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Constats et propositions du MEDEF Apprentissage La connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information. Albert Einstein MEDEF juillet 2014

Apprentissage : propositions du medef juillet 2014

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Avec une baisse de 8 %, c’est-à-dire - 24.000 jeunes, l’apprentissage a connu en 2013 un recul historique. Si la crise a évidemment joué un rôle négatif, ce décrochage s’explique avant tout par les six erreurs accumulées du Gouvernement en la matière. Mais au-delà de la conjoncture, cette situation dramatique pour les jeunes et les entreprises doit être l’occasion de lancer, enfin, une réflexion en profondeur et une action en vue de refondre l’apprentissage durablement pour en faire à tous niveaux et pour chaque jeune une voie pédagogique d’excellence, une voie pédagogique recherchée. Depuis le début des années 2000 en effet, les gouvernements n’ont eu de cesse de vanter ses mérites. Pourtant, mis à part dans les niveaux supérieurs, l’apprentissage a stagné depuis 15 ans, et même reculé depuis l’année dernière. Force est de constater qu’au-delà de la conjoncture économique et des politiques conduites, des facteurs structurels de blocage sont à l’oeuvre. La volonté du MEDEF, c’est d’identifier ces blocages et de soumettre au débat des propositions pour les surmonter. Les entreprises, notamment dans le cadre du pacte de responsabilité, sont prêtes à s’investir davantage dans la formation des jeunes en apprentissage. C’est leur nécessaire contribution à l’intérêt général, c’est leur intérêt économique impératif. Encore faut-il leur en donner les moyens, c’est-à-dire la liberté, de le faire. Tel est l’objet du présent document : formuler des propositions esquissant un nouveau modèle d’apprentissage fondé sur les besoins des jeunes et des entreprises, pour donner à plus de jeunes la chance de réussir par l’apprentissage, pour donner à plus d’entreprises l’opportunité d’utiliser ce levier formidable de compétitivité. Le MEDEF veut également, à travers sa réflexion, contribuer positivement au pacte de responsabilité proposé par le Gouvernement : si les premières discussions ou négociations de branche relatives au pacte de responsabilité mettent toutes en lumière une tendance à la baisse de l’alternance et de l’apprentissage en particulier, cette tendance n’a rien de fatal. Nous en avons la forte conviction et volonté. Il est possible de la corriger rapidement, par une réforme structurelle d’une part et des mesures d’urgence d’autre part. Si ces conditions sont remplies, alors les branches seront en situation de s’engager, positivement, dans le cadre du pacte de responsabilité, des objectifs chiffrés en matière d’apprentissage. L’apprentissage est un atout et une force pour notre jeunesse et nos entreprises.

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Constats et propositions du MEDEF

Apprentissage

La connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information.Albert Einstein

MEDEF juillet 2014

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Avec une baisse de -8 %, c’est-à-dire -24 000 jeunes, l’apprentissage a connu en 2013 un recul historique.

Si la crise a évidemment joué un rôle négatif, ce décrochage s’explique avant tout par les six erreurs accumulées du Gouvernement en la matière.

Mais au-delà de la conjoncture, cette situation dramatique pour les jeunes et les entreprises doit être l’occasion de lancer, enfin, une réflexion en profondeur et une action en vue de refondre l’apprentissage durablement pour en faire à tous niveaux et pour chaque jeune une voie pédagogique d’excellence, une voie pédagogique recherchée.

Depuis le début des années 2000 en effet, les gouvernements n’ont eu de cesse de vanter ses mérites. Pourtant, mis à part dans les niveaux supérieurs, l’apprentissage a stagné depuis 15 ans, et même reculé depuis l’année dernière. Force est de constater qu’au-delà de la conjoncture économique et des politiques conduites, des facteurs structurels de blocage sont à l’œuvre.

La volonté du MEDEF, c’est d’identifier ces blocages et de soumettre au débat des propositions pour les surmonter.

Les entreprises, notamment dans le cadre du pacte de responsabilité, sont prêtes à s’investir davantage dans la formation des jeunes en apprentissage. C’est leur nécessaire contribution à l’intérêt général, c’est leur intérêt économique impératif.

Encore faut-il leur en donner les moyens, c’est-à-dire la liberté, de le faire.

Tel est l’objet du présent document : formuler des propositions esquissant un nouveau modèle d’apprentissage fondé sur les besoins des jeunes et des entreprises, pour donner à plus de jeunes la chance de réussir par l’apprentissage, pour donner à plus d’entreprises l’opportunité d’utiliser ce levier formidable de compétitivité.

Le MEDEF veut également, à travers sa réflexion, contribuer positivement au pacte de responsabilité proposé par le Gouvernement : si les premières discussions ou négociations de branche relatives au pacte de responsabilité mettent toutes en lumière une tendance à la baisse de l’alternance et de l’ap-prentissage en particulier, cette tendance n’a rien de fatal. Nous en avons la forte conviction et volonté.

Il est possible de la corriger rapidement, par une réforme structurelle d’une part et des mesures d’urgence d’autre part.

Si ces conditions sont remplies, alors les branches seront en situation de s’engager, positivement, dans le cadre du pacte de responsabilité, des objectifs chiffrés en matière d’apprentissage.

L’apprentissage est un atout et une force pour notre jeunesse et nos entreprises.

Florence Poivey

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SommaireSynthèse des propositions 7

1. Refonder l’apprentissage sur un système de co-pilotage entre les entreprises et les pouvoirs publics 7

2. Répondre à l’urgence 7

L’apprentissage s’effondre 9

Les six erreurs du gouvernement 101. Suppression de l’aide à l’embauche d’un alternant supplémentaire 10

2. Suppression de l’accès au dima à partir de 14 ans 10

3. Restriction de l’accès à l’apprentissage par le décret « machines dangereuses » 11

4. Réduction du crédit d’impôt apprentissage à la première année de formation 11

5. Réduction de l’aide forfaitaire à l’embauche d’apprentis (indemnité compensatrice forfaitaire, ICF) 12

6. Prélevement sur la taxe d’apprentissage et interdiction de l’utiliser pour investir dans les CFA 12

Nos propositions : une réforme structurelle pour refonder l’apprentissage 14

1. L’héritage de l’histoire : le rapport problématique de l’école avec la formation en entreprise 14

2. Quatre chantiers pour refonder l’apprentissage 16♦♦1.♦L’orientation♦ 16♦♦2.♦La♦construction♦des♦diplômes♦ 17♦♦3.♦La♦carte♦des♦formations♦ 19♦♦4.♦Liberer♦le♦financement♦de♦l’apprentissage♦ 20

Trois mesures d’urgence 23

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Synthèse des propositions

Refonder l’apprentissage sur un système de co-pilotage entre les entreprises et les pouvoirs publics

Proposition 1Rendre obligatoire l’information sur les débouchés des cursus proposés à tous les niveaux de qualification

Proposition 2Expérimenter la co-construction des diplômes entre les branches professionnelles volontaires et le ministère

Proposition 3Mettre en place une procédure de co-décision entre les régions et les partenaires sociaux sur la carte des formations

Proposition 4Libérer l’utilisation de la taxe d’apprentissage par les entreprises

Répondre à l’urgence

Proposition 5Mettre en place un « zéro charges » alternance

Proposition 6Expérimenter un contrat de professionnalisation « sur-mesure »

Proposition 7Développer les prépa-alternance

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1.

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L’apprentissage s’effondre

Le Gouvernement a beau utiliser toutes les astuces de présentation qu’il peut pour dissimuler l’effondrement de l’apprentissage, les faits sont têtus : 273 094 jeunes sont entrés en apprentissage en 2013, contre 297 295 en 2012.

C’est une chute de 24 201 jeunes, soit -8 %, c’est à dire la plus forte baisse jamais enregistrée par la Dares. En valeur absolue, il faut remonter à 2005, soit huit ans en arrière, pour trouver un niveau plus faible (263 638).

En 2014, la tendance se poursuit, avec -14 % enregistré sur les 4 premiers mois de l’année.

Au vu de ces chiffres inconnus jusqu’alors, il n’est pas excessif de parler d’ « effondrement » de l’apprentissage, avec tout ce que le mot recouvre, sans pouvoir l’exprimer, en termes de dégâts humains pour les jeunes d’abord, pour les CFA ensuite, et pour la compétitivité des entreprises enfin.

Contrairement ce que d’aucuns prétendent, la crise n’est qu’en partie responsable de ce décrochage.

Pour s’en convaincre, il suffit de comparer les entrées en apprentissage et les créations d’emploi en 2013 avec d’autres années où la croissance n’a pas été au rendez-vous. En 2009 par exemple, alors que l’économie française avait détruit 262 000 emplois, les entrées en apprentissage n’avaient baissé « que » de 3 %, à 287 902 jeunes. En 2013, l’économie a détruit 65 000 emplois pour une chute deux fois plus importante (273 094) du nombre d’apprentis. Si la crise était la seule responsable de l’ef-fondrement de 2013, comment se fait-il qu’elle ait en 2009, détruit deux fois moins d’emplois en apprentissage alors qu’elle en détruisait quatre fois plus dans l’ensemble de l’économie ? C’est bien, incontestablement, que d’autres facteurs ont joué.

Ces facteurs, ce sont les six erreurs commises depuis deux ans en matière d’apprentissage par le Gouvernement.

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2.

1.

Les six erreurs du gouvernementLe Gouvernement proclame depuis deux ans sa volonté de développer l’apprentissage. En réalité, il a accumulé les décisions qui l’affaiblissent et qui expliquent, au-delà de la crise, l’effondrement auquel nous assistons.

Ces arbitrages en défaveur de l’apprentissage sont au nombre de six :

• suppression de l’aide à l’embauche d’un alternant supplémentaire (juillet 2012) ;

• suppression de l’aide financière aux employeurs d’apprentis (ICF) pour les entreprises de plus de 10 salariés (annoncée en juin 2013) ;

• réduction du crédit d’impôt apprentissage aux entreprises (annoncée en juin 2013) ;

• suppression de passerelles entre le collège et les CFA (août 2013, annoncée dès novembre 2012) ;

• restriction de l’accès des jeunes apprentis à certaines machines et installations dites « dangereuses » (octobre 2013) ;

• prélèvement de 380 millions d’euros sur la taxe d’apprentissage librement gérée par les entreprises pour les affecter aux conseils régionaux (loi du 5 mars 2014).

Suppression de l’aide à l’embauche d’un alternant supplémentaireLes entreprises de moins de 250 salariés bénéficiaient d’une compensation des charges patronales, pendant un an, pour l’embauche supplémentaire d’un jeune de moins de 26 ans en alternance (en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation).

Le montant de l’aide variait selon le niveau de rémunération des contrats, mais correspondait à une compensation quasi-totale des cotisations patronales restant dues par l’employeur pour une durée de douze mois :

• pour un contrat apprentissage : minimum 300€, maximum 950€ sur 12 mois ;

• pour un contrat de professionnalisation : minimum 1000€, maximum 1800€ sur 12 mois ;

• aide supplémentaire de 2000 € pour l’embauche d’un demandeur d’emploi de 45 ans et plus.

Cette aide, prévue à l’origine par le décret n°2011-523 du 16 mai 2011 pour s’appliquer aux contrats de travail conclus entre le 1er mars 2011 et le 31 décembre 2011, avait été prorogée pour les contrats dont la date de début d’exécution était comprise entre le 1er janvier et le 30 juin 2012.

Cette aide a été supprimée par le Gouvernement le 1er juillet 2012.

Suppression de l’accès au dima à partir de 14 ansLe dispositif d’initiation aux métiers en alternance permettait à des élèves, demeurant sous statut scolaire, d’alterner dès 14 ans des enseignements académiques avec la découverte d’un ou plusieurs métiers via des stages en entreprise et de préparer une évolution vers l’apprentissage tout en renforçant leurs savoirs fondamentaux.

Le ministre de l’éducation nationale a annoncé d’interdire ce dispositif aux jeunes de 14 ans dès l’été 2012. La suppression a été rendue effective par le décret du 13 août 2013.

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Restriction de l’accès à l’apprentissage par le décret « machines dangereuses »Les décrets n° 2013-914 et 2013-915 du 11 octobre 2013 ont réformé la réglementation relative à la protection des jeunes travailleurs. Une circulaire interministérielle du 23 octobre 2013 explicite la nouvelle procédure de dérogation aux travaux réglementés.

Désormais, l’autorisation de déroger ne porte plus sur les individus, mais sur le lieu de formation (établissement ou entreprise) des jeunes âgés d’au moins quinze ans et de moins de dix-huit ans, et qui préparent un diplôme technologique ou professionnel.

L’inspecteur du travail accorde cette autorisation pour trois ans au chef d’établissement ou à l’employeur pour les périodes de formation en milieu professionnel, selon les éléments obtenus : formations concernées, travaux pour lesquels la dérogation est demandée, équipements de travail…

Le chef d’établissement ou l’employeur adresse à l’inspecteur du travail la liste nominative des élèves concernés, accompagnée des avis médicaux délivrés pour chacun des élèves et la liste des personnes chargées de l’encadrement des élèves pour ces travaux. Ces informations sont à renouveler chaque année.

Ces nouvelles contraintes ont découragé de nombreuses entreprises, notamment dans les Travaux Publics, de continuer à s’investir dans l’apprentissage. Pour ne pas prendre de risque en accueillant des jeunes de moins de 18 ans, certaines entreprises, dont des grands groupes employant plusieurs centaines d’apprentis, ont décidé de stopper le recrutement d’apprentis mineurs.

Réduction du crédit d’impôt apprentissage à la première année de formationLa loi de finances pour 2014 a refondu le dispositif du crédit d’impôt apprentissage.

Le bénéfice de ce crédit d’impôt de 1 600€ est dorénavant limité à la seule 1ère année de formation et réservé aux entreprises employant des jeunes préparant un diplôme d’un niveau inférieur ou égal à Bac+2. Il est calculé en fonction du nombre moyen annuel d’apprentis n’ayant pas achevé la 1ère année de cycle de formation dans l’entreprise et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus à un BTS ou un DUT, enregistré au RNCP.

Ces modifications prennent effet à compter du 1er janvier 2014 (crédit d’impôt apprentissage calculé au titre de l’année 2014). Des dispositions transitoires et dérogatoires sont fixées pour le crédit d’impôt apprentissage calculé en 2013 : son montant est divisé par deux pour les apprentis en 2e ou 3e année de formation et pour ceux préparant un diplôme d’un niveau supérieur à Bac+2.

Pour les apprentis préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus à un BTS ou un DUT enregistré au RNCP, les entreprises peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt apprentissage d’un montant de 1 600€ par le nombre moyen annuel d’apprentis en 1ère année de cycle de formation et, de 800€ par le nombre moyen annuel d’apprentis en 2ème et 3ème année de cycle de formation ;

Pour les apprentis préparant d’autres diplômes, les entreprises peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt apprentissage d’un montant de 800€ par le nombre moyen annuel d’apprentis quelle que soit l’année de cycle de formation.

Cette refonte représente une diminution de 250 millions d’euros du crédit d’impôt apprentissage pour les entreprises.

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Réduction de l’aide forfaitaire à l’embauche d’apprentis (indemnité compensatrice forfaitaire, ICF)La loi de finances pour 2014 a également diminué les aides régionales accordées en cas d’embauche d’un apprenti.

Elle a supprimé l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF), versée à l’employeur d’un apprenti par la Région qui déterminait le montant et les conditions d’attribution, avec un montant minimum de 1 000€ pour chaque année du cycle de formation. Dans le même temps, elle a créé une prime à l’apprentissage réservée aux entreprises de moins de 11 salariés.

Cette mesure a pris effet pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 2014.

À titre transitoire, les contrats d’apprentissage conclus avant le 1er janvier 2014 ouvrent droit à une prime :

• calculée selon les modalités de l’ICF pour la première année de formation, quel que soit l’effectif de l’entreprise ;

• égale à 1 000€ pour la 2e année de formation et 1 000€ pour la 3e année de formation, lorsque l’entreprise a moins de 11 salariés ;

• égale à 500€ pour la 2e année de formation et 200€ pour la 3e année de formation, lorsque l’entreprise a au moins 11 salariés.

Cette mesure représente également une baisse de 250 millions d’euros des aides à l’apprentissage en faveur des entreprises.

Prélevement sur la taxe d’apprentissage et interdiction de l’utiliser pour investir dans les CFALe gouvernement a entamé en 2013 une réforme de la taxe d’apprentissage qui s’est traduite dans un premier temps par la fusion de la taxe d’apprentissage et de la contribution au développement de l’apprentissage (CDA) et l’attribution de la contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA) aux centres de formation d’apprentis (CFA) et sections d’apprentissage, alors qu’elle abondait auparavant le CAS FNDMA.

Cette réforme a été actée dans la loi du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013. La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a poursuivi la réforme en déterminant de nouvelles modalités de fixation des coûts de la formation d’un apprenti pour les CFA et en prévoyant de nouvelles modalités d’affectation du solde du quota non affecté par les entreprises.

Elle a plafonné le montant des dépenses libératoires susceptibles d’être effectuées par les entreprises pour le financement des centres de formation d’apprentis, des sections d’apprentissage et des formations technologiques et professionnelles.

La dernière étape de la réforme est inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2014.

Elle prévoit de répartir le produit de la taxe d’apprentissage en trois fractions :

• Une fraction régionale dont le montant est égale à 56 % du produit de la taxe due. Une part fixe arrêtée à la somme totale de 1 544 093 400 est réparti entre toutes les régions. Si le produit de la fraction régionale pour l’apprentissage est inférieur à ce montant global, le produit est réparti au prorata des parts attribuées à chaque région. Si le produit est supérieur à ce montant il est réparti en fonctions de critères et de pourcentages fixés par la loi.

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• Une fraction dénommée « quota » dont le montant est égal à 21 % du produit de la taxe due, attribuée aux personnes morales gestionnaires des CFA et sections d’apprentissage au titre de ces centres

• Une dernière fraction correspondant au solde, soit 23 % du produit de la taxe d’apprentissage et destiné à des dépenses libératoires engagées au profit des premières formations technologiques ou professionnelles, redéfinies par la loi du 5 mars 2014.

Au total, la loi représente un prélèvement de 380 millions d’euros sur la taxe d’apprentissage qui seront désormais affectés aux Régions.

Pour compenser ce transfert, le Gouvernement a prévu que la CSA payée par les entreprises d’au moins 250 salariés ne serait plus affectée à l’Etat, mais directement gérée par les entreprises elles-mêmes pour embaucher des apprentis. Le Gouvernement prétend que le produit de la CSA est d’environ 300 millions, ce qui compenserait en grande partie le prélèvement de 380 millions sur la taxe au profit des Régions.

Il s’agit d’un marché de dupes pour quatre raisons :

• le dernier produit connu de la CSA est de 103 millions d’euros. Le produit actuel doit être certainement plus élevé, car les taux de la CSA ont augmenté en 2012. Mais le chiffre de 300 millions apparaît très surévalué ;

• l’assiette de la CSA est par construction appelée à se réduire, puisque les entreprises de plus de 250 salariés vont préférer augmenter le nombre de jeunes employés en alternance plutôt que de payer la CSA. A court terme (quelques années), quel que soit son niveau actuel, la CSA est appelée à revenir à un niveau inférieur à 100 millions d’euros ;

• des branches professionnelles qui concentrent une part significative des effectifs salariés des entreprises de plus de 250 salariés se voient régulièrement refuser leurs demandes d’ouverture de CFA par les conseils régionaux. Elles vont donc remplir leur quota d’alternants en employant des jeunes en contrat de professionnalisation, ce qui va diminuer la CSA sans augmenter d’un euro les ressources attribuées à l’apprentissage ;

• les entreprises les plus pénalisées par la réforme sont celles qui s’engagent le plus dans l’apprentissage et qui ne paient donc pas de CSA : pour elles, la perte est nette, alors qu’elles réalisent les plus gros efforts en faveur des jeunes.

Le résultat « structurel » de la réforme est donc bien de prélever 380 millions d’euros sur la taxe d’apprentissage librement gérée par les entreprises pour l’affecter aux Régions, en prétendant compenser ce prélèvement par une gestion libre de la CSA dont le produit est bien inférieur à 380 millions et qui de toute façon est appelée à diminuer fortement et rapidement.

A cette « taxe sur la taxe » s’ajoute, pour la première fois depuis 1971, l’interdiction faite aux entreprises d’utiliser la totalité de leur taxe d’apprentissage disponible pour financer l’apprentissage. Plus précisément, les entreprises n’auront plus le droit d’utiliser leur barème pour investir dans l’apprentissage. Celui-ci ne pourra être sollicité que pour couvrir les concours financiers obligatoires si le « quota » ne suffit pas. En d’autres termes, la loi interdit désormais aux entreprises d’utiliser la taxe pour investir dans les CFA.

La loi du 5 mars 2014 réduit donc fortement la taxe d’apprentissage directement gérée par les entreprises et restreint considérablement la liberté d’affectation de la petite part qui leur reste.

En ce sens, elle est un très mauvais coup porté à l’apprentissage.

Si elle n’est pas corrigée rapidement, elle va structurellement, et donc durablement, affaiblir l’apprentissage dans notre pays et accélérer la chute constatée en 2013.

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Nos propositions : une réforme structurelle pour refonder l’apprentissageDepuis le début des années 2000, les gouvernements successifs ne cessent de plaider la cause de l’apprentissage. Pourtant, sauf dans les niveaux supérieurs, celui-ci ne se développe pas dans notre pays. C’est le signe que des freins structurels existent, des freins qui plongent loin dans l’histoire de notre pays et notamment dans son rapport à l’Ecole.

Il est temps désormais d’en parler, d’en débattre librement pour, enfin, pour faire évoluer les choses et donner à davantage de jeunes de notre pays la chance de l’apprentissage.

Après avoir tenté d’identifier ces freins, il faudra s’employer à formuler des propositions pour conduire une réforme structurelle, historique, au service de l’apprentissage, c’est-à-dire de l’emploi des jeunes et de la compétitivité des entreprises.

L’héritage de l’Histoire : le rapport problématique de l’école avec la formation en entrepriseEn France, davantage que dans d’autres démocraties, l’Ecole est investie d’une double mission, à la fois individuelle et collective. Collective d’abord: permettre, par l’éducation de citoyens autonomes, l’émergence d’une nouvelle société, plus juste, plus solidaire, plus épanouie. Individuelle ensuite : donner à chacun les moyens de son autonomie pour qu’il puisse librement se réaliser. Double mission d’émancipation collective et individuelle, héritière de la Révolution, qui s’est apparentée avec les années à un « sacré républicain », et qu’une tradition persistante et influente a voulu opposer à celle de l’entreprise, en la caricaturant comme, au contraire, le lieu du conflit, des tensions, voire de l’exploitation.

Le temps a heureusement triomphé de ces préjugés grossiers mais il reste un fond de suspicion : Comment l’entreprise pourrait-elle être, à côté de l’Ecole, avec l’Ecole, et parfois mieux que l’Ecole, un lieu d’émancipation, d’acquisition des savoirs, un lieu de réalisation de la promesse républicaine d’autonomie faite à la jeunesse ?

Derrière cette question apparaît ce qu’il n’est pas excessif d’appeler « l’impensé de l’apprentissage » dans notre pays. L’apprentissage, et plus généralement toute forme d’alternance impliquant une formation en entreprise, y est perçu comme une voie secondaire, une voie par défaut, une voie faite pour ceux qui ne peuvent emprunter le chemin académique.

C’est une erreur profonde, pédagogique et politique.

Erreur pédagogique d’abord, car considérer l’alternance comme une voie de relégation, c’est ne rien comprendre à ce qu’elle est, à ses effets sur les jeunes, à ce qu’elle met en jeu : l’alternance est fondamentalement une pédagogie, une autre manière d’apprendre la même chose qu’à l’école, une autre manière de réussir les mêmes diplômes et certifications. Ce qui peut bloquer un jeune à l’école peut être libéré par l’alternance. Ce qui peut rester obscur à l’école peut s’éclairer par l’alternance. Ce qui peut entraîner un refus d’apprendre à l’école peut être surmonté par l’alternance. L’alternance est une autre pédagogique que celle de l’école au service du même objectif d’émancipation individuelle et collective.

Erreur politique ensuite, qui découle de la première : pourquoi notre pays freine-t-il, d’une manière ou

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Apprentissage - Propositions du MEDEF pour la conférence sociale

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d’une autre, le développement de cette autre pédagogie qui conduit au même résultat, qui poursuit le même objectif que l’école ? Pourquoi prive-t-il les jeunes d’une autre manière de réussir aussi bien, et parfois mieux, que la voie académique ? Cette pratique plus ou moins consciente ne mène-t-elle chaque année plusieurs dizaines de milliers de jeunes dans le mur ? Il faut cesser d’opposer les deux voies pour les penser comme deux pédagogies différentes et complémentaires au service de la formation de la jeunesse.

Les entreprises de France sont fortement investies dans la formation en alternance. Malgré les lourdeurs de toutes sortes et un système qui n’est pas adapté à leurs contraintes mais à celles de l’Education nationale, elles forment près de 600 000 jeunes en alternance chaque année. Les entreprises s’engagent dans l’alternance pour deux raisons majeures. C’est bien sûr souvent leur intérêt économique : l’alternance permet de bien former de potentiels et futurs collaborateurs et de les sensibiliser à la culture de l’entreprise. Mais c’est aussi leur responsabilité sociale : l’alternance étant une pédagogique qui se met en œuvre et se vit essentiellement dans l’entreprise, c’est à elle qu’incombe la mission d’intérêt général de la proposer au plus grand nombre de jeunes possibles qui en font la demande.

La conviction du MEDEF est que l’effort des entreprises en faveur de l’alternance peut être accru car c’est leur intérêt et leur responsabilité. Néanmoins, cet accroissement ne peut se faire à n’importe quelles conditions. Le système français de formation en alternance, et notamment en apprentissage, a quelque chose d’absurde. Que ce soit sur la conception des formations, la définition de leur contenu, leur révision, l’appréciation du besoin de compétences des entreprises sur un territoire et de plus en plus désormais le financement, la décision n’appartient pas à ceux qui sont concernés. Au contraire, les décisions stratégiques sont, à tous les niveaux, prises par des acteurs qui n’ont pas forcément intérêt au développement de l’apprentissage.

Pour compenser les inconvénients qui résultent de cette situation pour les entreprises, les pouvoirs publics leur accordent plusieurs subventions conséquentes (ICF, crédit d’impôt, exonérations de cotisations sociales…).

Le système est donc pervers : au lieu de parier sur la responsabilité et la liberté des acteurs, on les enferre dans un système de règles inadaptées en dédommagement desquelles on les indemnise. Ceci donne aux pouvoirs publics le contrôle du système, mais au prix d’un double gâchis d’énergie privée et d’argent public.

Il est temps désormais de sortir de ce système dont tout le monde admet, officiellement ou officieusement, qu’il est à bout de souffle. Il est temps de refonder l’apprentissage comme un chemin, à côté de la voie scolaire, que la République offre à ses jeunes pour tenir sa promesse d’émancipation.

Quatre grands chantiers doivent être ouverts pour cette refondation :

• l’orientation • la construction des diplômes • la carte des formations • le financement

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Quatre chantiers pour refonder l’apprentissage

♦♦1.♦L’orientation

ConstatsL’alternance est perçue comme une voie secondaire par rapport à la voie académique alors que les évaluations montrent qu’il vaut toujours mieux effectuer sa formation en apprentissage, à tous les niveaux, pour s’insérer sur le marché du travail.

Pour chaque niveau, l’apprentissage présente des taux d’accès à l’emploi supérieur :

• de 9 points de plus pour les non-diplômés ;

• de 11 points pour les diplômés du secondaire ;

• d’1 point pour les sortants du supérieur.

Contrairement aux préjugés tenaces, quel que soit le niveau et quel que soit le secteur d’activité, la voie de l’apprentissage est gage d’une meilleure insertion sur le marché du travail : les apprentis ont des durées d’accès à l’emploi plus faibles, des emplois plus qualifiés et sont moins souvent frappés par le chômage que les jeunes ayant suivi leur formation en lycée professionnel.

Propositions

Proposition 1 : rendre obligatoire l’information sur les débouchés des cursus proposés à tous les niveaux de qualificationLes élèves et les étudiants doivent pouvoir choisir leur formation en connaissance de cause : l’information sur le taux d’insertion de la formation envisagée doit être obligatoire et préalable au choix d’orientation, de même que le taux de réussite au diplôme selon le diplôme d’origine. Deux amendements inspirés par les propositions du MEDEF ont été adoptés par le Parlement dans le cadre de la loi Fioraso. Ils imposent à tous les établissements (y compris les lycées disposant de formations supérieures) le suivi statistique de l’insertion professionnelle de leurs étudiants et une diffusion de ces informations obligatoires en amont de leur choix d’orientation.

Ces statistiques mesureront les taux d’insertion professionnelle des étudiants, « un et deux ans après l’obtention de leur diplôme ». Actuellement les statistiques publiées sous l’égide du MESR fixe le délai de mesure à 36 mois.

Il faut donc étendre cette exigence démocratique d’orientation en connaissance de cause à l’enseignement secondaire.

Proposition complémentaire : stopper la dévalorisation symbolique de l’apprentissage dans le système d’orientationLa procédure d’affectation des élèves post 3ème de collège appelée « Affelnet post 3ème » exclut généralement l’apprentissage des choix d’orientation à part entière formulés par l’élève. L’apprentissage est considéré comme un vœu de recensement à l’instar du redoublement ou du choix d’un établissement hors académie, par opposition aux vœux d’orientation formulés pour rejoindre des lycées publics.

2.

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Certaines académies, comme l’académie de Grenoble, ont choisi d’introduire une évaluation complémentaire « des compétences des élèves pour le calcul du barème d’affectation vers la voie professionnelle » qui repose sur un barème évaluant le degré de motivation de l’élève dans la construction de son parcours d’orientation (l’élève obtiendra des points s’il a rencontré un conseiller d’orientation-psychologue, a accompli un mini-stage en lycée professionnel ou encore participe à la vie du groupe en respectant les règles de la vie collective par exemple). La circulaire du recteur ne précise pas ce qu’il advient d’une cotation non probante pour un élève qui choisit la voie professionnelle et plus encore l’apprentissage.

Dans la même académie, la fiche préparatoire renseignée par la famille pour préparer le choix d’orientation saisi via internet, ne stipule pas l’apprentissage parmi les choix d’orientation.

L’académie de Créteil, en revanche, présente l’apprentissage dans la fiche préparatoire, comme une voie d’orientation au même titre que la voie scolaire de sorte que l’élève a systématiquement le choix entre voie scolaire et voie par apprentissage pour chaque diplôme de la spécialité choisie.

On constate ainsi que les rectorats ont une grande latitude pour organiser l’information et la procédure d’orientation des collégiens. Les documents remis aux familles, participant au titre de la procédure officielle, ont sans aucun doute un effet sur le choix des familles. Le fait de stipuler l’apprentissage comme un choix annexe « hors système éducatif » peut facilement être anxiogène et conduire à des renoncements. Il s’agit d’une aberration pédagogique et politique révélant une incompréhension radicale de l’apprentissage. Rajouter des procédures de vérification complémentaire au-delà des évaluations de compétences acquises dans le cadre de la formation peut conduire également à stigmatiser l’élève qui choisit la voie professionnelle.

Le ministère de l’Éducation nationale est invité à imposer à ses académies au minimum une neutralité dans la présentation faite de l’apprentissage et à contenir les préjugés obscurantistes que l’on rencontre encore parfois dans les milieux académiques contre l’apprentissage.

Le MEDEF demande ainsi la généralisation de la démarche conduite par l’académie de Créteil.

Par ailleurs, afin de rendre plus concrète l’approche des métiers, indépendamment du type de formation y conduisant, une journée de présentation des métiers, sollicitant des professionnels et des parents d’élèves, devrait être systématiquement organisée en fin de troisième et de terminale, dans chaque collège et lycée.

♦♦♦2.♦La♦construction♦des♦diplômes

Constats Afin que les entreprises accroissent leurs efforts en faveur de l’alternance, il est nécessaire de résoudre trois types de problèmes, qui concernent davantage l’apprentissage que la professionnalisation.

D’abord, les savoirs et connaissances requis pour l’obtention d’un diplôme ne correspondent pas toujours à ceux exigés pour s’insérer sur le marché du travail. Ce décalage entre ce qui est perçu comme important par les milieux académiques et ce qui l’est réellement pour obtenir un emploi pénalise les jeunes et dissuade beaucoup d’entreprises de se lancer dans l’aventure de l’apprentissage. Les compétences professionnelles, pré-professionnelles ou transversales acquises par un élève ou un apprenti en formation ne peuvent s’identifier qu’au terme de l’observation et d’une analyse d’activité en situation. L’évaluateur s’attachera ainsi à comprendre comment l’élève opère un processus de conceptualisation et de mobilisation de ressources internes et externes qui lui permet d’agir ou d’anticiper dans une situation donnée. Les référentiels de diplômes de l’Éducation nationale ne sont pas pour l’instant conçus dans cette perspective. Ils décrivent un résultat attendu comme objectif de certification et ne s’appuient que très rarement sur une analyse externe

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des activités de travail. La conséquence est que le processus d’élaboration des référentiels de diplômes ont plus vocation à décrire une situation d’évaluation plutôt qu’à orienter la formation elle-même.

Cela réduit et parfois élimine le rôle des professionnels dans la formation elle-même. Cela rend plus difficile aussi la mise en œuvre du contrôle en cours de formation (CCF) et privilégie les évaluations collectives et ponctuelles.

Ensuite, pour tous les niveaux de qualification, les diplômes sont encore bâtis sur une logique de savoirs et de connaissances, et non de compétences. Là aussi, le phénomène crée un écart néfaste entre la formation initiale et les savoirs et savoir-faire requis pour s’insérer durablement sur le marché du travail, notamment dans un contexte de plus grande mobilité professionnelle. Les référentiels actuels s’emploient trop souvent à décrire une liste de tâches qui conduisent à une trop grande standardisation et à une description très figée de l’emploi-cible considéré. Cela a pour conséquence de rendre moins indispensable la période de formation en milieu professionnel puisque l’essentiel des apprentissages (tournés plus vers la délivrance d’un diplôme que l’apprentissage d’un métier) peut être réalisé en centre de formation.

Enfin, la procédure de création et de révision des diplômes est beaucoup trop longue, et laisse les professionnels de côté. Un rapport récent du CEREQ (demandé à l’initiative du MEN - mars 2012) a évalué « la place et le rôle des professionnels dans la conception des diplômes professionnels ». Le rapport explique que « Dans tous les cas étudiés, le ministère a pris l’initiative de la proposition de création ou de rénovation du diplôme. Il s’est efforcé de faire partager ce projet aux employeurs, la plupart du temps dans le cadre de relations informelles. ». Prenant l’exemple précis de la création du bac pro EIE ou du bac pro vente, les auteurs concluent à la « prégnance, dans la décision de création ou de rénovation, d’une logique interne à l’appareil éducatif ». En d’autres termes, le processus connait depuis plusieurs années une certaine dérive qui permet au ministère de l’Éducation nationale de prendre l’initiative de faire évoluer l’offre de diplômes professionnels en fonction de critères d’orientation par les flux ou d’autres logiques endogènes au système éducatif. Il en résulte souvent des délais de construction et de rénovation très longs. Par exemple, il faut en moyenne cinq ans pour créer un BTS et deux ans pour le réviser. Ce temps est en totale discordance avec la réalité de l’évolution du marché du travail et des besoins des entreprises. Sans tomber dans l’adéquationnisme, il est nécessaire de rapprocher les deux temporalités.

Propositions

Proposition 2 : expérimenter la co-construction des diplômes entre les branches professionnelles volontaires et le ministèreAfin de rapprocher le contenu des formations des besoins en compétences des entreprises, et non simplement de cantonner les dérives possibles, les branches professionnelles doivent davantage s’investir dans l’ingénierie de formation. Les organisations professionnelles ne peuvent à la fois critiquer l’Éducation nationale et refuser de prendre leurs responsabilités.

Le MEDEF propose donc d’expérimenter, dans les branches professionnelles volontaires, une co-construction des diplômes avec le ministère.

Cette expérimentation pourrait prendre la forme suivante :

• Ecriture du référentiel métier par la branche professionnelle ;

• Co-élaboration du référentiel de certification entre la branche et le ministère ;

• Co-élaboration du règlement d’examen entre la branche et le ministère.

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Le conseil national des programmes créé par la Loi Peillon aura pour mission d’élaborer les programmes d’enseignements généraux des diplômes professionnels, laissant aux CPC le soin de préparer les programmes des enseignements professionnels. Dans cette nouvelle configuration, il faut donner aux CPC une visibilité institutionnelle et politique (le conseil les chapeautant n’ayant pas un rôle de régula-tion). Nous proposons que les CPC puissent être représentées par un chef d’entreprise qui aurait rang de Président et que l’administration du MEN assure le greffe et non plus le secrétariat général.

Proposition complémentaire : rendre obligatoire un rapport d’opportunité validé par la CPNE avant toute création ou révision d’un diplômeAfin de s’assurer que la création ou la rénovation d’un diplôme correspond bien à un besoin des entreprises et non à une logique interne à l’Éducation nationale, il est proposé la réalisation systématique d’un rapport d’opportunité préalable à toute création, fusion ou rénovation d’un diplôme et s’appuyant notamment sur les données des observatoires prospectifs des métiers et des qualifications des branches profes-sionnelles. Ce rapport d’opportunité devra être validé par les CPNE (Commission Paritaire Nationale de l’Emploi) concernées par les emplois cibles. Une étude d’opportunité et une évaluation ex-post doivent être systématisées pour chaque diplôme renouvelé.

♦♦♦3.♦La♦carte♦des♦formations

Constats Avec la conception des diplômes, la carte des formations est un des principaux problèmes du système d’apprentissage français.

De même que les diplômes ne sont pas conçus pour les besoins de ceux auxquels ils s’adressent (les jeunes et les entreprises), la carte des formations n’est pas élaborée en fonction de considérations objectives et rationnelles, c’est-à-dire les aspirations des jeunes, leurs chances de s’insérer durablement dans l’emploi et la réalité des besoins en compétences des entreprises.

Instruites par l’Éducation nationale, validées ou refusées par le pouvoir politique régional, les demandes d’ouverture ou de fermeture des sections d’apprentissage sont largement tributaires de considérations étrangères à l’intérêt des jeunes ou des entreprises.

Propositions Le MEDEF propose de renverser radicalement la logique en responsabilisant les acteurs : comme en Allemagne, les entreprises et les branches professionnelles doivent être absolument libres de leur politique de formation en alternance, que ce soit sur la conception des diplômes ou l’ouverture des sections. En revanche, comme en Allemagne également, les pouvoirs publics doivent être absolument libres de soutenir tel ou tel secteur ou formation en fonction de leurs priorités politiques et ne pas être contraints de subventionner malgré eux. Liberté et responsabilité donc, fondements de la refondation de l’apprentissage.

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Proposition 3 : mettre en place une procédure de co-décision entre les régions et les partenaires sociaux sur la carte des formationsAfin de rapprocher la carte des formations du besoin en compétences des entreprises et lutter contre la rigidité de l’offre de formation, les partenaires sociaux doivent être co-décideurs sur les cartes régionales des formations professionnelles initiales, pour tous les niveaux de qualification : les besoins économiques et de compétences des entreprises doivent faire partie des critères de choix prioritaires.

Conformément à l’article 18 de la loi Peillon du 8 juillet 2013 (« Refondation de l’école de la République »), chaque région aura pour compétence d’arrêter la carte régionale des formations professionnelles initiales, après concertation avec les autorités académiques et en cohérence avec les décisions d’ouverture et de fermeture de formations par l’apprentissage qu’elle aura prises. La procédure d’élaboration de la carte régionale des formations professionnelles initiales, telle que décrite, prévoit une simple consultation des branches professionnelles et des organisations syndicales professionnelles des employeurs et des salariés concernés.

Le MEDEF demande à ce que le conseil régional ne puisse adopter une carte régionale que si cette dernière a obtenu un avis conforme de la part des partenaires sociaux (Coparef), ce qui apporterait la garantie qu’elle répond effectivement aux besoins économiques du territoire et aux souhaits des secteurs professionnels. En cas d’avis négatif des partenaires sociaux, la carte des formations devrait être adoptée à la majorité qualifiée du Conseil régional.

♦♦♦4.♦Liberer♦le♦financement♦de♦l’apprentissage

Constats Les entreprises financent l’apprentissage de trois manières :

• la taxe d’apprentissage est payée par toutes les entreprises (sauf les entreprises employant des apprentis et dont la base fiscale est inférieure à 6 Smic annuels). Le taux est de 0,5 % de la masse salariale et le produit est de 2 milliards d’euros. 22 %, soit 440 millions, est attribué aux Régions ;

• la contribution au développement de l’apprentissage (CDA) est payée par toutes les entreprises (sauf les entreprises employant des apprentis et dont la base fiscale est inférieure à 6 Smic annuels). Le taux est de 0,18 % de la masse salariale et le produit est de 720 millions d’euros, entièrement affecté aux Régions ;

• la contribution supplémentaire à l’apprentissage est due par les entreprises d’au moins 250 salariés (environ 7 000 entreprises) dont les jeunes en apprentissage représentent moins de 4 % de l’effectif total. Le taux varie de 0,05 % à 0,6 % de la masse salariale en fonction de la taille de l’entreprise et de l’effectif d’apprentis dans l’entreprise. Le dernier produit connu (2011) est de 67 millions d’euros. La taxe est affectée à l’Etat.

Le Gouvernement a fusionné dans le PLFR 2013 la taxe d’apprentissage et la CDA. Le taux est donc de 0,68 %, soit 0,5 + 0,18. Si la proportion entre les fonds librement gérés par les entreprises et ceux affectés aux Régions était respectée par rapport à l’existant, la part de cette nouvelle taxe fusionnée affectée aux Régions devrait être de 43 %. Les entreprises devraient continuer à gérer librement 57 %.

Or, la loi affecte la part attribuée aux Régions à 56 %, au lieu de 43 % comme l’équivalent d’aujourd’hui. En valeur absolue, cette augmentation de la part affectée aux Régions représente un transfert de 380 millions d’euros annuels aujourd’hui librement gérés par les entreprises vers les Régions.

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Pour compenser ce transfert, le Gouvernement a prévu que la CSA payée par les entreprises d’au moins 250 salariés ne serait plus affectée à l’Etat, mais directement gérée par les entreprises elles-mêmes pour embaucher des apprentis. Nous avons déjà vu (voir six erreurs du Gouvernement) en quoi il s’agissait d’un marché de dupes. Le Gouvernement prétend que le produit de la CSA est d’environ 300 millions, ce qui compenserait en grande partie le prélèvement de 380 millions sur la taxe au profit des Régions. Nous avons déjà vu (voir les six erreurs du Gouvernement) en quoi il s’agissait d’un marché de dupes.

Il faut ajouter deux effets négatifs très forts de cette loi sur le financement de l’apprentissage :

• d’une part, l’interdiction faite aux entreprises d’utiliser une partie de la taxe d’apprentissage (le barème) pour financer l’apprentissage (en dehors du CFO) ;

• d’autre part, la rigidification des catégories qui restreint encore davantage la liberté d’utilisation de la taxe par l’entreprise et l’empêche d’en faire un usage correspondant à ses besoins en compétences.

Le résultat « structurel » de la loi du 5 mars 2014 est bien de prélever 380 millions d’euros sur la taxe d’apprentissage librement gérée par les entreprises pour l’affecter aux Régions, d’in-terdire aux entreprises d’utiliser la taxe d’apprentissage pour investir dans les CFA et de les empêcher d’user de la taxe en fonction de leurs besoins en compétences.

Dans ces conditions, dire qu’il s’agit d’un très mauvais coup porté à l’apprentissage est un doux euphémisme qui masque mal le fait que sans correction rapide, cette loi va accélérer le déclin de l’apprentissage dans notre pays.

Propositions

Proposition 4 : libérer l’utilisation de la taxe d’apprentissage par les entreprisesMême si la loi du 5 mars 2014 comporte certaines mesures utiles de clarification dans la collecte et l’uti-lisation de la taxe (fusion OPCA/OCTA notamment), il est nécessaire de revenir sur cette loi et ses décrets d’application. Il est impératif de :

• rendre aux entreprises la part de la taxe d’apprentissage prélevée en faveur des Conseils régionaux ;

• revenir sur l’interdiction d’utiliser le barème pour financer les CFA ;

• assouplir les catégories de la taxe

Proposition complémentaire : déconnecter l’ouverture des CFA de l’obligation de financement régionalLes conseils régionaux invoquent souvent le manque de financement pour refuser à des branches professionnelles l’ouverture de CFA ou de sections. A partir du moment où les entreprises et les branches professionnelles sont en capacité d’autofinancer un CFA ou une section, la légitimité d’un tel refus de la part des régions est posée.

Le MEDEF propose qu’en cas d’auto-financement complet par les entreprises et les branches professionnelles, la région ne puisse s’opposer à l’ouverture d’un CFA ou d’une section d’apprentissage, et qu’elle soit en échange libérée de toute obligation légale de financement (subvention d’équilibre et obligation de verser l’ICF).

Cette liberté faciliterait la création de CFA interrégionaux qui pourraient fonctionner avec des entreprises

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et des apprentis issus de plusieurs régions.

A terme, si les propositions du MEDEF sont retenues, celui-ci n’est pas opposé à ce que le système de subventionnement public de l’apprentissage soit revu. A partir du moment où les entreprises et branches reconfigurent un système correspondant à leurs attentes, il est normal qu’elles ne soient plus systématiquement indemnisées pour les dysfonctionnements du système actuel. L’autonomie financière est le prix de la liberté, comme pour les entreprises allemandes.

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Trois mesures d’urgenceProposition 5 : Zéro charges alternanceAfin de limiter les dégâts de la loi du 5 mars 2014 sur la rentrée 2014 et en attendant une réforme structurelle pour la rentrée 2015, le MEDEF propose la mise en œuvre exceptionnelle, pour une durée d’un an, d’un « zéro charges alternance » permettant à toute entreprise embauchant un jeune en alternance de bénéficier d’une exonération totale de charges pendant la durée du contrat. Afin de maximiser son impact, cette mesure pourrait être votée avant l’été pour s’appliquer dès la rentrée 2014. Elle resterait en vigueur le temps qu’une réforme structurelle de l’apprentissage, incluant le financement, soit mise en œuvre, soit un an au minimum.

Par son impact financier et surtout psychologique auprès des chefs d’entreprise, le « zéro charges alter-nance » serait de nature à freiner significativement le nouveau recul annoncé de l’apprentissage à la rentrée. Le coût de la mesure par contrat serait dix fois inférieur à celui d’un contrat aidé : pour le prix d’un seul contrat aidé dans le secteur non-marchand, dix contrats en alternance pourraient être soutenus. Etant donné la différence de taux d’insertion dans l’emploi de chaque dispositif (80 % pour l’alternance, 30 % pour les contrats aidés non marchands), une réorientation des priorités s’impose, d’abord dans l’intérêt des jeunes. Pour financer la mesure à coût constant pour les finances publiques, il suffirait de transférer 10 % du budget annuel des emplois aidés sur l’aide à l’alternance. Cela ne représenterait par ailleurs que 50 % des économies budgétaires faites l’année dernière sur le compte de l’apprentissage, et donc des jeunes.

Proposition 6 : Contrat de professionnalisation « sur-mesure »De même que l’apprentissage, le contrat de professionnalisation est un moyen d’insertion dans l’emploi particulièrement efficace : six mois après un contrat de professionnalisation, 76 % des anciens bénéficiaires sont en emploi dont ½ chez le même employeur.

En application du Code du travail, le contrat de professionnalisation doit obligatoirement conduire à une qualification soit enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles, soit reconnue dans les classifications d’une convention nationale de branche, soit ouvrant droit à un certificat de qualification professionnelle.

Si le respect de ces exigences permet de garantir la qualité de la formation, il n’en est pas moins bloquant pour l’accès au contrat de professionnalisation pour beaucoup de jeunes :

• d’abord, ces règles complexifient la mise en œuvre du contrat pour les entreprises, notamment les TPE. Cette complexité est au mieux dissuasive, au pire inhibitrice ;

• ensuite et surtout, l’encadrement par des règles à la fois universelles et précises interdit l’adaptation du contrat de professionnalisation à la situation particulière de chaque jeune et de chaque entreprise. En l’état actuel du droit, il est impossible soit de réaliser une formation « sur-mesure » correspondant exactement aux besoins de l’entreprise et du jeune, soit de réaliser la formation en interne de l’entreprise.

En conséquence, afin de lever cet obstacle puissant au développement de l’alternance, le MEDEF propose que le contrat de professionnalisation puisse, pour une durée expérimentale, conduire à une formation correspondant exactement aux besoins du jeune et de l’entreprise. Celle-ci serait définie en amont par l’entreprise et le jeune et devrait se dérouler selon un calendrier déterminé. Elle pourrait être réalisée en interne par l’entreprise.

L’expérimentation d’un « contrat de pro sur-mesure » dans des conditions sécurisées juridiquement pour les entreprises pourrait ainsi relancer fortement l’alternance dans les entreprises en permettant à plusieurs dizaines de milliers de jeunes supplémentaires d’accéder à un emploi et à une formation.

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Proposition 7 : Développer les prépa-alternanceL’observatoire Tendances-Emploi-Compétences (TEC) du MEDEF permet d’identifier, région par région, les emplois non pourvus.

C’est une situation à la fois paradoxale et inacceptable : certains jeunes décrocheurs scolaires et universitaires ne trouvent pas d’emploi et certains secteurs économiques ne parviennent pas à faire face à leur besoin de main d’œuvre.

Le MEDEF propose donc de développer les « prépa-alternance » mis en œuvre depuis 2011. Il s’agit d’apporter une réponse tant aux décrocheurs qu’aux entreprises qui ne parviennent à pourvoir tous leurs emplois :

• pour les décrocheurs, le dispositif a deux aspects complémentaires : une remise à niveau minimum (savoir-être, savoirs de base directement utiles) permettant de postuler à une offre de contrat en alternance et une découverte de plusieurs types de métiers sur les plateaux techniques des CFA facilitant le mûrissement d’un choix professionnel ;

• pour les secteurs économiques en tension, la prépa-alternance vise à attirer de jeunes demandeurs d’emplois et facilite l’embauche de jeunes déjà préparés et plus mûrs.

Techniquement, ces dispositifs s’apparentent à une préparation opérationnelle à l’emploi collective. Certaines branches professionnelles, comme celle du commerce par exemple, forment ainsi plusieurs milliers de jeunes par an et offrent ainsi une solution aussi bien aux entreprises qu’aux jeunes.

Les branches qui rencontrent le même type de difficulté pourraient également s’en saisir rapidement dans le contexte économique et social actuel.

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