Transcript
Page 1: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314 © 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

299

Doi : 10.1019/20094053

Article original

Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad

1, 2

, M. Khemiss

1

, I. Bougmiza

3

, C. Prefaut

2,

H. Aouina

4

, N. Mrizek

5

, A. Garrouche

6

, A. Zbidi

1

, Z. Tabka

1

1 Service de Physiologie et Explorations Fonctionnelles, EPS Farhat Hached, Sousse, Tunisie.2 Inserm, Équipe ERI 25, « Muscle et Pathologies », Service Central de Physiologie Clinique, Hôpital Arnaud de Villeneuve, Montpellier, France.3 Département de Médecine Communautaire, Faculté de Médecine de Sousse, Sousse, Tunisie.4 Service de Pneumologie, EPS Charles Nicolle, Tunis. Tunisie.5 Service de Médecine du Travail, EPS Farhat Hached, Sousse, Tunisie.6 Service de Pneumologie, EPS Farhat Hached, Sousse, Tunisie.

Correspondance : H. Ben Saad Laboratoire de physiologie, Faculté de Médecine « Ibn Eljazzar » de Sousse, avenue Karoui Mohamed, Sousse 4000, Tunisie.

[email protected]

Réception version princeps à la Revue : 04.04.2008.Demande de réponse aux auteurs : 28.05.2008.Réception de la réponse des auteurs : 08.09.2008.Demande de réponse aux auteurs : 09.09.2008.Acceptation définitive : 19.10.2008.

Les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’intérêt.

Résumé

Introduction

Les études portant sur le profil spirométrique desfumeurs du narguilé sont rares, leurs méthodologies sont limitéeset leurs conclusions sont contradictoires.

Objectifs

(i) Déterminer le pourcentage des fumeurs de nar-guilé ayant un déficit ventilatoire obstructif (DVO) et/ou restrictif

(DVR), ou une distension pulmonaire statique (DPS). (ii)

Comparerl’âge estimé du poumon avec l’âge chronologique.

Population et méthodes

Critères d’inclusion : hommes âgés de

20 à 60 ans, fumeurs de narguilé (> 1 narguilé-année (NA)). Critèresde non inclusion : fumeur de cigarettes ou de cigares, comorbi-dités. Quantification de la consommation de narguilé : NA et kgde tabac cumulé (1 NA = 9,125 kg de tabac cumulé). Définitions :DVO proximal : VEMS/CVF < limite inférieure de la normale (LIN).DVO distal : CVF > LIN et diminution (< LIN) d’un ou plusieursdébits périphériques. DVR : CPT < LIN. DPS : VR > limite supérieurede la normale. Mesures spirométriques (spiromètre Vmax avecmesure de la capacité résiduelle fonctionnelle par rinçage àl’azote) : les mesures sont réalisées selon les recommandationsinternationales.

Résultats

110 fumeurs sont inclus (34 ± 10 ans ; 1,76 ± 0,07 m ;84 ± 14 kg). (i) 36 % des fumeurs ont une DPS, 14 % ont un DVOdistal, 14 % ont un DVR et 6 % ont un DVO proximal. (ii) L’âgeestimé du poumon est plus élevé que l’âge chronologique (47 ±18 contre 34 ± 10 ans, p < 0,05).

Conclusion

La consommation du narguilé accélère le déclin dela fonction respiratoire. Cette étude fournit aux autorités sanitai-res des arguments valides pour lutter contre ce fléau qui touche deplus en plus les enfants et les femmes enceintes.

Mots-clés :

Spirométrie • Tabac • Narguilé • Déficit • Vieillissement.

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

Page 2: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

300

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

Spirometric profile of narghile smokers

H. Ben Saad, M. Khemiss, I. Bougmiza, C. Prefaut, H. Aouina, N. Mrizek, A. Garrouche, A. Zbidi, Z. Tabka

Summary

Introduction

Studies of the spirometric profile of narghile smo-kers are few, have some methodologic limits (ie. small samplesize) and present contradictory conclusions.

Objective

(i) To determine the percentage of smokers havingan obstructive ventilatory defect (OVD) and/or a restrictive venti-latory defect (RVD) or static hyperinflation (SHI). (ii) To comparethe chronological and the estimated lung ages.

Population and methods

Inclusion criteria: men aged 20-60 yearssmoking narghile (>1 narghile-year (NA). Non-inclusion criteria:cigar or cigarettes smoker and co-morbidity.

Narghile consummation quantification: NA and kg of cumulatedtobacco (1 NA=9.125 kg of cumulated tobacco). Definitions: largeairway OVD: FEV

1

/FVC < lower limit of normal (LLN). Smallairway OVD: FVC > LLN and forced mid expiratory flow < LLN.RVD: total lung capacity < LLN. SHI: residual volume > upper limitof normal.

Spirometric measures (

Vmax 22 Series/6200 Autobox, YorbaLinda, California, USA with measurement of functional residualcapacity by nitrogen washout). Measurements were made accordingto international recommendations.

Results

110 narghile smokers were included (34±10Yr; 1.76±0.07m;84±14kg). 36% of subjects had SHI; 14% had small airway OVD;14% had RVD and 6% had large airway OVD. (ii) Estimated lungage was higher than the chronological lung age (47±18Yr

vs

34±10Yr, p<0.05).

Conclusion

Narghile consumption accelerates ageing of thelung. This study provides the health authorities with valid argu-ments to fight this blight on society which increasingly involveschildren and pregnant women.

Key-words:

Spirometry • Tobacco • Narghile • Deficiency • Ageing.

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

[email protected]

Introduction

Depuis une décennie nous assistons à l’émergence àgrande échelle de la consommation du narguilé. Cette der-nière, devenue un phénomène de mode, a pris une ampleurinquiétante. À ce jour le nombre de ses adeptes est estimé à100 millions à travers le monde, principalement répartis enAfrique du nord, en Asie et au Moyen-Orient [1-4]. À titred’exemples, les fumeurs de narguilé, hommes, sont respecti-vement 22 % en Égypte, 50 % en Syrie et 57 % au Koweït[1-4]. Face à la « mondialisation » de ce phénomène qui touchede plus en plus les femmes et les enfants [5, 6], l’organisationmondiale de la santé s’est saisie du dossier et a souligné que« le narguilé est non seulement un risque sanitaire, maisconstitue aussi une porte d’entrée dans le tabagisme pour uncertain nombre de jeunes » [7]. Contrairement aux fumeursde cigarettes, les adeptes du narguilé, ne sont pas enclins àenvisager d’arrêter de fumer ; ce qui révèle un grave et pro-fond déficit d’information sur la nature réelle et la toxicitéde la fumée du narguilé [2, 6-9].

Habituellement, l’opinion publique et surtout le cadremédical sous-estiment les méfaits de cette pipe à eau et ce malgréses effets nocifs sur la santé [1, 6]. En effet, il est prouvé que safumée est riche en centaines de substances potentiellement dan-gereuses pour la santé [10-13]. En plus, la consommation dunarguilé est souvent associée à plusieurs pathologies [14-26](cancers, maladies infectieuses, anomalies génétiques, maladies

Abréviations

BBPCOCOCPTCRFCVCVFDEMx%

DEMMDEPDLCODPSDVODVREPSIMCnN

N2

NAO2

rVEMSVRVV

::::::::

::::::::::

:::::::

Coefficient de régression non standardiséBroncho-pneumopathie chronique obstructiveMonoxyde de carboneCapacité pulmonaire totaleCapacité résiduelle fonctionnelleCapacité vitale lenteCapacité vitale forcéeDébit expiratoire maximal lorsque x% de la CVF reste à expirerDébit expiratoire maximal médianDébit expiratoire de pointeCapacité de diffusion du CODistension pulmonaire statiqueDéficit ventilatoire obstructifDéficit ventilatoire restrictifÉtablissement public de la santéIndice de masse corporelleNombre de sujetsNormale correspondant à l’intervalle de confiance à 95%AzoteNarguilé-annéeOxygèneCoefficient de corrélationVolume expiré maximal à la première secondeVolume résiduelVariable ventilatoire

Page 3: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

301

cardiovasculaires, eczéma de la main et aspergillose chez lessujets immunodéprimés). Par ailleurs, comparativement à lafumée de cigarette, celle du narguilé a un taux plus élevé denicotine (1-3 % contre 2-4 % ; respectivement), de monoxydede carbone (CO) (0,41 % contre 1,40 % ; respectivement) et degoudrons (11 mg contre 802 mg ; respectivement) [2, 8, 12, 13,27-29]. De surplus, les fumeurs du narguilé ont un taux sanguintrès élevé de radicaux libres, connus comme médiateurs delésions du tissu bronchopulmonaire [30, 31]. Enfin, la consom-mation du narguilé altère la clairance mucociliaire de l’appareilrespiratoire [32]. Tout ceci nous a incités à penser qu’une alté-ration du profil spirométrique des fumeurs de narguilé seraitpossible.

À notre connaissance les études portant sur le profilspirométrique des fumeurs du narguilé sont rares [8, 32-41].En effet trois seulement sont publiées sous forme d’articlesoriginaux [8, 32, 33], alors que d’autres approches s’y afférantont été présentées sous forme de résumés lors de congrèsinternationaux [34-37]. La majorité de ces études a desméthodologies limitées : faible taille de l’échantillon (19, 20,65 et 82 sujets exclusivement fumeur de narguilé, respective-ment pour les études d’Altinisik et coll. [35], de Köseoglu etcoll. [32], de Bayindir et coll. [34] et de Kiter et coll. [8]),inclusion de sujets à la fois fumeurs de cigarettes et de nar-guilé [2, 33], ou de sujets âgés [8] ou atteints de pathologiesaffectant la fonction respiratoire [38-40], mesure seulementdes débits expiratoires et non des volumes pulmonaires [8,34, 35], non application des récentes recommandations etdéfinitions spirométriques [8, 41]. Ces défaillances métho-dologiques expliquent une partie des discordances desconclusions : absence d’atteinte fonctionnelle respiratoire[32, 35-37], atteinte minime des petites voies aériennes [8]ou atteinte des grosses voies aériennes [34, 42].

Certainement le fait d’ignorer les effets néfastes de lafumée du narguilé sur la fonction respiratoire, nous amène àun problème de santé publique mondial [1, 2, 7, 43], quenous pouvons d’ores et déjà entreprendre de prévenir. La pré-sente étude, portant sur le profil spirométrique des fumeurs denarguilé a comme objectifs de :1. Comparer les variables ventilatoires (VV) mesurées avecles valeurs de référence.2. Déterminer le pourcentage de sujets ayant des VV horsnormes, ou un déficit ventilatoire obstructif (DVO) et/ourestrictif (DVR), ou une distension pulmonaire statique(DPS).3. Comparer l’âge estimé du poumon avec l’âge chrono-logique.

Population et méthodes

Type d’étude

Il s’agit d’une étude transversale étalée sur 3 mois(décembre 2006 - février 2007). Elle est réalisée dans le Ser-

vice de Physiologie et Explorations Fonctionnelles au sein del’Établissement Public de la Santé (EPS) Farhat Hached deSousse en Tunisie. Cette étude, sans bénéfice individueldirect pour le sujet, a obtenu l’accord du comité d’éthiquede l’EPS local. En cas de découverte d’un déficit ventilatoire,le sujet a été confié à un pneumologue.

Population

Seuls sont inclus dans l’étude les sujets de genre mascu-lin fumeurs actuels de narguilé. Ces sujets sont recrutésparmi le personnel de la Faculté de Médecine et de l’EPSFarhat Hached de Sousse ainsi que des connaissances despersonnes impliquées dans l’étude. Les critères de non inclu-sion sont multiples : âge inférieur à 20 ans ou supérieur à60 ans, fumeurs de cigarettes, de cigares ou de pipe, antécédentsd’asthme, d’atopie, de tuberculose pulmonaire ou d’infectionrespiratoire récente, présence de comorbidités (pathologiescardiovasculaires, diabète, néoplasie) et réalisation imparfaitedes manœuvres respiratoires demandées.

Taille de l’échantillon

Elle est calculée selon l’équation prédictive suivante

[

44] : n = (Z

2

.p.q)/

Δ

2

. n : nombre de sujets nécessaires. Z :niveau de confiance à 95 % (Z = 1,96). p : estimation del’atteinte spirométrique chez les fumeurs de narguilé. D’aprèsla littérature [45], 25 à 40 % des fumeurs de narguilé ont undébit expiratoire de pointe (DEP) diminué. q = 1 – p = 0,75.

Δ

: précision = 8 %. D’après cette formule le nombre desujets nécessaires est de 112.

Procédures de collectes des données

Les données ont été recueillies à l’aide d’un question-naire inspiré de celui de

l’American

Thoracic Society

[46]. Lequestionnaire, non validé, est composé de questions rédigéesen langue française et posées aux sujets dans la langue arabe.Ces questions, posées par le même opérateur selon la mêmeforme, sont essentiellement à réponses fermées et le plussouvent dichotomiques.

Le protocole de déroulement de l’étude se définitcomme suit : accueil et remise d’une fiche d’information ;explication des objectifs de l’étude, signature du consente-ment éclairé, réponse au questionnaire médical et mesuresanthropométriques et spirométriques.

Les données recueillies sont les suivantes : consomma-tion du narguilé quantifiée en narguilé-année (NA) et en kgde tabac cumulé [1, 47], données anthropométriques (âge,poids, taille, indice de masse corporelle (IMC)), données spi-rométriques (capacité vitale forcée (CVF), volume expirémaximal à la première seconde (VEMS), DEP, débit expira-toire maximal médian (DEMM), débits expiratoires maximaux,

Page 4: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

302

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

lorsque 75 %, 50 % et 25 % de la CVF reste à expirer (res-pectivement, DEM

75 %

, DEM

50 %

et DEM

25 %

), capacitévitale lente (CV), capacité résiduelle fonctionnelle (CRF),volume résiduel (VR), capacité pulmonaire totale (CPT),rapports VEMS/CV, VEMS/CVF, VR/CPT et CRF/CPT)et âge estimé du poumon.

Définitions utilisées

Les définitions utilisées sont basées sur l’identificationd’une limite inférieure de la normale pour la VV en question.Pour cette raison, nous avons appliqué les deux méthodesd’interprétation les plus utilisées dans la pratique courante[41, 48, 49].

La première méthode est basée sur des « valeurs seuilsfixes » en dehors desquelles, la VV sera considérée commeanormale [48, 49]. Pour le VEMS et les volumes pulmonaires,la VV est considérée diminuée quand elle est inférieure à80 % de sa valeur de référence, normale entre 80 et 120 %,et augmentée quand elle est supérieure ou égale à 120 %.Pour les débits expiratoires maximaux et à cause de leursgrandes variabilités, la VV est considérée diminuée quandelle est inférieure à 50 % de sa valeur de référence, normaleentre 50 et 120 %, et augmentée quand elle est supérieureou égale à 120 %. Pour le rapport VEMS/CVF, le seuil estfixé à 0,70.

La deuxième méthode est basée sur la détermination del’intervalle de confiance à 95 %, et donc sur l’application deslimites inférieure et supérieure de la normale [41]. Par sim-plification dans l’article, on définira les anomalies ventilatoiresen supérieur (> N) ou inférieur de la normale (< N), la nor-male correspondant à l’intervalle de confiance. Le DVOproximal est défini par un « rapport VEMS/CVF < N » [41].La récente classification internationale du degré de gravité duDVO, basée sur le VEMS exprimé en pourcentage de savaleur de référence, est utilisée (léger : VEMS

70 % ;modéré : 60 %

VEMS < 69 % ; assez grave : 50 %

VEMS < 59 % ; grave : 35 %

VEMS < 49 % et trèsgrave : VEMS < 35 %) [41]. Le DVO distal est défini parl’association d’une « CVF normale » et d’une diminution(< N) des débits périphériques (DEM

25 %

et/ou DEM

50 %

et/ou DEM

75 %

et/ou DEMM) [48]. Le déficit ventilatoire res-trictif est défini par une « CPT < N » [41]. La classificationinternationale du degré de la gravité du DVR, basée sur laCPT exprimée en pourcentage de sa valeur de référence, estutilisée (léger : 70 %

CPT

N ; modéré : 60 %

CPT< 70 % ; grave : CPT < 60 %) [49]. Le déficit ventilatoiremixte est défini par l’association d’une « CPT < N » et d’un« rapport VEMS/CVF < N » [41]. La distension pulmonairestatique est définie par un « VR > N » [50]. La classificationinternationale du degré de gravité de la DPS est utilisée(stade I : VR

N mais CRF et CPT normales ; stade II : VRet CRF

N mais CPT normale ; stade III : VR, CRF etCPT

N) [50]. Le déficit ventilatoire non spécifique est

défini par une baisse (< N) de la CVF et/ou du VEMS, avecun rapport VEMS/CV et une CPT normaux.

L’âge estimé du poumon est calculé à partir de l’équa-tion suivante [51] : âge estimé du poumon = 0,072898

×

Taille (m) -31,250

×

VEMS mesuré (l) -39,375.Selon l’IMC (rapport du poids sur le carré de la taille),

nous distinguons [52] : maigreur (IMC < 18,5), poids nor-mal (18,5

IMC < 25), surpoids (25

IMC < 30) et obésité(IMC supérieur ou égale à 30). Cette dernière est soit modé-rée (30 < IMC < 35) soit importante (35

IMC < 40) soitmassive (IMC

40).

Narguilé : description, fonctionnement, composition

de la fumée et évaluation de la consommation

Le narguilé est une pipe à eau qui permet de fumer unepréparation de tabac, aromatisé ou non, brûlée par des braisesde charbon et dont la fumée est refroidie en passant à traversl’eau avant d’être inhalée. Les différentes parties du narguilé,dont la taille varie de 40 à 100 cm, sont mentionnées dans la

figure 1

. La douille est en terre cuite ou en métal. Elle contientle tabac et elle est trouée afin de laisser passer la fumée dans lacolonne. Le cendrier est utile pour récupérer les cendres du char-bon. La colonne constitue la partie centrale du narguilé (1 cmde diamètre). La douille se fixe en haut et l’étanchéité est assuréepar un joint. En bas, l’extrémité de la colonne trempe dans l’eau.Le tout est soit enfoncé soit vissé dans le vase. Le vase est enverre ou en acrylique, et il est rempli par l’eau à moitié de sahauteur. Le tuyau (75-150 cm) permet de fumer le narguilé.L’extrémité proximale donne sur l’espace d’air entre l’eau et lajonction avec la colonne.

Fig. 1. Différentes parties du narguilé.

Page 5: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

303

Le fonctionnement du narguilé peut être résumécomme suit [9] : l’aspiration dans le tuyau crée une dépres-sion à l’intérieur du vase. L’air passe à travers la colonne etbarbotte dans l’eau, permettant ainsi la combustion du tabac.La fumée produite, traverse la colonne et l’eau, remonte sousforme de bulles d’air et passe dans le tuyau.

Nous avons considéré qu’un narguilé fumé comporte25 grammes de tabac et donc 1 NA (un narguilé par jourpendant un an) = 9,125 kg de tabac cumulé. Le sujet estclassé en non-fumeur (< 1 NA) ou en fumeur actuel(

1 NA).

Technique de la spirométrie

Nous avons utilisé un spiromètre avec mesure de la CRFpar rinçage à l’azote (N

2

) à réponse rapide (Vmax 22 Séries/6 200 Autobox, Yorba Linda, California, USA). Après intro-duction des données anthropométriques, les valeurs de réfé-rence sont automatiquement calculées, selon les équationslocales [53]. Les mesures sont faites selon les recommanda-tions internationales [54, 55].

Les données sont calibrées en fonction des conditionsatmosphériques relevées quotidiennement [56]. L’exactitudedu débit et du volume sortant du débitmètre est confirméeune fois par jour avec une seringue de 3 litres [54]. Avant detester chaque sujet, l’analyseur à N

2

est réglé à zéro avec100 % d’oxygène (O

2

) et ensuite exposé à l’air ambiant pourconfirmer l’étalonnage.

L’opérateur supervise les manœuvres respiratoires etencourage fortement le sujet à produire un effort maximal.Une démonstration de la technique appropriée est faite et lesprocédures des mesures sont respectées.

La manœuvre de mesure de la CVF se compose de 4 phasesdistinctes : 1) respiration calme pendant 5 cycles ; 2) expira-tion lente et prolongée jusqu’à la CRF ; 3) inspiration maxi-male ; 4) expiration « explosive » et complète. Nous avonsgardé la courbe d’expiration forcée avec un DEP satisfaisantet qui a la meilleure somme (CVF + VEMS).

La technique de mesure de la CRF par rinçage du N

2

estbasée sur le rinçage du N

2

dans les poumons, observé pendantque le sujet respire de l’O

2

à 100 % [55]. La procédure de lamesure de la CRF est expliquée au sujet, en insistant sur lanécessité d’éviter les fuites autour de l’embout buccal pendantle rinçage. Le sujet respire l’air ambiant, pince-nez en place,pendant 30 à 60 s pour s’habituer à l’appareil et pour obtenirun niveau télé-expiratoire stable. Lorsque la respiration est sta-ble et régulière, le sujet est connecté au circuit lui permettantde respirer 100 % d’O

2

au lieu de l’air ambiant. Le rinçage estconsidéré comme terminé lorsque la concentration en N

2

est< 1,5 % pendant au moins trois respirations successives. Aumoins une mesure techniquement satisfaisante est obtenue. Siplus d’une mesure est effectuée, la valeur retenue sera lamoyenne des résultats techniquement acceptables et similairesà 10 % près.

Analyse statistique

L’analyse de la distribution des variables est réaliséegrâce au test de Kolmogorov-Smirnov [44]. Quand la distri-bution est normale et les variances sont égales, les résultatssont exprimés par leurs moyennes ± écart-types. Sinon, lesrésultats sont exprimés par leurs médianes (1

er

-3

e

quartile).Le test t de student est utilisé pour comparer les VV

mesurées avec les valeurs de référence et pour comparer l’âgeestimé du poumon avec l’âge chronologique.

Nous avons réalisé des régressions linéaires simples entreles VV (variables dépendantes) et la consommation du narguiléexprimée en kg (variable indépendante). La VV (exemples :DEMM, VR) varie d’un facteur égal à « B x consommation dunarguilé ». B est le coefficient de régression non standardisé.Exemple : le DEMM décline de B

1

ml par kg de consommationde narguilé et le VR augmente de B

2

ml par kg de consomma-tion de narguilé. Le coefficient de corrélation (r) entre la VV etla consommation du narguilé exprime la quantité de variationqui est commune aux 2 variables.

Puis nous avons réalisé des régressions linéaires multiplesentre les VV influencées par la consommation du narguilé(variables dépendantes) et les variables indépendantes suivantes :âge, taille, poids et consommation de narguilé en kg.

Le seuil de significativité de 5 % est retenu.La saisie des résultats est réalisée en utilisant le logiciel

Statistica (Statistica Kernel version 6 ; Stat Soft. France).

Résultats

Cent dix sujets sur les 150 examinés (73 %) sont inclusdans l’étude. Les critères de non inclusion sont : fumeurs decigarettes ou de cigares (n = 17), réalisation imparfaite desmanœuvres respiratoires demandées (n = 12), comorbidités(n = 6), âge < 20 ans ou > 60 ans (n = 5).

La médiane (1

er

-3

e

quartile) de la consommation dunarguilé est de 14 NA (4-28) et de 128 kg de tabac cumulé(37-256).

Les moyennes ± écart-types (minimum-maximum) del’âge, de la taille, du poids et de l’IMC, sont respectivementde 34 ± 10 ans (20-60), de 1,76 ± 0,07 m (1,58-1,90), de 84 ±14 kg (57-125) et de 27 ± 4 kg/m

2

(19-39). Trente-six sujets(33 %) ont un poids normal, 47 (43 %) un surpoids et 27 (25 %)une obésité. Vingt-quatre sujets (22 %) ont une obésité modéréeet 3 (3 %) ont une obésité importante.

La

figure 2

illustre la répartition de l’échantillon partranches d’âge de 10 ans.

Comparaison des VV mesurées avec les valeurs de référence

(tableau I)

Tous les débits expiratoires forcés sont diminués.

Page 6: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

304

Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

Les augmentations du VR, de la CRF et des rapportsVR/CPT et CRF/CPT orientent vers une DPS chez lesfumeurs du narguilé.

Nombre de sujets ayant des déficits ventilatoiresAucun sujet n’a une spirométrie strictement nor-

male.La

figure 3

expose le nombre de fumeurs répartisselon la méthode basée sur les « valeurs seuils fixes ». Cinqfumeurs (5 %) ont un rapport VEMS/CVF

0,70.Le

tableau II

expose, selon la méthode basée surl’intervalle de confiance à 95 %, le nombre et le pourcen-tage de fumeurs ayant des VV hors normes et/ou des défi-cits ventilatoires. L’analyse de ce tableau révèle les pointssuivants :• Seulement 6 sujets (6 %) ont un DVO proximal (légeret modéré) ;• 15 sujets (14 %) ont un DVO distal ;• 40 sujets (36 %) ont une DPS. 7 (6 %), 13 (12 %) et 20(19 %) sujets ont une DPS classée, respectivement, enstade I, en stade II et en stade III ;• 15 sujets (14 %) ont un DVR. 11 (10 %), 3 (3 %) et 1(1 %) sujets ont un DVR classé, respectivement, commeléger, modéré et grave ;• Aucun sujet n’a un déficit ventilatoire mixte ;• Entre 3 et 5 % des sujets ont un déficit ventilatoire nonspécifique.

Fig. 2. Répartition de l’échantillon par tranches d’âge de 10 ans.

Tableau I.

Comparaison des variables ventilatoires (VV) mesurées avec les valeurs de référence (n = 110).

VV Valeur mesurée Valeur mesurée exprimée en pourcentage

de la valeur de référence

p

Débits expiratoires forcés

VEMS (l) 3,87 ± 0,69 94 ± 12 0,004

DEP (l.s-1) 8,27 ± 1,64 87 ± 15 < 0,001

DEM25% (l.s-1) 1,93 ± 0,79 81 ± 32 < 0,001

DEM50% (l.s-1) 4,84 ± 1,27 92 ± 23 < 0,001

DEM75% (l.s-1) 7,30 ± 1,70 89 ± 19 < 0,001

DEMM (l.s-1) 4,05 ± 1,07 87 ± 21 < 0,001

Volumes pulmonaires

CVF (l) 4,80 ± 0,84 97 ± 12 0,218

CV (l) 4,45 ± 0,83 87 ± 13 < 0,001

CRF (l) 3,80 ± 1,61 114 ± 48 0,002

CPT (l) 7,22 ± 1,75 104 ± 24 0,148

VR (l) 2,40 ± 1,44 132 ± 50 < 0,001

Rapports

VEMS/CVF 0,81 ± 0,06 100 ± 12 0,519

VEMS/CV 0,88 ± 0,10 95 ± 12 < 0,001

VR/CPT 0,31 ± 0,11 117 ± 39 < 0,001

CRF/CPT 0,51 ± 0,10 101 ± 20 0,812

Les valeurs sont exprimées par leurs moyennes ± écart types. Pour les abréviations, voir la liste des abréviations. P (test de student) : Valeur mesurée contre valeur mesurée exprimée en % de la valeur de référence.

Page 7: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 305

Relations entre les VV et la consommation de narguilé

Le DEM25 %, la CVF, la CV, la CPT et le rapport CRF/CPT ne sont pas significativement corrélés à la consomma-tion de narguilé.

La figure 4 expose les coefficients de corrélation (r)entre les VV mesurées et la consommation de narguilé.Cette dernière accélère le déclin du VEMS (p < 0,001)(fig. 4 A) et des débits expiratoires maximaux (fig. 4. B-E). De même, elle accélère l’augmentation de la CRF

(p = 0,049) (fig. 4 F) et du VR (p = 0,004) (fig. 4 G),témoignant ainsi d’une tendance vers une DPS. Enfin,elle accélère le déclin du rapport VEMS/CVF (p = 0,04)(fig. 4 H).

Les régressions linéaires multiples entre les VV et lesdonnées anthropométriques selon la consommation dunarguilé montrent que plus cette dernière augmente, plusles débits expiratoires maximaux et le rapport VEMS/CVF diminuent, et plus la CRF, le VR et le rapport VR/CPT augmentent (variations statistiquement significati-ves).

Tableau II.

Profil spirométrique des fumeurs du narguilé (n = 110).

Nombre de sujets ayant des variables ventilatoires hors normes

Débits expiratoires forcés ou rapports ≤ N

VEMS (l) 14 (13 %)

DEP (l.s-1) 31 (28 %)

DEM25 % (l.s-1) 8 (7 %)

DEM50 % (l.s-1) 9 (8 %)

DEM75 % (l.s-1) 9 (8 %)

DEMM (l.s-1) 18 (16 %)

VEMS/CVF 6 (6 %)

VEMS/CV 2 (2 %)

Rapports ≥ N

VR/CPT 33 (30 %)

CRF/CPT 16 (14 %)

Volumes pulmonaires

≥ N ≤ N

CVF (l) 7 (6 %)

CV (l) 40 (36 %)

CRF (l) 36 (33 %) 14 (13 %)

CPT (l) 23 (21 %) 15 (14 %)

VR (l) 40 (36 %) 9 (8 %)

Définitions Nombre (%) de sujets ayant un déficit ventilatoire obstructif distal

CVF normale et [DEM25 % ou DEM50 % ou DEM75 % ou DEMM] < N 15 (14 %)

DEM25 % < N 8 (7 %)

DEM50 % < N 9 (8 %)

DEM75 % < N 9 (8 %)

DEMM < N 15 (14 %)

Nombre (%) des sujets ayant un déficit ventilatoire non spécifique

CVF < N et (VEMS/CVF et CPT) dans les normes 3 (3 %)

VEMS < N et (VEMS/CVF et CPT) dans les normes 5 (5 %)

(CVF < N ou VEMS < N) et (VEMS/CVF et CPT) dans les normes 5 (5 %)

N : Normale correspondant à l’intervalle de confiance à 95 %. Pour le reste des abréviations, voir la liste des abréviations.

Page 8: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

306 Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

Tableau III.

Composition de la fumée de narguilé selon des modèles expérimentaux. Les données de la fumée de cigarette sont montrées à titre comparatif.

Shihadeh et Saleh [60] Shihadeh [13] Rakower et Fatal [17] Hoffmann et Hoffmann [79]

Type de tabac Moassel Moassel Tombak Cigarettes

Nombre de bouffées 171 100 Non mentionné

Volume de la bouffée, ml 530 300 200 35

Durée de la bouffée, s 2,6 3 5

Intervalle entre les bouffées, s 17 30 60

Goudron, mg 802 242 84 1-27 (11,2)

Nicotine, mg 2,96 2,25 0,1-2 (0,77)

Monoxyde de carbone, mg 145 1-22 (12,6)

Hydrocarbures aromatiques polycycliques (ng)

Benzopyrène 20-40

Phénanthrène 748 200-400

Fluranthracène 221 9-99

Chrysène 112 4-41

Métaux lourds (ng)

Arsenic 165 40-120

Béryllium 65 300

Nickel 990 0-600

Cobalt 70 0,13-0,2

Chrome 1 340 4-70

Plomb 6 870 34-85

Fig. 3. Nombre de fumeurs répartis selon la méthode basée sur les « valeurs seuils fixes ». Les « valeurs seuils fixes » sont exprimées en pourcentagede la valeur de référence.A). Volume expiré maximal à la première seconde (VEMS) et volumes pulmonaires [capacité vitale forcée (CVF), capacité pulmonaire totale(CPT), volume résiduel (VR) et capacité résiduelle fonctionnelle (CRF)].B) Débits expiratoires maximaux [débit expiratoire de pointe (DEP), débit expiratoire maximal médian (DEMM), débit expiratoire maximallorsque x% de la CVF reste à expirer (DEMx%).

A B

Page 9: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 307

Fig. 4. Coefficient de corrélation (r) entre les variables ventilatoires et la consommation de narguilé exprimée en kg cumulé (n = 110).A) Volume expiré maximal à la première seconde (VEMS). B) Débit expiratoire de pointe (DEP). C) Débit expiratoire maximal lorsque50% de la capacité vitale forcée (CVF) reste à expirer (DEM50%). D) Débit expiratoire maximal lorsque 75% de la CVF reste à expirer(DEM75%). E) Débit expiratoire maximal médian (DEMM). F) Capacité résiduelle fonctionnelle (CRF). G) Volume résiduel (VR). H) RapportVEMS/CVF.

Page 10: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

308 Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

Âge estimé du poumon

L’âge estimé du poumon est plus élevé que l’âge chro-nologique (respectivement, 47 ± 18 ans contre 34 ± 10 ans ;p < 0,05).

Discussion

Le profil spirométrique des fumeurs du narguilé estaltéré avec surtout la présence d’un DVO, d’une DPS etd’une accélération du vieillissement pulmonaire.

Discussion méthodologique

Cadre nosologique

Narguilé ou pipe à eau est le nom générique pour touteméthode d’utilisation du tabac ayant comme caractéristiquele passage de la fumée dans l’eau avant d’être inhalée. Dansla littérature l’appellation de ce mode de tabagisme dépend despays d’origine et comporte les termes suivants : narguilhé,arghila, argileh, shisha, chicha, gozha, goza, chilam, ghelyan,hookah, hooka, hukka, ou hubble-bubble. Nous avons pré-féré l’utilisation du terme « narguilé ».

Type d’étude

Cette étude, de type transversale, est économique etfacile à effectuer. Elle requiert moins de temps qu’une étudelongitudinale et fournit plusieurs informationss utiles [57].Nous avons préféré comparer les valeurs mesurées des VVdes fumeurs de narguilé avec les valeurs de référence établiessur une population locale saine et non fumeuse [53]. D’autresméthodes ont été utilisées, telle que la comparaison avec ungroupe de fumeurs de cigarettes ou un groupe de non-fumeurs[8, 32].

Mode de recrutement

Pour des raisons purement pratiques, nous avonsrecruté nos sujets parmi le personnel de la Faculté de Méde-cine et de l’EPS Farhat Hached de Sousse ainsi que lesconnaissances des personnes impliquées dans l’étude.Comme dans toute étude portant sur des volontaires, il y apossibilité d’un biais de sélection [58]. D’autres modes derecrutement ont été utilisés. Par exemple, Kiter et coll. [8]ont visité tous les cafés de narguilé de la ville d’Izmir (Tur-quie), où 15 à 20 fumeurs de narguilé par café ont réponduà un questionnaire et effectué une mesure des débits expira-toires.

Critères d’inclusion et de non inclusion

Certaines précautions ont été prises lors de la réalisa-tion de cette étude. Afin d’éviter des interprétations erro-nées nous avons inclus uniquement les hommes, fumeurs

actuels de narguilé, non-fumeurs de cigares, de cigarettesou de pipes, stables sur le plan clinique et indemnes decomorbidités.

Comme dans l’étude de Kiter et coll. [8], nous n’avonspas inclus les femmes dans notre étude et ce malgré le fait quele phénomène « narguilé » touche de plus en plus les femmes(69 % des femmes au Koweït fument le narguilé [4]).

Comme la moyenne d’âge d’initiation à la consommationde narguilé est de 19 ± 5 ans [3, 47], nous avons inclus seule-ment les fumeurs âgés de 20 ans et plus ayant une consomma-tion supérieure à 1 NA. Cependant, ce phénomène « narguilé »touche de plus en plus les enfants [6].

L’espérance de vie en bonne santé des Tunisiens étantde 61 ans (année 2002) [7], il est peu probable de trouverdes fumeurs de narguilé âgés de plus 60 ans, indemnes decomorbidité et stables sur le plan clinique. Ceci explique lefaible nombre de sujets, âgés de 50 à 60 ans, inclus dansnotre étude (fig. 2). Cette limite supérieure d’âge n’a pas étérespectée dans l’étude de Kiter et coll. [8] qui ont inclus dessujets âgés de 18 à 85 ans.

Selon les recommandations, les sujets incapables d’exé-cuter correctement les manœuvres respiratoires demandées,après huit essais, ne sont pas inclus dans l’étude [54].

Il se peut que d’autres critères non évalués dans cetteétude, tels que l’exposition professionnelle et l’obésité, aientpu influencer nos résultats. Toutefois, lors du questionnairemédical, aucun sujet n’a déclaré être suivi par un médecin detravail. L’altération fonctionnelle du poumon liée à l’obésitén’apparaît qu’en cas d’obésité importante ou massive sansaucune pathologie pulmonaire avérée [59]. Dans notreétude, seuls 3 % des sujets ayant une obésité importante,ceux-ci n’ont pas été exclus.

Taille de l’échantillon

La taille de l’échantillon (n = 110) semble satisfaisante[44] en accord avec les recommandations internationales [41].Notre échantillon est plus important que celui relatif à cer-taines études réalisées sur des fumeurs exclusifs de narguilé[8, 32, 34, 35]. Toutefois il est moins important que celuirelatif à une étude [33] réalisée sur une population mixte defumeurs de cigarette et de narguilé (n = 595).

Mode de quantification de la consommation

du narguilé

En l’absence de codification internationale spécifique,nous avons quantifié la consommation du narguilé, commedans l’étude de Kiter et coll. [8], en NA et en kg de tabaccumulé. Nous avons considéré qu’un narguilé fumé com-porte 25 grammes de tabac. En fait, le tabac utilisé pour unnarguilé pèse entre 10 et 25 grammes [2] et se présente essen-tiellement sous trois formes : « moassel » ou « maasel » (miel-leux) qui contient 30 % de tabac et 70 % de mélasse et quiest souvent parfumé (pomme, fraise, banane, etc.). « tom-

Page 11: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 309

bak » ou « tumbak » ou « ajami » qui est une pure pâte noirede tabac. « Jurak », forme intermédiaire qui contient souventdes fruits ou des huiles [2].

En se basant sur un modèle expérimental, Shihadeh etSalah ont évalué la consommation du narguilé en nombred’aspirations [60]. Une session standard de 20 grammes detabac à narguilé dure 45 minutes. Elle comporte en moyenne171 aspirations de 2,6 secondes chacune (le volume de chaqueaspiration étant de 530 ml), entrecoupées d’un repos de17 secondes (cycle de 19,6 secondes) [60].

Cependant, et selon les sujets, le volume de chaqueaspiration varie de 500 à 1 000 ml contre 30 à 50 ml pourune bouffée de cigarette [60, 61]. Une session de consom-mation de narguilé dure en moyenne entre 45 et 60 minutesavec un volume cumulé de fumée inhalée de 100 l [2, 61].De même, il a été démontré que la concentration du COdans la fumée du narguilé est significativement plus élevéedans les narguilés de petite taille que dans ceux de grandetaille [62].

Étant donné que le narguilé se fume le plus souvent engroupe dans des endroits relativement confinés comme les caféset les salons de thé, nous pensons que nous sous-estimons laquantité réelle de fumée inhalée [2].

Composition de la fumée de narguilé

Nous étions confrontés à un autre problème méthodo-logique, à savoir la variabilité de la composition du tabac uti-lisé dans le narguilé (tableau III). D’après les données de lalittérature, la composition chimique de la fumée de narguilé(production tirée d’un gramme de tabac) comporte : CO(145 mg), nicotine (2,96 mg), goudron (802 mg), hydrocar-bures aromatiques polycycliques [fluranthracène (221 ng),phénanthrène (748 ng), chrysène (112 ng)], métaux lourds[arsenic (165 ng), cobalt (70 ng), chrome (1 340 ng), plomb(6 870 ng), nickel (990 ng) et béryllium (65 ng)] [2, 10, 12,13, 27-29].

Mesures spirométriques

Contrairement à la majorité des autres études [8, 32,34, 35], nous avons mesuré les volumes pulmonaires nonmobilisables.

Contrairement à l’étude de Kiter et coll. [8] où desanciennes définitions ont été utilisées [63], nous avons appliquéles récentes définitions internationales basées sur la notion del’intervalle de confiance à 95 % [41]. En effet, dans l’inter-prétation des données de la spirométrie, nous comparons lesvaleurs mesurées aux valeurs de référence établies sur unepopulation dite « normale », et donc standardisées en fonctiondes déterminants de la taille du poumon [64]. Les valeurs endehors de l’intervalle de confiance à 95 %, sont considéréescomme « anormales » [64, 65].

Limites de la présente étude

La classification internationale du fonctionnement, duhandicap et de la santé fait état de trois étapes évolutives,devant être chacune évaluée par un ou plusieurs examensspécifiques : déficience, incapacité et désavantage social [66].

Lors de cette étude, nous avons évalué seulement ladéficience. En effet, nous avons analysé les effets de laconsommation du narguilé sur l’appareil respiratoire en utilisantcomme marqueur seulement les VV. Cependant, il existed’autres marqueurs tels que les mesures du CO dans l’airexpiré ou de la carboxyhémoglobinémie ou l’étude de la clai-rance mucociliaire respiratoire [32, 67, 68]. En effet, il a étédémontré que les fumeurs de narguilé ont un taux élevé deCO dans l’air expiré [67]. Ils ont, comparativement auxfumeurs de cigarettes et aux non-fumeurs, une carboxyhémo-globinémie plus élevée (10 %, 6 % et 2 % respectivement)[68], et ont un déclin de la vitesse de la clairance mucoci-liaire [32]. De même, il était souhaitable de compléter l’éva-luation par la pratique d’un test de réversibilité bronchiqueet/ou de la mesure de la capacité de diffusion du CO(DLCO). Le test de réversibilité n’a pas été réalisé, car il estdifficile de demander à un sujet volontaire qui pense être« sain » d’inhaler un bronchodilatateur. La mesure de laDLCO n’a pas été faite. En effet, en l’absence de correctionpar l’hémoglobine et la carboxyhémoglobine, les résultats dela DLCO auraient été faussés [41, 67-69]. De même, ilaurait été souhaitable de pratiquer, dans le cadre de l’évalua-tion de l’incapacité et de l’handicap, un test de marche de sixminutes et un questionnaire de qualité de vie. Ces évaluationsfont partie des perspectives de notre équipe.

Dans cette étude, nous nous sommes intéressés seule-ment à l’aspect purement fonctionnel de la consommationdu narguilé. Cependant, les fumeurs de narguilé peuvent seplaindre de certains signes cliniques tels qu’une dyspnée oudes sibilants.

Discussion des résultats

L’effet nocif de la consommation de narguilé sur lafonction ventilatoire mis en évidence dans cette étude s’intègredans un phénomène plus général. En effet, cette consomma-tion est souvent associée à plusieurs pathologies [14-26, 32] :cancers bronchopulmonaire, buccal, digestif et vésical, tuber-culose et infection par Helicobacter pylori, aberrations chromo-somiques, athérosclérose et coronaropathies, eczéma de la mainet aspergillose chez les immunodéprimés, altération de la clai-rance mucociliaire respiratoire.

Comparaison des VV mesurées avec les valeurs

de référence (tableau I)

Par comparaison aux valeurs de référence, les débitsexpiratoires forcés des fumeurs du narguilé sont significative-ment diminués (tableau I). Les résultats des principales études

Page 12: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

310 Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

analysant les VV des fumeurs exclusifs de narguilé sont exposésdans le tableau IV.

Par comparaison aux débits expiratoires des non-fumeurs, Kiter et coll. [8] ont trouvé une diminution signi-ficative seulement du DEP. De même, il a montré que lesfumeurs de narguilé comparativement aux fumeurs de ciga-rettes, ont une diminution significativement plus marquéedu VEMS, du DEM50 %, du DEMM et du rapport VEMS/CVF [8]. Pour Zahran et Baig [42], la diminution significativedu rapport VEMS/CVF et du DEMM est le résultat d’uneobstruction des petites voies aériennes. Deux études turques,réalisées sur deux petits échantillons et présentées lors de con-grès internationaux montrent des résultats différents des nôtres[34, 35]. Dans une étude réalisée sur 595 Saoudiens, lesmoyennes de la CV, de la CVF et du VEMS étaient plusbasses chez les fumeurs de narguilé par rapport aux fumeursde cigarettes [33].

L’augmentation des volumes pulmonaires oriente versune tendance à une DPS (tableau I). À notre connaissance,ce résultat n’a jamais été montré auparavant.

Nombre de sujets ayant des déficits ventilatoires

(tableau II) (fig. 3)

Contrairement à certaines études [32, 35-37], où aucunfumeur de narguilé n’a une atteinte fonctionnelle respiratoire,dans notre étude aucun sujet n’a une spirométrie strictementnormale.

Seulement 6 % des fumeurs de narguilé ont un DVOproximal, et donc probablement une broncho-pneumopathiechronique obstructive (BPCO). Ce pourcentage est prochede celui trouvé par Kiter et coll. [8], favorisant ainsi l’idée quela BPCO post narguilé est rare. Cependant, ce pourcentage estplus bas que celui décrit dans des études non publiées portantsur des fumeurs exclusifs de narguilé [26, 70] ou portant surdes fumeurs de cigarettes. En effet, en utilisant une défini-tion spirométrique, le pourcentage de fumeurs de cigarettesayant un DVO proximal varie de 8 à 11 % [71, 72].

Les atteintes bronchiques distales varient de 7 % à 36 %(DPS) (tableau II). D’une part, nos résultats sont différents deceux de Kiter et coll. [8]. En effet, ces derniers ont trouvé quele DVO distal est peu fréquent chez les fumeurs de narguilécomparativement aux fumeurs de cigarettes. Il a conclu que laconsommation de narguilé n’altère pas la fonction respiratoireaussi gravement que le fait la consommation de cigarettes [8].Il a expliqué ceci par les trois faits suivants : i) La consommationintermittente de narguilé permet une réparation des petites voiesaériennes entre deux périodes d’inflammation. ii) La fumée denarguilé, du fait du mode de consommation, n’atteint pas lesvoies aériennes profondes. iii) La fumée de narguilé, du fait duphénomène de filtration dans l’eau, est moins nocive pour lesbronches [8]. D’autre part, nos résultats sont similaires à ceuxobtenus chez les fumeurs de cigarettes : 15-20 % dévelop-pent un DVO distal [73]. Comme chez les fumeurs de ciga-rettes, nous pouvons penser que l’atteinte bronchique distale

Tableau IV.

Valeurs des variables ventilatoires (VV)* de la présente étude et de celles publiées.

VV Présente

étude

Kiter et al.

[8]

Köseoglu et al.

[32]

Zahran et Baig

[42]

Bayindir et al.

[34]

Altinisik et al.

[35]

CVF 97 ± 12 94 ± 27 102 ± 17

Non mentionné

Non mesuré

Non diminué

VEMS 94 ± 12£ 87 ± 19 106 ± 19

DEP 87 ± 15£ 66 ± 23£ 95 ± 21 Diminué£

DEM25% 81 ± 32£ 71 ± 26

Non mentionné

Non mesuré

DEM50% 92 ± 23£ 79 ± 28

DEM75% 89 ± 19£ Non mentionné

DEMM 87 ± 21£ 79 ± 26 97 ± 27 Diminué£

VEMS/CVF 100 ± 12 98 ± 13 82 ± 5 Diminué£

CV 87 ± 13£

Non mesuré

CRF 114 ± 48£

CPT 104 ± 24

VR 132 ± 50£

VEMS/CV 95 ± 12£

VR/CPT 117 ± 39£

CRF/CPT 101 ± 20

Pour les abréviations, voir la liste des abréviations. *Exprimées en pourcentage de leurs valeurs de référence (moyennes ± écart types). £Diminution statistiquement significative.

Page 13: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 311

serait la conséquence de lésions inflammatoires chroniques avecremodelage de la muqueuse bronchiolaire [73].

Quatorze pour cent des fumeurs de narguilé ont unDVR. Ce résultat, rarement observé chez les fumeurs decigarettes, ne peut pas être expliqué par l’inclusion dansnotre étude de sujets obèses. En effet, il est connu que l’alté-ration fonctionnelle respiratoire n’apparaît qu’en cas d’obésitéimportante ou massive sans aucune pathologie pulmonaireavérée [59]. De surplus, dans notre échantillon total, seulement3 % des sujets ont une obésité importante. La moyenne del’IMC de ces 15 fumeurs est de 29 ± 5 kg.m-2 et seulement5 sujets parmi ces 15 fumeurs ont un IMC > 30 kg.m-2.L’hypothèse de l’obésité comme origine du DVR est donc àéliminer. Ce DVR peut être alors expliqué par la composi-tion particulière de la fumée du narguilé. En effet, cettefumée est riche en métaux lourds tels que le plomb, l’arsenicet le nickel [13] connus comme facteurs de risque pour lecancer bronchique [14-17] : une étude faite en Inde montreque 22 hommes sur les 25 suivis pour carcinome bronchiquesont fumeurs de narguilé [14]. De plus, l’exposition chroniqueà de faibles niveaux de métaux lourds peut engendrer unefibrose et une pneumoconiose [74].

Relations entre les VV et la consommation de narguilé

(fig. 4)

Contrairement à l’étude de Kiter et coll. [8], où aucunecorrélation significative n’a été trouvée entre la consomma-tion de narguilé et les débits expiratoires maximaux, nousavons trouvé que ces derniers, à l’exception du DEM25%,diminuent avec l’augmentation de la consommation de nar-guilé (fig. 4). Cette corrélation négative (fig. 4 A), r = -0,31 ;p = 0,001 entre le VEMS et la quantité de narguilé expriméeen kg) est similaire à celle observée chez les fumeurs de ciga-rette (r = -0,50 ; p < 0,05 ; pour le VEMS et la quantité decigarettes exprimée en paquet-année) [8]. Kiter et coll. [8]ont expliqué l’absence de corrélation par un problème dequantification de la consommation de narguilé et ont conseilléd’interpréter ses résultats avec beaucoup de précaution.

La CRF (fig. 4 F) et le VR (fig. 4 G) augmentent avecl’augmentation de la consommation de narguilé, témoignantencore une fois de la tendance vers une DPS.

Âge estimé du poumon

Un des principaux résultats de la présente étude est quela consommation du narguilé accélère le vieillissement pulmo-naire : âge estimé du poumon plus élevé que l’âge chronologi-que (48 ± 18 ans contre 34 ± 10 ans, p < 0,05). Cet effet,signalé par Al-Fayez et coll. [33] en 1988 « water-pipe smokerswere at greater risk than cigarette smokers for decreased pulmo-nary function » a été confirmé en 2007 par Lipkus et coll.[75] sur des fumeurs de cigarettes. Ces derniers ont montréque l’âge estimé du poumon est supérieur à l’âge chronologiquedes fumeurs de cigarettes (35 ± 16 ans contre 20 ± 1 ans).

Notre résultat peut être utilisé pour inciter les sujets à cesserce mode de tabagisme [51].

Comment expliquer les effets nocifs

de la consommation du narguilé sur la fonction

respiratoire ?

Comme chez les fumeurs de cigarettes [76, 77], laréponse à cette question passe par l’étude des biopsies bron-chiques, des expectorations induites, des lavages broncho-alvéolaires et des dosages biologiques. À notre connaissance,chez le fumeur de narguilé, ces explorations sont rarementréalisées. Il est connu que la consommation du narguilé estassociée à des modifications biochimiques du liquide dulavage broncho-alvéolaire [78]. De même, il est établi que lesfumeurs de narguilé, comparativement aux non-fumeurs,ont des taux très élevés de radicaux libres, ont une plusgrande production d’anion superoxide, un plus grand nombrede leucocytes, et un taux plasmatique élevé de prostaglandine8-epi-PGF2a [2, 30, 31]. Ceci témoigne de la présence d’unstress oxydatif plus marqué chez les fumeurs réguliers de nar-guilé. Ces changements peuvent causer des lésions au niveaudu tissu pulmonaire et avoir ainsi un rôle dans la pathogenèsedes déficits ventilatoires [30, 31].

En conclusion, le profil spirométrique des fumeurs dunarguilé est altéré avec surtout la présence d’un déficit ven-tilatoire obstructif distal, d’une distension pulmonaire statiqueet d’une accélération du vieillissement pulmonaire. À notreconnaissance, il s’agit de la première étude qui établit d’unefaçon objective et selon les récentes recommandations inter-nationales le profil spirométrique des fumeurs de narguilé.Elle fournit ainsi aux autorités sanitaires publiques, desarguments valides pour lutter contre ce fléau rampant qui necesse de se répandre et qui touche de plus en plus les adolescentset les femmes.

Remerciements

Les auteurs remercient vivement les docteurs AbdelazizHadj Mtir (médecin généraliste), Radhia Zayani (pneumo-logue), Raoudha Sfaxi (pneumologue) et Mohamed MoezBen Sayah (pneumologue), pour leurs participations dans laprésente étude.

Références

1 Maziak W, Ward KD, Afifi Soweid RA, Eissenberg T : Tobacco smo-king using a water pipe : a re-emerging strain in a global epidemic.Tobacco control 2004 ; 13 : 327-33.

2 Knishkowy B, Amitai Y : Water-pipe (narghile) smoking : an emerginghealth risk behavior. Pediatrics 2005 ; 116 : e113-9.

3 Maziak W, Fouad MF, Hammal F, Asfar T, Eissenberg T, Ward KD,Eissenberg T, Ward KD : Prevalence and characteristics of narghilesmoking among university students in Syria. Int J Tuberc Lung Dis2004 ; 8 : 882-9.

Page 14: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

312 Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

4 Memon A, Moody PM, Sugathan TN, el-Gerges N, al-Bustan M, al-Shatti A, al-Jazzaf H : Epidemiology of smoking among Kuwaiti adults:prevalence, characteristics, and attitudes. Bull World Health Org 2000 ;78 : 1306-15.

5 Maziak W, Ward KD, Eissenberg T : Measuring exposure to environ-mental tobacco smoke : A developing country’s perspective. Prev Med2006 ; 42 : 409-14.

6 Varsano S, Ganz I, Eldor N, Garenkin M : Water-pipe tobacco smo-king among school children in Israel : frequencies, habits, and attitudes.Harefuah 2003 ; 142 : 736-41.

7 World health organisation report on the global tobacco epidemic,2008: The mpower package. www.who.int/tobacco/mpower. Visité le18.03.2008.

8 Kiter G, Ucan ES, Ceylan E, Kilinc O : Water-pipe smoking and pul-monary functions. Respir Med 2000 ; 94 : 891-4.

9 Dautzenberg B : Tout ce que vous ne savez pas sur la chicha. 1re édition,Paris, Margaux Orange. 2007.

10 Lakier JB : Smoking and cardiovascular disease. Am J Med 1992 ; 93 :S8-12.

11 Hecht S : Tobacco smoke carcinogens and lung cancer. J Natl CancerInst 1999 ; 91 : 1194-210.

12 US Department of Health and Human Services : The health conse-quences of smoking: nicotine addiction. A report of the SurgeonGeneral, 1988. Rockville, Maryland: Public Health Service, Centersfor Disease Control, Office on Smoking and Health, 1988, (DHHSPublication No (CDC) 88-8406).

13 Shihadeh A : Investigation of mainstream smoke aerosol of the argilehwater pipe. Food Chem Toxicol 2003 ; 41 : 143-52.

14 Nafae A, Misra SP, Dhar SN, Shah SN : Bronchogenic carcinoma inKashmir Valley. Indian J Chest Dis 1973 ; 15 : 285-95.

15 Lubin JH, Qiao YL, Taylor PR, Yao SX, Schatzkin A, Mao BL, RaoJY, Xuan XZ, Li JY : Quantitative evaluation of the radon and lungcancer association in a case control study of Chinese tin miners. CancerRes 1990 ; 50 : 174-80.

16 Gupta D, Boffetta P, Gaborieau V, Jindal SK : Risk factors of lungcancer in Chandigarh, India. Indian J Med Res 2001 ; 113 : 142-50.

17 Rakower J, Fatal B : Study of narghile smoking in relation to cancer ofthe lung. Br J Cancer 1962 ; 16 : 1-6.

18 El-Hakim IE, Uthman MAE : Squamous cell carcinoma and keratoa-canthoma of the lower lip associated with "Goza" and "Shisha" smoking.Int J Dermatol 1999 ; 38 : 108-10.

19 Roohullah, Nusrat J, Hamdani SR, Burdy GM, Khurshid A : Cancerurinary bladder - 5 year experience at Cenar, Quetta. J Ayub Med CollAbbottabad 2001 ; 13 : 14-6.

20 Bedwani R, el-Khwsky F, Renganathan E, Braga C, Abu Seif HH,Abul Azm T, Zaki A, Franceschi S, Boffetta P, La Vecchia C : Epide-miology of bladder cancer in Alexandria, Egypt: tobacco smoking. IntJ Cancer 1997 ; 73 : 64-7.

21 Gunaid AA, Sumairi AA, Shidrawi RG, al-Hanaki A, al-Haimi M, al-Absi S, al-Hureibi MA, Qirbi AA, al-Awlagi S, el-Guneid AM : Oeso-phageal and gastric carcinoma in the Republic of Yemen. Br J Cancer1995 ; 71 : 409-10.

22 Onder M, Oztas M, Arnavut O : Nargile (Hubble-Bubble) smoking-induced hand eczema. Int J Dermatol 2002 ; 41 : 771-2.

23 Szyper-Kravitz M, Lang R, Manor Y, Lahav M : Early invasive pulmo-nary aspergillosis in a leukemia patient linked to aspergillus contamina-ted marijuana smoking. Leuk Lymphoma 2001 ; 42 : 1433-7.

24 El-Barrawy MA, Morad MI, Gaber M : Role of Helicobacter pylori inthe genesis of gastric ulcerations among smokers and nonsmokers. EastMediterr Health J 1997 ; 3 : 316-21.

25 Yadav JS, Thakur S : Genetic risk assessment in hookah smokers. Cyto-bios 2000 ; 101 : 101-13.

26 Mazen A, Aurabia S : The effect of Maassel water-pipe smoking versuscigarette smoking on pulmonary arterial pressure and left ventricularand right ventricular function indices in COPD patients : an echodop-pler. Sci J Al Azhar Med Fac (Girls) 2002 : 649-86.

27 Reis O : Tobacco agriculture. The Bulletin of Tobacco. Experts' Com-pany 1996 ; 30 : 4-6.

28 Akkoyunlu ZS : Investigations on tobacco. Reports of Tobacco Insti-tute 1944 ; 113-35.

29 Gold WM : Pulmonary function testing. In Murray JF and Nadel JA,eds. Textbook of respiratory medicine. 1st vol, 2nd ed. Philadelphia :W.B. Saunders Company, 1994 ; 798-900.

30 Wolfram RM, Chehne F, Oguogho A, Sinzinger H : Narghile (waterpipe) smoking influences platelet function and (iso-) eicosanoids. LifeSci 2003 ; 74 : 47-53.

31 Sharma RN, Deva C, Behera D, Khanduja KL : Reactive oxygen spe-cies formation in peripheral blood neutrophils in different types ofsmokers. Indian J Med Res 1997 ; 106 : 475-80.

32 Köseoglu N, Aydin A, Uçan ES, Ceylan E, Eminoglu O, Durak H,Güven H : The effects of water-pipe, cigarette and passive smoking onmucociliary clearance. Tuberk Toraks 2006 ; 54 : 222-8.

33 Al-Fayez SF, Salleh M, Ardawi M, Zahran FM : Effects of sheesha andcigarette smoking on pulmonary function of Saudi males and females.Trop Geogr Med 1988 ; 40 : 115-23.

34 Bayindir U, Uçan ES, Sercin B, Ikiz F : Effect of waterpipe smokingon peak expiratory flow rate. Eur Respir J 1993 ; 6 : S608 (abstract).

35 Altinisik G, Uçan ES, Akpinar O : Effects of waterpipe smoking onpulmonary functions. Eur Respir J 1995 ; 8 : S233.

36 Hamada G, Radwan G, Israel E, Zakaria M, El-Setouhy M, Mostafa M,Loffredo C : Pulmonary dysfunction from large airway versus smallairways among waterpipe smokers. Poster presented at the 11th annualmeeting of the Society for Research on Nicotine and Tobacco, March2005 (abstract).

37 Hamada G, Radwan G, Zakaria M, Loffredo C, Mohamed M,Setouhy M, Israel E : Is peak expiratory flow a good indicator for asses-sing airway obstruction in waterpipe smokers? Poster presented at the11th annual meeting of the Society for Research on Nicotine andTobacco, March 2005 (abstract).

38 Tamim H, Terro A, Kassem H : Tobacco use by university students,Lebanon, 2001. Addiction 2003 ; 98 : 933-9.

39 Maziak W, Rastam S, Eissenberg T, Asfar T, Hammal F, Bachir ME,Fouad MF, Ward KD : Gender and smoking status-based analysis ofviews regarding waterpipe and cigarette smoking in Aleppo, Syria. PrevMed 2004 ; 38 : 479-84.

40 Gad RR, El-Setouhy M, Haroun A, Gadalla S, Abdel-Aziz F, Aboul-Fotouh A, Mohamed MK, Mikhail N, Israel E : Nicotine dependenceamong adult male smokers in rural Egypt. J Egypt Soc Parasitol 2003 ;33 : 1019-30.

41 Pellegrino R, Viegi G, Brusasco V, Crapo RO, Burgos F, Casaburi R,Coates A, Van der Grinten CPM, Gustafsson P, Hankinson J, Jensen R,Johnson DC, MacIntyre N, McKay R, Miller MR, Navajas D, Peder-sen OF, Wanger J : Série du groupe de travail ATS/ERS : «Standardi-sation des explorations fonctionnelles respiratoires» : Stratégies

Page 15: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

Narguilé et fonction spirométrique

© 2009 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 313

d’interprétation des explorations fonctionnelles respiratoires. Rev MalRespir 2006 ; 23 : 17S79-104.

42 Zahran FM, Baig MHA : Long term effects of sheesha and cigarettesmoking on respiratory system in Saudi Arabia. Proceeding of theseventh Saudi Medical Meeting. Dammam 1982 ; 160-5.

43 Chaouachi K : Narghile (Hookah, Shisha) and Public Health. Tabac-cologia 2006 ; 4 : 29-38.

44 Jencek M, Cleroux R : Epidémiologie : Principes techniques. Applica-tions. Edisem inc., Maloine Paris, 1982, 430p.

45 El-Zahaby MM, Salem ES, Galeb H : Studies on the effect of Gozasmoking sublimates on the tonicity of the bronchial tree. Egypt J ChestDis Tubercul 1980 ; 23 : 23 (abstract).

46 Ferris BG : Epidemiology standardization project II : Recommendedrespiratory disease questionnaires for use with adults and children inepidemiological research. American Thoracic Society. Am Rev RespirDis 1978, 118 : 1-120.

47 Fakhfakh R, Hsairi M, Maalej M, Achour N, Nacef T : Tobacco usein Tunisia : Behaviour and awareness. Bull World Health Organ 2002 ;80 : 350-6.

48 ERS/European Respiratory Society : Standardized lung function tes-ting. Eur Respir J 1993 ; 6 : Suppl 16.

49 ATS/American Thoracic Society : Lung function testing : Selection ofreference values and interpretative strategies. Am Rev Respir Dis 1991 ;144 : 1202-18.

50 Stoks J, Quanjer PH : Reference values for residual volume, functionalresidual capacity and total lung capacity. ATS workshop on lungvolume measurements. Official statement of the European RespiratorySociety. Eur Respir J 1995 ; 8 : 492-506.

51 Morris JF, Temple W : Spirometric "lung age" estimation for motiva-ting smoking cessation. Prev Med 1985 ; 14 : 655-62.

52 World Health Organization : Obesity : Preventing and managing theglobal epidemic. Report of a WHO Consultation on obesity. Geneva,3-5 june 1997 (WHO/NUT/NCD/98.1), 1998.

53 Tabka Z, Hassayoune H, Guenard H, Zebidi A, Commenges D, Essa-bah H, Salamon R, Varene P : Spirometric reference values in a Tuni-sian population. Tunis Med 1995 ; 73 : 125-31.

54 Miller MR, Hankinson J, Brusasco V, Burgos F, Casaburi R, Coates A,Crapo R, Enright P, Van der Grinten CPM, Gustafsson P, Jensen R,Johnson DC, MacIntyre N, McKay R, Navajas D, Pedersen OF, Pel-legrino R, Viegi G, Wanger J : Série du groupe de travail ATS/ERS :«Standardisation des explorations fonctionnelles respiratoires» : Stan-dardisation de la spirométrie. Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 17S23-45.

55 Wanger J, Clausen JL, Coates A, Pedersen OF, Brusasco V, Burgos F,Casaburi R, Crapo R, Enright P, Van der Grinten CPM, Gustafsson P,Hankinson J, Jensen R, Johnson D, MacIntyre N, McKay R,Miller MR, Navajas D, Pellegrino R, Viegi G : Série du groupe detravail ATS/ERS : «Standardisation des explorations fonctionnelles res-piratoires» : Standardisation de la mesure des volumes pulmonaires. RevMal Respir 2006 ; 23 : 17S47-60.

56 Miller MR, Crapo R, Hankinson J, Brusasco V, Burgos F, Casaburi R,Coates A, Enright P, van der Grinten CPM, Gustafsson P, Jensen R,Johnson DC, MacIntyre N, McKay R, Navajas D, Pedersen OF, Pel-legrino R, Viegi G, Wanger J : Série du groupe de travail ATS/ERS :«Standardisation des explorations fonctionnelles respiratoires» : Consi-dérations générales sur les explorations fonctionnelles respiratoires. RevMal Respir 2006 ; 23 : 17S11-21.

57 Berry G : Longitudinal observations, their usefulness and limitationswith special reference to the forced expiratory volume. Bull PhysiopatholRespir 1974 ; 10 : 643-55.

58 Ganguli M, Lytle ME, Reynolds MD, Dodge HH : Random versusvolunteer selection for community - based study. J Gerontol A Biol SciMed Sci 1998 ; 53 : 39-46.

59 Dore MF, Orvoen-Frija E : Respiratory function in the obese subject.Rev Pneumol 2002 ; 58 : 73-81.

60 Shihadeh A, Saleh R : Polycyclic aromatic hydrocarbons, carbonmonoxide, ‘‘tar’’, and nicotine in the mainstream smoke aerosol of thenarghile water pipe. Food and Chemical Toxicology 2005 ; 43 : 655-61.

61 Shihadeh A, Azar S, Antonius C, Haddad A : Towards a topographicalmodel of narghile water-pipe café smoking. Biochemistry, Pharmacology,and Behavior 2004 ; 79 : 75-82.

62 Sajid KM, Akhter M, Malik GQ : Carbon monoxide fractions in ciga-rette and hookah (hubble bubble) smoke. J Pak Med Assoc 1993 ; 43 :179-82.

63 American Thoracic Society : Standardization of spirometry. 1987update. Am Rev Respir Dis 1987 ; 136 : 1285-307.

64 Crapo RO : Role of reference values in making medical decisions.Indian J Med Res 2005 ; 112 : 100-2.

65 Aggarwal AN, Gupta D, Behera D, Jindal SK : Comparison of fixed per-centage method and lower confidence limits for defining limits of nor-mality for interpretation of spirometry. Respir Care 2006 ; 51 : 737-43.

66 http : //www.who.int/icidh (visité le 14.03.2008).

67 Shafagoj YA, Mohammed FI : Levels of maximum end-expiratory car-bon monoxide and certain cardiovascular parameters following hubble-bubble smoking. Saudi Med J 2002 ; 23 : 953-8.

68 Zahran FM, Ardawi MS, Al-Fayez SF : Carboxyhemoglobin concen-trations in smokers of sheesha and cigarettes in Saudi Arabia. Br MedJ 1985 ; 291 : 1768-70.

69 MacIntyre N, Crapo RO, Viegi G, Johnson DC, van der Grinten CPM,Brusasco V, Burgos F, Casaburi R, Coates A, Enright P, Gustafsson P,Hankinson J, Jensen R, McKay R, Miller MR, Navajas D, Pedersen OF,Pellegrino R, Wanger J : Série du groupe de travail ATS/ERS : «Stan-dardisation des explorations fonctionnelles respiratoires» : Standardisa-tion de la détermination de la diffusion du monoxyde de carbone parla méthode en apnée. Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 17S61-78.

70 Zakaria M, Radwan G, Mohamed M, El-Zorkany M, Abdel-Aziz F,Israel E : Who ends up with COPD among smokers in a communitysetting? Poster presented at the 11th annual meeting of the Society forResearch on Nicotine and Tobacco, March 2005 (abstract).

71 Viegi G, Pedreschi M, Pistelli F, Di Pede F, Baldacci S, Carrozzi L,Giuntini C : Prevalence of airways obstruction in a general population :European Respiratory Society vs American Thoracic Society definition.Chest 2000 ; 117 : S339-45.

72 Pena VS, Miravitlles M, Gabriel R, Masa JF, Viejo JL, Fernandez-Fau L :Geographic variations in prevalence and underdiagnosis of COPD :results of the IBERPOC multicenter epidemiological study. Chest 2000 ;118 : 981-9.

73 Hogg JC, Wright JL, Wiggs BR, Coxson HO, Opazo Saez A, Paré PD :Lung structure and function in cigarette smokers. Thorax 1994 ; 49 :473-8.

74 Konstantin S, Xiaomei L, Morton L : Effect of nickel and iron co-expo-sure on human lung cells. Toxicology and Applied Pharmacology 2004 ;196 : 258-65.

Page 16: Profil spirométrique des fumeurs de narguilé

H. Ben Saad et coll.

314 Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 299-314

75 Lipkus IM, Prokhorov AV : The effects of providing lung age and res-piratory symptoms feedback on community college smokers' perceivedsmoking-related health risks, worries and desire to quit. Addictive Beha-viors 2007 ; 32 : 516-32.

76 Jeffery PK : Comparison of the structural and inflammatory features ofCOPD and asthma. Chest 2000 ; 117 : S251-60.

77 Turato G, Zuin M, Saetta M : Pathogenesis and pathology of COPD.Respiration 2001 ; 68 : 117-28.

78 Radwan GN, Mohamed MK, El-Setouhy M, Israel E : Review onwaterpipe smoking. J Egypt Soc Parasitol 2003 ; 33 : 1051-71.

79 Hoffmann D, Hoffmann I : Letters to the Editor, Tobacco SmokeComponents. Beitr Tabakforsch Int 2000 ; 18 : 49-52.