Hesitation, stephenie meyer

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Tome 3 de la série Twilight en francais

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  • 1. PrologueTous nos subterfuges staient rvls vains.Le cur glac, je le regardai se prparer me dfendre. Son intenseconcentration trahissait une assurance absolue, en dpit du surnombre denos ennemis. Inutile desprer de laide en ce moment mme, les siensluttaient pour leur vie, linstar de ce que lui sapprtait faire pour nous.Saurais-je jamais comment cet autre combat se terminerait ?Dcouvrirais-je qui avait gagn, qui perdu ?Les chances taient minces.Des prunelles noires que le dsir forcens de me voir mortes teintaitdun froce clat guettaient linstant o faiblirait lattention de monprotecteur ; linstant qui marquerait coup sr mon trpas.Quelque part au loin, dans les trfonds de la fort glace un louphurla.

2. 1. UltimatumBella, Je ne comprends pas pourquoi tu obliges Charlie porter des notes Billy, comme si nous tions encore lcole primaire. Si javais envie dete parler, je rpondrais aux Tu as fait un choix, daccord ? Tu ne peux pas gagner sur les deuxtableaux, alors que Dans ennemis mortels , quel mot est trop compliqu pour que tu Ecoute, je sais que je suis nul, mais il ny a pas dautre solutionIl nous est impossible dtre amis quand tu passes ton temps avec unebande de Penser toi trop souvent ne fait quaggraver la situation, alors ncrisplus Oui, tu me manques aussi. Beaucoup. a ne change rien. Dsol. Jacob. Mes doigts caressrent la feuille, sarrtant sur les mots o il avaitappuy si fort sa plume que le papier avait failli se dchirer. Je limaginaisrdigeant cette missive, traant maladroitement de son criture grossireles mots furieux, barrant ligne aprs ligne les phrases insatisfaisantes,jusqu briser de ses mains puissantes, peut tre, son stylo, ce qui 3. expliquerait les taches dencre. Je devinais ses sourcils sombres se fronaitsous leffet de la frustration, les rides de son front. Aurais-je t l-bas, jeme serais esclaffe : Pas la peine de te coller la migraine, Jacob. Crachele morceau. Rire tait cependant la dernire chose dont javais envie, tandis queje relisais ces mots que je connaissais par cur. Sa rponse masupplication transmise par lintermdiaire de Charlie et de Billy,exactement comme des lves de primaire, ainsi quil lavait soulign neme surprenait pas. Javais pressenti la teneur du pli avant de lavoir ouvert.Mtonnait toutefois la force avec laquelle chacune de ses lignesratures me blessait, croire que les pointes des lettres taient tranchantes.Et puis, tous ces dbuts rageurs cachaient mal locan de douleur ; lasouffrance de Jacob me tailladait plus que ma propre peine.Fourrant la page froisse dans ma poche arrire, je descendis toutesjambes au rez-de-chausse. Juste temps ! Le bocal de sauce tomate queCharlie avait flanqu dans le micro-ondes navait effectu quun tourlorsque jinterrompis vivement les oprations.- Quest-ce que jai encore fait ? grommela mon pre.- Tu es cens retirer le couvercle avant, papa. Le mtal bousille les micro-ondes.Tout en parlant, jouvris le bocal, en vidai la moiti dans un bol queje plaai au four avant de ranger le restant de sauce dans le rfrigrateur.Jenclenchai la minuterie et appuyai sur le bouton.- Men suis-je mieux tir avec les ptes ? senquit Charlie.Il mavait observe agir, les lvres pinces. Je regardai, la cuisinire,la casserole source de lodeur qui mavait alerte.- Remuer aide, lui rpondis-je gentiment.Dnichant une cuiller, jentrepris de dcoller le tas gluant qui avaitattach au fond. Il soupira.- Explique-moi un peu ce quil tarrive, lanai-je.Mon pre croisa les bras sur son torse et fixa la pluie qui, derrire lesfentres, tombait a seaux.- Je ne vois pas de quoi tu parles, marmonna-t-il. Charlie aux fourneaux ? Jtais perplexe. Ajoutons-y son attituderevche. Edward ntait pas encore l ; dordinaire, mon pre rservait cegenre de comportement mon petit ami, dployant des trsorsdimagination tant dans ses paroles que dans ses postures afin de lui fairesentir quel point il ntait pas le bienvenue. Ces efforts taient dailleurs 4. inutiles Edward savait trs prcisment ce que pensait Charlie sans avoirbesoin de ces reprsentations. Petit ami Je me surpris mordiller lintrieur de ma joue, en proie une tension familire. Ces mots ntaient pas les bons, nexprimant en rienlengagement ternel qui tait le ntre. Certes, les termes destine ou sort sonnaient ridicules dans une conversation courante. Edward enavait un autre lesprit, origine de ma tension. Rien que dy songer, jtaisnerveuse. Fiance . Pouah ! Jen frissonnai.- Aurais-tu quelque chose mannoncer ? repris-je. Depuis quandprpares-tu le dner ? Ou, du moins, ty essayes-tu ? ajoutai-je enenfonant dans leau les spaghettis amalgams.- Nulle loi ninterdit que je cuisine dans ma propre maison, rtorquaCharlie avec un haussement dpaules.- Tu serais en effet au courant, rpliquai-je avec bonne humeur enregardant le badge de shrif pingl sur son blouson de cuir.- Trs drle. Il retira le vtement, comme si, avant mon coup dil, il avait oubliquil le portait encore, et alla le suspendre la patre. La ceinture et ltuide son pistolet sy trouvaient dj. Il navait pas jug ncessaire de lesemporter au commissariat depuis plusieurs semaines. Les disparitionssusceptibles de troubler la petite ville de Forks, dans ltat de Washington,avaient cess. Plus aucun tmoin ne venait jurer avoir aperu demystrieux loups gants dans les bois de cette rgion ternellementhumide.Je ninsistai pas, sachant que Charlie finirait par mavouer en tempsvoulu ce qui le proccupait. Il tait dun naturel taciturne; ses tentativesmalheureuses pour orchestrer le dner ma place laissaient supposer quilavait nombre de choses dire ce soir-l. Par habitude, je jetai un coupdoeil la pendule, geste que javais tendance rpter frquemment cette heure. Plus que trente minutes.Les aprs-midi constituaient ltape la plus difficile de mes journes.Depuis que mon ancien et meilleur ami (loup-garou de surcrot) JacobBlack avait cri haut et fort que je faisais de la moto en douce - trahisondestine ce que je sois punie et prive de la compagnie de monamoureux (et vampire) Edward Cullen -, ce dernier navait lautorisation deme frquenter que de dix-neuf vingt et une heures trente, dans leconfinement de ma maison et sous la surveillance rapproche, rprobatriceet grincheuse de mon pre. Ce chtiment sajoutait aux mesures de 5. rtorsion que javais rcoltes pour avoir disparu sans explication duranttrois jours et mtre amuse sauter dans la mer du haut dune falaise.Certes, je continuais ctoyer Edward au lyce, Charlie ne pouvantdcemment sy opposer. Par ailleurs, Edward passait presque toutes sesnuits dans ma chambre, ce dont mon gniteur ntait toutefois pas averti.La facult quavait mon ami de se hisser sans bruit jusqu ma fentre, ltage, tait aussi utile que sa capacit dchiffrer les penses de monpre.Bref, les aprs-midi avaient beau tre les seuls moments o jtais sparedEdward, ils me pesaient, interminables. Jendurais pourtant macondamnation sans protester : et dune, je lavais amplement mrite ; et dedeux, je naurais pas support de heurter Charlie en dmnageant (jtaismajeure, aprs tout), alors quune sparation beaucoup plus dfinitive sedessinait lhorizon, ce quil ignorait.Bougon, il sattabla et dplia le journal humide ; quelques secondes aprs,il mettait des claquements de langue mcontents.- Je ne comprends pas pourquoi tu lis les nouvelles si a doit te mettredans cet tat, papa.- Voil pourquoi tout le monde souhaite habiter de petites villes, luda-t-ilen plissant le nez.- Allons bon ! Que reproches-tu aux grandes, prsent ?- Seatle est en bonne position pour dcrocher le titre de capitale dumeurtre. Cinq homicides non lucids ces deux dernires semaines. Tu tevois vivre dans pareille ambiance ?- Il me semble que Phoenix est plus dangereuse, or jy ai vcu des annes.Et je navais jamais autant risqu dtre victime dun assassinat quedepuis mon installation dans la charmante bourgade de Forks quil croyaitsi sre. Plusieurs tueurs taient encore mes trousses, du reste. Dans mamain, la cuiller trembla, dclenchant les frissons de leau.- Eh bien moi, on me paierait que je refuserais dy emmnager, dcrtaCharlie.Renonant sauver notre repas, je le servis. Je dus recourir uncouteau viande pour couper les spaghettis.Mon pre affichait une mine penaude. Il recouvrit sa part de sauce etsy attaqua. Je suivis son exemple sans grand enthousiasme. Nousmangemes en silence pendant quelques instants. Charlie tant retourn ses articles, je memparai de mon exemplaire dfrachi des Hauts de 6. Hurlevent et tentai de me perdre dans lAngleterre de la fin du XIXe sicleen attendant quil daigne madresser la parole. Jen tais au moment o Heathcliff revient, lorsque Charlie se racla lagorge et jeta le journal par terre.- Cest vrai, dit-il, javais une raison de prparer... Va. (Il brandit safourchette en direction de son assiette.) Je voulais te parler. Je reposai mon livre ; la reliure en tait si abme quil scrasa platsur la table.- Il suffisait de le dire, rpondis-je. Il acquiesa, sourcils froncs. Je tcherai de men souvenir, la prochaine fois. Je pensais que tedbarrasser de la corve de cuisine te mettrait de meilleure humeur.- Et a marche ! ris-je. Tes talents de chef mont ramollie comme uneguimauve. Allez, je tcoute.- a concerne Jacob.- Quest-ce quil a, Jacob ? ripostai-je, lvres serres, en me fermantcomme une hutre.- Du calme, Bella. Je sais que tu ne lui as pas pardonn son mouchardage,mais il a eu raison. Il sest comport de manire responsable.- Pardon ? moffusquai-je en levant les yeux au ciel. Enfin, passons. Alors,quen est-il ? Cette question anodine rsonna dans mon esprit, rien moins quebanale. Quen tait-il de Jacob, en effet ? Quallais-je faire son sujet ? Mon ancien ami tai dsormais... quoi? Mon ennemi ?- Ne tnerve pas, daccord ? plaida Charlie, les traits soudain soucieux.- Pourquoi mnerverais-je ?- Eh bien... Edward est galement concern.Je grimaai.- Je lui permets de venir ici, non ? se dfendit mon pre.- Oui. Pour des visites chronomtres la seconde prs. propos, nepourrais-tu pas mautoriser sortir dici ? Jai t plutt sage, non ? Le tout dit sur le ton de la plaisanterie. Je savais pertinemment quejtais punie jusqu la fin de lanne scolaire.- Justement, jy arrivais. De manire assez inattendue, le visage de Charlie se fendit dungrand sourire. Un instant, il parut rajeunir de vingt ans. Jentrevis unevague possibilit dans ce sourire, dcidai cependant de rester prudente. 7. - Excuse-moi, je suis perdue. De quoi discutons-nous ? De Jacob ?DEdward ? De ma punition ?- Un peu des trois. Et... le lien ?- Bon, daccord, soupira-t-il en levant les mains comme sil rendait lesarmes. Jestime que tu mrites une remise de peine pour boncomportement. Jai rarement rencontr dadolescente aussi peupleurnicheuse que toi.- Tu es srieux ? mcriai-je, ahurie. Je suis libre ? Do venait cette soudaine mansutude ? Javais t certaine de resteraux arrts jusqu ce que je quitte dfinitivement la maison, et Edwardnavait rien dcel de ce retournement de situation dans lesprit de monpre. Ce dernier leva un doigt.- une condition.- Super, grognai-je, douche.- coute, il sagit plus dune requte que dun ordre. Tu es libre. Jespreseulement que tu utiliseras cette libert de manire... judicieuse.- Prcise. Une fois encore, il poussa un soupir.- Jai conscience que la compagnie dEdward te suffit...-Je passe aussi du temps avec Alice, linterrompis-je. La sur dEdward ntait pas soumise aux heures de visite ; elle allaitet venait comme bon lui semblait. Entre ses mains habiles, Charlie ntaitquun jouet.- Oui, mais tu as des amis en dehors des Cullen. Ou du moins, tu en avais. Nous nous dvisagemes un long moment.- Quand as-tu discut avec Angela Weber pour la dernire fois ? finit-ilpar lcher.- Vendredi midi, ripostai-je aussitt. Avant le retour dEdward Forks, mes camarades de classe staientdiviss en deux groupes que jaimais opposer en bons et mchants, nous et eux . Les gentils taient Angela, son amoureux BenCheney, ainsi que Mike Newton. Tous trois mavaient gnreusementpardonn ma folie aprs quEdward mavait quitte. Lauren Mallory taitlme damne de la bande des vilains, laquelle regroupait pratiquementtous mes pairs, y compris ma premire amie, Jessica Stanley, qui paraissaitsentendre merveille avec le clan des anti-Bella. 8. Edward revenu dans le jeu, la ligne de sparation stait encoreaccentue. Sa rapparition avait laiss des traces sur lamiti que meportait Mike. Angela, elle, mtait reste loyale, et Ben avait suivi lemouvement. En dpit de laversion naturelle que la plupart des humainsprouvaient pour les Cullen, Angela se faisait un point dhonneur desasseoir au ct dAlice, tous les jours la cantine. Au bout de quelquessemaines, elle avait mme sembl tre laise. Il tait difficile de resterinsensible au charme des Cullen une fois quon les laissait exercer leurpouvoir de sduction.- En dehors du lyce, insista Charlie, me ramenant la ralit.- Comment aurais-je vu qui que ce soit en dehors du lyce ? Tu maspunie, je te rappelle. Angela a un petit copain, elle aussi. Elle est toujoursfourre avec. Si tu dcides de me lcher la bride, nous pourrons sans doutesortir tous les quatre ensemble, dailleurs.- Jentends bien. Nempche... Toi et Jake tiez comme des siamois.Maintenant...- Va droit au but, le coupai-je. Quelle est ta condition ?- Jestime que tu ne devrais pas ngliger tes amis au profit du seul Edward,Bella, lana-t-il dune voix ferme. Ce nest pas bien. Je crois aussi que tavie serait plus quilibre si tu y intgrais dautres personnes. Ce qui sestpass en septembre dernier...Je sursautai.- Eh bien, se justifia-t-il, si tu avais eu une vie en dehors dEdward Cullen,les choses se seraient droules diffremment- Non, elles auraient t pareilles, murmurai-je.- Va savoir.- Quattends-tu de moi ?- Que tu mettes profit ta libert pour frquenter dautres camarades. Quetu rtablisses un quilibre.- Daccord, acquiesai-je lentement. As-tu dfini des quotas ?- Restons simples, maugra-t-il. Je te demande simplement de ne pasoublier tes amis.Mes amis. Ctait un dilemme avec lequel je me dbattais depuis unmoment dj. Des gens que, pour leur propre scurit, je ne recontacteraisplus jamais aprs mon bac. Quelle tait la meilleure faon dagir ? Les voirle plus possible tant que cela mtait donn ou amorcer ds prsent notresparation, en douceur ? Cette seconde solution, avec ce quelle supposaitde prparation, me rebutait. 9. - Surtout Jacob, ajouta Charlie. Un problme encore plus pineux que le premier, qui mobligea choisir soigneusement mes mots.- a risque dtre... difficile.- Les Black sont presque de la famille, Bella, protesta Charlie sur un tonsvre et trs paternaliste. Jacob a t un trs, trs bon ami pour toi.- Jen suis consciente.- Il ne te manque donc pas ? Ma gorge se noua, et je dus toussoter deux reprises avant de russir parler.- Si. Beaucoup, mme.- Alors, o est la difficult ? Malheureusement, je navais pas le droit de le lui expliquer. Lespersonnes normales, les humains comme Charlie et moi, ntaient pascenses connatre lexistence clandestine de lunivers peupl de mythes etde monstres qui ctoyait le ntre. Ctait enfreindre les rgles. Pour tre aucourant, je pataugeais dans les ennuis. Je ne souhaitais pas que mon prese retrouve dans une situation identique.- Jacob et moi sommes... en conflit, chuchotai-je. propos de notreamiti. Elle ne lui suffit pas toujours, apparemment. Cette excuse, relle quoique insignifiante, ntait rien en comparaisonde la ralit - la meute de loups-garous de Jack hassait copieusement leclan vampirique dEdward, et moi avec, puisque javais lintention demunir la famille. Il mtait impossible de rgler ce diffrend avec Jacobau travers dune simple lettre, et il refusait de rpondre mes coups de fil.Du ct des Cullen, ma dcision de clarifier en personne la situation avecles loups-garous tait trs mal accepte.- Edward ne supporterait donc pas un petit dfi ? se moqua Charlie.- Il ny a aucun dfi qui tienne ! rtorquai-je, peu amne.- En vitant Jake, tu le blesses. Il prfre sans doute une amiti rien dutout. Parce que, maintenant, ctait moi qui lvitais ?- Je suis certaine quil se fiche de mon amiti, objectai-je avec amertume.Je me demande o tu es all pcher a.- Bah ! le sujet a d venir sur le tapis avec Billy, marmonna Charlie, unpeu gn. Lui et toi jacassez comme deux vieilles pies ! memportai-je enplantant ma fourchette dans mes ptes froides. 10. - Billy sinquite pour Jacob. Il ne va pas bien... il est dprim. Si ces mots marrachrent une grimace, je ne pipai mot.- Et puis, poursuivit mon pre, tu tais si heureuse aprs avoir pass unejourne avec lui.- Je suis heureuse, grondai-je. Le contraste entre mes paroles et mon ton brisa soudain la tension.Charlie clata de rire, je ne pus mempcher de me joindre lui.- Daccord, daccord, admis-je. Lquilibre.- Et Jacob.- Je te promets dessayer.- Bien. Je compte sur toi, Bella. Oh ! propos, tu as du courrier. Je laipos prs de la cuisinire. Je ne ragis pas, encore partage entre regrets et colre. Quant aucourrier, je nen attendais pas, ayant reu un colis de ma mre la veille.Srement de la pub. Charlie se leva et stira puis alla porter son assiettedans 1vier. Avant douvrir le robinet pour la rincer, il me lana unepaisse enveloppe qui glissa sur la table et heurta mon coude.- Merci, marmonnai-je, tonne par son insistance. Je dcouvris alors le nom de lexpditeur, luniversit dAlaska.- Ils ont t rapides, commentai-je. Un refus, sans doute. Jai srement ratla date limite de dpt des dossiers dinscription. Mon pre se borna rigoler.- Elle est dj ouverte, protestai-je en le fusillant du regard.- Jtais curieux.- Ton attitude me choque, shrif. Lire le courrier des autres est un crimefdral.- Tais-toi et regarde. Je sortis de lenveloppe une lettre et un emploi du temps.- Flicitations ! sexclama Charlie avant que jaie parcouru la moindreligne. Ce sont les premiers accepter ta candidature.- Merci.- Il faudra que nous en discutions. Jai quelques conomies...- Ne temballe pas ! Je ne toucherai pas largent de ta retraite, papa. Jai lelivret dpargne destin mes tudes, je te rappelle. Enfin, ce quil en restait, sachant quil ny avait jamais eu grand-chosedessus.- Ces facs sont trs onreuses, Bella, objecta-t-il. Jai envie de taider. Tunes pas oblige de texiler en Alaska parce que cest moins cher. 11. Ce qui ntait absolument pas la raison de lexil en question. Ctaitlloignement qui avait prim, justement, suivi par lavantage nonngligeable que prsentait Juneau dtre situe une latitude garantissanten moyenne trois cent vingt et un jours de mauvais temps par an. Lapremire exigence tait la mienne, la seconde celle dEdward.- Jai les moyens, mentis-je. Il existe aussi des tas de financements. Onobtient facilement des prts.Ctait l un coup de bluff un peu gros, car je ne mtais gurerenseigne sur le sujet.- Et..., commena Charlie avant de sinterrompre.- Quoi ?- Rien. Je... je me demandais juste quels taient les plans dEdward pourlanne prochaine.- Ah.- Donc?On frappa soudain la porte, ce qui me sauva. Mon pre soupira, jebondis sur mes pieds.- Jarrive ! criai-je, tandis que Charlie marmonnait dans sa barbe quelquechose qui ressemblait Quil aille au diable ! .Lignorant, jallai ouvrir, tirant le battant la vole avec unempressement ridicule. Apparut alors mon miracle personnel. Malgr letemps, je succombais encore la perfection de ses traits, que je netiendrais jamais pour acquise, jen tais persuade. Mes yeux balayrent lapleur de son visage, sa mchoire carre et dure, la courbe plus tendre deses lvres pleines qui, en cet instant, me souriaient, la ligne droite de sonnez, langle saillant de ses pommettes, ltendue lisse de son front en partieobscurcie par une mche de cheveux cuivre que la pluie avait foncs, lesdotant dune couleur bronze...Je gardai ses prunelles pour la fin, sachant que, quand jy plongeraisles miennes, javais toutes les chances de divaguer. Larges, allumes parun or liquide et encadres de cils pais et sombres, elles ne manquaientjamais de dclencher en moi des motions extraordinaires et detransformer mes os en ponges. Je fus prise dun lger vertige, peut-treparce que javais oubli de respirer. Une fois de plus.Un mannequin masculin aurait vendu son me pour un visage pareil.Ctait dailleurs le prix exact de la transaction - une me. 12. Non. Je ne le croyais pas, et je me sentis coupable davoir voqu lacomparaison, et soulage, comme souvent, dtre lunique personne aumonde dont les penses restaient mystrieuses Edward.Je tendis la main et soupirai daise lorsque ses doigts glacs serefermrent autour des miens. Son contact mapportait toujours un trangeapaisement, comme si je cessais brusquement davoir mal.- Salut !Accueil quelque peu banal, dont je mexcusai dun pauvre sourire. Ilcaressa ma joue avec le revers de sa main sans rompre la chane de nosdoigts entrelacs.- Bon aprs-midi ?- Lent.- Le mien aussi.Il porta ensuite mon poignet son nez et, paupires fermes, humama peau, lair bat. Jouissant du bouquet tout en rsistant au vin, ainsi quillavait formul un jour. Je savais que lodeur de mon sang, plus tentatricepour lui que celle de nimporte quel autre, diffrence identique celle quisparait le vin de leau pour un alcoolique, provoquait en lui une soifdvorante et douloureuse. Il semblait cependant moins la fuir quaupa-ravant. Jimaginais mal les efforts herculens que ce simple geste cachait,mme si jtais triste quil dt dployer autant de volont pour se contenir.Je me rconfortais en songeant que, bientt, jaurais cess dtre pour luiune source de souffrance.Charlie approcha en tranant des pieds, sa manire dexprimer sarprobation coutumire lgard de notre invit. Edward ouvrit aussitt lesyeux, et nos mains retombrent, toujours noues.- Bonsoir, Charlie.Mon amoureux ne se dpartait jamais de son implacable politesse,bien que mon pre ne la mritt pas. Il le gratifia dailleurs dungrognement boudeur et se planta derrire nous, bras croiss. Ces dernierstemps, il jouait son rle de tuteur avec un zle qui frlait labsurde.- Je tai apport de nouvelles demandes dinscription, mannona Edwarden brandissant une enveloppe de papier Kraft rebondie.Il tenait galement un rouleau de timbres, pareil une bague autourde son auriculaire. Je gmis. Restait-il encore beaucoup duniversitsauxquelles il ne mavait pas contrainte postuler ? Comment sedbrouillait-il dailleurs pour dnicher ces opportunits ? Lanne tait dj 13. si avance ! Il me sourit comme sil lisait dans mon esprit, et jen conclusque mes penses saffichaient clairement sur mes traits.- Les inscriptions ne sont pas toutes closes, enchana-t-il. Et puis, certainesfacs font des exceptions. Je ne devinais que trop bien les motifs qui se cachaient derrire cesdrogations. Et la quantit de dollars quelles impliquaient. Edwardsesclaffa.- Au boulot ! lana-t-il en dsignant la table de la cuisine. Pinant les lvres, Charlie nous embota le pas, mme sil pouvaitdifficilement objecter aux activits prvues ce soir-l, lui qui me harcelaitquotidiennement pour que je choisisse enfin une universit. Je dbarrassairapidement le couvert, tandis quEdward empilait un nombreimpressionnant de formulaires. Lorsque je dplaai Les Hauts deHurlevent sur le plan de travail, il sourcilla. Il sapprtait lcher uncommentaire, mais mon pre lui coupa lherbe sous le pied.- propos de candidatures, Edward, lana-t-il sur un ton encore plusboudeur (il tchait de ne jamais sadresser mon ami directement, serenfrognait quand il ne pouvait lviter), Bella et moi parlions justement delanne prochaine. As-tu dcid de lendroit o tu poursuivrais tes tudes ?- Pas encore, rpondit suavement Edward. Jai t accept dans plusieursfacs. Jhsite encore.- O as-tu t admis ?- Syracuse, Harvard, Dartmouth. Sans compter luniversit dAlaska, dontjai reu laccord hier. Edward se dtourna lgrement et madressa un clin dil. Jtouffaiun rire.- Harvard ? Dartmouth ? marmonna Charlie, incapable de dissimuler sonadmiration. Eh bien, cest... quelque chose. Bien sr, lAlaska ne sauraitrivaliser avec les tablissements de lIvy League1. Ton pre souhaiteraitsrement que tu...- Carlisle se range toujours mes dcisions, quelles quelles soient.- Hum.- Devine un peu, Edward ! mexclamai-je dune voix joyeuse, histoiredentrer dans son jeu.- Quy a-t-il, Bella ?- Moi aussi, je suis prise luniversit dAlaska, linformai-je en montrantlenveloppe.1Groupement des universits amricaines les plus prestigieuse. 14. - Flicitations ! Quelle concidence ! Le front pliss, Charlie nous toisa lun aprs lautre.- Bon, grommela-t-il, je vais regarder le match. Vingt et une heures trente,Bella. Son ordre coutumier avant de nous laisser tranquilles.- Papa ? Tu nas pas oubli notre petite conversation sur ma libert ? Il soupira.- Tu as raison. Vingt-deux heures trente, alors. Nous sommes en semaine,tu vas au lyce demain.- Bella nest plus punie ? feignit de stonner Edward avec unenthousiasme toutefois crdible.- Sous certaines conditions, prcisa mon pre entre ses dents. En quoi a teconcerne, dailleurs ? Je lui fis les gros yeux, il ne sen aperut pas.- Je suis content de lapprendre, rien de plus. Alice trpigne depuis quellena plus de partenaire de shopping. Je suis sr que Bella adorerait respirerun peu lair de la grande ville.- Pas question ! rugit Charlie.- Voyons, papa, o est le problme ?- Je tinterdis daller Seatle en ce moment.- Pardon ?- Je tai parl de cette affaire de meurtres. Ctait dans le journal. Seattleest en proie une espce de guerre des gangs, alors tu vites de ty rendre.Compris ?- Jai plus de chances dtre frappe par la foudre que de...- Vous avez raison, Charlie, minterrompit Edward, et je ne pensais pas Seattle. Plutt Portland. Moi non plus, je ne tiens pas ce que Bella aillel-bas. Cela va de soi. Je lui lanai un regard ahuri. Il stait empar du journal et en lisait lapremire page. Bah ! Il avait d dire a pour calmer mon pre. Lidemme que je coure un risque alors que jtais en compagnie dAlice oudEdward tait tout bonnement risible. Y compris face au pire tueur ensrie qui soit. Quoi quil en soit, la ruse fonctionna. Aprs une minute desilence, Charlie haussa les paules.- Parfait, gronda-t-il avant de disparatre grands pas dans le salon, sansdoute press dassister louverture du match. Jattendis que la tlvision couvre mes paroles pour ragir.- Quest-ce que... 15. - Un instant, me coupa Edward sans lever les yeux du journal mais enpoussant le premier formulaire de demande dinscription vers moi. Tudevrais pouvoir rutiliser ta lettre de motivation pour celui-l, ajouta-t-il.Et leurs questions sont les mmes.Charlie nous coutait donc. En soupirant, je me mis fournir lesennuyeuses informations quon exigeait de moi : nom, adresse, professiondes parents... Au bout de quelques minutes, je redressai la tte. Edwardregardait pensivement par la fentre, prsent. Je retournai ma tche,remarquant pour la premire fois de quel tablissement il sagissait.Agace, jcartai les papiers dun geste impatient.- Bella ?- Dartmouth, Edward ? Sois srieux !Il sempara du formulaire et le replaa doucement devant moi.- Je crois que le New Hampshire te plaira, dit-il. Ils proposent des cours dusoir qui me conviendront, et les forts reclent plein de promesses pour lesmarcheurs de mon genre. La faune y est fabuleuse.Il me gratifia du sourire en coin auquel jtais incapable de rsister. Jepris une profonde inspiration.- Je tautoriserai me rembourser tes tudes si a doit te rendre heureuse,me jura-t-il. Jirai mme jusqu te compter des intrts.- Comme sils allaient maccepter sans un norme pot-de-vin ! Ou tais-jecomprise dans la promesse de don ? Une nouvelle aile Cullen pour labibliothque ? Cest dgotant. Pourquoi faut-il que nous revenions sur cesujet ?- Sil te plat, Bella, contente-toi de remplir ces documents. Demander necote rien, non ?- Tu sais quoi ? mnervai-je. Il nen est pas question.Je comptais me jeter sur les formulaires pour les rouler en boule etles balancer la poubelle, mais ils disparurent avant que je naie eu letemps desquisser un mouvement. Je contemplai la table vide, puisEdward. Il semblait ne pas avoir boug, mais les papiers taient sans doutedj enfoncs dans sa poche.- quoi joues-tu ? grognai-je.- Jimite trs bien ta signature. Et tu as dj rdig ta lettre de motivation.- Tu dpasses les bornes, fulminai-je en prenant soin de parler bas, des foisque Charlie ne soit pas entirement absorb par son match. Je nai nulbesoin de postuler ailleurs, jai t admise en Alaska. L-bas, jai presquede quoi rgler mon premier semestre. Cest un alibi aussi bon quun autre. 16. Inutile de jeter largent par les fentres, que ce soit le tien ou le mien. Unclair chagrin traversa son visage.- Bella...- Ne recommence pas. Jai accept de jouer le jeu pour donner le change Charlie, mais nous savons trs bien toi et moi que je ne serai pas en tat desuivre des tudes lautomne prochain. Et quun loignement seraindispensable.Mes connaissances concernant les dbuts dun vampire nouveau-ntaient floues. Edward avait beau ne jamais tre entr dans les dtails - ilprfrait viter le sujet -, jtais consciente que ce ntait pas joli-joli. Lecontrle de soi ncessitait apparemment pas mal dannes dentranement.Il tait exclu que je suive autre chose que des cours par correspondance.- Je croyais que nous navions pas encore arrt la date, me rappeladoucement Edward. Tu apprcieras peut-tre de passer un ou deuxsemestres la fac. Il y a beaucoup dexpriences humaines que tu nas pasencore vcues.- Je les vivrai aprs.- Elles ne seront plus humaines, alors. Tu nauras pas de deuxime chance,Bella.- Sois raisonnable, il est trop dangereux de reculer lchance.- Nous avons du temps devant nous. Je le fusillai du regard. Du tempsdevant nous ? Ben voyons ! Une dame vampire aux instincts sadiquessefforait se venger la mort de son compagnon en me tuant, de prfrenceau moyen de longues et pnibles mthodes. Victoria ntait donc pas unsouci ? Ha ! Et puis, il y avait les Volturi, la famille royale des vampires etson arme de guerriers, qui insistaient pour que mon cur cesse de battre,peu importe comment, dans un futur proche, car il tait interdit auxhumains de savoir quils existaient. Et Edward osait affirmer que je navaisaucune raison de maffoler ? Certes, Alice montait la garde. Son frrecomptait sur ses visions trangement justes du futur pour nous avertir.Toutefois, il tait insens de continuer courir autant de risques.De toute faon, javais remport cette victoire. Le jour de matransformation avait t provisoirement fix - ce serait dici quelquessemaines, aprs lobtention de mon diplme.Mon estomac se tordit quand je me rendis compte quel point ledlai se rapprochait. Bien sr, ce changement tait ncessaire. Il tait la clde mon accession ce que je dsirais plus que tout au monde. Mais il yavait Charlie, assis dans la pice voisine profiter de son match, comme 17. tous les soirs. Quant ma mre, Rene, exile dans sa Floride ensoleille,elle navait pas renonc me supplier de venir passer lt sur la plageavec elle et son nouveau mari. Sans parler de Jacob qui, linverse de mesparents, savait trs exactement ce qui se produirait lorsque je disparatraispour quelque universit lointaine. Mme si jarrivais retarder les soup-ons de mes parents, en prtextant le cot des voyages, une maladie, leprt de mes tudes rembourser, Jacob ne serait pas dupe.Un instant, lide de son dgot supplanta mes autres chagrins.- Il ny a pas durgence, Bella, chuchota Edward, le visage tordu par lapeine que lui inspiraient les tourments quil lisait sur mes traits. Je nelaisserai personne te faire du mal. Tu peux prendre tout le temps que tuveux.- Je suis presse, murmurai-je. Moi aussi, jai envie dtre un monstre.Il serra les mchoires.- Tu dis des btises.Il jeta brutalement le journal humide sur la table. Son doigt se posacomme une pe sur le gros titre de la une : MEURTRES EN SRIE, LA POLICE CRAINT UN RGLEMENTDE COMPTES ENTRE BANDES RIVALES- Quel rapport ?- On ne plaisante pas avec les monstres, Bella.De nouveau, je parcourus lintitul de larticle puis relevai la tte verslui.- Cest... cest luvre dun vampire ? soufflai-je.Il eut un sourire sans joie.- Tu serais surprise du nombre de fois o mon espce est lorigine deshorreurs qui nourrissent vos informations dhumains, dit-il dune voixfroide. Ils sont faciles identifier, pour peu quon sache ce que loncherche. Ce journal nannonce rien dautre que la prsence dun vampirenouveau-n, lch dans les rues de Seattle. Sanguinaire, sauvage,incontrlable. Comme nous lavons tous t nos dbuts.vitant ses yeux, je balayai derechef larticle des yeux.- Nous exerons une surveillance depuis quelques semaines, enchana-t-il.Tous les signes sont l - disparitions inexpliques, toujours la nuit,cadavres abandonns nimporte comment, manque de preuves... Oui, unbb tout neuf, un nophyte que personne ne semble avoir pris en charge.(Il poussa un gros soupir.) Ce nest pas notre problme. Nous ny aurionsmme pas prt attention si les vnements ne se droulaient pas aussi 18. prs de chez nous. Cela arrive tout le temps, aprs tout. Lexistence demonstres a des consquences forcment monstrueuses.Jeus beau mefforcer dignorer les noms qui stalaient sur la page, ilsme sautrent la figure comme sils avaient t crits en gras. Cinqpersonnes qui lon avait arrach la vie, cinq familles en deuil. Ces nomsrendaient les meurtres concrets. Maureen Gardiner, Geoffrey Campbell,Grce Razi, Michelle OConnell, Ronald Albrook. Des gens qui avaientdes parents, des enfants, des amis, des chiens et des chats, des boulots etdes espoirs, des projets et des souvenirs, un avenir...- Mon cas sera diffrent, soufflai-je, en partie pour moi seule. Tu ne melaisseras pas devenir comme a. Nous irons nous installer en Antarctique.Edward ricana, brisant la tension.- Des pingouins ? Formidable !Partant dun rire tremblotant, je repoussai le journal, qui tomba sur lesol. Il tait normal quEdward songet aux possibilits de chasse. Lui et safamille de vgtariens qui stait dvous la sauvegarde des vieshumaines prfraient la saveur des grands prdateurs naturels quand ilsagissait de satisfaire leurs besoins alimentaires.- LAlaska, repris-je. Mais un endroit un peu plus recul que Juneau. Unendroit fourmillant de grizzlis.- Les ours polaires sont trs froces. Et les loups plutt imposants.Je me raidis aussitt.- Quy a-t-il ? sinquita-t-il. Lorsquil comprit, il se figea son tour.- Bon, daccord, maugra-t-il, tant pis pour les loups, si lide te dplattant que a.- Il tait mon meilleur ami, Edward, balbutiai-je, peine de devoirmexprimer au pass. Il est logique que lide me rebute, non ?- Pardonne ma maladresse, rpondit-il, toujours aussi compass. Jenaurais pas d suggrer cela.- Ce nest pas grave. Je baissai les yeux sur mes mains serres en deuxpoings. Il y eut un silence, puis son doigt froid glissa sous mon menton,mobligeant relever la tte. Son expression stait adoucie.- Dsol. Vraiment.- Je sais, je sais que ce nest pas pareil. Je naurais pas d ragir ainsi.Seulement... il se trouve que je pensais Jacob, avant que tu narrives.Jhsitai. Ses prunelles fauves paraissaient sassombrir chaque fois que jeprononais ce prnom. Mes intonations se firent suppliantes, du coup.- Daprs Charlie, il ne va pas bien. Il souffre, et cest ma faute. 19. - Tu nes coupable de rien, Bella.- Il faut que jarrange les choses, je le lui dois bien. Dailleurs, cest lunedes conditions de Charlie... Encore une fois, son expression se durcit, lui donnant des airs destatue.- Il est hors de question que tu tranes prs dun loup-garou sans protection,Bella, objecta-t-il. Or, si lun de nous pntrait sur leur territoire, celaromprait la trve. Tu souhaites donc dclencher une guerre ?- Non ! Bien sr que non !- Alors, inutile den discuter plus avant. Il dtourna la tte, cherchant un autre sujet de conversation. Ses yeuxsarrtrent derrire moi, et il eut un sourire, bien que son regard resttcirconspect.- Je suis heureux que Charlie ait dcid de tautoriser sortir. Tu asvraiment besoin daller dans une librairie. Je nen reviens pas que tu relisesLes Hauts de Hurlevent. Tu dois le connatre par cur, non ?- Contrairement toi, tout le monde na pas une mmoire photographique.- Mmoire photographique ou pas, jai du mal comprendre comment tupeux aimer ce roman. Les personnages sont des gens horribles qui sepourrissent mutuellement lexistence. Quon ait lev Heatheliff et Cathyau rang de Romo et Juliette ou dElizabeth bennet et de M. Darcy melaisse pantois. Ce nest pas une histoire damour, cest une histoire dehaine.- Tu es vraiment nul en littrature.- Sans doute parce que les vieilleries ne mimpressionnent pas. Il affichait un air satisfait, content de mavoir entranait sur unnouveau terrain.- Franchement, reprit-il, pourquoi le relire sans cesse ? Quest-ce quitattire autant dans ce livre ? Il tait rellement intress, maintenant, tchant, une fois encore, dedbobiner les mandres compliqus que suivait mon esprit. Tendant lebras, il posa sa main sur ma joue.- Je ne sais pas trop, avouai-je, dsarme par son authentique curiosit etperturbe par lintensit de ses prunelles qui me scrutaient. Linluctable,peut-tre. La faon dont rien narrive les sparer, ni lgosme de Cathy,ni la malfaisance de Heatheliff, ni mme la mort... Edward mdita mes paroles, puis un sourire moqueur se dessina surses lvres. 20. - Lhistoire serait mieux si chacun tait dot dune qualit rdemptrice,commenta-t-il.- Lamour quils prouvent lun pour lautre est leur seule qualitrdemptrice.- Alors, je te souhaite davoir plus de jugeote queux et de ne pascommettre lerreur de tamouracher dun tre funeste.- Il est un peu tard pour tinquiter de celui dont je tomberai amoureuse.Du reste, je crois mtre plutt bien dbrouille.- Jen suis ravi.- Quant toi, je te souhaite de ne pas tprendre dune goste commeCathy. Cest elle qui est lorigine de tous leurs malheurs, pas Heatheliff.- Je te promets de rester sur mes gardes. Il excellait toujours me divertir de mes penses. Posant ma main surla sienne, je soupirai.- Il faut que je voie Jacob. Il ferma les paupires.- Non.- Il ny a aucun danger, plaidai-je. Jai pass beaucoup de temps La Pushavec toute la bande, et il nest jamais rien arriv. Ma voix drailla toutefois au moment o je prononai ces derniersmots, car ils taient mensongers. Il stait produit quelque chose, et lebrusque souvenir dun norme loup gris prt me sauter la gorge,babines retrousses sur ses crocs acrs comme des poignards, me renvoya la panique que javais alors prouve et mouilla mes paumes de sueur.Captant la chamade de mon cur, Edward hocha la tte comme si javaisavou lui avoir menti.- Les loups-garous sont instables, blessant parfois leur entourage. Ou lestuant. Jaurais voulu protester. Hlas, une autre image simposa moi,mobligeant ravaler mes objections, celle du visage autrefois si beaudEmily Young, aujourdhui labour par trois cicatrices sombres quistiraient de son il sa bouche, dsormais fige dans un rictus deguingois. Edward attendit, triomphant, que je retrouve la parole.- Tu ne les connais pas, murmurai-je.- Mieux que tu ne le penses, Bella. Jtais prsent, la dernire fois.- La dernire fois ?- Nos chemins ont commenc se croiser il y a environ soixante-dix ans...Nous venions de nous installer prs de Hoquiam. Alice et Jasper ne nous 21. avaient pas encore rejoints. Nous tions plus nombreux que ces chiens, cequi ne les aurait pas empchs de se battre sans lintervention de Carlisle.Il est parvenu persuader Ephram Black que la coexistence tait possible.Cest ainsi quun armistice a t conclu. Nous croyions la ligne teinteavec la mort dEphram, dailleurs, et que la bizarrerie gntique loriginede leur transmutation stait perdue...Il se tut, me contempla dun air vaguement accusateur.- Ta poisse semble augmenter de jour en jour, poursuivit-il. Te rends-tucompte que ton insatiable attirance pour les dangers mortels a russi letour de force de ressusciter une meute de mutants ? Si lon pouvait embou-teiller ta malchance, on obtiendrait une arme de destruction massive detout premier ordre.Jignorai ses sarcasmes, intrigue par son jugement. Il ne pouvait tresrieux !- Ce nest pas moi qui les ai ramens, me dfendis-je. Tu nes donc pas aucourant ?- De quoi ?- Les loups-garous sont rapparus parce que les vampires taient revenus.Je ny suis pour rien.Edward parut tonn.- Jacob ma expliqu que linstallation de votre clan dans la rgion avaitdclench le processus. Je croyais que tu le savais...- Telle est leur opinion ?- Les faits parlent deux-mmes, Edward. Il y a soixante-dix ans, vous tesarrivs ici, les loups-garous ont surgi. Aujourdhui, vous revenez, euxaussi. Ce nest pas une concidence.- Voil une thorie qui risque dintresser Carlisle, convint-il en sedtendant.- Une thorie ! raillai-je.Il garda le silence durant quelques secondes, les yeux fixs sur lafentre, mditant cette perspective nouvelle selon laquelle la prsence dessiens transformait les Indiens locaux en monstres.- Tout cela est fort intressant, finit-il par chuchoter, mais nous ne sommespas plus avancs. La situation reste inchange.Je traduisis sans peine : pas damiti possible avec les loups-garous. Ilme fallait tre patiente avec Edward. Il ntait pas tant but quignorant. Ilnavait aucune ide de ce que je devais Jacob Black - ma vie, de nom-breuses reprises, la raison trs certainement. Jvitais dvoquer ma 22. traverse du dsert et ma tentation de la folie, surtout avec Edward. Il avaitjuste voulu me prserver en rompant avec moi, sauver mon me. Je ne luitenais pas rigueur des btises que javais commises en son absence, ni dema profonde souffrance. Lui, si. Jallais tre oblige de plaider mon cas avec soin. Me levant, jecontournai la table et massis sur ses genoux, me blottissant dans ltreinteglace et marmorenne de ses bras.- Sil te plat, commenai-je, coute-moi une minute. Il ne sagit pas dunelubie consistant faire un saut chez un vieil ami. Jacob souffre. Je nai pasle droit de ne pas laider, de labandonner au moment o il a besoin de moisous prtexte que, quelquefois, il nest pas humain... Il a t l pour moilorsque je... lorsque je ntais plus vraiment humaine non plus. Tu ignoresce que a t... Je minterrompis, hsitante. Edward stait ptrifi, ses mainsntaient plus que deux poings aux tendons saillants.- Si Jacob ntait pas venu mon secours... je ne suis pas sre de ce que tuaurais retrouv en revenant ici. Jai une vritable dette envers lui, Edward. Je le regardai. Il avait ferm les paupires, sa mchoire tait serre.- Je ne me pardonnerai jamais de tavoir quitte, chuchota-t-il. Mme si jevis cent mille ans. Ma main frla son visage froid, il finit par soupirer et rouvrir lesyeux.- Tu voulais agir au mieux. Je suis persuade que a aurait fonctionn avecune fille moins cingle que moi. Et puis, tu es l, maintenant, cestlessentiel.- Si jtais rest, tu nestimerais pas ncessaire de risquer ta vie pourrconforter un clbard. Je sursautai. Autant jtais accoutume aux insultes de Jacob - buveurde sang, parasite, sangsue -, autant le sobriquet sonnait plus mprisant,prononc par la voix veloute dEdward.- Jignore comment formuler a, enchana-t-il avec tristesse, et a va tesembler cruel, mais jai dj trop manqu de te perdre par le pass. Je saisles affres dans lesquelles cela ma plong. Je ne tolrerai pas dautres misesen danger.- Aie confiance en moi. Tout ira bien.- Je ten prie, Bella, murmura-t-il, pein.- Quoi ? 23. - Tche de ne pas texposer. Fais-le pour moi. Je mefforce de te prserver,ton aide nest pas de trop, cependant.- Je vais essayer.- Devines-tu quel point tu mes prcieuse ? Comprends-tu combien jetaime ? Il me serra contre son torse dur, coina ma tte sous nom menton.Jembrassai son cou de neige.- Je sais combien je taime, rpondis-je.- Cest comparer un arbre frle une fort. Je levai les yeux au ciel, ce quil ne vit pas.- Impossible. En soupirant, il baisa mon crne.- Pas de loups-garous.- Hors de question. Il faut que je rencontre Jacob.- Je ten empcherai. Il paraissait trs sr dy parvenir, et il avait sans doute raison.- Cest ce quon verra, bluffai-je. Il reste mon ami. Dans ma poche, la lettre de Jacob paraissait soudain peser des tonnes.Jentendais les mots quil avait crits comme sil les avait prononcs, et ilavait lair daccord avec Edward, ce qui tait inconcevable. a ne changerien. Dsol. 24. 2. LIBERTUn entrain surprenant sempara de moi quand je sortie du coursdespagnol pour gagner la caftria. La raison nen tait pas seulement queje marchais main dans la main avec ltre le plus parfait qui ft, bien quece dtail comptt certainement.Entrait en jeu aussi la fin de mon chtiment, le retour monmancipation. moins que cela net rien voir avec moi, mais avec latmosphrejubilatoire qui planait sur le lyce. La fin de lanne se dessinait et, surtoutpour les terminales, elle saccompagnait dune effervescence perceptible.La libert tait si proche quon pouvait la palper, la goter. Elle semanifestait partout. Multiples affiches sur les mur de la cantine, poubellesdbordant de dpliants multicolores rappelant aux lves dacheterlannuaire de ltablissement ou des bagues souvenirs, annonces diverses etvaries sur la date limite de commande des robes et toques de crmonie,modles dinvitations1 ; publicits roses invitant participer au bal de findanne (pouah !). Les festivits taient prvues pour le week-endprochain, mais javais la promesse ferme et dfinitive dEdward que je neserais pas oblige dy aller. Cette exprience humaine, je lavais djvcue, non merci pour une deuxime manche. la rflexion, ctait srement ma propre libert recouvre quimemplissait de joie. En finir avec le lyce ne me procurait pas autant deplaisir qu mes pairs. En vrit, jtais nerveuse au point davoir le curau bord des lvres lorsque je rflchissais la fin de lanne, et jemefforais de ne pas y penser. Ce qui tait difficile, dans lambiance quirgnait.- As-tu dj envoy tes cartons dinvitation ? me demanda Angela quandEdward et moi nous assmes notre table.Les cheveux clairs de mon amie, dordinaire si bien coiffe, taientrassembls en une queue-de-cheval lche ; ses prunelles trahissaient unevague panique. Alice et Ben taient prsents aussi, encadrant Angela. Bentait plong dans une BD, ses lunettes glissant sur son nez fin. Alicedtaillait ma tenue banale (jean et T-shirt) dune faon telle que je fusgne. Elle complotait sans doute une nime transformation. Mon indif-1. Aux tats-Unis, le couronnement de chaque cycle dtudes(ou graduation , ici lquivalent de notre baccalaurat) faitlobjet dune vritable crmonie de remise des diplmes, aveclves en toge, familles officiellement prvenues et/ou invitesau grand jour, bal. Le sentiment dappartenance untablissement est galement plus fort quen France, do lachatdannuaires et de souvenirs destins rappeler les annes lyce. 25. frence envers la mode tait une pine dans son pied. Si je ly avais autorise, elle maurait habille tous les jours, voireplusieurs fois par jour, telle une poupe surdimensionne.- Non, rpondis-je Angela. Cest inutile. Rene est au courant, et je naipersonne dautre prvenir.- Et toi, Alice?- Jai termin, sourit cette dernire.- Quelle veine ! soupira Angela. Ma mre a des milliers de cousins etexige que je rdige la main une invitation chacun. Je vais me coller unsyndrome du canal carpien. Je redoute lpreuve, or je ne peux plus lareculer.- Je taiderai, proposai-je. Si tu ne crains pas mon criture abominable. Voil qui ravirait Charlie. De coin de lil, je vis Edward sourire. Luiaussi devait tre content - jobissais lune des conditions poses par monpre sans pour autant frquenter les loups-garous.- Comme cest gentil ! sexclama Angela, soulage. Dis- moi quand jepeux passer.- Je prfrerais quon fasse cela chez toi, si a ne gne pas. Je suis lasse demes quatre murs. Charlie a lev ma punition hier soir.- Vraiment ? se rjouit Angela. Toi qui te croyais condamn vie !- Je suis aussi tonne que toi. Jtais sre quil ne relcherait pas la gardeavant le bac.- En tout cas, cest gnial, Bella. Il faut que nous ftions a !- Tu nimagines pas comme je suis heureuse. Voyons un peu, ppia Aliceen sanimant, comment pourrions-nous clbrer la bonne nouvelle ? Sa conception dune petite sauterie tait toujours trop grandiose mon got, car elle avait tendance en rajouter systmatiquement.- Quels que soient tes projets, lui dis-je, je doute dtre libre de mesmouvements ce point.- Ton pre a lev ta punition, oui ou non ?- Oui. Nempche, il y a encore quelques restrictions. Ne pas sortir destats-Unis, par exemple.Angela et Ben sesclaffrent, alors quAlice grimaait, visiblement due.- Alors, que fait-on ce soir ? insista-t-elle.- Rien. coute, attendons quelques jours pour nous assurer quil neplaisante pas. De toute faon, nous sommes en milieu de semaine.- Trs bien ! On organisera quelque chose ce week-end. Son enthousiasme tait dcidment difficile contenir. 26. - Cest a, cdai-je pour lapaiser.Les bizarreries taient exclues. Mieux valait y aile doucement etmontrer Charlie que jtais mature et digne de confiance avant dedemander une quelconque faveur. Angela et Alice se mirent chafauderdes plans Ben dlaissa sa BD et se joignit leur conversation. Monattention sgara. Bizarrement, ma libert retrouve ne constituait plus unsujet aussi satisfaisant que quelques minutes plus tt. Tandis que mes amisdiscutaient des opportunits quoffraient Port Angeles, voire Hoquiam, jefus envahie par une certaine morosit, dont la raison ne tarda pas simposer moi.Depuis que Jacob et moi nous tions spars, dans les bois prs dechez moi, une image particulire, persistante et drangeante, navait cessde me tourmenter. Elle surgissait mon esprit intervalles rguliers, telleune agaante sonnerie de rveil rgle pour carillonner toutes les demi-heures, et mimposait le visage de Jacob dform par le chagrin. Ctait ledernier souvenir que javais de lui. Cette rminiscence me frappait de nou-veau et, en dpit des circonstances, jidentifiai la source de monmcontentement - ma libert tait incomplte.Certes, javais le droit daller o bon me semblait, sauf La Push.Javais le loisir dagir comme je le souhaitais, pas de voir Jacob. Il devaitbien y avoir un juste milieu.- Alice ? Alice ?La voix dAngela me tira de ma rverie. Mon amie agitait la maindevant la figure fige et insondable dAlice, une expression familire quidclencha une vague daffolement en moi. Ce regard vide indiquait quelletait en train de voir autre chose que la scne banale alentour, unvnement pourtant rel qui se produirait, dans peu de temps audemeurant. Mon sang se glaa dans mes veines. Soudain, Edward clatade rire, bruit naturel et dtendu qui eut le don dattirer lattention dAngelaet de Ben, tandis que je continuais de fixer sa sur. Celle-ci tressaillitcomme si un de ses voisins lui avait donn un coup de pied sous la table.- Tu fais dj la sieste, Alice ? se moqua Edward.- Dsole, se ressaisit-elle, je rvassais.- Cest toujours mieux quaffronter encore deux heures cours, commentaBen.Alice rintgra la discussion avec encore plus dentrainquauparavant, un petit peu trop, mme. Ses prunelles rencontrrent cellesde son frre, rien quun instant, avant de revenir se poser sur Angela. 27. Personne ne sen aperut, part moi. Silencieux, Edward jouait avec unemche de mes cheveux. Je guettai anxieusement une occasion de lui demander en quoi avaitconsist la vision dAlice, mais laprs-midi scoula sans que nous ayonsune minute nous. Cela me parut trange, presque dlibr. En quittant lacaftria, Edward sattarda auprs de Ben pour lui parler dun devoir dontje savais quil lavait termin. linterclasse, il se trouva systmatiquementquelquun avec nous, alors que nous russissions dordinaire nousoctroyer cinq minutes seul seule. Lorsque la cloche annonant la fin dela journe retentit, Edward se lana dans une conversation amicale ettonnante avec Mike Newton (!) et laccompagna sa voiture. Je leurembotai le pas, perplexe. Mike expliquait Edward que son moteur avaitdes rats.- ... pourtant, je viens de remplacer la batterie disait-il, apparemment aussitonn que moi par les attentions inattendues dEdward.- Un problme de cbles, peut-tre ? suggra ce dernier.- Je ny connais rien, en bagnoles. Je devrais porter la mienne au garage.Malheureusement, Dowling est trop cher. Jouvris la bouche pour proposer mon mcanicien personnel, larefermai. Le garon en question tait trs occup ces derniers temps -occup tourner en rond comme un loup gant dans une cage.- Je me dbrouille un peu, offrit Edward. Je jetterai un coup dil, si tuveux. Le temps de ramener Alice et Bella la maison, et je suis tonhomme. Tant Mike que moi le dvisagemes avec ahurissement.- Euh... merci, rpondit Mike, la surprise passe. Il faut que jaille bosser,l. Une autre fois, peut-tre.- Pas de soucis !- plus ! Mike grimpa dans sa voiture en secouant la tte, incrdule. La Volvotait gare deux places de l. Alice nous y attendait dj.- Quest-ce que a signifie ? murmurai-je tandis quEdward me tenait laportire.- Je rends service, cest tout.- Tu nes pas aussi dou que cela en mcanique, mon cher, dbita Alice toute vitesse depuis la banquette arrire. Tu devrais demander Rosaliedexamin a cette nuit, histoire de ne pas avoir lair ridicule quand Mikedcidera de recourir ton aide. Remarque, ce serait rigolo de voir sa 28. raction si Rosalie dbarquait ta place. Mais vu quelle est cense tre enfac, lautre bout du pays... Dommage ! Enfin, pour la voiture de Mike, tusuffiras srement. Seules les belles sportives Italiennes te donnent du fil retordre. propos dItalie et des sportives que jy ai voles, tu me doistoujours cette Porsche jaune. Et je nai pas envie de patienter jusquNol...Je cessai de lcouter au bout dun moment, et son debit rapide setransforma en bourdonnement de fond tandis que je me rsignais attendre. Il tait clair quEdward vitait mes questions. Trs bien. Il seraitassez tt seul avec moi. Ce ntait quune question de temps. Il lui dut lecomprendre aussi, car il dposa Alice lentre du chemin menant chezles Cullen au lieu de la conduire jusqu la maison. Quand elle descendit,elle lui lana un regard inquisiteur. Lui tait parfaitement laise.- plus tard ! lui dit-il en hochant le menton de faon presqueimperceptible.Alice senfona dans les bois. Sans un mot, Edward fit demi-tour etreprit la route de Forks. Allait-il aborder la question de lui-mme ? Non,apparemment. Ces tergiversations me rendirent nerveuse. Que diable Aliceavait-elle vu durant le djeuner ? Quelque chose dont il ne tenait pas meparler ? Pour quelle raison ? Il valait mieux que jenvisage tout et soncontraire avant de linterroger si je souhaitais ne pas flancher et lui donnerlimpression que je ntais pas capable dencaisser la nouvelle, quellequelle soit.Un silence pesant rgnait dans lhabitacle quand nous arrivmes chezCharlie.- Pas beaucoup de devoirs, ce soir, commenta Edward.- En effet.- ton avis, suis-je de nouveau autoris entrer ?- Charlie na pas piqu sa crise lorsque tu es pass me chercher ce matin.Jtais toutefois certaine quil redeviendrait vite boudeur silsurprenait Edward la maison quand il rentrerait. Bah ! Je me mettrais enquatre pour le dner.Une fois lintrieur, je grimpai lescalier, Edward sur mes talons. Ilsallongea sur mon lit et sabsorba dans la contemplation du paysage, delautre ct de la vitre, compltement impermable mon exaspration. Jerangeai mon sac, allumai lordinateur. Il me fallait rpondre un mail ensouffrance de ma mre, et elle avait tendance saffoler quand je neragissais pas assez vite. 29. Pendant que jattendais que ma machine dcrpite daigne se mettre enroute, mes doigts tambourinrent sur le bureau en un staccato angoiss.Soudain, sa main couvrit la mienne.- Serait-on impatiente, aujourdhui ? murmura-t-il.Je relevai la tte, prte lui lancer une repartie cinglante mais, plusproche de moi que je ne le souponnais, il me coupa dans mon lan. Sesprunelles dores brlaient quelques centimtres peine des miennes, etson haleine rafrachissait ma bouche entrouverte. Je gotais son odeur aubout de ma langue, et ma rponse spirituelle se perdit dans les limbes deloubli. Je ne savais mme plus comment je mappelais. Le tratre ne melaissa aucune chance de recouvrer mes esprits.Si javais pu, jaurais pass lessentiel de mon temps embrasserEdward. Rien de ce que javais eu le loisir dexprimenter ntaitcomparable leffet que me procuraient ses lvres froides et dures commele marbre, pourtant si douces lorsquelles bougeaient lunisson desmiennes. Hlas, cette opportunit mtait rarement donne, et je mtonnaiquelque peu lorsque ses doigts fourragrent dans mes cheveux, amenantmon visage vers le sien. Mes bras crochetrent sa nuque, et je regrettai dentre pas plus forte, pas assez en tout cas pour le garder prisonnier de montreinte. Sa deuxime main glissa le long de mes reins, mcrasant contreson torse de pierre. Malgr son pull, sa peau tait assez glace pourdclencher mes frissons - des frissons de plaisir. Las ! Conscient de latemprature quil dgageait, il me relcha.Dans trois secondes, il soupirerait et me repousserait avec diplomatie,me gratifierait dune phrase affirmant que nous avions suffisamment misma vie en pril pour laprs-midi. Profitant des ultimes instants quimtaient accords, je me collai lui, me fondis dans le moule de soncorps. La pointe de ma langue suivit le contour de sa lvre infrieure, aussilisse que si elle avait t polie, et dune saveur sans pareille...Il mcarta de lui, brisant ltau de mes bras sans difficult - il nestait sans doute pas rendu compte que jy avais mis toutes mes forces. Unrire guttural lui chappa. Ses yeux luisaient du dsir quil disciplinait avecune rigueur ahurissante.- Ah, Bella ! soupira-t-il.- Je mexcuserais si jtais dsole, mais ce nest pas le cas.- Ce que je devrais regretter, ce qui nest pas le cas non plus. Je crois queje vais retourner sur le lit.- Si tu estimes que cest ncessaire. 30. Jeus droit au sourire en coin, et il se dgagea. Je secouai la tte pourtenter de mclaircir les ides avant de pivoter vers lordinateur. La bteavait chauff et ronronnait. Enfin, gmissait plutt.- Transmets mes salutations Rene.- Bien sr.Je relus le message de ma mre, incrdule devant ses toquadesinsenses. Jen fus la fois divertie et horrifie, avec autant dintensit quelors de ma premire lecture. Cela lui ressemblait tellement doublier quellesouffrait dun vertige paralysant jusquau moment o elle se retrouvaitattache un parachute et un moniteur. Je reprochais Phil, lhommequelle avait pous environ deux ans auparavant, de lavoir laisse senga-ger dans cette aventure. Je la connaissais beaucoup mieux que lui.Il fallait que japprenne leur ficher la paix, mexhortai-je plusieursreprises. Javais consacr lessentiel de ma vie prendre soin de Rene, la dtourner de ses projets les plus fous, supporter avec bonne humeurceux dont je navais pas russi lloigner. Javais toujours fait preuvedindulgence son gard, de condescendance, mme. Ses innombrableserreurs mamusaient. Quelle tte de linotte ! Jtais diffrente - rflchie etprudente ; responsable et adulte. Cest ainsi que je me voyais, du moins.Telle tait celle que je connaissais.Le sang battant encore mes tempes suite au baiser dEdward, je nepus me retenir de repenser la btise qui avait le plus influenc lexistencede Rene. En sotte romantique, elle stait marie, sitt le lyce termin, un quasi-inconnu et mavait mise au monde un an plus tard. Elle mavaitjur nprouver aucun regret - jtais le plus beau cadeau de sa vie.Nonobstant, elle mavait serin encore et encore que les gens intelligentsconsidraient le mariage avec srieux. Les gens matures suivaient destudes et entamaient une carrire avant de sengager durablement. Elletait dailleurs sre que je ne me montrerais jamais aussi irresponsable,idiote et provinciale quelle...Grinant des dents, je mappliquai rpondre son mot. Jen arrivais sa phrase dadieu quand je me souvins pourquoi javais tard crire. Tu ne mas rien dit de Jacob depuis un bon moment. Que devient-il ? Charlie avait d lasticoter ce sujet, ctait parier. Poussant un soupir, jeme mis taper toute vitesse, la renseignant entre deux paragraphes auxpropos moins brlants. 31. Jacob va bien, je crois. Je ne le vois gure ; il passe la plupart de sontemps avec une bande damis La Push.Jajoutai le salut dEdward et expdiai mon mail.Je ne maperus quil se tenait derrire moi quaprs avoir teint lamachine et mtre recule. Jallais le rprimander pour avoir lu par-dessusmon paule lorsque je me rendis compte quil ne me prtait aucuneattention, focalis sur une bote plate et noire do schappaient des filslectriques tire-bouchonns qui nauguraient rien de bon pour lobjet enquestion. Au bout dun instant, je reconnus lautoradio quEmmett, Rosalieet Jasper mavaient offert lors de mon dernier anniversaire. Javaiscompltement oubli que javais cach mes cadeaux au bas de monplacard, o ils prenaient la poussire.- Nom dun chien ! sexclama Edward, horrifi. Que lui as-tu fait subir ?- Je narrivais pas lextraire du tableau de bord.- Alors, tu tes sentie oblige de le torturer ?- Je ne suis pas doue avec les outils, tu le sais. Ctait involontaire.- Cest un meurtre, oui ! assena-t-il en secouant le menton, lair faussementtragique.- Bah !- Ils seraient blesss sils lapprenaient. Heureusement que ta punition tatenue loin de chez nous. Je vais devoir le remplacer avant quils neremarquent quelque chose.- Cest gentil, mais je nai pas lusage dun appareil aussi sophistiqu.- Ce nest pas pour toi que jen rachterai un. Je me bornai soupirer. - Tu as vraiment maltrait tes cadeaux, ajouta-t-il, mcontent, ensventant avec un rectangle cartonn.Je ne pipai mot, par crainte que ma voix ne tremblt. Lanniversairedsastreux de mes dix-huit ans et son cortge de consquences durablesntaient pas un moment que je souhaitais me rappeler. Jtais dailleurstonne quil prenne la peine de le mentionner. Il tait encore plus cranque moi sur lvnement.- As-tu conscience quils sont sur le point dexpirer ? me demanda-t-il enme tendant le papier.Ctait un autre prsent, deux billets davion pour la Floride, donnspar Esme et Carlisle.- Non, dis-je dun ton neutre. Je ne me souvenais mme plus que je lesavais. 32. Ses traits affichaient une expression la fois rjouie et prudente.- Il nous reste encore un peu de temps, poursuivit-il . Impassible. Tu nesplus punie, et nous navons aucun projet pour ce week-end, puisque turefuses dtre ma cavalire au bal de fin danne. Et si nous ftions talibert retrouve ainsi ?- En rendant visite Rene ?- Il me semble tavoir entendue dire que le territoire amricain ttaitpermis.Je le toisai avec suspicion, tchant de saisir lorigine de cettesurprenante proposition.- Alors ? insista-t-il avec un grand sourire. Oui ou non ?- Charlie sy opposera.- Il na pas le droit de tinterdire de voir ta mre. De plus, elle aofficiellement ta garde.- Personne na ma garde. Je suis majeure.- Certes.Je rflchis pendant une bonne minute sous son il scrutateur avantde dcider que le jeu nen valait pas la chandelle. Charlie serait furieux,non que je me rende chez ma mre, mais quEdward maccompagne. Ilrefuserait de madresser la parole durant des mois, et je risquerais srementune nouvelle punition. Il tait plus intelligent de ne pas soulever leproblme. Dans quelques semaines, peut-tre, en guise de rcompensepour avoir obtenu mon diplme.Javais pourtant trs envie daller chez Rene. Maintenant, pas plustard. Nous ne nous tions pas vues depuis longtemps, et pas dans lescirconstances les plus favorables, qui plus tait. La dernire fois que jemtais rendue Phoenix, javais termin sur un lit dhpital ; la dernirefois quelle mavait rejointe ici, jtais dans un tat catatonique. Pasfranchement les meilleurs souvenirs que je puisse lui laisser. Du reste, sielle constatait que jtais heureuse avec Edward, elle conseillerait peut-tre Charlie de se dtendre.- Pas ce week-end, finis-je par dcrter.- Pourquoi ?- Je refuse de me battre avec Charlie. Pas si tt aprs quil ma pardonn.- Moi, je trouve que ce serait parfait.- Non. Une autre fois.- Tu nes pas la seule avoir t confine dans cette maison, me reprocha-t-il. 33. Mes soupons se rveillrent. Cette insistance ne lui correspondaitpas, lui toujours tellement altruiste, me passant mes moindres dsirs aupoint de me transformer en enfant gte.- Tu peux aller o bon te semble, lui signalai-je.- Le monde sans toi ne mintresse pas.Je levai les yeux au ciel.- Je suis srieux, protesta-t-il.- Commenons doucement, daccord ? Par un film Port Angeles, parexemple...- Laisse tomber, maugra-t-il. On en reparlera une autre fois.- Tout a t dit ce propos.Il haussa les paules.- Parfait. Autre chose : quest-ce quAlice a vu aujourdhui au djeuner ?Javais bien failli oublier mes inquitudes (son but initial ?). Je lefixai afin dvaluer sa raction. Il conserva sa contenance, bien que sesprunelles topaze eussent prit un clat trs lgrement plus dur.- Jasper, expliqua-t-il. Dans un drle dendroit. (Quelque part dans le sud-ouest, daprs elle. Pas loin de son ancien clan. Or, il na aucune intentionconsciente de retourner l-bas. Cela linquite.- Oh !La nouvelle ne correspondait en rien mes craintes. Il tait normalquAlice ft aux aguets quant lavenir de Jasper, son me sur, sadeuxime moiti, mme si leur relation navait pas lextravagance de celleunissant Rosalie et Emmett.- Pourquoi ne men as-tu pas parl plus tt ? menquis-je.- Il mavait chapp que tu ten tais aperue. De toute faon, cestsrement sans importance.Dcidment, mon imagination tait par trop galopante. Javais gchun aprs-midi normal en me convainquant quEdward sefforait de medissimuler une information vitale. Il fallait que je me soigne.Nous descendmes au rez-de-chausse pour faire nos devoirs, juste aucas o Charlie rentrerait tt. Edward liquida les siens en quelques minutes.Je peinai sur mes maths, puis vint lheure de prparer le dner. Edward semontra pnible, grimaant devant chaque ingrdient cru que jutilisais - lanourriture humaine lui rpugnait quelque peu. Je cuisinai un bufStroganov selon la recette de ma grand-mre Swan - seule, je laurais rate.Ce plat ntait pas mon prfr, mais Charlie serait ravi. 34. Il avait lair dhumeur charmante quand il arriva, ne fit mme pasleffort dtre impoli avec Edward qui,| comme dhabitude, sexcusa de nepas partager notre repas et sclipsa au salon. Les chos du journal du soirnous parvinrent en arrire-fond, mais je doutai quil regardt rellement latlvision.Aprs stre resservi deux fois, Charlie posa ses pieds sur la chaiselibre et croisa ses bras sur sa panse rebondie.- Ctait excellent, Bella, commenta-t-il, bat.- Heureuse que a tait plu. La journe sest bien passe ?Il avait t si absorb par la dgustation de son dner que javaisdcid de ne pas le dranger.- Ennuyeuse. Mark et moi avons jou aux cartes une bonne partie delaprs-midi, rigola-t-il. Jai gagn, dix-neuf manches sept. Ensuite, jaibavard avec Billy un bon moment.- Comment va-t-il ? demandai-je en tchant de garder ma srnit.- Bien. Ses articulations le tourmentent, sinon a va.- Jespre que a ne durera pas.- Oui. Il nous a invits lui rendre visite ce week-end. Il y aura lesClearwater et les Uley.- Ah!Raction un peu mince, certes. Que pouvais-je rpondre, cependant ?Je ne serais pas autorise me gendre une fte de loups-garous, ycompris sous la surveillance paternelle. Que Charlie frquente la rservene posait sans doute pas de problme Edward qui estimait quil nerisquait rien, dans la mesure o il passait la plupart de son temps avecBilly, lequel ntait quhumain.Je dbarrassai les assiettes et mattaquai la vaisselle. Edward sematrialisa mon ct sans un bruit et sempara dun torchon. Charliesoupira mais dcida de ne pas dclencher les hostilits pour linstant,mme si jtais sre quil me reparlerait de cette soire quand nous serionsseuls. Il se mit debout pour se rendre au salon.- Charlie ? lui lana Edward dune voix dtendue.Mon pre stoppa net.- Oui?- Bella vous a-t-elle dit que mes parents lui avaient offert les billetsdavion son anniversaire afin daller voir Rene ?Jen lchai lassiette que je nettoyais ; elle rebondit sur le bord delvier et dgringola avec fracas par terre. Si elle ne se brisa pas, elle 35. aspergea toute la pice deau savonneuse, et nous trois par la mmeoccasion. Charlie parut ne mme pas le remarquer.- Cest vrai, Bella ? me demanda-t-il, stupfait.- Oui, avouai-je sans lever les yeux. Il dglutit bruyamment et frona lessourcils avant de tourner la tte vers Edward.- Je ntais pas au courant, non.- Je vois..., murmura le flon.- As-tu une raison de soulever la question aujourdhui ? senquit mongniteur.- Leur validit est sur le point dexpirer, expliqua Edward avecdsinvolture. Je crains quEsm ne se vexe si Bella nutilise pas soncadeau. Certes, il suffirait de le lui dissimuler, mais... Je le contemplai avec hbtude, tandis que Charlie rflchissait.- Ce ne serait pas une mauvaise ide que tu rende visite ta mre, Bella,dclara-t-il enfin. Elle serait contente. Je ne comprends pas pourquoi tu nemen pas parl.- Jai oubli.- Pardon ? On te donne des billets davion, et a te sort de lesprit ? Marmonnant un son incomprhensible, je me remis ma vaisselle.- Edward, continua mon pre, tu as mentionn des billets. Combien y en a-t-il exactement ?- Un pour elle et... un pour moi. Cette fois, lassiette tomba au fond delvier. Jentendis distinctement le soupir de Charlie. Je rougis, irrite etdpite en mme temps. quoi jouait Edward ? Oppresse, je fixai lamousse dans le bac.- Cest hors de question ! semporta soudain mon pre.- Pourquoi ? insista mon ami, linnocence incarne. Vous venez de direque ce serait une bonne ide que Bella voie sa mre.- Tu niras nulle part avec ce garon, jeune fille ! brailla Charlie enlignorant. Je virevoltai - il brandissait un doigt vengeur sur moi. Aussitt, larage sempara de moi, raction pidermique au ton sur lequel il sepermettait de sadresser moi.- Je ne suis plus une enfant, papa. Et je ne suis plus punie, je te rappelle.- Oh que si ! partir de tout de suite.- En quel honneur ?- Parce que je lai dcid.- Je te signale que je suis majeure. 36. - Ceci est ma maison. Tu obis mes rgles !- Ah oui ? lchai-je, ma voix colrique virant au glacial. Tu veux la jouerainsi ? Trs bien. Quand souhaites tu que je parte ? Ds ce soir ? Ou ai-jequelques jours pour emballer mes affaires ?Charlie tourna lcarlate, et je me sentis minable davoir recouru auchantage. Je respirai profondment, mefforai de me calmer.- Je ne protesterai jamais contre une punition tant quelle sera mrite,repris-je. Mais je refuse de faire les frais de tes prjugs.Il voulut rpondre, ne russit pas articuler de phrase cohrente.- Tu sais trs bien que jai le droit de voir maman le week-end, enchanai-je. Tu ne ty opposerais pas si jy allais avec Alice ou Angela.- Des filles, ructa-t-il.- Ragirais-tu ainsi si je partais avec Jacob ?Javais choisi cet exemple, parce que Charlie prfrait le fils de Billy Edward. Tactique peu habile, en juger par la faon dont mon ami serrales dents, au point que je les entendis grincer. Mon pre seffora de se res-saisir.- Oui, finit-il par dcrter. Cela mennuierait aussi.- Tu mens mal, papa.- Bella...- Ce nest pas comme si jallais Las Vegas pour assister un spectaclecochon. Cest maman, dont il sagit. Elle est tout autant responsable de moique tu les.Il me fusilla du regard.- Serais-tu en train de suggrer que maman nest pas capable de veiller surmoi ?Il tressaillit.- Mfie-toi que je ne lui rapporte a.- Tu nas pas intrt, gronda-t-il. Tout cela ne me plat pas, Bella.- Cesse de te monter le bourrichon, et a ira mieux !Il leva les mains au ciel, mais je devinai que lorage sloignait. Meretournant face lvier, jtai la bonde.- Mes devoirs sont termins, repris-je, tu as dn, la vaisselle est faite, et jene suis plus punie. Je sors. Je serais rentre avant vingt-deux heures trente.- O vas-tu ? grogna-t-il en sempourprant de nouveau.- Je nen sais trop rien. Je resterai dans un rayon de quinze kilomtres.Daccord ? 37. Il maugra quelques mots incomprhensibles qui ne ressemblaientgure une approbation avant de quitter la cuisine grands pas. Mavictoire arrache, je fus aussitt submerge par une bouffe de culpabilit.Comme par hasard.- Nous sortons ? murmura Edward, tout content.- Oui, rtorquai-je en le toisant. Jai deux mots te dire en priv. Il neut pas lair aussi inquiet quil aurait d ltre, mon avis.Jattendis que nous soyions installs dans sa voiture.- Quest-ce qui ta pris ? explosai-je alors.- Je sais que tu as envie de revoir ta mre, Bella. Tu en as parl endormant. Tu tinquites pour elle.- Ah bon ?- Oui. Comme tu avais la frousse daffronter Charlie, je me suis born intercder en ta faveur.- Tu plaisantes ? Tu mas jete dans la fosse aux lions, oui !- Je nai pas eu limpression que le pril tait si grand.- Je tavais pourtant averti que je ne voulais pas me disputer avec monpre.- Tu ny tais pas force.- Cest plus fort que moi, fulminai-je. Quand il se met tre injuste, mesinstincts adolescents reprennent le dessus.- Je ny suis pour rien, rigola Edward. Je linspectai du coin de lil, ce dont il ne sembla pas sapercevoir.Il scrutait la nuit avec srnit. Je subodorais quelque chose, sans arriverpourtant mettre le doigt dessus. Ou alors, mon imagination semballaitune fois de plus.- Lurgence dune visite en Floride aurait-elle un lien avec la fte chezBilly ?- Du tout. Que tu restes ici ou que tu sois lautre bout du monde nychangerait rien : tu nirais pas. Ctait le mme scnario quavec Charlie quelques instantsauparavant - jtais traite en petite fille dsobissante. Serrant les poings,je me retins de hurler. Je ne tenais pas me fcher avec Edward aussi. Cedernier soupira. Lorsquil reprit la parole, sa voix avait retrouv sa chaleurveloute.- Bon, o va-t-on ?- Chez toi ? Je nai pas vu Esm depuis longtemps. 38. - Cela lui fera plaisir, sourit-il. Surtout quand elle apprendra o nousallons ce week-end.Vaincue, je ronchonnai.Comme promis, nous ne nous attardmes pas chez les Cullen, et leslumires taient encore allumes quand je rentrai. Charlie mauraitattendue, histoire de continuer me brailler dessus.- Mieux vaut que tu ne maccompagnes pas, conseillai-je Edward. Inutiledaggraver la situation.- Ses penses sont assez calmes.Son expression moqueuse et son sourire contenu mamenrent medemander si je ratais quelque chose damusant.- plus, grommelai-je.- Je reviendrai quand Charlie ronflera, rigola-t-il en embrassant le sommetde mon front. La tlvision beuglait lorsque je pntrai dans la maison. Uneseconde, jenvisageai de me faufiler en douce jusqu ma chambre. Monpre djoua mes plans.- Bella ? Viens ici, sil te plat. Jobtemprai en tranant des pieds.- Quy a-t-il, papa ?- Tu tes bien amuse ? Il paraissait embarrass. Je cherchai une signification i ache dans sesmots, en vain.- Oui.- O tes-vous alls ?- Chez eux. Nous avons pass la soire avec Alice et Jasper. Edward abattu sa sur aux checs, Jasper ma ratatine. Je souris. Une partie dchecs entre Edward et Alice tait lun desspectacles les plus drles auxquels il met t donn dassister. Presqueimmobiles, ils ne quittaient pas le plateau des yeux. Alice voyait lavance les mouvements quenvisageait Edward, lui, lisait les siens dansses penses. Lessentiel de la partie se jouait mentalement. Ils navaientdplac que deux pions avant quAlice ne renverse son roi en signe dereddition. Le navait dur que trois minutes. Charlie baissa le son de la tlvision.- coute, se lana-t-il, trs mal laise, il faut que je te dise quelque chose.- Oui?- Je ne suis pas trs dou pour ces trucs, soupira-t-il. Je ne sais par ocommencer. Je patientai. Il se leva et se mit arpenter le salon en gardant leregard fix sur ses pieds. 39. - Hum... Edward et toi mavez plutt lair srieux. Or, tu dois te mfier decertaines choses. Jai conscience que tu es une adulte, mais tu es encorejeune, Bella. Il y a des aspects importants ne pas ngliger quand on... ehbien, quand on est physiquement impliqu dans...- Oh ! Je ten prie ! Pas a ! Pas de conversation sur le sexe avec moi !- Je suis ton pre, quand mme. Et je suis aussi gn que toi.- Peu probable. De toute faon, maman ta coiff au poteau il y a unedizaine dannes.- Il y a dix ans, tu ne sortais avec personne.Il rsistait apparemment son envie de laisser tomber le sujet toutde go. Rouges comme des pivoines, nous nosions nous regarder ni bouger.- Les rgles de base nont pas chang depuis, non ? objectai-je.Ctait le septime cercle de lenfer. Le pire tait quEdward avaitdevin ce qui allait arriver. Pas tonnant quil ait affich pareille jubilation,dans la voiture.- Jure-moi seulement que vous vous comportez tous deux en tresresponsables, me supplia Charlie.- Ne tinquite pas. Nous nen sommes pas l.- Ce nest pas que je nai pas confiance en toi, Bella. Toi comme moisommes rticents aborder le sujet, mais je vais mefforcer davoir lespritouvert. Les temps ont chang, jen suis conscient.- Les temps, oui, pas Edward, mesclaffai-je. Tu nas aucune raison de tefaire du souci.- Bon, marmonna-t-il, peu convaincu.- Je regrette vraiment que tu me forces formuler cela haute voix, maissache que je suis vierge et que je nai pas lintention de remdier cet tatdans limmdiat.Il sursauta. Pourtant, ses traits sapaisrent- il me croyait.- Puis-je aller me coucher, maintenant ?- Une dernire chose.- Papa !- Rien de gnant, massura-t-il en se rasseyant sur le canap, visiblementsoulag et plus dtendu. Je me demande seulement comment lquilibragede ta vie se droule.- Oh... a ? Bien, jimagine. Angela et moi nous sommes entenduesaujourdhui pour que je laide rdiger ses invitations la crmonie deremise des diplmes. Entre filles.- Parfait. Et Jake ? 40. - Je nai pas encore rsolu ce problme.- Continue dy rflchir. Je sais que tu agiras comme il faut, tu es unegosse bien, Bella. Super. Cela signifiait-il que, si je ne russissais pas me rconcilieravec Jacob, je serais une sale gosse ? Quel coup bas !- Daccord, daccord. Ma rponse mamusa brivement. Ctait du Jacob tout crach.Javais mme imit le ton paternaliste quil employait envers Billy.Satisfait, Charlie remonta le son de la tlvision.- Bonne nuit, Bella. demain ! Je filai ltage. Edward ne rapparatrait pas avant que Charlie ne se ft endormi. Ilchassait sans doute quelque part, histoire de passer le temps. Me prparerpour la nuit ne revtait donc pas un caractre durgence. Javais beau nepas avoir envie dtre seule, il tait exclu que je redescende pour traner encompagnie de mon pre, des fois quil repense quelque sujet dducationsexuelle quil navait pas encore abord. Par sa faute, jtais nerve etanxieuse. Mes devoirs taient termins, et je ne me sentais pas assez calmepour lire ou couter de la musique. Jenvisageai dappeler Rene afin de luiannoncer notre prochaine visite, puis calculai quil tait trois heures dumatin en Floride. Je pouvais toujours tlphoner Angela. Puis je compris que ce ntait pas elle que je souhaitais parler. Quejavais besoin de parler. Je contemplai la fentre sombre en me mordant la lvre. Jignorecombien de temps jhsitai, pesant le pour - bien me comporter avec Jacob,revoir mon ami le plus cher, tre une fille bien - et le contre - fcherEdward. Une dizaine de minutes, peut-tre. Assez en tout cas pourconclure que le pour lemportait sur le contre. Aprs tout, seule ma scuritinquitait Edward, ce qui tait absurde. Inutile dappeler. Jacob avait dclin tous mes coups de fil depuis leretour dEdward. Et puis, il me fallait le rencontrer en chair et en os, ilmtait ncessaire de le revoir sourire comme autrefois, de remplacerlabominable dernier souvenir que jen avais gard - ses traits dforms parle chagrin. Sinon, je ne serais jamais en paix. Je disposais denviron uneheure devant moi pour faire un saut La Push avant quEdward nesaperoivent que javais fil. Lheure de mon couvre-feu tait certesdpasse, mais Charlie nobjecterait pas, puisquil sagissait de Jake. 41. Enfilant ma veste toute vitesse, je dgringolai lescalier. Mon preleva la tte, souponneux.- a ne tennuie si je vais chez Jacob ce soir ? Je ne resterai pas longtemps. Ds quil entendit le prnom, il se dtendit et sourit, trs content delui, comme sil ntait pas tonn que sa leon de morale et agi aussi vite.- Pas de souci, chrie. Ne te presse pas.- Merci, papa. Je dguerpis. linstar de tout fugitif, je ne pus me retenir deregarder plusieurs reprises par-dessus mon paule tandis que je trottaisvers ma camionnette. La nuit tait si sombre, cependant, que a ne servit rien. Je fus mme oblige de ttonner pour trouver la poigne de laportire. Mes yeux commenaient shabituer obscurit quand jenfonaila cl dans le contact. Je la tournai gauche, rien ne se produisit. Lemoteur cliqueta au lieu de rugir. Jessayai de nouveau, en vain. Soudain, la priphrie de ma vision, un mouvement me fit sursauter.- Aaaaahhh ! hurlai-je en constatant que je ntais pas seule lhabitacle. Edward tait l, immobile, lgre lueur dans la pnombre. Seules sesmains bougeaient, tripotant un objet noir.- Alice ma prvenu, murmura-t-il. Flte ! Javais oubli de la prendre en compte dans mes plans, celle-l. Elle avait d me surveiller.- Elle a pris peur en dcouvrant que ton futur avait brutalement disparu, ily a cinq minutes. Mes prunelles, dj carquilles par la stupeur, sagrandirent encore.- Les loups lui sont invisibles, prcisa Edward, la voix toujours aussibasse. Tu as oubli ? Lorsque tu dcides de les ctoyer, ton destinsvapore aussi. Tu comprends pourquoi cela me rend un petit peu... ner-veux. Alice a cess de te voir, sans pouvoir dterminer si tu reviendrais ounon. Nous ignorons les raisons de ce phnomne. Les loups-garous ontpeut-tre une dfense inne, mais lexplication laisse dsirer, puisquemoi, je nai aucune difficult lire leurs penses. Daprs Carlisle, cela estd au fait que leur transmutation rgit leur existence. Elle tiendrait moinsde la dcision volontaire que de la raction spontane bouleversant toutautour deux. linstant o ils changeraient de forme, ils nexisteraientplus vraiment. Du coup, le futur ne les concerne plus... Jtais ahurie.- Je rparerai ta voiture temps pour que tu ailles au lyce, au cas o tuprfrerais ty rendre seule, ajouta Edward aprs une minute de silence. 42. Lvres pinces, je rcuprai mes cls et descendis avec raideur duvhicule.- Ferme ta fentre si tu ne veux pas de moi cette nuit, chuchota-t-il justeavant que je ne claque la portire. Je comprendrai. Je regagnai la maison dun pas furibond, en claquai galement laporte.- Que se passe-t-il ? senquit Charlie depuis le canap.- Ma camionnette refuse de dmarrer.- Tu veux que je jette un il ?- Non. On verra a demain.- Je peux te prter ma voiture.Je navais pas le droit de conduire son vhicule de patrouille. Il devaitvraiment brler denvie que jaille la Push. Presque autant que moi.- Non merci, je suis fatigue. Bonne nuit.Je montai dans ma chambre, fonai droit sur la vitre que je fermai sibrutalement que lencadrement mtallique trembla. Je restai plante devantpendant de longues minutes puis, en soupirant, je la rouvris. 43. 3. MotivationsLes nuages taient si denses quil tait impossible de dterminer si lesoleil stait lev ou non, ce qui tait trs dstabilisant, alors que nouslavions pourchass durant tout notre long retour vers louest, au point quilavait donn limpression dtre immobile dans le ciel ; Le cours du tempssemblait subir dtranges variations. Lorsque, lextrieur de la voiture, lafort sestompa pour laisser apparatre les premiers btiments indiquantque nous ntions plus loin de Forks, jen fus presque tonne.- Tu es bien silencieuse, fit remarquer Edward, lavion ta rendue malade?- Non.- Tu es triste dtre partie ?- Plutt soulage, je crois.Il se tourna vers moi, perplexe. Inutile de lui demander de regarderdevant lui, mme si je dtestais quil quittt le pare-brise des yeux.- Rene est tellement plus intuitive que Charlie, expliquai-je. a me rendnerveuse.- Ta mre est dote dun esprit trs intressant, sesclaffa-t-il. Enfantin etperspicace la fois. Elle envisage les choses dune manire trspersonnelle.Perspicace. Oui, du moins quand elle prtait attention aux autres. Engnral, elle tait si droute par sa propre existence quelle avait tendance occulter le reste. Ce week-end cependant, elle mavait observe avecbeaucoup dacuit. Phil ayant t occup par le tournoi de lquipe de base-ball quil entranait, Edward et moi avions t seuls avec elle la plupart dutemps. Cela avait contribu renforcer son intrt pour nous. Lesembrassades et cris de joie passs, elle ne nous avait pas quitts du regard,ses grands yeux bleus se teintant peu peu dun clat interrogateur etsoucieux.Ce matin encore, nous avions fait une longue promenade sur la plage.Elle avait tenu me montrer les merveilles de son nouvel environnement,en esprant toujours, sans doute, que le soleil finirait par mattirer loin deForks. Elle avait aussi dsir me parler seule seule, ce qui navait pas tdifficile obtenir : Edward stait invent un expos terminer en guisedexcuse pour ne pas sortir dans la journe.Notre conversation me revint en mmoire. 44. Nous marchions sur le trottoir en essayant de restai lombre desrares palmiers. Bien quil ft tt, la chaleur tait accablante. Lair tait sicharg dhumidit que respirer relevait du dfi.- Bella ? avait demand Rene en fixant les vagues qui scrasaientdoucement sur la grve.- Oui?- Je suis inquite, avait-elle soupir en vitant de me regarder.- Pourquoi ? mtais-je aussitt affole. Je peux taider ?- Pas pour moi. Pour toi... et Edward.Elle avait enfin tourn la tte vers moi, lair de sexcuser.- Oh!- Votre relation est bien plus srieuse que ce que je pensais.Plissant le front, je mtais mentalement repass le film de ces deuxderniers jours. Edward et moi nous tions peine touchs, devant elle entout cas. Rene sapprtait-elle me servir une leon de morale sur le sensdes responsabilits, linstar de Charlie ? Cela ne maurait pas autantgne quavec lui. De plus, ctait moi qui, durant dix ans, lavais chapitre; un juste retour des choses, en quelque sorte.- Votre liaison est trange, avait-elle continu, sourcils froncs. Il est si...protecteur envers toi. Comme sil tait prt se jeter devant une balle depistolet pour te sauver.- Cest donc si mal ? avais-je plaisant.- Non. Juste diffrent. Il prouve des sentiments trs forts pour toi... touten se montrant prudent. Jai limpression de ne pas bien saisir ce qui vousunit. Comme si vous partagiez... un secret.- Que vas-tu inventer, maman ? mtais-je empresse de protester enfeignant la lgret.Pourtant, javais lestomac nou. Javais oubli quel point ma mretait capable de discernement. Parfois, sa vision simpliste du monde et sadistraction naturelle taient balayes par des illuminations qui la menaientdroit la vrit. Cela ne mavait pas pos de problme auparavant, nayantjamais eu de secrets pour elle.- Et ce nest pas que lui, avait-elle prcis. Tu verrais ton comportement ensa prsence !- Comment a ?- Tu te dplaces comme si tu torientais systmatiquement en fonction delui. Lorsquil bouge, mme un tout petit peu, tu ajustes ta position la 45. sienne. On dirait des aimants... une sorte de raction gravitationnelle. croire que tu es un satellite. Cest trs bizarre.- Laisse-moi deviner, tu tes remise lire des livres fantastiques, toi ? Oude la SF- Cela na aucun rapport, avait-elle protest en rosissant et en pinant leslvres.- Tu es tombe sur un ouvrage sympa, ces derniers temps ?- Eh bien, il y en a un qui... mais oublions cela. Cest de toi que nousparlons, pour linstant.- Tu devrais ten tenir aux romans damour, maman. Tu sais combien tu esimpressionnable.Elle avait souri.- Je suis sotte, hein ? Cette rflexion mavait dstabilise pendant uneseconde. Rene tait si influenable ! Ce travers se rvlait parfois positif,car ses ides manquaient souvent de sens pratique. En mme temps, jtaispeine de constater quelle vitesse elle stait range mes argumentsbanals, dautant que, pour le coup, elle avait parfaitement raison.- Mais non, mtais-je ressaisie, tu es juste une mre.En sesclaffant, elle avait eu un vaste geste pour englober la plage desable blanc qui stirait jusquaux eaux bleues.- Et rien de tout cela nest suffisant pour tinciter revenir vivre avec tagourde de mre ?Je mtais essuy le front, avais fait semblant dessorer mes cheveux.- On shabitue lhumidit, mavait-elle garanti.- la pluie aussi, avais-je contr.Elle mavait flanqu un coup de coude joueur dans les ctes, staitempare de ma main, et nous tions reparties vers sa voiture.Hormis ses inquitudes mon gard, elle mavait paru pluttheureuse. Bien dans sa peau. Elle avait toujours les yeux de lamour pourPhil, ce qui mavait rassure. Sa vie tait pleine et agrable. Je ne luimanquais plus autant...Les doigts glacs dEdward caressrent ma joue, me ramenant linstant prsent. Il se pencha, embrassa mon front.- Nous sommes arrivs, Bella au Bois Dormant. Debout!Nous tions gars devant chez Charlie. Le perron tait allum, lavoiture de patrouille range dans lalle. Un rideau bougea la fentre dusalon, dessinant un rayon jaune sur la pelouse sombre. Jtouffai un soupir.Naturellement, mon pre tait lafft, prt me sauter dessus. 46. Lexpression un peu raide dEdward, son regard terne lorsquilmaccompagna la porte mindiqurent quil partageait mes penses.- Cest si terrible que cela ? lui demandai-je.- Il nest pas en colre. Tu lui as juste manqu. Jeus des doutes. Si tel tait le cas, pourquoi Edward tait-il tenducomme un arc ? Bien que mon sac ft lger, il insista pour le porter lintrieur. Charlie nous ouvrit.- Bienvenue, chrie ! maccueillit-il, lair sincrement ravi. Commentctait, Jacksonville ?- Humide et infest de moustiques.- Rene na pas russi te vendre luniversit de Floride ?- Elle a essay. Je prfrerais me pendre.- Vous vous tes bien amuss ? continua mon pre avec un coup dilrticent Edward.- Oui, rpondit ce dernier dune voix sereine. Rene est trs hospitalire.- Hum... parfait. Tant mieux pour vous. Se dtournant de lui, Charlie me serra dans ses bras, un geste pluttrare chez lui.- Impressionnant, murmurai-je son oreille. Il rit.- Tu mas vraiment manqu, Bella. Quand tu nes pas l, la bouffe estcarrment nulle.- Je vais te prparer dner.- Tlphone dabord Jacob, veux-tu ? Il me sonne toutes les cinq minutesdepuis six heures ce matin. Je lui ai promis que tu lappellerais sittrentre. Je neus pas besoin de regarder Edward pour sentir sa rigidit et safroideur. L tait donc la vritable raison de sa tension.- Il souhaite me parler ?- Apparemment. Il a refus de me confier de quoi il sagissait. A justeprcis que ctait important. cet instant, lappareil retentit, strident, insistant.- Je te parie mon prochain salaire que cest lui, marmonna Charlie.- Je le prends, annonai-je en me dirigeant vers la cuisine. Je dcrochai, Edward sur les talons, tandis que mon pre sclipsaitau salon.- All?- Tu es rentre, lcha la voix de Jacob. 47. Ses intonations rauques, familires, dclenchrent une vague denostalgie qui me secoua. Des dizaines de souvenirs entremls afflurent ma mmoire une plage de galets jonche de bois flott, un