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SIDAsolidarité #15 mai 2007 Hommage à Arnaud Marty-Lavauzelle p-3 Sida, halte aux charlatans p-8 Dossier: 2007, l’année du dépistage p-11/16 Le théâtre de l’invisible au service de la prévention p-19

Sida Solidarité Magazine N°15

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Bulletin d'information de l'ALCS Sida Solidarité Magazine N°15 Mai 2007

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Page 1: Sida Solidarité Magazine N°15

SIDAsolidarité#15 mai 2007

Hommage à Arnaud Marty-Lavauzelle p-3 Sida, halte aux charlatans p-8

Dossier: 2007, l’année du dépistage p-11/16

Le théâtre de l’invisible au service de la

prévention p-19

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Sommaire

SIDAsolidarité#15 mai 2007

Hommage à Arnaud Marty-Lavauzelle / 3 L’effet protecteur de la circoncision contre le sida confirmé / 6 Interview Omar Amri / 7 Sida, halte aux charlatans / 8 Allo Info Sida, le numéro qui en dit long sur le sida au Maroc / 9 Sidaction Maroc 2005: Bilan de la 1ère tranche des réalisations / 10 DOSSIER: 2007, l’année du dépistage / 11 PATAM: ALCS l’Africaine / 17 ALE Jordanie-USA: Rien que des coûts, pas de bénéfices / 18 Le théâtre de l’invisible au service de la prévention / 19 Le droit aux soins des migrants en question / 21

EDITO Sale temps pour l’accès aux traitements Six ans sont passés depuis la déclaration de Doha qui a confirmé la légitimité des pays en voie de développement de protéger la santé publique et l’accès aux traitements notamment par le recours aux flexibilités de l’accord ADPIC. Aujourd’hui le constat est décevant. Très peu de pays ont mis en application ces souplesses. Pire, ceux qui ont osé franchir le pas subissent pressions et chantages en tous genres.

Ainsi la Thaïlande qui a dû décréter une licence obligatoire sur la version non réfrigérée du Kaletra s’est attirée les foudres du laboratoire Abbott, qui non seulement a stoppé l’enregistrement de cette molécule dans le pays pour bloquer l’introduction de versions génériques, mais a également retiré tous les dossiers en cours d’enregistrement, portant sur d’autres médicaments, histoire de punir la Thaïlande. Une punition qui signifie priver un peuple entier de l’accès aux médicaments. Notons au passage que la Thaïlande n’a fait qu’appliquer ses droits garantis par les règles du commerce mondial.

En Inde, c’est un procès d’un autre genre qui a lieu en ce moment. Le laboratoire Novartis poursuit le gouvernement Indien pour l’obliger lui aussi à renoncer à ses droits notamment l’utilisation des clauses qui permettent de se protéger contre les brevets abusifs.

En Jordanie, l’ONG Oxfam vient de publier un rapport sur l’impact de l’accord de libre échange sur l’accès aux médicaments. Quelques années à peine après la mise en application de cet accord, l’impact est bien là et contrairement à la propagande américaine il n’a rien de positif. Le Maroc n’a qu’à bien se tenir!

En Gambie, c’est le chef de l’état en personne qui s’est improvisé guérisseur et propose de soigner le sida, poussant ainsi des milliers de personnes à arrêter le traitement antirétroviral au profit d’une potion présidentielle magique. Chez nous, c’est le Chrif El Mekki qui prétend guérir le sida par une simple poignée de main, pendant qu’ Al Jazeera fait la promotion d’un Cheikh Yéménite dont l’arme fatale contre le VIH consiste en un simple Hadith du prophète!

C’est dire que le combat est loin d’être gagné et que les menaces affluent de tous les côtés. Il nous faut donc redoubler de vigilance et continuer à se battre sur tous les fronts.

Enfin, et après plusieurs mois d’absence due à la fin du financement par le PNUD, SIDAsolidarité revient avec une nouvelle maquette et plus de pages; cette fois-ci grâce au soutien du Ministère des Affaires étrangères français et de Sidaction Maroc 2005.

Bonne lecture.

Othoman Mellouk

SIDAsolidarité, le bulletin d’information interne de l’Association de lutte contre le sida au Maroc est publié grâce au soutien du ministère des Affaires étrangères français et à Sidaction Maroc 2005.

Ont contribué à ce numéro: Rahma Youssfi, Mariam Fadouallah, Rose-Marie Marque, Mehdi Karkouri, Nadia Rafif, Marion Wadoux & Othoman Mellouk.

Contact: [email protected]

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Le sida a vaincu son infatigable combattant… C’est avec ces mots qu’Eric Favereau, journaliste au quotidien français Libération et ami intime d’Arnaud Marty-Lavauzelle annonça, le 14 février 2007, la mauvaise nouvelle. Implacable…

Du Mali en passant par le Yémen, Le Burkina Faso, ou encore l’Ile Maurice, les messages affluent, remplis d’émotion, témoignant du charisme dont jouissait Arnaud partout où son combat contre le sida l’avait mené.

Pour les anciens de l’ALCS, Arnaud fait aussi partie de notre histoire. Dès la première rencontre avec l’ALCS, le coup de foudre. Ensuite, une amitié et une fidélité sans faille. Il a été des premiers combats de l’ALCS, et les liens n'ont jamais été rompus, jusqu'au bout. Les assises de l’ALCS étaient pour lui un moment privilégié. Fatigué déjà par la maladie, il n’a pas hésité à nous rejoindre à Casablanca il y a deux ans. Il aimait le Maroc au point d’acquérir une maison à Marrakech. Une maison à son image, baignée de lumière, où il aimait recevoir et s’enquérir des nouvelles de l’ALCS.

Pionnier de la solidarité avec les malades des pays en développement, Arnaud a été l’un des premiers militants à se battre en faveur de l’accès universel aux traitements, dans un contexte où beaucoup ne considéraient pas encore cette question comme prioritaire. Son amitié indéfectible pour l’ALCS s’exprima à de nombreuses occasions, notamment en 2001, alors que se jouait le premier round du Fonds mondial. Arnaud ne se résignait pas à voir le Maroc écarté du fait que tous arguaient que nous n’étions pas un pays prioritaire. Il fit jouer ses relations pour que l’ALCS soit présente à Bruxelles en novembre 2001. Notre pays fut ainsi le premier de la région à voir sa proposition acceptée dès le premier round.

Nous gardons tous d’Arnaud le souvenir d’un interlocuteur exigeant, qui aimait la contradiction, et qui défendait becs et ongles ses convictions. Le souvenir d’un homme passionné, plein d’humour et d’humanité. Arnaud s’est battu courageusement contre la maladie qui était aussi la sienne. Il était tellement le symbole d'un miracle sans cesse renouvelé que même le 14 février, on n'arrivait pas à y croire.

Choukrane Arnaud !

Hommage à Arnaud Marty-Lavauzelle

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ACTU/Monde

pays à faible revenu et 1000$ dans les pays à revenu intermédiaire.

On estime que 300 000 patients reçoivent des traitements de seconde ligne aujourd’hui, alors que 400 000 en ont un besoin urgent, en premier lieu en Afrique. 10% du total des malades pourraient avoir besoin d’ARV de seconde ligne avant la fin de la décennie, soit entre 400 000 et 500 000 personnes supplémentaires, dont 70% dans les pays à bas revenu. L’objectif d’unitaid est de couvrir 40 000 nouveaux patients dès 2007 et 69 000 en 2008. 27 pays (dont 23 en Afrique sub-saharienne) sont d’ores et déjà bénéficiaires du programme en 2007. Les premiers approvisionnements pour 2007 arriveront en Côte D’Ivoire à partir de juillet (notamment au Cameroun, au Botswana, au Bénin, au Tchad, au Burundi, en Haiti, au Togo ou en Thaïlande).

Unitaid poursuit les négociations avec ses partenaires opérationnels (OMS, Fonds Mondial, UNICEF, Fondation Clinton, Stop TB) pour diminuer et rendre abordables les prix des traitements contre le VIH/ sida, le paludisme et la tuberculose dans les pays du sud.

A l’occasion de la réunion du Forum consultatif d’Unitaid le 8 mai dernier, le Ministre Philippe Douste Blazy, président du CA, a annoncé une baisse importante de prix sur les médicament de seconde ligne contre le VIH/ SIDA, obtenue par Unitaid en partenariat avec la Fondation Clinton. Grâce à ce partenariat - qui apporte plus de 120 millions de dollars sur 2007/ 2008 pour le programme d’approvisionnement des antirétroviraux de seconde ligne - les prix obtenus auprès des laboratoires représentent une baisse de 25% dans les pays à faible revenu et de 50% dans les pays à revenu intermédiaire. Les pays ayant signé une convention avec la Fondation Clinton, c’est le cas du Maroc, pourront également bénéficier de cette baisse des prix pour assurer leur approvisionnement.

L’accord concerne 7 formulations différentes d’ARV. Un appel d’offre international a été lancé, ouvert à tous les laboratoires de marque et aux génériqueurs susceptibles de répondre aux exigences de qualité d’Unitaid. Suite à cette procédure, les laboratoires Matrix par exemple vendront l’Acabavir à 330 $ (contre 700 $) et le Ténofovir à 149$ (contre 300 en moyenne). Cipla a accepté de vendre le Ténofovir à 151 $. Ranbay fournira de la Didanosine pour 156$. Abbott va fournir une forme résistante à la chaleur du Kaletra, à 500$ dans les

Le Conseil d’administration du Fonds mondial a nommé le 8 février dernier Michel Kazatchkine, médecin et expert en santé internationale, au poste de Directeur exécutif. Il remplace Sir Richard Feachem, premier Directeur exécutif du Fonds mondial, qui s’est retiré au terme d’un mandat de cinq ans le 31 mars dernier. En sa qualité de médecin, le Professeur Kazatchkine suit des patients atteints du VIH/SIDA depuis plus de 20 ans et a dirigé la deuxième plus grande Agence de recherche sur le SIDA au monde. Il était récemment Ambassadeur de France chargé de la lutte contre le VIH/SIDA et les ma lad ies t r ansmiss ib les . Le Professeur Kazatchkine a été Vice-

président du Conseil d’administration du Fonds mondial et le premier président du Comité technique d'examen des propositions, entité responsable de l’évaluation de la qualité des demandes de subvention. Avec 450 programmes dans 136 pays, le Professeur Kazatchkine dirigera la plus grande institution internationale de financement de programmes contre la tuberculose et le paludisme, se plaçant également parmi les trois plus importants bailleurs de fonds au niveau mondial en termes de financement de programmes VIH/SIDA. A rappeler que Michel Kazatchkine avait fait le déplacement au Maroc sur le plateau de 2M à l’occasion du Sidaction Maroc 2005.

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UNITAID et la Fondation Clinton annoncent des nouvelles baisses des prix des ARV

SIDASOLIDARITÉ N° 15

Michel Kazatchkine élu directeur exécutif du Fonds mondial

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ACTU/Maroc

La mission que devait effectuer la Princesse Mathilde de Belgique au Maroc, du 2 au 4 mai dernier, en sa qualité de représentante spéciale de l’UNICEF/ONUSIDA pour la problématique "enfants et sida", a été reportée officiellement sans aucune précision des raisons de ce report. La visite de la princesse était très attendue par les acteurs de la lutte contre le sida notamment l’ALCS qui devait la recevoir. Certains titres de la presse marocaine avaient fait preuve d’un véritable déni de l’épidémie au Maroc digne des régimes les plus opaques sur la question, notamment en s’interrogeant sur le bien-fondé d'une telle visite. Ils ont estimé que la princesse Mathilde était la bienvenue au Maroc mais pas en tant que représentante des Nations Unies, puisque « le Royaume n'est -Dieu merci- pas un de ces pays où le fléau du VIH fait des ravages dans la population, et ceux qui en sont atteints, reçoivent les soins appropriés », ajoutant que, « la princesse rentabiliserait mieux son voyage en se rendant en Afrique Sub-Saharienne ». Nous rappelons que la coopération Belge est un bailleur qui participe au financement du plan stratégique national contre le sida en soutenant un certain nombre de projets notamment dans la région de Casablanca. Il ne manquerait plus que ces journaux demandent à la Belgique de transférer ses financements vers l’Afrique Sub-Saharienne. N’en déplaise à certains, le sida existe au Maroc, et les enfants malades du sida aussi. Alors, la princesse sera la bienvenue quand elle le souhaitera.

Report de la visite de la princesse Mathilde

2007

Le Conseil d’administration du Fonds mondial, réuni au Guatemala a approuvé le 4 novembre 85 soumissions dont la nouvelle proposition du CCM Maroc portant sur le VIH/SIDA avec cette fois, une composante tuberculose. Cette nouvelle approbation représente pour le pays la chance de continuer à garantir une meilleure prise en charge des personnes touchées, et notamment la pérennité de l’accès universel aux ARV, sans laquelle aucun programme de prévention ne pourrait être réellement

efficace. L’ALCS a quant à elle vu tous ses projets acceptés, et en plus de la reconduction et du renforcement de ses programmes auprès des professionnel(e)s du sexe et des ouvrières du secteur agro-alimentaire et textile, trois nouveautés pour les cinq ans à venir, à savoir le renforcement et l’extension des programmes d’aide à l’observance, et la mise en place d’un programme de prévention auprès des routiers, et des populations étrangères migrantes.

Les usagers de drogues injectables qui jusqu’à là n’étaient pas ciblés par le plan stratégique national, bénéficieront d’un programme spécifique de réduction des risques au VIH Sida, avec l'appui technique de l'Onusida et le soutien financier du Fonds mondial. Déjà mis en œuvre dans deux sites pilote, l’un en résidentiel à l’hôpital Razi de Salé, l’autre ambulatoire au centre Hasnouna de Tanger, il sera progressivement étendu à Tétouan. L’ALCS sera partie prenante de ce projet, avec la mise en place à Tétouan d’équipes mobiles (un médecin et un infirmier) qui iront à la rencontre des usagers sur le terrain. Ce programme de réduction des risques comporte, entre autre, et c’est la grande nouveauté, l 'introduction du traitement de substitution par la méthadone, un programme d’échange de seringues et une stratégie d’éducation de proximité. Il a bénéficié du soutien politique officiel des départements concernés, à l’occasion de la Conférence sur la santé mentale et les toxicomanies qui s’est tenue en février 2007. A noter qu’après l’Iran, le Maroc est le premier pays musulman à mettre en place un tel programme.

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La proposition Maroc acceptée au 6ème round du Fonds Mondial

Le Maroc opte pour la méthadone

Le Maroc vient de rejoindre officiellement UNITAID, le 16 février 2007 lors du 24e sommet Afrique-France de Cannes. Cette initiative, lancée par la France, vise à fournir des médicaments de première et deuxième intention contre le sida, le paludisme et la tuberculose à bas prix dans les pays en développement et d'élaborer un mécanisme de soutien au programme de préqualification des produits pharmaceutiques de l'OMS. En rejoignant l’initiative, le Maroc devra appliquer à son tour une taxe sur les billets d’avion émis sur son territoire. Une bonne façon pour le pays de participer à la solidarité internationale et ne pas se contenter d’en bénéficier seulement. A ce jour, on ne connaît pas encore le montant de cette taxe ni la date de sa mise en application.

Le Maroc rejoint UNITAID

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Cette fois, l’information est quasi sûre : un homme adulte hétérosexuel qui est circoncis voit son risque de contracter le SIDA diminuer de moitié. Dans un communiqué commun avec l’ONUSIDA, publié fin mars 2007, l’OMS a annoncé officiellement que la circoncision était une pratique qu’il faudrait dorénavant intégrer dans les stratégies de prévention pour réduire la transmission sexuelle du virus de la femme à l'homme. On estime aujourd’hui, qu’environ 30 % des hommes dans le monde sont circoncis, ce qui représente 670 millions d’individus, dont 68 % sont de confession musulmane,1 % de confession juive et 13 % sont des Américains non-musulmans et non-juifs. La circoncision est aussi pratiquée depuis des milliers d’années en Afrique sub-saharienne pour des raisons ethniques indépendantes de la religion. Elle relève alors d’un rite traditionnel de passage au statut d’homme.

On connaissait le lien entre le VIH et la circoncision depuis les années 80. L'an dernier, une vaste étude menée en Afrique du Sud auprès de 3.000 hommes avait déjà fait apparaître que la circoncision diminuait le risque de 60%. Cet acte chirurgical consiste en l’ablation totale ou partielle du prépuce, peau qui entoure le gland de la verge. Son rôle protecteur est dû au fait que la face interne du prépuce est une muqueuse très fine, très perméable et qui contient des cellules hôtes du VIH. Elle peut ainsi récupérer et retenir le VIH contenu dans les sécrétions vaginales. Chez l’homme circoncis, la muqueuse du prépuce ayant été retirée, la surface exposée lors de la relation sexuelle est plus réduite. La muqueuse du gland se kératinise et devient plus semblable à la peau, qui elle est imperméable au virus. De plus, après un rapport sexuel, un pénis circoncis sèche très rapidement ; or, le VIH est également sensible à la dessiccation.

Partant de l'hypothèse d'une réduction de 60 % de la transmission du VIH chez l'homme circoncis, le nombre d'infections et de

décès liés au VIH pourrait diminuer considérablement en Afrique sub-saharienne si la pratique de la circoncision se généralisait d’ici 10 ans. En une vingtaine d’années, 5,7 millions de nouvelles infections et 3 millions de décès pourraient ainsi être évités, chez les hommes et les femmes, selon l’OMS.

Prudence cependant. Bien que les résultats démontrent que la circoncision réduit le risque pour les hommes d'être infectés par le VIH, les institutions des Nations Unies soulignent que la protection n'est pas complète. Les hommes circoncis peuvent toujours contracter le VIH et, une fois séropositifs, transmettre le virus. La circoncision ne doit donc jamais se substituer à d'autres méthodes de prévention à l'efficacité reconnue. Elles recommandent aux pays qui décident de proposer plus largement la circoncision aux hommes comme moyen supplémentaire de se protéger contre l'infection par le VIH, de veiller à ce que cette intervention soit pratiquée par des professionnels qualifiés, dans un cadre hygiénique et dans des conditions de consentement éclairé, de confidentialité, de conseils sur la réduction des risques et de sécurité.

De leur part les activistes de la lutte contre le sida craignent un effet négatif des dernières annonces se traduisant par un sentiment de fausse sécurité de la part des hommes circoncis et l’abandon de l’utilisation du préservatif, seul moyen de prévention à ce jour ayant prouvé son efficacité. Comme le rappelle Hakima Himmich : « Au Maroc, 100% des hommes porteurs du VIH sont circoncis, ca me les a pas empêché d’être contaminés ». La vigilance s’impose d’autant plus que les résultats dont nous disposons aujourd’hui ne concernent que la transmission hétérosexuelle dans le sens femme-homme, un rapport qu’on sait déjà peu contaminant. Ils ne prennent pas en compte la transmission dans le sens homme-femme ni les rapports anaux qui sont pourtant très répandus aussi bien chez les populations ayant des pratiques homosexuelles que hétérosexuelles.

Rose-Marie Marque

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L'effet protecteur de la circoncision contre le Sida confirmé

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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Les relations entre l’association française AIDES et les associations de lutte contre le sida du Maghreb se sont construites autour de la réalisation du Programme Cap prévention à partir de 1996. Ce projet, construit autour d’actions de sensibilisation réalisées en été sur les bateaux qui relient les pays du Maghreb à la France et à l’Espagne, élaboré, mis en œuvre, évalué et modifié en concertation, a permis, entre 1996 et 2002, de tisser des liens étroits entre chacune des associations partenaires. En 2004, le projet AMEDIS (Action entre le Maghreb et l’Europe pour le Dépistage, l’Information et le Soutien) a pris la relève. Questions à Omar Amri, chargé du programme à AIDES...

L’interview

2007

Comment est né le programme AME-DIS ?

Durant le programme Cap prévention, la conduite des actions lors des traversées par les volontaires français et maghrébins ainsi que les séjours entre deux traversées dans les pays hôtes ont permis de créer des rela-tions interpersonnelles fortes et d’établir des modes d’intervention communs. Le regrou-pement d’associations de lutte contre le sida de part et d’autre de la Méditerranée autour d’un même projet, sur un principe de réci-procité, a construit au fil des années les contours d’un fonctionnement en ré-seau. Plusieurs facteurs ont permis d’abou-tir à ce fonctionnement. D’abord, des affini-tés culturelles évidentes entre d’une part chaque pays du Maghreb, les partenaires du projet et, d’autre part, ces mêmes pays du Maghreb et la France, à travers la ville de Marseille. Ensuite, le regroupement de per-sonnes qui se reconnaissent toutes au-delà de leur appartenance nationale dans les élé-ments qui fondent la lutte contre le sida : prévention, soutien aux personnes vivant avec le VIH mais aussi, lutte contre les dis-criminations et combat pour les droits de l’Homme.

Quels sont les principaux objectifs d’A-MEDIS ?

Le programme a pour vocation de renforcer la mobilisation associative locale face au VIH/sida en Algérie, au Maroc, en Maurita-nie et en Tunisie à travers la promotion et le partage des meilleures pratiques de préven-tion, de dépistage, de soutien et d’organisa-tion de la vie associative.

Quels sont les principaux axes de travail développés entre les différents partenai-res ?

A la demande de l’ensemble des partenai-res, il a paru nécessaire de renforcer les dynamiques locales de lutte contre le sida à partir des partenariats établis avec les associations au Maroc, en Tunisie et en Algérie ; d'intégrer aussi les acteurs asso-ciatifs Mauritaniens et de favoriser de manière progressive la coopération sud/sud à travers le partage d’expérience sous forme de stages, de formations et de ren-contres inter-associatives. Ces axes s’ins-crivent dans un plan d’action transversal commun à tous les partenaires tout en respectant les besoins et spécificités de chacun des pays.

Quelles associations sont partenaires du programme?

Elles sont au nombre de 5: l’APCS-Oran pour l’Algérie, au Maroc l’ALCS, l’Asso-ciation Espoir et Vie de Mauritanie, en Tunisie l’ATL MST/SIDA et enfin, l’as-sociation française AIDES.

A ce jour, quelles sont les réalisations d’AMEDIS ?

Les principales réalisations accomplies dans le cadre de la première phase du projet en 2006, comprennent : l’identifica-tion des partenaires du projet à travers des missions exploratoires pour la Tunisie et la Mauritanie et la mise en place de plu-sieurs formations et stages à l'intention des partenaires du programme. A titre d’exemple, l’ALCS a bénéficié de plu-sieurs formations portant sur : l’accompa-gnement des personnes vivant avec le VIH sous traitement antirétroviral ; un atelier de bonnes pratiques de gestion associative et de communication ; le "théâtre forum" (méthode de sensibilisa-tion publique sur les problématiques liées

au sida) ; et des stages en France sur la gestion d'un réseau associatif au niveau national ; la promotion de la santé avec les gais et la communication associative ex-terne. Le projet a également contribué à la mise en place d’un centre de dépistage anonyme et gratuit, le 1er du genre en Algérie, par l’APCS.

En mars 2007, une rencontre maghré-bine de concertation et d’échange d’ex-périences et d’expertises sur le dépistage s’est tenue à Oran, quels en étaient les objectifs?

Cette Journée thématique était l’occasion pour les acteurs associatifs maghrébins et français de confronter leurs expériences et leurs démarches en matière de dépistage anonyme et gratuit. L’objectif était le sou-tien à la visibilité et à la reconnaissance de l’APCS pour la mise en place d’un centre de dépistage associatif en Algérie.

Des perspectives pour l’année 2007 ? Les activités qui restent à mettre en place ?

2007 sera l’année où le programme AME-DIS atteindra sa vitesse de croisière. L’ar-rivée dans le programme des partenaires mauritaniens et tunisiens favorisera la dynamique d’échange voulue par le pro-gramme. L’un des moments fort sera l’or-ganisation de la 2ème Journée Thématique du programme en même temps que les 7e assises de l’ALCS, renforçant leur dimen-sion maghrébine et l’échange entre les ONG du Maghreb membres de ce pro-gramme.

Propos recueillis par Nadia Rafif

Pour plus d’informations sur le programme AMEDIS : www.projet-amedis.org

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Omar Amri: AMEDIS, une plateforme d’échange entre AIDES et les ONG du Maghreb

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LE d ernier en dat e d e ces ch arlatan s n ’est autre qu e Yah ya Jammah, le Présid ent Gamb ien en perso nne.

Début 2007, la fièvre Chrif El Mekki s’empare de la presse nationale. Et pour cause : le Chrif prétend détenir des pouvoirs supranaturels qui lui permettent de soigner d’une simple poignée de main des maladies jusque là incurables, y compris le sida ! Loin d’être un cas isolé, les charlatans du sida ont toujours existé et pas seulement au Maroc. L’ALCS appelle à la vigilance.

Que l’on soit clair, en l’état actuel des connaissances, il y a une certitude : on ne guérit pas de l’infection à VIH ! Les médecins ne pouvant malheureusement pas faire de miracles certains charlatans ont fait depuis de nombreuses années des propositions de traitements fantaisistes et parfois fort onéreux. Ce fut le cas récemment au Maroc avec Chrif El Mekki, le soi-disant guérisseur de Skhirat qui prétend soigner le sida en serrant tout simplement la main d’une personne malade. Autre cas, un émirati installé depuis quatre ans dans notre pays affirme posséder des traitements à base de plantes contre les maladies les plus rebelles sida y compris. Sa recette ? Un mélange d’eau bénite, d’eau de rose, de miel pur et de plantes enrobées dans des dattes !

Dans un communiqué de presse publié le 2 février 2007, l’ALCS a mis en garde la population et les personnes vivant avec le VIH en particulier contre tous ceux qui abusent de la détresse et du désespoir de milliers de malades en promettant des solutions miracle pour en finir avec le VIH ou d’autres maladies à ce jour incurables. Une attitude qui devient criminelle quand elle pousse des personnes à arrêter leur traitement médical en échange de potions magiques ou encore une poignée de main aux vertus soi-disant magiques.

Le phénomène des charlatans du sida n’est pas nouveau et ne se limite pas au Maroc. Un simple tour sur Internet suffit pour se rendre compte de l’étendue de la pratique et de l’imagination débordante de la filiale des profiteurs en tous genres. Exemples : «un phytothérapeute

Togolais, avec un produit à base de plantes, rend tout séropositif forcément séronégatif…» ; «guérir du Sida avec un potage, c’est ce qu’ont expérimenté avec succès plus de 5 000 malades…». Un ancien ministre de la Santé du Cameroun dirige même une clinique qui prétend avoir mis au point Vanhivax : le vaccin contre le Sida ! Même les pays occidentaux à la culture jugée plus rationnelle n’y échappent guère. En France, des individus proposaient en 1999 contre espèces sonnantes et trébuchantes, un traitement : le colladeter. Il s’agissait de recevoir 40 injections intra musculaires de mimosa pudicaline, traitement mis au point par le Dr. Cruz dans une clinique roumaine.

Mais le dernier en date de ces charlatans n’est autre que Yahya Jammah, le Président Gambien en personne. Des plantes et une prière sur le Coran sont la base du remède miracle contre le Sida que le président a présenté en janvier à des diplomates étrangers. La guérison surviendrait entre trois à trente jours. Actuellement, des publicités radios et télévisées sont diffusées par le ministère de la Santé du pays clamant les «vertus» du traitement. Selon le site officiel du Président, les tests sanguins effectués par un laboratoire sénégalais, puis par le très réputé Institut National d’Hygiène (INH) au Maroc indiqueraient que neuf patients ayant pris le traitement montraient une charge virale indétectable. Quid en réalité de ces sérums ? La coordinatrice de l’ONU dans le pays ayant osé critiqué la méthode du président a été déclarée «persona non grata». Certains membres de la communauté des affaires ont expliqué ne pas avoir d’autre choix que de contribuer au fonds traitement du sida que le président a instauré de crainte d’être ciblés par des représailles.

Devant la multiplication de ces cas, les associations de lutte contre le sida devraient rester vigilantes et mobilisées pour informer les personnes vivant avec le VIH sur le danger de telles pratiques. Les médias jouent également un rôle important pour dénoncer à chaque fois ceux qui profitent de la misère des malades face à une maladie toujours mortelle et une recherche qui progresse hélas très lentement.

Rose-Marie Marque

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Sida, Halte aux charlatans

SIDASOLIDARITÉ N° 15

Page 9: Sida Solidarité Magazine N°15

Quatre années se sont écoulées depuis la création du centre d’écoute Allo Info Sida, dont l’objectif est de permettre l’accès à la prévention à l’ensemble des citoyens, de fournir des informations fiables et rassurantes sur le sida, infections sexuellement transmissibles et hépatites virales ; et d’apporter un soutien aux personnes vivant avec le VIH. Une équipe d’écoutants professionnels formés à tous les aspects de la maladie est mise à la disposition des appelants, du lundi au samedi entre 9h et 21h, pour répondre de façon anonyme et confidentielle à leurs questions et les orienter.

2.097 appels reçus en 2006 En 2006, Allo Info Sida a répondu à 2.097 appels dont 73% proviennent d’hommes et 27% de femmes. 75% des appelants sont des jeunes de moins de 30ans. La tranche d’âge la plus dominante demeure celle des 25-29 ans avec un taux de 39%, suivie par la tranche d’âge des 15-19 ans avec un taux de 19% et celle des 20-24 ans avec 17%. Les demandes de renseignements représentent 55% de la totalité des appels. Les demandes d’orientation 22% et les demandes de soutien 8%.

80% des appelants, cette année, ont évoqué le VIH/SIDA en premier plutôt que d’autres pathologies. Les questions sur les IST étaient de l’ordre de 8% et les hépatites virales dans 9% des cas avec un fort intérêt pour l’hépatite virale C en comparaison avec l’année précédente.

Les affiches et les brochures ont été, en 2006, le moyen de connaissance par excellence de la ligne d’écoute avec 37%, mais la radio et la télévision ont enregistré un recul considérable par rapport à 2005 avec 11% pour se placer derrière Internet 18% et l’association 12%. Ceci s’explique par l’absence de campagne de prévention audio-visuelle en 2006.

La peur de contamination placée en tête des inquiétudes des appelants Une fois de plus, c’est la peur de la contamination qui s’est placée en tête des inquiétudes des appelants avec un taux de 43%. Le deuxième souci qui interpelle les appelants est la question de la transmission du VIH lors de la pénétration qui a occupé 34% des demandes. Les pratiques sexuelles restent couvertes d’un mur de pudeur dans la société marocaine. Ainsi ils étaient 54% à se poser des questions sur les pratiques sexuelles, l’anonymat de la ligne permettant aux appelants d’aborder plus facilement la question.

La question sur les symptômes préoccupe 38 % des appelants contre 33 % pour 2005. L’angoisse et la peur de la maladie font souvent croire aux appelants qu’une simple diarrhée est un symptôme du VIH, les écoutants expliquent aux appelants que seul un dépistage peut révéler la contamination.

Les questions abordant le préservatif sont présentes dans 38% des appels. Concernant les difficultés de prévention, 36 % des appelants évoquent les difficultés de prévention en 2006 contre seulement 24 % en 2005. C’est peut être un signe positif de prise au sérieux des risques de contamination, et des retombées positives des efforts de sensibilisation. Les peurs irraisonnées occupent cette année un taux élevé de 42% ce qui explique que cette maladie est source permanente d’angoisse. Elles sont liées aux incompréhensions liées aux modes de transmission d’où l’intérêt de ne pas baisser la vigilance et continuer les efforts d’information et de sensibilisation du grand public.

Les appelants par gêne continuent à se cacher sous une autre identité En ce qui concerne le dépistage, 33 % des questions sont axées sur les coordonnées des centres de dépistage anonyme et gratuit, 32 % sur les généralités et le déroulement du test et 21% sur la fiabilité et validité de ce dernier.

Les personnes vivant avec le VIH ont été nombreuses à appeler, 6% pour 2006 contre seulement 1% pour 2005. Ce pourcentage semble sous estimé vu que seulement 31% des appelant affirment parler pour eux même. Nous considérons que les appelants par gêne continuent à se cacher sous une autre identité (ami, famille etc.) pour pouvoir poser leurs questions sur des sujets qu’ils jugent tabous ou difficiles.

Une diminution de 27 % est constatée sur les appels concernant le traitement, comme d’ailleurs sur la plupart des questions relatives à cet item, les plus fortes baisses étant enregistrées sur les effets secondaires et la recherche avec respectivement moins 87% et 83%. Cette baisse pourrait être liée à la décentralisation du programme éducation thérapeutique en partenariat avec l’ALCS et le ministère de la Santé vers de nouvelles villes.

La ligne Allo Info Sida (N°éco 0810 025 25) a été créée en 2002 par l’Association de lutte contre le sida (ALCS) en partenariat avec Sida-Info-Service France. Elle bénéficie du soutien du ministère de la Santé du Maroc, de la mairie de Paris, du Fonds mondial de lutte contre le sida, du ministère des Affaires étrangères français et de Maroc Télécom.

Rahma Youssfi

Allo Info Sida, le numéro qui en dit long sur le sida au Maroc

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Un an après l’émission événement, 2M a diffusé le jeudi 15 mars une émission intitulée «Sidaction Maroc 2005 : Le bilan». Il s’agissait pour 2M et l’ALCS de faire le point sur la première tranche des réalisations mises en place grâce aux dons collectés lors de cette opération. En ce qui concerne le soutien aux personnes vivant avec le VIH, des caisses de solidarité ont été mises en place dans les villes où il existe des activités de prise en charge. Elles permettent de venir en aide aux patients nécessiteux pour la prise en charge des médicaments non fournis par le ministère de la Santé, des examens biologiques et radiologiques, du transport vers l’hôpital, des consultations externes etc. Une dotation importante en médicaments pour le traitement des maladies opportunistes a également été acquise. Parallèlement, des assistantes sociales et des éducateurs thérapeutiques ont été recrutés dans ces villes. Un fonds solidaire pour favoriser les activités génératrices de revenus (AGR) a été mis en place en lien avec l’ADS (agence de développement social) et l’AMSED. Ces AGR visent à aider les personnes touchées ou exposées au VIH/sida à améliorer leurs conditions de vie socioéconomiques et à mieux faire face au VIH.

Dans le domaine de la prévention, treize antennes de l’ALCS ont pu bénéficier de fonds et d’équipement leur permettant de jouer pleinement leur rôle dans la prévention et l’accueil du public dont les personnes

vivant avec le VIH. Cinq antennes ne disposant pas de locaux ont pu s’en procurer. Sans un local et sans équipement adapté, il est en effet impossible d’organiser des séances de sensibilisation de façon régulière, surtout pour les groupes difficiles d’accès. Le matériel nouvellement acquis, facilement transportable, a ainsi permis d’organiser un nombre important de séances d’information/ prévention dans plusieurs lieux, y compris en milieu carcéral.

Afin de faciliter l’accès au test du VIH, sept nouveaux centres d’information et de dépistage anonyme et gratuit (CIDAG) ont été ouverts à Beni Mellal, Fès, Laayoune, Larache, Tetouan,Tiznit, Mohamadia . Ceux de Rabat et Meknès ont été remis à niveau. L’ALCS a pu aussi multiplier les sorties des unités mobiles de dépistage afin de proposer le test dans des zones où il n’existe pas de structures de diagnostic. Par ailleurs, le Sidaction a participé au financement de « la Caravane du Rif » et des « Journées nationales de dépistage 2007 », qui ont permis en trois jours de réaliser 7470 tests dans 45 villes différentes.

En plus des sections de l’ALCS, 24 associations, sélectionnées sur la base d’un appel d’offre, ont obtenu des fonds pour réaliser des activités de prévention auprès de populations variées dans toutes les régions du Maroc. Quatre projets de recherche appliquée, ayant une incidence directe sur la qualité de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH, ont également pu être soutenus.

Enfin, Sidaction Maroc 2005 a contribué à lever les tabous et à faire reculer les comportements d’intolérance vis-à-vis des personnes touchées par le VIH. En témoigne l’histoire de ces deux familles qui par ignorance des moyens de transmission, avaient mis à la porte leurs fils séropositifs, par peur d’être contaminés, et qui se sont réconciliés avec eux suite à l’émission. Plusieurs parents nous ont également rapporté que le Sidaction les a aidé à parler du Sida plus facilement avec leurs enfants.

L’ALCS continuera à oeuvrer pour la concrétisation des objectifs fixés lors du Sidaction Maroc 2005, à savoir la prévention, la promotion du test de dépistage, ainsi que le soutien et l’intégration sociale des personnes vivant avec le VIH, et ce, sous le contrôle d’un auditeur indépendant et du comité de garantie de la transparence. Ce dernier s’est réuni le 13 février 2007 et qui a certifié les comptes de Sidaction.

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Sidaction Maroc 2005:

Bilan de la 1ère tranche des réalisations

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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Lors de la dernière Conférence internationale sur le VIH/SIDA, le dépistage a fait partie des sujets d'actualité donnant lieu à plusieurs séances et débats parfois houleux. Et pour cause : le dépistage précoce est aujourd’hui reconnu en tant qu’outil incontournable en matière de prévention et représente le levier de l’accès aux traitements antirétroviraux; cependant, l’élargissement du test de dépistage et sa proposition en routine pose un certain nombre de problèmes éthiques.

Au Maroc, on a assisté ces derniers mois à la multiplication des initiatives en faveur du dépistage précoce : organisation de séminaires autour de l’élargissement du test, création de nouveaux CIDAG, aménagements de bus de dépistage mobiles et campagnes nationales de promotion du test.

2007, l’année du dépistage

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Dossier:

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De plus en plus de voix s'élèvent pour exiger un élargissement extensif du dépistage de l'infection à VIH/SIDA, élargissement exprimé par le terme anglais de "scale-up" largement dévoyé. "Scale-up", dont le sens peut être traduit par "mise à l'échelle", illustre bien la volonté mondiale de mettre en avant le dépistage, un outil qui s'est révélé très performant dans la lutte contre l'infection à VIH/SIDA. A la dernière Conférence Internationale sur le VIH/SIDA, tenue à Toronto, Canada, du 13 au 18 août derniers, le sujet était brûlant d'actualité et a donné lieu à plusieurs séances et débats.

L’avantage de connaître son statut sérologique n'est plus à démontrer, et notamment de connaître ce statut "à temps", c'est-à-dire, de façon précoce permettant une prise en charge médicale adéquate et un suivi optimal. Toutefois, le dépistage ne doit pas être conduit comme un dépistage banal, l'enjeu du VIH/SIDA impliquant des précautions en matière de droits de l'homme et de respect de la confidentialité.

Le dépistage de l'infection à VIH/SIDA, fruit d'une longue lutte d'associations de malades, d'activistes et de personnels médicaux, est assorti d'un soutien tout au long du processus, connu sous le terme de "conseil et test volontaire" (CTV). En effet, dans le cadre du VIH/SIDA, le test n'est jamais obligatoire ou imposé, bien au contraire, il doit être volontaire, le fruit d'une demande émanant de la personne elle-même. Avant d'accéder au test proprement dit, tout consultant doit se voir offrir une séance de conseil pré-test, celle-ci est destinée à s'assurer du consentement dit "éclairé" de la personne, de ses motivations et de sa bonne compréhension du

test qu'elle s'apprête à subir, avec tout ce que cela implique par la suite, quel que soit le résultat du test. Une fois le test réalisé, la remise du résultat s'accompagne aussi et obligatoirement par une séance de conseil dite "post-test". Cette séance est cruciale quel que soit le résultat du test et de son bon déroulement dépend sans doute le changement de comportement ou non du consultant . En cas de négativité, elle permet de revenir sur l'analyse des facteurs de risque du consultant et leurs causes, de délivrer des messages de prévention permettant à la personne de rester séronégative. En cas de positivité, cette séance a pour but de faire l'annonce de la séropositivité mais aussi de délivrer une information détaillée sur la prise en charge, les traitements, le suivi, les implications personnelles et professionnelles d'une telle positivité. Plus généralement, elle a pour but d'offrir un soutien psychologique au consultant séropositif et à l'accompagner dans l'acceptation de cette nouvelle situation, au moins jusqu'à ce que le relais soit pris par l'équipe de prise en charge.

C'est pour cela que le CTV constitue une porte d'entrée privilégiée dans le système de soins permettant de mettre en relation directe le consultant et les professionnels de santé qui vont le prendre en charge.

Il est clair que tout ce processus de conseil autour du test n'est pas chose aisée et qu'il doit faire l'objet d'un apprentissage au moyen d'une formation spécialisée. On ne s'improvise pas conseiller, on apprend à le devenir et ceci est aisément compréhensible quand on mesure l'ampleur et la difficulté de la tâche. Il va sans dire que la confidentialité qui entoure ce processus est totale et ne souffre d'aucune dérogation, de quelque nature qu'elle soit. Le conseiller s'engage à une confidentialité totale et, souvent, cette confidentialité est renforcée par l'anonymat dans les centres de CTV. Cette clause de confidentialité exclut, bien entendu, toute notification aux autorités ou au(x) partenaire(s), du moins, pour ce(s) dernier(s), sans l'accord express et "éclairé" du consultant concerné.

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Le dépistage à l'ère du "scaling-up"

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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2007

Le CTV a démontré son efficacité dans le cadre de programmes structurés de lutte contre le VIH/SIDA. Mais l'encouragement au dépistage doit se voir accompagné de mesures incitatives, notamment, l'accès à une prise en charge en cas de séropositivité (se faire dépister, d'accord, mais à quoi bon si le consultant se voit dénier l'accès aux soins?) mais également l'absence de stigmatisation et de rejet. En effet, encore aujourd'hui, les personnes qui sont connues séropositives (avec ou contre leur gré) se voient rejetées, stigmatisées, même par leur propre famille et les exemples, à travers le monde, ne manquent pas. Parfois, même les professionnels de santé, par ignorance ou par peur irrationnelle, sont l'auteur d'actes de rejet vis-à-vis des personnes séropositives. Le processus de CTV doit se développer dans un milieu favorable où le système législatif au moins (à défaut de la société elle-même) doit offrir des garanties d'anti-discrimination.

Voilà pourquoi le CTV ne peut être "mis à l'échelle" sans prendre en considération tous ces aspects pratiques. Les garanties anti-discrimination doivent être réelles et solides, passant par la sensibilisation de masse et l'information du grand public mais également la formation, plus spécialisée, des personnels de santé. Les circuits de la prise en charge doivent être parfaitement rodés et éprouvés avec, en bout de chaîne, la possibilité de se voir offrir les traitements adéquats si besoin. De plus, la gestion des stocks (de tests, de médicaments, d'équipements) doit être rigoureuse pour ne pas tomber dans les ruptures de stock, facteur important d'abandon du CTV.

Par ailleurs, jusqu'à présent, et dans la plupart des pays ayant mis en place des structures de CTV, la politique qui prévaut est celle du volontariat, dite "opt-in". C'est le consultant qui fait la démarche de demander un test, l'initiative vient de lui (il est, évidemment, plus ou moins poussé par les messages d'information et de sensibilisation délivrés). Si la personne ne fait pas l'effort de se rendre à une structure de CTV, elle ne se voit quasiment jamais offrir l'opportunité de faire un test. Ce principe d'opt-in a le grand avantage de ne voir le test offert qu'aux personnes qui sont prêtes à en subir les conséquences, quel qu'en soit le résultat. Le consultant a mené, en lui-même ou avec l'aide de tiers (volontaires d'associations, médecin traitant, amis, etc.) une réflexion qui l'a mené à la décision de faire le test.

Devant le succès du CTV, certains ont imaginé et mis en place, poussés en cela par les instances internationales telles que l'OMS ou l'ONSUIDA, un système de CTV dit "opt-out". A chaque contact du citoyen avec le système de santé, lors de ses visites au dispensaire du quartier, lors d'une consultation médicale, dans les services de lutte anti-tuberculeuse, les cliniques IST, les consultations mère-enfant, etc., le citoyen se voit offrir systématiquement un dépistage VIH. A lui ensuite de décliner l'offre ou de l'accepter.

Cette politique de l'opt-out ne dispense évidemment pas des consultations de counselling pré- et post-test. Le

processus de CTV doit être mené de façon rigoureusement identique à celle du système de l'opt-in. Le test est systématiquement proposé –mais pas systématiquement imposé, différence de taille!- ce qui, on le devine aisément, entraîne une charge de travail additionnel non négligeable, voire importante, aux professionnels de santé qui se voient ainsi obligés de proposer le test VIH à tout consultant. La conséquence aussi est que le counselling peut ne pas être mené de façon rigoureuse, il peut être fait de façon un peu précipitée, par manque de temps ou de motivation. Les conséquences peuvent en être désastreuses. Suicide, dépression, rejet sont quelques unes des conséquences d'un processus de CTV incorrectement mené. Il n'y a plus, devant le nombre important de séances de counselling, de garantie sur la qualité du conseil qui est délivré.

Mais, d'un autre côté, il est indiscutable qu'une telle politique permet d'augmenter de façon significative le nombre de personnes testées, comme cela a été rapporté lors de la Conférence de Toronto dans plusieurs études menées au niveau des pays où l'opt-out a été mis en place (comme le Botswana). Avec l'augmentation du nombre de personnes testées, l'accès aux soins se voit indirectement amélioré par l'augmentation du nombre de dépistages précoces, avec tout ce que cela implique comme bénéfice aussi bien au plan de l'individu que celui de la communauté. Le système opt-out a été expérimenté jusqu'à présent dans des pays à forte prévalence où l'infection à VIH/SIDA constitue un danger national imminent. Dans les pays de faible prévalence, comme le nôtre, la "mise à l'échelle" du CTV doit être introduite de façon plus progressive, avec ciblage des structures susceptibles d'accueillir le plus de consultants vulnérables, comme les centres IST ou encore les centres anti-tuberculeux. Elle doit, en outre, être accompagnée de mesures indispensables, telles que la formation de tous les personnels de santé impliqués. L'aménagement d'un contexte social et juridique favorable est également une des nécessités qui doivent être menées en priorité. L'information du grand public est importante, notamment la communication autour de l'action de dépistage, avec l'utilisation des termes exacts. En effet, la conception par les instances internationales de ce système d'opt-out a donné naissance, comme d'habitude, à un florilège de termes anglo-saxons dont la traduction française reste encore hésitante, voire contradictoire. Le dépistage "systématiquement proposé" et non pas "dépistage systématique" (le système de l'opt-out donc) peut correspondre au terme anglais de routine testing qui ne signifie en aucun cas un dépistage organisé, de masse, imposé, ou mandatory testing. Il est important de veiller à éviter tout glissement sémantique, capable d'anéantir tant d'efforts déployés pour la promotion du test de dépistage.

C'est à ce prix seulement que l'on obtiendra l'adhésion du grand public, principal concerné par toutes ces campagnes d'incitation au dépistage.

Mehdi Karkouri

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Le 5 janvier 2007, la championne olympique Nawal El Moutawakil et le comédien Rachid El Ouali lancent les journées nationales du dépistage au siège de l’ALCS en se soumettant au test devant les médias. Objectif: dédra-matiser le test de dépistage, donner l’exemple et passer le message que tout le monde est concerné. Le recours aux célébrités pour changer le comportement s’explique par le charisme et la cote de notoriété dont elles dispo-sent auprès du public et plus particulièrement les jeunes. Le spécialiste du genre au Maroc c’est Simo Ben Bachir, le président de l’association Ruban Rouge qui fait venir

Au Maroc, le dépistage est organisé par des ONG comme l'ALCS qui dispose de 17 Centres d'Information et de Diagnostic Anonyme et Gratuit (CIDAG) fixes, à côté de 3 unités mobiles de dépistage qui sillonnent le pays. L'idée de ces unités mobiles est née du constat que l'un des principaux obstacles à l'augmentation du nombre de tests est sans aucun doute la non disponibilité ou l'éloignement des CIDAG dans certains régions du Maroc. Les unités mobiles de dépistage, même si elles vont permettre de toucher certaines populations éloignées, ne vont sûrement pas résoudre le problème du faible nombre de CIDAG par rapport à la population et de leur éloignement. C'est pour cela qu'il faut explorer d'autres pistes si on veut toucher un maximum de personnes. Parmi les possibilités, l'élargissement du dépistage VIH à certaines activités de santé publique, comme par exemple les centres de diagnostic et de traitement de la tuberculose, les centres de traitement des IST ou encore les centres de planification familiale et de la protection materno-infantile. Le principe est d'offrir un test de dépistage VIH à tout usager de ces services du Ministère de la Santé. Cette éventualité a fait l'objet d'un atelier national sur l'élargissement des tests de dépistage VIH qui s'est tenu à Rabat en février 2006. Une des principales conclusions de cet atelier est qu'il est impératif, si on veut étendre le test de dépistage VIH à ces centres, d'accompagner cette mesure d'une formation des personnels de santé avec un contrôle rigoureux de la qualité des prestations offertes. Enfin, la nécessité d'obtenir une confirmation d'un test rapide par le test du Western Blot, plus compliqué et, surtout, qui reste encore très centralisé dans notre pays, constitue également un frein à l'extension de nos activités de dépistage. La confirmation peut prendre plusieurs jours, jusqu'à 2 semaines et l'envoi des tubes de sang nécessite une logistique compliquée et coûteuse. Pouvoir obtenir une confirmation par la pratique d'un 2e test rapide, complémentaire avec le premier utilisé en première ligne, permettrait sans aucun doute de remédier à cette situation et, surtout, de faciliter l'implantation du dépistage du VIH. La validation de cette technique de confirmation par un deuxième test rapide doit être rapidement et urgemment réalisée à l'échelle de notre pays.

régulièrement acteurs, chanteurs, top models et anima-teurs vedettes de la télé. Sa meilleure prise demeure Haifa Wahbi dont la visite a fait déplacer des foules. La formule est simple, séances photos, brèves déclarations à la presse et test de dépistage devant les caméras. Ce que Simo appelle la communication préventive. Si on ne dispose d’aucune mesure d’impact sur le nombre de tests suscités par ce genre d’opérations, il n’en demeure pas moins que ces événements sont largement repris par la presse remettant le temps de quelques jours le sida dans le feu de l’actualité. O.M

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Recommandations nationales pour l’élargissement du dépistage VIH

Quand les célébrités donnent l’exemple

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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Aujourd’hui au Maroc, 65% des personnes développant un sida ne découvrent leur séropositivité qu’à un stade avancé de la maladie. Or les avancées en matière de traitements, disponibles gratuitement au Maroc depuis 2003, associées à un dépistage précoce, permettraient une meilleure prise en charge des personnes infectées. C’est pour promouvoir le diagnostic précoce du VIH que l’ALCS a mis en place une opération pilote : « Les journées nationales du dépistage du VIH » organisées les 5, 6 et 7 janvier 2007.

2007

7 508 tests en trois jours

Lancée par la championne olympique Nawal El Moutawakil et le comédien Rachid El Ouali qui ont effectué le test devant les médias, cette opération, organisée dans 37 villes du Royaume, a largement dépassé toutes les prévisions puisque 7 508 personnes ont fait le test de dépistage en trois jours, contre 6 401 tests réalisés sur l’ensemble de l’année 2005 dans les centres d’information et de dépistage anonyme et gratuit (CIDAG) de l’ALCS.

Les réseaux de l’association ont même signalé des ruptures de stock de réactifs dans certaines villes. «Cette opération prouve que plus l’accès au test est facilité, plus la participation est importante. Les régions de Rabat- Salé et du Grand Casablanca ont enregistré les participations les plus importantes avec respectivement 1214 et 1402 tests de dépistage réalisés en trois jours. Un succès inattendu a également été constaté dans des localités les plus éloignées des grands centres urbains», précise Ahmed Douraidi, coordinateur des sections de l’ALCS.

Une grande affluence des jeunes

La distribution selon l’âge montre que la tranche de 20 à 29 ans est la plus représentée parmi les personnes ayant accepté de faire le test (43%), suivie de la tranche de 30 à 39 ans (22%). La tranche des jeunes entre 18 et 29 ans représente 55% des personnes testées ce qui est très intéressant vu que cette catégorie est au centre de l’épidémie de part sa vulnérabilité, l’âge de plus en plus avancé du mariage et la précocité des rapports sexuels chez des jeunes mal ou non informés sur le SIDA et chez qui l’approvisionnement en préservatifs est gênant. Les femmes représentent 34% des personnes dépistées avec un sexe ratio H/F de 1,9.

Les femmes plus touchées

Sur les 7 508 tests réalisés, 43 se sont révélés positifs, soit une prévalence de 0,57% chez les personnes dépistées. Les femmes représentent 27% des cas positifs contre 73% pour le sexe masculin. avec un sexe ratio H/F de 2,7. Mais ce sont les femmes qui sont les plus touchées avec une prévalence de 1,32% (0,38% chez les hommes) ce qui concorde avec le fait que les femmes sont les plus vulnérables face à l’infection à VIH.

On constate que la prévalence la plus élevée a été observée dans la région Goulmim-Smara 1,85%, suivie de Rabat-Salé-Zemmour-Zair 1,23% . Ces données rejoingnent les données de la surveillance sentinelle à savoir une épidémie peu active avec une dynamique focale. La vision par province montre bien cette dynamique focale avec des foyers à prendre en considération notamment Tiznit, Oujda, Tan Tan et Rabat-Salé.

Cependant, ces résultats restent à prendre avec beaucoup de précautions. Il est clair que toute inférence statistique à la population

générale serait très controversée vu qu’il s’agit d’un dépistage volontaire où le profil sérologique des répondants serait différent de celui des non répondants, et constitue par conséquent un biais de sélection.

75 médecins, 300 volontaires mobilisés en 3 jours

L’organisation de cet événement a été possible grâce au soutien de l’ambassade du Royaume des Pays-Bas au Maroc et des fonds récoltés par Sidaction Maroc 2005. Il a mobilisé 75 médecins, 300 volontaires et 3 unités mobiles de dépistage répartis sur 50 sites déployés sur l’ensemble du territoire national. Il a également été facilité par le travail des associations locales, partenaires de l’ALCS dans les différentes régions du pays, et par la collaboration de cabinets de médecins du secteur privé et de certains centres de santé. Pour leur part, le ministère de la Santé a fourni les réactifs nécessaires pour les tests, et l’INH, l’institut national d’hygiène, s’est chargé de la confirmation des résultats positifs. En outre, l’importante mobilisation de l’ensemble des médias nationaux et locaux a largement contribué au succès de cette campagne.

Les journées nationales du dépistage ont prouvé que l’attitude des marocains vis-à-vis du VIH/SIDA a beaucoup évolué ces dernières années et que, désormais, quand le test est disponible dans des conditions éthiques garantissant l’anonymat et la confidentialité, le public l’accepte volontiers.

Mariam Fadouallah

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Les journées nationales du dépistage 2007

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Etalée sur deux mois, la caravane d’information et de dépistage dans le Rif avait pour objectif principal de sensibiliser la population de cette région à l’infection à VIH et aux IST et d’étendre et améliorer l’accessibilité du test de dépistage du VIH. Et ce grâce aux unités mobiles de dépistage anonyme et gratuit et l’installation de kiosques d’information et de sensibilisation dans les différentes villes traversées par la caravane.

Grâce au soutien de l’ambassade des Pays Bas, la caravane est partie de Tanger le 1er novembre 2006 pour sillonner toute la région du Rif et de l’Oriental en passant par Tétouan, Larache, Ksar El Kebir, Ksar Sghir, Chaouen, Ouazzane, Taounate, Oujda, Berkane, Saidia, Nador et Al Hoceima. Avec au partenariat des associations locales, le contact avec la population a été plus facile, et les messages mieux compris, compte tenu des contraintes liées à la langue et aux coutumes locales. Des dépliants préventifs et des affiches ont été conçus, selon une charte graphique adaptée à la thématique de l’événement ; à savoir, le choix des personnages, des couleurs et du paysage montagneux faisant référence au Rif. De plus, le passage de la caravane dans les souks hebdomadaires à permis d’atteindre une population originaire de régions enclavées et très mal desservies par les transports urbains.

Des équipes de volontaires ont été mobilisées dans chaque région pour l’affichage dans différents lieux stratégiques de la ville de banderoles annonçant l’arrivée de la caravane. Certaines radio rifaines locales ont diffusé gratuitement des messages annonçant son passage et 2 M a couvert l’événement, notamment dans les villes d’Oujda et Nador. Mission accomplie. Lors des 52 jours (1er novembre-31 janvier 2007), 3609 tests ont été réalisés et l’objectif essentiel qui était de rendre le test accessible sur le plan géographique, financier (gratuité) et culturel a ainsi été atteint. De plus, en capitalisant sur un tissu associatif local opérant dans le domaine du développement, d’importants relais en matière de communication et de mobilisation contre l’infection à VIH et aux IST sont aujourd’hui mobilisés.

C’est la section de Fès qui organisera les VIIèmes Assises nationales de l’ALCS qui se tiendront dans la capitale spirituelle les 25, 26 et 27 mai prochains. Le thème retenu cette année est le dépistage et le diagnostic précoce de l’infection à VIH.

Devenues au fil des ans, le rendez-vous privilégié de tous les acteurs de lutte contre le VIH/SIDA au Maroc, les Assises nationales de l'ALCS se présentent comme une réflexion collective de l'ensemble des volontaires, pour faire le point et repenser nos actions et nos orientations.

Elles sont aussi un espace de partage des initiatives et des expériences diverses en matière de lutte contre le Sida. Partenaires nationaux et internationaux, institutions, programmes gouvernementaux et associations amies sont invités à participer activement à ces rencontres.

Les assises cette année, verront la participation de nombreux experts marocains et internationaux de renommée comme Carla Makhlouf Obermyer de l’OMS qui fera le déplacement pour l’occasion. Elles auront également une dimension régionale, à l’image de l’action de l’ALCS, avec la présence d’associations d’Algérie, de Tunisie, de Mauritanie ou encore du Mali; et ce afin d’échanger sur les politiques de dépistage dans les différents pays de la région.

En ouverture, une conférence-débat sur « Éthique, dépistage et VIH » sera animée par Maître Alain Molla ancien membre du conseil national du sida en France.

Durant les deux jours suivants, en séances plénières ou en ateliers, tous les aspects liés au diagnostic précoce et au dépistage anonyme et volontaires seront abordés et débattus. Le choix du thème est justifié par le rôle important du dépistage dans la prévention de la transmission du VIH mais également en tant que véritable levier de l’accès aux traitement.

Le programme complet des assises sera disponible sur le site www.alcsmaroc.org début mai.

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Une caravane de dépistage dans le Rif

Fès Accueille les VIIèmes Assises de l’ALCS sous le thème du dépistage

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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2007

Vingt activistes du Mouvement PanAfricain pour l’Accès aux Traitements (PATAM) représentant les cinq régions d’Afrique (nord, centre, ouest, est et sud) se sont réunis du 15 au 18 décembre 2006 à Marrakech pour unifier leur voix afin de réclamer l’accès aux traitements contre le VIH/SIDA pour toutes les personnes qui en ont besoin sur le continent africain.

Lors de cette réunion co-organisée par l’Association de lutte contre le sida (ALCS) et PATAM, les délégués ont réitéré leur engagement à renforcer les capacités des communautés en matière de plaidoyer pour l’accès aux traitements, et de multiplier les efforts de plaidoyer sur le niveau régional et international afin de mobiliser les ressources financières nécessaires et pour une prise en compte réelle des besoins des personnes vivant avec le VIH en Afrique.

« Bien que l’Afrique soit le continent le plus touché par l’épidémie, c’est la région au monde ayant la couverture la plus faible en matière de traitements. C’est une injustice qui doit être réparée. Nous demandons aux gouvernements africains d’allouer plus de ressources aux traitements anti-VIH et de tenir enfin leurs promesses. La communauté internationale doit également doubler d’efforts afin de mobiliser les ressources financières aux fonctionnement des mécanismes de la lutte globale contre le VIH qui ont montré leur efficacité comme le Fonds Mondial », a expliqué Morolake Nwangu du Treatment Action Movement –TAM- au Nigeria.

Les activistes ont exprimé leur préoccupation concernant le besoin urgent de nouvelles lignes d’antirétroviraux, de traitements de maladies opportunistes et la disponibilité de tests de suivi biologique qui ont jusque là été négligés.

« Nous ne prendrons pas des traitements de 1ère ligne à vie, et nous commençons déjà à présenter des résistances à certains anciens antirétroviraux. La disponibilité de traitements de 2ème ligne à un prix abordable est une question de survie pour les personnes vivant avec le VIH aujourd’hui. C’est le seul moyen de garantir la pérennité des efforts fournis aujourd’hui pour garantir l’accès universel aux traitements. », a déclaré James Kamau du Kenyan Treatment Acces Movement –KETAM- au Kenya.

L’ALCS a été choisie par les membres de PATAM pour héberger le mouvement et en assurer la coordination pour une durée de deux ans, et ce en reconnaissance du travail exemplaire que l’association a réalisé en matière de plaidoyer en faveur de l’accès aux traitements aussi bien au Maroc qu’à l’échelle régionale et internationale. « Nous sommes honorés de cette décision et nous nous engageons à ne ménager aucun effort afin que nous soyons à la hauteur des défis qui nous attendent », a déclaré Othman Mellouk, président de l’ALCS Marrakech.

PATAM est un mouvement continental composé d’activistes et d’organisations de la société civile dont l’objectif est de faire le plaidoyer pour l’accès aux traitements et à la prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH en Afrique. Il a été fondé par des activistes de 22 pays d’Afrique réunis lors du Sommet Mondial pour l’accès aux traitements (ITPS) organisé à Cape Town en Afrique du Sud en 2002.

Questions à Othoman Mellouk, Président de l’ALCS-Marrakech et membre du comité de coordination de PATAM:

Que signifie pour l’ALCS le fait d’héberger PATAM et d’en assurer la coordination?

D’abord c’est une reconnaissance de la part de nos amis de lutte sur tout le continent du travail effectué par l’ALCS dès sa création dans le domaine de l’accès aux traitements. C’est également un symbole très fort de reprendre la coordination après TAC en Afrique du Sud. Montrer au monde que l’Afrique est unique est indivisible et que la problématique est la même quelle que soit la sous-région d’où l’on vient.

Quelles ont été les premières actions entamées depuis décembre?

La priorité c’est d’essayer de restructurer le mouvement qui à ce jour est un réseau d’activistes et d’organisations mais qui ne dispose pas de secrétariat fixe. Ce choix avait été fait à la création du mouvement afin de garder une structure la plus souple possible. Aujourd’hui, nous avons besoin d’un secrétariat et d’un coordinateur à l’échelle du continent pour plus d’efficacité. Une autre priorité, c’est de recruter des activistes et organisations francophones. A ce jour, il y a une prédominance d’anglophones et pour des raisons linguistiques les francophones se sentent exclus. Nous avons profité de la conférence de Paris pour présenter PATAM à ceux qui avaient fait le déplacement. Nous sommes également en train de revoir le site web et la liste de diffusion pour y inclure le français et l’arabe. En ce qui concerne les ressources pour le plaidoyer, dès janvier nous avons réussi à créer ,dans le cadre du Fonds Collaboratif avec ITPC et la Fondation Tides, deux nouvelles sous-régions : la région Nord et une nouvelle région en séparant la région Ouest et Centre de l’Afrique. Ceci drainera des nouveaux financement aux organisations locales

Qu’en est-il de la région de l’Afrique du Nord?

Cette région est très en retard en matière de plaidoyer pour l’accès aux traitement. C’est comme si le travail des association se limitait à la prévention et que le traitement ne concernait que les gouvernements. L’ALCS souhaite renforcer ce volet dans la région. Nous sommes entrain de finaliser les préparatifs d’une réunion régionale à la rentrée qui donnera naissance à la branche Afrique du Nord de PATAM ainsi que la mise en place du Fonds Collaboratif dans la région. Ceci permettra de mettre à la disposition des organisations des financements pour entamer des actions de plaidoyer.

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Mouvement Pan Africain pour l’accès aux traitements : ALCS, l’Africaine

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2007

La Jordanie fait partie des premiers pays à avoir signé, dès 2001, un accord de libre échange (ALE) de nouvelle génération avec les États-unis d’Amérique qui introduit un cadre rigide de règles ADPIC-plus. Six ans après, l’impact négatif sur l’accès aux médicaments est déjà ressenti. L’ONG Oxfam vient de publier un rapport accablant sur la question.

Le prix des médicaments a augmenté de 20 pourcent en Jordanie depuis 2001. Le prix plus élevé des médicaments menace maintenant la durabilité f i n a n c i è r e d e s p r o g r a m m e s gouvernementaux de santé publique.[i] Les règles ADPIC-plus ont contribué à l'augmentation du prix des médicaments et retarderont ou empêcheront le recours à des sauvegardes de santé publique pour réduire le prix de nouveaux médicaments dans le futur. En particulier, l'exclusivité des données a retardé la concurrence générique pour 79 pourcent des nouveaux médicaments l a n c é s p a r 2 1 e n t r e p r i s e s pharmaceutiques multinationales entre 2002 et la mi-2006, qui auraient pu être disponibles sous une forme générique bon marché. L'exclusivité des données est une règle ADPIC-plus qui crée un nouveau système de pouvoir m o n o p o l i s t i q u e distinct des brevets en bloquant l 'enregistrement et l'approbation de commercialisation des médicaments générique pour cinq ans ou plus, même en l'absence de brevet.

Les dépenses supplémentaires pour les médicaments sans concurrent générique en raison du recours à l'exclusivité des

d o n n é e s p a r l e s e n t r e p r i s e s pharmaceutiques multinationales s'élèvent à entre 6,3 et 22,04 millions de dollars. En raison de ces dépenses, le système de santé publique et la population ont dû payer un prix plus élevé pour de nombreux médicaments nécessaires pour le traitement de maladies non contagieuses graves comme l'hypertension, l'asthme, le diabète et des maladies mentales. Par exemple, les nouveaux médicaments pour traiter le diabète et les maladies cardiaques coûtent entre deux et six fois plus cher en Jordanie qu'en Egypte, là où il n'y a pas de barrières ADPIC-plus.

En outre, l'introduction en Jordanie de règles strictes sur la propriété intellectuelle n'a pas apporté de bénéfices, malgré les déclarations positives du Représentant américain au Commerce et d'autres représentants américains depuis l'entrée en vigueur de l'accord. En particulier, les entreprises pharmaceutiques n'ont pour ainsi dire pas effectué d'investissements étrangers directs (IED) en Jordanie depuis 2001 pour synthétiser ou fabriquer des médicaments en partenariat avec des entreprises génériques locales, ce qui a également des implications graves en matière de santé. Les patients jordaniens

paient entre deux et dix fois plus cher p o u r c e r t a i n s n o u v e a u x médicaments que les patients en

Egypte, où les nouveaux médicaments sont fabriqués par le biais d'accords de licence et de partenariats. Les seuls IED effectués en Jordanie par les multinationales pharmaceutiques ont servi à étendre les bureaux scientifiques, qui utilisent des tactiques de vente

agressives pour s'assurer que des médicaments brevetés onéreux sont utilisés en lieu et place de génériques bon marché.

En outre, depuis la conclusion de l'ALE, les règles plus strictes sur la propriété intellectuelle n'ont pas encouragé les entreprises génériques à mener des ac t iv i t é s de r echerche e t de développement pour des médicaments. En fait, elles n'ont pas développé le moindre médicament nouveau. Enfin, les nouveaux produits lancés en Jordanie ne représentent qu'une fraction du total des nouveaux produits lancés aux Etats-Unis et dans l'UE ; de nombreux médicaments nouveaux lancés en Jordanie sont vendus à un prix inabordable pour les simples citoyens et presque aucun de ces médicaments n'a effectivement été vendu sur le marché local en raison de leur coût.

Dans le futur, le fardeau croissant des maladies non contagieuses nécessitera des dépenses encore plus élevées en matière de soins de santé et de médicaments. Le prix plus élevé des médicaments mettra le système de santé publique sous pression et poussera les habitants ne bénéficiant pas d'une assurance-santé à effectuer des dépenses directes importantes qui portent préjudice aux plus pauvres. Cependant, la Jordanie dispose de peu d'options étant donné que les règles ADPIC-plus sont en place et que le gouvernement ne sera pas à même de compenser le prix plus élevé des médicaments en utilisant des mécanismes de santé publique. Le rapport complet est téléchargeable sur le site d’Oxfam:

h t t p : / / w w w . o x f a m . o r g / f r / f i l e s /bp102_usa_jordanie_medicaments .pdf /download

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Impact de l’ALE Jordanie-USA: Rien que des coûts, pas de bénéfices

Le prix des médicaments a augmenté de 20% en Jordanie depuis 2001.

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Un dimanche matin, dans un bus de Marrakech, les passagers assistent ébahis à une scène pour le moins inattendue. Deux garçons rencontrent leur chère amie Jamila qu’ils n’ont pas vu depuis longtemps. Jamila est très triste et démoralisée. Après un salut chaleureux et très amical, les deux garçons lui proposent de prendre un café comme à l’époque, pour lui faire changer d’humeur. Jamila décline l’invitation : elle ne va pas très bien. Les deux amis veulent absolument savoir ce qui lui arrive. Finalement, Jamila leur annonce sa séropositivité et explique sa situation. Les deux amis réagissent violemment et la rejettent sans ménagement devant le public étonné. Une femme, tenant son bébé dans les bras, s’est levée de sa place en invectivant les personnages qui discriminaient leur amie, ensuite, elle s’est approchée de Jamila et lui a tendu son bébé pour que cette dernière l’embrasse devant tout le monde. Elle voulait montrer par ce geste fort que le VIH ne pouvait se transmettre par les baisers et témoigner sa solidarité avec les personnes séropositives.

Cette scène n’est pas réelle, elle est jouée par les volontaires de l’ALCS, tous réunis à Marrakech pour expérimenter dans les rues populaires de la ville ocre la formation sur « le théâtre de l’invisible » qu’ils viennent de suivre. Ce ne sont pas des acteurs de théâtre mais des acteurs de prévention de la lutte contre le SIDA au Maroc. Et c’est bien parce qu’ils sont imprégnés en profondeur des difficultés que vivent les personnes séropositives, qu’ils ont pu faire passer des messages si prégnants, avec une telle

force. Chaque saynète est élaborée à partir de sujets basés sur des problématiques de prévention et de solidarité jugées prioritaires et sur lesquelles les volontaires de l’ALCS souhaitent communiquer. Ensuite, il faut définir les lieux, et surtout, jusqu’où aller pour faire évoluer la problématique dans la société marocaine ? Comment susciter le débat dans les couches populaires marocaines et faire émerger des positionnements solidaires de la part des publics ?

Par contre les réactions des gens, notamment de la dame avec son bébé, sont bien réelles. Et là, ce sont nos représentations de la société qui s’en sont trouvés bouleversées. L’impact des saynètes jouées dans les rues de Marrakech a été impressionnant, en termes d’implication des acteurs, d’engouement des publics et de solidarité de ces derniers avec les personnes séropositives discriminées. À trois reprises, les intervenants de l’ALCS ont dû prendre à part des membres du public pour leur dire que ce n’était pas la réalité mais du théâtre joué dans les rues pour sensibiliser sur le VIH/SIDA. Dans une galerie marchande à côté de la place Jamaa El Fnaa, tous les clients et les commerçants se sont retrouvés en assemblée. Les gens ont discuté, réfléchi sur les enjeux qui les concernent. Ils ont confronté des solutions et par ce processus d’échanges, ils ont pu inscrire ces problématiques dans leur réalité. Un commerçant proche de l’ALCS nous a rapporté le témoignage selon lequel, deux heures après notre départ, les commerçants de la galerie discutaient

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Le théâtre de l’invisible au service de la prévention

SIDASOLIDARITÉ N° 15

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2007

encore entre eux sur la problématique du VIH/SIDA et sur ce qu’ils venaient de vivre.

Le théâtre de l’invisible a comme principe de jouer une situation d’oppression devant des personnes ne sachant pas que la situation exposée est jouée. Ce théâtre a été inventé dans les années 60 au Brésil, pendant des luttes populaires après le coup d’Etat en avril 1964. Auguste Boal prit alors avec d’autres artistes un engagement aux côtés des classes populaires. C’est alors qu’est né le « théâtre de l’opprimé ». Un théâtre où sont créés les conditions du dialogue et du débat, mais dans lequel les solutions à mettre en place doivent être proposées par les personnes elles-mêmes, le dernier mot étant donné au public. Le Théâtre de l’Invisible s’adapte très bien au contexte marocain, imprégné de culture orale, et le fait de travailler sur nos représentations individuelles et collectives permet de laisser émerger un théâtre populaire et transformateur social.

Un outil précieux de lutte contre les discriminations, et de sensibilisation du public aux questions essentielles que sont le préservatif, la peur du dépistage, le refus social des personnes séropositives. Une nouvelle façon d’aborder la lutte contre le sida que l’ALCS vient de mettre en place grâce au soutien de son partenaire, l’association française AIDES qui possède

une grande expertise en la matière. L’expérience sera renouvelée, à l’occasion du prochain Festival Gnaoua d’Essaouira de juin 2007 dans les ruelles de Mogador.

Nadia Rafif

Les volontaires de l’ALCS en compagnie de Nordine Frizi, formateur, de

l’association AIDES après une représentation dans les rues de Marrakech

récurrentes concernant ces volets étaient afférentes à la manière de préparer cette sensibilisation et d'adresser des messages ciblés à une population particulièrement vulnérable. Dans ce sens, la section de Fès souhaite élargir son action aux chauffeurs de camion qui sont souvent en contact avec les travailleuses de sexe, et qui constituent, de par leur mobilité, une population à risque. Le volet médical de la lutte contre le VIH/SIDA était également au programme. Des interventions médicales, des explications sur la manière d'effectuer des tests de dépistage et les endroits où les pratiquer ont été fournies par des médecins du privé et ceux de la délégation du ministère de la Santé. Un atelier a été consacré au plaidoyer pour défendre les droits des travailleuses de sexe. A la fin de la rencontre, un comité de pilotage a été composé pour assurer le suivi des recommandations. Cette rencontre a été accompagnée d’une campagne de promotion de dépistage effectuée grâce au CIDAG mobile de l’ALCS qui a sillonné la région durant ces deux jours.

Douze associations oeuvrant dans le Moyen-Atlas d’El Hajeb à Beni Mellal se sont données rendez-vous au mois de mai au musée de Wad Srou, dans la région de Khénifra pour renforcer leur coopération en matière de lutte contre le sida dans la région. Une réunion orchestrée par l'ALCS-Fès, en collaboration avec l'association «Wad Srou» dont les objectifs étaient de présenter les expériences des associations dans le domaine du travail avec les professionnelles du sexe, renforcer les capacités des organisations locales en matière de formation et les initier à l'éthique de travail avec cette population vulnérable. Il était également question de définir les besoins primordiaux dans le domaine de la prévention, du dépistage et des consultations IST. Selon Mustapha Yamine, président de l’ALCS-Fès : « Le Moyen-Atlas a besoin d'actions pour parer au manque relatif à la sensibilisation, au diagnostic, au dépistage et au plaidoyer de la cause de la vulnérabilité des travailleuses du sexe qui souffrent de stigmatisation et de marginalisation ». Les questions

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Le théâtre de l’invisible (suite)

L’ALCS-Fès mobilise les ONG du Moyen Atlas pour la prévention auprès des professionnelles du sexe

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A l’origine, le Maroc était un simple pays de transit pour les migrants, mais les frontières étant devenues de plus en plus hermétiques, les migrants se sont vus contraints de s’installer au Maroc pour un temps plus ou moins long, de quelques mois à plusieurs années, en attendant le moment propice. Les mi-grants sont dans une situation dramati-que : exploités, stigmatisés, démunis, déracinés, victimes de nombreuses vio-lences, etc. Si le tableau peut sembler apocalyptique, il est toutefois bien réel, comme en témoignent les conclusions de la consultation ONUSIDA menée en novembre 2004 dans le cadre de l’initia-tive sur la migration et la mobilité dans la sous-région.

La présence des migrants sur le sol marocain pose la question de leur prise en charge médicale. Aujourd’hui, l’ac-cès des migrants aux services de santé est balbutiant. Les migrants clandestins sont considérés comme des indésirables qu’il s’agit de renvoyer au plus vite dans leur pays d’origine. La loi 02/03 ne contient aucune référence aux droits des migrants, alors même que le Maroc a ratifié en 1993 la Convention internatio-nale sur la protection de tous les travail-leurs migrants et que par ailleurs, dans la Déclaration d’engagement de la ses-sion extraordinaire des Nations Unies sur le VIH/sida adoptée en 2001, un paragraphe est spécialement consacré à la prévention et à l’accès aux soins des populations migrantes.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles ils se heurtent? Tout d’a-bord, ils ont peur d’être arrêtés à l’en-trée des centres de santé et reconduits à la frontière. Ceci compromet l’accès aux soins et le suivi des traitements. Ensuite, les migrants n’ont souvent pas les moyens de se faire soigner ; le budget alloué spécifiquement à la prise en charge des migrants est en effet insuffi-sant et le statut d’indigent qui leur per-mettrait d’obtenir la gratuité des soins leur est trop souvent injustement refusé. Les migrants sont parfois confrontés purement et simplement à des refus de soins. Enfin, l’accès à l’information est rendu très difficile à cause des barrières

linguistiques et culturelles. Le fait d'être migrant ne constitue pas en soi un fac-teur de risque pour le VIH ; ce sont les situations dans lesquelles ces personnes se retrouvent, ainsi que les activités menées pendant le processus de migra-tion, qui constituent des facteurs de risque

La situation des migrants est d’autant plus critique que les acteurs opération-nels sont peu nombreux en raison des difficultés rencontrées (identification des populations, accès aux populations, communication, etc.). Il faut à cet égard rendre hommage aux associations qui oeuvrent sur le terrain et notamment à Médecins sans Frontières qui effectue un travail remarquable auprès des popu-lations étrangères. L’ONG est présente depuis 2003 dans le Nord du pays où se trouve un nombre important de migrants subsahariens. Elle a d’abord travaillé à Tanger avant d’élargir son action aux régions de Nador et d’Oujda. L’ALCS Rabat a également initié un travail de-puis 2 ans auprès de ces populations

Comment réduire la vulnérabilité des migrants à l’infection à VIH/sida ? Comment améliorer leur prise en charge médicale ? Aujourd’hui, il n’existe pas de programme VIH/sida à destination des migrants, mais simplement des ré-ponses ponctuelles à des situations d’ur-gence identifiées à l’issue de tableaux cliniques graves. Les malades sont alors pris en charge par les ONG telles que MSF, Caritas ou l’ALCS et/ou orientés vers les services hospitaliers compé-tents. Ces ONG font également des visi-tes sur les lieux de vie des migrants et mettent en œuvre des structures d’é-coute et d’évaluation des problèmes de santé. Or, il existe une circulaire, large-ment méconnue, du ministère de la San-

té qui fait obligation aux médecins de prodiguer aux migrants les mêmes soins qu’aux Marocains. Sur la base de cette circulaire, les médecins peuvent et doi-vent soigner les migrants et leur fournir les antirétroviraux. Au CHU Ibn Rochd de Casablanca, les migrants qui en ont besoin reçoivent ainsi des traitements ; ceux-ci sont prélevés sur les stocks de dons collectés auprès des associations françaises. L’ALCS s’est battue pour faire connaître cette circulaire et exiger son application effective. Elle compte également poursuivre et renforcer son action de prévention auprès des popula-tions étrangères migrantes et a obtenu un financement du Fonds Mondial pour la mettre en oeuvre. Une nouveauté malgré tout cette année, l’intégration dans le plan stratégique du ministère de la Santé 2006/2010 d’un programme spécifique pour les migrants, compre-nant des actions de prévention, d’appui psycho-social et de prise en charge mé-dicale, avec la participation des popula-tions concernées dans les villes de Tan-ger, Rabat, Casablanca, Tétouan, Oujda, Nador et Laayoune.

Le défi de l’accès aux soins des mi-grants est à la portée du Maroc, car le pays dispose d’une bonne couverture sanitaire. Aussi ne faudra-t-il pas créer des services de santé spécifiques, mais simplement intégrer la prise en charge des migrants dans le cadre des services déjà existants. L’ALCS s’est battue aux côtés des associations françaises contre les restrictions à l’accès aux soins des étrangers en France et elle ne peut pas tolérer de telles restrictions au Maroc, sous prétexte que la situation est diffé-rente.

Marion Wadoux

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Le droit aux soins des migrants en question

SIDASOLIDARITÉ N° 15

Le Maroc accueille aujourd’hui un nombre croissant de migrants clandestins, notamment d’origine subsaharienne. Selon les estimations, 15000 à 20000 Subsahariens entreraient chaque année irrégulièrement sur le territoire marocain. Fuyant la misère et la guerre, ces migrants veulent à tout prix atteindre l’Europe. Les migrants sont ainsi une population particulièrement vulnérable à l’infection à VIH/sida. Cette vulnérabilité est d’autant plus forte que les campagnes de prévention ne touchent pas ou peu les migrants qui vivent en marge des circuits officiels et ne maîtrisent pas l’arabe.

Expérience de l’ALCS-Rabat auprès des migrants

Depuis 2005, l’ALCS Rabat a initié, en partenariat avec CARITAS, un programme pilote de prévention et de prise en charge de cette population permettant la formation de 40 éducateurs pairs, la sensibilisation de plus de 3000 personnes, le traitement des IST de 103 personnes, la réalisation de 155 tests, et la prise en charge médicale et thérapeutique de 26 personnes, comprenant également le suivi de séances d’aide à l’observance par 22 personnes. Des brochures de prévention traduites dans les dialectes locaux ont également été conçues, avec les populations concernées.

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2007

Forte présence de l’ALCS lors des conférences internationales sur le Sida

L’ALCS était largement présente lors de la dernière Conférence Internationale sur le VIH Sida de Toronto en août 2006, ainsi qu’à l’occasion de la quatrième conférence francophone sur le sida de mars dernier. Durant cette dernière, trois communications ont été présentés, portant notamment sur « L’impact de l’éducation thérapeutique dans le traitement antirétroviral chez les patients infectés par le VIH », « La prévention et la prise en charge de l’infection à VIH auprès des migrants clandestins », et « Droits des minorités et accès à la prévention ».

Media & Sida

Une convention a été signée entre le Syndicat national de la presse marocaine et l'ALCS le 11 avril 2007. L’objectif étant une implication renforcée des médias pour contribuer à la prévention et au contrôle de l’épidémie, réfléchir ensemble à une manière de mieux partager l’information et à promouvoir des interventions innovantes en matière de communication afin de faciliter les changements positifs des comportements à risque, et mobiliser la population pour une réduction de la stigmatisation des personnes touchées et des groupes vulnérables. Pour rappel, l’ALCS avait organisé dès 1994 un premier séminaire auprès des journalistes francophones et arabophones, et renouvelé l’expérience en 2004, à la suite desquels une lettre Medias & Sida destinée aux journalistes, et un blog www.blog.ma/mediasida ont été créés.

Création de trois nouveaux CIDAG

La ville de Laayoune a ouvert son CIDAG en novembre 2006 et en janvier 2007, ce fut le tour de Mohamedia. Devant l’affluence des demandes des consultants dans la région Souss Massa Dra, un deuxième CIDAG géré par l’ALCS-Agadir s’est ouvert à Inezgane. Portant ainsi le nombre des CIDAG fixes de l’ALCS à 18 CIDAG. De plus, suite au succès des JND et

grâce à l’impact du Sidaction, un groupe de personnes motivées s’est constitué à El Jadida, et une formation initiale y a été organisée en février dernier. L’ouverture d’un CIDAG est prévue pour le mois de juin.

Renforcement des modules de formation et des outils de prévention/ sensibilisation

Latéfa Imane vient de passer 6 semaines au Maroc dans le but de fournir un appui à la restructuration des activités de formation interne. Lors de son passage, deux ateliers de définition des contenus de la formation ont été organisés, l’un portant sur la santé et les techniques éducatives et l’autre sur la relation d’aide, de soutien et d’accompagnement des personnes en situation de vulnérabilité Des guides méthodologiques seront bientôt définis. Ils porteront sur la formation initiale des volontaires et la formation des éducateurs pairs, ainsi que sur la gestion, le suivi et le montage des projets. Le guide ressource pour les médecins et conseillers impliqués dans les CIDAG fixes et mobiles sera réactualisé, en fonction de l’expérience acquise lors des journées nationales de dépistage et de la mise en place des tests rapides. Enfin, une collection de nouvelles brochures (transmission, prévention, dépistage, traitements, IST, vivre avec le VIH, etc.) est en cours de rédaction, ainsi qu’un guide reprenant les 50 questions les plus posées. Parallèlement, des nouveaux outils adaptés au monde du travail (affiches de sensibilisation, guide de formation) seront bientôt diffusés. Beaucoup de travail en perspective pour Melle Hind Setti, qui vient de rejoindre l’ALCS pour coordonner les activités de prise en charge et de formation interne.

Signature de nombreuses conventions de partenariat

Plusieurs conventions viennent d’être signées par l’ALCS avec de nombreux partenaires, afin de renforcer la gamme de nos activités et le réseau des personnes oeuvrant dans la lutte contre le sida ; dans des domaines aussi variés que la prévention et l’éducation dans le

milieu du travail (GSK -Sida et Entreprise - la CGEM) ; les migrants et les personnes vivant avec le VIH (Médecins du Monde) ; le monde du sport (Association Marocaine Sport & Développement) ; le milieu hospitalier (ESTHER) ; les universités (Université Hassan II et l’Université Moulay Ismail de Méknès) ; la fondation Orient-Occident ; les programmes de micro-crédit (ADS et Amsed) ; et les différents ministères (Justice, Education etc.). Enfin, les 26 bénéficiaires de l’appel à projets ont signé une convention avec l’ALCS le 1er novembre 2006, dans le cadre du programme d’appui SIDACTION MAROC à des associations et instituts de recherche.

Hakima Himmich, nommée conseillère pour les questions liées VIH/au sida auprès de l’OMS

Hakima Himmich vient d’être nommée par l’OMS membre du «Strategic and Technical Advisory Committee for HIV /AIDS» qui est chargé d’évaluer les différentes réponses à l’épidémie et d’établir d e s s t r a t é g i e s e t d e s recommandations pour lutter contre le VIH/sida dans le monde. Le comité était présidé auparavant par Pr Kazatchkine, jusqu’à sa récente nomination à la direction du Fonds mondial.

Création de ALCS+, un groupe de PVVIH au sein de l’ALCS

Suite à la décision du conseil national de l’ALCS en janvier dernier de renforcer l’implication des PVVIH au sein de l’association, un premier atelier de partage a été organisé à Sid i Kaouki regroupant 14 personnes séropositives de diverses vi l les. Durant 2 jours, les participants ont travaillé sur les priorités en matière de plaidoyer et les activités à mettre en place par le groupe qui s’appelle désormais ALCS+. Les conclusions de l’atelier seront présentées en plénière aux assises de l’ALCS qui se tiendront à Fès. Avec la création du groupe ALCS+ et l’inclusion de PVVIH au sein du conseil national, L’ALCS franchit ainsi un nouveau pas dans la mise en application du principe GIPA.

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ALCS/News

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AIDS-people

Par ordre de la gauche vers la droite et du haut vers le bas: Hicham Hassanine Casablanca, Rolake Nwangwu Nigeria, Maria Bernoussi Tanger, Mathilda Moyo Zimbabwe, Milouda Choukri Casablanca, Alise Abadie Marrakech, Belgacem Chafik Essaouira, Gregg Gonsalves Afrique du Sud, Mariam Fadouallah Casablanca, Ahmed Issaoui Agadir, Héléna Traïcu Roumanie, Youssef El Kaouini Essaouira, Chloé Florette France, Abdellatif Äicha Tanger,Btissam Daoudi Casablanca, Asia Russel USA, Mohammed Zaghloul Marrakech, Fatima Zohra Serghini Tanger, Eric Fleutelot France, Fouzia Bennani Casablanca, Gaelle Krikorian USA/France, Mohammed Maouloud Mauritanie, Polly Clayden Grande Bretagne, Sangeeta Shashikant Suisse, Hicham Zouali Tanger, Nadia Rafif Marrakech, Aziz Tadjeddine Algérie, Rose-Marie Marque Essaouira, Khalil Elouardighi France.

Nos compagnons de lutte au Maroc et dans le monde…

Page 24: Sida Solidarité Magazine N°15

d'affaires ou les bénéfices réalisés.

Une rubrique régulière peut être consti-tuée par le conseil du mois, la critique d'un livre, une lettre du président ou l'éditorial. Vous pouvez également pré-senter les nouveaux employés, ou vos meilleurs clients ou partenaires.

La longueur de cet article est comprise entre 100 et 150 mots.

Votre bulletin peut traiter de sujets très divers, comme les dernières technolo-gies et innovations dans votre secteur, la conjoncture économique et commerciale ou les prévisions concernant vos clients ou partenaires.

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Utilisé comme un outil de promotion, le bulletin présente l'avantage de pouvoir recourir aux textes provenant de com-muniqués de presse, d'études marketing ou de rapports.

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Titre de l'a rticle intérieur

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« Pour attirer l'attention de vos lecteurs, insérez ici une phrase ou une citation intéressante tirée de l'article. »

SIDASOLIDARITÉ N° 15

Légende accompagnant l'illustration.

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