6

Click here to load reader

Communication

Embed Size (px)

DESCRIPTION

communication lors d'un colloque international

Citation preview

Page 1: Communication

L’enseignement de la littérature au lycée est « en péril »

Driss louiz, Professeur de français

Lycée ibn zaidoun,

Sidi yahya du gharb

La réforme, engagée par le ministère de l’Education nationale, vise le

développement d’un enseignement de qualité s’appuyant sur les constantes

civilisationnelles et culturelles, cet enseignement se veut une préparation

efficiente à des études supérieures et / ou une plate-forme pour une insertion

aisée des jeunes dans le marché du travail.

Cette réforme se donne pour finalité entre autres :

La formation d’un citoyen autonome par le biais des valeurs civique et

humaines et universelles.

La compréhension et l’assimilation des différents changements et

développements de la civilisation humaine.

Comme le stipule la charte nationale de l’éducation et de la formation,

l’élève qui accède au cycle secondaire qualifiant est déjà capable de

s’exprimer ou d’interagir de manière correcte et efficace, dans des

situations de communications complexes. Il est appelé durant ce cycle à

consolider ses acquis, à se perfectionner en vue d’une appropriation élargie

des dimensions culturelles, discursives et linguistiques de la langue

française.

Et à l’issue du cycle secondaire qualifiant, l’apprenant devra être capable :

Recevoir et produire de l’oral

Recevoir et produire de l’écrit

Travailler en autonomie

Certes on s’est inspiré des modèles développés, mais est ce qu’on a tenu compte

de nos différences, de la spécificité de la société marocaine, bref de la réalité

actuelle ? C’est que nous essayons de développer dans cette modeste

communication.

Page 2: Communication

Si l’on observe le système éducatif marocain actuel nous nous rendons

compte que la littérature à travers les œuvres littéraires enseignées au lycée y

tient une place importante. Ainsi, nous voyons bien que les programmes de

quelques matières ont changé pour contenir des œuvres littéraires. Sans oublier

le fait qu’il existe des branches dites, littéraires. Désormais, quelle que soit la

branche choisie, les élèves marocains se retrouvent confrontés à un

enseignement littéraire, souvent déterminant dans leur réussite (l’exemple bien

connu, de l’importance du français dans la réussite de l’examen régional).

L’enseignement des œuvres littéraires au cycle secondaire qualifiant est une

voie semée d’embûches non seulement pour les élèves qui manquent

affreusement d’outils linguistiques et discursifs afin d’approcher ces œuvres

mais aussi pour les enseignants qui ne cessent de se plaindre du niveau de

leurs apprenants.

Nous constatons qu’il y a un décalage entre le niveau réel des apprenants et

le contenu des œuvres littéraires. En classe, nous nous trouvons face à une

réalité amère et parfois décourageante. La majorité des élèves lisent mal ou

savent à peine déchiffrer, question qui se pose : comment oser enseigner une

œuvre littéraire comme Candide de Voltaire pour les 2ème

année du bac , le

dernier jour d’un condamné pour les 1ère

année ou encore le bourgeois

gentilhomme pour les troncs communs ?

D’après notre modeste expérience en classe de français et lors de l’activité

étude de textes, nous sommes confrontés à des cas, des élèves qui refusent

de lire puisqu’ils ne savent tout simplement pas le faire et ont peur d’être la

risée de leurs camarades . Cette difficulté ne vient elle pas d’une autre

expérience menée par les élèves des écoles primaires et collège ?

Nous signalons que ce type de difficultés concernent beaucoup plus les

élèves des branches littéraires et sciences humaines que leurs camarades des

branches scientifiques. 4 ou 5 élèves d’une classe de 40 ont des

compétences linguistiques et sont capables de suivre et d’interagir avec le

contenu. Ces littéraires sont le plus souvent des élèves moyens ou très

moyens par rapport à leurs camarades de la branche scientifique et j’ose dire

que ces littéraires sont mal vus par leurs camarades voire même par la

société.

Page 3: Communication

Jamais les littéraires n’ont été aussi faibles en littérature ; les élèves des autres

branches ne font que tolérer tant bien que mal cet enseignement ; seulement par

souci d’examen. Nous sommes bien loin de cette transmission passionnée d’un

enseignement par définition passionnant. Cette discipline semble, dans nos

cours, une incommodité pour les professeurs et pour leurs élèves, une gêne et un

malaise profond.

Bien entendu, il ne faut pas oublier la lutte des élèves est quasi-désespérée

contre leurs incapacités linguistiques qui font de la lecture d’une œuvre intégrale

une sorte de prouesse dont ne sont capables que trois élèves ou quatre.

Toutefois, comment leur demander de lire alors qu’ils vivent dans une société

qui s’est arrêtée de lire, et ce depuis longtemps !!

En tant qu’enseignants nous nous interrogeons sur le choix des œuvres qui

posent de sérieuses difficultés pour les apprenants : La première question à se

poser donc lorsqu’on décide d’inscrire une œuvre dans un programme d’étude

d’un niveau scolaire donné est : est-ce que ces œuvres correspondent au niveau

réel des élèves ? sachant aussi que notre enseignement est un terrain vaste et

hétérogène, un enseignement à deux vitesse à savoir l’enseignement public et

privé.

Est-ce qu’à 15ans l’élève se met en face du conflit social et politique entre les

nobles et les bourgeois en France au XVII siècle ? Que lui fait voir Le Bourgeois

gentilhomme de Molière ? Se passionne-t –il, cet élève qui sait à peine

déchiffrer, pour la société française du XIX siècle telle qu’elle est

merveilleusement peinte et critiquée par Balzac dans Le père Goriot ? Et les

exemples sont légion.

En revanche Sidi Mohamed dans la boîte à merveilles leur parle à travers des

ruelles de Fès, de par son enfance et sa marocanité, grâce à la rencontre admise

ou refusée avec notre réalité, avec notre quotidien.

Nous rappelons que la qualité des œuvres n’est pas remise en question, mais

c’est juste que ce programme manque terriblement de réalisme.

Il correspondrait plutôt à une formation de littéraires, de vrais littéraires on veut

dire, destinés à des études universitaires dans cette branche.

Ainsi dans le programme du tronc commun, nous commençons tout

naturellement par des extraits de textes, puis nous passons aux nouvelles et nous

devrions finir l’année par aborder une pièce de théâtre en guise d’œuvre un peu

plus consistante et de façon à englober les principaux genres littéraires. Tout

cela tient parfaitement la route ! Mais c’est sans compter sur les énormes

difficultés que pose Le bourgeois gentilhomme, qui par la souffrance qu’il

Page 4: Communication

inflige aux élèves et aux professeurs est loin d’être gentil. C’est une comédie, ça

va de soi, sauf que presque jamais les élèves ne rient. Elle ne respecte pas le

critère du niveau, la langue utilisée étant trop difficile pour un élève de tronc

commun (on ne parle même pas ici des élèves des zones rurales).

Deux problèmes importants demeurent particulièrement préoccupants : d’une

part le déphasage linguistique entre le secondaire où l’essentiel des

enseignements se fait en langue arabe et le supérieur où l’arabisation n’a

concerné qu’une partie des sciences humaines à l’exclusion des autres champs

scientifiques, technologiques et professionnels, d’autre part entre la langue

d’enseignement qui est l’arabe et les langues exigées dans la vie professionnelle.

Nous reconnaissons également qu’il n y a pas que l’enseignement du français

qui souffre de ces difficultés, les autres disciplines ont presque les mêmes

maux, d’ailleurs tout le monde s’accorde à dire que notre l’état

d’enseignement n’est pas bon

A notre sens, nous pensons que l’un des problèmes majeurs qui entrave le bon

déroulement de l’action pédagogique de notre enseignement est la gestion des

ressources humaines souvent influencée par le système politique et éducatif.

Nous citons dans ce sens, l’exemple de ce qu’on appelle communément : « les

affectations ministérielles directes », beaucoup d’enseignants sont affectés

dans les différents cycles d’enseignement sans avoir fait de formations au

préalable. Ils se trouvent dans des classes, un champ d’expérimentation ;

d’autres enseignants considérés comme des bouche – trous, le plus souvent

des instituteurs appelés à la hâte pour enseigner au secondaire qualifiant et

bonjour l’improvisation !!

L’essentiel pour l’administration c’est qu’il y a un enseignant qui s’occupe

d’une classe et qu’importe la qualité !

S’ajoute à cela, les différentes méthodes élaborées, et le passage d’une méthode

à une autre ou est ce peut être c’est l’effet de la mondialisation ou le brassage

des cultures comme a dit M. Tenkoul lors de l’ouverture de ce colloque ?

Un autre problème relié à cette pratique c’est l’absence quasi-totale de

l’encadrement pédagogique, nous observons le nombre très réduit des

inspecteurs censés accompagner les nouvelles recrues. Il y a beaucoup

d’enseignants qui n’ont pas vu l’inspecteur depuis 3 ou 4 ans et ne savent à

quel saint se vouer lorsqu’ils auront besoin d’un conseil.

Page 5: Communication

Il existe d’autres problèmes que nous ne pouvons pas citer vu le temps qu’il

nous est imparti. Mais ils affectent beaucoup le bon déroulement de l’action

pédagogique. Une remise en question de la gestion de nos ressources humaines

est urgente.

Et partons du bilan publié par la Commission Spéciale Éducation - Formation

dans le rapport qui clôture son mandat et qui contient une évaluation détaillée

des quatre premières années de la Réforme.

La question des langues est communément reconnue comme un facteur

structurel de la crise de l’école en raison de l’incohérence des choix qui ont

longtemps prévalu aussi bien en matière de « langues d’enseignement » qu’en

matière « d’enseignement des langues » ; des choix qui se sont traduits le plus

souvent par une faible maîtrise des langues par les élèves et les étudiants. Que ce

soit la langue arabe, ou les autres langues étrangère, le niveau linguistique des

étudiants reste globalement faible tant au niveau de l’écrit que de l’expression

orale.

Après près de huit années d’application des nouveaux programmes, les

évaluations et les tests effectués aux différents niveaux et cycles du système

attestent toujours d’une faible maîtrise des langues

Les jeunes diplômés qui manquent de maîtrise en langue française ont des

difficultés à s'intégrer sur le marché de l'emploi, car le français joue un rôle

encore important dans les affaires comme dans l'administration.

En guise de conclusion, nous pensons que l’enseignement du texte littéraire

devra être clairement établi pour la société, le professeur et l’école, les objectifs

devront être clairs et réalistes, reste encore une étape à franchir et surtout à

réussir pour que l’opération soit un succès, Il s’agit de la mise en œuvre de cet

enseignement, en d’autres termes, des méthodologies d’approche des œuvres

littéraires. Ces dernières étant adaptables en fonction de l’objet de

l’enseignement et des objectifs.

Aborder un texte littéraire c’est ne pas rester limiter à la thématique c’est aussi

sensibiliser les apprenants aux différents style d’écriture car la littérature c’est

sensibiliser l’élève à la beauté de la langue.

Page 6: Communication

Les enseignants, armés d’outils, devront faire l’effort d’adapter les œuvres

littéraires (dans une certaine marge de manœuvre bien déterminée) aux réalités

de leurs classes.

Les enseignants du secondaire sont appelés à user du texte littéraire, il faut qu’ils

apprennent d’abord à en jouir. Car, disons- le, même si cela doit paraître

évident, le plaisir de lire s’acquiert et se transmet et il constitue indéniablement

la source première et continue de l’esprit de découverte et du contrôle actif des

connaissances.