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ANIMATION AUTOUR DE LES AVENTURES DU PRINCE AHMED DE LOTTE REINIGER Présentation du film Malgré ce que l'on peut lire, Les aventures du Prince Ahmed n'est pas le premier film d'animation de l'histoire : c'est le 1er film d'animation long qui ait survécu jusqu'à notre époque, ce qui n'est pas le cas de El Apostol, de 1917, réalisé par Quirino Cristiani. En revanche, aucun des nitrates de l'époque (matière constituant la pellicule dans les années 20, extrêmement inflammable et compliquée à conserver) n'a survécu : le film a été restauré en 1998/1999 en noir et blanc, puis reteinté selon les méthodes de son époque d'origine, à partir d'une copie anglaise. Les aventures du Prince Ahmed est un film d'animation en papier découpé de Lotte Reiniger, sorti en 1926. C'est plus particulièrement un film de silhouettes pour lequel l'invention d'une nouvelle machinerie a été nécessaire : le banc titre, sorte de table trouée sur laquelle les calques avec les silhouettes étaient posés, puis éclairés par en dessous et filmés par au dessus avec une caméra fixe, date de cette époque. Il aura fallu trois ans, de 1923 à 1926 pour réaliser le film : il a nécessité pas moins de 300 000 prises de vues, les décors étaient filmés séparément des personnages dans certains cas et ce n'est qu'au développement que la réalisatrice pouvait voir le résultat lorsque les deux bandes étaient développées conjointement. Le film "émerge" d'un contexte particulier puisqu'un nouveau genre cinématographique voit le jour : c'est l'avant-garde allemande et l'expressionnisme qui se mettent en place, les peintres et dessinateurs rêvent de dessins en mouvements, en musique... Plusieurs artistes plasticiens vont donc venir au cinéma à cette époque, dont certains qui viendront constituer l'équipe "technique" de Lotte Reiniger : pour les effets spéciaux ce sont Bertold Bartosch (effets de brouillard, de mousse étalée, travail avec différentes couches de papiers et sur les matières de papier : cartonné, ondulé...) et Walter Ruthman (animation à la cire, au sable, et décors). Le premier, ayant fait des études d'arts dans une école viennoise, sera reconnu pour ses films d'animation, quand le second peintre, architecte de formation, deviendra le père du cinéma abstrait (Absoluter film en allemand). Le filmage, enfin, est l'œuvre de Carl Koch, mari de Lotte Reiniger et quasi-indissociable de la réalisation de tous ces films. Dans ce film précisément la musique, chère à l'avant-garde, est importante : créée en fonction du story-board et de l'intrigue, elle a été composée par Wolfgang Zeller, puis le nombre de plans a été adapté en fonction des phrases musicales écrites et minutieusement suivi à la fabrication du film pour une synchronisation parfaite. C'est donc le processus inverse du processus habituel qui a été mis en place ici, le nombre d'image a été pensé et créé en fonction de la longueur de la musique, elle même composée à partir du scénario. Ce qui explique le lien indissociable entre musique et images dans le film.

Analyse de "Les aventures du Prince Ahmed"

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L'analyse de "Les aventures du Prince Ahmed", telle que présenté par Stéphanie Arens lors de la matinée pédagogique du 14 décembre 2013 au Ciné220 de Brétigny.

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ANIMATION AUTOUR DE LES AVENTURES DU PRINCE AHMED DE LOTTE REINIGER

Présentation du film

Malgré ce que l'on peut lire, Les aventures du Prince Ahmed n'est pas le premier film d'animation de l'histoire : c'est le 1er film d'animation long qui ait survécu jusqu'à notre époque, ce qui n'est pas le cas de El Apostol, de 1917, réalisé par Quirino Cristiani. En revanche, aucun des nitrates de l'époque (matière constituant la pellicule dans les années 20, extrêmement inflammable et compliquée à conserver) n'a survécu : le film a été restauré en 1998/1999 en noir et blanc, puis reteinté selon les méthodes de son époque d'origine, à partir d'une copie anglaise.

Les aventures du Prince Ahmed est un film d'animation en papier découpé de Lotte Reiniger, sorti en 1926. C'est plus particulièrement un film de silhouettes pour lequel l'invention d'une nouvelle machinerie a été nécessaire : le banc titre, sorte de table trouée sur laquelle les calques avec les silhouettes étaient posés, puis éclairés par en dessous et filmés par au dessus avec une caméra fixe, date de cette époque. Il aura fallu trois ans, de 1923 à 1926 pour réaliser le film : il a nécessité pas moins de 300 000 prises de vues, les décors étaient filmés séparément des personnages dans certains cas et ce n'est qu'au développement que la réalisatrice pouvait voir le résultat lorsque les deux bandes étaient développées conjointement.

Le film "émerge" d'un contexte particulier puisqu'un nouveau genre cinématographique voit le jour : c'est l'avant-garde allemande et l'expressionnisme qui se mettent en place, les peintres et dessinateurs rêvent de dessins en mouvements, en musique...

Plusieurs artistes plasticiens vont donc venir au cinéma à cette époque, dont certains qui viendront constituer l'équipe "technique" de Lotte Reiniger : pour les effets spéciaux ce sont Bertold Bartosch (effets de brouillard, de mousse étalée, travail avec différentes couches de papiers et sur les matières de papier : cartonné, ondulé...) et Walter Ruthman (animation à la cire, au sable, et décors). Le premier, ayant fait des études d'arts dans une école viennoise, sera reconnu pour ses films d'animation, quand le second peintre, architecte de formation, deviendra le père du cinéma abstrait (Absoluter film en allemand). Le filmage, enfin, est l'œuvre de Carl Koch, mari de Lotte Reiniger et quasi-indissociable de la réalisation de tous ces films.

Dans ce film précisément la musique, chère à l'avant-garde, est importante : créée en fonction du story-board et de l'intrigue, elle a été composée par Wolfgang Zeller, puis le nombre de plans a été adapté en fonction des phrases musicales écrites et minutieusement suivi à la fabrication du film pour une synchronisation parfaite. C'est donc le processus inverse du processus habituel qui a été mis en place ici, le nombre d'image a été pensé et créé en fonction de la longueur de la musique, elle même composée à partir du scénario. Ce qui explique le lien indissociable entre musique et images dans le film.

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Analyse des thématiques et sous-thématiques du film (15 minutes)

THEMATIQUES ET SOUS THEMATIQUESTHEME PRINCIPAL : Le voyage initiatique Sous-thèmes : La tentation (celle du prince et d'Aladin). Les quêtes (qui se succèdent : rentrer chez soi, vaincre le Mage, sauver la princesse, réhabiliter Aladin). Les épreuves : acquisition de force morale et physique. La découverte de l'amour et l'accomplissement du héros.THEME PRINCIPAL : Le rapport au merveilleux/ à la magie

Sous-thèmes : L'émergence de la magie, le rapport aux êtres magiques (génie, djinn, monstres du Mage, monstre qui tente de tuer Aladin), présence dans le film d'un "folkore" ou bestiaire magique propre aux contes de l'orient.THEME PRINCIPAL : Le rapport au vivant, à l'humain et à l'organique

Sous-thèmes : La création et la naissance (presque l'accouchement) des personnages à l'image. Le rapport au désir, aux sentiments humains. L'émergence des besoins primaires de l'humain, de ses qualités et de ses défauts.THEME PRINCIPAL : L'émergence du cinéaste au cœur de son filmSous-thèmes : Naissance des personnages, qualité démiurgique du réalisateur, cosmogonie de l'univers créé, réinterprétation des contes et mythes par le biais de sa propre nationalité/religion, ajout de symboliques, ajout au conte d'une lecture occidental des Mille et une nuits...

La technique du film

Lotte Reiniger à pratiquement inventer le banc titre : une table trouée, sur laquelle on pose une plaque de verre au dessus de laquelle la caméra est fixée, et la lumière qui éclaire le tout par au dessous. Le film est entièrement réalisé selon ce procédé : pour les décors une autre plaque de verres a été ajoutée sous la première avec le décor quand décors et personnages sont filmés en même temps, ce qui n'est pas constant dans le film, les décors ayant eux-mêmes parfois nécessité plusieurs calques superposés filmés sur un autre banc titre.Le film comporte certains effets spéciaux : l'impression d'un flot de couleur dégoulinant au départ vient de la machine à cire, et le génie, ainsi que certains éléments de décors sont de l'animation de sable.Faisons un point sur l'utilisation des bains de teinture : c'est un procédé qui permettait de teinter entièrement la pellicule dans une couleur, avant de l'impressionner avec les images.

Hervé Joubert-Laurencin, auteur du Carnet de notes sur... nous donne une première approche des couleurs des fonds du film, liées au contexte des années 20 (couleur encore non utilisée en cinéma car procédés restreints, et couteux), et donc connotations associées à l'époque plus évidentes : "le bleu c'est la nuit, rouge-orangé pour l'incendie ou le désir (...) vert pour les actions surnaturelles, jaune-or pour les décors munificents de palais richement ornés". Ce postulat de base est extrêmement important car dans l'analyse d'un film le contexte ne doit jamais être mis de côté, il peut être enrichi d'interprétations secondaires, sur-interprété même (bien qu'il soit impossible d'interpréter un film à la lumière de ce qui adviendra après sa sortie évidemment), mais ne peut pas être nié. Il est donc impossible de faire l'impasse sur ce sens premier et la compréhension automatique qui en découlait pour le spectateur des années 20, et il est bon de nous l'expliquer à nous, spectateurs de 2013.

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Cela sera sujet à enrichissement, car les couleurs font maintenant (à l'air de la publicité, du marketing et de la communication) l'objet de pas mal de révisions et sont beaucoup plus connotées pour nous.

Les personnages

Tous les personnages fonctionnent en doublon, et ont un opposé moral, cela rejoint l'imagerie souvent symétrique du film.Ainsi il y d'un côté Ahmed le héros : projeté loin de chez lui, il va vivre bon nombre de bouleversements avant d'arriver à regagner son palais. Les tentations, les épreuves et les découvertes vont se succéder, mais il sortira de la quête plus fort. Ses motivations sont pures, même s'il cède parfois aux tentations. Son pendant est Aladin : motivé par l'appât du gain au départ, l'envie de richesse, et la volonté de séduire grâce à celles-ci : il suit le Mage et fait ce qu'il lui demande, puis souhaite de devenir riche et d'avoir un palais aussi grand que le calife (on a amené au départ l'idée qu'il était amoureux MAIS l'opposition entre Ahmed et Aladin vient de leurs motivations en premier lieu et de ce que l'un n'a pas choisi sa situation tandis que l'autre savait ce qu'il faisait).Ensuite vient le Mage, maléfique, prêt à tout pour parvenir à ses fins, et son opposée la bonne Sorcière.Le bon calife qui paye pour son divertissement et ses désirs, et qui s'oppose à l'Empereur chinois, cruel et méprisable, à qui les choses et personnes sont dues.Dinarsade, la princesse timide qui subit les situations (devient même la victime du Mage) et Pari Banu, combattante, volontaire qui résiste, bien que parfois dominée.Les servantes "inoffensives" de Pari Banu, et le Bouffon de l'Empereur servile et profiteur.Les génies de la lumière qui sauve les personnages à la fin et les djinns sortis de la lampe à l'appel des démons de Wak-Wak.L'ambivalence des choses et des personnages est toujours présente : rien n'est ni bien ni mal dans ce conte, tous semblent incarnés les deux facettes d'un même personnage, tantôt bon, tantôt mauvais, tantôt courageux, tantôt lâche. La symétrie dépasse le simple cadre du décor.

ANALYSE POSSIBLE DU FILM

On retrouve dès le début du film quelque chose de l'ordre de la cosmogonie qu'évoque Hervé Joubert-Laurencin : la cinéaste se pose en démiurge, elle fait naître ses personnages, naître son incipit, et naître des mains d'un des personnages la clé, l'élément narratif au cœur de l'intrigue, qui nouera entre eux tous les personnages.En effet, Lotte Reiniger, au moyen de plusieurs procédés, et par le biais de forme très évocatrices fait naître ses personnages : le début du film est très rattaché à l'avant-garde allemande, à l'expressionnisme également : les formes sont multiples, distordues, inhabituelles pour le spectateur, l'amenant ainsi à ressentir des émotions plus fortes. Ici la rondeur va dominer : c'est un des motifs du film.

La présentation des personnages va dans ce sens : tous apparaissent dans un cocon, qui n'est pas sans rappeler d'une certaine façon la maternité.Le Mage africain apparait dans un rond, après des formes semblant dégoulinées. Dinarsade apparait dans une forme arrondie, après qu'une pointe venue former l'intérieur de son décor soit apparue. Ahmed lui apparait dans un carré, et sera d'ailleurs le premier personnage à apparaître simplement à l'image, sans entrave. Pari Banu apparait dans une superposition de rond et de vague (la symbolique de

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l'eau va en partie dans le sens de la naissance également). Aladin lui apparait d'abord dans un rond, sorte d'halo de lumière jaune, puis entravé dans un ersatz de pyramide. Enfin la Sorcière apparait toute droite sortie de la fusion de deux œufs, rappelant la mitose cellulaire lors des premiers mois de la grossesse.

Ainsi l'apparition du Mage africain donne l'impression d'une éclosion, après nous avoir montré l'œuf dans lequel il était contenu le voilà qui se déplie symétriquement et que son visage semble expulsé par ses épaules. Tout dans ses gestes, le jeu avec les doigts notamment invoque quelque chose de mystique : c'est la façon dont il invoque les forces obscures. Quelque chose aussi dans la posture du Mage met mal à l'aise : son corps est tortueux, ses jambes semblent à l'envers, il a quelque chose de désarticulé, comme une sorte de pantin.La récurrence du motif de la rondeur dans le décor revient ici : 1 puis 2 puis 3 ronds qui tournent et s'assemblent, comme la mitose biologique lors de la reproduction des êtres humains. Ils s'assemblent, grossissent reprenant une forme aux allures embryonnaires qui se désolidarisera pour se reconstruire et incarner le cheval volant, qui pourtant est une machine, né de la symbiose entre l'organise et le mystique.Le magicien semble d'ailleurs, dans sa frénésie se prosterner de par et d'autres : c'est le rituel de l'appel aux puissances. Il émerge ainsi au sein d'une bulle étrange, une forme grossière aux allures cabossées qui s'incarne dans le cheval volant, magnifique et cornu au niveau de la selle (on peut alors penser à l'imagerie du diable, d'où l'idée que le cheval incarne déjà une partie des forces obscures, condamnables et terrifiantes qui vont semer la discorde au sein du film). Le magicien sera d'ailleurs, puisqu'il envoie Ahmed loin de chez lui, à l'origine des tentations du Prince, et de celles d'Aladin. Et la couleur ici nous rappelle la nuit : les choses obscures, condamnables commencent dans l'ombre, cachées de tous.

Il y alors un contraste saisissant lorsque l'on arrive à l'anniversaire du calife. Le décor, savamment créé, donne l'illusion d'une profondeur sur une surface plane. Le jaune-or rappelle la munificence des décors -le faste de l'instant- le palais plus clair par jeu de transparence y apparait plus pur, les murs noirs eux donnent l'idée qu'en dehors de l'enceinte du palais, l'obscur peut se frayer une place dans la fête et venir tout bouleverser. On notera la symétrie parfaite de cette séquence : la danse des valets et leurs façons de s'incliner quand arrive le calife. La récurrence du motif triangulaire dans cette scène est saisissante, de même que le jeu sur les obliques rappelant l'omniprésence de l'avant-garde dans ce film pourtant atypique pour le genre.

La première apparition de Dinarsade dans le film se fait à l'intérieur d'un cocon : sa roulotte de voyage est cernée de draps. Elle est ainsi coupée du monde ou plutôt préservée et doit faire un geste pour s'ouvrir au monde. Dinarzade apparait elle aussi comme en train d'éclore.Le prince Ahmed lui bénéficie d'un tout autre régime : il apparait fier et puissant, baigné de jaune, à l'air libre montant son cheval. Mais obligé de renverser la tête en arrière pour regarder le Mage dans les airs : cela implique d'emblée que bien que sorti du cocon, il est à la merci du Mage sans le savoir encore, et que son salut viendra de ce qu'il traversa tout un long voyage initiatique pour devenir lui même un héros. Le calife apparait également dans un cocon, caché du vaste monde, car il doit être protégé, et est plus puissant, donc plus fragile que tout autre.

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Cette séquence reprend le motif de la création démiurgique : deux des personnages semblent éclore.

On note que le Calife lorsqu'il propose au Mage "choisit parmi mes trésors" se dévoile à la lumière du jour, sans son cocon. C'est là l'incarnation d'une prise de risque, du danger, auquel il va s'exposer puisque le Mage va choisir un de ses trésors les plus précieux : sa fille. S'ensuit un enchainement très intéressant qui donne du suspense à la scène et permettra au spectateur de recréer en son sein les émotions des personnages : les plans se font plus courts et les personnages y apparaissent seuls, alternativement, créant ainsi de la tension. L'animation des personnages y est importante : hormis le calife et Dinarsade, ils sont montrés devant des fonds vides - le monde n'existe plus autour d'eux, il a disparu derrière toute la tension que la scène véhicule. Les intentions du Mage sont découvertes : il veut épouser la fille du calife et sans doute à terme devenir calife à la place du calife...Dinarsade est alors sortie de force de son cocon, comme un enfant à peine né encore sans défense et se retrouve dans un monde sans décor, vide. Le Mage, courbé, attire d'un mouvement de doigt Ahmed venu prendre la défense de sa sœur. Il ne va alors lui montrer que la façon de faire s'élever le cheval dans les airs. C'est à ce moment que la confirmation que le cheval est une machine nous est donnée : la sensation de rigidité qu'il véhicule était perceptible dès le début du film mais est confirmée à ce moment. Ces membres ne se désolidarise pas, il n'a que deux positions et ses yeux ne bougent pas : il n'est pas humain. Puis après l'envolée du Prince et l'égarement qui en découle, le Mage africain se retrouve de nouveau au sein d'une forme ronde, d'une bulle : hostile cette fois, c'est celle des gardes qui le menacent de la pointe de leur lance.

Lorsque le prince est dans les airs, le jaune se pare d'une teinte un peu plus verdâtre...le mystérieux, le surnaturel entre en action. Lorsque le Prince Ahmed voyage, sa position suit une trajectoire particulière : pour nous faire comprendre son ascension, il s'en va vers le haut à droite (représentant traditionnellement le futur en occident). Puis le fond devient bleu : la nuit est tombée, les étoiles apparaissent, le temps passe et la terre ferme est loin. Vient ensuite l'atterrissage. Les ascensions et les descentes sont aussi un motif du film, faisant écho à tous les cheminements que doit faire le héros pour rentrer chez lui.S'ensuit alors pour le Prince, comme en écho avec sa longue ascension, une descente : il s'enfonce...S'enfonce. Et sera bientôt pris au piège, sans même le savoir. La montée et la descente sont intéressantes d'un point de vue symbolique. L'ascension permet au personnage de s'élever et est une allégorie du voyage : le prince est déjà transfiguré par sa montée, l'éloignement, la séparation. Il est changé, n'est plus le prince dans son royaume et va être mis en difficulté car confronté à l'inconnu. Sa descente ensuite est celle de tout voyage initiatique : il sera soumis à la tentation, à sa propre "traversée du désert". Soumis au désir et à ce qui rappelle la bassesse du vivant, de l'homme, son rapport à ses besoins primaires : l'attirance pour le sexe opposé, pour les intentions basses et souvent considérées comme impures de l'esprit (attirance sexuelle, enivrement, abondance des plaisirs, côté orgiaque de la scène). Il inclinera vers le désir ardent, l'immoralité (multiplicité des prétendantes du quasi harem) et vers la luxure (baiser ardent, abondance de femme, domination de l'homme unique devenant ainsi l'objet de toutes les attentions/affections).

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La danse, typée orientale que fait la danseuse aussi est connotée : les danseuses du ventre dans la tradition orientale sont des pécheresses, femmes de petites vertus. De même le nombre d'images est augmenté dans cette séquence : les mouvements sont très rapides, saccadés, presque comme des spasmes, que les gestes répétitifs accentuent, rappelant presque la montée en tension et une certaine allégorie de la sexualité. D'ailleurs le prince finit alors couché au milieu des femmes... Puis viennent les querelles, et la violence...corollaires de la passion. Et l'idée à nouveau que le sexe et le désir amènent avec eux des sentiments violents, tandis que plus tard dans le film la relation entre Ahmed et Pari Banu ne fonctionnera pas du tout sur la même base. Dans la suite de cette scène avec les servantes de Pari Banu, Ahmed n'incarne plus l'objet du désir mais l'objet de l'obsession : il se réfugie alors dans un cocon en hauteur, qui l'espace d'un instant devient paradisiaque, puis s'effondre sous le poids, encore une fois des tentations humaines : sous le poids du désir des autres femmes venues le rejoindre.Fuyant alors ces sentiments et une situation qu'il ne peut maîtriser Ahmed enfourche son cheval et repart dans les airs, non sans revenir voir les femmes et profiter une dernière fois de leur attachement, puis s'envole.

C'est la première étape de son voyage : il y a été confronté à l'oisiveté, la fête, la paresse, la luxure et la gourmandise, sombrant dans l'excès avant de retourner dans le droit chemin, il reprend alors son voyage en s'élevant encore. Nous avons alors une certitude : Ahmed sortira grandi, plus fort de ce long voyage de retour.

Il redescend vers la terre, pour arriver dans une sorte d'Eden qu'il va troubler. Nous ne savons rien du pays de Wak-Wak à ce moment là, et tout dans sa présentation est idyllique : la biche qui s'abreuve, le paysage magnifique, les femmes volantes qui s'apparentent à des créatures mystiques. Tout est fait pour nous émerveiller. Les décors y sont luxuriants, rappelant sans conteste l'oasis dans le désert... Nous savons d'ores et déjà que ce qui s'y passe sera positif pour le personnage. Et de nouveau Ahmed s'enferme dans un cocon de branches, protégé du monde, pour voir sans être vu. Les créatures émergent de leurs plumes : ce sont des femmes. Et Ahmed de se retrouver enfermé dans les feuilles, et plongé dans le noir, comme s'il était de nouveau en gestation, et qu'il allait éclore à un nouveau lui-même, c'est l'allégorie de ce qui se passe dans sa tête et son cœur : Ahmed tombe amoureux, il va renaître au sentiment, s'ouvrir. Il n'est plus motivé que par son retour, mais par l'idée de retrouver Pari Banu. Pourtant Ahmed pour se faire voir de la princesse amène le crime dans ce que l'on croit être le paradis: il vole le costume de la reine, et commet le crime de venir troubler leur paradis. Cette fois ce ne sont plus les femmes qui courent après Ahmed, mais Ahmed qui court après une femme, qui cherche à s'en faire aimer et comprend alors la frénésie dont étaient prises les femmes du harem. Il domine par ailleurs la situation car domine souvent de sa hauteur Pari Banu.

Arrivés en Chine, le jaune revient et la munificence des décors avec lui. Ahmed s'agenouille aux pieds de Pari Banu, cette fois, il dévoile la vérité : le voilà dominé par Pari, car il l'aime et se déclare son esclave. On apprend alors la vérité sur Wak Wak et Ahmed a maintenant deux ennemis : le Mage africain et les démons de Wak Wak.

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Pendant ce temps dans le pays d'Ahmed, Le Mage emprisonné par le calife se transforme en chauve-souris : l'imagerie de la démonologie est de nouveau présente (la chauve souris, ersatz de vampire). Le Mage est bel et bien un démon. Ahmed, lui, rend sa livrée à Pari Banu pour prouver sa bonne foi : confiante elle le suit. La quête du prince prend alors un autre sens, il doit maintenant protéger celle qu'il aime et rentrer chez lui. Comme dans tout voyage initiatique, le héros se voit nanti de responsabilités au fur et à mesure de son évolution. Ici le jaune ne sert pas qu'à souligner la beauté des décors mais met aussi en lumière la beauté des sentiments, la richesse de celui qui a trouvé celui ou celle qu'il aime et est aimé en retour (thème récurrent de conte).Mais comme précédemment à Wak-Wak, le bonheur et la pureté de l'instant vont être de courte durée : le Mage s'empare de la livrée, et lui et Ahmed se mettent à descendre. Vers quels ennuis, que va t-il se passer ? Quelles tentations ? Ahmed livre alors un combat contre un immense serpent...Est-il besoin de rappeler la symbolique du serpent ? Qui ici laisse le temps au Mage d'enlever Pari Banu et de laisser Ahmed, une fois qu'il l'aura vaincu, dans le plus grand désarroi.

Dans ce second acte quelque chose émerge : le mal et la tentation sont protéiformes, tout comme le Mage qui peut changer d'apparences. Et d'autres personnages du film vont dans ce sens : ils peuvent séduire (le cheval volant, le serviteur chinois d'apparence sympathique qui est en fait plus ou moins marchand d'esclave), rebuter (la chauve souris, le kangourou, le Mage sous sa forme d'homme...) mais quoi qu'il en soit, ils sont séduisants quand ils le désirent, prenant au piège les âmes pures, mais mentent, trahissent et piègent également.

On arrive alors dans les "chinoiseries" avec un foisonnement de détail dans les costumes, les postures... mais là aussi : l'Empereur à un chapeau cornu. (Récurrence de la présence de corne : imagerie du démon, du malin, de la cruauté ici.)Dans le palais de l'Empereur, tout est défini par des cadres dans le cadre, il y a du décor qui arrête le cadre partout. Dès l'entrée avec ses grilles : c'est celle d'une prison pour Pari Banu. La mise en abime rend l'étouffement des personnages palpable : Pari Banu est prisonnière de sa robe quadrillée, du décor, du lit de l'Empereur, de sa chaise au porteur... Tandis que plus tard quand Ahmed fera irruption chez le Bouffon, leur liberté sera traduite par l'écartement du cadre et le retour à une liberté de mouvements plus grande.Ici l'argent fait son retour dans le film, comme en écho avec la séquence de l'anniversaire du Calife : sauf que quand le Mage récupère l'argent de l'Empereur on dirait une balance, et que le Calife payait pour des prestations, pas pour posséder des personnes.La scène entre Pari Banu et l'Empereur dans le lit peut être vu comme une allégorie de scène de viol, ou du moins de tentative. Et s'ensuit alors une ultime humiliation de l'Empereur qui donne Pari Banu à marier à son Bouffon, au lieu de la tuer.Dans ce palais, et ces décors : les sentiments invoqués et les attitudes des personnages sont très éloignés de ceux de la séquence de présentation de Dinarsade, Ahmed et le Calife. Construites comme en écho de ces séquences de fêtes, les séquences dans le palais de l'Empereur chinois ont une double utilité : elles nous montrent que la bonté d'âme n'est pas nécessairement un corollaire de la richesse pécuniaire, et que derrière la munificence des lieux, les situations peuvent se révéler "laides" et troubles. Les apparences peuvent être trompeuses et encore une fois, le mal est protéiforme : il ne s'incarne pas nécessairement que

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dans un personnage laid ou des monstres, il peut prendre le visage de la richesse, du pouvoir...

L'importance de la position des personnages est primordiale ici : les personnages se dominent réellement selon leurs positions sociales dans l'image. La mise en scène est "basique" mais efficace, afin de nous faire comprendre qui domine physiquement/moralement/psychologiquement les personnages sont montrés différemment. Il y a quelque chose de très classique (rapport à l'époque) dans la relation maître/esclave : comme dans certaines mises en scène de théâtre classique le maître domine toujours physiquement l'esclave en étant positionné au dessus de lui sur la scène.

Entre alors en scène un nouveau personnage : la Sorcière de feu, qui malgré un nom, un élément, et un physique peut-être effrayants est en fait pleine de bonté. C'est elle qui fera d'Ahmed un véritable héros en lui donnant une armure, qu'elle crée et qui jaillit du feu, symbole de puissance s'il en est. La Sorcière par ailleurs, est un personnage intéressant puisqu'elle naît "à retardement" : on la découvre d'abord dans son habitat puis elle est expulsée du volcan, dans le "vrai monde". Tout cela n'est pas sans rappeler le motif du cocon et cette idée d'un "accouchement" des personnages à travers les images.

Lorsqu'Ahmed retrouve Pari Banu, il y a un contraste saisissant dans les couleurs : le bleu dehors -symbolisant la nuit mais aussi l'arrivée massive de l'ombre et de l'obscur puisque les démons envahissent la Chine pour récupérer leur reine- alterne avec l'orangé de l'intérieur de la maison et qui est un doux contraste entre le désir des deux amoureux enfin réunis et la beauté que leurs retrouvailles confèrent à la scène.Pari est ainsi récupérer par les démons et Ahmed se retrouve démuni. Il retourne à Wak-Wak, faisant ainsi un détour, retournant en arrière pour sauver celle qu'il aime. Le voyage initiatique continue ici nous rappelant que le cheminement du personnage pour devenir complètement un héros n'est pas rectiligne, et n'est pas un long chemin sans obstacle, mais bel et bien une longue quête dans laquelle le héros doit s'adapter pour pouvoir mener à bien ses missions.

Un dernier personnage fait alors son entrée : Aladin.C'est le second personnage qui n'éclot pas, il est même au bord de la mort quand arrive Ahmed. Il est donc totalement opposé aux autres personnages : mais sa mort prochaine, arrêtée par Ahmed vient aussi de ce qu'Aladin a perdu son honneur, sa réputation...Le traitement différent à l'image, que lui fait la réalisatrice, est donc tout à fait emblématique du personnage. Il a "tout perdu" : il apparait sans chapeau (ce qui laisse à penser qu'il n'a pas ou plus de position sociale), seul, démuni, face à une mort certaine.Et lorsqu'il raconte son histoire, ce sentiment que le personnage est montré différemment des autres dès le début, mais à l'opposé de l'entrée en scène du Prince Ahmed est accentué.Il y a quelque chose de la quête et du voyage initiatique dans l'histoire d'Aladin, sauf qu'au contraire d'Ahmed, il semble ne pas apprendre de ses erreurs et expériences. Aladin pourrait s'arrêter à demander la liberté au génie mais pêche par excès, par orgueil et envie, qui sont des corollaires du pouvoir que la lampe lui apporte. Son voyage à lui apparait comme une suite d'ascensions et de descentes dont on pourrait croire que la rencontre avec le génie sera la dernière remontée, salvatrice et remplie d'enseignements... mais en vérité ce sera Ahmed qui "sauvera" Aladin.

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Le combat entre le Mage et la Sorcière est intéressant car il est une première "ébauche" de ce qui va suivre : la lutte "finale" entre le bien et le mal. Malheureusement il sera une sorte d'ouverture à la véritable bataille finale car le Mage n'est pas à lui seul l'incarnation du mal dans le film. La séquence du combat débute lorsque la Sorcière invoque le Mage pour le faire apparaître : elle tape des pieds sur le sol et des ronds apparaissent autour d'elle, sorte de halos lumineux, puis laisse place à une sorte de coulée d'où émergera le Mage. Il s'incarne d'abord en lion, tandis qu'elle choisit le serpent. Si lui semble choisir la puissance et la noblesse, elle attaque le mal par le mal en en choisissant un des symboles : le serpent. Le Mage se change alors en scorpion, et la Sorcière emprisonnée par sa queue se transforme en coq, ayant alors l'avantage de pouvoir s'élever dans les airs. Le Mage se change alors en vautour. Puis les deux se transforment en même temps en sorte de poissons/brochets qui s'affrontent en tournoyant. Les deux protagonistes reprennent alors leurs formes originelles et la Sorcière vainc le Mage grâce au feu.Ce combat, plein de symboliques incarne aussi l'idée que la bataille opposant le bien et le mal, le bon et le méchant a lieu dans tous les éléments (sur terre, en l'air, dans l'eau, puis à la fin dans le feu). C'est une façon d'incarner le combat intemporel et sans fin qui anime ces deux opposés. La bataille finale est un crescendo total de ce qui s'est passé durant le film, pour plusieurs raisons : d'abord dans le côté "merveilleux" du film qui va s'incarner ici dans l'utilisation excessive de la magie. Dans cette incarnation de la bataille entre le bien et le mal aussi. Et enfin dans la réunion de tout le "bestiaire" des contes (autant orientaux, qu'occidentaux) : sorcières, génies, djinns, guerriers, princesses, monstres... et le bien triomphe.

Ainsi tous les combats et les transformations, puis le combat final, sont autant d'allégories de la bataille entre le bien et le mal qui a eu lieu durant tout le film, s'incarnant tout à tour dans des luttes morales (Ahmed et les servantes, Aladin et le génie), et physiques (Ahmed et le serpent, puis le monstre). Par la prière à la fin, ou du mois l'appel à la prière, on s'ancre à nouveau dans le concret comme si la magie n'avait jamais réellement existée et le rideau se ferme nous rappelant que la séance de cinéma va se terminer.

CONCLUSION ET QUESTIONS

Le film Les Aventures du Prince Ahmed mêle contes de l'orient, et références occidentales : Lotte Reiniger y apporte ses références occidentales tant dans le schéma narratif utilisé que dans sa construction du personnage du héros - qui apparait ici tel qu'on le perçoit depuis l'antiquité- que dans ses références à l'antiquité : Ulysse et son odyssée, Sisyphe et son rocher, l'hydre aux têtes qui repoussent et doivent être brûlées... La présence de l'Orient reste cependant très importante dans tout le film, mais on peut noter que dans le cas présent, la nationalité de la réalisatrice et sa re-lecture occidentale (et dans une époque donnée) sont indissociables de l'interprétation que chaque spectateur va faire du film.

Page 10: Analyse de "Les aventures du Prince Ahmed"

Le combat entre le Mage et la Sorcière est intéressant car il est une première "ébauche" de ce qui va suivre : la lutte "finale" entre le bien et le mal. Malheureusement il sera une sorte d'ouverture à la véritable bataille finale car le Mage n'est pas à lui seul l'incarnation du mal dans le film. La séquence du combat débute lorsque la Sorcière invoque le Mage pour le faire apparaître : elle tape des pieds sur le sol et des ronds apparaissent autour d'elle, sorte de halos lumineux, puis laisse place à une sorte de coulée d'où émergera le Mage. Il s'incarne d'abord en lion, tandis qu'elle choisit le serpent. Si lui semble choisir la puissance et la noblesse, elle attaque le mal par le mal en en choisissant un des symboles : le serpent. Le Mage se change alors en scorpion, et la Sorcière emprisonnée par sa queue se transforme en coq, ayant alors l'avantage de pouvoir s'élever dans les airs. Le Mage se change alors en vautour. Puis les deux se transforment en même temps en sorte de poissons/brochets qui s'affrontent en tournoyant. Les deux protagonistes reprennent alors leurs formes originelles et la Sorcière vainc le Mage grâce au feu.Ce combat, plein de symboliques incarne aussi l'idée que la bataille opposant le bien et le mal, le bon et le méchant a lieu dans tous les éléments (sur terre, en l'air, dans l'eau, puis à la fin dans le feu). C'est une façon d'incarner le combat intemporel et sans fin qui anime ces deux opposés. La bataille finale est un crescendo total de ce qui s'est passé durant le film, pour plusieurs raisons : d'abord dans le côté "merveilleux" du film qui va s'incarner ici dans l'utilisation excessive de la magie. Dans cette incarnation de la bataille entre le bien et le mal aussi. Et enfin dans la réunion de tout le "bestiaire" des contes (autant orientaux, qu'occidentaux) : sorcières, génies, djinns, guerriers, princesses, monstres... et le bien triomphe.

Ainsi tous les combats et les transformations, puis le combat final, sont autant d'allégories de la bataille entre le bien et le mal qui a eu lieu durant tout le film, s'incarnant tout à tour dans des luttes morales (Ahmed et les servantes, Aladin et le génie), et physiques (Ahmed et le serpent, puis le monstre). Par la prière à la fin, ou du mois l'appel à la prière, on s'ancre à nouveau dans le concret comme si la magie n'avait jamais réellement existée et le rideau se ferme nous rappelant que la séance de cinéma va se terminer.

CONCLUSION ET QUESTIONS

Le film Les Aventures du Prince Ahmed mêle contes de l'orient, et références occidentales : Lotte Reiniger y apporte ses références occidentales tant dans le schéma narratif utilisé que dans sa construction du personnage du héros - qui apparait ici tel qu'on le perçoit depuis l'antiquité- que dans ses références à l'antiquité : Ulysse et son odyssée, Sisyphe et son rocher, l'hydre aux têtes qui repoussent et doivent être brûlées... La présence de l'Orient reste cependant très importante dans tout le film, mais on peut noter que dans le cas présent, la nationalité de la réalisatrice et sa re-lecture occidentale (et dans une époque donnée) sont indissociables de l'interprétation que chaque spectateur va faire du film.