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DOSSIER ANGIOPLASTIE CORONAIRE Dossier coordonné par Meyer Elbaz (Toulouse) 1 Les biomarqueurs cardiaques : quelle place dans le diagnostic de syndrome coronaire aigu ? p 18 Sandrine Charpentier (Toulouse) 2 Etude de la viabilité myocardique : prise en charge des cardiopathies ischémiques p 22 Olivier Lairez, Pauline Marchal et Thomas Cognet (Toulouse) 3 Recommandations pour la revascularisation myocardique : revue partielle p 28 Jérôme Roncalli (Toulouse) L a maladie coronaire revêt une grande variété symptomatique, des formes cliniques silencieuses, aux formes symptomatiques, infarctus du myo- carde et mort subite. L’amélioration de la prise en charge diagnostique et thérapeutique a permis une amélioration considérable du pronostic vital et fonc- tionnel au cours des trois dernières décennies. L’utilisation de biomarqueurs spécifiques, de nouvelles modalités d’approche fonctionnelle (Fractional flow re- serve ; tests d’ischémie ou de viabilité élaborés…) ou morphologique (scanner coronaire ; échographie en- docoronaire ou tomographie par cohérence optique) ont permis un traitement différencié des lésions res- ponsables ou non des accidents coronaires. Par ailleurs, la complexification des traitements antiag- grégants plaquettaires, et les possibilités toujours plus grandes de revascularisation des formes anatomiques les plus sévères et difficilement accessibles (réouverture des occlusions chronique des coronaires ; lésions calci- fiées…) ont conduit à une appréciation individuelle du rapport bénéfice risque par l’utilisation de scores, l’ap- plication de recommandations évolutives fondées sur l’avis d’experts et de larges essais cliniques mettant en exergue une approche multidisciplinaire. Nous mettrons en perspective ce formidable et perma- nent dynamisme grâce à 3 dossiers successifs consacrés aux coronaropathies. Des articles, rédigés par des spé- cialistes français, essaieront sans prétention d’exhaus- tivité, de balayer les grands champs d’intérêt actuels dans le domaine des coronaropathies. n Meyer Elbaz (Toulouse) Coronary artery disease: a vast theme Coronary artery atherosclerosis disease may take many different symptomatic forms: from discreet clinical, to critical ones, myocardial infarction and sudden death. Enhancements in diagnosis and therapeutic care have enabled tremendous progresses in vital and functio- nal prognosis during the past three decades. The use of new specific biomarkers, functional tests (Fractional flow reserve, ischemic treadmill test, viability assessment…) or morpho- logical coronary evaluation (by ECG gated coronary scan, intravascular ultrasound or optical coherence tomography) have supported a differentiated treatment of injuries, related or unrelated to coronary accidents. In addition, the improvement of new antiplatelets agents and anticoagulants, and the ever increasing possibilities of revascularization of the most severe anatomic forms, and of the least acces- sible ones (calcificated lesions, occluded arteries, left main…) have led to an individual assessment of the benefit ratio through the use of scores , the implementation of scalable recommendations in accordance to an expert’s panel, and vast clinical trials, which underlined the importance of multidisciplinary approaches. We will illustrate this remarkable and continuous dynamism thanks to 3 successive files devoted to coronary artery disease. These articles, written by French experts will attempt, without pretending to be exhaustive, to show the entirety of the main present interest fields concerning CAD. Keywords: Coronary artery atherosclerosis disease, Angioplasty, Revascularization LES CORONAROPATHIES : UN VASTE SUJET…

Angioplastie coronaire RÉSUMÉ 2011

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Angioplastie coronaire..CE QUI IL FAUT RETENIR EN 2011

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DOSSIER

AngIOplAStIE cOROnAIREDossier coordonné par Meyer Elbaz (toulouse)

1 les biomarqueurs cardiaques : quelle place dans le diagnostic de syndrome coronaire aigu ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p . 18Sandrine Charpentier (Toulouse)

2 Etude de la viabilité myocardique :prise en charge des cardiopathies ischémiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p . 22Olivier Lairez, Pauline Marchal et Thomas Cognet (Toulouse)

3 Recommandations pour la revascularisation myocardique :revue partielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p . 28Jérôme Roncalli (Toulouse)

La maladie coronaire revêt une grande variété symptomatique, des formes cliniques silencieuses, aux formes symptomatiques, infarctus du myo-

carde et mort subite. L’amélioration de la prise en charge diagnostique et thérapeutique a permis une amélioration considérable du pronostic vital et fonc-tionnel au cours des trois dernières décennies.L’utilisation de biomarqueurs spécifiques, de nouvelles modalités d’approche fonctionnelle (Fractional flow re-serve ; tests d’ischémie ou de viabilité élaborés…) ou morphologique (scanner coronaire ; échographie en-docoronaire ou tomographie par cohérence optique) ont permis un traitement différencié des lésions res-ponsables ou non des accidents coronaires.Par ailleurs, la complexification des traitements antiag-grégants plaquettaires, et les possibilités toujours plus

grandes de revascularisation des formes anatomiques les plus sévères et difficilement accessibles (réouverture des occlusions chronique des coronaires ; lésions calci-fiées…) ont conduit à une appréciation individuelle du rapport bénéfice risque par l’utilisation de scores, l’ap-plication de recommandations évolutives fondées sur l’avis d’experts et de larges essais cliniques mettant en exergue une approche multidisciplinaire.Nous mettrons en perspective ce formidable et perma-nent dynamisme grâce à 3 dossiers successifs consacrés aux coronaropathies. Des articles, rédigés par des spé-cialistes français, essaieront sans prétention d’exhaus-tivité, de balayer les grands champs d’intérêt actuels dans le domaine des coronaropathies. n

� Meyer Elbaz

(Toulouse)

Coronary artery disease: a vast themeCoronary artery atherosclerosis disease may take many different symptomatic forms: from discreet clinical, to critical ones, myocardial infarction and sudden death. Enhancements in diagnosis and therapeutic care have enabled tremendous progresses in vital and functio-nal prognosis during the past three decades.

The use of new specific biomarkers, functional tests (Fractional flow reserve, ischemic treadmill test, viability assessment…) or morpho-logical coronary evaluation (by ECG gated coronary scan, intravascular ultrasound or optical coherence tomography) have supported a differentiated treatment of injuries, related or unrelated to coronary accidents. In addition, the improvement of new antiplatelets agents and anticoagulants, and the ever increasing possibilities of revascularization of the most severe anatomic forms, and of the least acces-sible ones (calcificated lesions, occluded arteries, left main…) have led to an individual assessment of the benefit ratio through the use of scores , the implementation of scalable recommendations in accordance to an expert’s panel, and vast clinical trials, which underlined the importance of multidisciplinary approaches.

We will illustrate this remarkable and continuous dynamism thanks to 3 successive files devoted to coronary artery disease. These articles, written by French experts will attempt, without pretending to be exhaustive, to show the entirety of the main present interest fields concerning CAD.

Keywords: Coronary artery atherosclerosis disease, Angioplasty, Revascularization

lES cOROnAROpAthIES : un vAStE SujEt…

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1 Les biomarqueurs cardiaquesQuelle place dans le diagnostic de syndrome coronaire aigu ?

n La clinique et l’électrocardiogramme sont des outils de triage indispensables pour le diagnostic

de SCA mais les anomalies sont souvent peu spécifiques voire absentes et ne suffisent pas à iden-

tifier ou éliminer de façon formelle un SCA. La biologie est un atout majeur dans l’arsenal diagnos-

tique utilisé en urgence. La littérature médicale rapporte continuellement des études sur de nou-

veaux marqueurs cardiaques. Il convient d’avoir une lecture critique et une bonne connaissance

méthodologique de l’étude des performances d’un test pour ne pas se laisser tenter abusivement

par des nouveaux examens coûteux et d’un intérêt limité. Les marqueurs de nécrose cardiaque

sont les plus connus, il existe peu de marqueurs d’ischémie. sandrine charpentier*

Les définitions dans la ma-ladie coronarienne ont considérablement évolué

ces dernières années. Initiale-ment, deux entités ont été indivi-dualisées, l’infarctus du myocarde (IDM) et l’angor instable sans frontière très nette entre elles. Puis le concept de syndrome coronaire aigu (SCA) est apparu plus adapté à la prise en charge en urgence, avec une dichotomie entre SCA sans élévation du segment ST et avec élévation du segment ST (1).

DéfInItIOnLe diagnostic d’IDM, quant à lui, repose sur l’élévation même mi-nime des marqueurs de nécrose myocardique, associée à une cli-nique et des modifications sur l’électrocardiogramme compa-tibles avec une ischémie (1). En 2007, une nouvelle définition de l’IDM a été proposée dans la-quelle l’IDM n’est pas seulement

*Pôle de Médecine d’Urgences, CHU de Toulouse

synonyme de SCA mais égale-ment d’inadéquation entre les besoins et la consommation en oxygène du myocarde (2). Cette nouvelle définition a complexifié le diagnostic de SCA et toute élé-vation des marqueurs cardiaques n’est pas synonyme de maladie coronaire aiguë.

LES maRquEuRS bIOLOgIquES D’ISchémIEDétecter une ischémie est très sé-duisant car une intervention thé-rapeutique précoce permettrait d’éviter une nécrose myocar-dique. L’Ischemia Modified Al-bumin (IMA) a été le marqueur le plus étudié. La sérum-albumine possède une séquence d’acides aminés spécifiques de l’homme à sa partie N-terminale avec la propriété de fixer le cobalt. Les radicaux libres libérés au cours de l’ischémie altèrent transitoi-rement la conformation de cette séquence N-terminale et sa ca-

pacité à fixer le cobalt. L’IMA est dosée par le test albumin cobalt binding (ACB). Les premières études semblaient séduisantes (3). Toutefois, les patients ont toujours été très sélectionnés et lorsque l’on prend les malades tout venant des urgences les per-formances sont bien plus limi-tées voire insuffisantes (4).

LES maRquEuRS DE nécROSELes enzymes utilisées ont chan-gé depuis 1984, date de la pre-mière définition de l’IDM. De l’élévation des aspartates ami-notransférases, des lactates des-hydrogénases, des total créati-nine kinases (CK) et CPK(mb), la troponine est devenu le pivot central du diagnostic. De nou-veaux marqueurs apparaissent : la troponine ultrasensible, la Heart-Fatty Acid Binding Pro-tein (H-FABP) et la copeptine, qui tendent de se faire une place dans l’arsenal diagnostique des

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IDM. Nous ne reprendrons que les marqueurs récents.

Les troponinesLa troponine est un complexe de myofibrille que permet de régu-ler la contraction myocardique composé de troponine T (TnT), de troponine I (TnI) et de tropo-nine C. Ce complexe est lié avec l’actine et la tropomyosine pour former l’unité de régulation de la contraction musculaire. En pratique courante, seuls les do-sages des formes T et I sont inté-ressants. Elles vont être libérées en cas de nécrose cardiaque. La TnT s’élève également dans les pathologies musculaires et en cas d’insuffisance rénale mais l’amé-lioration des techniques a permis d’améliorer la cardiospécificité. Aussi la TnT et la TnI sont haute-ment spécifiques d’une atteinte myocardique. Elles sont détec-tables dans les 4 à 6 heures après le début de la nécrose, avec un pic à la 12e heure et restent détec-tables 6 jours après l’évènement.

n Marqueur de référence dans l’iDMLes dosages de troponine se sont améliorés ces dernières années et ont montré leur supériorité par rapport à tous les autres mar-queurs. Depuis 1999, les sociétés savantes recommandent que la troponine soit le marqueur de l’IDM (5). La définition de l’IDM repose sur l’association de signes cliniques ou électrocardiogra-phiques d’ischémie myocardique et de l’élévation de la troponine (2). Les valeurs limites supé-rieures de la normale sont défi-nies au 99e percentile de la nor-male sur une population saine plutôt que les 97,5e percentiles (2 déviations standard) comme dans la plupart des essais, c’est-à-dire la valeur seuil permettant

la détection d’un test positif sur une population de référence de 100 patients. Le coefficient de variation du test pour le 99e per-centile doit être o 10 %. Il est important pour le praticien de connaître les valeurs du 99e per-centile et les coefficients de varia-tion de la troponine utilisés par son laboratoire afin d’interpréter correctement les résultats (6).Cette amélioration de la sensibilité a considérablement augmenté le nombre de patients diagnostiqués comme ayant un IDM par rapport aux définitions précédentes mais a également permis de détecter des patients pour lesquels le diagnostic d’IDM n’était pas évident.

n Comment utiliser et interpréter le dosage de la troponine ?Il convient dès lors d’être parti-culièrement vigilant sur les règles de prescription et les limites d’utilisation de la troponine.

Les dernières recommandations

préconisent, compte tenu des cinétiques de détection de la tro-ponine, de réaliser les dosages à l’admission puis de les répéter 6 à 9 h après en cas de négativité du premier dosage. En cas de négativité mais de clinique ty-pique, ce dosage doit être répété entre la 12e et la 24e heure. Si les patients sont vus 24 h après le début des symptômes alors un seul dosage peut suffire (2, 7).Un seul dosage positif permet de poser le diagnostic d’IDM. Toutefois, il convient de bien connaître les situations dans les-quelles une troponine peut être élevée en dehors d’un épisode d’ischémie myocardique (Tab.  1). Un deuxième dosage montrant l’absence de croissance ou de décroissance du marqueur per-mettra de s’orienter vers une autre étiologie. L’élévation de la troponine si elle est un faux posi-tif de syndrome coronarien peut être alors un marqueur de mau-vais pronostic.

• contusion myocardique ou autre traumatisme incluant chirurgie, ablation d’un pacemaker • insuffisance cardiaque aiguë ou chronique• Dissection aortique• Valvulopathie aortique• cardiomyopathie hypertrophique• tachy ou brady-arythmie ou bloc• syndrome de tako-tsubo• rhabdomyolyse avec atteinte cardiaque• embolie pulmonaire, hypertension pulmonaire sévère• insuffisance rénale• Maladie neurologique aiguë incluant un accident vasculaire cérébral ou une hémorragie sous-arachnoïdienne• Maladie infiltrante par exemple amylose, hémochromatose, sarcoïdose, ou sclérodermie• Maladies inflammatoires par exemple myocardite, ou extension myocardique d’une endo ou péricardite• toxicité des médicaments ou des toxines• pathologies graves particulièrement détresse respiratoire ou sepsis• Brûlures particulièrement > 30 % de la surface cutanée• Fatigue extrême

tableau 1 - Elévation de la troponine en dehors d’une coronaropathie (2).

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La dernière classification de l’European Society of Cardiology (ESC) introduit une dimension nouvelle dans la définition de l’IDM (Tab.  2). Les patients clas-sés type 2 n’ont pas de maladie coronaire proprement dite mais présentent un infarctus secon-daire à une ischémie due à l’aug-mentation de la consommation ou une diminution de l’apport en oxygène comme cela peut être le cas dans une anémie, une arythmie ou un spasme corona-rien. Il n’est pas forcément aisé en urgence d’exclure une mala-die coronarienne ou de mettre en œuvre un traitement adapté.

n Vers une sensibilité encore plus grandeLes dernières avancées technolo-giques ont vu l’arrivée de dosages de troponine plus sensibles (ultra-sensibles) qui ont permis d’amé-liorer encore la sensibilité, parti-culièrement dans les 3 premières heures de la prise en charge et ce, en s’accompagnant d’une dimi-nution acceptable de la spécificité pour le diagnostic d’IDM (8).

Ces nouveaux dosages amènent deux réflexions. • Un résultat de troponine positif n’est pas forcement synonyme d’infarctus du myocarde mais peut également refléter une at-teinte du myocyte cardiaque. • Quel est l’intérêt en termes de pronostic et de mise en œuvre d’une thérapeutique pour une mesure d’une faible élévation de la troponine (9) ? Ceci n’a pas en-core été démontré.

La MyogLobineLa myoglobine est une protéine héminique de petite taille pré-sente dans le cytoplasme des cellules musculaires. Elle ap-paraît précocement entre 2 à

3 heures après le début de l’at-teinte myocardique avec un pic entre 6 et 9 h puis disparaît après la 24e heure. Toutefois la myoglobine est aspécifique du myocarde et s’élève dans les at-teintes musculaires et l’insuffi-sance rénale. Son intérêt a été diminué avec l’augmentation de la sensibilité de la troponine. Elle n’apparaît plus dans la nou-velle définition récente de l’IDM. Son élévation précoce doit être confirmée par les résultats du dosage de la troponine (10).

Les Créatinines kinases et L’isoenzyMe MbLongtemps marqueurs biolo-giques de référence pour le dia-gnostic d’IDM, les créatinines kinases (CK) ont été supplantées par la troponine du fait de leur manque de spécificité. Elles se trouvent dans les muscles sque-lettiques et l’isoenzyme Mb est plus spécifique du myocarde. Après nécrose cardiaque, leur taux s’élève dans le sang à partir

de la 4e heure avec un pic à la 9e heure et un retour à la normale plus tardif que la troponine entre la 48e et la 72e heure (11). Leur sensibilité (17 % à 63 % à l’arri-vée aux urgences) est moindre que celle de la troponine et une élévation est constatée dans de nombreuses pathologies (myo-cardique, rhabdomyolyse, ac-tivité musculaire intense, hy-perthermie, hypothyroïdie…). La nouvelle définition de l’IDM place le dosage des CKMB comme alternative au dosage de la troponine lorsque son dosage n’est pas disponible (2). Les va-leurs limites supérieures de la normale sont définies au 99e per-centile de la normale sur une population saine et à adapter en fonction du sexe du patient. Comme la troponine, une ciné-tique doit être réalisée et un deu-xième dosage est requis 6 à 9 h après l’admission en cas de nor-malité du premier dosage voire 12 à 24 h après en cas de forte suspicion d’IDM.

classification Définitiontype 1 iDM spontané secondaire à une ischémie due à un événe-

ment coronaire primitif tel que l’érosion d’une plaque et/ou sa rupture, une fissuration ou une dissection.

type 2 iDM secondaire à une ischémie due à une augmentation de la demande en oxygène ou à une diminution de l’offre comme un spasme coronaire, une embolie coronaire, une anémie, une arythmie, une hyper- ou hypotension.

type 3 Mort subite inattendue incluant un arrêt cardiaque précédé de symptômes suggérant une ischémie myocardique accompagné vraisemblablement par un sus-décalage du segment st ou un bloc de branche gauche de novo ou la mise en évidence d’un thrombus frais dans une artère coro-naire visualisé à l’angiographie et/ou à l’autopsie mais dont la mort est survenue avant que des prélèvements sanguins n’aient pu être réalisés ou dont l’élévation n’est pas encore apparue dans le sang.

type 4a iDM associé à une angioplastie.type 4b iDM associé avec une thrombose de stent documentée par

angioplastie ou à l’autopsie.type 5 iDM associé à un pontage coronaire.

tableau 2 - classification des différents types d’IDm (2).

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La Heart-Fatty aCiD binDing proteinLa heart-Fatty Acid Binding Protein (h-FABP) est une pro-téine de bas poids moléculaire localisée dans les myocytes car-diaques et relarguée dans la cir-culation 30 minutes après le dé-but d’une nécrose myocardique. On la trouve également dans d’autres tissus et elle s’élève dans les insuffisances cardiaques congestives. Le pic de concen-tration se situe entre la 6e et la 8e heure et son taux revient à la normale dans les 24 à 36 heures (12). Des études ont montré que l’h-FABP était plus intéressante que la troponine et la myoglobine pour le diagnostic d’infarctus du myocarde car plus précoce avec une sensibilité de 100 % dans les 3 heures après le début des symptômes. Toutefois, la ma-jorité de ces études ont inclus des patients avec des infarctus importants avec des sus-déca-lages du segment ST. Des études incluant des patients moins sé-lectionnés n’ont pas montré de résultats aussi intéressants en termes de sensibilité (4).

La CopeptineL’arginine vasopressine est une hormone de stress vasculaire synthétisée par l’hypothalamus

sensible à l’hypovolémie, l’hyper-osmolarité et l’hypotension. Son dosage est difficile. La copeptine est la partie C-terminale de la pro-hormone de la vasopressine et est beaucoup plus stable donc plus facilement dosable. Ce sont des marqueurs de stress reconnus qui s’élèvent dans l’insuffisance cardiaque ou les états de choc et l’IDM. Toutefois, la copeptine n’a pas d’intérêt, utilisée seule, pour le diagnostic d’IDM et ses perfor-mances sont inférieures à celles de la troponine. Deux études récem-ment publiées ont évalué l’intérêt de l’association copeptine-tro-ponine pour exclure le diagnostic d’IDM à l’admission aux urgences (13, 14). La première incluant 487 patients dont 81 IDM a mon-tré qu’un taux de copeptine < 14 pmol/l associé à une troponine o 0,01 µg/l permettait d’éliminer un IDM avec une sensibilité de 98,8 % et une valeur prédictive né-gative de 99,7 % (13). La deuxième a inclus 1 386 patients dont 184 IDM et a montré une valeur pré-dictive négative de 92,4 % pour les patients présentant une douleur thoracique de moins de 3h (14). Dans cette étude, une analyse de l’association copeptine-tropo-nine sensible semble également montrer des performances su-périeures à celles de la troponine

seule. Une des limites de ces deux études est qu’elles ont inclus des patients avec des IDM ST+ qui augmentent les performances des tests. D’autres études en cours de publication semblent toutefois confirmer ces résultats en ex-cluant les IDM ST+. Ces résultats pourraient modifier la prise en charge diagnostique d’IDM et on peut imaginer qu’un seul dosage de copeptine et troponine néga-tive permettrait d’exclure le dia-gnostic. Ces résultats sont donc à confirmer par des études inter-ventionnelles et dans des popula-tions à risque de SCA comme chez les coronariens.

cOncLuSIOnLes marqueurs biologiques sont essentiels dans la démarche dia-gnostique dans la prise en charge des SCA. La troponine reste le marqueur de choix pour le dia-gnostic d’IDM mais ses règles d’utilisation doivent être bien connues. Les autres marqueurs diagnostiques (myoglobine, CPK, h-FABP, copeptine) peuvent avoir une utilité complémentaire de la troponine mais non exclusive. n

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BiBliographie

Mots-clés : biomarqueurs, Infarctus

du myocarde, Syndrome coronaire

aigu, troponine, cKmb

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2 Etude de la viabilité myocardique

prise en charge des cardiopathies ischémiquesn Les coronaropathies représentent l’étiologie la plus fréquente d’insuffisance cardiaque sys-

tolique et sont retrouvées chez 70 % des patients présentant une insuffisance cardiaque avec

altération de la fraction d’éjection du ventricule gauche (1). La recherche d’une coronaropathie

et/ou de ses effets sur le myocarde que ce soit par une méthode invasive ou non invasive est

donc recommandée dans le bilan étiologique de toute insuffisance cardiaque systolique (2).

� olivier lairez*, pauline Marchal*, thomas cognet*

InSuffISancE caRDIaquE SyStOlIquE : un pROnOStIc SOmbREMalgré l’amélioration perma-nente des traitements phar-macologiques de l’insuffisance cardiaque systolique, le pronos-tic des patients reste sombre et les données issues de l’étude de Framingham rapportaient un taux de mortalité à 5 ans de 59 % pour les hommes et 45 % pour les femmes atteints d’insuffi-sance cardiaque sur la période de 1990 à 1999. Plus récemment, les résultats de l’étude SHIFT rendus publiques au cours du congrès de la So-ciété Européenne de Cardiologie en septembre 2010 rapportaient une mortalité à 30 mois dépas-sant les 18 % dans une popula-tion d’insuffisants cardiaques systoliques. Aussi parmi les stratégies thérapeutiques dispo-nibles pour en améliorer le pro-nostic, la possibilité d’un geste de revascularisation, qu’il soit

*Centre d’Imagerie Cardiaque, Fédération des services de Cardiologie, CHU Rangueil, Toulouse

chirurgical ou interventionnel, est systématiquement envisagée en présence d’une dysfonction systolique ventriculaire avec co-ronaropathie.

SélEctIOnnER lES patIEntSPourtant, seulement 39 % des patients porteurs d’insuffisance cardiaque systolique améliorent leur fraction d’éjection du ven-tricule gauche après revasculari-sation (3) ce qui expose les 61 % restants à une augmentation du risque inhérent à la procédure, particulièrement important en cas de dysfonction systolique sévère. Aussi, la sélection des patients qui bénéficieront d’un geste de revascularisation myo-cardique est d’un intérêt majeur. La présence de myocarde viable est largement associée à la ré-cupération fonctionnelle après revascularisation myocardique (4) et à une amélioration du pro-nostic (5), ce qui explique que la recherche de viabilité myocar-dique soit systématiquement considérée en présence d’une

dysfonction systolique chez les patients porteurs de corona-ropathie et dans la perspective d’une revascularisation (2).

lE cOncEpt DE vIabIlIté myOcaRDIquELe concept de myocarde viable regroupe les notions d’hiberna-tion et de sidération, deux en-tités physiopathologiques qui expliquent la présence d’une dysfonction systolique myocar-dique en l’absence d’infarctus. • La notion d’hibernation myo-cardique a été introduite en 1989 pour décrire une condition de dysfonction systolique chro-nique secondaire à une hypo-perfusion myocardique de repos chez des patients porteurs de coronaropathie qui amélioraient leur fonction systolique ventri-culaire après revascularisation (6). • La sidération myocardique se définit comme une dysfonc-tion contractile en l’absence d’anomalie de perfusion de re-pos (7). La notion de sidération

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myocardique est donc souvent rattachée à un phénomène aigu secondaire en pratique à l’oc-clusion transitoire d’un vaisseau coronaire épicardique comme cela se voit au décours d’un syn-drome coronarien aigu avec as-cension du segment ST revascu-larisé en urgence. • Pourtant, certains travaux sug-gèrent qu’il puisse exister un continuum temporel entre sidé-ration et hibernation en démon-trant que la répétition d’événe-ments ischémiques peut induire l’apparition d’une dysfonction systolique chronique compa-rable à de l’hibernation, en l’ab-

donc d’un apport essentiel dans l’exploration non invasive de la viabilité myocardique où leur objectif est de prévoir la récu-pération fonctionnelle myocar-dique après revascularisation. La notion de myocarde hibernant résultant de l’interaction étroite entre perfusion, fonction et via-bilité, plusieurs approches per-mettent d’atteindre cet objectif.

l’ImagERIE nucléaIRE paR tOmOgRaphIE paR émISSIOn mOnOphOtOnIquE L’imagerie nucléaire par tomo-

au 99mTc dépend de la perfu-sion myocardique, de l’intégrité membranaire, des fonctions mitochondriales et donc de la viabilité du cardiomyocyte. Les propriétés chimiques des tra-ceurs marqués au 99mTc (compo-sants cationiques liposolubles) leur procurent un taux d’extrac-tion lors de la perfusion de pre-mier passage de l’ordre de 60 % suivi d’une fixation mitochon-driale qui expliquent l’absence de redistribution tardive. Que ce soit avec le 201Tl ou le 99mTc, l’in-tensité du signal reçu par la gam-ma-caméra est proportionnelle à la quantité de cellules viables et est corrélée à la récupération fonctionnelle après revasculari-sation (4) (Fig. 1).

l’ImagERIE nucléaIRE paR tOmOgRaphIE paR émISSIOn DE pOSItOnS L’imagerie nucléaire par tomo-graphie par émission de po-sitons (TEP) utilise comme la TEMP le principe de la scinti-graphie. Le FDG (analogue du glucose) marqué au Fluor 18 est le radiotraceur le plus utilisé dans l’étude de la viabilité myo-cardique. L’internalisation et le stockage du 18F-FDG permettent la détection des cardiomyocytes viables. L’intensité du signal reçu par la gamma-caméra est ici encore proportionnelle à la quantité de cellules viables et est corrélée à la récupération fonc-tionnelle après revascularisation (13).

l’échOcaRDIOgRaphIE avEc aDmInIStRatIOn DE faIblES DOSES DE DObutamInEL’échocardiographie, par la simple mesure de l’épaisseur té-

Les techniques d’imagerie sont d’un apport essentiel dans l’exploration non invasive de la viabilité myocardique.

sence d’anomalie de perfusion de repos (8). D’un point de vue biologique, l’hibernation myo-cardique se manifeste par une profonde diminution du méta-bolisme énergétique des cardio-myocytes (9) et s’accompagne de modifications architectu-rales cellulaires et histologiques, aboutissant à terme à la perte cellulaire et à la fibrose myocar-dique (10).

ObjEctIfS DES tEchnIquES nOn InvaSIvESMême si la présence d’un in-farctus transmural, donc non viable, s’associe souvent à la présence d’une onde Q élec-trocardiographique, les études d’imagerie nous montrent que la présence d’une onde Q ne pré-juge pas de l’absence de viabilité du territoire incriminé (11, 12). Les techniques d’imagerie sont

graphie par émission mono-photonique (TEMP) utilise le principe de la scintigraphie. En pratique quotidienne 2 types d’isotopes sont utilisés pour l’étude de la viabilité myocar-dique : le thallium 201 et tech-nétium 99 métastable. Le 201Tl est un cation monovalent aux propriétés biologiques simi-laires à celles du potassium, ca-tion intracellulaire majoritaire théoriquement absent des zones cicatricielles. Son internalisa-tion initiale par le cardiomyo-cyte dépend essentiellement de la perfusion myocardique alors que son internalisation tardive dépend de l’intégrité de la membrane cellulaire et donc de la viabilité du cardiomyocyte. L’utilisation du 201Tl permet donc l’étude de la perfusion et de la viabilité myocardiques par la réalisation d’imageries précoce et tardive. La fixation aux cardio-myocytes des traceurs marqués

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lédiastolique d’un segment myo-cardique est capable de prédire l’absence de viabilité. En effet, une épaisseur de moins de 6 mm est prédictive d’une absence de viabilité dans le segment considé-ré, se traduisant par une absence de récupération après revascula-risation myocardique (11) (Fig.  2). L’administration de faibles doses de dobutamine intraveineuse (10 µg/kg/min) permet d’améliorer la viabilité des segments viables pré-sentant une dysfonction donnant ainsi l’accès à l’exploration de la réserve contractile du myocarde. Les segments non viables ne pré-sentent pas de réserve contractile. L’avènement des nouvelles tech-niques échographiques d’étude de la déformation myocardique (strain en Anglais) devrait per-mettre d’améliorer la sensibilité de cet examen dans l’étude de la viabilité.

l’échOcaRDIOgRaphIE avEc agEnt DE cOntRaStE IntRavEInEuxLes produits de contraste en échocardiographie sont basés sur l’utilisation de microbulles composées de gaz inertes de haut poids moléculaire. Avec une rhéologie proche de celle de glo-bules rouges, les microbulles ont une haute rémanence vasculaire et une faible diffusion dans l’es-pace extravasculaire permettant l’étude de la perfusion myocar-dique par échocardiographie. La perfusion myocardique étant un prérequis à la viabilité myocar-dique, l’administration de mi-crobulles intravasculaires permet l’étude de la densité capillaire qui est inversement corrélée au degré de fibrose. En pratique, l’absence de rehaussement d’un segment myocardique par les microbulles

est considérée comme le signe d’une absence de viabilité (14) (Fig.  2). Cependant, en France, les agents de contraste en échogra-phie n’ont pas d’autorisation de mise sur le marché dans cette in-dication.

l’IRm caRDIaquETout comme l’échocardiogra-phie, l’IRM cardiaque avec son mode ciné permet une étude dynamique et morphologique du myocarde. Tout comme en échocardiographie, un amin-

figure 1 - Etude de la viabilité myocardique par scintigraphie au 201tl. Défaut de fixa-

tion du radiotraceur en regard de la paroi inférieure. conclusion : absence de viabilité

inférieure. viabilité des autres territoires.

figure 2 - Etude de la viabilité myocardique par échocardiographie transthoracique.

a. coupe parasternale grand axe en mode 2D. amincissement de la paroi antéroseptale

(segments basal et médian) : épaisseur télédiastolique < 6 mm.

b. coupe parasternale en mode tm. amincissement et dyskinésie de la paroi antéroseptale.

c. coupe parasternale grand axe en mode 2D. absence de rehaussement myocardique

de la paroi antéroseptale par les microbulles de contraste ; rehaussement du segment

apical. conclusion : absence de viabilité antéroseptale.

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cissement pariétal (ici inférieur à 5,5 mm) signe l’absence de viabilité (15) (Fig.  3). Cette ap-proche morphologique cou-plée à l’étude de la déformation myocardique durant l’adminis-tration de faibles doses de do-butamine permet l’étude de la réserve contractile des segments myocardiques présentant une dysfonction. L’augmentation de l’épaisseur myocardique de plus de 2 mm sous faibles doses de dobutamine des segments pré-sentant une dysfonction est as-sociée à une récupération fonc-tionnelle après revascularisation (15). Mais la plus-value de l’IRM se situe essentiellement autour de ses séquences dites “tardives” réalisées 5 à 15 minutes après injection de gadolinium. Après la réalisation de séquences dites d’inversion – récupération visant à annuler le signal du myocarde sain –, les séquences tardives font apparaître en hy-persignal les zones de défaut de clairance du gadolinium. Ces zones pathologiques correspon-dent à des zones d’augmenta-tion de l’espace interstitiel où le gadolinium stagne du fait d’une diminution de la clairance vas-culaire. En pratique clinique, ces zones dites de “rehaussement tardif” correspondent, soit à de l’œdème signant généralement un phénomène aigu, soit à de la fibrose assimilée généralement à un phénomène chronique. Ain-si, du fait de sa haute résolution spatiale, l’IRM cardiaque permet d’apprécier l’extension trans-murale d’un d’infarctus, seg-ment par segment. La récupéra-tion fonctionnelle d’un segment myocardique est inversement proportionnelle à la transmura-lité de l’infarctus. Une extension de la nécrose de moins de 50 % signe la présence de viabilité

myocardique (16) (Fig. 3).

lE ScannER caRDIaquEBien que l’étude de la viabi-lité ne soit pas son rôle princi-pal, le scanner cardiaque, tout comme l’IRM, permet d’évaluer la présence et l’extension d’un infarctus du myocarde par la réalisation d’acquisitions tar-dives après injection iodée. Les zones d’infarctus apparaissent en hyperdensité par le même mécanisme de stase du produit de contraste que pour l’IRM. En plus de permettre l’étude de l’épaisseur télédiastolique des segments myocardiques par des séquences dynamiques syn-chronisées à l’ECG, le scanner cardiaque permet donc d’ap-précier l’extension de la nécrose. Les données du scanner car-diaque sont concordantes avec celles de l’IRM en terme d’amé-lioration après reperfusion (17), avec la limite d’une sous-estima-tion systématique de l’extension de la nécrose (18).

l’amélIORatIOn fOnctIOnnEllE apRèS REvaSculaRISatIOnEn présence d’une dysfonc-tion myocardique, l’intérêt de l’étude de la viabilité repose es-sentiellement sur la prédiction d’une amélioration fonction-nelle après revascularisation. La plupart des études s’accordent sur la nécessité de 30 à 40 % de myocarde viable (O 4 segments) pour espérer une amélioration fonctionnelle en terme de frac-tion d’éjection du ventricule gauche (FEVG) après revascu-larisation (19). Pourtant, la pré-sence de myocarde viable ne préjuge pas d’une récupération fonctionnelle après revascula-

risation. Ainsi, en terme d’amé-lioration fonctionnelle après re-vascularisation, les techniques isotopiques, l’IRM cardiaque avec produit de contraste et l’échocardiographie avec agent de contraste, en permettant de dépister la présence de myo-carde viable, offrent une bonne sensibilité mais une faible spé-cificité. Cette faible spécificité s’explique par la présence régu-lière d’infarctus sous-endocar-diques en regard desquels per-

figure 3 - Etude de la viabilité myocar-

dique par IRm cardiaque.

a. séquence ciné-IRm. coupe petit axe.

mesure de l’épaisseur pariétale télédias-

tolique. flèches rouges : épaisseur pa-

riétale < 5,5 mm (absence de viabilité).

flèche verte : épaisseur pariétale

O 5,5 mm (viabilité).

b. séquence tardive pondérée t1 après

injection de gadolinium : recherche de

zones de défaut de clairance du gado-

linium apparaissant sous la forme d’un

hypersignal. coupe petit axe. flèches

rouges : hypersignal transmural (absence

de viabilité). flèche verte : hypersignal

sous-endocardique intéressant moins de

50 % de l’épaisseur du myocarde (viabilité).

conclusion : absence de viabilité inférola-

térale et antérieure (segments médians).

viabilité antéroseptale (segment médian).

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siste une couche épicardique de fibres circonférentielles viables qui ne participent que peu à la performance systolique du myocarde. Ainsi, les techniques explorant la réserve contractile du myocarde telles que l’écho-cardiographie dobutamine et l’IRM dobutamine offrent une meilleure spécificité en termes de récupération fonctionnelle après revascularisation (Tab. 1).

ISchémIE myOcaRDIquE Et REvaSculaRISatIOnLe manque de spécificité de la plupart des techniques d’image-rie dans la prédiction d’une ré-cupération fonctionnelle après revascularisation est également due au fait qu’en l’absence de menace ischémique, le myo-carde viable n’est plus en situa-tion d’hibernation ou de sidé-ration répétée et la réalisation d’un geste de revascularisation n’apporte par conséquent au-cun bénéfice sur la performance des cellules myocardiques. Cette situation se rencontre réguliè-rement en présence d’infarc-tus sous-endocardiques pour lesquels la dysfonction myo-cardique est attribuable à l’at-teinte des fibres longitudinales sous-endocardiques et non pas à une hibernation ou sidération répétée du myocarde. Ainsi, les études échocardiographiques sous dobutamine (faibles puis fortes doses) nous apprennent que le bénéfice d’une revascu-larisation ne s’observe qu’en cas de viabilité myocardique (pré-sence d’une réserve contractile pour de faibles doses de dobu-tamine) avec ischémie résiduelle (dégradation de la cinétique myocardique pour de fortes doses de dobutamine) se ma-

nifestant par une réponse dite biphasique à la dobutamine (20). La présence d’une réserve contractile sans ischémie asso-ciée signe alors généralement la présence d’un infarctus sous-endocardique. Pour cette raison, la plupart des techniques d’ima-gerie de la viabilité myocardique sont couplées à la réalisation d’un stress pharmacologique à la recherche d’une altération de la réserve coronaire (étude de la perfusion sous vasodilatateurs) ou d’une ischémie myocardique vraie (inadéquation entre be-soins et apports du myocarde en oxygène sous fortes doses de dobutamine).

REmODElagE vEntRIculaIRE Et REvaSculaRISatIOnLa présence d’un remodelage ventriculaire évolué, se manifes-tant par une importante dilata-tion ventriculaire, s’accompagne d’une diminution des chances d’amélioration fonctionnelle après revascularisation malgré la présence de viabilité myocar-dique. Cet impact du remode-lage se manifeste par une évolu-tion de la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) après revascularisation directement corrélée au diamètre télédiasto-

lique du ventricule avant revas-cularisation (21). En pratique cli-nique, la présence d’un volume télédiastolique du ventricule gauche > 130 ml avant revascu-larisation se manifeste par une dégradation du pronostic vital à long terme. Cette constatation s’explique par la physiopatho-logie de l’hibernation myocar-dique qui se caractérise, à terme, par d’importantes modifica-tions histologiques et cellulaires myocardiques empêchant la récupération fonctionnelle du myocarde hibernant malgré la restauration d’une perfusion suffisante (22).

l’Impact DES DélaIS DE pRISE En chaRgESi l’apparition d’un remodelage ventriculaire sous la forme d’une dilatation ventriculaire n’est pas un phénomène aigu, les modi-fications histologiques et cellu-laires qui accompagnent l’hiber-nation du myocarde pourraient apparaître précocement et ex-pliqueraient l’impact des délais avant revascularisation sur la récupération fonctionnelle et le pronostic vital après revasculari-sation. Ainsi, un délai d’un mois avant revascularisation d’un myocarde viable s’accompagne d’une diminution de l’améliora-

technique Sensibilité (%) Spécificité (%)teMp 201ti 86 59teMp 99mtc 81 66tep 18F 88 74echocardiographie dobutamine 82 79echocardiographie avec agent de contraste 89 51irM cardiaque dobutamine 73 83irM cardiaque avec produit de contraste 95 45

tableau 1 - Synthèse des sensibilités et spécificités des techniques d’exploration de la viabilité en terme de récupération fonction-nelle des segments myocardiques après revascularisation. D’après Schinkel et al. (19).

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tion de la FEVG et d’une dégra-dation du pronostic vital à 2 ans (23).

cOncluSIOn Et pERSpEctIvESLa recherche de viabilité dans l’insuffisance cardiaque systo-lique d’origine ischémique est donc d’un intérêt diagnostique et pronostique majeur. Les tech-niques d’imagerie actuelles per-

mettent de guider au mieux un geste de revascularisation myo-cardique en intégrant en plus des paramètres de viabilité, la présence d’un éventuel remo-delage ventriculaire et/ou d’une éventuelle ischémie qui impac-teront le résultat de la revascula-risation.

L’évolution des techniques non invasives dans l’exploration des cardiopathies ischémiques

s’oriente vers le développe-ment des techniques d’imagerie mixtes regroupant évaluations morphologique et fonctionnelle, en conditions de repos et en conditions de stress. n

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BiBliographie

Mots-clés : cardiopathie, Ischémie, Revascu-

larisation, Insuffisance cardiaque,

Imagerie

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3 Recommandations pour la revascularisation myocardique

revue partiellen Les recommandations sur la revascularisation myocardique publiées en 2010 sont sépa-

rées en différents chapitres, commençant par les stratégies diagnostiques et l’importance de

l’imagerie cardiaque, suivies des chapitres sur les indications de revascularisation dans la

maladie coronaire stable, les syndromes coronaires aigus et certaines situations cliniques

particulières, pour enfin se terminer par des considérations sur les techniques opératoires et

interventionnelles. L’environnement pharmacologique ne sera pas abordé dans cette revue.

� Jérôme roncalli*

Au cours de l’année 2010, le monde de la cardiologie interventionnelle aura été

marqué par la publication des re-commandations européennes sur la revascularisation myocardique dans l’European Heart Journal (1). Ces nouvelles recommanda-tions sont définies selon la classe de recommandations et le niveau d’évidence (Tab. 1). Contrairement aux précédentes versions, elles ont été élaborées conjointement par des experts de l’European Society of Cardiology (ESC) et de l’European Association for Cardio-thoracic Surgery, réunis en somme sur le modèle de l’équipe médico-chirurgicale, dont elles soulignent largement l’importance.

“HEaRt tEam”C’est l’équipe médico-chirur-gicale qui est mise en avant par les cardiologues intervention-nels. En effet, ce concept de la

* Service de Cardiologie A, Cardiologie Interventionnelle, CHU de Rangueil, Toulouse

“Heart Team” fait figure de ré-férence pour la prise en charge des patients complexes comme par exemple les pluritroncu-laires. Le développement de ré-seaux sur le plan régional et les

échanges entre les équipes de cardiologie interventionnelle sont nécessaires pour parfaire la prise en charge des patients. Une caractéristique essentielle de ces recommandations est leur

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx

classes de Définition recommandations classe i evidence et/ou agrément qu’un traitement ou une

procédure donnée est bénéfique, utile, efficace.classe ii evidence contradictoire et/ou divergence d’opinion

à propos de l’utilité/efficacité d’un traitement ou une procédure donnée.

classe iia poids de l’évidence/l’opinion est en faveur de l’utilité/efficacité.

classe iib l’utilité/efficacité est bien moins établie par l’évidence/opinion.

classe iii evidence ou agrément général qu’un traitement ou une procédure donnée n’est pas bénéfique/efficace, et dans certains cas nuisible.

Niveau d’évidence Définitionniveau d’évidence A Données issues de plusieurs études cliniques rando-

misées ou méta-analyses.niveau d’évidence B Données issues d’une seule étude clinique randomi-

sée ou de grandes études non randomisées.niveau d’évidence c consensus d’opinion d’experts et/ou petites études,

études rétrospectives, registres.

tableau 1 - classes de recommandations et niveaux d’évidence selon la Société Européenne de cardiologie (ESc).

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insistance sur la collaboration avec les chirurgiens. Au-delà des compétences techniques, recon-nues comme liées au volume d’activité, ce sont les indications de revascularisation proprement dites qui méritent le plus souvent une réflexion approfondie faisant intervenir non seulement les car-diologues et les chirurgiens, mais aussi les anesthésistes et parfois même les gériatres pour les sujets les plus âgés. Enfin, les patients doivent être clairement informés des bénéfices et des risques de telle ou telle attitude thérapeu-tique (Tab. 2).

L’aNgIOpLaStIE ad-hoc L’angioplastie coronaire est lar-gement pratiquée dans la conti-nuité immédiate de la coronaro-graphie à visée diagnostique. Elle a des avantages indéniables, no-tamment en termes de confort et de gain de temps pour le patient, de réduction des risques de sai-gnement au point de ponction et donc de coût. Néanmoins, elle ne doit pas être considérée comme une stratégie par défaut (Tab. 3) et doit faire l’objet de pro-tocoles de prise en charge spé-cifiques de certaines situations anatomiques et cliniques, défi-nis au sein de chaque établisse-ment par la Heart Team.

L’utILISatION DES ScORESLa décision thérapeutique col-légiale, notamment pour la re-vascularisation, repose entre autres sur l’évaluation de scores et la stratification du risque. Ainsi l’EuroSCORE (www.euroscore.org/calc.html) et le STS score (http://209.220.160.181/STSWe-bRiskCalc261/) sont reconnus de classe I B, ce qui justifie d’un

bon niveau de preuve leur utili-sation lorsque l’on envisage une décision médico-chirurgicale. Le SYNTAX Score (www.syntaxscore.com) également très utilisé par les équipes interventionnelles est de recommandation IIa B.

aNgOR StabLE : L’èRE NOuvELLE apRèS SYNtaX Dans l’angor stable, la revascula-risation se justifie pour amélio-rer le pronostic des patients ou bien leurs symptômes. Les prin-cipales recommandations dans l’angor stable sont largement ré-sumées dans le tableau 4.

Cette revascularisation fait ap-pel aux techniques intervention-nelles ou chirurgicales.

La prise en charge des patients pluritronculaires avait au début des années 2000 pour gold stan-dard la chirurgie. Depuis l’arri-vée des stents et notamment des stents actifs, la prise en charge de ces patients a évolué.

• L’étude ARTS I et le registre ARTS II ont montré la sécurité de l’angioplastie avec toutefois un taux de revascularisation plus important dans le groupe stent, nettement diminué par l’utilisa-tion des stents actifs.

classe de recom- Niveau mandation d’évidenceil est recommandé que les patients soient adéquatement informés du potentiel bénéfice et des résultats à court et long termes de la

i cprocédure de revascularisation. suffisamment de temps doit s’écouler entre l’information et la prise de décision.la stratégie de revascularisation appropriée chez des patients multitronculaires doit être i c débattue par la “Heart team”

tableau 2 - Recommandations pour décision de revascularisation et information au patient.

angioplastie ad-hoc• patients hémodynamiquement instables (incluant choc cardiogénique)• lésion coupable lors d’un syndrome coronarien aigu avec ou sans sus-décalage du segment st• patients stables à faible risque avec atteinte mono- ou bitronculaire (sans l’iVA) et morphologie favorable (coronaire droite, cx non ostiale, iVA moyenne ou distale)• lésion de resténose non récidivante

angioplastie à distance• lésion d’aspect morphologique à haut risque • insuffisance cardiaque chronique• insuffisance rénale (clairance de la créatinine < 60 ml/min), si volume total de contraste est > 4 ml/kg• patients stables avec atteinte multitronculaire incluant l’iVA• patients stables avec lésion ostiale ou complexe de l’iVA proximale• toute évidence clinique ou angiographique d’un plus haut risque périprocédu-ral comparé à une angioplastie ad-hoc

tableau 3 - Indications pour angioplastie ad-hoc versus angioplas-tie à distance.

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• L’étude SYNTAX (2) a confirmé ces données, elle a montré qu’en fonction du score de gravité des lésions (score SYNTAX), le taux de revascularisation augmen-tait de manière exponentielle nous permettant de dégager un groupe de patients avec un score Syntax inférieur à 22 où l’angio-plastie avec stent actif (TaxusTM) faisait aussi bien que la chirurgie (Tab. 5). Les données des équipes françaises confirment ces bons résultats quel que soit le score Syntax, ajoutant une prime à l’expertise et la technicité des équipes.

La pLacE DES OutILS INtERvENtIONNELS ESt mISE EN avaNtLorsqu’une revascularisation a été retenue, notamment chez les multitronculaires, la mesure de la réserve de débit fractionnaire (FFR) au sein de la coronaire pour en déterminer le caractère fonctionnel d’une sténose a été mise en avant. La problématique soulevée par la FFR conduit à se poser des questions sur ce que l’on appelle les patients multi-tronculaires en fait. Il paraît rai-sonnable de penser par exemple que dans l’étude SYNTAX, si les patients du groupe angioplastie avaient bénéficié d’une FFR sur les lésions à dilater, nous aurions peut-être dilaté moins de lésions et de ce fait limité le risque de resténose et de réintervention donc la survenue d’événements graves.

Mieux guider l’évaluation du re-tentissement d’une sténose coro-naire semble ainsi nécessaire pour limiter les risques de resténose. L’utilisation de ce type de device est donc vouée à un grand avenir, et ce d’autant que les recomman-

dations en la matière sont de très bon niveau. La FFR est désormais considérée comme une tech-nique indispensable pour guider l’indication d’angioplastie sur des lésions angiographiquement difficiles à analyser. Mais du fait de son coût non encore pris en charge, elle reste très insuffisam-ment utilisée.

Parmi les autres points essentiels de la revascularisation coronaire percutanée, d’autres outils spéci-fiques ont été retenus pour une

recommandation de classe I (Tab. 6).

La REcONNaISSaNcE DES StENtS actIfSLà encore, pour ce qui est de la revascularisation des pluritron-culaires, lorsque l’on a pris la décision de traiter par angio-plastie, la question à résoudre est la suivante : « angioplastie de plusieurs vaisseaux : stents actifs à élution sur toutes les lésions ou stents actifs sur seulement des lésions précises ? ».

Lésion anatomique classe Niveaupour le tronc commun > 50 % i Apronostic iVA proximale > 50 % i A 2 ou 3 vaisseaux avec fonction Vg altérée i B ischémie étendue (> 10 %) i B sténose > 50 % sur seule artère restante i c 1 vaisseau sans iVA proximale et sans ischémie > 10 %

iii A

pour les toute sténose supérieure à 50 % symptômes avec angor limitant ou équivalent non répondant à un traitement

i A

médical optimal. Dyspnée/icc et > 10 % ischémie/viabilité Vg sous la dépendance d’une sténose > 50 %.

iia B

pas de symptôme limitant avec traitement médical optimal

iii c

VG : ventricule gauche ; IVA : artère interventriculaire antérieure ; ICC : insuffisance cardiaque chronique.

En faveur de En faveur l’angioplastie de la chirurgie1 ou 2 vaisseaux - iVA non proximale i c ii b c1 ou 2 vaisseaux - iVA proximale iia B i A3 vaisseaux, lésions simples, accessibles à l’angioplastie, score syntax o 22

iia B iA

3 vaisseaux, lésions complexes, non entièrement accessibles à l’angioplastie, iiiA iA score syntax > 22tronc commun (isolé ou + 1 vaisseau, lésion ostiale)

iia B iA

tronc commun (isolée ou + 1 vaisseau, lésion distale ou bifurc.)

iib B iA

tronc commun + 2/3 vaisseaux, score syntax o 32 iib B iAtronc commun + 2/3 vaisseaux, score syntax > 32 iii B iA

tableau 4 - principales recommandations dans l’angor stable.

tableau 5 - techniques de revascularisation.

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Efficacité Et sécuritéLes stents actifs sont donc plus efficaces que les stents nus, leur sécurité a depuis été mise à mal par la communication de Ca-menzind à l’ESC 2006, le taux de thrombose a toutefois dans diverses communications et méta-analyses réalisées depuis, été confirmé comme superpo-sable à celui des stents nus ou Bare Metal Stents.

n�seconde générationLa sécurité et l’efficacité des stents actifs ne sont pas iden-tiques entres eux, l’arrivée des stents actifs de seconde géné-ration amène des résultats pro-bants en terme de sécurité et d’efficacité, notamment chez le pluritronculaire. La technique de pose, incluant la préparation de la lésion (prédilatation, Ro-tablator®..), l’utilisation de long stents afin d’éviter l’overlap-ping, la post-dilatation avec des ballons non compliants à haute pression doit être minutieuse et impose un cahier des charges ri-goureux.

n�iVus et octSi l’IVUS et l’OCT sont dispo-nibles, il est intéressant dans cette indication de les utiliser. En effet, les pluritronculaires sont souvent diabétiques et présen-tent des lésions le plus souvent diffuses, ces techniques vont alors permettre de s’assurer de la parfaite apposition du stent et de juger de manière précise la longueur de la lésion afin d’évi-ter un geographical miss.

incidEncE du coût Enfin, les différences de coût entre stents actifs et stents nus vont s’atténuer voire disparaître et donc permettre aux stents ac-tifs de s’imposer.

L’arsEnaL thérapEutiquE L’évolution actuelle de la car-diologie interventionnelle et la médecine fondée sur les preuves nous permet aujourd’hui de mieux évaluer les cardiopathies ischémiques et de mieux opti-miser la prise en charge des co-ronariens notamment en terme de revascularisation myocar-dique. Après les périodes de doute des années 2005-2006 concernant les risques accrus de thrombose avec les stents actifs, les dernières années nous ont rassurés sur l’absence de sur-risque thrombotique et le taux d’implantation de stents actifs est actuellement dans les pays européens supérieur à 50 %.

n�du stent actif au pontage aorto-coronaireCes données récentes permet-tent de proposer aux patients multitronculaires des options thérapeutiques variées allant du stent actif au pontage aorto-co-ronaire.

En fonction de l’évaluation médico-chirurgicale, des scores de risque clinique et angio-graphique (EuroScore, Syntax Score), la revascularisation de plusieurs vaisseaux par angio-plastie devient une alternative au pontage tout à fait intéres-sante.

n�Les recommandationsDans la littérature, les recom-mandations des sociétés sa-vantes et de la Haute Autorité de santé nous aident dans nos choix quotidiens. Globalement, les sujets diabétiques, les lon-gues lésions > 15 mm et les petits vaisseaux o 2,5 mm relèvent de la mise en place de stents actifs. Les autres lésions doivent être traitées par stents nus en dehors du tronc commun coronaire gauche. En effet, le taux de res-ténose élevé après implantation de stent nu sur le tronc commun doit faire privilégier sauf contre-indication la mise en place de stents actifs.

classe de recom- Niveau mandation d’évidencel’angioplastie guidée par la FFr est recommandée pour la détection d’ischémie myocardique liée à une lésion coronaire en

i A

l’absence d’ischémie évidente documentéeles stents à élution sont recommandés pour réduire la resténose/ré-occlusion, s’il n’y a pas de contre-indication à une double

i A

antiagrégation plaquettaire prolongéeUn système de protection d’embolie distale est recommandé pour l’angioplastie des ponts veineux saphènes afin d’éviter i B l’embolisation distale de débris et la prévention d’un infarctus du myocardele rotablator® est recommandé pour la préparation des lésions calcifiées qui ne peuvent pas être franchies par un ballon i c ou suffisamment dilatées avant l’implantation d’un stent

tableau 6 - Recommandations pour l’utilisation d’outils spéci-fiques au cours de l’angioplastie.

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détachable

32� Cardiologie - Cardinale • Janvier 2011 • vol. 5 • numéro 35

n�L’exemple françaisC’est pourquoi, le taux actuel d’implantation de stents actifs en France augmente progressive-ment et nous conduit à dilater des patients multitronculaires qui nécessitaient jusque-là chirurgie. En attendant l’arrivée des stents biorésorbables, de nouvelles études randomisées ou non avec les stents actifs de deuxième et troisième générations devraient confirmer cette tendance dans les années à venir.

LE DIabétIquE Les recommandations pour la prise en charge des patients dia-bétiques sont résumées dans le tableau 7.

LéSIONS cORONaIRES SpécIfIquES

bifurcations Les sténoses coronaires sont fré-quemment localisées au niveau des bifurcations, ce qui reste un challenge pour la revascularisa-tion par angioplastie aussi bien sur le plan technique que pour le suivi.Rien de bien nouveau dans ces recommandations, il est tou-jours préconisé la mise en place du stent sur l’artère principale et si possible d’éviter de stenter la branche fille. L’utilisation de la FFR a montré la surestima-tion fonctionnelle des branches filles. Un kissing balloon est pré-conisé lorsqu’il y a deux stents qui sont mis en place au niveau de la bifurcation. Ces commen-taires s’appliquent volontiers aux lésions de bifurcation du tronc commun avec des recom-mandations de mise en place de stents actifs au niveau des bifur-cations et des lésions du tronc

ainsi que sur les vaisseaux de moins de 2,5 mm de diamètre pour diminuer les taux de resté-nose.

occLusion coronairE chroniquE Définie par un flux TIMI 0 de-puis plus de trois mois, les oc-clusions coronaires chroniques ont été abordées. Après une pé-riode de confusion à propos des indications de l’angioplastie sur

procédures, il existe un risque potentiel lié à l’irradiation. Les taux de succès sont étroitement liés à l’expérience des opérateurs, notamment dans l’utilisation de techniques spécifiques à ce type de procédure incluant des guides et des microcathéters avec des ballons de très petit profil. L’an-giographie bilatérale et l’utilisa-tion de sondes d’échographie sont d’une grande utilité ainsi que les approches rétrogrades.

classe Niveaupatients avec steMi, l’angioplastie primaire est préférée à la fibrinolyse si elle peut être recommandée dans les délais.

i A

chez les patients stables avec atteinte coronaire étendue, la revascularisation est indiquée dans le but d’améliorer i A la survie sans événement. l’utilisation des stents actifs est recommandée dans le but de diminuer la resténose et les revascularisations répétées.

i A

chez les patients sous metformine, la fonction rénale doit être monitorée avec attention après i ccoronarographie/angioplastie.la réalisation de pontages devrait être envisagée plutôt que l‘angioplastie, lorsque l’étendue des lésions justifie une approche chirurgicale (surtout chez les pluritronculaires),

iia B

et chez les patients à risque acceptable.chez les patients subissant une angioplastie avec insuffisance rénale connue, la metformine devrait être iib c stoppée 48 h avant la procédure.l’utilisation de glucise/insuline/potassium chez le diabétique subissant une revascularisation n’est pas indiquée.

iii B

tableau 7 - Recommandations spécifiques pour le patient diabétique.

Au niveau des bifurcations, il est toujours préconisé la mise en place du stent sur l’artère principale et si possible d’éviter de stenter la branche fille.

ces occlusions chroniques, il est recommandé d’envisager la re-vascularisation de ce type de lé-sions en présence d’un angor ou d’une ischémie dans le territoire de l’artère. L’angioplastie ad-hoc n’est pas recommandée. Compte tenu de la longueur de certaines

pont VEinEux saphènE Chez ce type de patients, le risque d’embolie distale n’est pas négligeable. Par ailleurs, le traitement anti-GP2B3A n’a pas démontré une efficacité dans ce type d’approche, ce qui justifie l’utilisation de filtres en aval de

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la lésion pour limiter les embo-lisations distales, notamment de débris.

dans La rEsténosE intrastEntL’utilisation de ballons est la technique la plus simple et la mieux tolérée. Cependant, le taux de resténose reste très élevé avec un risque de glissement du ballon soit en proximalité, soit en distalité, pouvant endommager les segments adjacents au stent, justifiant l’utilisation de cutting balloon. Hormis l’implantation d’un stent actif, les autres tech-niques n’ont pas démontré de bénéfice significatif, en parti-culier la radiothérapie qui reste d’utilisation très limitée.

LE tronc communLa place de l’angioplastie du tronc commun a été évoquée comme alternative à la chirur-gie cardiaque, notamment chez les patients qui présentent un score Syntax bas, et ce d’autant plus que les patients présentent un risque chirurgical élevé. Cette proposition avait également été retenue par la HAS en 2009. Néanmoins, un score Syntax trop élevé doit faire préférer la chirurgie.

Les recommandations de l’ESC 2010 sont en effet plus nuancées que les recommandations ACC/AHA de février 2009 qui contre-indiquaient l’angioplastie du tronc commun. Cela étant, le traitement chirurgical des sté-noses du tronc commun gauche est toujours préconisé à un ni-veau I A lorsque le risque chirur-gical n’est pas élevé. Il existe donc une recommandation d’un niveau IIa B ou IIb B (tronc com-mun distal pour l’angioplastie de certaines lésions du tronc commun gauche avec score Syn-tax bas ou intermédiaire). La dé-cision doit être prise à l’occasion d’un staff médico-chirurgical associant chirurgiens, cardiolo-gues interventionnels et anes-thésistes comme précités plus haut. Enfin, un coroscanner ou un contrôle coronarographique peut être envisagé entre le 3e et 12e mois afin de s’assurer de la bonne évolution.

cONcLuSIONLes nouvelles recommandations de la revascularisation myocar-dique de la Société Européenne de Cardiologie viennent renfor-cer les principes établis au cours

des dernières années grâce aux résultats des études cliniques et couronnent ainsi les efforts consentis par les investigateurs pour améliorer le devenir de nos patients au cours du temps. Cette revue n’a pas pour voca-tion de reprendre l’ensemble des chapitres abordés compte tenu de l’ampleur du travail réalisé par le comité de rédaction. n

1. Wijns W, Kolh p, Danchin n et al. guidelines on myocardial revascularization: the task Force on Myocardial revascularization of the european society of cardiology (esc) and the european Association for cardio-thoracic surgery (eActs). eur Heart J 2010 ; 31 : 2501-55.2. serruys pW, Morice Mc, Kappetein Ap et al. percutaneous coronary intervention versus coronary-artery bypass grafting for severe coronary artery disease. n engl J Med 2009 ; 360 : 961-72.

BiBliographie

mots-clés : Stent actif, Stent nu, Revasculari-

sation, Recommandations, Score,

angioplastie, heart team