9

Elvis presley, Histoires & Légendes

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Elvis presley, Histoires & Légendes
Page 2: Elvis presley, Histoires & Légendes

extrait du livre

Elvis Presley

Histoires et Légendes

Daniel Ichbiah

Copyright 2012, 2013 Daniel Ichbiah

Le Colonel Parker a-t-il brisé la carrière d’Elvis ?

Le parcours pour le moins troublant de celui qui n’a jamais été colonel et qui a mené Elvis vers la gloire avant de briser sa carrière en l’obligeant à tourner des navets que le chanteur horripilait…

Quel est le point commun entre les grands phénomènes de l’histoire de la musique populaire : un mentor, une personne clé qui prend en main la carrière de l’artiste. Des individus souvent peu sympathiques mais indéniablement efficaces, même si leurs motivations artistiques ne sont pas toujours très voyantes.

Les Beatles auraient aisément conquis la Grande Bretagne et un grand nombre de pays du monde. Toutefois, s’imposer aux USA était d’une autre envergure. Le talent de leur imprésario Brian Epstein a été déterminant en la matière. Après sa disparition en 1967, il est apparu qu’il n’avait pas géré la carrière du groupe au mieux de l’intérêt des Fab Four. Il demeure qu’il a été essentiel pour ce moment crucial qu’est le décollage…

Si Michael Jackson n’avait pas eu un père hyper autoritaire qui le faisait cravacher, ainsi que ses autres frères durant le moindre moment libre de sa jeunesse, serait-il devenu un professionnel aussi exigeant ? Joseph Jackson semblait clairement attiré par les retombées financières liées à la <carrière de ses rejetons, mais il les a sans doute aidé à les propulser sur le devant de la scène.

L’on pourrait citer d’autres exemples : il est de notoriété publique que René Angeli a bâti la carrière de Céline Dion. L’on sait moins que Led Zeppelin était épaulé par un manager hors pair, Peter Grant. Inversement, si des groupes comme les Beach Boys (challengers officiels des Beatles en 1966) ou même Oasis, si n’ont pas atteint le statut de superstar internationale d’un niveau comparable à Presley ou les Beatles, c’est probablement parce qu’ils n’ont pas su

Page 3: Elvis presley, Histoires & Légendes

ou n’ont pas tout simplement pas voulu s’offrir les services d’un individu de cette trempe, un génie du marketing de l’artiste.

Certains argueront : quid de Madonna ? Qui était la personne clé qui l’a poussé en avant d’un bout à l’autre n’autorisant aucun relâchement ? Elle-même, tout simplement ! La chanteuse était doublée d’une business woman hors pair…

Elvis pour sa part, était un chanteur de seconde zone, certes ultra populaire dans son Tennessee natal. Le Colonel Parker en a fait une star d’envergure mondiale en un temps record. Il a même été le premier manager musical qui ait autant façonné l’image et la réputation de son poulain. Dire que l’individu était trouble est une lapalissade…

L’un des auteurs qui a écrit une biographie sur le Colonel Parker s’appelle James L. Dickerson. Et le moins que l’on puisse dire est qu’il s’est heurté à une sacré problématique. Que dire d’un homme pour lequel il n’existe pratiquement aucun document officiel ? Dickerson n’a pas pu mettre la main sur le moindre certificat de naissance, sur un quelconque dossier militaire, sur un certificat de mariage. Et pour couronner le tout, il a cherché en vain des amis à même de témoigner, comme si Parker avait essentiellement vécu dans la solitude il avait tout de même une compagne officielle depuis 1969. Et lorsqu’il a été tardivement découvert qu’il s’agissait en fait d’un immigré hollandais, pas moyen de retrouver le certificat d’immigration ! Là où le FBI détient un dossier de 663 pages sur Elvis Presley, il n’en existe aucun sur son manager.

L’on a tout de même pu découvrir que le « Colonel » Parker s’appelait en réalité Andrea Cornelis van Kuik et qu’il était né à Breda aux Pays-Bas le 28 juin 1909. Cette origine hollandaise, Parker l’a cachée durant toute sa vie à tous ceux qu’il fréquentait, y compris Elvis et sa propre compagne !

Pourquoi l’imprésario du King a-t-il cultivé un tel mystère autour de son passé ? Il fallu attendre la sortie d’un livre de Alana Nash paru en 2003 pour enfin le découvrir. Au terme d’une enquête ultra fouillée, « The Colonel » a révélé qui était le Colonel Parker et levé le voile sur bien des questions que l’on pouvait se poser auprès du vieux renard. Et les faits sont ahurissants…

À l’âge de 20 ans, le dénommé Cornelis van Kuik a matraqué une femme jusqu’à la tuer. Afin d’éviter d’être attrapé par la police, il s’est enfui, sans même dire au revoir à sa famille, sans emporter le moindre bien, ni même d’argent. Il s’est fait embaucher comme aide cuisinier sur un cargo en partance pour les USA. Sur ce bateau, un passager clandestin du nom de Tom Parker a été découvert et jeté par-dessus bord. À son débarquement au port de Tampa en Floride, Cornelis van Kuik a refusé de prendre le chèque du chef du cargo. Dès lors qu’il a posé le pied sur le sol américain, il est devenu Tom Parker. Dès cet instant, il a été un émigrant en situation potentiellement illégale : il n’a jamais fait de demande pour une carte verte qui lui donnerait la nationalité américaine !

En cette année 1929, le pays de l’Oncle Sam a d’autres soucis étant donné la crise économique. Afin de survivre, Tom Parker se fait embaucher par l’armée américaine. Pourtant, très vite, il fait une dépression nerveuse et se voit conduit à l’Hôpital Walter Reed Army. Sur place, les médecins décident de le renvoyer de l’armée pour cause de psychose, dépression aiguë, instabilité émotionnelle. Par la suite, Parker vit dans un camping car et travaille dans des fêtes foraines. La légende voudrait qu’il ait dirigé un spectacle de poulets dansant sur une casserole brûlante. Pourtant, lors des rares moments où il s’est confié, Parker a expliqué qu’il n’en avait rien été et qu’il s’agissait d’une blague qu’il utilisait pour tester la crédulité des gens.

Page 4: Elvis presley, Histoires & Légendes

C’est en 1939 que Tom Parker assume pour la première fois le rôle de manager, pour un chanteur country du nom de Gene Austin. Puis, il s’occupe de protection des animaux, avant tout parce que la SPA locale lui offre un logement et un salaire. Il apparaît toutefois qu’il aurait exploité la bonté des amis des animaux pour ses propres fins, récupérant une partie des dons. Par la suite, il devient l’un des Directeurs de la Société Humanitaire de Tampa mais cette activité ne dure que trois ans. Parker décide ensuite de reprendre le chapeau de manager et de s’occuper de groupes de musique country.

En 1944, Tom Parker devient l’impresario du chanteur Eddy Arnold et démontre une belle efficacité : Arnold se classe n°1 des charts de country music durant des mois entiers. En parallèle, Parker tente de se rapprocher de certains politiciens, notamment Lyndon B. Johnson qui va devenir Président des USA. Il offre ses services à Jimmy Davis, qui est chanteur de country mais aussi candidat au poste de gouverneur de Louisiane. Lorsque ce dernier sera élu, il va lui décerner le titre honorifique de « Colonel ».

Lorsque Eddy Arnold se sépare de Tom Parker, ce dernier et prend sous contrat un autre chanteur, Hank Snow, en janvier 1955. Lors du grand show de musique country, Grand Ole Pry, Snow insiste pour prendre un nouveau talent en ouverture de sa prestation : le jeune Elvis Presley. Au vu des réactions des spectatrices, Parker réalise très vite qu’il y a une mine d’or. En août 1955, Hank Snow et Tom Parker créent une entité, Hank Snow Attractions et celle-ci signe un contrat avec Elvis Presley. Quelques mois plus tard, Snow est éjecté de l’équipe et Parker se retrouve seul responsable de la carrière du chanteur. Dépité, Hank Snow dira plus tard que le nom de Tom Parker résonne comme « une insulte a mes oreilles ».

Dès octobre 1955, Parker qui agit alors comme « conseiller spécial » d’Elvis, négocie un contrat d’enregistrement pour Elvis chez RCA, ce qui implique une distribution à l’échelle nationale. Il brise alors les conventions. Alors que d’ordinaire, les directeurs artistiques d’une maison de disque choisissent les chansons que leurs poulains vont interpréter, Parker insiste pour qu’Elvis puisse sélectionner son propre répertoire. RCA cède, le succès du chanteur laissant anticiper un phénomène sans précédent. Et de fait, dès avril 1966, le single « Heartbreak Hotel » est n°1 au hit-parade national, premier d’une très longue série. Dès lors, Parker devient le manager personnel d’Elvis et le gère de façon flamboyante comme lorsqu’il s’occupait de fêtes foraines. Il appelle d’ailleurs Elvis « mon attraction ». Parker montre une efficacité redoutable dans la promotion des disques et dans la vente de produits à l’effigie du King : dès la fin 1956, le chanteur a fait entrer 22 millions de dollars dans les caisses et ses apparitions à la télévision pulvérisent les records d’audience.

Parker casse la coutume de bien d’autres façons : il prend 25 % des revenus d’Elvis (il ira jusqu’à prendre 50 % par la suite), au lieu des 10 % habituels. Pour les concerts, il demande à être payé cash. Par ailleurs, il opère un contrôle drastique sur le chanteur, refusant la plupart des demandes d’interviews, dans les magazines comme à la télévision. Parker justifiera plus tard cette attitude en expliquant qu’il aurait observé que le fait d’apparaître à la télévision dans des talks shows serait néfaste pour la carrière des artistes.

Déjà à cette époque, Parker s’est acharné à brouiller son passé. Il affirme qu’il serait né en Virginie de parents travaillant dans les fêtes foraines. La hantise que l’on découvre qui il a été le hante et il souffre de cauchemars fréquents. Il fait parfois preuve de crises de colères qui terrifient son personnel. Parker règle ses impôts rubis sur l’ongle allant jusqu’à payer davantage que ce qui serait nécessaire : ici comme ailleurs, il veut à tout prix éviter d’attirer l’attention sur lui.

Page 5: Elvis presley, Histoires & Légendes

Alors qu’il accumule les disques d’or, Elvis reçoit son appel pour l’armée. Il est alors suggéré que le chanteur n°1 pourrait accomplir son devoir national en donnant des concerts gratuits pour les troupes. Il semble pourtant que Parker n’appréciait aucunement cette perspective. Il persuade Elvis qu’il serait bon pour son image d’effectuer son service militaire comme tout bon américain. D’une certaine façon, Parker peut ainsi garder Elvis sous sa coulpe, sortant régulièrement des singles enregistrés avant le départ pour l’Allemagne tandis que le troufion, basé en Europe, s’inquiète de son futur musical.

C’est au retour d’Elvis que le Colonel semble jouer un rôle quasi incompréhensible auprès d’Elvis. Bien qu’il soit encore le chanteur n°1 mondial au début des années 60, Presley se voit forcé, bon gré mal gré, de tourner dans 27 films hollywoodiens d’une incroyable niaiserie et d’y interpréter des chansons très éloignées de son style d’origine, le rock’n’roll. Durant cette période où les Beatles et les Rolling Stones détrônent le King, il perd sa crédibilité, sa popularité fond progressivement. Déprimé par cette situation, Elvis se laisse pourtant faire et tourne ces films qu’il abhorre et va jusqu’à chanter des choses à la limite du ridicule. Il semble que le contrat signé avec la MGM ne lui laisse simplement aucun choix lui-même aurait souhaité interpréter des rôles dramatiques à la Marlon Brando. Comment est-il possible que durant ces huit années Parker ait pu avoir une telle emprise sur Presley ?

« Elvis n’a jamais trouvé le courage de quitter le Colonel Parker pour de nombreuses raisons, » nous explique Alana Nash. « En premier lieu, Elvis était quelqu’un de très émotionnel. Comme son propre père était assez faible, il a dit un jour au Colonel qu’il représentait la figure du père pour lui. »

« De plus, Elvis était très inquiet à propos de sa carrière lorsqu’il a quitté l’Amérique pour ses deux années d’armée en Allemagne. Il craignait que la mode du rock’n’roll ne s’éteigne durant son absence et qu’il ne soit plus rien à son retour. Le Colonel a promis à Elvis que s’il accomplissait ses devoirs sans causer d’ennui, il serait une star encore plus importante à son retour, que Parker lui apporterait des contrats lucratifs en tant qu’acteur et qu’il renforcerait sa position chez RCA Records. C’est précisément ce qui s’est passé Frank Sinatra a même organisé un show TV de bienvenue spécialement pour lui, transformant le « rebelle » en « type bien ». Elvis s’est senti fort reconnaissant envers le Colonel pour tout cela et il lui est donc demeuré loyal ».

« Troisièmement, le Colonel a toujours eu Vernon Presley, le père d’Elvis dans sa poche et ce dernier s’est toujours employé à décourager son fils de quitter Parker, lui rappelant que personne n’aurait pu lui faire atteindre une telle position en 1956 et qu’il ne trouverait jamais un aussi bon manager. »

En 1968, lorsque le contrat avec la MGM est achevé, Parker rebondit en organisant le come back d’Elvis, d’abord à la télévision puis sur scène. Toutefois, il est à noter que le chanteur ne s’est jamais rendu en Europe ou au Japon. Il semble que le Colonel redoutait la perspective d’avoir à sortir des USA de peur que l’on puisse découvrir qu’il était en situation irrégulière et qu’il se voit refuser l’entrée sur le sol américain.

« Elvis n’était pas vraiment conscient de l’importance qu’il avait acquise en tant que star, » explique Alana Nash. « Il n’a pas réalisé qu’il pouvait se séparer de son manager pour en trouver un autre qui ait la même vision de son futur : jouer dans des films dramatiques comme il le souhaitait, se produire sur des scènes en Europe et ailleurs… »

Parker cependant a succombé à un terrible démon : celui du jeu. Ses dettes s’élèvent rapidement à 8 millions de dollars et pour renflouer les caisses, il importe qu’Elvis se produise sans cesse sur scène. Déjà accro aux médicaments, le chanteur va sombrer plus que

Page 6: Elvis presley, Histoires & Légendes

jamais dans la dépendance pharmaceutique. Presley commettra quelques belles gaffes : un beau jour, il déclare fièrement qu’il a gagné 5 millions de dollars sans rien faire, ayant cédé les droits d’exploitation de ses disques au Colonel Parker. Il ne réalise alors pas qu’il a été blousé comme un blanc-bec.

Abreuvé de drogues, Elvis quitte officiellement ce monde en 1977 (voir l’article : Est-il vivant ?). Le jour des funérailles, Parker profite de la tristesse de Vernon, le père d’Elvis pour lui faire signer à la hâte un contrat lui assurant la gestion des affaires du chanteur. Quatre ans plus tard, il sera éjecté par la famille Presley à la suite d’un procès relatif aux droits du défunt chanteur. Il n’a toutefois pas repris d’artiste sous contrat

Lorsqu’il s’est éteint en 1997, Tom Parker ne possédait plus qu’un maigre million de dollars sur les cent millions accumulés durant sa carrière. Le reste s’était envolé dans les casinos…

Que dire ? Parker a bâti la première rock’n’roll star d’envergure mondiale et mené sa barque à la façon d’un organisateur de spectacle de fête foraine, faisant preuve d’un sens aigu du spectacle. Pourtant, l’on ne peut s’empêcher de penser que la carrière du King aurait été tout autre s’il avait su se séparer du Colonel au début des années 60. Tom Parker l’a fait, il l’a dompté, il l’a brisé.

« L’on ne peut pas non plus tout imputer à Parker, » temporise pour sa part Alana Nash…

« Comme me l’a dit récemment l’un des amis d’Elvis, Jerry Schilling : les gens qui étaient en charge des films, du management et des disques d’Elvis ne souhaitaient qu’il soit trop intelligent. Ils ont toujours essayé de saper ses idées, de les lui faire apparaître comme idiotes et inexploitables ! »

Si vous souhaitez lire ce livre dans son intégralité pour 1,00 euro, cliquez sur cette page : Elvis Presley - Histoires & Légendes