problèmes détectés, on voit
qu'il existe évidemment des liens naturels entre des unités lexicales et certains problèmes
(voir le tableau 5.13). Par exemple, seuls les verbes (14) ont été visés par les incohésions
temporelles et seulement les adverbes et les conjonctions ont été à l'origine de lnauvais
liens (17) et de liens manquants (6). Les erreurs de syntaxe sont SUltout associées à des
prépositions (19) et à des adverbes (10) tandis que les erreurs d'orthographe grammaticales
ont le plus souvent été décelées sur des verbes (23/50). Les incompatibilités sémantiques
ont presque toutes visé des verbes (20/24). Les unités qui ne respectaient pas des règles de
présentation sont en majorité des noms (13/21) et celles qui occasionnaient une reprise
d'information incorrecte sont surtout des pronoms (11/16). Les répétitions étaient causées
par des noms (11) et des verbes (8) et les noms ont aussi donné lieu à plusieurs
inexactitudes (6/16).
En outre, contrairement à ce que l'on serait tenté de croire, les unités des classes fermées ne
se confinent pas qu'à celtains problèmes; on les trouve dans presque autant de catégories
que les unités des classes ouvertes.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 158
Tableau 5.13 - Détail des unités visées dans chacune des catégories de problèmes
Catégories de problèmes Parties du discours visées
Total 0/0 Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterm. Prép. Conj .
Erreur de syntaxe 7 1 10 4 7 19 4 52 11,0
Erreur d'orthographe 8 23 9 2 8 50 10,5 grammaticale
Problème pressenti 1 10 2 7 5 5 4 4 38 8,0 Imprécision 7 7 5 6 2 2 4 33 7,0 Anglicisme 2 5 6 7 9 29 . 6,1
Impropriété 7 4 3 4 2 8 28 5,9 Répétition 11 8 1 2 2 1 25 5,3 Incompatibilité sémantique 1 20 3 24 5,1
Non-respect d'une règle de 18 1 1 1 21 4,4 présentation
Formulation inadéquate 4 3 7 1 3 1 19 4 ,0
Pléonasme 5 3 8 3 19 4,0 Information non nécessaire 1 2 4 7 1 2 17 3,6 Mauvais lien 8 9 17 3,6 Inexactitude 6 2 2 1 3 2 16 3,4
Reprise d'information 1 11 4 16 3,4 incorrecte
Incohésion temporelle 14 14 3,0 Vocabulaire non adapté .7 2 2 2 13 2,7 Problème inconnu 3 1 1 3 3 1 12 2,5
Erreur d'orthographe 6 1 3 10 2,1 lexicale
Répét ition inutile 2 2 2 2 8 1,7 Lien manquant 5 1 6 1,3 Manque d'uniformité 1 4 5 1,1 Autre cas 1 1 2 0,4
Total 87 117 46 67 36 49 51 21 474
5.4 Les solutions aux problèmes détectés Le troisième objectif que je me sui s fixé est celui de produire une grille de résolution de
problèmes. Par cemmodité, étant donné son étendue, elle est présentée à l ' annexe H. Cette
grille , représentative du travail des révi seurs professionnels sur les unités lexicales, expose
d 'une part les Inoyens linguistiques employés par ces derniers pour corriger les erreurs et
faiblesses décelées, et, d ' autre part, Inontre lesquel s sont les plus souvent utili sés. Grâce à
elle, j e peux donc répondre à la seconde partie de ma deuxième question de recherche :
Comlnent les révi seurs ont-ils résolu les problèmes détectés?
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 159
Dans les li gnes qui suivent , je me borne à commenter les unités modifiées et les unités
fi nales puis j'exemplifie les solutions les plus fréquentes ainsi que d'autres, moins usitées,
Inais tout de même intéressantes.
5.4.1 Observations sur les unités modifiées et les unités finales Comme on devait s'y attendre, les réviseurs ont majoritairement modifié les unités
lexicales . En effet, sur les 474 problèmes détectés, les trois quarts d'entre eux , soit 357, ont
été résolus en modifiant une unité lexicale: 44 ont été ajoutées, 95 ont été supprimées, 213
ont été remplacées et seulement 6 ont été déplacées (voir le tableau 5.14). Sur l'ensemble
des unités lexicales remplacées, 1 S4 l'ont été par une autre unité lexicale -(72,3 0/0) et 27
l'ont été par un groupe de mots (12,7 %). Les 32 autres unités lexicales qui ont subi une
opération de remplacement ont changé de forme (25), notamment pour corriger les
incohésions temporelles (14) et la grammaire (9 [voir l'exemple 28, p. 126]), de face (3) ou
de casse (1) et trois ont été remplacées par un signe de ponctuation. Le réviseur 3, par
exemple, a changé une conjonction par une virgule pour énoncer correctement une série de
telwes coordonnés (De même, les bardeaux de bois ou d'ardoise ou d'asphalte peuvent être
ren1placés [. .. ] , EXP3 : M.84).
Tableau 5.14 - Répartition des unités modifiées selon les opérations d'écriture effectuées
Unités modifiées Opérations Unité Gr. de Total
Caractère lexicale mots
Addition 22 44 3 69 31 % 12,3% 6,7% 14,5%
Suppression 28 95 8 131 39,4 % 26,5 % 17,8% 27,6 %
Remplacement 21 213 34 - 268 29,6% 59,5% 75,5% 56,5 %
Déplacement 6 6 1,7% 1,3%
Total 71 358 45 474 15% 75,5 % 9,5%
Les caractères des unités lexicales ont pour leur part été touchés pour régler 71 problèmes
(15 0/0), dont les principaux sont des erreurs d'orthographe grammaticale (41), des règles de
présentation non respectées (16) et des erreurs d'orthographe lexicale (10). En outre, les
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 160
trois opérations les plus courantes ont été utilisées dans des proportions semblables pour
modifier ces. caractères (22 additions, 28 suppressions et 21 remplacements), contrairement
aux autres unités modifiées qui ont en majorité été remplacées (voir le tableau 5.14).
Quelques groupes de mots ont été modifiés (45/474, 9,5 %), dont 34 remplacés. Souvent,
ces groupes ne sont formés que de deux unités, soit un déterminant et un nom (des
versants), un verbe et un déterminant (travailler la), une conjonction suivie d'une autre
unité (et caractéristique) ou des articles contractés (de + les = des ou à + les = aux).
Par ailleurs, les réviseurs ne remplacent pas de phrases simplement parce qu'une unité
lexicale pose problèlne dans celle-ci. Lorsqu'ils réécrivent des phrases, c'est parce qu'elles
comportent un ou plusieurs autres problèmes qui ne visent pas nécessairement une unité ·
lexicale (voir l'exemple 40, p. 138). La modification d'un paragraphe faite par la
réviseure 1 (voir l'exemple 58) offre un a~tre bel exemple de cette situation, en plus de
montrer un moyen peu usité pour ~IÎlniner une incompatibilité sémantique et une répétition.
La réviseure ad' abord détecté une incompatibilité sémantique entre le verbe possède et son
complément. En poursuivant la lecture de la phrase, elle a aussi repéré la répétition du
verbe comprend. En cOlnplétant la lecture du paragraphe, elle s'est aperçue que ce verbe
était encore présent deux phrases plus loin et elle trouvait en fin de compte que « quand on
lisait ça là là c'tait vraiment pas clair» (EXPI : V.135). Comme il y avait une énumération,
la réviseure s'est décidée à présenter l'information au moyen d'une liste à puces. Ainsi,
tous les verbes servant à introduire le nombre d'emplacements disponibles sur chacun des
sites de campings, dont les verbes c011}prend (répétition) et possède (incompatibilité), ont
été remplacés par des deux-points.
Exemple 58 (EXPI : M.19)
Texte original Le camping du lac du Coq possède actuellement 15 emplacements, le camping du lacBarley en comprend 29 et le camping du lac des Employés civils en comprend 24. Les campings présents aux abords des rivières Malbaie et Barley contiennent respectivement 10 et 30 emplacements. Enfin, le camping du lac de la Galette comprend 2] emplacements. Texte révisé L'offre de camping est telle:
• Au lac du Coq: 15 emplacements; • Au lac Barley : 29 emplacements; • Au lac des Employés civils: 24 emplacements;
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 161
• Aux abords de la rivière Malbaie : ] 0 emplacements; • Aux abords de la rivière Barley : 30 emplacements; • Au lac de la Galette: 2] emplacements.
5.4.2 Observations sur les moyens utilisés En examinant la grille de résolution de problèmes (voir l'annexe H) , j 'ai dénombré
55 solutions différentes dont la plupart remédient à plus d'un problème. À cet effet, le
premier constat sur les solutions utilisées est qu'il y en a généralement plusieurs possibles
pour un même problème. Outre la catégorie Erreur d'orthographe grammaticale où la
grande majorité des 16 solutions consiste à corriger la grammaire, celles qui en comptent le
plus sont Anglicisme -sémantique (6), Erreur de syntaxe (la), Formulation inadéquate -
manque d 'effet stylistique (6), Impropriété (9), Incompatibilité sémantique (8), Problème
pressenti (8), Répétition (11) et Vocabulaire non adapté -registre (6). À l'opposé, seules
quatre catégories de problèmes ne comportent qu ' une solution: Incohésion temporelle,
Information non nécessaire, Lien manquant et Répétition inutile. Le temps ou le mode des
verbes est changé pour corriger les incohésions temporelles tandis que les unités lexicales
qui apportent des informations non nécessaires, surtout des adverbes (7/17) et des adjectifs
(4/17), ou qui créent des répétitions inutiles sont supprimées. D'autres adverbes sont le plus
souvent ajoutés quand des liens sont manquants (5/6).
Le second constat concerne les fréquences d'emploi des solutions. Celles-ci montrent que
des moyens ont naturellement été privilégiés pour résoudre certains problèmes précis,
notamment pour les anglicismes sémantiques, les imprécisions, les impropriétés, les
incompatibilités sémantiques, les inexactitudes, les mauvais liens, les pléonasmes et les
répétitions. Je présente ci-dessous les solutions que les réviseurs ont appliquées
majoritairelnent pour résoudre ces problèmes ainsi que quelques autres moins fréquentes.
Anglicisme
Sur les 18 anglicismes sémantiques, 10 ont été remplacés par des unités lexicales de sens
équivalent. Le réviseur 4 a par exemple substitué le verbe opéraient par exploitaient dans la
phrase suivante: Elle a ouvert son salon [de coiffure} à l'arrière la maison de ses parents,
dans laquelle ses sœurs opéraient aussi un comnlerce (EXP5 : M.38). À elle · seule, la
réviseure 2 a utilisé èe moyen à huit reprises, mais elle a également eu recours a trois autres
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 162
moyens, dont une fois le remplacement d'une unité, en l'occurrence un adjectif, par une
subordonnée relative de sens plus précis (voir l ' exemple 59).
Exemple 59 (EXP2 : M.136)
Texte original Dans·le but de rendre leur évasion difficile, on a longtemps obligé les pri sonnier à endosser de vêtements spéciaux . Texte révisé Dans le but de rendre leur évasion difficile, on a longtemps obligé les pri sonniers à endosser des vêtements qui ne laissaient aucun doute sur leur situation.
En ce qui a trait aux anglicismes syntaxiques, tous détectés par la réviseure 2 , on se rappelle
que celle-ci en a corrigé plusieurs (7/9) en supprimant le déterminant indéfini placé en
début d'apposition (voir sous § 5.3.2).
Erreur de syntaxe
Les erreurs de syntaxe ont le plus souvent été corrigées en supprimant (20) ou en ajoutant
(16) des unités lexicales. Des prépositions (8), des déterminants (5) et des pronoms (4)
figurent parmi les unités effacées tandis que, du côté des ajouts , il y a aussi plusieurs
prépositions (7), mais on recense également des adverbes de négation (5) et quelques
verbes (3). On remarque de plus que les six réviseurs ont utilisé ces solutions au moins une
fois chacun. Dans cette catégorie, six autres unités ont été remplacées par d'autres de même
classe grammaticale, mais de sens différent. La réviseure 2 a utilisé ce moyen à cinq
reprises, dont quatre fois pour corriger la locution adverbiale d'autre part qui était utilisée
sans sa contrepartie d'une part (voir sous § 5.3.2).
Erreur d'orthographe grammaticale et Erreur d'orthographe lexicale
La catégorie Erreur d'orthographe grammaticale regroupe des problèmes de nature variée si
l'on considère les différents types de corrections appliquées. Les plus fréquents ont été des
verbes mal accordés avec leur sujet (12) et d'autres unités mal accordées en genre ou en
nOlnbre avec un nom (12). On note également plusieurs problèmes d'accord de participes
passés (8) et de noms qui n'avaient pas le bon genre ou le bon nombre (8) . La grande
lnajorité des problèmes · de grammaire détectés (41/50, 82 0/0) se règlent par contre
facilement en modifiant des caractères. Par exemple, l 'ajout de caractères a permis de
corriger huit unités qui n'étaient pas bien accordées en genre ou en nombre avec le nom
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 163
(des petit_ lnétiers, EXP4 : M.162), de même que. cinq noms qui n'avaient pas le bon genre
ou le bon nombre (d'autres activité_ (EXP4: M.93). Également, cinq suppressions de
caractères ont réglé des problèmes d'accord des verbes avec leur sujet (ce type d 'ajout
détonnent, EXP3 : M.290). Les remplacements d'un·ités visaient aussi à accorder certains
verbes avec leur sujet (chacun des sites sont [. .. ] ~ chacun des sites est [. .. ] , EXP.1 :
M.16) en plus d'accorder les unités en genre et en nOlnbre· avec l'antécédent ([ ... ] l 'homme
et la femme cherchent à plaire aux dieux, à séduire le sexe opposé, à satisfaire sa propre
vanité ~ [ ... ] leur propre vanité (EXP2 : M.5).
En ce qui a tra~t aux erreurs d'orthographe lexicale, elles ont été plus souvent corrigées en
supprimant des caractères qu'en en ajoutant (8 contre 2).
Imprécision
La première solution envisagée lorsqu'il y a une imprécision est de remplacer l ' unité
lexicale par une autre de sens plus précis. Les réviseurs ont utilisé 'ce moyen pour corriger
13 des 33 imprécisions détectées. Le réviseur 4 a souvent eu recours à cette solution (7/12),
comme dans l'exemple 60 ci-dessous.
Exemple 60 (EXP4 : M.21)
Texte original Un de ces chauffeurs de taxi se souvenait que les femmes étaient plus belles en revenant, qu'en s'en allant. Parce que, pour économiser, el1es avaient l 'habitude de se couper elles-mêmes les cheveux avant d' arriver chez la coiffeuse. Texte révisé Un de ces chauffeurs de taxi se souvenait que les femmes étaient plus bel1es en revenant, qu'en s'en allant. Parce que, pour économiser, elles avaient l 'habitude de se couper elles-mêmes les cheveux avant d'aller chez la coiffeuse. Verbalisation avant d 'arriver chez la co~ffeuse, mais là si je garde avant d'arriver, ça veut dire qu'elles pourraient faire ça dans le taxi, tsé. (EXP4 : V.59).
Dans trois autres cas, des groupes de mots ont été les unités remplacées par d'autres
groupes de mêlne catégorie grammaticale et de sens plus précis. La réviseure 5 a par
exemple remplacé un groupe nominal dans lequel figurait un nom abstrait pour le
remplacer par un autre groupe nominal qui explicite davantage ce dont il est question (Ce
phénomène [ . .. ] ~ Le nombre de personnes âgées [ ... ], EXP5 : M.34).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 164
L 'autre moyen le plus souvent employé pour apporter une précision consiste à ajouter une
unité lexicale (9/33). Par exemple, en ajoutant la préposition jusque (voir l'exemple 61) , la
réviseure 2 a voulu préciser en marquant clairement qu'il était question d 'une période de
temps.
Exemple 61 (EXP2: M.112) Texte original Un détail de la silhouette annonce parfois l' état civil: ainsi, de l'Empire romain _ au début du xxe siècle, la femme mariée attache et souvent même cache ses cheveux, alors que la jeune femme les lai sse libre sur les épaules. Texte révisé Un détail de la silhouette annonce parfois l'état civil: ainsi, de l'Empire romain jusqu'au début du xxe
siècle, la femme mariée a ttache e t souve nt même cache ses cheveux, alors que ]a jeune femme les lai se libre sur les épaules .
À quelques occasions (7/33), les réviseurs ont remplacé une unité par une autre de sens
différent tout en justifiant qu'ils apportaient une précision ou qu'ils clarifiaient le propos.
Le réviseur 3 a entre autres changé le nom qualité par esthétique dans cette intention-là
dans la phrase suivante: Il est impératif de respecter le patron de pose afin de préserver la
qualité de l'ouvrage (EXP3 : M.235.5). Il a mentionné qu'on ne parlait pas de la qualité de
l'ouvrage en termes de solidité, mais qu'on faisait référence à son esthétique (EXP3 :
V.603-607).
Impropriété
Parmi les 28 impropriétés, 18 ont été corrigées en remplaçant une unité lexicale par une
autre de même catégorie grammaticale, mais de sens différent. Cette solution est une des
rares à avoir été utilisée par les six réviseurs. C'est la réviseure 2 qui l'a le plus souvent
appliquée (10/18); c'est d'ailleurs elle qui a détecté le plus grand nombre d'impropriétés
(15). Elle a par exemple justifié le remplacement de la locution prépositionnelle Lors de par
Au cours de (voir l'exemple 62), en expliquant que, pour elle, « lors de [ ... ] ça veut encore
dire "à l'époque de", on va dire lors de la Conquête, lors de mon séjour en France , mais au
cours de ou eh, pendant. [ ... ] y'en a beaucoup qui ne le remplace pas» (EXP2 : V.217).
Exemple 62 (EXP2: M.120)
Texte original Lors de funérailles officielles ou royales , ne voit-on pas la majorité des personnes présentes vêtues de noir?
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 165
Texte révisé Au cours de funérailles offi cielles ou royales, ne voit-on pas la majorité des personnes présentes vêtues de noir?
Dans d' autres cas , elle 'a remplacé un adjectif par une subordonnée relative de sens différent
(Les conditions climatiques ne sont pas les seules concernées lorsqu 'il s 'agit de p rotection
~ Les conditions climatiques ne sont pas les seules qui entrent en ligne de compte
lorsqu'il s 'agit de protection, EXP2: M.23) ainsi qu 'un groupe nominal incomplet (une
denrée de) par un déterminant (un). Pour cette modification (voir l'exemple 63), la
réviseure a indiqué que la soie ne peut pas être une denrée parce que le mot s'emploie
seulement pour parler des aliments: « au départ, denrée était une impropriété », dit-elle.
Exemple 63 (EXP2: M.167) Texte original La soie produite en grande quantité en Orient est considérée dès le début de notre ère, dans les pays occidentaux , comme une denrée de luxe. Texte révisé La soie produite en grande quantité en Orient est considérée dès le début de notre ère, dans les pays occidentaux, comme un luxe. Verbalisation la soie produite, làj 'sui s allée voir [dans le Robert] si eh le mot denrée était réservé seulement qu 'à des aliments (EXP2 : V.289). - C 'est le cas . La soie produite ne peut pas , n' est pas une denrée (V.290) - Au départ , denrée était une impropriété (V.295).
Incolnpatibilité sémantique
La moitié des incompatibilités sémantiques (12/24) a été corrigée en substituant une unité
de même catégorie grammaticale et de sens différent à l'unité problématique. C 'est ce qu ' a
fait la réviseure 2 en remplaçant le verbe détenir par afficher dans ils [les vêten1ents]
aideront une personne à jouer un rôle ou conféreront à une autre une prestance qu'elle ne
détient pas toujours (EXP2 : M.55), puisque selon elle « on ne détient pas une prestance, on
l ' affiche » (EXP2: V.127). Panni les autres moyens utilisés, on remarque qu ' à quatre
repri ses des unités ont été remplacées par d'autres équivalentes (quasi-synonymes), par
exemple confectionné au lieu de préparé, en parlant d 'un vêtement (EXP2 : M.245) et
soulève au lieu de suscite dans La pudeur [. .. ] suscite une question sur laquelle les avis
sont partagés : [ ... ] (EXP2: M.142).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 166
Inexactitude
Comme les incompatibilités, les problèmes d ' inexactitude sont pour la plupart résolus en
remplaçant l ' unité vi sée par une autre de même catégorie grammaticale et de sens différent
(9/16). Ce sont les révi seurs 3 et 4 qui ont le plus recouru à cette solution (3 et 5 foi s
respectivement). Une foi s, par contre, le réviseur 3 a dû remplacer un groupe de mots par
un autre parce qu ' il employait un nom de genre différent et qu ' il accordait en même temps
l ' adjectif le qualifiant (exemple 64).
Exemple 64 (EXP3 : M.314)
Texte original Certaines lucarnes présentent des formes particulières : ell es peuvent par exemple être ornées d ' un œil-debœuf, cette fenêtre circulaire ou ovale, ou comportant une chatière, un pe tit ouvrage placé sur le ver ant [ . . . ] Texte révisé Certaines lucarnes présentent des éléments particuliers: ell es peuvent par exemple être ornées d ' un œilde-bœuf, cette fenêtre circulaire ou ovale, ou .comportant une chati ère, un petit ouvrage placé sur le versant [ ... ] Verbalisation ben ça c ' est parce que c ' est faux. C 'est pas la forme de la lucarne. C 'est un élément de la lucarne . Hein . C 'es t parce que c 'était inexact tout simplement (EXP3 : V.823) .
Mauvais lien
Les 111auvais liens étaient surtout causés par la présence de connecteurs qui exprimaient des
relations qui n'avaient pas lieu d'être (13/16). Ces unités , 7 conjonctions et 6 adverbes, ont
été supprimées par tous les réviseurs qui ont détecté ce type de problème. Les réviseurs 3 et
4 ont également remplacé deux unités et un groupe de mots par d ' autres unités de sens
différents pour rétablir les bonnes relations.
Non-respect d'une règle de présentation
Le principal problème lié au non-respect d'une règle de présentation consistait en la
présence d 'une majuscule initiale à 14 unités, dont 12 noms, qui s ' écrivent entièrement en
minuscules (14/21). Trois autres unités ont été modifiées en remplaçant leur face pour
passer du rOll1ain à l'italique afin de marquer leur appartenance à la langue anglaise (une
fois donner et deux fois lnodern style). La réviseure 5 a également supprimé des caractères,
soit le -e final des noms aidantes et aînées, pour respecter une règle voulant que le genre
masculin l ' emporte sur le genre féminin.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 167
Pléonasme
Les unités lexicales qui créent des pléonasmes sont pour la majorité supprimées (14/19),
par exemple notamment dans [. .. j il est actif auprès de diverses organisations bénévoles,
dont notamlnent Les petits frères des Pauvres (EXP5: M.65). Comme pour les
inexactitudes, le réviseur 3 a parfois modifié des groupes de mots pour coniger des
pléonasmes. II en a suppriIné trois dont le groupe nominal son cachet et (voir
l'exemple 65).
Exemple 65 (EXP3 : M.263)
Texte original Certains détails d'ornementation [ ... ] donnent tout son cachet et son caractère stylistique à la lucarne [ ... ] Texte révisé Certains détails d'ornementation [ ... ] donn~nt tout son caractère stylistique à la lucarne [ ... ] Verbalisation Bon ben le cachet ça découle du caractère stylistique . Ça fait que je l'ai enlevé (EXP3 : V.700). - Une redondance (V.701).
Enfin, un verbe qui causait un pléonasme a été remplacé par un autre parce que la structure
de la phrase n'adlnettait pas qu'il soit supprimé (ils tournaient simplement un bol à l'envers
sur la tête du garçon [ ... j ----+ ils mettaient sin1plement un bol à l'envers sur la tête du
garçon [ ... j, M.153). Pour le réviseur,« s'ils le mettaient à l'envers, il était nécessairement
tourné» (EXP4 : V .451).
Répétition
Il semble y avoir de nombreuses façons de remédier à un problème de répétition, mais la
plus courante est celle de remplacer l'unité répétée par une autre de sens équivalent (9/25),
par exemple vêten1ents par habits (EXP2 : 164) ou selon par d'après (EXP2 : M.149). Un
autre moyen utilisé à quelques reprises est le remplacement d'un groupe de mots par une
unité lexicale de catégorie différente, mais de sens équivalent (5/25). Par exemple, pour
éviter la répétition du nom emplacenlents ci-dessous (voir l'exemple 66), la réviseure 1 n'a
pas eu le choix de remplacer le complément du nom dans lequel se trouvait l'unité visée.
Exemple 66 (EXPI : M.9)
Texte original [ ... ] qui permettra aux responsables du MRN de juger de la conformüé des emplacements de camping ainsi que du nombre de ces emplacements selon les règles préétablies concernant le respect de l'environnement.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 168
Texte révisé [ ... ] qui pennettra aux responsables du MRN de juger de la conformité des emplacements de camping ainsi que de leur nombre selon les règles préétablies concernant le respect de l'environnement.
5.4.3 Sommaire des solutions aux problèmes détectés On retient des solutions employées pour résoudre les problèmes détectés que trois fois sur
quatre les réviseurs ont modifié seulement une unité lexicale. Des caractères des unités
lexicales visées sont aussi parfois modifiés (15 0/0), principalement pour corriger des erreurs
d'orthographe grammaticale et lexicale ainsi que pour se conformer à des règles de
présentation. Environ 10 % des problèmes détectés visant une unité lexicale nécessitent la
modification d'un groupe de mots pour les coniger. Les groupes de mots sont par contre le
plus souvent formés de deux ou trois unités seulement: dans ces cas, en plus de corriger
l'unité visée, les réviseurs ajustent machinalement les autres unités dépendantes qui
gravitent autour de celle-ci. Enfin, les phrases ne sont pas modifiées lorsqu'une unité
lexicale pose problème, à moins que d'autres problèmes, visant ou non une unité lexicale,
soient aussi détectés à l'intérieur de celles-ci et qu'ils rendent leur remplacement inévitable.
Les six réviseurs ont appliqué 55 solutions différentes pour résoudre les problèmes
détectés. Plusieurs d'entre elles règlent plus d'un problème et certaines sont plus typiques à
une catégorie de problèmes qu'à d'autres. Il faudrait voir si les tendances dégagées sont
aussi présentes chez d'autres réviseurs. Une telle analyse permettrait peut -être également de
découvrir d'autres moyens de corriger les problèmes.
5.5 Les préoccupations des réviseurs reflétées par les modifications lexicales
Pour atteindre Illon dernier objectif, qui est de déterminer les préoccupations révisionnelles
des réviseurs, j'ai groupé chacune des catégories de problèmes (ou sous-catégories) sous la
préoccupation révisionnelle dont elle rend principalement compte. Comme à la section 5.3,
je présente d'abord les résultats pour chacun des réviseurs avant d'en faire une synthèse. À
]' aide de quelques exemples, je montre le travail des réviseurs sur des aspects normatifs,
communicationnels et stylistiques des textes.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 169
5.5.1 Les préoccupations de la réviseure 1 Le regroupement des catégories de problèmes selon les préoccupations gu ' elles reflètent
montre que la principale préoccupation de la révi seure 1 est normative. En effet, 38 des 64
modifications lexicales traduisent cette préoccupation (59,4 % [voir le tableau 5 .15]) . Il
n ' est donc pas surprenant de noter que quatre des six premières catégories de problèmes en
importance pour cette révi seure (Erreur d ' orthographe grammaticale, Erreur de syntaxe,
Incompatibilité sémantique et Impropriété) se classent sous la préoccupation normative.
Tableau 5.15 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations
(réviseure 1)
Préoccupation normative Préoccupation communicationnelle
Catégories de problèmes Nombre % (n/64) Catégories de problèmes Nombre % (n/64)
Erreur d'orthographe 11 17,2 grammaticale Imprécision 6 9,4 Pléonasme 3 4,7
Erreur de syntaxe 8 12,5 Inexactitude 2 3,1 Incompatibilité sémantique 8 12,5 Vocabulaire non adapté 2 3,1 Impropriété 6 9,4 Répétition inutile 1 1,6 Erreur d'orthographe lexicale 2 3,1
Non-respect d'une règle de 2 3,1 présentation
Reprise d'information incorrecte 1 1,6 (antécédent éloigné)
Autre cas 1 1,6
Anglicisme 1 1,6 Total : 7 16 25,1
Total: 7 38 59 ,4
Préoccupation esthétique Préoccupation personnellé
Catégories de problèmes Nombre % (n/64) Catégorie de problèmes Nombre % (n/64)
Répétition 6 9,4 Problème pressenti 4 6,3
Manque d'uniformité 1 1,6 Total: 1 4 6,3
Total: 2 7 11
La gramlnaire et la syntaxe sont à l ' origine de la moitié de ces modifications (19/38) : les
erreurs de grammaire ont été les plus fréquemment détectées (11) tandis que les erreurs de
syntaxe (8) viennent juste derrière (voir § 5.3.1). Ces modifications touchent la forme des
unités et leur emploi syntaxique, mais la dimension sémantique a également donné lieu à
des modifications lexicales normatives. En effet, la réviseure 1 a été très attentive au sens
des unités et à la combinaison de celles-ci pour formuler le message puisqu'elle a détecté
huit incompatibilités sémantiques et six impropriétés (voir sous § 5.3.1).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 170
La préoccupation communicationnelle se manifeste dans 16 modifications lexicales, ce qui
représente tout de même le quart des modifications (25,1 0/0). Bien que la révi seure ait une
vision normative et communicationnelle de son travail de révision (voir § 5.l.1 ), les
modifications lexicales qu ' elle a faites sont davantage liées à des aspects normatifs qu'à des
aspects communicationnels. Cela coïncide toutefois davantage avec son mandat qui en était
un de révision linguistique.
L'aspect communicationnel est surtout marqué par des modifications amenant des
précisions pour faciliter la compréhension du texte (6 [voir sous § 5.3.1] ) et des
modifications éliminant des pléonasmes pour faciliter la lecture (3). Parmi les pléonasmes
détectés, un visait le nom quiétude (voir l'exemple 67). La réviseure avait l'impression que
l'auteure disait la même chose en coordonnant les noms quiétude et tranquillité. Elle s'en
est assuré en vérifiant le sens de quiétude dans un dictionnaire avant d'apporter un
changement. La réviseure trouvait de plus que la phrase n'était pas jolie et, en la
reformulant, elle a gardé le nom tranquillité et a supprimé quiétude.
Exemple 67 (EXP! : M.78)
Texte original La quiétude et la tranquillité sont visées et tous les aménagements sont tournés vers cela. Texte révisé Les aménagements ont pour but d'assurer une grande tranquiIIité aux utilisateurs. Verbalisation lei , je m'interroge à savoir si quiétude pis tranquillité c'est pas des synonymes. Parce que c'est deux mots qui dans ma tête se ressemblent beaucoup pis je regarde si eh, si dans le fond elle ~ pas dit deux foi s la même chose. Faque je cherche quiétude dans le Multi. Et quiétude qui se définit par « tranquillité ». Il s ne l'ont pas mis comme synonyme, mais ils l'ont donné comme j ' pense c'était grande eh, « grande tranquillité » ou quelque chose comme ça. Faque là j'en déduis que c'est la même chose. Pis là j'pense à si je mets paix et tranquillité, mais j ' trouve encore que ça se ressemble trop. Faque là je sais que je vais reformuler la phrase totalement, pi s j'trouvais que la phrase était pas jolie La quiétude et la tranquillité sont visées et tous les aménagements sont toun'lés vers cela. J'aimais pas ça. Faque je décide de la reformuler (EXPl : V.366)
Enfin, un exemple d'inexactitude visait l'unité lexicale correction, précédant le nom de la
réviseure dans la page titre (M.3). La réviseure a affirmé qu'elle fait de la révision et non de
la correction. Le mot correction a un sens plus restreint que révision: il est liInité à la
vérification de la surface des textes (on parle d'ailleurs de correction d'épreuves, mais de
révision de forme et de fond), en plus d'être associé aux aspects normatifs d'un texte. Pour
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 171
la réviseure, cela ne correspond pas exactement à son travail et c'est pourquoi elle a
remplacé le mot par révision.
La troisième préoccupation reflétée par les modifications lexicales de la réviseure 1 est
esthétique (7/64, Il 0/0). Elle est représentée essentiellement par la volonté de la réviseure
d'éviter les répétitions dans le texte (6/7). Ces répétitions concernaient surtout les verbes
(4/6 [voir sous § 5.3.1]).
Une faible proportion de modifications lexicales (6,3 0/0) témoigne d 'une préoccupation
personnelle. Ce sont les modifications effectuées sur la base de jugements personnels qui
rendent compte de cette préoccupation (problèmes de la catégorie Problème pressenti). La
réviseure 1 n'a apporté que quatre modifications par préférence, dont les deux seules
consistant en des déplacements. Elle trouvait qu'il était mieux d'écrire et ne répond donc
pas au lieu de et donc ne répond pas (M.IS) et elle préférait une formulation comme Il faut
toutefois noter, où l'adverbe est placé avant l'infinitif, plutôt que Il faut noter toutefois, où
l 'adverbe est placé après l'infinitif (M.26)J7. Les deux autres changements visaient les
prépositions concernant et quant à (locution) qui ont été remplacées par des unités de
même famille, en l'occurrence la locution prépositive relativement à et ]' adjectif relatives (à).
Hormis l'emploi de relativen1ent à (ou de la variante relatif à) que la réviseure semble
préférer dès que le contexte le permet, on peut dire que celle-ci n'abuse pas de ses goûts
personnels et qu'elle juge de la pertinence de modifier ou non une unité avant de le faire.
La formation qu'elle a reçue, en particulier pendant le certificat en rédaction
professionnelle, peut expliquer en partie cette attitude puisqu'elle aurait appris l'importance
de pouvoir justifier les modifications apportées dans les textes d'autrui. Le peu
d'expérience de la réviseure pourrait également être un facteur à retenir: la réviseure ayant
moins d ' assurance, elle évite de faire des modifications qu'elle peut difficilement
expliquer.
17 Selon Le bon usage, les adverbes marquant le lieu et le temps suivent l'infinitif, mais les autres peuvent être placés avant ou après. « [L]a langue courante préf[ère] l'antéposition pour les adverbes courts (notamment de degré) et la postposition pour les adverbes longs (notamment de manière) , tandis que la langue littéraire est plus libre » (Grevisse, 1993 : § 936).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 172
5.5.2 Les préoccupations de la réviseure 2 La réviseure 2 considère la révision comme un travail normatif sur les textes (cÇ)rriger les
anglicismes, les fautes de syntaxe, la ponctuation et les participes passés [voir § 5 .l.2]). Les
modifications lexicales qu'elle a apportées traduisent bien cette vision puisque 93 d ' entre
elles se rapportent à des aspects normatifs, soit environ les deux tiers (68,9 % [voir le
tableau 5.16]). Ce pourcentage constitue l~ plus élevé parmi les six réviseurs en ce qui a
trait à cette préoccupation. On remarque d ' ailleurs que parmi les huit premières catégories
de problèmes en importance pour cette ré~iseure (voir le tableau 5.7 sous § 5.3.2) , seule la
catégorie Répétition ne correspond pas à une préoccupation normative.
Le quart des modifications normatives avaient pour but de corriger des anglicismes (23/93,
24,7 0/0). Ceux-ci sont pour la plupart d'ordre sémantique (14/23), comme le sont d'ailleurs
une lnajorité des modifications normatives apportées pa~ la réviseure 2 (50/93 , 53 ,8 0/0 ). En
corrigeant non seulement des anglicismes sémantiques, mais aussi des impropriétés (15) et
des incompatibilités sémantiques (11), de même qu'en établissant clairement les reprises et
les antécédents (8), la réviseure s'assure que le message est bien formulé du point de vue de
la langue.
Lorsque la réviseure affirme se donner comlne buts en révision de rendre le texte clair et
lisible le plus possible (voir § 5.l.2), c'est aussi à la langue qu'elle fait référence. En effet,
cette professionnelle rattache le concept de lisibilité aux éléments de surface du texte
comme le font Henry (1975) et Richaudeau (1984), de même que Préfontaine et Lecavalier
(1996) lorsqu'ils parlent de lisibilité microstructurelle. La lisibilité se limite alors à la
dimension linguistique du texte et à la reconnaissance des éléments de surface comme les
lettres, les mots et les phrases. En corrigeant les anglicismes, les ambiguïtés lexicales
(impropriétés et incompatibilités sémantiques), les pronominalisations (mauvaises reprises),
la syntaxe et la gramlnaire (voir des exemples sous § 5.3.2), la réviseure garantit que le
message est fonnulé clairement, puisque la langue utilisée (le code) pour le faire est
maîtrisée (Arcand et Bourbeau, 1995 : 16). Pour cette réviseure, la clarté et la lisibilité sont
donc étroitement liées au respect des règles d'écriture plutôt qu'à des principes
cOlnmunicationnels. À l'autre bout de la chaîne, elle suppose que le lecteur maîtrise
également le code et qu'il peut décoder le message sans peine.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications le xicales
Tableau 5.16 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations
Préoccupation normative
Catégories de problèmes Nombre
Anglicisme 23 Impropriété 15 Erreur de syntaxe 14 Incompatibilité sémantique 11
Erreur d'orthographe 8 grammaticale
Non-respect d'une règle de 8 présentation
Reprise d'information incorrecte (antécédent absent, mauvaise 8 reprise) Erreur d'orthographe lexicale 3
Incohésion temporelle 2
Mauvais lien 1
Total : 10 93
Préoccupation esthétique
Catégories de problèmes Nombre
Répétition 11 Formulation inadéquate (manque de style, mauvais effet 2 stylistique) Manque d'uniformité 2
Total : 3 15
Préoccupation indéterminée
Catégorie de problèmes Nombre
Problème inconnu 4
Total: 1 4
(réviseure 2)
0/0 (n/135)
17 11 ,1 10,4 8,1
5,9
5,9
5,9
2,2
1,5
0,7
68,9
0/0 (n/135)
8,1
1,5
1,5
11 ,1
0/0 (n/135)
3
3
Préoccupation communicationnelle
Catégories de problèmes Nombre
Information non nécessaire 6 Imprécision 4 Répétition inutile 4 Pléonasme 3 Formulation inadéquate (lourde) 2 1 nexactitude 2 Vocabulaire non adapté 2 Lien manquant 1
Reprise d'information incorrecte (reprise ambiguë)
Autre cas
Total: 10 26
Préoccupation personnelle
0/0 nI 135)
4,4 3 3
2,2 1,5 1,5 1,5 0,7
0,7
0,7
9,3
0/0 135) Catégorie de problèmes Nombre nI
,2 Problème pressenti 3 2 ~----------------------+-------+---Total: 1 3 2 ,2
ation
iterla
Seulement 26 des 135 modifications lexicales de la réviseure 2 révèlent une préoccup
communicationnelle (19,3 0/0). Ces modifications sont principalement faites pour facil
lecture en élilninant les lnots inutiles, que ce soit parce qu'ils apportent de l'inform
superflue (6 [voir l'exemple 68]), qu'ils sont inutilement répétés (4) , qu'ils créen
pléonasmes (3 [voir l'exemple 23, p. 89]) ou qu'ils établissent des liens qui n'ont pa
ation
t des
s lieu
d'être (1).
173
.....
Exemple 68 (EXP2: M.170)
Texte original
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 174
En ce début de millénaire, alors que la vitesse des moyens de transport et de communication tend à abolir les di stances , rares sont désormais les matières impossibles à trouver dans l'entourage immédiat. Texte révisé En ce début de millénaire, alors que la vitesse des moyens de tran port et de communication tend à abolir les di stances, rares sont les matières impossibles à trouver dans l'entourage immédiat. Verbalisation [ ... ] le désonnais à absolument pas eh (EXP2 : V.298); [est] absolument pas [nécessaire] 2.30].]
On trouve également sous la préoccupation communicationnelle quelques modifications
faites pour apporter des précisions (4) et corriger des inexactitudes (2). Par exemple, pour
convenir davantage au sens de l'énoncé présenté à l'exemple 69, la réviseure a remplacé le
verbe posséder par le verbe porter. Le premier ne crée pas d'inexactitude, mais il est
sémantiquement moins précis et approprié pour le contexte dans lequel il figure.
Exemple 69 (EXP2 : M.252)
Texte original Les soieries d'Extrême-Orient, les fourrures de Russie , les cotons d'Égypte, les teintures d'Asie mjneure, tous ces produits tant convoités pénètrent en Europe et donnent à ceux qui les possèdent l'occasion d ' éblouir les cours aristocratiques, lieux privilégiés de la création des modes. Texte révisé Les soieries d'Extrême-Orient, les fourrures de Russie, les cotons d'Égypte, les teintures d'Asie mineure, tous ces produits tant convoités pénètrent en Europe et donnent à ceux qui les portent l ' occasion d ' éblouir les cours aristocratiques, lieux privilégiés de la création des modes. Verbalisation j' me di s que c'est probablement les soieries, les fourrures, les cotons, les gens les portent, il ne font pas que les posséder, parce que c'est en les portant qu'ils éblouissent les cours (EXP2 : V.413).
Enfin, sur le plan communicationnel, un problème de reprise anaphorique corrigé visait à
lever une ambiguïté parce que plusieurs antécédents étaient possibles pour un pronom (voir
l'exemple 70). Ci-dessous, Elle réfère à la politique de Louis XIV, mais ce pronom poun"ait
tout aussi bien s'appliquer à la structure politique ou à la politique absolutiste de Louis XIII.
Exemple 70 (EXP2 : M.185)
Texte original La structure politique agit parfois jusque dans les moindres détails du vêtement, comme le fait la politique absolutiste de Louis xm, mais plus encore celle de Louis XIV. El1e place les nobles dans un tel état d'oisiveté que leur principale préoccupation est d'acquérir une place de choix à la cour. Texte révisé La structure politique agit parfois jusque dans les moindres détails du vêtement, comme le fait la politique absolutiste de Louis XIII, mais plus encore celle de Louis XIV. Celle-ci place les nobles dans un tel état d'oisiveté que leur principale préoccupation est d'acquérir une place de choix à la cour.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 175
Verbalisation Je remplace Elle place par Celle-ci, qui renvoie au sujet de la phrase précédente, qui est la structure politique (EXP2 : V .311); c'est une règle parce que sinon Elle ... (V .312) ; La structure politique agit parfois jusque dans les moindres détails du vêtement, comme le fait la politique absolutiste de Louis Xl/l, mais plus encore celle de Louis XlV. Et c'est celle de Louis XIV qui place les nobles dans un tel état d 'oisiveté (V.313).
La préoccupation esthétique, qui occupe le troisième rang avec 15 modifications (11 ,1 %),
se caractérise surtout par des modifications faites pour éviter des répétitions (11/15). Ce
résultat est d ' ailleurs similaire à celui de la réviseure 1. Le plus souvent, les unités lexicales
étaient répétées dans des phrases consécutives (par exemple, Plus près de nous, les deux
guerres mondiales mobilisent la population [. .. ). Ces deux guerres [. .. }. ~ Plus près de
nous, les deux guerres mondiales mobilisent la population [ .. . J. Ces deux conflits [. .. }.
M.177).
Les autres modifications dans cette préoccupation visaient à alnéliorer le style de deux
formulations et à en uniformiser deux autres. Dans un cas de formulation inadéquate, la
place du verbe arriver dans la proposition créait un mauvais effet selon la révi seure (voir
l'exemple 71); en le déplaçant, celle-ci a estimé que cela donnait un effet plus fort, moins
négatif, et qu'elle améliorait la phrase.
Exemple 71 (EXP2: M.157)
Texte original Certains optent pour la protection, tandi s que d'autres soutiennent que le besoin de se parer pour séduire ou se di stinguer ne peut qu ' arriver en premjère place. Texte révisé Certains optent pour la protection , tandis que d 'autres soutiennent que le besoin de se parer pour séduire ou se di stinguer ne peut arriver qu ' en première place. Verbalisation [ ... ] le besoin de se parer pour séduire ou se di stinguer ne peut qu 'arriver en première place, c 'es t comme si on était, on se serait attendu à lire ne peut qu' arri ver en dernière place. Tandis que si on écrit le besoin de se parer pour séduire ou se distinguer ne peut arriver qu 'en [ ... ] première place [ ... ] pour moi c 'est plus fort. On a plus l'impression qu ' on va lire prenlÏère qu'en dernière , si on dit ne peut qu'arriver en dernier, on dirait que c'est le dépit qui est là-dedans, tandi s qu'on ne peut arriver qu 'en première place, c'est plus fort (EXP2 : V.283).
Pour ce qui est du manque d'uniformité, la réviseure a remédié à l ' un des problèmes en
remplaçant un déterminant indéfini par un déterminant défini pour obtenir une symétrie de
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 176
forme (un papillon sur une épaule ou une fleur à la cheville --* un papillon sur l 'épaule ou
une fleur à la cheville, M.85).
La préoccupation personnelle est quant à elle négligeable dans le travail de la réviseure 2
(3/135, 2,2 0/0) . Celle-ci justifie la grande majorité de ses modifications et quand elle juge
qu 'une lnodification est plus subjective, elle utilise généralement la mine de plomb pour
l'indiquer (voir sous § 5.3.2).
Enfin, seulement quatre problèmes (3 %) n ' ont pu être classés dans l ' une ou l ' autre des
préoccupations (voir sous § 5.3.2), mais cela n ' a pas d' incidence sur les résultats obtenus :
la préoccupation normati ve est clairelnent dominante.
5.5.3 Les préoccupations du réviseur 3 Les modifications lexicales du réviseur 3 sont aussi principalement faites dans , un but
normatif. Cette préoccupation se révèle en effet dans 43 des 100 modifications qui vi saient
des unités lexicales (voir le tableau 5.17). Ce résultat est inattendu si l'on considère que ce
réviseur affirme ne pas faire de révision linguistique « normative » (voir § 5.1 .3).
La préoccupation communicationnelle n'est toutefois pas très loin derrière la préoccupation
normative, puisque 38 % des modifications lexicales rendent compte de cette préoccupation
(voir le tableau 5.17). La différence entre les deux préoccupations est donc assez faible
(5 %). De plus, les nombreuses erreurs grammaticales et syntaxiques occasionnées par des
modifications que le révi seur 3 a apportées au texte (17 pour ces deux catégories, voir sous
§ 5.3.3) contribuent à gonfler le pourcentage de modifications normatives . Si l 'on ne tient
pas compte de ces 17 modifications, on obtient des pourcentages de 45 ,8 % pour la
préoccupation communicationnelle (38/83) et de seulement 31 ,3 % pour la préoccupation
normative (26/83). La préoccupation communicationnelle est alors une foi s et demie plus
importante que la préoccupation normative. Ces pourcentages sont ainsi plus représentatifs
de la préoccupation révisionnelle de ce réviseur. Mais, peu importe le calcul, la réalité est
qu ' il y a toujours un minimum de modifications qui doivent être faites pour assurer la
qualité linguistique des textes, même en réécriture. Améliorer la compréhension en
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 177
modifiant des passages du texte rend parfois certains ajustements grammaticaux et
syntaxiques nécessaires. Sans doute que le réviseur 3 ne pensait pas en faire autant 18.
Tablea.u 5.17 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseur 3)
Préoccupation no rmative Préoccupation communica tionnelle
Catégories de problèmes Nombre Catégories de problèmes N ombre 0/0
(n/100)
Erreur d'orthographe Imprécision 9 9 grammaticale 17 17
Vocabulaire non adapté 7 7 Erreur de syntaxe 8 8 Information non nécessaire 6 6
Mauvais lien 6 6 Pléonasme 6 6
Erreur d'orthographe lexicale 3 3 Inexactitude 4 4 Anglicisme 2 2 Lien manquant 3 3 Impropriété 2 2 Répétition inutile 2 2
Non-respect d'une règle de 2 2
Reprise d'information incorrecte 1 1 présentation (antécédent éloigné)
Incohésion temporelle Total: 8 38 38
Incompatibilité sémantique
Reprise d'information incorrecte (mauvaise reprise)
Total : 10 43 43
Préoccupation per sonnelle Préoccupation esthét ique
Catégorie de problèmes Nombre 0/0
n/1 00) Catégories de problèmes N ombre 0/0
(n/100) Problème pressenti 7 7
Total: 1 7 7
Formulation inadéquate (mauvais effet, manque d'effet 6 6 st listi ue Manque d'uniformité 1 1 Répétition 1 1
Total: 3 8 8
Préoccupation indéterminée
Catégorie de problèmes Nombre 0/0
(n/100 Problème inconnu 6 6
Total: 1 6 6
Pour le reste, on remarque que même si la préoccupation normative regroupe une di zaine
de catégories, plusieurs d ' entre elles ne contiennent qu ' un , deux ou troi s problèmes (voir le
tableau 5.17). Outre les erreurs d'orthographe grammaticale et de syntaxe (voir des
18 Il faut aussi se rappeler que les modifications lexicales ne représentent que 35 % de toutes les modi fications que le réviseur 3 a apportées au texte. Les autres modifications peuvent marquer une plus forte préoccupation communicati onnelle .
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 178
exemples sous § 5.3.3), le réviseur 3 a cOITigé plusieurs mauvais liens (6) qui nuisaient à la
cohérence du texte. Ainsi, pour rétablir les bonnes relations logiques d ' addition, trois mots
liens - deux conjonctions et un adverbe - ont été remplacés par d'autres. C' est le cas à
l'exemple 72 où le réviseur a remplacé ou par et, puisque la lucarne produit trois effets
(addition) ~t non l'un des trois · effets (alternative): «t'as pas le choix entre les trois ...
entres les trois effets de la lucarne, ça s' additionne », dit-il (EXP3: V.367; voir aussi
l'exemple 21, p. 88).
Exemple 72 (EXP3 : M.160)
Texte original .J'
Placée au-dessus de l'entrés principale, elle [la lucarne] rompt l' austérité d ' une façade , accentue son style ou donne au bâtiment une image plus imposante. Texte révisé Placée au-dessus de l'entrés principale, elle [la lucarne] rompt l'austérité d'une façade, accentue son style et donne au bâtiment une image plus imposante.
Par ailleurs, la correction d'un des deux anglicismes révèle davantage l'intérêt du réviseur à
vouloir faciliter la compréhension du texte (objectif communicationnel) plutôt qu'à corriger
une faute de langue (objectif normatif). En effet, dans la phrase Comme pour les fenêtres de
la façade, bien souvent seule la contrefenêtre nécessite un entretien plus important compte
tenu de son exposition plus sévère aux intempéries, le réviseur mentionne la présence d'un
anglicisme, mais on comprend bien en lisant la verbalisation ci-dessous que ce problème est
pour lui peu important comparativement à celui que pose la forme de la phrase:
Compte tenu de son exposition plus sévère, ben là, y a un anglicisme. Bon, bien souvent seule la contrefenêtre nécessite un entretien plus important, car c'est elle qui est le plus exposée aux intempéries ben compte tenu de son exposition ... Dans la mesure du possible, à peu près partout vous avez dû remarquer, j'essaie de, d'utiliser des verbes, plus, le plus souvent des verbes. Ça, c'est juste juste pour une question de vivacité du texte là. Pour le, pour le style. Le dynamisme du style. Là on est devant un fait là, c'est elle qui est le plus exposée. C'est plus facile à imaginer que compte tenu de son exposition. Autrement dit, toujours préférer le verbe au nom (EXP3 : V.173).
Ainsi, plutôt que de simplement remplacer l'anglicisme, il reformule la fin de la phrase en
écrivant car c'est elle qui est le plus exposée aux intempéries (M.1 09).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 179
En ce qui concerne la préoccupation nonnative, on note enfin qu'une seule modification a
touché la typographie pour corriger la présentation visuelle d'un mot de langue étrangère
dans le texte, soit dornler, qui a été mis en italique plutôt qu'entre guillemets (M.15).
Même si elle arrive en deuxième position, la préoccupation communicationnelle occupe
une place importance chez ce réviseur puisque, comme je l'ai mentionné précédemment,
38 % des modifications lexicales ont été faites dans cette optique. Les problèmes qui sont
associés à cette préoccupation sont également mieux répartis dans les catégories de
problèmes que ceux des catégories de la préoccupation normative.
En expliquant les choses le plus justement possible et en employant des mots précis, le
réviseur veut remédier à des imprécisions (9) et ainsi aider le lecteur à comprendre pl us
facilement le message. C'est donc par souci de clarté qu'il a ajouté deux adverbes (parfois
et en principe, voir 'l'exemple 42, sous §5.3.3)) et remplacé sept autres unités lexicales dont
deux verbes, deux noms (voir l'exemple 13, p. 85) et un groupe nominal.
Le réviseur 3 a aussi amélioré l'aspect communicationnel du texte en adaptant le
vocabulaire au destinataire et à la situation de communication (7 [voir des exemples sous
§ 5.3.3]), en supprimant les unités porteuses d'information inutile (6) et redondantes (6) , en
corrigeant les inexactitudes (4) ainsi qu'en explicitant des liens de cause et d'addition (3).
Les unités supprimées parce qu'elles n'apportaient pas d'information utile à la
compréhension des propos sont des adverbes (4) et des adjectifs (2). Dans les ouvrages de
rédaction, ces deux parties du discours figurent d'ailleurs souvent dans les exemples de
mots inutiles à suppritner (notamment CSLF, 2000 : 73). Le réviseur a par exemple enlevé
l'adverbe individuellement dans la phrase De mênle, les bardeaux de bois, d'ardoise ou
d'asphalte peuvent être relnplacés irtdividucllcrncnt comme pour une couverture principale
(M.85); il a fait de même avec l'adjectif utile dans Elle [la lucarne] servait aussi à donn,er
plus d'espace tJtfi.te et à se rapprocher du mur extérieur [. .. ] (M.16).
Les pléonasmes (6) ont amené le réviseur à supprimer trois noms et trois adjectifs.
Connaissant bien la façon d'écrire de l'auteur pour avoir révisé d'autres textes de lui, le
réviseur savait qu'il « a tendance à faire beaucoup de redites» (EXP3 : E.57). Il s'attendait
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 180
donc à devoir supprimer des unités pour enlever les redondances et améliorer le texte,
comme à l'exemple 73.
Exemple 73 (EXP3 : M.197 et M.202)
Texte original La lucarne à fronton pignon occupe de façon majestueuse le centre de la toiture; ses dimensions importantes en font un élément structurant et caractéristique de la toiture. Texte révisé (M.] 97) La lucarne à fronton pignon occupe de façon majestueuse le centre de la toiture; ses dimension en font un élément structurant et caractéristique de la toiture. Verbalisation je l ' enlève [le mot importantes] parce que si c 'est majestueux , c ' est forcément important (EXP3 : V.493 ). Texte révisé (M.202) La lucarne à fronton pignon occupe de façon majestueuse le centre de la toiture; ses dimensions en font un élément structurant de la toiture. Verbalisation c'est parce que si c ' est structurant de la toiture, forcément ça fait partie de la caractéristique de la toiture (EXP3 : V.499).
La préoccupation esthétique vient au troisième rang (8 %), juste devant la préoccupation
personnelle (7 0/0) et la préoccupation indéterminée (6 0/0). Contrairement aux réviseures 1
et 2, la préoccupation esthétique du réviseur 3 n'est pas principalement attribuable aux
répétitions qu'il a voulu éviter, mais bien à des formulations inadéquates sur le plan
stylistique (6/8). Le réviseur mentionne d'ailleurs qu'il réécrit aussi pour donner du style au
texte (EXP3 : E.96). Il a par exemple ajouté un adverbe pour donner du rythme à une
phrase (tantôt dans elles sont tantôt cintrés, tantôt en arc, droites, etc., M.237) et il a
remplacé deux participes présents qui «enlev[aient] de l'effet sur le plan stylistique»
(EXP3 : V.42 [exemple 74]).
Exemple 74 (EXP3 : M.36)
Texte original Une grande variété de lucarnes se retrouve en façade à l'aplomb des murs, faisant alors partie intégrante de l'élévation. Texte révisé U ne grande variété de lucarnes se retrouve en façade à ]' aplomb des murs. Elles font alors partie intégrante de l'élévation. Verbalisation j 'élimine le plus souvent possible aussi, les participes présents parce que les participes présents enlèvent, le moteur de la phrase c'est le verbe, et si on le met au participe présent, be-n forcément le participe présent est subordonné au verbe pleinement conjugué, donc ça enlève de ]' effet sur le plan stylistique. Autrement dit, c 'est pour redonner au verbe toute sa puissance d'évocation (EXP3: V.42); en plus , ça améliore le rythme (V.43).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 181
À l'exemple 75 , il a également modifié l'effet de style produit en déplaçant l 'adverbe
toutefois :
Exemple 75 (EXP3: M.168) Texte original Toutefois, certaines lucarnes peuvent être « rentrantes » , aménagées en retrait de l'aplomb de mur , ou être « sur le devant » , c'est-à-dire qu 'elles excèdent le versant de la toiture. Texte révisé certaines lucarnes peuvent Toutefois être « rentrantes » , aménagées en retrait de l 'aplomb des murs, ou être « sur le devant » , c'es t-à-dire qu 'ell es excèdent le versant de la toiture. Verbalisation c' t ' un effet vraiment de style [ . . . ] Certaines lucarnes peuvent toutefois . .. euh, je le déplace parce que je trouve en position antéposée ça insiste trop sur le toutefois et ce sur quoi je pense qu 'on doit insister ici c'est sur euh, certaines lucarnes et non pas les fo is où y a des lucarnes tsé » (EXP3 : V .414) .
La préoccupation personnelle (7 0/0) compte sept modifications apportées sur la base de
problèmes pressentis, qui sont en fait des préférences. Ce pourcentage est à peine plus élevé
que celui de la réviseure 1 (6,1 0/0) . Comme je l'ai déjà mentionné, le fait que ce réviseur
réécrivait le texte et pouvait le modifier à sa guise pour l ' améliorer et le rendre agréable à
lire explique ses préférences. Considérant qu ' il avait toute la latitude voulue pour réécrire le
texte, on peut dire que ce réviseur n' abuse pas de ses goûts personnels.
Enfin, les modifications lexicales auxquelles je n ' ai pas été capable d 'associer une
préoccupation parce que les problèmes sont inconnus représentent 6 % de toutes les
modifications. Ce pourcentage est relativement important si ]' on considère que les
préoccupations personnelle et esthétique ont à peu près le même taux. Cependant, à moins
que ces modifications ne se rapportent davantage à une préoccupation qu'à une autre - ce
qui n' est pas le cas selon moi -, il est peu probable qu 'elles aient un impact majeur sur les
résultats obtenus et le classement des préoccupations normatives et communicationnelles.
Le réviseur 3 est celui EIui a fait le plus grand nombre de modifications au cours de
l ' expérimentation (289 en tout), mai s aussi celui qui a fait les plus complexes. Lors de la
verbali sation , quelques-unes de ces modifications sont passées inaperçues, d ' où les
problèmes inconnus visant des unités lexicales.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 182
5.5.4 Les préoccupations du réviseur 4 Le réviseur 4 obtient lui aussi un pourcentage de préoccupation normative supérieur à celui
de la préoccupation communicationnelle (44,1 % contre 30,6 % [voir le tableau 5.18]). Cela
concorde bien avec le mandat reçu qui l'engageait d' abord à tenir compte des aspects
nonnatifs du texte.
Tableau 5.18 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (réviseur 4)
Préoccupation normative Préoccupation communicationne Ile % %
Catégories de problèmes Nombre (n/111 ) Catégories de problèmes Nombr e (n/111
Erreur d'orthographe Imprécision 12 10,8 grammaticale 12 10,8
Inexactitude 8 7,2
Incohésion temporelle 11 9,9 Information non nécessaire 5 4,5 Erreur de syntaxe 7 6,3 Pléonasme 4 3,6 Mauvais lien 7 6,3 Formulation inadéquate (longue ,
lourde) 2 1,8 Anglicisme 3 2,7 Incompatibilité sémantique 3 2,7 Lien manquant 1 0,7 Erreur d'orthographe lexicale 2 1,8 Répétition inutile 1 0,7 Impropriété 2 1,8 Reprise d'information incorrecte 1 0,7 Reprise d' information incorrecte (reprise ambigüe)
2 1,8 (antécédent absent) Total: 8 34 30 ,6
Total: 9 49 44,1
Préoccupation personnelle Préoccupation esthétique % %
Catégorie de problèmes Nombre (n/111 ) Catégories de problèmes Nombr e (n/111 ) Problème pressenti 19 17,1 Formulation inadéquate 5 4,5
Total: 1 19 17,1 (manque d'effet stylistique)
Répétition 4 3,6
Total: 2 9 8,1
Préoccupation indéterminée %
Catégorie de problèmes Nombre (n/111 ) Problème inconnu 1 0,9
Total: 1 1 0,9
La préoccupation nonnative du réviseur 4 ressemble à celle du réviseur 3. En effet, en plus
d'être dans une proportion équivalente (43 % pour le réviseur 3 et 44 % pour le réviseur 4),
les modifications qui y sont regroupées visent sensiblement à corriger les mêmes genres de
problèmes. Honnis les incohésions temporelles, particulières au réviseur 4 (voir des
exemples sous § 5.3.4), les problèmes corrigés les plus fréquents sont des erreurs
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 1 83
d 'orthographe grammaticale ( 12 [voir des exemples sous § 5.3.4]) et de syntaxe (7), dont
plusieurs ont aussi été occasionnées par des lTIodifications antérieures (8/19), et des
mauvais liens (7). En outre, les autres catégories ne COlTIportent que deux ou trois
problèmes, dont les catégories Anglicisme (3 ), Incompatibilité sémantique (3) et
Impropriété (2).
Sur le plan normatif, le réviseur 4 a notamment détecté et corrigé sept mauvais lien . Dans
tous les cas sauf un , des adverbes (4) ou des conjonctions (2) ont été supprimés. Les
adverbes aussi (3 fois) et cependant ont été biffés parce qu ' il s exprimaient des relations
d ' addition et d ' opposition qui n ' avaient pas lieu d 'être. Les conjonctions mais et or ont
également été enlevées pour des rai sons semblables. Seul l ' adverbe puis a été remplacé par
aussi (Puis on prétendait que le pain d'habitant était meilleur[. .. ) ~ On prétendait aussi
que le pain d 'habitant était meilleur J .. . }, M.227) parce que, selon le réviseur, «ça vient
pas après, ça s' ajoute tout simplement » (EXP4 : V. 714). En effet, l'idée exprimée dans la
phrase est une raison de plus qui explique pourquoi les boulangers ont commencé
modestement, les deux premières étant que le pain acheté coûtait plus cher que celui qu 'on
faisait chez soi et que c 'était mal vu pour une femme de ne pas cuire le pain de sa famille.
La préoccupation communicationnelle, qui vient au second rang (30,6 0/0 ), est surtout
marquée par des modifications qui touchent au contenu informatif (26/34, 76,5 0/0 ).
L ' auteure espérait d'ailleurs que le réviseur 4 porte une attention particulière à cet aspect
des textes (voir § 5.1.4). Le réviseur n ' y a donc pas manqué pui squ'il a entre autres apporté
plusieurs précisions (12) et corrigé des inexactitudes (8) pour ajuster et améliorer le
contenu (voir des exemples sous § 5.3.4). Parmi les six réviseurs, le réviseur 4 est d'ailleurs
celui qui a détecté le plus d ' imprécisions et d ' inexactitudes (voir le tableau 5.12 sous
§ 5.3.7)1 9.
De nombr~uses modifications reflétant une préoccupation communicationnelle ont aussi été
faites par le réviseur 4 pour faciliter la lecture et la compréhension du texte puisque celui-ci
a retranché plusieurs éléments qui n'étaient pas intéressants, soit 5 informations non
nécessaires et 4 pléonasmes. On remarque encore une fois que les unités supprimées sont
19 En moyenne, les 6 réviseurs ont détecté 5,5 imprécisions et 4 inexactitudes .
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 184
surtout des adverbes et des adjectifs (inl1nédiatement, ensuite [voir l ' exemple 18, p . 87J ,
mêmes et certains qui apportaient de l'information inutile; puis, occasionnellelnent [voir
l'exemple 76 ci-dessousJ et achetée qui créaient des redondances) .
Exemple 76 (EXP4 : M.65)
Texte original Les habitants se suffi saie nt e n viande et les « j ournaliers » élevaie nt leur porc et leurs volai Iles, n'achetant que peu de viande, si ce n 'est du bœuf des culti vateurs, occasionnellement. Texte révisé Les habitants se suffi saie nt en viande et les « j ournaliers » élevaient leur porc et leurs volailles, n'achetant que peu de viande, si ce n'est du bœuf des cultivateurs. Verbalisation c'es t pas nécessaire; occasionnellement est. On a la même idée avec eh, les gens se suffisaient et ensuite il s s ' achetaient peu de viande. Pourquoi ajouter occasionnellen'ient? Ça donne eh ri en, ça ajoute eh rien (EXP4 : V.1 89).
La préoccupation personnelle du réviseur 4 occupe une place assez importante avec un taux
de modifications de 17,1 % (19/111 [voir le tableau 5.18]). Elle est même deux foi s plus
importante que la préoccupation esthétique (8,1 %). De plus, parmi les six réviseurs, ce
pourcentage est le plus élevé. La liberté que s' est donnée le réviseur de modifier le style de
l ' auteure pour l ' améliorer en est la principale rai son. Les problèmes pressentis qui relèvent
de cette catégorie sont en effet pour la plupart basés sur des jugements personnels de la part
du réviseur ainsi que sur des préférences quant à la façon de dire les choses (voir des
exemples sous § 5.3.4).
La préoccupation esthétique (8,1 0/0 ) se manifeste quant à elle dans les catégories
Formulation inadéquate (6) et Répétition (4). Tous les problèmes de formulation concernent
le pronom qui (voir sous § 5.3.4) tandis que deux des répétitions mettent en cause des
adverbes. Dans un cas, par exemple, le révi seur trouvait que l' auteure employait trop
souvent le mot souvent, ce qui l'a amené à remplacer une des occurrences de cet adverbe
par généralement (M.88).
Enfin , la préoccupation indéterminée représente moins de 1 % des modifications lexicales ;
un seul problème qui a mené à une modification n ' a pu être préci sé (1/111 , 0,9 0/0).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 185
5.5.5 Les préoccupations de la réviseure 5 Plus de la moitié des modifications lexicales faites par la réviseure 5 sont de nature
normative (22/37 , 59,5 % [voir le tableau 5.19] ). Étant donné le mandat de révision
linguistique qu ' elle avait , on pouvait effectivement s' attendre à ce qu 'une majorité de '
modifications lexicales se rapporte à la préoccupation normative. Le pourcentage obtenu est
même similaire à celui obtenu par la réviseure 1 (59,4 0/0), dont le mandat con istait
également à faire de la révision linguistique. Peu de catégories de problèmes figurent par
contre sous cette préoccupation et ce ne sont pas les mêmes que celles de la réviseure 1.
Outre les catégories EITeur de syntaxe et Non-respect d 'une règle de présentation, qui sont
les plus nombreuses (voir des exemples sous § 5.3.5), on trouve seulement deux mauvais
liens, une impropriété et une incompatibilité sémantique.
Tableau 5.19 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations
(réviseure 5)
Préoccupation normative Préoccupation communicationnelle
Catégories de problèmes Nombre % (n/37) Catégories de problèmes Nombre % (n/37)
Erreur de syntaxe 9 24,3 Pléonasme 3 8,1 Vocabulaire non adapté 2 5,4 Imprécision 1 2,7
Non-respect d'une règle de 9 24 ,3 présentation
Reprise d'information incorrecte 1 2,7 (antécédent éloigné) Mauvais lien 2 5,4
Impropriété 1 2,7
1 ncompatibilité sémantique 1 2,7 Total: 4 7 18,9
Total: 5 22 59,5
Préoccupation personnelle Préoccupation esthétique
Catégorie de problèmes Nombre % (n/37) Catégories de problèmes Nombre % (n/37)
Problème pressenti 4 10,8
Total: 1 4 10,8 Formulation inadéquate 1 2,7 (mauvais effet stylistique)
Manque d'uniformité 1 2,7 Répétition 1 2,7
Total: 3 3 8,1
Préoccupation indéterminée
Catégorie de problèmes Nombre % (n/37)
Problème inconnu 1 2,7
Total: 1 1 2,7
Chapitre 5 : Pré~,entation et analyse des modifications lexicales 186
Dans un cas de mauvais lien, la conjonction donc n'amenait pas de conséquence ou de
conclusion à ce que l'auteur avait dit dans le paragraphe précédent; la réviseure l ' a alors
enlevée (M.54). L'impropriété visait l'emploi abusif de la locution prépositive face à dans
le sens de «en ce qui concerne », «pour ce qui est de » (des préoccupations éthiques et
déontologiques face au vieillissement individuel et collectif, M.2l). Enfin , l'incompatibilité
sémantique détectée par la réviseure 5 mettait en cause le verbe bénéficiant et son
complément formation. La réviseure a expliqué qu'elle ne pensait pas que quelqu 'un
bénéficiait d'une formation, mais qu'il la détenait (voir l'exemple 16, p. 87).
La préoccupation communicationnelle se reflète dans moins de 20 % des modifications
lexicales (7/37 , 18,9 0/0). Encore ici, le comportement de cette réviseure se rapproche de
celui de la réviseure 1. En effet, même si la révi seure 5 a une vision nonnative et
communicationnelle de son travail de révision (voir § 5.l.5), les modifications lexicales
qu'elle a faites sont davantage liées à des aspects normatifs qu'à des aspects
communicationnels.
La réviseure 5 a détecté seulement quatre types de problèmes touchant l ' aspect
communicationnel du texte. Trois modifications faites ont notamment permis d ' éliminer
des pléonasmes. Deux autres modifications lexicales ont été faites . pour remplacer des
emplois non adaptés au lecteur et à la situation de cOlnmunication : l'une d ' elles a permis
d'enlever une locution relevant du jargon - administratif foit probablement - , et l'autre a
remplacé un emploi métaphorique qui ne convenait pas selon la réviseure (exemple 77).
Exemple 77 (EXP5 : M.46)
Texte original Le Conseil des aînés assure une vigie et un suivi des différents défis qui touchent les aînés et en tient compte dans le cadre de ses travaux. Texte révisé Le Conseil des aînés se penche sur les différents défis qui touchent les aînés et en tient compte dans le cadre de ses travaux. Verbalisation J'suis allée voir le sens de vigie parce que je trouvais ça bizarre exercer une vigie, j ' ai dit oui c'est une métaphore, mais je voyais pas très bjen ce qU' ils veulent dire , surveillance, j ' suis allée voir si, tous les sens de vigie (EXP5 : V.205); la vigie c'est parce que y'a vraiment pas ce sens-là, j'ai beau essayer de voir la métaphore c ' est, c'est vraiment pas une métaphore qui, qu'on peut faire là (EXP5 : V.232).
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 187
Comme pour le réviseur 4, la préocçupation per onnelle occupe la troi sième posi tion
devant la préoccupation esthétique. Elle rend compte de 10,8 % des modification lexicales
apportées par la réviseure 5 (voir le tableau 5.19), ce qui e t légèrement supérieur à la
moyenne des six réviseurs (8,2 % [voir le tableau 5.21 sous § 5.5.7] ). Le fait qu ' elle aime
réécrire expliquerait le nombre assez élevé de modification lexicales qu 'elle a apportée
pour des raisons personnelles (voir des exemples sous § 5.3.5).
La préoccupation esthétique se révèle dans trois modifications causées par de problèmes
différents (8,1 % [voir le tableau 5.19] ). Dans un cas, après avoir reformulé le début dune
phrase pour remplacer le nom phénomène, la révi eure a dû remplacer, dan la phrase
suivante, le nom accroissen1ent pour éviter la répétition de fOlme avec accroîtra
(exemple 78).
Exemple 78 (EXP5 : M.34 et M.38.5)
Texte original Depuis plusieurs années déjà , la population québécoise connaît un vieillissement. Ce phénomène s'accentuera au cours des prochaines décennies. La société est donc confrontée à des adaptations susc itées notamment par l'accroi ssement des besoins actuels des personnes aînées ou l 'apparition de nouveaux besoi ns. Texte révisé (M.34) Depuis plusieurs années déjà, la population québécoise connaît un vi eilli ssement. Le nombre de personnes âgées s'accroîtra au cours des prochaines décennies. La société est donc confrontée à des adaptations suscitées notamment par l'accroissement des besoins actuels des personnes aînées ou l 'apparition de nouveaux beso ins. Texte révisé (M.38.5) Depuis plusieurs années déjà , la population québécoise connaît un vieillissement. Le nombre de personnes âgées s" accroîtra au cours des prochaines décennies. La société [doit] donc [s ' adapter à cette réal ité :] augmentation des besoins actuels des personnes aînées ou l'apparition de nouveaux besoins. Verbalisation [regarde dans le Robert] c'est pour juste voir les synonymes pas mal liés parce qu'après on va parler de l'accroissement pi s j 'veux pas avoir trois fois accroissement (EXPS : V .181).
Comme pour le réviseur 4, seulement un problème inconnu figure sous la préoccupation
indéterminée. Toutefois, parce que la réviseure 5 a effectué moins de modifications
lexicales que le réviseur 4 (37 contre Ill), le pourcentage qu'il représente est plus élevé
(2,7 % pour la réviseure 5 contre 0,9 % pour le réviseur 4). Ce résultat n ' a cependant pas
d'incidence sur les autres préoccupations.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 188
5.5.6 Les préoccupations de la .réviseure 6 Mêlne si la réviseure 6 a fait peu de . modifications lexicales, on peut avancer que sa
principale préoccupation en ce qui a trait à l 'emploi des mots dans le texte est normative.
En effet, Il des 17 modifications lexicales (64,7 0/0) qu'elle a faites se classent dan cette
catégorie (voir le tableau 5.20). Ce résultat rejoint également les propos de la révi eure
lorsqu 'elle affirmait régler surtout des problèmes de syntaxe de grammaire et de
vocabulaire dans un texte (voir § 5.1.6).
Tableau 5.20 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacune des préoccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations
(réviseure 6)
Préoccupation normative Préoccupation communicationnelle
Catégories de problèmes Nombre % (n/17) Catégories de problèmes Nombre % (n/17)
Erreur de syntaxe 6 35 ,1 Imprécision 1 5,9 Lien manquant 1 5,9
Total: 2 2 11 ,8 Erreur d'orthographe
2 11 ,8 grammaticale
Impropriété 2 11 ,8 Mauvais lien 1 5,9
Total: 4 11 64 ,7
Préoccupation personnelle Préoccupation esthétique
Catégorie de problèmes Nombre % (n/17) Catégories de problèmes Nombre % (n/17)
Problème pressenti 1 5,9 Répétition 2 11 ,8
Total: 1 1 5,9 Formulation inadéquate 1 5,9 (mauvais effet stylistique)
Total: 2 3 17,7
Outre les modifications pour corriger les erreurs de syntaxe (voir sous § 5.3.6), la
réviseure 6 a fait des modifications normatives pour corriger deux erreurs de grammaire,
deux impropriétés et un mauvais lien. Les fautes grammaticales consistaient en des erreurs
d'accord en genre (paysage régionalf" M.43) et en nombre (de nombreux escarpement_,
M.30), tandis que les impropriétés concernaient l'emploi d'une préposition et d'un adjectif
(voir l'exemple 79).
Exemple 79 (EXP6 : M.18)
Texte original
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modificat ions lexicales 189
Les érablières à chêne rouge e t à ostryer y sont auss i beaucoup plus fréquente qu ' ailleurs dans la région, dû aux carac téri stiques des dépôts de surface dominants de cette unité. Texte révisé Les érablières à chêne rouge e t à ostryer y sont auss i beaucoup plus fréquentes qu ' ail1 eur dans la région en raison des carac téri stiques des dépôts de surface dominants de cette unité . Verbalisation je sais pas. Je sais dû là ce que ça veut dire, mais j'ai l' impression que d ' habitude on dit grâce à, à cause de ou en raison tsé, euh , mais dû tout court. .. (EXP6 : V .1 53).
Ci-dessus, la réviseure ne savait pas trop pourquoi , mais son sentiment lingui tique lui
donnait une forte impression que le dû était mal employé dans le contex te et elle l'a
rempl acé par en raison des20.
Enfin , un mauvais lien était causé par la présence de la conjonction mais dans une phrase
(exemple 80). Comme le second mais exprimait une relation d ' opposition qui n 'avait pas
lieu d 'être, la révi seure l 'a supprimé pour rétablir le sens de la phrase.
Exemple 80 (EXP6 : M.4l )
Texte original L ' uni té M aniwaki est égaleme nt couverte de dépôts glac iolacustres surtout sableux, mais parfo is argileux dans les parties les plus basses, mais situées au-delà de la limite de l' invas ion marine . Texte révisé L ' unité M aniwaki est également couverte de dépôts glac iol acustres surtout sableux, mais parfois argileux dans les parti es les plus basses situées au-delà de la limite de l'invasion marine.
La préoccupation esthétique comporte seulement troi s problèmes (17 ,7 0/0) et la
préoccupation communicationnelle, deux (11 ,8 0/0 ). Il faudrait ici un échantillon de
modifications lexicales plus important pour valider les pourcentages de ces deux
préoccupations (et sans doute aussi celui de la préoccupation normative). Les résultats
obtenus par les autres réviseurs montrent que la préoccupation communicationnelle est plus
importante que la préoccupation esthétique, ce qui devrait également être le cas pour cette
révi seure.
Les modifications se rapportant à la préoccupation esthétique ont réglé deux problèlnes
différents. La réviseure a remarqué deux répétitions mettant en cause la même unité
20 Comme elle ne fait aucune allusion au fait que la locution dû à est un calque de due to dans ce contexte (voir le Multi) , j e n' ai pas classé cette modificati on dans la catégori e Anglici sme.
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 190
territoire dans des contextes très rapprochés. Une formul ation inadéquate était par ailleurs
causée par une cascade de compléments introduit par la préposition de (<< y avait plein de
de », EXP6: V.156). En remplaçant la derniere préposition et le reste du groupe
prépositionnel dans l'extrait ci-dessous, la réviseure 6 voulait « ITIettre un peti t peu de vie»
(EXP6: V.156).
[ . .. ] en rai on des caractéri stique des dépôt de urface do minants de cette unit ". ~ . [ .. . ] en rai on de caractéri stique des dépôts de urface dominant qui s'y trouvent. (M .1 9)
Sur le plan communicationnel, un mot-lien indiquant la conséquence (a insi) a été ajouté par
la réviseure pour renforcer une relation de cau e-conséquence, la rendre plu évid~nte
(M.42).
La réviseure 6 n ' a fait qu 'une modification sur la base d 'un problème pres enti . Il agit du
déplacement d 'un adverbe (Le relief y est en général accidenté et formé surtout de collines
[ ... ] ~ Le relief y est en général accidenté et surtout forn1é de collines [ ... ], M.45). Elle
avait l ' impression que c ' était mieux de placer l'adverbe devant le participe, mai elle ne
pouvait pas dire pourquoi ( << j ' ai l'impression qu 'on, tsé ça se li t il est surtout f onné de »
(EXP6: V.278). Cette modification entre dans la préoccupation personnelle (5,9 0/0) parce
que c ' est son sentiment de la langue qui l ' a poussée à faire cette lTIodification. La réviseure
ne l'a pas associée à une contrainte normative, comlTIunicationnelle ou esthétique.
5.5.7 Vue d'ensemble des préoccupations des réviseurs reflétées par les modifications lexicales Après cette analyse détaillée des préoccupations dont rendent compte les modifications
lexica~es , je suis en mesure de répondre à ma dernière question de recherche: Quelles
préoccupations révisionnelles traduisent ces modifications?
Les résultats indiquent que la préoccupation normative arrive en première position chez les
six réviseurs. Les pourcentages varient de 43 % à 68 ,9 0/0, la lTIoyenne se situant à 55,2 0/0
(voir le tableau 5.21). Ainsi, peu importe la nature du mandat, la conception de la révision,
l ' expérience des réviseurs ou le . texte lui-même, les modifications lexicales sont
généralement apportées une fois sur deux pour des considérations normatives linguistiques
et textuelles. Elles sont surtout faites pour corriger des erreurs de syntaxe (52/256) et
- -
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modificati ons lexicales 191
d 'ort hographe grammaticale (50/256), des anglicismes (29/256) et des impropriété
256). Les erreurs de syntaxe et d ' orthographe grammaticale représentent d ' ailleurs
on 40 % des modifications lexicales normatives (102/256, 39,8 0/0 ).
(28/
enVlr
préo Tableau 5.21 - Nombre de problèmes détectés et résolus appartenant à chacu ne des
ccupations et pourcentage des modifications lexicales reflétant ces préoccupations (ensemble
Préoccupation normative
Catégories de problèmes
Erre ur de syntaxe
Erre ur d'orthographe maticale gram
Angl i cisme Impr opriété Inco mpatibil ité sémantique
Non-respect d'une règle de entation prés
Mau vais lien
Inco hésion temporelle Repr ise d'information incorrecte
cédent absent , mauvaise se
(anté repri Erre ur d'orthographe lexicale
Total : 10
Nombre
52
50
29 28 24
21
17
14
11
10
256
Préoccupation personnelle
Catégorie de problèmes Nombre
Probl ème pressenti 38
Total: 1 38
Préoccupation indéterminée
Catégorie de problèmes Nombre
Probl ème inconnu 12
Total: 1 12
des réviseurs)
Préoccupation communicationnelle
010 n/464) Catégories de problèmes Nombre
010 (n/464)
11 ,2 Imprécision 33 7,1
10,8 Pléonasme 19 4,1 Information non nécessaire 17 3,7
6,3 Inexacti tude 16 3,4 6,0 Vocabulai re non adapté 13 2,8 5,2 Répétition inuti le 8 1,7
4,5 Lien manquant 6 1,3 Reprise d'information incorrecte
3,7 (antécédent éloigné, reprise 5 1,1 ambi uë
3,0 Formulation inadéquate (longue, 4 0,9 lourde) 2,4
Autre cas 2 0,4
2,2 Total : 10 123 26 ,5
55 ,2
Préoccupation esthétique
Catégories de problèmes Nombre
Répétition 25 Formulation inadéquate (manque de style, mauvais 15 3,2 effet Manque d'uniformité 5 1,1
Total: 3 45 9,7
2,6
Des
(26,5
préoccupations d 'ordre communicationnel rendent compte d'un peu plus du quart
0/0) des modifications lexicales . Cette préoccupation occupe la deuxièlne position
tous les réviseurs, sauf la révi seure 6, et on note qu ' elle est la plus élevée chez le
eur 3 (38 0/0). Celui-ci a une visée essentiellement communicationnelle de la révision et
chez
révis
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modifications lexicales 192
avait un m andat de réécriture. Ce réviseur a également l ' écart le ITIoin s grand entre la
préoccupation normative et la préoccupation communicationnelle (5 0/0). Au contraire, la
réviseure 2, qui conçoit la révision comme une activité essentiellement normative et dont le
mandat se limitait à de la révision linguistique, a un écart de 49,6 % entre les deux
préoccupations, ce qui en fait le deuxième plus grand après celui de la révi eure 6 (52,9 o/i ).
Les modifications lexicales qui reflètent une préoccupation communicationnelle
remédiaient principalement à des problèmes d ' imprécision (33/123), mai s un bon nombre
permettait également de supprimer les pléonasmes (19/123) et les informations non
nécessaire s (17/123), puis de corrjger les inexactitudes (16/123).
Les préoccupations esthétique et personnelle comptent quant à elles chacune pour un peu
moins de 10 % des modifications lexicales (voir le tableau 5.21). En plus d ' être peu
nombreuses (45/464, 9,7 0/0 ), les lTIodifications lexicales apportées pour améliorer
l'apparence visuelle du texte, créer des effets et varier le style ne se classent que dans troi s
catégories de problèmes. Mis à part les répétitions qui sont les plus fréquentes (25/464,
5,4 0/0 ), il semble que les unités lexicales ne consÜtuent pas une véritable source de
problèmes sur le plan esthétique. On peut penser que les modifications vi sant des groupes
de mots ou des phrases devraient être plus sujettes à refléter une préoccupation esthétique
parce que les formulations inadéquates visent généralement plus qu ' un mot, mais il faudrait
procéder à l'analyse de toutes les modifications faites par les réviseurs et comparer les
résultats obtenus pour confirmer ou infirmer cette impression.
En outre, alors que les pourcentages pour la préoccupation esthétique varient peu d ' un
réviseur à l'autre (de 8 % à Il ,1 0/0, lnais 17,7 % pour la réviseure 6) , ceux de "la
préoccupation personnelle connaissent des écarts assez importants (de 2,2 % à 17,1 0/0 ). On
observe que les réviseurs qui ont plutôt carte blanche en ce qui a trait au travail sur le texte
(réviseurs 3 et 4) ont un pourcentage similaire ou supérieur à la moyenne (7 % et 17,1 0/0
respectivement) tandis que ceux qui s'en tiennent à leur mandat de révision linguistique
(réviseurs 1, 2 et 6), obtiennent de plus faibles pourcentages (6,3 0/0, 2,2 % et 5 ,9 0/0
respectivement). Pour ce qui est de la réviseure 5, dont le pourcentage de préoccupation
personnelle est supérieur à la moyenne malgré le mandat de révision linguistique (10,8 % ),'
Chapitre 5 : Présentation et analyse des modif ications lexicales 193
on peut penser gue sa tendance à vouloir améliorer le tex te sur le pl an communicationnel
l ' amène à faire certaines modifications de façon impulsive gu ' elle ne réussit pas à
clairement justifier après coup (voir sous § 5.l.5).
Conclusion
Ma recherche a permis de décortiquer les modifications lexicales app'ortées dans les texte
par les réviseurs professionnels pour mieux comprendre leur travail sur les unités lexicales.
Les recherches en révision professionnelle étant peu nombreuses , plusieurs pans de cette
discipline étaient envisageables pour des études descrjptives. J 'ai choisi de travailler sur les
modifications lexicales parce qu'elles touchent une de mes cordes sensibles oit les mots
de la langue. Comme ces derniers sont les unités de base des phrases et que ces phrases
produisent un discours, je voulais notamment savoir dans quelle mesure les réviseurs
peuvent modifier les mots d'un texte pour améliorer la qualité linguistique et l'efficacité de
la communication.
Même si elle n ' est pas une discipline récente" la révision professionnelle commence à peine
à émerger comme objet d 'étude. Grâce notamment aux travaux de Jocelyne Bisaillon (entre
autres Bisaillon 2003, 2006, 2007a, 2007b, 2007c et 2008), le processus de révision a ainsi
pu être observé et décrit, tout comme le contexte de production de l 'activité révisionnelle
(Laflamme, 2007). Ces connaissances, que j'ai exposées dans le prelnier chapitre, ont non
seulement permis de décrire ce qu'englobe la révision professionnelle, mais elles ont
surtout servi à contextualiser les modifications lexicales dans l'ensemble du travail des
réviseurs professionnels. On comprend ainsi comment ces modifications sont générées et
on sait également que certains éléments peuvent guider et influencer la détection des
problèmes dans les textes.
J'ai défini une modification lexicale comme étant une opération d' écrüure effectuée dans
un texte à cause d'un problèlne que pose, pour le réviseur, la présence ou l'absence d'une
unité lexicale. Les modifications lexicales constituent donc un type de modifications panni
d'autres. En basant les modifications sur les unités textuelles visées, les réviseurs
pourraient également faire des modifications syntagmatiques, des modifications
phrastiques, des modifications de paragraphes et des modifications de ponctuation, par
exemple. Cependant, peu importe les autres types de modifications, il semble que les
modifications lexicales représentent une partie importante des modifications faites dans les
Conclusion 195
textes, puisqu ' elles composent plus de 40 % de toutes les modifications effectuées par les
six réviseurs observés. Le résultat que j ' ai obtenu ne paraît " pas exagéré si l ' on considère
que les recherches en autorévi sion ont démontré que les mots étaient l ' uni té textuelle la
plus souvent modifiée (Sommers, 1980; Bridwell, 1980; Monahan , 1984; Bisaillon , 1997).
D ' autres recherches portant sur des modifications basées sur les unités vi sées permettraient
par contre une comparaison plus juste. Par ailleurs, j ' ai pu montrer que l'expérience des
réviseurs n ' a pas de lien avec le taux de modifications lexicales, les révi eurs peu
expérimentés et les réviseurs expérimentés ayant obtenu des pourcentage imilaires
(43 ,5 % et 43 ,6 %). Le type de révision effectuée aurait par contre une incidence. En effet,
en proportion , la révision linguistique donne généralement lieu à davantage de
modifications lexicales que la réécriture.
Le fait de m ' intéresser uniquement aux modifications de lTIotS et de prendre l ' unité vi sée et
non l'unité modifiée comme point d ' origine de la modification a eu des conséquences
importantes, puisqu ' il m'était dès lors impossible d ' utiliser une des typologies des
modifications déjà existantes, comme je l'ai expliqué au chapitre 2; II a fallu que je
conçoive ma propre typologie des modifications lexicales pour les caractériser. En outre, je
n'ai pas trouvé de points de comparaison possibles à la plupart de mes résultats dans
d'autres études qui ont traité des modifications de mots.
En ce qui a trait aux opérations d'écriture, les résultats indiquent que plus de la moitié des
modifications lexicales ont été faites au moyen d'une substitution (56 0/0). Le remplacement
a donc prédominance sur les autres opérations d'écriture, comme cela est également le cas
dans d'autres recherches en autorévision et en révision professionnelle (SomlTIerS, 1980;
Monahan, 1984; Bisaillon et autres, 2004-non publié (voir Bisaillon, 2007b); Cloutier,
2005). À l'opposé, le déplacement n'a presque pas servi" (1,3 0/0). Cette opération, qui est
peu utilisée de façon générale eri révision, semble l'être encore lTIoins pour les
modifications lexicales. Les suppressions sont quant à elles deux fois plus nombreuses que
les additions (260 contre 130).
Si l'on pensait que les noms et les verbes figuraient parmi les unités lexicales les plus
souvent visées, on ne se trompait pas. En effet, près du quart des unités visées
Conclusion 196
appartiennent à la classe des verbes (24,3 %) et un peu mOIns de 20 % sont des noms
(18,8 %). Ces deux classes d'unités connaissent également les plus hauts taux de
remplacement, soit 71,7 % et 64,4 % respectivement.
L ' aspect sémantique est par ailleurs la principale cause des modifications lexicales. C'est
près d 'une modification lexicale sur deux qui est apportée parce qu ' elle comporte ou cause
un problème sur le plan du sens (225/464, 48,5 0/0) . Les réviseurs focali sent donc une
grande partie de leur attention sur le sens des unités pour s'assurer, notamment, que les
mots sont appropriés et qu'ils sont employés dans les bons contextes. L 'orthographe et la
syntaxe, que de nombreuses personnes croient encore être les aspects les plus souvent
corrigés lorsqu'il est question de révision de textes, ne sont en cause que dans le tiers des
modifications lexicales environ (14,4 % et 17,2 % respectivement). Si l 'ensemble des
modifications était analysé, il est fort probable que la proportion de chacun de ces aspects
serait encore plus faible. Enf~ n, la portée stylistique des unités lexicales, à laquelle on ne
pense pas de prime abord, est également à considérer comme un aspect pouvant mener à
des modifications lexicales puisqu'environ 12 % de celles-ci relèvent de la dimension
stylistique.
Par aille~rs, l'analyse des solutions aux problèlnes détectés montre que 75 % des
modifications lexicales sont effectuées en modifiant l'unité lexicale visée. Des caractères
des unités lexicales visées sont modifiés dans 15 % des cas et les 10 % restant ont nécessité
la modification d'un groupe de mots, le plus souvent formé de seulement deux ou trois
unités. Il n'est pas alTivé qu'une unité lexicale posant problème dans une phrase ait
contraint le réviseur à réécrire celle-ci complètement. 11 faut pour cela que d'autres
problèmes, visant ou non une unité lexicale, soient aussi détectés à l'intérieur de la phrase
et qu'ils rendent son remplacement inévitable.
Les modifications lexicales apportées dans les textes par les réviseurs professionnels
viennent corriger des erreurs et des faiblesses qu'ils détectent lors de la lecture évaluative
d'une portion du texte. Un des objectifs que je m'étais fixés était de faire l'inventaire de ces
erreurs et faiblesses pour montrer toute la diversité des problèmes liés à l'emploi des mots
de même que pour voir lesquelles sont les plus fréquemment corrigées. À partir des
Conclusion 197
justifications données par les réviseurs, j 'ai déterminé les problèmes qu'ils ont détecté et je
les ai regroupés dans une vingtaine de catégories. Tous les problèmes possibles vi ant une
unité lexicale ne sont peut-être pas présents dans mon corpus, mais les principaux et les
plus représentatifs s'y trouvent certainement. De ce point de vue, il aurait néanmoin été
intéressant d'observer des tâches complètes pour avoir un plu grand nombre de
modifications lexicales à analyser pour chacun de réviseurs, même si le travail demandé
avait été colossal vu la longueur de quelques-uns des texte à révi er. Cela aurait peut-être
permis de marquer plus nettement l ' importance de certaines catégories d.e problème en
plus de compléter ou de modifier la liste de catégorie , le ca échéant.
On peut par exemple se demander si la distinction entre une imprécision et une inexactitude
est nécessaire, car les réviseurs eux-mêmes ne semblent pas toujour faire la différence.
A vec un plùs grand nombre de données, il serait sans doute aussi valable de subdivi er les
catégories Erreur de syntaxe et Erreur d'orthographe grammaticale. Con idérant les
données que j'avais, j'ai jugé que des sous-catégories ne présentaient aucun intérêt
particulier, mais peut-être aurais-je dû le faire quand même pour être plus cohérente avec
les autres catégories que j 'ai subdivisées quand les problèlnes détectés n 'étaient pas tous
pareils (par exemple les formulations inadéquates et les reprises d ' information incorrectes) .
Les principaux problèmes d 'orthographe grammaticale sont par contre assez facilement
reconnaissables lorsqu'on observe la grille de résolution de problèmes. Il y a des elTeurs
d'accord du verbe avec le sujet, des erreurs d'accord de participes passés (avec avoir et
être) et des erreurs de genre ou de nombre.
Sur l'ensemble des catégories répertoriées, seulement deux regroupent un peu plus de 10 0/0
des modifications lexicales, soit En4 eur de syntaxe (11 0/0) et Erreur d'orthographe
grammaticale (10,5 0/0). Ces erreurs sont les plus fréquentes, lnais on doit se rappeler
qu 'environ le tiers d 'entre elles sont apparues à la suite d'autres modifications faites par les
réviseurs et qu'elles ne figuraient donc pas dans les textes originaux. On peut aussi penser
que COlnme ces en'eurs sont généralement plus faciles à détecter et à corriger que les autres,
leur nombre est conséquemment plus élevé que les autres. Encore là, d'autres analyses de
modifications lexicales permettraient d'avoir une meilleure idée de la situation de ces types
de problèmes sur l'ensemble des problèmes détectés par les réviseurs. Il faudrait également
Conclusion 198
voir s ' il ne serait pas plus adéquat et représentatif de créer de nouvelles catégories de
problèmes plutôt que de simplement diviser en sous-catégories les erreurs de syntaxe et les
erreurs d ' orthographe grammaticale . .
Les problèmes pressentis sont passablement nombreux (80/0 ) et plusieurs d ' entre eux sont
basés sur des jugements personnels de la part des réviseurs ain si que sur des préférences sur
la façon de dire les choses. Ceci est particulièrement vrai chez le réviseur 4. Celui-ci voulait
améliorer le style de l,' auteur, mais il était incapable de justifier clairement ses
modifications en s' appuyant sur des éléments stylistiques ou rédactionnel s connus. TI faut
dire que parlTIi les six ré vi seurs , le révi seur 4 a é té le plu s di ffic il e à f a ire verb a li ser. S e
commentaires étaient souvent vagues, même lorsque nous insistions pour avoir plus de
contenu , et nous devions faire attention de ne pas lui suggérer de répon ses . Quoi qu ' il en
soit , le révi seur 4 voyait davantage ses modifications comme des suggestions à 1 auteure,
celle-ci étant libre de les retenir ou non. Par ailleurs, j ' ai pu constater que tous les réviseurs
ont fait quelques modifications par préférence, certains en ayant eu plus conscience que
d ' autres puisqu ' ils n'hésitaient pas à le dire ou, comIne la réviseure 2, ils utili saient un
crayon différent pour les indiquer (cela pourrait aussi être une couleur d ' encre différente) .
Du reste, ces modifications ne représentent qu ' une fraction des modifications lexicales et
l ' intention est bonne: si les révi seurs les font , c'est qu ' il s croient qu ' elles peuvent bonifier
un aspect du texte.
Parmi les autres problèmes détectés et con"igés par les révi seurs, les plus fréquents ont été
les imprécisions (33), les anglicismes (29), les impropriétés (28), les répétitions (25) et les
incompatibilités sémantiques (24). Ils représentent chacun entre 5 % et 7 % des problèInes
détectés. Il est également intéressant de voir que les réviseurs n ' ont pas tous détecté les
mêInes types de problèmes ni dans les mêmes proportions. Par exemple, la réviseure 2 a
détecté et corrigé presque tous les anglicismes (23/29) tandis que le réviseur 4 a relevé plus
du tiers des imprécisions (12/33) ainsi que la moitié des problèmes pressentis (19/38). Au
contraire, les réviseures 5 et 6 n'ont vu aucun problème d ' anglicisme et n'ont relevé qu 'une
imprécision chacune. À ce propos, les résultats indiquent d'ailleurs que les réviseurs plus
expérimentés détectent des problèmes de nature plus variée que les réviseurs peu
Conclusion 199
expérimentés, en plus d 'en détecter et d ' en corriger presque troi s foi s plus dans un même
laps de temps.
En outre, les problèmes détectés et conigés par les deux réviseurs les plus expérimentés
(les réviseurs 2 et 3) montrent clairement l'influence que certains éléments du contexte de
révision ont sur le comportement des réviseurs en ce qui à trait aux modifications lexicales.
On remarque d ' abord que, hormis les informations non nécessaires et les erreurs
d'orthographe lexicale, il n' y a guère de similitudes dans la proportion des problèmes
détectés pour chacune des catégories: les types de problèmes les plus détectés par la
révi seure 2 ne l'ont pas été pour le révi seur 3 et inversement. Les principaux problèmes
corrigés par la réviseure 2 touchent à des aspects normatifs de la langue (anglicismes,
impropriétés, erreurs de syntaxe, incompatibilités sémantiques, erreurs d'orthographe
grammaticale, règles de présentation non respectées et mauvaises reprises d ' information),
ce qui est tout à fait en accord avec le mandat de révision qu ' elle avait, mais également
avec sa conception de la révision qui est normative et porte sU110ut sur la forme du texte.
Qui plus est, la formation de la réviseure en traduction a grandement influé sur la détection
des anglicismes. La tâche de réécriture du réviseur 3 était pour sa part centrée sur l ' aspect
communicationnel du texte et visait à faciliter sa lecture et sa cOJnpréhension. C 'est
également dans cette optique que le réviseur 3 conçoit et vend son travail de révision. Il a
ainsi relevé plusieurs imprécisions, pléonasmes et inexactitudes et ajouté quelques
connecteurs. Les destinataires du texte, le type de publication et les qualités linguistiques et
communicationnelles du texte sont aussi des facteurs qui l'ont amené à faire des
changements: il a notamment remplacé de nombreuses unités lexicales qui n'étaient pas
adaptées au lectorat et corrigé un bon nombre de mauvais liens, ce qui contribue
indirectement à mnéliorer la compréhension du texte.
Malgré tout cela par contre, on s'aperçoit que les modifications lexicales effectuées par le
réviseur 3 reflètent une préoccupation un peu plus normative que communicationnelle
(43 % contre 38 0/0). Cette préoccupation arrive d'ailleurs en première position chez tous les
"réviseurs, souvent avec un écart important par rapport à la préoccupation
communicationnelle. Ainsi, peu importe les éléments contextuels, dont le mandat, et leurs
influences possibles, les modifications lexicales reflètent davantage une préoccupation
Conclusion 200
normative que communicationnelle ou esthétique. En moyenne, les modifications lexicales
sont apportées une foi s sur deux pour des considérations nOimatives lingui stiques (256/464,
55 ,2 0/0) .
Même s' il y a autant de catégories de problèmes dans la préoccupation comlnunicationnelle
que dans la préoccupation normative (dix chacune), les problèmes qui concernent l'aspect
communicationnel sont deux foi s moins nombreux que ceux qui relèvent de la norme (123
contre 256)~ Les modifications lexicales qUI reflètent une préoccupation
communicationnelle représentent ainsi environ le quart des modifications. Elles
remé diaient principa le m e nt à d es p roblè m es d ' imprécis ion , m a is plus ieurs ' d 'entre e lles
supprimaient aussi des pléonasmes et des informations non nécessaires et corrigeaient des
inexactitudes. Les révi seurs ont également fait des modifications lexicales pour répondre a
des critères esthétiques et d ' autres par choix personnel , mais dans des proportions moins
importantes. La préoccupation esthétique, surtout associée aux répétitions de mots que les
réviseurs ont voulu éliminer, et la préoccupation personnelle, sous laquelle se trouvent
seulement les problèmes pressentis, regroupent en effet chacune un peu moins de 10 % des
modifications lexicales.
La recherche que j ' ai menée se veut une contribution à la descript,ion et à la compréhension
du métier de ' révi seur ainsi qu ' à l'avancement des connaissances dans le dOlnaine de la
révision professionnelle. Peut-être trouvera-t-elle écho dans les milieux de la recherche et
de l ' enseignement. Sur le plan scientifique, par exelnple, d'autres chercheurs poun"aient
être alnenés à analyser les modifications d 'un texte à partir de leur point d'origine, c'est-à
dire à partir de l ' unité textuelle qui pose problème pour le réviseur. Puisqu 'une
modification a lieu si un problème est détecté et réel , il me paraît tout à fait logique de
considérer l'unité textuelle problématique (l'unité vi sée), en plus de l'unité textuelle
modifiée et de l 'unité textuelle finale. En procédant de la sorte, la description des
modifications n'en est que plus précise: on voit d'abord cl airement l'unité du texte qui est
à l'origine du problème, on connaît ensuite le segment du texte qui a besoin d ' être modifié
pour corriger le problème et l'opération d'écriture qui est utilisée pour le faire , et on a, pour
terminer, le segment final qui montre le résultat de la modification.
Conclusion 201
La typologie que j'ai élaborée pourrait également être repnse pour mener d'autres
recherches sur les modifications lexicales. Ces études fourniraient ainsi des points de
comparaison possible avec certains résultats de ma recherche et serviraient à valider et à
parlaire les catégories de problèmes.
En outre, il serait intéressant de chercher à mieux décrire et à mesurer l'impact de certains
éléments du contexte - je pense en particulier aux caractéristiques professionnelles des
réviseurs - sur l'ensemble des détections et des corrections que font les réviseurs. J ' ai noté
quelques observations à ce sujet, en rapport notamment avec la formation , l'expérience et la
conception de la révi s ion des réviseurs , mais il e s t possible d ' aller plus loin sur ces a pects .
On peut aussi se demander quelle influence ont les connaissances des réviseurs sur le sujet
des textes qu ' ils révisent.
Par ailleurs, quelques éléments des modifications lexicales resteraient encore à examiner et
à décrire pour en faire le tour complet. En effet, si l'on considère les modifications lexicales
dans l'ensemble de la démarche de révision, il faudrait se pencher sur les stratégies de
détection des problèmes liés à l'emploi des mots de même que sur les . stratégies de
résolution. On poun-ait ainsi savoir dans quelle mesure les problèlnes détectés sont basés
sur des connaissances certaines, des connaissances incertaines et des méconnaissances (voir
sous § 1.2.2). Cela fournirait entre autres des indications sur les connaissances -
linguistiques et autres - que les réviseurs intègrent rapidement dans leur mémoire à long
terme, mais surtout sur les éléments devant lesquels ils hésitent ainsi que sur les
connaissances qui leur font défaut. Selon les résultats obtenus en ce qui a trait aux
connaissances incertaines et aux méconnaissances, on pourrait alors envisager de les
enseigner ou de s'attarder un peu plus sur celles-ci dans les cours de révision. De même en
considérant les stratégies de résolution, on saurait si les modifications lexicales sont le plus
souvent des automatismes, c'est-à-dire ,que les réviseurs corrigent les problèmes aussitôt
qu'ils les détectent sans avoir besoin de relire ou de réfléchir, ou si elles nécessitent le
recours à une ou plusieurs stratégies (voir sous § 1.2.3.1).
Sur le plan pédagogique, ma recherche fournit quelques données que les enseignants
pourraient mettre à profit. Je retiens trois éléments ici. Tout d'abord, considérant que
Conclusion 202
presque la moitié des unités lexicales visées par les lTIodifications concernaient la
dimension sémantique (48,5 %) et que les réviseur plus expérimentés détectent et corrigent
plus de problèmes sémantiques que le réviseur moins expérimenté , il serait san doute
pertinent que les professeurs consacrent davantage de temps à l'apprentissage et à la
maîtrise du vocabulaire. Ainsi , les enseignants pourraient développer des exercice p011ant
exclusivement sur le vocabulaire pour que les étudiants comprennent bien le nuances de
ens qui existent entre des emplois similaires et qu'ils sachent dan quels contextes les
utiliser. Les étudiants pourraient également devoir chercher des synonymes dans les
dictionnaires et e faire une banque de mots qui contiendrait des exemples d'emploi parce
que tous ne sont pas interchangeables. D'une part, ce exercice permettraient aux étudiants
d'étendre et d'enrichir leur vocabulaire et, d ' autre part , ils favori eraient la détection et la
correction de problèlnes sur le plan sémantique lors de la révision de textes (par exemple
des imprécisions, des impropriétés, des incompatibilités sémantique, des pléonasme, des
répétitions inutiles et des mots non adaptés au lecteur et à la situation de communication).
Ensuite, pour aider les étudiants à trouver des solutions aux problèmes détectés, la grille de
résolution de problèmes me paraît un outil utile. En effet, les enseignants peuvent expliquer
les moyens qui existent pour résoudre des problèmes et lTIOntrer la variété de solutions
applicables selon les problèmes détectés. Ils peuvent par la suite proposer des exercices
ayant comme objectif de corriger des problèmes dans des phrases en recourant à divers
lTIoyens. De plus, de nombreux exemples que je présente dans cette thèse sont intéressants
de ce point de vue et sont facilement adaptables pour en créer de nouveaux.
Enfin, dans une perspective plus générale, le modèle de la révision professionnelle qui a été
dégagé à partir des travaux de madame Bisaillon et de moi-même (figure 1.1) aurait tout
avantage à être présenté et discuté dans les cours de révision. Ce serait un excellent moyen
de montrer ce en quoi consiste le travail d'un réviseur et les étudiants verraient clairement
tous les éléments qui font partie du contexte et qui sont susceptibles d'influencer la
démarche de révision.
En terminant, je sais que cette thèse représente une goutte dans l'océan des connaissances.
J'ai entrepris ce travail de description avec enthousiasme et sans prétention afin de mieux
Conclusion
faire connaître la révision professionnelle et c'est dans le même état d' espri t que je le
termine. J'espère simplement que mon but d'expliciter et de rendre concret le travail des
réviseurs professionnels sur les unités lexicales a été atteint et que la lecture vous a été
agréable.
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Annexe A · Modèles de rédaction et de révision
Environnement de la tâc ll e
Tâche de rédacti on Texte déjà écri t
Destinatai res Enjeux Thème
JI.
l 1 l Processus cogni tif d' écri tu re
Contrôle
Planification Ivli se en texte Révision
Génér<ltion d'idées Lecture Orgar1lsatron Édition P,ecadrage
i l Ivlémoi re à 10 ng terme
Connaissance du thème Connaissance des desltnataires
Plans de rédaction stockés
Figure A.1 - La révision dans le modèle de rédaction de Hayes et Flower (1980) , adapté de Hayes , (1998)
Dans une perspective psychocognitiviste, Hayes et Flower ont développé le premier modèle de rédaction de textes en s'appuyant sur l'analyse de protocoles verbaux de scripteurs. Ces chercheurs avaient comme objectif de « formaliser la production de textes en tant qu 'activité humaine complexe » (Alamargot et Chanquoy, 2002 : 47). Dans le modèle, la révision (Reviewing) constitue l'une des trois composantes de l'activité de production rédactionnelle , les deux autres étant la planification (Planning) et la mise en texte (Translating). Ces composantes sont régies par une instance de contrôle (Monitor) dont le principal rôle est de « superviser le processus de production » en déterminant l'ordre d'activation et la récursivité de chacune d'elles et « en acceptant ou en éliminant les produits des traitements réalisés par les différentes composantes » (Fayol et Hurley, 1995 : 26) . La composante révision vise l'amélioration du texte. Elle est constituée de deux sous-processus: la lecture (Reading) et la correction ou l'édition (Editing) . Le premier permet de détecter des erreurs et d'évaluer l'adéquation entre le texte écrit et les particularités linguistiques, sémantiques et pragmatiques découlant des buts fixés lors de la planification ; le second est perçu comme une activité automatique mise en œuvre pour corriger les problèmes (de compréhension , orthographiques, etc.) détectés (Alamargot et Chanquoy, 2002 : 48) , mais aussi comme une activité délibérée (réfléchie) .
~-----------------------------------------~ --- - ---~-------~----------------------------------------------~
P RO CESSU S
1 DÉRNffiON DE LA TÂCHE ,
ÉVALUATION
Lire pow-: Comprendre Éval uer Définir le problèlTes , ~~
Fixer 1 passer outre 1 1 chercher
• les ....... Ireporter 1 SÉLEG10N D'UNE buts . .....-- . . STRATÉGIE
- 1 réécrire 1
1 , Rédi ger de nouveau ou paraphraser ,
~ révi er 1 ,
Utili ser le tableau sol utions-problènes
Modifier le texte et/ou le plan
SA VOIRS
Buts, cli tères et contraintes
des text et d plans
REPRÉSENTATION 00 PRœ..ÈME
Détection imprécise
Diagnostic préci
PR<XÉDURES POJR I--........ .ho. AMÉUORER LE TEXTE 'P'"
Annexes 215
Figure A.2 - Le modèle de révision de Hayes, Flower, Schriver, Stratman et Carey (1987), d'après Bisaillon (1991)
Dans le milieu des années 1980, Hayes et ses collaborateurs (1987) ont proposé le premier modèle autonome de révision. « Ce processus est étudié et formalisé de façon isolée, indépendamment de ses rapports et interactions éventuelles avec les autres processus de production écrite » (Alamargot et Chanquoy, 2002 : 55). En se basant sur les travaux antérieurs en révision et en rédaction ainsi que sur leurs propres observations recueillies au cours de nouvelles recherches utilisant des protocoles verbaux , les auteurs ont développé un modèle très précis pour décrire les processus cognitifs impliqués dans la réVision. Celui-ci reprend en fait le processus de révis ion décrit dans leur recherche sur la rédaction (Hayes et Flower, 1980) , mais il est grandement complexifié. Le modèle présente les différentes opérations impliquées dans le processus de révision , les ressources cognitives ou connaissances nécessaires à la réalisation de chacune d'elles ainsi que les stratégies possibles à employer au cours de la révision . Il se divise en deux parties: les processus et les stratégies se trouvent à gauche tandis que les connaissances du scripteur-réviseur qui jouent un rôle fondamental dans le déclenchement des différentes étapes du processus , et que l'on suppose être emmagasinées dans la mémoire à long terme, sont indiquées à droite (Hayes et autres , 1987 : 185; Alamargot et Chanquoy, 2001 : 104, 108).
ENVIRONNEMENT
PROBLÈME RHÉTORIQUE
Sujet Destinatai res Importance
, TEXTE À RÉVISER
Format Genre
U nités lex icales Unités syntax iques
Pro pos itions But
SYSTÈME COGNITIF IMÉTACOGNITIF
MÉMOIRE À LONG TERME DU RÉVISEUR
MÉTACOGNITION
Modèles de conn aissances
Sujet Langue et rédac ti on
Stand ard s d 'évalu ation
Com préhension des stratégies
Penser Lire
R éd iger
COGNITION
Conn ais ances
Sujet
.... ~t------.---_ ... ~ Stratégies
Penser Langue e t réd action
Standards d 'évalu ati on
"
L ire Rédi ger
REPRÉSENTATION DU TEXTE À RÉVISER
Format, suj et, genre, destina taires, unités lex icales et syntaxiques, proposi ti ons, but, importance
MÉMOIRE DE TRAVAIL DU RÉVISEUR
-
Se représenter le problème : rhétorique, le pl a n et les standard s :
Lire po ur se représenter et comprendre le tex te à réviser
d 'évaluati on du tex te 1
1 __________________________ L _____________________ _
Détecter e t di agnostiquer les problèmes dans le texte représenté
1
1 Sélecti onner, modifi er ou créer : des s tratégies pour réviser le : texte représenté
________ _ _ _ _______________ L _____________________ _
Transposer les révi sions du texte représenté au tex te à réviser
Annexes 216
Figure A.3 - Le modèle de révision de Butterfield , Hacker et Anderson (1996), d 'après Laflamme (2004)
Le modèle procédural de Butterfield, Hacker et Albertson (1996) peut être considéré comme une version moderne du modèle de révision de Hayes et ses collaborateurs (1987 [Alamargot et Chanquoy, 2001 : 110]) . Selon ces auteurs, il s'agit d'un modèle cognitif-métacognitif élaboré à partir du modèle de rédaction de Flower et Hayes (1981) dans le but de combiner les modèles de rédaction et de révision en y incluant les distinctions théoriques qui ont été dégagées depuis les écrits de Flower et Hayes (Butterfield et autres, 1996 : 243). L'accent est mis sur les processus , essentiellement mentaux, et les types de connaissances pertinents à la révision. Le modèle mqntre ainsi l'importance et le rôle de la mémoire à long terme et de la mémoire de travail, de même que l'importance des connaissances métacognitives pendant la révision (Alamargot et Chanquoy, 2001 : 110). Le modèle est divisé en deux composantes: l'enviro'nnement du scripteur-réviseur et un système de traitement cognitif-métacognitif. En outre, de nombreux résultats d'expérimentations corroborent chacune des parties du modèle.
Annexes 217
Structut-e de co ntrôle
Ré'v'ision
Schémas de tâche
! ~ \ / \
Processus ondamentaux
Réflexion R.ésoudre des problèmes
Prendre des décisions
Tt·aite rne nt du te,<te Pt-ocJucti on de texte Lecture criti que
.......... ..,/' .......... V
Re~3 sout-ces ~ ~ .,~
h/lérn ol re (je tt-a\iai 1 ~,/l é rn o ire à long te t·me
Figure A.4 - Le nouveau modèle de révision de Hayes (1996) , adapté de Hayes (1998)
Hayes considère que la lecture faite par le scripteur-réviseur est différente de celle faite par le lecteur parce que le scripteur-réviseur ne lit pas seulement pour comprendre le texte , il veut également identifier les problèmes du texte. En continuant d'élaborer sur l'importance des activités de lecture et de compréhension au cours de la révision, Hayes postule que « [p]our comprendre la révision , il n'est pas suffisant d'identifier les processus sous-jacents impliqués» (Hayes, 1998 : 78) ; il faut en plus spécifier la composante qui permet de gérer le fonctionnement et ·Ia succession de ces processus. Le nouveau modèle de Hayes montre que les processus fondamentaux de la révision sont gouvernés par une structure de contrôle. Cette structure consiste en un schéma de tâche qui renferme l' « ensemble des connaissances acquises par la pratique [et] utiles pour réaliser la tâche» (Hayes, 1998 : 78). Elle inclurait notamment le but, qui est d'améliorer le texte , les sous-buts, par exemple être attentif à tel et tel aspect lors de la révision et éviter tel type d'erreurs , les connaissances sur la lecture évaluative et la résolution de problèmes, les différents critères de qualité, dont des critères pour le style , les stratégies pour corriger des classes particulières de problèmes, etc. L'existence d'une structure de contrôle rend plus explicite le fait que le scripteur-réviseur maîtrise volontairement certains aspects de la révision (Hayes , 2004 : 14). Les processus fondamentaux décrits reprennent sous d'autres appellations ceux identifiés dans le modèle de 1987. Enfin , Hayes indique que les ressources nécessaires à la réalisation des processus se trouvent dans la mémoire de travail et dans la mémoire à long terme.
Environnement de la tâche
Environnement social
Environnement physique
Dest i nataire Coll aborateurs
T xte déjà écrit Méd ium d écriture
Individu
Moti vationl Affect Processus cognitifs
Buts Préd ispo itions Croyance, attitude Esti matio ns
Interprétation de texte .... f--~ Réflexion
Production de texte
coû tslbénéfi ces
.,
• • • • Mémoire de travail
Mémoire phonol"ogique Bloc-notes visuo-spatial
M~mo ire sémantiqtl e
1 .. ."
Mémoire à long terme du rédact eur
Schémas de tâche Connaissance du thème Co nnaissance du destinataire Co nn aissance lingui stiq ue Conn aissance du genre
Annexes 218
Figure A.5 - Le nouveau modèle de rédaction de Hayes (1996), adapté de Hayes (1998)
Ce modèle a été présenté pour remplacer le modèle de rédaction de 1980 et fournir un nouveau cadre de référence de l'activité rédactionnelle qui tient compte des plus récentes données empiriques. Il ne prétend pas détailler tous les aspects majeurs de la rédaction , mais il se veut « une structure utile pour suggérer des courants de recherche et pour regrouper les phénomènes rédactionnels» (Hayes , 1998 : 52). Le nouveau modèle se compose de deux parties majeures: l'environnement de la tâche et l'individu. L'environnement de la tâche est maintenant formé d'un environnement social et d'un environnement physique plutôt que de la tâche de rédaction et du texte déjà écrit. Du côté de l'individu , il met l'accent sur les rôles joués par la mémoire de travail ainsi que la motivation et l'affect dans les processus rédactionnels, éléments absents du précédent modèle. La partie sur les processus cognitifs a aussi été revue et modifiée: la planification est maintenant intégrée dans la catégorie réflexion et la révision a été remplacée par l'interprétation du texte .
Annexe B · Classifications des modifications en autorévision
Tableau B.1 - La typologie de Bridwell (1980)
1. Nivea u de surface 1.] . Orthographe ] .2. Ponctu ati on 1.3 . Majuscule 1.4. Forme verbale ] .5 . Abréviati on vs fo rme complète ] .6 . Symbole vs forme complète 1.7. Contrac tio n YS forme co mplète
1.8. Singuli er vs pluriel ] .9 . Conditionne ment morphologique l.l O. Notati on interlinéaire ou marginale sur l' un
ou l'autre des aspects ci-dessus
2 . Niveau du mot 2. 1. Addition 2.2 . Suppress ion 2 .3 . Substitution (synonyme, pronom) 2.4 . Déplacement d ' un mot 2 .5 . Notati on in terlinéaire ou marginale sur un mot
3 . Niveau du syntagme 3.]. Addi tion 3 .2 . Suppress ion 3 .3. Substitution/M odificati on 3.4. Déplacement d ' un syntagme complet 3.5 . Expansion d ' un mot e n un syntagme 3 .6 . Réducti on d ' un syntagme à un mot 3.7 . . Notation interlinéaire ou marginale sur un
syntag me
4. Niveau de la proposition (subordonnée ou indépendante non ponctuée comme une phrase)
4 .]. Addition 4.2 . Suppress ion 4 .3 . Substitution/altération 4 .4. Déplacement d ' une proposition complète 4 .5. Expansion d ' un mot ou d ' un syntagme en
proposition 4 .6. Réducti on d ' une proposition à un mot ou à un
syntagme 4 .7 . Notation interlinéaire ou marginale sur une
proposition
5. Niveau de la phrase (ponctuée par l 'élève) 5.1 . Additi on 5 .2 . Suppression 5. 3. Substitutio n/Modifi cation 5 .4 . Déplacement d ' une phrase complè te 5.5. Expansion d ' un mot, d ' un syntagme ou d ~une
proposition en une phrase 5.6. Réduction d ' une phrase à un mot, un yntagme ou
à une proposition 5 .7 . Transformati on 5.8. Notati on in terlinéaire ou marginale sur une phrase
6. Niveau des phrases multiples (deux ou plusieurs phrases con sécuti ves 6.1. Addition 6.2. Suppress ion 6.3 . Substitution/Modificati on 6.4 . Déplaceme nt de deux ou plusieurs phrases 6.5. Réducti on de deux ou plu ieurs phra es à une phrase, à un mot, un syntagme ou à une proposition 6.6. Assembl age 6.7. Séparation 6. 8. Notati on interlinéaire ou margin ale sur des
phrases multiples
Tableau B.2 - Les typologies de Sommers (1980), de Monahan (1982, 1984), de Boiarsky (1984) et de Bisaillon (1997)
Auteurs : Opérations Unités textuelles Étapes de production du Buts, fonctions, raisons ou éléments déclencheurs de la Aspects du texte
Qualité d'écriture modifiées texte révision
Sommers 1. Acldition I . Mot ( 1980) 2. Suppression 2. Syntagme
3. Réarrangement 3. Phrase 4. Substitution 4. Thème
Monahan 1. Addition Ni veaux : 1 . Préécri ture 1. Esthétique ( 1982, 2. Suppression 1. Surface 2. Pendant la 1 le version 2. Mécan ique (règles) 1984) 3. Réarrangement 2. Mot 3. Entre les vers ions 3. Tran sito ire
4. Substitution 3. Syntagme 4. Pendant la 2e version 4. Informatif 5. En châsse ment 4. Proposition 5. Après la 2e version 5. Sty li stique
5. Phrase 6. Paragraphe 7. Di scours
Boi arsky 1. Mod ification de la forme (1984) 2. Réorgani sation de l' informat ion
3. Amé li oration de la cohérence 4. Suppression de l' informati on 5. Expansion de l' information 6. In sistan ce (accent) su r l' in formati on 7. Subordination de l' informati on 8. Création d'une urgence 9. Améli orati on de la prosod ie 10. Améli oration du vocabul aire 1 1. Correction de la grammaire et de la « mécanique»
Bi saill on 1. Ajout 1. Graphème 39 éléments déclencheurs identifiés parmi lesquels: 1. Contenu + ( 1997) (addition) 2. Mot 1. Mot, syntagme ou phrase qui tradui sent mal la pensée 2. Organi sation -
2. Efface ment 3. Groupe de de l'auteur 3. La ngue = (suppress ion ) mots 2. Information non pertinente 3. 1. lex ique
3. Déplacement 4. Phrase 3. Mot mal orthographié 3.2. orthographe 4. Rempl ace ment 5. Groupe de 4. Temps de verbe d'usage
(substitution) phrases 5. Structure d' un syntagme ou d'u ne phrase 3.3. orthographe
6. Mot de trop (suppress ion) grammatica le
7. Mot de la langue parl ée (remp lacement) 3.4. syntaxe
8. Besoin d'u n mot différent (remplacement) 4. Ponctuation
9. Besoin d' un mot plus précis (remplacement) 5. Traitement de
JO. Problème avec le clav ier pour la ponctuation texte
J J. Prob lème de frappe (proximité des lettres) 1
Annexes 221
Tableau 8.3 - La classification de Faigley et Witte (1981 ; traduit par Laflamme, 2004)
Changements révisiormels
Changements de surface
/ C'hang emerd:~
forrnels
0 11110 grap Ile Temps. personne et rno de .A.brévi ati 0 ri '; Ponctufiti (Jn
Fonnat
Chéingen')enig Cfw préservent Je sens
Additrons Suppressions Substitutions P érrnuteti ons Distributions ConsoHdati ons
Ch8:(lgemen;s o'ans Je sens du texte
Changements-tnjçros(r1.ldurels
Additions Suppressi ons Subsht uti (lns Petmutahons Distributions Conso!i c(ations
Chan.gements rnficroslructure/s
A(1CMiQt1s Suppn~ssi ons SubstitlJücJos Permuta tions Di stri b uri ons C::o!îso li dati ons
Annexe C : Classifications des modifications en révision professionnelle Tableau C.1 - Les typologies de Bisaillon , Laflamme et Leclerc (2004-non publié) et de Cloutier (2005) pour analyser les modifications des
réviseurs profess ionnels
Opérations Unités textuelles Emplacement des Aspects (ou dimensions) Auteurs: d'écriture modifiées unités mod ifiées dans Raisons ou objectifs des modifications Catégories de pertinence
textuels concernés le texte
Bi saill on, 1. Add ition 1 . Caractère 1. Titraill e 1. Faci li ter la co mpréhension du tex te 1 . Info rmati f Lafla mme 2. Dépl acement 2. Mot 2. Corps de texte ( co mpréhensibi li té) 2. Organisationnel et Leclerc 3. Rempl acement 3. Groupe de mots 3. Ensemble du texte 2. Respecter les règles 3. Formel (o rthographe, (2004 - 4 . Suppression 4. Proposition 4. Tex te 3. Rendre la formul ation plus adéquate, plus lex ique, grammaire, non 5. Phrase complémenta ire claire ou plus économique li nguistiquement syntaxe, ponctu atio n, publié) 6. Grou pe de phrases 4. Rendre le texte plu s agréable (style) ou plus typograp hie des
7. Paragraphe fac il e à lire (li sib il ité) caractères , typographie 8. Texte 5. Facili ter son travail de rév iseur ou celui du de l'espace ment)
grap hi ste 6. Se conformer à son mandat 7. Aucune justification
C loutier J. Ajout 1. Signi fiant 'graph ique 1. Texte pri ncipal 33 raisons parmi lesquelles: 1. Réducti on des effo rts 1. Informati f (2005) 2. Déplacement alphabétique ou non 2. Tex te indicateur 1. App li cati on d' une contrainte linguistiq ue de traitement cognit if 2. Organi sationnel
3. Remplacement alphabétique 3. Texte organisateur 2. App li cati on d'une convention graphi que a) Épargne de surcroits 3. Lingui stiq ue 4. Suppress ion 2. Mot 4. Texte secondaire 3. App li ca ti on d' une norme d ' in formations (phonologie, syntax e,
3. Syntagme 4. Élimination d' un ri sque d ' ambigüité ou de b) Augmentation de la sé man ti que) 4. Proposition(s) co nfusion perceptibi li té des 4. Orthographique 5. Phrasees) 5. In formation répétée in formati ons 5. Typographi que
graphique(s) 6. In formations nécessaires c) Gu idage de 6. Paragraphe(s) 7. In formati on inexacte l' interprétation
8. In fOl:mati on pas tout à fait exacte 2. Produ cti on d' effets
9. [nformati on devenue inexacte cogni ti fs (ajout
10. Indiquer les liens entre les in formations d"hypothèses
dans l'ensemb le du texte nouve ll es)
1 J. Uni fo rmi sation du sty le 12. Ordre de priorité l 3. Mise en évidence 14. Découpage visuel des info rmations 15. Répétiti on d' un mot
Annexe D · Extrait de la liste des modifications du réviseur 4 Liste des modifications du réviseur 4 (29 avril 2004)
1. Rempl ace « ce métier exigeait de suivre un cours peu accessible » par « les cours conduisant à l'exercice de ce Inétier étaient rares» (L.4-5; V.8:.]0).
2. Supprime « nlême » dans « Ces mêmes femmes fai saient au si le nettoyage » (L.16; V.12) .
3. Remplace « des» par « les» dans « d ' après des procédés en usage là où elles avaient » (L.17 ; V.14).
4. Remplace une virgule par un point après « elles avaient travaillé, » (L.17; V.19-22).
5. Supprime « un service nouveau » avant « à cette époque. » (L.18 ; V.17 ?)
6. Rempl ace le « à » minu,scule par un « À » majuscule dans « à cette époque. » (L.18; V .19-21 ).
7. Remplace le point par une virgule après « époque » (L.18).
8. Ajoute « le nettoyage à sec était une nouveauté [sic J. » après « À cette époque, » (L.18 ; V.22).
9. Supprime « Chez elles, une façon d' augmenter » (L.20; V.24,26).
10. Remplace le « 1 » minuscule par un « L » majuscule à « la » (L.20).
Il. Remplace le verbe « consi stait » par « se constituait » (L.20; V.32-35).
12. Ajoute « des coiffeuses » après « La clientèle » (L.20; V.28).
13. Remplace « à faire un » par « par la pratique du » (L.21 ; V.32 ,36-38).
14. Ajoute « accordé '» après « rabais » (L.21; V.38).
15. Remplace « pour se faire coiffer» par « au salon de coiffure » (L.2I ,22; V .40,41).
16. Remplace « Ou de donner » par « On donnait parfois » (L.22; V.42).
17. Suppri me « Un homlne âgé qui avait été l' » (L.25; V.45).
18. Remplace le « u »' minuscule » par un « U » majuscule (L.25; V.46).
19. Supprime la virgule après « de taxi » (L.26; V.48).
20. Supprime « , disait-il , » après « se souvenait » (L.26; V .49,51).
21. Remplace « alTiver » par « aller» dans « les cheveux avant d'arriver chez la coiffeuse » (L.29; V.59,60).
22. Remplace les guillemets anglais par les guillemets français dans « l'ondulation "Marcel", » (L.37; V.64,65).
23. Remplace « $0. » par « cents» dans « rapportait $0.25. » (L.38; V .66-71).
24. Remplace « son » par « le » dans « qu'on ouvrait son salon» (L.44; V.73).
25. Supprime la virgule après « salon » (L.44; V.75).
26. Relnplace « son emploi » par « le lnétier » dans « la femme abandonnait son emploi » (L.49; V.77-79).
27. Remplace « du » par « dans ce » dans « Celles qui faisaient carrière du métier de coiffeuse » (L.50; V.83,84).
28. Supprime « de coiffeuse » dans « dans ce métier de coiffeuse » (L.51; V .80,81).
29. Supprime « qu'on enroulait» dans « le bouclage des cheveux qu ' on enroulait sur des rouleaux » (L.56; V.86-89).
30. Remplace « reposait sur l'usage » par « se faisait à l'aide » dans « La permanente à chaud reposait sur l'usage d' apparei ls » (L.59; V .90-91).
31. Supprime « à fils» dans « d 'appareils électriques à fils» (L.60; V .91-94).
A. Cherche pad dans le Robe11 puis dans le Multi (L.60; V.95).
Annexes 224
32. Ajoute des guillemets français au mot « pads » dans « ou de pads chimiques » (L.60; V.95).
33. Remplace « dégageant » par « qui dégageaient » dans « ou de « pads » chimiques dégagean t » (L.61; V.98 ,99).
B. Cherche au dire dans le MuIti.
34. Supprime le « x » et le « s » à « Aux dires» (L.69 ; V. I 00).
35. Remplace « es » de « des» par une apostrophe (L.69; V.l 02 ,103).
36. Remplace, « leur » par « le » dans « leur métier était payant » (L.69; V.l 05-107).
37. Ajoute une virgule après « payant de coiffer" » (L.74; V.1 09).
38. Remplace le verbe « opéraient » par « exploitaient» dans « ses sœurs exploitaient aussi un commerce » (L.88; V.Il2).
C. Écrit « Une » dans la marge de gauche, mai s le raye aussitôt.
39. Remplace les deux-points par un point dans« exploitaient aussi un commerce: » (L.88 ; V.1I5).
40. Ajoute « une de ses sœurs , » après « Fernande, » (L.89; V. I 25-127).
4 I . Supprime le « qui » après « Felllande » (L.89; V. I 16,1 I9).
42. 'Supprime « et qui » dans « et qui allait devenir l'assistante » (L.90; V .128,129). 43. Remplace les guillemets anglais par les guillemets français au mot « "Seal" » (L.1 00; V.1 32) .
44. Ajoute un « S » à « permanente » dans « machine à permanente » (L.I 00; V. I 3 I).
45. Remplace « les» dans « on ne les refusait jamais » par « [on ne refusait jamais] personne » (L.I09; V.I35).
46. Remplace « en les faisant attendre» par « chacune attendait son tour » (L. I 09; V. I36).
47. Déplace les guillemets fermants après le point dans « « Les Pompadours ». » (L.l I7; V.142).
D. Remplace « nos matériaux » par « notre matériel »; remplace « notre matériel » par « nos instruments de coiffure », mais le raye et met un stet dans la marge (L. I 19; V.143).
48. Supprirne « Or, » dans « Or, cette région étant alors desservie » (L. I 27; V. I 52).
49. Remplace « cette» par « La » dans « cette région étant alors desservie » (L.128; I 52, 153).
50. Supprime « Le Témiscouata » dans «le chemin de fer Le Témiscouata » (L.129; V.I54-158).
51. Remplace le « 1» minuscule dans « l'été et l'automne » par un « L » majuscule (L.129; V.16I ).
52. Ajoute une virgule après « gares» (L.132; V.179).
53. Remplace « ces derniers » par « ceux-ci» dans « ces derniers les revendaient » (L. I 32; V.169).
54. Supprime « Immédiatement, » (L.133; V.173).
55. Remplace le « l » minuscule de « les» par un « L » majuscule dans « les jeunes filll s [sic] » (L.133; V.I73).
56. Supprime « jeunes» dans « Les jeunes fillls [sic] » (L.I33; V.174).
57. Remplace « montaient dans » par « reprenaient » dans « Les filUs [sic] montaient dans le train » (L.] 33; V. I 76, I 77).
58. Ajoute une virgule après « que» dans « on se souvient que dans les années 1925 à ] 940 » (L.127; V.149).
[ ... ]
Annexe E : Grille d'analyse des modifications lexicales
Grille (1 de 3)
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Annexes 227
Grille (3 de 3)
Annexe F · Correspondance entre les catégories de problèmes et I.es dimensions linguistiques concernées
Tableau F.1 : Correspondance entre les catégories de problèmes et les dimensions linguistiques concernées
Catégories de Dimensions linguistiques concernées problèmes Sous-catégories
Sémantique Morphologie Syntaxe Styl istique Typographie Indéterminée
Angl icisme : lexical X X
sémantique X
syntaxique X Erreur d'orthographe grammaticale X Erreur d'orthographe, lexicale X Erreur de syntaxe X
Formulation ' . longue ou lourde X inadéquate : manque d'effet ou X mauvais effet stylist ique
Imprécision X Impropriété X Incohésion temporelle X Incompatibil ité sémantique X Inexactitude X Information non nécessaire X Lien manquant X X Manque d'uniformité X X Mauvais lien X X Non-respect d'une règle de présentation X (1 fois ) X (2 fois) X
Pléonasme X Répétition X Répétition inutile X X X
Reprise antécédent absent X d'information antécédent éloigné X incorrecte : mauvaise reprise X
reprise ambiguë X
Vocabulaire registre X X non adapté: marque stylistique X X Autre cas X
Problème inconnu X X X X Problème pressenti X X X X
Annexe G · Tableaux complémentaires aux analyses des modifications lexicales
Tableau G.1 - Répartition des unités lexicales visées par les modifications lexicales des réviseurs selon les classes d'unités
Réviseure 1 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
8 27 4 7 1 3 11 3 64 (12,5 %) (42,2 %) (6,2 %) (10,9 %) (1,6 %) (4,7 %) (17,2 %) (4,7 %)
46 (71 ,8 %) 17 (28,2 %)
Réviseure 2 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
30 25 15 17 11 16 17 4 135 (22,2 %) (18,5 %) (11 ,1 %) (12,6 %) (8,1 %) (11 ,9 %) (12,6 %) (3 %)
87 (64 ,4 %) 48 (35,6 %)
Réviseur 3 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
19 25 9 18 7 12 5 5 100 (19 %) (25 %) (9 %) (18 %) (7 %) (12%) (6%) (5 %)
71 (71 %) 29 (29 %)
Réviseur 4 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
15 29 11 19 14 11 6 6 111 (13,5%) (26,1 %) (9,9%) (17,2%) (12,6%) (9 ,9 %) (5,4%) (5,4 %)
74 (66,7 %) 37 (33 ,3 %)
Réviseure 5 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
12 5 4 1 2 4 7 2 37 (32 ,5 %) (13 ,5%) (10 ,8 %) (2,7%) (5,4 %) (10 ,8%) (18,9 %) (5 ,4 %)
22 (59,5 %) 15 (40,5 %)
Réviseure 6 Classes ouvertes Classes fermées
Total Nom Verbe Adjectif Adverbe Pronom Déterminant Préposition Conjonction
3 2 2 2 1 1 5 1 17 (17,6%) (11 ,8 %) (11 ,8%) (11,8%) (5,9%) (5,9%) (29,3 %) (5 ,9 %)
9 (53%) 8 (47 %)
Annexes 230
Tableau G.2 - Répartition des unités lexicales visées selon les dimensions sur lesquelles portent les problèmes détectés
Classe Dimensions linguistiques d'unités Morphologie Sémantique Syntaxe stylistique Typographie Indéterminée
Nom 17 38 1 13 16 3
Verbe 27 55 9 16 9 Adjectif 9 30 2 3 1 1
Adverbe 0 44 11 7 5
Sous-total 53 167 23 39 17 18 (79,1%) (74,2%) (28,8%) (72,2%) (94,4%) (60%)
Pronom 2 17 7 7 3
Déterm inant 9 11 19 2 1 5
Prépos ition 3 21 23 5 1
Conjonction 0 9 8 1 3
Sous-total 14 58 57 15 1 12 (20,9%) (25 ,8%) (71 ,2%) (27,8%) (5,6%) (40%)
Total 67 225 80 54 18 30
Annexes 231
Tableau G.3 - Comparaison des problèmes détectés par la réviseure 2 et le réviseur 3
Réviseure 2 Réviseur 3 Catégories de problèmes
Nombre 010 Nombre 010
Anglicisme 23 16,3 2 2
Impropriété 15 10,6 2 2
Erreur de syntaxe 14 9,9 8 7,8
Incompatibilité sémantique 11 7,B 1 1
Répétition 11 7,B 1 1
Reprise d'information incorrecte 9 6,4 2 2
Erreur d'orthographe grammaticale 8 5,7 17 16,7
Non-respect d'une règle de présentation 8 5,7 2 2
Problème pressenti 3 2,1 7 6,9
Information non nécessaire 6 4,3 6 5,9
Formulàtion inadéquate 4 2,B 6 5,9
Imprécision 4 2,B 9 B,8
Problème inconnu 4 2,B 6 5,9
Répétition inutile 4 2,B 2 2
Erreur d'orthographe lexicale 3 2,1 3 2,9
Pléonasme 3 2,1 6 5,9
Incohésion temporelle 2 1,4 1 1
Inexactitude 2 1,4 4 3,9
Manque d'uniformité 2 1,4 1 1
Vocabulaire non adapté 2 1,4 7 6,9
Lien manquant 1 0,7 3 2,9
Mauvais lien 1 0,7 6 5,9
Autre cas 1 0,7 0 0
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