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ECITV Mastère Digital Marketing et E-business Sans e-publicité plus de diffusion de l’information gratuite ? Mélanie BECHU et Emeline GAUDIN Sous la direction de Camille Brachet Année universitaire 2015-2016

Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

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ECITV

Mastère Digital Marketing et E-business

Sans e-publicité plus de diffusion de l’information gratuite ?

Mélanie BECHU et Emeline GAUDIN

Sous la direction de Camille Brachet

Année universitaire 2015-2016

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1

INTRODUCTION

L’essor et le succès grandissant de la presse écrite dès la fin du XVIIIe siècle - et par

voie de conséquence la naissance d’un réservoir important de lecteurs et de

consommateurs potentiels - s’est accompagné de l’apparition de la publicité. A cette

époque elle ne consistait encore qu’en quelques encarts présentant les nouvelles

tendances vestimentaires ou vantant les mérites d’une nouvelle machine à coudre.

Depuis très longtemps donc, les publicités existent. Ces publicités ont perduré car il y a

un public pour les lire mais ce public ne vient pas sur les sites d’information pour la

publicité, mais pour le contenu auquel elle est rattachée.

Le désir croissant de disposer des nouvelles d’ici et d’ailleurs1 associé aux nouvelles

politiques éditoriales et publicitaires (développées au XXe siècle principalement), qui

éduquaient peu à peu le public à l’information2 de masse en continu, participèrent à la

construction de notre vision contemporaine de l’accès à la culture et à l’information.

Nous sommes en quelque sorte devenus aujourd’hui des « accros de l’information »,

quitte à parfois s’abreuver d’informations litigieuses.

La presse a peu à peu habitué le lecteur à l’accès facile à l’information et à la promotion

de l’information de masse : le lecteur veut lire de plus en plus et est donc de plus en

plus susceptible d’être consommateur de publicité.

Les publicitaires ont flairé l’affaire et la publicité dans la presse écrite a pris plus

d’ampleur.

Dans les années 90 s’est développé un nouveau média : Internet.

C’est en effet dans ce contexte d’émergence du Web que l’information en ligne, a très

fortement concurrencé la presse papier pour répondre autrement au désir d’information

du public. Cette facilité d'accès pour le public, sa rapide fidélisation et le très grand

nombre de lecteurs potentiels du fait de son hyper-visibilité intéressèrent très

rapidement la presse écrite qui a vu en ce nouveau canal de communication la

possibilité presque infinie de diffuser de l'information.

1 Fruit de l’amélioration du niveau de vie, d’une forme primitive d’occupation du temps libre, des progrès de l’imprimerie etc…

2 Nous considérerons dans ce document l’information dans son acceptation la plus large, c’est-à-dire toute source écrite et/ou orale

mise à la disposition d’un public le plus large possible.

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2

Mais contrairement à l’information via le média historique qu’est la presse papier,

l’information via Internet est considérée par les internautes comme « gratuite » car ils ne

payent que leur accès Internet et pas leur navigation web.

En la matière, 1993 fut une année importante puisqu’on assista au lancement de la

première édition d’un quotidien sur le web : le journal californien San José Mercury

News. Depuis, de nombreux quotidiens ont fait leur apparition sur Internet, d’où la

naissance du terme « cyberjournalisme », qui désigne le journalisme en ligne. Cette

même année, un autre marché s’intéressa à Internet et ses promesses : le marché de la

publicité. Les annonceurs sont très intéressés et souhaitent communiquer sur les sites

d’information afin de toucher plus de clients. Avec l’expansion d’internet, et donc de ce

nouveau support de diffusion de l’information, les publicitaires ont ressenti un fort

potentiel d’investissement et de développement de leur activité : la e-Publicité est née.

En 1998, c’est dans une logique de fournir aux internautes l’accès à l’information grâce

aux mots clé que Google est né. Auparavant, le lecteur achetait son journal et prenait le

temps de « lire les nouvelles » alors que sur internet il faut plaire au lecteur au premier

coup d’œil : l’article doit plaire en moins de 4 secondes pour capter l’attention très

rapidement afin que l’internaute reste sur la page et lise l’intégralité du contenu dans le

meilleur des cas.

Durant les années 2000, la presse en ligne se modifie une nouvelle fois et cherche à

fournir au lecteur/à l’internaute de l’information en continu : on parle dès lors

d’ « information permanente »3. En 2003, un nouveau pas est franchi dans la

compilation d’informations avec le lancement de l’agrégateur d’informations Google

News. Celui-ci rassemble très simplement tous les articles d’actualité en catégories bien

distinctes et cette nouvelle fonctionnalité augmenta férocement la concurrence entre les

sites d’informations. Chacun d’eux souhaite être affiché en premier lien d’un thème pour

être le plus vu, donc le plus cliqué et visité par les internautes (sachant que plus les

visites sont nombreuses, plus les publicités sont vues et ont donc potentiellement plus

de chance d’atteindre leurs objectifs).

3 Amandine DEGAND, Benoît GREVISSE, 2015, « Journalisme en ligne »

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3

En 2009, le premier quotidien qui abandonne la presse écrite pour ne paraître que sur le

web est le quotidien américain « Christian Science Monitor ». C’est une étape

particulièrement importante pour la presse écrite puisque les consommateurs n’auront

dès lors de cesse de la délaisser au profit des sites web d’informations.

Maintenant, la mobilité des internautes devient un enjeu important pour tous les sites

informatifs. En effet, selon l’institut Médiamétrie4 en 2013, « il y avait 24 millions de

mobinautes dont 80% se connectant à Internet quotidiennement »5 : l’accès à internet

avec le mobile est très facile et peut se faire partout, à tout moment. La publicité a elle

aussi migré presque en même temps qu’Internet vers ces nouveaux canaux de

communication (tablette et mobile). Ainsi, avec l’arrivée de ces nouveaux outils, nous

avons pu observer la création de nouvelles publicités afin de s’adapter à ces nouveaux

formats.

De ce fait, d'innombrables internautes arrivent en masse sur ces sites absolument “tout

gratuit” via des supports différents (ordinateurs, tablettes et mobiles) : c’est une aubaine

pour les annonceurs qui peuvent communiquer de manière plus variée. Amandine

DEGAND et Benoît GREVISSE expliquent dans leur livre « Journalisme en ligne » que «

en 2011, en France, le marché de la publicité en ligne atteint 2,5 milliards d’euros de

recettes, soit une croissance de 11% par rapports aux années précédentes » 6 : c’est

l’essor de la publicité en ligne !

Ainsi, grâce à Internet, la presse possède un nouveau canal de communication qui lui

permet de toucher une cible différente mais aussi de fidéliser ce public en exploitant le

cross canal7 ou l’utilisation de plusieurs moyens de distribution : Internet et le

smartphone et/ou la tablette. Internet a réussi à modifier les habitudes des individus : ils

l’utilisent de plus en plus pour se renseigner et ne se déplacent plus pour acheter leur

journal tout simplement car Internet est rapide, gratuit et surtout accessible depuis

presque partout dans le monde.

4 Smart-Seven, « Définition et stratégie digitale du mobile first et web design” »

5 Communiqué intitulé « L'année Internet 2015 : Le multi-écrans se généralise et influence les pratiques des internautes » de

Médiamétrie paru le 25 février 2016. 6 Amandine DEGAND et Benoît GREVISSE, 2015, Livre : « Journalisme en ligne », édition De Boeck

7 C’est-à-dire l'utilisation de plusieurs canaux de communication dans le même temps.

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4

Francis BALLE explique dans son livre « Les médias » qu’Internet cherche à se trouver

une destinée dans l’information puisque « les internautes consultent Internet en

moyenne douze heures chaque jour »8. Récemment, Facebook, le réseau social le plus

utilisé par les internautes, a créé une sorte de « player », nommé « Instant Articles », qui

permet de lire uniquement des articles de presse sans quitter sa plateforme. Une

révolution qui permet de confirmer la destinée d’Internet à vouloir se tourner vers

l’information. En effet, il y a un besoin certain des utilisateurs puisque en 2015, « 71%

d’individus utilisant les réseaux sociaux en général, s'en servent pour s’informer sur

l'actualité »9. Mais, même ce réseau social aux grosses recettes qu'est Facebook a

inséré dans « Instant Article » des espaces publicitaires. Certes, il y en a peu et ils ne

sont pas intrusifs afin que l’internaute puisse lire les articles de presse relativement

tranquillement. Ainsi donc, même le célèbre réseau social se sert de l’actualité pour

donner une nouvelle opportunité à ses clients annonceurs et publicitaires de pouvoir

communiquer en profitant de l’information.

Cette question de la place de la publicité prend d’ailleurs de plus en plus d’importance

dans les problématiques commerciales des sites d’information. Amandine DEGAND et

Benoît GREVISSE démontrent que certains sites de presse optent pour l’accès avec

abonnement (modèle « premium »), et d’autres pour la gratuité (modèle « free »). Le

courant dominant (la gratuité) génère de fortes audiences ce qui permet d’attirer des

annonceurs.

Comme nous pouvons le constater grâce à Serge PROULX et Anne ROSENBERG

dans la Revue du MAUSS10, datant de 2010, ce nouveau média a proposé aux

internautes un accès facile et gratuit à l’information, mais les sites devant forcément être

rentables, ils ont trouvé en la publicité une source de revenus conséquente. Pourtant,

avec Arpanet (ancêtre d’Internet qui n’était qu’un réseau privé d’essai), cette information

était à la base payante, les mutations successives de cet outil ont donc visiblement peu

à peu établi une certaine culture de la liberté et de la gratuité dans laquelle l’internaute

peut être perçu selon deux visions. La vision mercantile considère l’internaute comme

client ou consommateur alors que la vision citoyenne considère qu’il joue un rôle clé et

aide à la création de contenu. Ces deux visions poussent la culture de la gratuité à se

8 Francis BALLE, 2014, Livre : « Les médias », édition puf - Que sais-je ?

9 Thomas COËFFE, 2015, blog du modérateur, « étude les usages des Français en 2015 »

10 Serge PROULX, Anne ROSENBERG, 2010, Revue du MAUSS, « Internet et la culture de la gratuité »

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répandre fortement. De ce fait, faire payer des internautes pour l’accès à un bien

informationnel relèverait de l’artifice.

Malheureusement, la politique du « tout gratuit » sur internet (dont un des chefs de file

était Rupert Murdoch) connut une grave crise économique et il fallut trouver rapidement

des solutions pour relancer audiences et profits. L’une a été de mettre en place des

solutions marchandes en misant sur la publicité, bien qu’elle ne puisse pas être le seul

revenu de tous ces sites d’information.

D’après Pierre GROSJEAN11, certains sites d’information ont fait le choix de rendre

payante une partie de leur contenu éditorial : ce fut une réussite seulement lorsque le

contenu additionnel avait une réelle valeur ajoutée. En effet, le développement du

freemium (offre gratuite en libre accès avec un contenu élaboré payant) exige une

innovation forte en matière de contenu (datajournalism, webdocumentaires, ...) : ce

modèle “mixte” propose une large palette d’information de base accessible gratuitement

(free) puis rend payant l’accès à des analyses enrichies, approfondies voire des

contenus exclusifs (premium).

Mais là encore, la solution trouvée - le freemium - n’a pas été satisfaisante puisqu’elle

n’est pas parvenue à freiner le fort ralentissement des audiences et des profits

publicitaires des années 2007-2009. En effet, à cette période, les visites d’internautes

sur les sites de presse, donc des publics visés par la publicité, se sont fortement

ralenties par manque d’attractivité auprès des jeunes consommateurs. Ce désintérêt fut

une des causes de la « crise économique d’internet » à laquelle aucune solution

satisfaisante et durable n’a pu être trouvée. En effet, la progression des audiences,

toujours existante malgré le ralentissement, ne parvenait pas à faire progresser les

revenus publicitaires comme escompté.

Depuis l’apparition des publicités sur les sites d’information via des habillages, des

interstitiels, pavés, etc…, les annonceurs ont évidemment cherché à engranger le plus

de profits possibles et cette perspective a très rapidement attiré de très nombreux

annonceurs sur un même créneau. Sachant que les sites d’information ont « besoin »

de revenus pour continuer à exister sur la toile, les annonceurs ont profité de cette

recherche de fonds pour s’imposer sur ce marché naissant, entrant forcément en

11

Pierre GROSJEAN, 17 mai 2001, largeur.com, article, « Internet, la fin de la gratuité »

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concurrence les uns avec les autres pour acquérir les espaces publicitaires vendus sur

ces sites. Ainsi, l’internaute est donc contraint de visualiser de plus en plus de publicités

sur un même site d’information. Karine BERTHELOT-GUIET emploie dans son livre

« Fin de la publicité ? »12 Deux nouveaux termes que sont l’ « hyperpublicitarisation »,

qui met en évidence que la publicité n’est plus ce qu’elle était et qu’elle est devenue de

la communication de masse, et la « publicitarisation » qui signifie que la publicité

recouvre le contenu éditorial. Nous pouvons citer notamment l’exemple très parlant de

publicitarisation que dévoile également Karine BERTHELOT-GUIET13 dans un autre

ouvrage intitulé « Entre dépublicitarisation et hyperpublicitarisation, une théorie des

métamorphoses du publicitaire » : il s’agit du quotidien Le Monde, qui en page d’accueil

de son site a publié de faux articles provenant de fausses archives. Le seul but était de

faire une publicité bien réelle pour Vuitton. Ainsi, cette marque utilisait une

communication dépublicitarisée, c’est-à-dire que la publicité en question prenait la forme

d’une information éditoriale alors que le média d’information lui-même se faisait

publicitariser (le média devenait lui-même une publicité). Ainsi l’internaute pouvait lire

une fausse information en première page qui était totalement publicitaire. Ce

phénomène consiste alors à publicitariser le média lui-même pour bénéficier de sa

crédibilité mais aussi pour ne plus se servir des banals champs publicitaires

traditionnels.

Mais aujourd’hui, entre la concurrence des sites d’information et la concurrence des

annonceurs, les internautes ne se sentent plus libres et expriment leur ras-le-bol via

notamment l’utilisation des bloqueurs de publicité comme Adblock. Cet outil est un

module que l’utilisateur ajoute à son navigateur web tel que Mozilla Firefox et Chrome

qui permet de bloquer les publicités de tous les sites web ou bien d’une sélection que

l’utilisateur choisit. Selon la célèbre revue 01Net, on considère qu’il y a environ 15 à

20% d’internautes français qui utilisaient en 2015 des ad-blockers.

Le problème est qu’une publicité doit être reconnaissable en tant que telle par

l’internaute, il doit pouvoir reconnaître la marque grâce à son logo ou son nom. Or les

publicités intempestives, comme des liens cachant des annonces, se multiplient et

exaspèrent l’internaute qui a cliqué sur le contenu du site et qui voit s’ouvrir de

12

Karine BERTHELOT-GUIET, 2014, « Fin de la publicité ? » 13

Karine BERTHELOT-GUIET, Caroline MARTI DE MONTETY et Valérie PATRIN-LECLERE, 22 avril 2015, Revue Semens,

« Entre dépublicitarisation et hyperpublicitarisation, une théorie des métamorphoses du publicitaire »

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nouveaux onglets comprenant de la publicité, parfois accompagnée de sons, eux aussi

intempestifs. Dans ce cas, le clic n’est donc pas forcément voulu et provoque un

sentiment de frustration, de mécontentement de celui qui visionne une publicité

trompeuse et non désirée.

En 2015, Google Adwords, la régie numéro un mondiale de la publicité sur le Web, a

bloqué « près de 780 millions14 de publicités mensongères ou qui étaient des

escroqueries ».

Cette récente tendance cause des dommages grandissants aux annonceurs mais

également aux sites financés (parfois uniquement) par cette simple publicité. Ce

mouvement a donc créé une nouvelle problématique plutôt épineuse : comment faire

face aux frais de fonctionnement quand la principale caractéristique de l'information et

de la culture web est la gratuité ?

La publicité s'est avérée, comme partout ailleurs, une solution lucrative.

Malheureusement, elle s'est peu à peu développée aux dépens de l'internaute, puisque

quel que soit le site sur lequel il surfe désormais, il est assailli de toutes parts d'offres

publicitaires. Prenons le célèbre exemple du site Cdiscount qui regorge de nombreuses

publicités : il a fait naitre le besoin de bloquer les publicités pour obtenir un meilleur

accès à l’information, c’est pourquoi des bloqueurs de publicités ont été créés. Si les

sites internet n'avaient pas adopté cette solution, ils auraient probablement dû faire

payer un abonnement aux internautes pour avoir accès au contenu éditorial. En effet,

d’après la revue 01Net : « Selon les spécialistes, si Internet n’était plus financé par la

pub, il faudrait débourser environ 30 euros par mois pour en bénéficier pleinement »15.

De plus, pour obtenir davantage de revenus, certains sites de presse en ligne proposent

notamment de lire une partie seulement de l’article et propose à l’internaute de payer un

abonnement afin de pouvoir lire la suite de l’article. Ou encore, ils proposent un

abonnement afin de pouvoir avoir accès aux articles qui ne sont plus d’actualité. En

revanche, ce contenu payant comprend la plupart du temps également des publicités.

Mais Internet a toujours été gratuit pour les internautes. Ils ont toujours payé

uniquement leur abonnement Internet et non la navigation sur les différentes pages. Ces

14

Le Figaro, “Google a bloqué 780 millions de publicités en 2015”, mis en ligne le 22.01.2016 15

Jean Philippe PISANIAS, 4 mars 2015, Le web déclare la guerre aux bloqueurs de pubs

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consommateurs n’ont jamais eu la culture du payant pour ce service, la plupart d’entre

eux n’a pas été éduquée à l’information tarifée.

Pour terminer, certains de ces sites d’information sont remplis de publicité qui empêche

d’en lire agréablement le contenu. Nous pouvons là parler de « pression publicitaire »

qui désigne le nombre de messages publicitaires présents dans un environnement.

L’internaute est donc devenu en très peu de temps publiphobe, à cause de la

surexposition à la publicité, d’où la montée des bloqueurs de publicités. Il est hors de

question pour les internautes de devoir payer une information qu’ils pouvaient trouver

gratuitement auparavant.

De façon plus générale, on peut donc se demander : en quoi

l’hyperpublicitarisation sur Internet tend-elle à nuire à l’accès à l’information

gratuite ?

Hypothèse 1 : La surabondance des publicités pousse les utilisateurs à se détourner

des sites web d’information.

Les publicités sont de plus en plus présentes sur Internet dans sa globalité, cette masse

publicitaire pousse parfois les internautes à quitter le site web plutôt que d’être à

nouveau exposé à une publicité.

Hypothèse 2 : Pour contrer cette invasion publicitaire, beaucoup d’internautes activent

un bloqueur de publicités sur leur navigateur web ce qui fait réagir certains sites

d’information qui désormais interdisent l’accès à ces internautes.

Une grande partie des internautes a recours aux bloqueurs de publicités afin d’avoir un

contenu vide de publicités. Pour contrer cela, certains sites d’informations bloquent

l’accès à ces internautes qui ne peuvent ensuite plus consulter les informations. Ils

doivent désactiver le bloqueur de publicité pour avoir accès au contenu textuel.

Hypothèse 3 : Les sites web d’information offrent à leurs internautes la possibilité de

payer un espace privilégié avec peu, voire sans, publicité.

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9

Certains grands noms d’Internet tel que Le monde proposent aujourd’hui des espaces

premium avec de nombreux avantages, parmi lesquels la limitation voire l’absence de

publicité. C’est une aubaine pour les nombreux internautes qui souhaitent ne plus subir

cette publicité. En revanche, la culture de l’Internet gratuit rend difficile l’acceptation d’un

espace premium payant.

Pour comprendre cette problématique à laquelle chaque internaute fait face et tenter d’y

répondre, nous souhaitons analyser les habitudes et les comportements des internautes

face à l’hyperpublicitarisation mais aussi face à son contraire, c’est à dire au contenu de

pages d’information sans publicité. C’est pourquoi, nous allons réaliser dans le cadre de

ce mémoire de recherche deux questionnaires. Le premier sera quantitatif et administré

par Internet sur un échantillon large de 300 individus. Il va nous permettre d’obtenir une

multitude d’avis sur la façon de penser des internautes face à la publicité pour ainsi

analyser leurs habitudes de navigation. Nous réaliserons dans un second temps une

étude cette fois-ci qualitative sur un panel d’individus sélectionnés par nos soins.

L’objectif de cette étude sera de déterminer les comportements face aux contenus avec

et sans publicité sur Internet.

Le premier sondage quantitatif comporte 26 questions et sera administré sur Internet à

l’aide d’un questionnaire « Google form » puisqu’il s’agit d’un outil très complet qui

permet d’avoir un taux de retour important tout en ayant un traitement des résultats en

temps réel auprès d’une cible qui utilise Internet et est donc confrontée à la publicité sur

ce média. Nous allons prendre en compte dans les réponses à ce sondage les

caractéristiques suivantes : l’âge, le sexe, le temps passé sur Internet chaque jour, avec

quels types de supports, etc…

Le deuxième entretien qualitatif permettra de faire la comparaison entre un contenu

avec publicité et un contenu sans publicité sur un panel restreint d’individus (15

personnes). Chaque individu sera enregistré pour pouvoir analyser son retour en temps

différé. Lors de cet entretien, nous poserons à chaque individu des questions cibles

telles que : « que ressentez-vous par rapport à votre navigation ? », « utilisez-vous un

bloqueur de publicités ? », etc... Nous leur expliquerons ensuite le fonctionnement

d’Internet « gratuit » pour réitérer l’expérience et constater un éventuel changement

dans les réponses des différents individus.

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SOMMAIRE

Problématique : En quoi l’hyperpublicitarisation sur Internet tend-elle à nuire à

l’accès à l’information gratuite ?

INTRODUCTION ............................................................................................................. 1

SOMMAIRE ................................................................................................................... 10

1 - La surabondance des publicités pousse les utilisateurs à se détourner des

sites web d’information ............................................................................................... 12

1.1 - La nécessité des sites d’information .................................................................. 13

1.1.1 - L’accès permanent à l’information ............................................................... 14

1.1.2 - Une utilisation régulière mais de courte durée ............................................. 14

1.1.3 - Les préférences des utilisateurs : support et site d’information.................... 15

1.2 - La surexposition à la publicité ............................................................................ 16

1.2.1 - Présentation du monde de la publicité et de ses acteurs ............................. 16

1.2.2 - La publicité : légale ou intempestive ? ......................................................... 17

1.2.3 - Les publicités légales considérées intempestives par les internautes ......... 19

1.2.4 - Le matraquage publicitaire ........................................................................... 23

1.3 - Les réactions et considérations des internautes ................................................ 24

1.3.1 - L’aversion des utilisateurs : un mécontentement généralisé ........................ 24

1.3.2 - Le ciblage publicitaire : la divergence des points de vue ............................. 25

1.3.3 - La publicité considérée comme une information ? ....................................... 28

1.3.4 - La compréhension du besoin de la publicité par les internautes .................. 29

2 - Pour contrer cette invasion publicitaire, beaucoup d’internautes activent un

bloqueur de publicités sur leur navigateur web ce qui fait réagir certains sites

d’information qui désormais interdisent l’accès à ces internautes. ....................... 31

2.1 - L’utilisation des bloqueurs de publicité ............................................................... 31

2.1.1 - Une pratique très répandue ......................................................................... 31

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11

2.1.2 - Un contenu purement informatif ................................................................... 32

2.1.3 - Les critères de choix du célèbre bloqueur de publicités Adblock ................. 32

2.2 - L’inquiétude des publicitaires ............................................................................. 33

2.2.1 - Des objectifs non atteints ............................................................................. 33

2.2.2 - Un futur publicitaire incertain........................................................................ 35

2.2.3 – La remise en question de l’IAB .................................................................... 35

2.3 - La contre-attaque des régies .............................................................................. 37

2.3.1 - La sensibilisation des utilisateurs sur la publicité ......................................... 37

2.3.2 - Les demandes de dons ................................................................................ 38

2.3.3 - Le blocage des utilisateurs en cas de nécessité .......................................... 39

3 - Les sites web d’information offrent à leurs internautes la possibilité de payer

un espace privilégié avec peu voire sans publicité. ................................................. 41

3.1 - Le revenu des régies .......................................................................................... 41

3.1.1 - Le besoin de financement ............................................................................ 41

3.1.2 - Les cyberjournalistes ne sont pas bénévoles............................................... 42

3.1.3 - La proposition d’abonnement avec espace premium ................................... 43

3.2 - La perception des espaces premium par les internautes ................................... 46

3.2.1 - La rentabilité incertaine ................................................................................ 46

3.2.2 - La culture du gratuit ..................................................................................... 47

3.2.3 - La peur du retour au matraquage publicitaire .............................................. 48

CONCLUSION .............................................................................................................. 51

BIBLIOGRAPHIE .......................................................................................................... 53

WEBOGRAPHIE ........................................................................................................... 54

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12

1 - La surabondance des publicités pousse les utilisateurs à

se détourner des sites web d’information

La population est aujourd’hui constamment en contact avec la publicité avec notamment

l’affichage, la télévision, la radio, la presse mais aussi énormément avec Internet. Plus

de 60% des internautes se disent gênés par la publicité en ligne pendant leur lecture car

elle est trop présente et trop intrusive. En effet, la publicité attire leur attention ou les

empêche tout simplement de se concentrer sur la lecture de leurs informations. De plus,

nous constatons que près de 75% des internautes interrogés n’apprécient pas d’être

exposés à la publicité en général. Ainsi, ces chiffres parlent d’eux-mêmes : la majorité

des internautes n’apprécie pas la publicité et s’en détourne dans la majorité des cas dès

que l’occasion se présente.

Des publicités sur Internet, il en existe de nombreuses, sous différents formats, qui

tentent d’attirer l’attention de l’internaute, de façon plus ou moins intrusive. Lorsque l’on

demande aux internautes ce qu’ils considèrent comme de la publicité sur les célèbres

sites d’informations Le Figaro, Le Parisien ainsi que Le Monde, nous pouvons constater

que toutes les formes de publicités sont repérées, de la simple bannière au sponsoring

moins visible.

Figure 1 - Screenshot : Exemple de publicité automobile sponsorisée sur le site LeMonde.fr

Nous notons donc que les internautes sont sensibles à toutes les formes de publicité et

sont capables de les repérer malgré les techniques de plus en plus utilisées par les

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13

publicitaires pour les masquer telles que, par exemple, le sponsoring. Malgré leur

mécontentement, les internautes continuent de consulter les sites d’information pour

satisfaire leur besoin permanent d’être au courant de l‘actualité et d’être parfaitement

renseignés sur des sujets précis.

1.1 - La nécessité des sites d’information

L’accès à l’information est un droit écrit dans l’article 19 de la Déclaration universelle

des droits de l’homme de 1966 qui précise que :

« Le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de chercher, de

recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les

idées par quelque moyen d’expression que ce soit »16.

Internet est un des moyens mis à la disposition de tout type de public pour s’informer.

C’est pourquoi, de nombreux journaux papier, tel que le Figaro, ont créé leur propre site

d’information en ligne. Cela leur permet de proposer une alternative à l’accès à

l’information. Dans le cadre de ce mémoire, nous allons étudier plus précisément les cas

des journaux Le Monde, Le Figaro et Le Parisien. En effet, ce sont ces trois sites

d’information que les internautes interrogés consultent le plus pour s’informer au

quotidien sur Internet

De nos jours l’information a pris une place importante dans le quotidien de chacun.

Certes, elle est un droit mais aujourd’hui elle est devenue une nécessité. Deux

phénomènes, résultant chacun de l’apparition d’internet, ont contribué à la rendre

indispensable.

Le premier phénomène est l’accessibilité à tout type d’information en ligne et la facilité

de recherche quel que soit l’événement, le sujet, le lieu, la date. Auparavant, chaque

information traitée dans la presse, le journal télévisé ou la radio faisait l’objet de

quelques lignes ou de quelques minutes d’antenne. L’information n’était délivrée au

public qu’une fois par jour pour la presse, et qu’à certains créneaux de diffusion pour la

télévision ou la radio. Désormais, le public veut et va s’informer quand il le souhaite.

16

Source : 197e session du Conseil de l’Unesco

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14

D’autre part, l’autre phénomène est l’apparition des réseaux sociaux par lesquels tous

communiquent, échangent et partagent des événements. Cette communication

continuelle avec l’autre implique de se tenir informé en permanence pour ne pas se

sentir exclu, stupide ou inculte face à aux autres.

Cette révolution technique qu’est internet a, d’une part, rendu accessible et sans délai

l’information et a, d’autre part, engendré pour elle un engouement certain du public. Les

sites d’information sont devenus une nécessité.

1.1.1 - L’accès permanent à l’information

Aujourd’hui, grâce à Internet, la population a un accès permanent à l’information. En

effet, ce média est accessible à tous et mis à jour de façon continuelle contrairement à

d’autres médias. De plus, selon les préférences de l’internaute, celui-ci peut consulter

les informations n’importe où grâce à son mobile, sa tablette ou même à l’aide d’un

ordinateur portable. Les nouveaux smartphones et forfaits associés permettent d’avoir

accès à Internet à peu près partout. Les mobinautes utilisent leur téléphone pendant

qu’ils sont dans les transports en commun, durant leur pause déjeuner, pendant une

pause en cours de journée, ou encore à l’école pour des recherches, etc… De cette

manière, Internet rend l’information accessible à tous, à tout moment, et quasiment

n’importe où. Il s’agit d’une aubaine pour les sites d’information et pour les publicitaires

qui peuvent ainsi proposer leur contenu dans n’importe quelle situation et à toute heure.

Les autres médias n’offrent pas une information aussi instantanée, mise régulièrement à

jour et facile d’accès qu’Internet. Cela a permis à chacun de se tenir au courant de tout

ce qui se passe dans le monde quel que soit le sujet, quel que soit le lieu géographique,

quel que soit le moment.

1.1.2 - Une utilisation régulière mais de courte durée

« On recense 84% d’internautes en France en 2015 et 68% d’internautes se connectant

tous les jours »17. Qu’ils soient équipés d’ordinateur, de PC portable, de smartphone ou

de tablette, environ sept personnes sur dix consultent Internet tous les jours, que ce soit

à des fins personnelles ou professionnelles.

17

ARCEP, baromètre du numérique, http://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/CREDOC-Rapport-enquete-diffusion-TIC-

France_CGE-ARCEP_nov2015.pdf

Page 16: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

15

Depuis quelques années, les téléphones mobiles sont devenus un des outils les plus

répandus. En effet, en 2015, les statistiques indiquent que plus d’une personne sur deux

est équipée d’un smartphone18 : les proportions de visibilité pour les sites d’information

mais aussi pour les publicités sont donc très fortes. Les nouveaux smartphones

permettent un nouvel usage de ce terminal grâce à leur accès permanent à internet.

Lors de ces connexions sur Internet, près de 93% des personnes interrogées disent

consulter régulièrement les informations. Cependant ce temps consacré à l’information

reste mince puisque 45% des internautes interrogés passent seulement 10 à 30 minutes

par jour à s’informer. On peut dire, que bien que les internautes soient friands

d’informations et consultent quotidiennement les sites, ils n’y consacrent que peu de

temps dans leur journée.

1.1.3 - Les préférences des utilisateurs : support et site d’information

D’après l’étude quantitative que nous avons réalisée, le support privilégié par les

internautes reste le PC avec 48% d’utilisateurs, suivi de près par le mobile lui aussi

fortement utilisé par les individus avec 44% d’utilisateurs. Ce sont donc ces deux

supports qui sont principalement utilisés par les personnes interrogées, suivis de loin

par le support tablette avec seulement 8% d’utilisateurs. Les publicités seront beaucoup

plus affichées sur PC et sur mobile que sur tablette vu que les internautes utilisent

moins ce support. Chaque support possède ses propres formats de publicités puisqu’ils

sont adaptés notamment à la taille de l’écran et à la capacité technique de l’outil.

Mais par quels moyens les internautes accèdent-ils à l’information ? De nos jours, il y a

plusieurs façons de rechercher des informations sur Internet : via les agrégateurs

d’actualités comme Google News ou New Republic qui synthétisent par thème des

grands titres des articles de tous les sites, et directement via les sites d’information (Le

Monde, Le Parisien, …). Les agrégateurs d’actualités sont presque autant utilisés que

les sites d’information. D’ailleurs, 71% des répondants disent ne pas avoir de préférence

quant au site d’information consulté. Ils privilégient les articles, donc l’information plutôt

que le site lui-même.

Un utilisateur sur deux (49%) a le site 20minutes.fr dans ses favoris, suivi des sites

LeMonde.fr (48%) et LeParisien.fr (32%) : probablement une continuité de leur fidélité à

18

Source : Baromètre du numérique de l’ARCEP

Page 17: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

16

la presse écrite. Il résulte de ses réponses que les internautes favorisent la lisibilité et la

rapidité d’accès à l’information : s’informer doit être facile.

1.2 - La surexposition à la publicité

Comme nous l’avons constaté précédemment, les internautes consultent assez

régulièrement les sites d’information. Ils sont confrontés à de multiples pages,

différentes autant dans leur contenu que dans leur architecture et graphisme. Chacune

de ces pages est remplie d’annonces publicitaires en fonction des recherches de

l’internaute. Au cours de notre enquête quantitative, nous avons voulu savoir si les

internautes étaient perturbés durant leur navigation sur les sites d’information. C’est le

cas, près de neuf utilisateurs sur dix (89%) affirment l’être : 61% des répondants sont

gênés par les publicités présentes sur les sites d’information, 38% des répondants sont

gênés par la limitation de contenu de certains sites sans y être abonné et enfin, 29%

sont gênés par la mauvaise qualité du contenu du site consulté. La majorité des

internautes qui disent être perturbés au cours de leur navigation le sont par la publicité.

Aujourd’hui, ces internautes expriment leur mécontentement face à cette surexposition à

la publicité. Mais qu’est-ce que la publicité en ligne ? Les publicités sont-elles toutes

intrusives et intempestives ? Peut-on parler de matraquage ?

1.2.1 - Présentation du monde de la publicité et de ses acteurs

Selon Karine BERTHELOT-GUIET, « le média est un support publicitaire »19, c‘est à

dire que l’éditeur du site web a créé une sorte de « contrat de lecture entre l’éditorial et

la publicité ». De cette manière, les sites ont été repensés pour accueillir la publicité.

Le monde publicitaire est constitué de plusieurs acteurs dont, en premier lieu, la marque

qui cherche à promouvoir son produit et est appelée « annonceur » dans le langage

publicitaire. L’agence média interactive est un organisme composé de spécialistes

chargés pour le compte des annonceurs de la conception, de l’exécution et du contrôle

du fonctionnement des formats publicitaires. Les agences média de communication

interactive sont des agences spécialisées dans le conseil, la stratégie et l’expertise de la

communication « online ». Elles gèrent des budgets, elles proposent une stratégie de

19

Karine BERTHELOT-GUIET, 2014, “Fin de la publicité ? Tours et contours de la dépublicitarisation”

Page 18: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

17

communication la plus efficace possible pour le compte de l’annonceur. Et enfin, la régie

qui gère un ensemble de sites web où seront diffusées les publicités.

A chaque étape, il y a des validations entre les différents acteurs pour savoir s’il n’y a

pas de dépassement de budget, si les formats publicitaires conviennent, si le produit

final correspond aux attentes de la marque, etc… Il y a beaucoup d’échanges entre les

différents acteurs avant de finaliser le produit (le format publicitaire) et de le mettre en

ligne. Bien entendu, les objectifs publicitaires varient, mais pour la majorité des

publicités, la vente est le principal objectif. C’est pourquoi les publicitaires tentent de

l’atteindre par diverses techniques publicitaires.

1.2.2 - La publicité : légale ou intempestive ?

On peut définir la publicité telle un moyen d'information, destiné à permettre à un client

potentiel, de se faire une opinion sur les caractéristiques des biens ou services qui lui

sont proposés.

La publicité légale est définie par des règles bien précises dictées par la cour de

cassation.

Tout message peut revêtir le titre de publicité tant qu’il donne une information au client

sur un produit ou un service. De ce fait, il y a des limitations à la libre diffusion de la

publicité afin de respecter la loyauté des principes et de protéger les consommateurs.

La publicité doit rendre clairement identifiable la personne physique ou morale pour le

compte de laquelle, elle est réalisée. En résumé, les règles principales de la publicité,

définies par la loi LCEN : l’identification claire et précise de l’annonceur, la transparence

et la loyauté.

Il existe deux types de publicité en ligne : les publicités légales et les publicités non

légales, dites intempestives.

● Publicité en ligne légale

Il n’existe pas de règles spécifiques à la publicité en ligne. Ce sont les règles de la

publicité en général qui s’appliquent.

Sur internet, il existe différents types de publicités réglementées par la structure IAB

(Internet Advertising Bureau). Voici les principaux : le display constitué d’éléments

créatifs (image, texte, …) avec ou sans vidéo ; le search, utilisé par Google, il propose

Page 19: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

18

des annonces grâce aux mots clés que les internautes tapent dans une recherche, et

l’e-mailing publicitaire.

L’annonceur doit être facilement reconnaissable par l’utilisateur : la présence de son

logo est obligatoire. Les phrases écrites en anglais doivent être traduites en français.

Les publicités ne doivent pas être agressives et doivent être intégrées correctement sur

le site.

Figure 2 - Screenshot : exemple de publicité display (pavé) pour le loto (FDJ) sur Melty

● Publicité en ligne intempestive

Ces publicités ne respectent pas les règles principales de la publicité et de la publicité

en ligne. Elles peuvent être agressives et déloyales, elles peuvent tromper

volontairement le client, le choquer voire lui nuire.

Ces publicités sont souvent présentes sur des sites web tels que des plateformes de

téléchargement illégal (musique et films) et autres sites web peu fiables. Elles sont aussi

présentes sur le navigateur de l’internaute qui a téléchargé un fichier contenant un virus

ou accepté de télécharger une extension qui lui a tout simplement ajouté toutes ces

publicités.

Nous pouvons dire que la publicité a su s’adapter au nouveau support qu’est internet

avec la e-publicité. Mais bien qu’elle soit soumise à la même réglementation que la

publicité en général, elle est ressentie comme plus agressive par le public.

Page 20: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

19

1.2.3 - Les publicités légales considérées intempestives par les internautes

Les utilisateurs ne font majoritairement pas la différence entre les publicités

intempestives et les publicités légales. Certaines publicités légales sont considérées

intempestives par les utilisateurs car bien que légales, elles les dérangent.

Les commentaires de quelques internautes interrogés nous révèlent des réactions

différentes face à ce dérangement. Le témoignage de Marine LIBERATOR montre un

comportement de crainte face aux publicités qui s’affichent devant la page qu’elle

visionne:

« En général j’évite de cliquer sur les publicités parce que j’ai souvent peur que

ce soient des arnaques »20.

La majorité des publicités qui viennent devant le contenu de l’utilisateur peuvent être

fermées grâce à un bouton de fermeture. Le souci principal vient de la peur des

internautes sur l’action qu'entraîne un clic sur la publicité qu’ils considèrent

intempestive: ils ont peur que cette action amène à télécharger un virus ou que le clic

provoque l’ouverture de multiples onglets et autres mauvaises intentions, comme nous

l‘exprime le témoignage de Marine LIBERATOR.

Or, sur les sites d’information, un clic de redirection ouvre une seule page de destination

appartenant à l’annonceur, c’est-à-dire que l’utilisateur va être redirigé vers le site web

présentant une offre ou un produit que l’annonceur souhaite promouvoir. Ainsi, certaines

publicités ne remplissent pas du tout leur objectif puisqu’elles font peur aux internautes

qui n’osent pas cliquer dessus.

Parmi les publicités mentionnées, pour la plupart, il s’agit de publicité “display” qui

regroupe toutes les formes de publicités en ligne présentant des éléments graphiques

ou vidéos. Ce sont donc ces types de publicités et non les autres plus classiques qui

gênent et effrayent les internautes. Le format de publicité display le plus répandu sur

internet est l’interstitiel vidéo. Ce type de publicité est considéré comme intempestif par

les internautes alors qu’il est tout à fait légal.

20

Marine LIBERATOR, commerciale agricole, interviewée le 17.04.2016

Page 21: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

20

Figure 3 - Screenshot : Interstitiel multividéo pour Zootopie sur Parents.fr

Il s’agit d’un pop-up qui vient se mettre devant le contenu de l’article ou avant le

chargement de la page. Pour avoir accès au site, l’utilisateur doit, soit attendre quelques

secondes pour pouvoir fermer le format à l’aide d’une croix, soit attendre la fin de la

vidéo pour que le format se referme de façon automatique.

Il y a aussi le format nommé “in-read” qui est jugé très dérangeant : lorsque l’utilisateur

lit son article, celui-ci est coupé en deux pour laisser apparaître une vidéo qui s’active

automatiquement avec le son. De même que pour l’interstitiel, l’utilisateur doit patienter

un minimum de temps pour pouvoir agir sur la vidéo et la fermer.

Page 22: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

21

Schéma : Explication de la scénarisation du format in-read

Etienne VAILLANT, lui, nous parlait plutôt de son agacement pour ce type de publicité

qui surgit au cours d’une consultation sur internet sans qu’il puisse intervenir:

« Je déroule ma page tranquillement, un soir pendant que ma femme dort, je suis

en train de lire mon article et là une publicité apparaît dans mon article avec le

son automatique à fond ».21

Il cherchait à se détendre après le travail, tandis que sa femme dormait dans la pièce

d’à côté. Il précise aussi qu’un tel incident aurait été plus énervant « si j’avais eu un

enfant, ça l’aurait certainement réveillé un bruit pareil ».

Cet internaute est surtout agacé de n’avoir pas pu contrôler le volume sonore de cette

publicité.

Comme beaucoup d’autres internautes interrogés, Joëlle CLERY elle, n’apprécie pas les

publicités, surtout celles en format vidéo et est agacée au point de quitter le site sur

lequel elle navigue :

« Les publicités sont très gênantes, ça coupe la lecture. Certains articles me

demandent de l’attention pour comprendre et l’apparition d’une publicité vient

perturber ma concentration et ma réflexion. C’est vraiment gênant. Les

21

Etienne VAILLANT, Ingénieur en électronique, interviewé le 17.04.2016

Page 23: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

22

interstitiels me donnent envie d’arrêter ma lecture, je n’ai pas envie d’aller plus

loin. »22

En résumé, pour la majorité des internautes sondés, la publicité est perturbante dès lors

qu’il y a une action à faire ou qu’elle vient s'immiscer dans le contenu de la page de

lecture, c’est ce qui est notamment reproché à la publicité display. Cependant, ils

acceptent beaucoup plus facilement la publicité display classique qui est statique, qui ne

requiert aucune action et ne cache aucun contenu.

Lorsque les publicités sont gênantes, les internautes les considèrent comme

intempestives.

Les internautes semblent avoir été agacés par la publicité display, plus particulièrement

vidéo. Ils désignent la publicité en ligne, dans son ensemble, comme désagréable. Or,

ce terme englobe des publicités qu’ils acceptent ou dont ils n’ont pas conscience. Ces

dernières sont dues à la qualité de l’adaptation de la publicité au site support.

En effet, Catherine VOYER nous expliquait que les internautes ont « tendance à tout

mettre dans un même sac », et pourtant, elle souligne que « beaucoup de publicités

sont vraiment intéressantes et ne nous dérangent absolument pas »23. D’ailleurs, selon

l’étude de Wibbitz24, le format préféré des internautes aux Etats-Unis est le format

publicitaire avec une vidéo « courte, muette et sans autoplay ». Cela signifie que

l’internaute souhaite choisir de pouvoir regarder la vidéo car il souhaite être tranquille.

Le fait que la vidéo démarre automatiquement n’est pas apprécié par les internautes car

ils n’aiment pas être obligés d’interagir avec le format publicitaire. Sur les réseaux

sociaux, cette observation est encore plus vérifiée car les internautes préfèrent les

images avec du texte aux vidéos. En effet, d’une manière générale, 61% des

internautes interrogés par Wibbitz « reconnaissent sauter systématiquement les vidéos

publicitaires ».

Ainsi, nous pouvons donc noter que les internautes se font une opinion totalement

subjective de la publicité en fonction de ce qui les gêne ou non, la différence entre des

publicités légales et des publicités intempestives n’entrent pas en compte dans leur

22

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016 23

Catherine VOYER, Médecin psychiatrique, interviewée le 17.04.2016 24

ZNet, Enquête Wibbitz du second semestre 2016, http://www.zdnet.fr/actualites/muette-courte-et-sans-auto-play-la-video-

publicitaire-preferee-des-internautes-39837032.htm

Page 24: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

23

jugement. Ils souhaitent pouvoir être libres dans le choix de visionner ou non une

publicité, ce qui n’est généralement pas le cas.

1.2.4 - Le matraquage publicitaire

De nos jours, il existe énormément d’annonceurs souhaitant avoir recours à la publicité

pour remplir un ou plusieurs objectifs. Parmi eux, nous pouvons compter en premier lieu

l’objectif cognitif qui cherche à faire connaître la marque, le produit ou le service pour

par exemple accroître la notoriété, mais aussi l’objectif affectif qui vise à faire aimer la

marque ou les produits et services s’y rattachant. Enfin, nous avons l’objectif conatif25

qui cherche à faire passer l’internaute à l’action, cela peut être par l‘achat, par la

consultation d’un document, etc… De ce fait, de nombreuses agences de publicité ont

fait leur apparition pour aider ces annonceurs à communiquer efficacement et à remplir

leurs objectifs. Les régies des sites web sont donc énormément sollicitées par de

multiples publicitaires : tout le monde a le droit de communiquer et de se faire connaître,

les petites comme les grandes entreprises. Les sites d’informations doivent répondre à

chaque demande et diffuser les nombreuses publicités.

Mais pour les internautes, la réalité est tout autre. Par exemple, Joëlle CLERY considère

la publicité sur les sites web comme une sorte de matraquage. Elle appuie sur le fait

qu’il y a « de plus en plus de publicité qu’elle soit statique ou sous forme de vidéo, les

articles sont noyés »26. Mais ce n’est pas tout, ce terme ne signifie pas seulement

l’abondance de publicité mais aussi un certain « bourrage de crâne » : parfois, il est

possible de rencontrer la même publicité plusieurs fois de suite ou dans le même encart

publicitaire. Ainsi, selon la majorité des internautes interrogés lors de l’enquête

qualitative, il y a trop de publicité.

D’ailleurs, Nicolas RIOU exprime le ras-le-bol généralisé quant au caractère intrusif des

publicités et la surexposition à celle-ci :

« C’est l’écœurement face à la quantité de messages qui nous sont destinés. On

estime entre 300 et 600 le nombre de messages quotidiens auxquels un individu

est exposé. »27

25

Objectif qui vise à faire faire une action au prospect. 26

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016 27

Nicolas RIOU, 2005 « Peur sur la pub »

Page 25: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

24

Cette constatation va être encore appuyée par les 280 répondants au questionnaire

quantitatif. En effet, deux tiers des internautes (68%) pensent être trop exposés aux

publicités sur les sites d’information. Les internautes jugent qu’il n’est pas acceptable

d’être obligé de visualiser une publicité pendant trois minutes alors que, bien souvent,

le temps de lecture de l’article ne dure que quelques secondes Il y a donc ici une notion

de comparaison entre le temps imparti à la publicité et celui imparti à la lecture de

l’article proprement dite ce qui a tendance à nuire la qualité d’accès à l’information. De

façon générale, les internautes vivent les publicités comme une contrainte et une

agression puisqu’ils n’ont ni le choix de se soustraire à la publicité ni le choix de la

quantité de spots qu’on leur impose.

1.3 - Les réactions et considérations des internautes

Notre étude révèle que la majorité des internautes avoue être gênée par trop de

publicité. Chaque internaute a sa propre façon de réagir face à la présence des

publicités. En revanche, nous pouvons remarquer un comportement généralisé et tout à

fait contradictoire : d’une part, les internautes comprennent ce besoin de publicités de la

part des sites Internet, mais d’autre part, ces mêmes internautes ne supportent plus

cette publicité constante sur une grande majorité des sites Internet, y compris les sites

d’information : « On est cerné par la publicité et on ne nous laisse pas le choix »28 confit

Yvon DEBREINE lors d’un entretien. Cet individu n’est pas un cas isolé, de nombreux

internautes interrogés ont cette réaction.

1.3.1 - L’aversion des utilisateurs : un mécontentement généralisé

Les internautes sont en majorité agacés par toutes ces publicités : près de 63 % des

personnes interrogées se disent lassées des publicités et se détournent des sites

d'information. Cette lassitude vient de la redondance des publicités mais aussi de

certains formats intrusifs qui poussent les internautes à se détourner de plus en plus de

cette publicité. Les internautes qui sont gênés par cette surexposition à la publicité

« recherchent désespérément les derniers territoires vierges de publicité »29

28

Yvon DEBREINE, informaticien à la retraite, interviewé le 17.04.2016 29

Nicolas RIOU, 2005, « Peur sur la pub »

Page 26: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

25

En effet, la surabondance de publicité est remarquée par les internautes, comme nous

le précise Mathieu PASTY lors d’un entretien : « La publicité, en surabondance, c’est

pas agréable »30. Seulement, certaines publicités sont également considérées comme

intrusives par les internautes. Pour exemple, d’après Marine LIBERATOR, le fait de

cliquer sur la croix n’est pas rassurant :

« Quand on est obligé de cliquer sur la croix pour fermer la publicité quand elle

est en plein milieu, je n’aime pas »31.

Cette internaute parle bien entendu d’un format de publicité intrusif.

De plus, cette surabondance de publicité ralentit l’affichage de la page car elle est

alourdie, comme le constate si bien Yvon DEBREINE avec les publicités vidéo :

« Surtout pour les vidéos parce que ça arrive à ralentir la navigation, surtout pour

les vieilles machines »32.

L’utilisateur souhaitant avoir accès à une information rapidement est perturbé par ce

ralentissement, et parfois même, le support peut bloquer à cause de la publicité, allant

jusqu’à la frustration de l’internaute puisqu’il ne peut plus accéder à son information ni à

son support qui lui est bloqué. Ceci est particulièrement vrai pour les internautes

disposant d’un faible débit.

Ainsi, les mots et expressions « pas agréable », « je n’aime pas », « surabondance »

reviennent fréquemment lors de différentes interviews. Nous pouvons donc réellement

parler de mécontentement général envers les publicités.

Mais la surabondance de publicités et le ralentissement de l’affichage ne sont pas les

seuls points qui agacent les internautes.

1.3.2 - Le ciblage publicitaire : la divergence des points de vue

Les navigateurs utilisent des cookies, ce qui permet de collecter des données sur les

internautes : les sites visités, l’âge de l’utilisateur, ses préférences, etc… Ces données,

30

Mathieu PASTY, sans activité, interviewé le 17.04.2016 31

Marine LIBERATOR, commerciale agricole, interviewée le 17.04.2016 32

Yvon DEBREINE, informaticien à la retraite. Interviewé le 17.04.2016

Page 27: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

26

appelées data, sont utilisées pour améliorer la navigation de l’utilisateur sur Internet, par

exemple sur les moteurs de recherche mais aussi sur les publicités. En effet, les

publicités utilisent ce qu’on appelle “le ciblage” : les internautes sont ciblés en fonction

de plusieurs catégories de données (homme ou femme, leur âge, leur préférence, leur

localisation, leurs dernières consultations…).

Figure 4 - Schéma : Exemple de retargeting pour le site les 3suisses.fr

Ce ciblage, appelée « retargeting » en marketing consiste à proposer une publicité en

fonction du contenu qu’a visité l’internaute auparavant. Cette méthode a pu voir le jour

grâce à l’utilisation des cookies mais elle engendre différentes réactions et opinions

chez les internautes. Nous avons par exemple le témoignage de Joëlle CLERY qui nous

parle du ciblage publicitaire :

« Je suis vraiment gênée d’être autant ciblée et qu’on me mette dans une

catégorie systématiquement, j’ai l’impression d’être pistée. »33

En effet ce ciblage peut avoir des conséquences fâcheuses.

● Intimité et discrétion très réduites

33

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016

Page 28: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

27

Les cookies reconstituent notre vie privée grâce à nos habitudes de navigation et les

informations que nous donnons via des formulaires. Un individu est représenté par une

session sur chaque navigateur. De ce fait, si ce premier individu prête son ordinateur a

un deuxième individu, ce dernier aura les publicités ciblées du premier individu. Cela

peut poser un problème car il est impossible d’avoir une intimité et d’être discret avec le

retargeting sauf si l’on utilise une session privée sans cookie, mais la grande majorité

des utilisateurs aime garder dans leur cookie des informations telles que des logins,

mots de passe, etc…Il y a deux situations présentées par les répondants où l’utilisation

du retargeting est assez gênante.

Si l’on souhaite faire un cadeau et que l’on se renseigne en amont, nous serons

confrontés ultérieurement à des publicités sur ce produit durant notre navigation. De ce

fait, si la personne à qui est destiné ce cadeau utilise le même ordinateur et le même

navigateur, elle tombera sur les mêmes publicités. Dans ce cas, elle comprendra très

rapidement que le propriétaire de l’ordinateur aura fait des recherches sur ce même

produit ou ce même service et bien évidemment devinera ce qu’est l’éventuel cadeau.

Et dans le cas où l’on fait des recherches plus personnelles ou intimes, par exemple de

la lingerie féminine, il peut être gênant de prêter son ordinateur au cas où l’emprunteur

tomberait sur des publicités sur ce même produit.

● Stressante voire terrifiante

Grâce à Internet, il est tout à fait possible de géolocaliser les internautes. Cette

fonctionnalité est parfois utilisée dans les publicités afin de prévenir un mobinaute ou

internaute d’une promotion dans un magasin proche. Cette géolocalisation surprend les

utilisateurs peu aguerris et les inquiète car elle appuie sur le fait que l’internaute est en

quelque sorte pisté et qu’une fois de plus, on s’introduit dans sa vie privée. Ainsi, les

internautes savent que leurs données sont utilisées à des fins commerciales avec

notamment la publicité, ils en ont conscience, mais la plupart ne savent pas comment

mettre fin à de telles pratiques.

Malgré tout, certains internautes trouvent un intérêt à ce ciblage.

● Très intéressante

Néanmoins, pour les utilisateurs ayant recours plus souvent à Internet et connaissant

mieux son fonctionnement, ces deux fonctionnalités (géolocalisation et retargeting) sont

Page 29: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

28

assez intéressantes. Tel que l’exprime le témoignage d’Etienne VAILLANT qui nous

confie sa vision du retargeting, ce principe peut être intéressant :

« Il y a pas mal de gens qui râlent contre les publicités ciblées, alors qu’en fait je

trouve qu’elles sont bien plus intéressantes que des publicités au hasard qui n’ont

rien à voir avec le contenu. Ça m’embête moins d’avoir une publicité sur quelque

chose que j’ai recherché six jours avant que d’avoir une publicité qui ne

m’intéresse pas du tout ».34

Comme Etienne VAILLANT, certains trouvent que le contenu proposé est tout à fait en

accord avec leurs envies et leurs préférences ce qui rend la publicité très intéressante et

donne parfois envie de cliquer pour en savoir plus. Ces derniers sont amenés à penser

que la publicité est donc une sorte d’information.

Nous retrouvons toujours ce phénomène de contradiction entre les internautes : ceux

qui n’apprécient pas d’être « espionnés », ciblés, et les autres que cela arrange d’être

catalogués et qui apprécie de recevoir des informations sur des types de produits qui

leur correspondent. Le dénominateur commun à ces deux types d’individus est qu’ils

sont favorables aux avantages d’un système dans lequel il ne souhaite, malgré tout, pas

être enfermés.

1.3.3 - La publicité considérée comme une information ?

La publicité, qu’elle soit ciblée ou non, est considérée par certains utilisateurs comme

une forme d’information. Les publicités sont créées pour communiquer une offre,

véhiculer un message et informer à propos d’une société, d’une association, d’un produit

ou encore d’un service, tout comme nous le démontre le format “Native Ads”. Il s’agit

d’un format de publicité qui par sa forme, son emplacement et son contenu ressemble et

s’intègre fortement aux contenus diffusés habituellement par le site support qui la

diffuse. Ainsi, ce format de publicité permet d’être moins intrusif puisqu’il a pour objectif

d’être discret et de se confondre avec les informations du site. Les internautes ont

tendance à moins considérer les “Natives Ads” comme des publicités, mais plus comme

de l’information. Ce type de format est donc plus apprécié des internautes, ce qui

34

Etienne VAILLANT, ingénieur en électronique, Interviewé le 17.04. 2016

Page 30: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

29

démontre l’importance du format la manière d’amener la publicité à l’internaute. Les

publicités contraires à ce principe de discrétion représentent un problème pour les

internautes car elles dérangent leur tranquillité de lecture.

De plus, lorsque les règles de la publicité sont respectées (l’identification claire et

précise de l’annonceur, la transparence et la loyauté) l’internaute prend connaissance

de nouveaux produits, offres ou services faisant partie du site d’information. Lorsqu’elle

est bien intégrée au contenu, elle peut parfaitement être considérée comme une

information.

Pour certaines personnes, notamment Thomas FOURRE, il est assez gênant de lire un

article parlant d’un sujet X et à l’intérieur de celui-ci avoir une publicité - une autre

information - sur un sujet Y. Il précise sa pensée en ajoutant que la publicité est :

« Généralement pas en lien avec ce que je cherche, elle est plutôt en lien avec

ce qu’on a regardé avant et dans ce cas-là, elle est gênante ».35

Cependant, il tient à expliquer qu’il apprécie fortement avoir des informations ciblées et

jugent qu’elles sont vraiment intéressantes. Il est juste compliqué de suivre deux sujets

à la fois, comme dans une conversation. Ainsi, nous pouvons voir que la publicité ne

déplaît pas forcément à tous les internautes, mais il faut tout de même qu’ils y trouvent

un intérêt pour l’apprécier.

1.3.4 - La compréhension du besoin de la publicité par les internautes

Les internautes interrogés lors de l’étude quantitative sont majoritairement lassés des

publicités pour 63% d’entre eux. Ils préfèrent parfois même renoncer à l’article qu’ils

lisent plutôt que de faire face à une surabondance de publicité qui les importune.

Néanmoins, malgré toutes les peurs et mécontentements, les utilisateurs comprennent

que les publicités sont nécessaires pour le maintien du service que représentent les

sites d’information. La gratuité du contenu d’Internet ne le reste que grâce aux publicités

qui paient, d’une manière ou d’une autre, le contenu du site d’information à la place des

internautes. En revanche, 14% des internautes interrogés n’utilisant volontairement pas

35

Thomas FOURRE, Etudiant en mécanique, Interviewé le 17.04.2016

Page 31: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

30

de bloqueur de publicité le justifient par le fait qu’ils pensent qu’il est utile que les

publicités soient présentes sur les sites d’information car cela permet de les rémunérer.

C’est pour cela que la plupart des internautes ne quittent pas immédiatement les sites,

même ceux inondés de publicité et y retournent régulièrement.

Ainsi, nous pouvons voir qu’il y a une conscience commune du besoin de la publicité

pour les sites d’information, les internautes l’admettent parce qu’ils savent qu’il y a des

enjeux financiers importants derrière cette immense machinerie et de nombreux salariés

qui en dépendent.

En revanche, malgré cette compréhension commune, les internautes sont plutôt

mécontents de la surabondance de publicité présente sur les sites d’information qui ont

aussi pour effet de ralentir leur affichage. De plus, celles-ci engendrent de l’inquiétude

chez quelques-uns qui craignent que leur vie privée soit perturbée. Par contre,

contrairement à ce que nous pensions, les internautes ne quittent pas nécessairement

les sites d’information. La plupart du temps, les personnes attendent que la publicité se

termine soit en attendant l’action de fermeture (apparition d’une croix, d’un bouton ou la

fin du compteur), soit en changeant d’onglet.

Face à cette lassitude et à cette inquiétude, les internautes ont installé sur leur

navigateur des bloqueurs de publicité. Mais comment les sites d’information et les

publicitaires réagissent-ils face à cette pratique ?

Page 32: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

31

2 - Pour contrer cette invasion publicitaire, beaucoup

d’internautes activent un bloqueur de publicités sur leur

navigateur web ce qui fait réagir certains sites d’information

qui désormais interdisent l’accès à ces internautes.

La manière la plus logique et efficace pour un internaute de se débarrasser des

publicités est d’utiliser un bloqueur de publicité, Adblock étant le plus célèbre d’entre

eux. Nous avons ainsi pu observer de quelle manière mais aussi pourquoi les

internautes avaient recours à cet outil qui répond tout à fait à leurs attentes.

2.1 - L’utilisation des bloqueurs de publicité

Les internautes ont la possibilité d’installer sur leur navigateur une extension qui leur

permet de filtrer le contenu des sites web et d’en bloquer les formats publicitaires. Ces

extensions sont des bloqueurs de publicité dont le plus connu se nomme Adblock.

2.1.1 - Une pratique très répandue

Cette extension est la plus téléchargée sur le navigateur Mozilla Firefox, dépassant « les

190 millions de téléchargements en février 2013 avec plus de 15 millions d'utilisateurs

quotidiens moyens »36. L’impact qu’a ce type d’extension sur la navigation des

internautes est donc très conséquent. Au fil des années, les bloqueurs de publicités ont

amélioré leur service. Ainsi, il est par exemple possible depuis 2011 d’activer la fonction

« page blanche », c’est-à-dire que l’internaute a le choix de désactiver cette extension

pour une ou plusieurs pages. Cela sert notamment aux internautes souhaitant accéder

aux sites sans utiliser de bloqueur de publicités par respect pour leur travail ou tout

simplement parce que c’est imposé par le site lui-même.

Pour empêcher les publicités d’envahir les sites d’information, 62% des internautes

interrogés utilisent des bloqueurs de publicités : 45% activent leur bloqueur de publicité

en permanence contre seulement 17% qui l’activent seulement pour quelques sites.

Parmi les 24% des personnes qui ne savaient pas qu’un tel outil existait, la plupart sont

tentés d’en installer un, pour éviter les publicités jugées trop présentes. Nous avons

donc d’un côté les personnes utilisant Adblock et les autres qui n’étaient pas informés

de son existence auparavant mais souhaitant désormais l’installer. Il n’y a donc plus de

36

Wikipédia, “Adblock Plus”, https://fr.wikipedia.org/wiki/Adblock_Plus

Page 33: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

32

doute sur le succès d’Adblock et son utilisation massive pour contrer le « trop de

publicités ».

2.1.2 - Un contenu purement informatif

Les bloqueurs de publicité permettent de bloquer la quasi-totalité des publicités sur les

sites web (quelques-unes arrivent tout de même à passer au travers de l’extension). Le

contenu devient ainsi purement informatif, sans publicité, et la lecture de l’internaute

n’est donc pas gênée, elle est plus fluide.

Les répondants utilisant Adblock admettent qu’ils trouvent beaucoup plus agréable leur

navigation sans les publicités, d’où le grand nombre d’utilisateurs qui laissent

constamment actif leur bloqueur de publicité. Néanmoins certains sites obligent les

internautes à désactiver leur bloqueur de publicité pour accéder au contenu.

En revanche, il existe des sites internet totalement gratuits et sans aucune publicité.

L’un des plus connus est l’encyclopédie collaborative Wikipédia, mais nous pouvons

citer également un plus petit site, owni.fr, qui est également un site informatif sans

aucune publicité.

2.1.3 - Les critères de choix du célèbre bloqueur de publicités Adblock

Adblock a un fonctionnement particulier. En effet, toutes les publicités qu’Adblock

détecte ne sont pas masquées. Il existe par exemple pour Adblock Plus une « liste

blanche des publicités acceptables »37 qui est déterminée et est gérée à l’heure actuelle

par la société Eyeo. Cette société (en partie gérée par une communauté de volontaires),

collabore avec Adblock. C’est elle qui constitue cette fameuse liste.

Ainsi, la liste a pour objectif de « permettre la diffusion de publicités sur des sites

Internet qui ont souhaité se conformer aux critères de la Publicité Acceptable. »38

37

source : site officiel d’Adblock Plus: https://adblockplus.org/fr/about 38

source : site officiel d’Adblock Plus: https://adblockplus.org/fr/about

Page 34: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

33

Figure 5 - Schéma : Explication du fonctionnement d’Adblock

En revanche, il est possible de désactiver cette liste par une manipulation. Ainsi,

Adblock laisse tout de même le choix aux internautes de désactiver toutes les publicités

détectées.

Le succès d’Adblock auprès des internautes s’explique par le fait qu’ils se sentent libres

face à la publicité. Ils ont la liberté de choisir si « oui ou non » il active le bloqueur et à

l’intérieur même du système de blocage « si oui ou non » ils acceptent de visionner la

liste de publicités acceptables.

2.2 - L’inquiétude des publicitaires

L’utilisation massive d’Adblock inquiète fortement les publicitaires. En effet, leur visibilité

a diminué, tout comme l’atteinte de leurs objectifs qui elle aussi, a diminué. Ainsi, les

publicitaires ont perdu énormément de moyens financiers et d’impact.

2.2.1 - Des objectifs non atteints

Un internaute ne clique pas forcément sur une publicité qu’il voit sur le site d’information.

Lorsque qu’une publicité s’affiche sur l’écran de l’internaute, on parle d’une

« impression » de la publicité. Il faut attendre peut-être 1 000 impressions avant d’avoir

un internaute cliquant sur la publicité. De plus, le fait que quelques internautes aient

cliqué sur la publicité, n’implique pas pour autant qu’ils iront acheter le produit ou

souscrire à un service. Par conséquent, il est assez compliqué dans ces conditions

Page 35: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

34

d’atteindre les objectifs publicitaires. Voilà pourquoi les publicitaires se battent pour avoir

le plus d’emplacements possibles sur des dates précises afin de rendre vraiment

efficace leur communication. Ils ont aussi tendance à commander beaucoup

d’impressions pour maximiser les chances d’être vus et de réussir à convertir ces

quelques vues en lead qualifié39 pour un futur achat.

Mais avec Adblock, les publicités bloquées ne sont pas visualisées par les internautes.

Cela restreint davantage la réussite des objectifs publicitaires. Mais sont-elles facturées

aux publicitaires par la régie ? Les publicitaires ne sont pas facturés uniquement lorsque

les publicités sont visualisées, ils doivent aussi payer la réservation de diffusion, le

créatif qui a réalisé la publicité, la mise en œuvre du projet par un chef de projet,

l’agence média qui lui a réalisé son plan de communication, etc…

Prenons l’exemple d’une campagne publicitaire display : avec une cible assez large de

25-49 ans, le prix de ce type de campagne « tourne autour de 150 000 euros. Mais le

prix peut grimper jusqu'à 500 000 euros tout compris. »40 Il faut aussi prendre en compte

le site d’information sur lequel nous avons envie de communiquer l’information de la

marque. Les prix varient en fonction de si nous sommes affichés en première page ou

sur des pages d’articles ou catégories (moins vues) mais aussi si nous sommes affichés

en haut de la page ou en bas (moins de visibilité). Ce budget représente une énorme

somme à investir pour peu de retour sur investissement que tous les annonceurs n’ont

pas forcément. Les annonceurs qui ont une grande notoriété n’auront pas besoin de

communiquer beaucoup. A contrario, les annonceurs méconnus qui souhaitent être vus

par un maximum d’internautes devront investir énormément pour s’en assurer.

Cet « échec » publicitaire a donc un coût non négligeable pour les annonceurs et les

régies, donc pour tout le système financier de la e-publicité. Cette riposte des

internautes qui refusent par tous les moyens cette publicité massive inquiète

sérieusement les publicitaires et les sites d’information.

39

Données d’une personne intéressée par un type de produit / service que l’annonceur vend. 40

Stratégie, « Combien ça coûte ? », 2008, http://www.strategies.fr/etudes-tendances/dossiers/r48267/r48271W/combien-ca-

coute.html

Page 36: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

35

2.2.2 - Un futur publicitaire incertain

En septembre 2015, les navigateurs ont décidé de bloquer le player Flash car il

présentait de trop nombreuses failles de sécurité. Les différents acteurs de la publicité

en ligne ont donc dû faire face et passer rapidement à une autre technologie telle que le

HTML5 car les publicités utilisaient presque toutes la technologie Flash Player. Cette

remise à niveau a fait perdre beaucoup d’argent à tous les intervenants pendant qu’ils

mettaient leurs technologies et leurs compétences à niveau ainsi qu’ils mettaient en

oeuvre des tests pour vérifier le bon fonctionnement de la nouvelle technologie.

Cette année, le navigateur chrome compte intégrer son propre bloqueur de publicité

permettant ainsi d’éviter les publicités intempestives mais aussi de réduire le nombre

d’internautes utilisant leur propre bloqueur de publicité.

Avec l’émergence des bloqueurs de publicité sur Internet, le comportement des

internautes et en conséquence les objectifs difficilement atteints par les publicitaires, les

annonceurs, sont de plus en plus réservés quant à l’utilisation d’Internet comme canal

de diffusion pour leurs publicités. De plus, les autres canaux que sont par exemple,

l’affichage, la presse écrite, la télévision ou la radio n’ont pas de bloqueur de publicité.

2.2.3 – La remise en question de l’IAB

Suite aux nombreuses réclamations concernant la sur-exposition de publicité et

l’installation exponentielle du célèbre bloqueur de publicité Adblock, l’IAB a publié un

communiqué41 pour s’excuser d’avoir manqué à son devoir.

En effet, l’IAB rappelle qu’il s’efforce de maintenir l’équilibre entre les différentes parties

que constitue l’information en ligne : commerce, contenu et technologie. Soucieux d'être

à la pointe de la technologie, et désireux que l’automatisation soit plus poussée, il ne

cesse d’améliorer le système pour optimiser le rendement des budgets de marketing.

Maintenant que cet organisme a suffisamment de recul, il s’est rendu compte que

l’objectif de rentabiliser les campagnes publicitaire a nui à la loyauté des internautes et à

leur fidélisation. Au contraire, ceux-ci sont plus qu’agacés et se détournent de la

41 IAB, « Getting LEAN with Digital Ad UX » 2015, http://www.iab.com/news/lean/

Page 37: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

36

publicité voire parfois in extremis des sites d’information. La publicité a donc été victime

de ses propres procédés d’optimisation et de rendement.

Ces publicités enrichies de technologies, de « data42 » et chargées de lourdes images

au graphisme parfait ont ralenti l’accès au web. La taille de ces publicités est donc très

lourde car elles ne respectent plus le poids maximum donné par l’IAB ce qui a pour effet

de ralentir le temps de chargement des pages internet. Le téléchargement d’une page

web comprend tout le contenu du site : images, textes, titres, animations et publicités.

La durée de son exécution est longue et requiert une connexion internet sans faille. Si

l’utilisateur perd sa connexion pendant le chargement, celui-ci reprend au début.

Certaines publicités s’affichent avant le contenu du site Internet, elles sont donc

chargées avant le reste du contenu du site.

La durée de ce téléchargement étant conséquente, il en résulte souvent qu’elle a pour

effet de vider les batteries d’ordinateur et des smartphones. Cela les use donc

prématurément sans que les internautes puissent intervenir. Ceci est une raison

supplémentaire à l’agacement des internautes qui se tournent encore plus vers les

bloqueurs de publicité.

Mais, l’IAB craint que ces mécontentements et bloqueurs de publicité conduisent « les

utilisateurs vers un monde de plate-forme fermée dominée par quelques

entreprises. »43. A l’origine, l’IAB estime que « la publicité sur le Web a servi de

fondation à une économie qui, aujourd'hui encore, permet de soutenir un Web gratuit et

démocratique »44.

De ce fait, ils ont imaginé un nouveau standard de publicité nommé « LEAN » (Light /

Encrypted / Ad choice supported / Non-invasive ad) : les publicités devront être

« légères, chiffrées, consenties et non intrusives » pour les internautes.

L’idée principale est que les internautes suppriment rapidement leur bloqueur de

publicité afin que le web ne soit pas sous l’emprise des grandes puissances du marché.

L’IAB espère que son nouveau standard de publicité « LEAN » ainsi que son « Mea

42

Terme anglais (« données » en français) qui est la représentation d'une information dans un programme informatique. 43

IAB, « Getting LEAN with Digital Ad UX » 2015, http://www.iab.com/news/lean/ 44

LeFigaro, « ‘’Nous nous sommes plantés’’ : le mea culpa de la publicité en ligne », 2015, http://www.lefigaro.fr/secteur/high-

tech/2015/10/16/32001-20151016ARTFIG00087-nous-nous-sommes-plantes-la-pub-en-ligne-fait-son-mea-culpa.php

Page 38: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

37

Culpa » vont apaiser les tensions dans le souci de maintenir l’accès au Web à la portée

de tous et pour cela, faire accepter le financement par la publicité aux internautes.

2.3 - La contre-attaque des régies

Pour contrer cette utilisation imposante d’Adblock, les régies utilisent différentes

méthodes plus ou moins agressives. En effet, la manière la plus conciliante d’empêcher

les internautes d’utiliser un bloqueur de publicité est de les sensibiliser grâce à des

messages affichés sur les sites concernés. Il existe également des sites faisant un appel

aux dons. Enfin, la manière la plus forte est d’empêcher l’internaute d’avoir accès au

contenu s’il a un bloqueur de publicités actif.

2.3.1 - La sensibilisation des utilisateurs sur la publicité

Les régies ne peuvent pas accepter que toutes les publicités soient bloquées sans agir.

En effet, si la régie n’arrive pas à délivrer toutes les impressions achetées par le

publicitaire, elle doit lui offrir une compensation. Pour éviter d’en arriver à cette situation,

les régies sont amenées de plus en plus à sensibiliser les internautes quant à l’utilisation

de bloqueurs de publicité et ce qu’ils engendrent sur la rémunération des sites web. En

effet, Joëlle CLERY insiste sur le fait que d’avoir recours à un bloqueur de publicité,

« c’est potentiellement nuire à la gratuité de l’information »45.

Le fait d’avoir des publicités sur le site permet de le rentabiliser car le contenu est gratuit

uniquement parce qu’il y a quelqu’un pour rémunérer les régies et éditeur de site web.

L’ajout par l’internaute de bloqueurs de publicité est néfaste pour les régies car ils

« participent en même temps à la destruction d’un modèle fondé sur la gratuité »46.

La publicité n’est pas le seul moyen dont la régie a besoin pour se rémunérer mais c’est

la solution la plus rentable. De plus, la création de contenu informatif et la gestion des

campagnes publicitaires en ligne ont créé de multiples métiers qui nécessitent aussi

d’être rémunérés.

45

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016 46

Jean-Philippe PISANIAS, Revue 01NET, « Le web déclare la guerre aux bloqueurs de pubs »

Page 39: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

38

Figure 6 - Screenshot : Message de sensibilisation contre les bloqueurs de publicité - site L’express Styles

Ce type de message de sensibilisation leur explique combien il est important de retirer

les bloqueurs de publicité. Joëlle CLERY47 approuve tout à fait ces rappels quant à la

gratuité de l’information :

« C’est bien de faire ce rappel pour les gens qui n’ont pas à l’esprit cette réalité.

Ils ne savent pas que cet accès à l’information n’est pas totalement gratuit, c’est

notre participation à la gratuité que d’accepter de voir les publicités. Il faut en

informer le jeune public qui n’est peut-être pas au courant de cela. »

La majorité des internautes qui surfent sur le net, n’imagine pas derrière leur écran, le

nombre de professionnels qui œuvrent pour qu’ils puissent avoir accès à une page

d’internet. C’est pourquoi, il semble important de les instruire sur ces nouveaux métiers

qui participent à tout le réseau internet, afin qu’ils aient un point de vue différent sur la

gratuité de ce service.

2.3.2 - Les demandes de dons

Certaines régies, qui tentent de ne pas utiliser trop de publicités, sollicitent l’aide des

utilisateurs avec des dons pour les aider à continuer de pouvoir leur fournir un contenu.

Pour ce faire, il existe des plateformes de dons où les internautes peuvent donner

quelques euros ou faire un don plus important. Ces messages sont affichés soit en pop-

up à l’arrivée de l’internaute ou en haut du site. Ils rappellent les bienfaits d’un site

dépourvu de publicité mais rappelle ce qu’il leur est nécessaire en contrepartie.

47

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016

Page 40: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

39

Le problème avec les dons est qu’aujourd’hui, les français ont des difficultés

financières ; leur pouvoir d’achat a beaucoup baissé. De ce fait, ils ont moins de moyens

pour faire des dons. Par ailleurs, la majorité des répondants préfère donner à des

associations d’aide sociale ou pour la recherche médicale.

Il est intéressant de noter ce que Catherine VOYER48 nous a révélé à savoir qu’elle est

prête à « ne pas mettre Adblock pour qu’ils puissent être rémunérés avec la publicité

plutôt que de donner. » Certains internautes préfèrent donc que ce soit la publicité qui

paye le contenu du site plutôt que de devoir « financer la gratuité » par le biais de dons

qu’ils consacrent habituellement à d’autres causes.

2.3.3 - Le blocage des utilisateurs en cas de nécessité

Quelques régies ont opté pour une sensibilisation plus agressive : elles bloquent l’accès

aux internautes qui utilisent des bloqueurs de publicité. La régie détecte si le navigateur

de l’internaute a l’extension Adblock installé et les bloque. Un message s’affiche en pop-

up dès leur arrivée sur le site. Celui-ci leur rappelle la nécessité de la publicité en ligne

et que c’est grâce aux revenus qui en découlent que le contenu du site peut être mis à

jour.

Les internautes ne peuvent donc plus lire les articles qu’ils voudraient consulter sauf s’ils

désactivent le bloqueur de publicité. Nos répondants ont un avis mitigé sur l’opportunité

d’employer une telle méthode qui est jugée plutôt agressive. Mais globalement cette

petite guerre est tout à fait légitime car il faut bien que quelqu’un paie pour le contenu

produit. Joëlle CLERY49 nous expliquait cette pensée avec l’image du kiosque à

journaux :

« Il y a ceux qui attendent pour lire leurs journaux d’avoir payé en caisse et il

faudrait qu’ils acceptent que d’autres viennent et lisent sans payer ? ».

Ce n’est pas le cas de tous les sites d’information, il existe d’autres façons de bloquer

l’accès au contenu : les articles ne sont pas totalement bloqués mais seulement floutés.

Dans ce cas, un autre message apparaît expliquant aussi aux internautes combien il est

48

Catherine VOYER, Médecin psychiatrique, interviewée le 17.04.2016 49

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016

Page 41: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

40

important de débloquer Adblock pour pouvoir avoir accès à la totalité du contenu qu’ils

souhaitent lire.

Figure 7 - Screenshot : Site flouté avec message pour inciter à désactiver le bloqueur de publicité - site lefigaro.fr

Autre solution : répondre à un questionnaire qui débloquera l’accès au contenu. Toutes

ces techniques empêchent de lire le contenu dès l’arrivée sur le site et incitent à la

désactivation du bloqueur de publicités.

La majorité des internautes a installé un bloqueur de publicité puisqu’ils jugent la

publicité trop présente sur les sites web. De plus, la surabondance de publicité ralentit le

chargement des pages internet ce qui agace la plupart des internautes. Les régies ne

pouvant pas accepter cette situation ont décidé de réagir en les informant sur la

nécessité des publicités. Certains ont pris l’initiative de bloquer les internautes dès leur

arrivée sur les sites les contraignant à désactiver Adblock pour pouvoir avoir accès au

contenu.

Mais malgré les multiples demandes des régies pour que les internautes désactivent

Adblock, ces derniers ne changent pas leurs habitudes. Les régies ont donc dû trouver

un autre moyen pour gagner de l’argent.

Page 42: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

41

3 - Les sites web d’information offrent à leurs internautes la

possibilité de payer un espace privilégié avec peu voire sans

publicité.

Un internet sans publicité et sans dons serait-il envisageable ? Certains sites web

proposent un abonnement permettant d’avoir un accès privé afin de lire un contenu

premium. Est-ce que cette solution correspond aux attentes des internautes et supprime

les publicités ? Est-ce que les internautes y ont recours ?

3.1 - Le revenu des régies

Certaines régies ont besoin de la publicité ou d’un autre moyen de financement car elles

n’ont pas d’autres sources de revenus. Sans cela, cela signifierait que les personnes en

charge de la mise à jour du contenu ne seraient pas payées et seraient plutôt

considérés comme des bénévoles. Accepteraient-ils cette situation ? L’abonnement

pour les internautes ne serait-il pas une solution plus intéressante ?

3.1.1 - Le besoin de financement

Aujourd’hui, il existe de multiples sites web d’information, des plus connus au moins

connus. En ce qui concerne les plus connus, comme Le Parisien, Le Monde, etc… ils

possèdent une activité rémunératrice importante, par exemple la vente de leur presse

papier, qui permet de supporter financièrement leur site web. De ce fait, la publicité sur

ces sites est présente pour améliorer cette rentabilité. Sans celle-ci, il est fort probable

que ces sites puissent quand même perdurer.

Par contre, pour ce qui concerne les sites web qui ont, soit abandonné la presse écrite

pour ne paraître que sur le web, soit qui n’existent que sur le web, ils ont besoin d’une

source de revenus pour subsister, résister face à la concurrence ou se développer. Par

le biais de la publicité en ligne, ces sites peuvent continuer d’alimenter leur contenu.

Mais, avec l’émergence des bloqueurs de publicité, il leur devient plus difficile de gagner

de l’argent. Les régies ont donc dû trouver une astuce pour obtenir autrement de

l’argent. Comme nous l’avons exposé précédemment, il existe aussi la possibilité des

dons, mais cette source de revenus ne peut pas être prise en compte. Cela est dû à son

instabilité puisque les internautes ne donneront pas forcément et pas toujours la même

Page 43: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

42

somme, l’entreprise ne peut pas complètement compter sur ces rentrées d’argent

aléatoires.

3.1.2 - Les cyberjournalistes ne sont pas bénévoles

Le contenu du site est rédigé par des cyberjournalistes formés spécifiquement à

l’écriture pour le web. Ces nouveaux métiers sont rémunérés en grande partie grâce,

aux revenus de la publicité en ligne. S’il n’y a pas de publicité, il est compliqué d’assurer

la mise à jour du contenu sans payer les cyberjournalistes. Ces personnes

n’accepteraient pas de ne pas être payées en échange d’un travail et ne sont pas

bénévoles tels que peuvent l’être certains rédacteurs de contenu qui donnent des

informations gratuitement, comme par exemple sur le site Wikipédia. Certains sites n’ont

qu’un seul webmaster50 qui se charge de faire la mise à jour du contenu. Il peut en avoir

la charge seul si le site offre peu de contenu à lire. Cependant les sites assez actifs et

proposants un grand nombre d’articles nécessitent de multiples cyberjournalistes en

charge de la rédaction, ce qui représente une charge financière pour le site.

Chaque cyberjournaliste se spécialise dans un domaine qui peut être vaste tel que

l’économie, la politique ou bien plus précis et défini comme l’univers Marvel. Un site

d’information comporte de multiples rubriques qu’il faut alimenter régulièrement grâce au

travail d’une équipe de cyber journalistes. Certains de ces cyberjournalistes ont des

compétences en référencement afin d’améliorer la position du site web dans un moteur

de recherche tel que Google. Ces profils de professionnels sont beaucoup plus

recherchés et donc mieux rémunérés. De ce fait, les régies dépensent énormément

d’argent pour faire fonctionner leur site d’information.

Pour les sites présentant du contenu uniquement en ligne, il est donc quasiment

impossible de ne pas compter sur la publicité comme source de revenus. Cependant, il

existe une autre possibilité de rémunération avec l’espace premium disponible sur

abonnement.

50

Personne s’assurant du maintien et suivi du site web

Page 44: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

43

3.1.3 - La proposition d’abonnement avec espace premium

« Le modèle d’affaires financé à 100% par la publicité en ligne ne s’avère pas viable

économiquement »51, cela est dû à la « masse critique d’audience » que représentent

les internautes mécontents de la surabondance de publicité. Les régies sont obligées de

trouver un autre moyen de financement. Le modèle freemium est donc de plus en plus

adopté par les médias traditionnels en ligne et les sites spécialisés : un modèle mixte

caractérisé par une gamme d’information de base gratuite avec de la publicité et, une

partie premium avec des informations plus complètes.

Les régies ont trouvé une alternative aux dons et à la publicité qui est l’abonnement : la

partie premium de leur offre freemium. Comment cela fonctionne-t-il et qu’est-ce que

cela propose ? Ces abonnements permettent de fournir un contenu premium aux

internautes abonnés. Il existe différents types d’abonnement. Pour notre présente

analyse, nous avons étudié les abonnements des trois sites préférentiels de notre

sondage : Le Parisien, Le Monde et Le Figaro. Nous nous positionnons en tant que

particulier ; de ce fait, nous ne prendrons pas en compte les offres professionnelles.

● Le Parisien

Il existe deux types d’abonnements : une formule 100% numérique - c’est-à-dire avoir

accès au contenu sur ordinateur, mobiles et tablettes - que l’on peut payer soit chaque

mois, soit tous les 6 mois ou tous les ans et une formule intégrale - c’est-à-dire sur

papier, ordinateurs, mobiles et tablettes.

51

Amandine DEGAND et Benoît GREVISSE, 2015, « Journalisme en ligne »

Page 45: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

44

Figure 8 - Screenshot : Abonnement proposé par Le Parisien

L’inscription à l’offre 100% numérique coûte 7,50€ par mois. Les avantages de cet

abonnement sont multiples : le journal en ligne est accessible sur tous les écrans que

l’abonné possède ; avec plus de 400 articles chaque jour et jusqu’à 60 jours d’archives ;

pour tous les magazines et suppléments ; l’internaute profite d’une lecture zen en une

page plein écran pour tous les contenus. Et depuis peu, être abonné revient à avoir un

accès sans aucune publicité.

L’inscription à l’offre intégrale coûte 41,30€ par mois. En plus d’avoir accès au tout

numérique, aux applications, et au magazine, l’abonné recevra le journal chez lui du

lundi au dimanche.

Ici, l’abonnement permet de supprimer totalement la publicité pour être dans une zone

de confort total.

● Le Monde

Il existe deux types d’abonnements : une formule 100% numérique et une formule

intégrale. Il y a aussi d’autres types de formules pour compléter l’offre du journal Le

Monde telles que la formule week-end, formules spéciales étudiants, etc.

L’abonnement numérique est proposé à 1€ le premier mois puis 17,90€ par mois (ou

179,90 € par an).

Page 46: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

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L’offre intégrale est une offre découverte proposée avec les 3 premiers mois à 19€ par

mois au lieu de 70,20€ par mois.

Figure 9 - Screenshot : Abonnement proposé par Le Monde

Grâce à ces formules l’internaute reçoit son journal en avant-première à 13h, il peut

également accéder au journal n’importe quand grâce aux différents supports proposés,

mais aussi aux actualités sélectionnées grâce aux différentes applications. De plus, Les

journaux et suppléments sont consultables pendant 30 jours consécutifs. Parmi les

avantages mis en avant, nous retrouvons la publicité limitée, notamment grâce à la

« lecture zen » qui permet de bénéficier de son article en plein écran sans habillage,

avec les publicités masquées.

Ici, l’abonnement permet de supprimer la majeure partie de la publicité pour être dans

une zone de confort quasi totale. Il est possible malgré tout de rencontrer quelques

publicités.

● Le Figaro

Pour le site Le Figaro, il n’existe qu’un seul choix d’abonnement : “Figaro Premium” à

9,90€ par mois avec le premier mois offert. Il s’agit d’un abonnement 100% numérique

qui donne un accès illimité au Figaro.

Page 47: Mémoire - Sans e-publicité, plus de diffusion de l'information gratuite ?

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Figure 10 - Screenshot : Abonnement proposé par Le Figaro

L’internaute a accès au journal numérique à partir de 22 heures, sur tous les écrans

(PC, tablette et mobile). Concernant la publicité, Le Figaro précise que les vidéos sont

sans publicité. Ce qui laisse donc supposer que sur l’édition numérique premium, les

publicités sont toujours présentes hormis dans les vidéos.

Pour cet abonnement, les abonnés seront donc toujours exposés à la publicité

(habillages, bannières, etc.) sauf pendant la lecture de vidéos.

Cet abonnement offert par Le Figaro est moins cher mais les internautes sont toujours

exposés à la publicité. Ainsi, nous pouvons déduire de l’étude de ces offres que, plus

l’internaute paiera cher, moins il sera exposé à la publicité.

3.2 - La perception des espaces premium par les internautes

Les abonnements proposés sont assez intéressants et très différents. Mais est-ce que

ces différentes formules d’abonnement conviennent aux internautes ? Seraient-ils prêts

à s’abonner ?

3.2.1 - La rentabilité incertaine

Les internautes ne se sentent pas assez assidus pour prendre un abonnement : certains

jugent le prix des abonnements trop onéreux par rapport aux nombres d’articles

auxquels ils auraient accès, d’autres par rapport à la quantité d’articles qui les intéresse

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ou tout simplement par rapport au temps qu’ils consacrent à s’informer. Pour d’autres,

tels les étudiants universitaires ils sont conscients que l’accès au contenu de certains

sites leur est offert par leur université afin qu’ils puissent faire leurs recherches. Donc

pour l’instant, ceux-ci ne jugent pas utile de faire cette dépense et ne souscriront pas à

un abonnement.

Il y a aussi ceux qui pensent que les informations sont intéressantes en temps réel et

non en tant qu’archives. Par exemple, Etienne VAILLANT52 nous expliquait que, dans

son travail scientifique les informations récentes sont très importantes :

« Une information sortie hier a bien plus de valeur qu’une information datant d’il y

a trois mois. Par exemple, je suis sûr que dans les archives, je pourrai trouver

que Pluton est une planète alors qu’aujourd’hui, elle n’est plus considérée comme

telle. Le principe des archives n'intéresse que peu de lecteurs »

Quelles que soient les raisons invoquées, le principe de l’abonnement en général ne

séduit pas encore totalement l’internaute notamment parce que, ce qu’il cherche bien

souvent est la gratuité des services.

3.2.2 - La culture du gratuit

Internet est considéré comme gratuit parce que les sites d’information se rémunèrent

grâce aux publicités et autres moyens dont ils disposent. Les internautes, payant déjà

leur accès à Internet, ont donc du mal à devoir payer encore autre chose : les sites et

leur contenu doivent être gratuits. En effet, d’après l’auteur Pierre GROSJEAN53, les

internautes vont devoir s’habituer à la culture du payant : « Après des années de

gratuité quasi-totale de l’information, les internautes vont devoir s’habituer à passer à la

caisse ». Mais il ne s’agit pas que des internautes, les publicitaires aussi sont concernés

par cette culture du gratuit car, d’après le même auteur :

« Les professionnels de la publicité ne se sont pas encore adaptés aux nouveaux

médias, observe Michelle Bergadaa, chercheur en marketing à l’Université de

Genève. Ils vont devoir trouver des moyens plus efficaces pour toucher les

52

Etienne VAILLANT, Ingénieur en électronique, interviewé le 17.04.2016 53

Pierre GROSJEAN, 2001, Largeur.com, article, “Internet, la fin de la gratuité“

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internautes. Dans l’intervalle, de nombreux sites financés jusqu’ici par la seule

publicité vont devenir payants, du moins partiellement ».

De plus, deux autres auteurs viennent confirmer que la culture du gratuit est de moins

en moins présente au grand désespoir des internautes. Il s’agit de Serge PROULX et

Anne ROSENBERG qui expliquent dans leur livre Internet et la gratuité que :

« Le modèle d’affaires des industries culturelles semble menacé par les

possibilités du numérique orienté vers un accès libre, illimité - et souvent gratuit -

à l’information et aux produits culturels, en particulier la presse quotidienne et les

revues scientifiques »54.

Et pour certains étudiants qui ont conscience que le contenu d’Internet n’est pas gratuit,

ils le considèrent comme tel car ils ont accès à des contenus payés par leur université.

En effet, Marion VANDEWALLE55 nous précisait qu’elle a accès aux informations

gratuitement :

« Les sites que je consulte dans le cadre de mes travaux de recherche sont

gratuits et quand ils sont payants notre université de rattachement souscrit un

abonnement général pour que tous ses étudiants y aient accès. J’aurais donc du

mal à payer de ma poche. »

Cette gratuité engage donc d’avoir un minimum de publicité ou alors d’avoir recours à

un « modèle Low cost d’informations gratuites »56.

3.2.3 - La peur du retour au matraquage publicitaire

A ce jour, dans le cas où l’internaute choisirait de prendre un abonnement, il n’aura pas

ou très peu de publicité comme le propose notamment le site Le Parisien avec un

espace sans publicité.

Cependant, les internautes sont inquiets du retour au matraquage publicitaire : si les

régies souhaitent gagner plus d’argent, elles peuvent ajouter de plus en plus de publicité

54

Serge PROULX et Anne ROSENBERG, 2010, Livre, Internet et la culture de la gratuité 55

Marion VANDERWALLE, Etudiante doctorante en histoire, interviewée le 17.04.2016 56

Amandine DEGAND et Benoît GREVISSE, 2015, « Journalisme en ligne »

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et ce, même dans les espaces premium. Par exemple, Joëlle CLERY57 a été abonnée à

un magazine papier, et craint qu’il n’arrive l’escalade vers de plus en plus de publicité et

de moins en moins de contenu avec les sites d’information. Elle nous confie son

expérience :

« Au début, mon magazine était fourni en articles et photos. Petit à petit, bien que

le prix ait toujours un peu augmenté, certaines pages ont été remplacées

entièrement pas des publicités. Puis il y a eu de plus en plus de publicité et de

moins en moins de contenu intéressant. Donc cela veut dire que l’éditeur du

magazine faisait de plus en plus d’argent sur un magazine de moins bonne

qualité et qui ne me satisfaisait plus par son contenu ! »

Ces craintes sont fondées puisque parmi les trois exemples de sites d’information, seul

le Parisien propose réellement un espace sans publicité, même si cet “espace” n’est pas

l’équivalent du site dans son intégralité. En effet, en comparaison, le site Le Monde

propose des publicités limitées tandis que le journal Le Figaro propose seulement les

vidéos sans publicité. Malgré l’absence ou la limitation de publicités sur les espaces

premium et autres abonnements privilégiés, la crainte du retour au matraquage

publicitaire ressentie par les internautes semble justifiée.

Ainsi, même avec un abonnement, les internautes ne seront que très rarement en

présence d’aucune publicité. Bien entendu, la promesse des sites d’information est tout

de même tenue puisqu’il y a moins de publicité pour chacun des abonnements

proposés. Mais nous pouvons nuancer ce fait en comparaison avec l’alternative des

bloqueurs de publicité qui permettent aux internautes d’avoir beaucoup moins de

publicités. En outre, les sites web d’information proposent effectivement moins de

publicité via une compensation financière, mais les bloqueurs de publicité, eux

proposent un meilleur service gratuitement. C’est pourquoi, nous pouvons considérer

que les internautes se tourneront vraisemblablement davantage vers les contenus

gratuits ou même les bloqueurs de publicité plutôt que vers les abonnements

notamment pour l’avantage représenté par la gratuité. Comme nous le prouvent

plusieurs témoignages effectués lors de l’entretien qualitatif, avec notamment Mathieu

57

Joëlle CLERY, Sous-officier de carrière en retraite, interviewée le 17.04.2016

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LEGRAND58 qui précise que « Je ne pourrais pas m’abonner à un site seulement pour

supprimer la publicité » et Aude-Emmanuelle ALBRIEUX59 qui explique que de nos

jours, « la richesse des sites et des contenus proposés gratuitement ne m’incite pas du

tout à m’abonner ».

L’hypothèse selon laquelle les sites web d’information offrent à leurs internautes la

possibilité de payer un espace privilégié avec peu voire pas de publicité est validée,

mais aussi nuancée. Il existe en effet une possibilité de s’abonner mais celle-ci est très

peu voire pas du tout adoptée par les internautes.

58

Mathieu LEGRAND, Etudiant en médecine, interviewé le 17.04.2016 59

Aude-Emmanuelle ALBRIEUX, Ingénieure méthode de production, interviewée le 17.04.2016

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CONCLUSION

De tout temps l’homme a voulu s’informer sur ce qui l’entoure et cet accès à

l’information a évolué au rythme des nouvelles technologies. Les frontières de la

connaissance se sont élargies au fur à mesure des moyens mis à la disposition de

l’homme et aujourd’hui, il lui est facile de savoir ce qui s’est passé hier dans un pays

lointain, à l’autre bout du monde. Grâce à cet outil, devenu accessible par quasiment

toute la population, s’informer instantanément, quotidiennement est devenu plus qu’un

droit : une nécessité pour l’individu.

Pour ce faire, de nombreux sites d’information ont émergé sur la toile. Qu’ils soient une

évolution de la presse écrite ou qu’ils aient vu le jour sur la toile, ces sites ont besoin

d’argent pour vivre et grandir. Une grande partie des revenus de ces sites provient de la

publicité qu’ils acceptent de publier sur leur page.

Afin d’accéder à ces pages et d’en lire le contenu, les internautes payent un accès à

internet sous forme d’abonnement. En contrepartie de cette « lecture gratuite » des

informations, sur chaque page s’affichent des publicités sous des formats plus au moins

importants allant de la simple image à la vidéo. Or ces publicités sont de plus en plus

nombreuses et de plus en plus gênantes pour l’internaute, notamment certaines vidéo

qu’il faut visionner jusqu’au bout avant d’atteindre le contenu de la page. Cet

accroissement des spots de publicité en ligne a provoqué chez l’internaute des réactions

qui mettent en péril la gratuité de l’information sur internet.

Dans ce présent mémoire, nous avons cherché à savoir en quoi l’hyperpublicitarisation

sur Internet tend à nuire à l’accès à l’information gratuite.

Nous avons vu que les internautes étaient en grande partie mécontents de la publicité

en ligne. Néanmoins, les avis sont mitigés et leur mécontentement ne porte pas sur

toutes les formes d’annonce publicitaire.

En effet, les internautes jugent que les publicités considérées intempestives sont

gênantes c’est pourquoi certains utilisent Adblock, tentent de fermer la publicité, ou dans

quelques cas quittent le site. Face à ce comportement légitime des internautes, les sites

d’information tentent des actions plus ou moins agressives : soit ils programment des

messages pop-up pour expliquer aux internautes que le contenu fourni n’est pas gratuit

et que c’est la publicité qui le paie. De ce fait, ils leur proposent le choix entre retirer

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Adblock ou faire un don grâce à une plateforme spéciale. Soit ils bloquent ceux qui

utilisent Adblock en leur affichant un message d’information avec invitation à supprimer

le bloqueur sous peine de refus d’accès au contenu du site, ou encore, ils floutent le

contenu de l’article. Ces méthodes ne sont pas bien perçues par les internautes même

s’ils en comprennent les motivations de la part de la régie.

Cependant, l’alternative que représente l’abonnement ne convient pas non plus aux

internautes. En effet, la plupart d’entre eux préfère retirer Adblock et continuer à subir la

publicité et ne rien payer. Comme ils se sont acquittés de leur abonnement internet, ils

considèrent que le contenu des sites doit être gratuit. D’autres choisissent de s’abonner

à la presse papier.

Le recours à l’extension Adblock n’est donc qu’une façon d’exprimer leur

mécontentement vis-à-vis de la surexposition à la publicité. Beaucoup d’internautes

supportent la publicité sur les sites d’information sauf si celle-ci est intrusive comme les

interstitiels, les in-read ou les publicités intempestives, non légales.

Bien que l’IAB ait élaboré un nouveau standard de publicités « LEAN » afin de satisfaire

tous les protagonistes de l’information en ligne, le navigateur Chrome est actuellement

en train de procéder à l’intégration d’un bloqueur de publicité. Celui-ci effectuerait une

sorte de filtrage entre de bonnes publicités répondant à des critères bien précis et des

publicités intempestives. Cette initiative permettrait le maintien du financement des sites

d’information tout en respectant la tranquillité d’accès à l’information des internautes.

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53

BIBLIOGRAPHIE

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Visité le 19.05.2016 à 22h00