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QUAND LE CANDOMBLÉ, RELIGION AFRO-BRÉSILIENNE, SE SAISIT DES MÉDIAS Patricia de Aquino Nouveau Monde éditions | Le Temps des médias 2011/2 - n° 17 pages 100 à 110 ISSN 1764-2507 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-le-temps-des-medias-2011-2-page-100.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- de Aquino Patricia, « Quand le candomblé, religion afro-brésilienne, se saisit des médias », Le Temps des médias, 2011/2 n° 17, p. 100-110. DOI : 10.3917/tdm.017.0100 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Nouveau Monde éditions. © Nouveau Monde éditions. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Biblio SHS - - 193.54.110.35 - 03/06/2014 13h56. © Nouveau Monde éditions Document téléchargé depuis www.cairn.info - Biblio SHS - - 193.54.110.35 - 03/06/2014 13h56. © Nouveau Monde éditions

Quand le candomblé se saisit des médias

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QUAND LE CANDOMBLÉ, RELIGION AFRO-BRÉSILIENNE, SE SAISITDES MÉDIAS Patricia de Aquino Nouveau Monde éditions | Le Temps des médias 2011/2 - n° 17pages 100 à 110

ISSN 1764-2507

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-le-temps-des-medias-2011-2-page-100.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------de Aquino Patricia, « Quand le candomblé, religion afro-brésilienne, se saisit des médias »,

Le Temps des médias, 2011/2 n° 17, p. 100-110. DOI : 10.3917/tdm.017.0100

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La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Entre 1532 et 1850, près de la moi-tié des onze millions d’esclaves razziéssur le continent africain vers le Nou-veau Monde furent déportés au Brésil.Au lendemain de l’indépendance(1822), la population brésilienne comp-tait 75 % de Noirs et de métis. Appar-tenant à différentes ethnies africaines,ils apportèrent les cultes de leursancêtres divinisés, autant de savoirsrituels complexes composés de mots, deprières, de connaissances phytothéra-peutiques, mais aussi musicales et culi-naires, qui traversent aujourd’hui l’en-semble de la langue et la culture brési-liennes. Les rythmes musicaux de lasamba, les saveurs culinaires du xinximde galinha ou de l’acarajé trouvent leursource dans les percussions et les metssacrificiels consacrés aux divinités afro-brésiliennes. Ils participent désormais del’identité métissée du pays.Le terme candomblé, d’origine ban-

toue, désigne les cérémonies publiquesau cours desquelles les dieux viennentdanser et se mêler aux humains dans la

transe de possession. Candomblé faitencore référence à la maison de culte,où se déroulent les rites initiatiques, lessacrifices, et souvent, les consultationsoù le destin est interrogé à travers lescauris manipulés par le devin.Le processus de légitimation reli-

gieuse du candomblé couvre une pé -riode historique relativement courte -un siècle- liée à l’émergence de la presseécrite, de la radio, de la télévision jusqu’àl’arrivée d’Internet. De ce point de vue,le candomblé constitue un observatoirepertinent pour saisir la manière dont lesacteurs religieux se sont appropriés lessupports de communication et conti-nuent d’investir l’espace public. Ayantfait l’objet de répression policière auXIXe siècle et dans la première moitié duXXe , ces rites sacrificiels et de posses-sion ont longtemps été stigmatisés parla société brésilienne. Jusqu’aux années1950, alors que la presse écrite véhicu-lait l’image de coutumes primitives etbarbares des « féticheurs », les membresdes cultes afro-brésiliens ont joué un rôle

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Quand le candomblé, religion afro-brésilienne, se saisit des médias

Patricia de Aquino*

N°17 – Automne 2011 Le Temps des Médias

* Laboratoire d’anthropologie sociale - EHESS/CNRS/Collège de France.

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actif dans la divulgation de la samba,forme musicale à matrice religieuse liéeau candomblé.L’essor des médias visuels, par l’exhi-

bition mâtinée de voyeurisme de ritestenus secrets, entraîne une prise deconscience identitaire et une redéfini-tion des stratégies des acteurs en ce quiconcerne les frontières cultuelles dudicible et du visible. Religion initia-tique, soumise à des règles de transmis-sion et d’accès au savoir, le candomblésuppose que ses rituels soient préservésdu regard profane. La question sera modifiée au cours

des années 1980, marquées par la reven-dication politique d’une identité cul-turelle forte. Les significations desimages documentaires sont alors rééla-borées à rebours d’une exploitationsensationnaliste pour fonder le can-domblé en tradition africaine. Il s’agitde mettre en évidence, et aussi en scène,les similitudes des rites entre les deuxcontinents. Cette appropriation dessupports de communication a visé l’in-tégration du candomblé comme reli-gion parmi les autres.L’arrivée des blogs et des réseaux

sociaux introduit, à partir des années2000, de nouvelles modalités de diffu-sion avec cette particularité que les usa-gers en sont presque exclusivement lesacteurs. Cette communication à usageinterne installe Internet comme lieuprivilégié de contrôle de la tradition etd’organisation de la résistance auxéglises évangéliques qui développentune violente opposition aux cultes afro-brésiliens.

Jusqu’aux années 1950, la réhabilitation des traditions

Entre l’abolition de l’esclavage (1888)et la première moitié du XXe, l’héritageafricain n’a pas bonne presse. Les jour-naux stigmatisent les rituels afro-brési-liens en dénigrant le «primitivisme» despratiques, les actes barbares (sacrifices)ou obscènes (danses de possession). Lesgazettes rendent compte positivementde la répression policière contre les pra-tiques rituelles et des procès intentéspour charlatanisme, fausse médecine,extorsion de fonds, tapage nocturne. Le«motif religieux », lui, n’est jamaisavancé car, dès la première charte consti-tutionnelle de 1824, la liberté de culteest garantie1. En 1831, le premier codepénal renforce ce principe en considé-rant comme crime le fait d’«abuser oumoquer n’importe quel culte établi dansl’Empire à travers des papiers imprimés,lithographiés ou gravés, qui se distri-buent à plus de quinze personnes, ou àtravers des discours proférés en réunionspubliques, ou à l’occasion, et dans leslieux où se déroule le culte»2. Ces dispositions légales ne freinent

pas le ton ironique et méprisant desarticles traitant de l’univers afro-brési-lien. En 1904, pour la première fois, lesujet quitte les pages des faits divers etde la chronique policière. João do Rioréalise une série de reportages sur lescultes de la capitale, publiés dans le quo-tidien Gazeta de Notícias, avant d’en faireun recueil, As religiões no Rio, «Les reli-gions à Rio». «En lisant les grands quo-tidiens, nous imaginons vivre dans un

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pays essentiellement catholique […].Cependant, la ville grouille de reli-gions».Dès l’introduction, le journaliste dis-

qualifie son informateur : «Antônioconnaît très bien N.D. des Douleurs, estfamilier des orixálas [divinités] d’A frique,mais ne respecte que le papier-monnaieet le Porto [le vin apéritif] ». Le devinconsulté est «un pauvre vieux rusé etingénu» ; les initiations, «une des plusbarbares et inexplicables coutumes desfétiches de Rio». La fin d’une cérémo-nie ravive les fantasmes d’une sexualitédébridée : « toutes ces chairs hypermé-tissées se dressaient vibrantes pour la bac-chanale». Outre le répertoire relativement

informé de ces reportages, qui en fontl’une des premières ethnographies ennégatif des cultes afro-brésiliens, il est àremarquer que les lecteurs de la Gazetade Notícias étaient suffisamment fami-liers de la langue rituelle afro-brési-lienne pour que l’auteur se dispensed’en expliciter les termes. L’affirmationde la distance vis à vis de cet univers parson dénigrement devenait d’autant plusnécessaire que la proximité géogra-phique était réelle et qu’un monde par-tagé, une nation républicaine, était envoie de construction3. Paradoxalement,la volonté politique d’union nationaleallait ouvrir un espace aux formes musi-cales portées par des acteurs appartenantaux traditions religieuses d’origines afri-caines. Au cours des vingt premières décen-

nies du XXe siècle, la samba, qui entre-tient par ses rythmes et ses acteurs, un

lien organique avec les cultes, arrive surla scène nationale et devient un genremusical à part entière. Cette «nationa-lisation » de la samba renforce la pré-sence des référents et du lexique ritueldu candomblé dans la culture et lalangue, à travers notamment les parolesdes morceaux diffusés à la radio. Il est d’usage de considérer Pelo Tele-

phone comme la première samba enre-gistrée (1917). Officiellement signé parDonga et Mauro de Almeida, le mor-ceau serait en réalité une compositioncollective, émanant des réunions quianimaient le Morro da Conceição à Riode Janeiro, quartier d’éminentes figuresde l’univers afro-brésilien. Tout commeaujourd’hui, une fois les célébrations desdivinités achevées, les adeptes prolon-geaient les festivités autour d’improvi-sations musicales profanes, sur fondd’imprégnation religieuse. «J’espère quetu en prendras une/Pour ne plus jamaisfaire ça/Voler les amours appartenant àd’autres/Et ensuite faire un “feitiço” »disent les paroles de Pelo Telephone. Ledernier vers pourrait être traduit par «Etensuite faire des rites afro-brésiliens ».Le texte évoque ainsi sans détour, dansun grand succès populaire, les pratiquesrituelles de matrice africaine. Dans ces quartiers afro-brésiliens,

naquirent également les ranchos, ces asso-ciations préfigurant les défilés du car-naval. Hilário Jovino Ferreira, respon-sable rituel du candomblé, a été l’un desprincipaux artisans de la fête qui contri-bue aujourd’hui au renom internatio-nal de Rio de Janeiro. En témoigne uneannonce, signée de son nom, parue le 2

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février 1906, dans le Jornal do Brasil, invi-tant l’ensemble des ranchos à se retrou-ver dans le quartier dit de la petiteAfrique4. Membre de la Garde natio-nale, corps honorifique de l’armée, lesinitiatives d’Hilário révèlent son intel-ligence de l’époque. Initialement, lesranchos défilaient lors de la fête des Roiset détonnaient face à la circonspectionaffichée par les fidèles catholiques. Hilá-rio décida donc de reporter la date dedéfilé de son rancho à la période du car-naval ; les autres groupes festifs se ran-gèrent au nouveau calendrier. « J’aifondé le Rei de Ouro qui a cessé dedéfiler le jour approprié, le 6 janvier,parce que les gens n’étaient pas habi-tués à ça. J’ai donc décidé de transférerle défilé au Carnaval», déclare-t-il au Jor-nal do Brasil, le 18 janvier 1913. Cela fai-sait deux ans que le quotidien finançaitle défilé des ranchos, précurseurs desactuelles écoles de samba, posant ainsiles jalons des compétitions au cœur ducarnaval carioca contemporain. L’arrivée au pouvoir de Getúlio Var-

gas, à la suite du coup d’État de 1930,s’accompagne de la mise en place ducontrôle politique des moyens de com-munication. Pour lui, il s’agit d’engagerle pays dans l’ère industrielle, avec une«société nouvelle», soudée autour d’unevaleur majeure, le travail, et d’une cul-ture nationale. Pendant que la répres-sion policière5 se poursuit et querésonne une samba édulcorée, le can-domblé commence à se transformer enobjet d’études scientifiques6, grâce enparticulier à un universitaire, membrede candomblé et auteur de plusieurs ou -

vrages sur les cultes afro-brésiliens.Paraissent alors les premiers articles depresse non dépréciatifs sur les cultesafro-brésiliens. En 1937, Edison Car-neiro, organise à Salvador, le deuxièmeCongrès afro-brésilien, et fonde unepremière structure associative, l’Uniondes sectes afro-brésiliennes. L’associationest présidée par Martiniano do Bonfim,célèbre devin né de parents esclavesaffranchis qui figure aujourd’hui parmiles grands ancêtres, rituellement saluésau début des cérémonies de candom-blé. La création de l’association estannoncée dans le journal O Estado daBahia, du 4 août 1937, qui y consacredans les jours qui suivent plusieurs sujets. La plupart des journalistes de l’é -

poque continuent de s’illustrer dans lerôle de gardiens de l’ordre et de la mora-lité. La police n’en fait pas assez : «Lecandomblé allait disparaître mais le sup-pléant du commissaire a prévenu lesintéressés », titrait O Estado da Bahia le13 février 1937. «Nous avons porté l’af-faire à la connaissance du […] Secré-taire de la sûreté publique», poursuit lereporter, se faisant le porte-parole d’unesociété qui a, ainsi que l’écrit sonconfrère, atteint un «degré de civilisa-tion […] (qui) ne comporte plus la pra-tique de certains actes, propres aux indi-vidus totalement ignorants […] origi-naires d’Africains imbéciles »7.À la radio, la samba, passée au tamis

des agences de censure gouvernemen-tales, devient le genre musical emblé-matique du carnaval et de la nation.Aquarela do Brasil, composé par Ary Bar-roso en 1939, est révélateur de l’ambi-

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tion d’une époque: exalter l’unité natio-nale rassemblant la diversité culturellebrésilienne. Les paroles retracent, dansun style lyrique et ampoulé, le voyagedu poète ébaubi par les régions du pays.«Et j’ai été radieux /Quand je suis arrivéà Bahia/[…]/Des nuits de magie, ducandomblé». La diffusion du candomblé gagne

l’Amérique du Nord avec une compo-sition musicale de Dorival Caymmi.Interprété par Carmen Miranda, dansle film A banana da terra de WallaceDowney, le morceauO que é que a baianatem? «Quels sont les atouts de la Bahia-naise ? », popularise, avec sa diffusioninternationale, les tenues vestimentairesdes initiées au candomblé : turban,jupons amidonnés, jupes et tuniquesbrodées, colliers aux perles coloréesattribuées aux divinités.

Des années 1950 aux années1980 : vers la reconnaissance de lamémoire historique des cultes

À la fin des années 1930, un nouveaumagazine hebdomadaire, O Cruzeiro, aintroduit le photo-reportage dans lejournalisme auriverde. Des actions depublicité inédites ont orchestré son lan-cement : quatre millions de prospectusont été lancés depuis le toit desimmeubles de la capitale, invitant sonmillion d’habitants à découvrir la publi-cation dite «contemporaine des gratte-ciels». Le premier éditorial annonce que« la plus moderne des revues » est née,circulant «depuis l’Amazonie jusqu’auRio Grande do Sul, s’infiltrant à travers

toutes les villes». Le 15 septembre 1951,O Cruzeiro publie des photos d’initia-tion rituelle. Le photo-reportage estencore dans les mémoires d’initiéesanciennes «une honte ! » ; comme entémoigne aujourd’hui Mãe Beata, il estjugé « très mauvais pour notre religion.Premièrement, parce que ce sont deschoses qui ne se montrent pas. Mêmepour beaucoup d’argent. Deuxième-ment, parce que le sang, le sacrificeimpressionnent ceux qui ne compren-nent pas le sens de nos rituels ». «Dansnotre maison, il est interdit de photo-graphier les cérémonies, affirme Reginad’Iemanjá. Même les fêtes ouvertes aupublic. Si on veut voir les dieux, il fautse déplacer. C’est notre tradition. ». Laquestion de l’enregistrement et de la dif-fusion d’images soulève des controversestoujours actuelles. Le reportage «Le dieu a soif de sang»

fait ainsi l’objet d’un lancement à grandbruit, avec teasing8. La veille, le quotidiende Bahia O Diário de Notícias en annoncela sortie par une photo: plan américainsur le buste d’un novice dégoulinant dusang d’une volaille aux ailes déployées,que des mains, appartenant à des per-sonnages hors-champ, maintiennent audessus de son crâne rasé. Au premier plande l’image, un amoncellement deplumes suggère une hécatombe de vola-tiles. Sensationnalistes, les pages de OCruzeiro voulaient concurrencer lereportage «Les possédées de Bahia »publié par Paris-Match quelques moisauparavant, à partir d’«un extraordinairedocument ethnographique» collecté parHenri-Georges Clouzot. Cependant, le

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texte du journaliste brésilien, ArlindoSilva, accompagnant les photos de JoséMedeiros, adopte un ton nouveau, deneutralité descriptive.L’impact du reportage dans les

milieux du candomblé de l’époque sevérifie par l’annonce, dans le journal ATarde du 22 novembre 1951, de la tenued’une réunion à la Fédération bahia-naise de culte afro-brésilien. À l’ordredu jour, une discussion sur le caractère«convenable [ou non] des publicationsqui ont été faites dans les revues ParisMatch et O Cruzeiro au sujet du culteafricain à Bahia ». Selon le témoignagede José Medeiros, de nombreuses mai-sons de culte s’étaient opposées aux cli-chés qui avaient finalement pu être réa-lisés en échange de rémunération. Mal-gré l’anonymat préservé dans la revue,la responsable du candomblé aurait étéostracisée par ses pairs. Quant au pho-tographe, il raconte qu’après la publi-cation, il ne s’enregistre plus que sousun faux nom dans les hôtels de Salva-dor pour éviter les ebós - rites, sorts oumaléfices - dont il pourrait être victime.À la même époque, Pierre Verger,

photographe d’origine française installéau Brésil et grand initié du candomblé,aurait refusé de fournir des images decérémonies initiatiques à O Cruzeiro,dont il était pourtant un correspondant.En 1954, des clichés de transe de pos-session, montrant des initiés aux cultesdes mêmes divinités de part et d’autrede l’Atlantique, sont pourtant publiésdans son ouvrage Dieux d’Afrique paruchez Hartmann. La préface de Théo-dore Monod éclaire les critères prési-

dant aux choix de l’auteur-photo-graphe: «Ce qui nous arrive ici, en pleinvisage, à l’improviste, ce n’est pas l’ha-bituelle matière à curiosité – voire, hélas,à sourire – de l’usuelle littérature demagazine […] ce prestigieux butin, iln’était pas à la portée d’un touriste ordi-naire, ou même à un ethnologue dumodèle habituel, de le conquérir. […]Pierre Verger ne dit pas tout, et nemontre pas tout. Car c’est, aussi, unsage».À partir des années 1950, se délimi-

tent, dans le monde du candomblé, leschamps de ce qui peut être divulgué,médiatisé, porté à la connaissance desprofanes et du plus grand nombre, et cequi doit demeurer réservé aux initiés,sacré, mis à l’écart du public. Le respectde ces frontières continuellement redé-finies par la communauté des adeptesengendre une différenciation des mai-sons de culte en plus ou moins « tradi-tionnelles», plus ou moins respectueusesdes interdits. En 1956, Joãozinho da Goméia, jeune

responsable d’une maison de culte à Riode Janeiro, doit affronter les foudres d’ini-tiées plus anciennes, après s’être déguiséen vedette pendant le carnaval. Danseurtalentueux, son spectacle présentant leschorégraphies propres aux divinités faitsalle comble au Casino d’Urca, haut lieude la nuit carioca. Quand le journalistede O Cruzeiro lui demande si cette théâ-tralisation n’est pas contraire aux règle-ments du candomblé, il répond: «Enaucune manière, mon ami. D’abord, parcequ’avant de me déguiser, j’en ai demandél’autorisation à ma divinité. Ensuite, parce

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que le fait de me déguiser en femme n’estpas un manquement de respect à l’égardde mon culte qui est une Suisse en termesde démocratie». Malgré les critiquesqu’ont pu susciter ses initiatives, João-zinho da Goméia a été l’un des plusgrands promoteurs de la reconnaissancesociale du candomblé. En 1967, il fait laune de O Cruzeiroqui consacre huit pagesaux parures rituelles des divinités du pan-théon. En 1970, il incarne son propre rôledans le film Copacabana mon amour, deRogério Sganzerla, où on le voit réaliserdes rites purificatoires sur le personnageinterprété par Helena Ignez, muse ducinéma expérimental brésilien.Les années 1960 et 1970 sont des

décennies fertiles pour le développe-ment de la musique populaire brési-lienne. La télévision, arrivée en 1950,s’installe dans les foyers, et promeut desfestivals musicaux qui, tous les ans, bat-tent des records d’audience. De la BossaNova à la Tropicália, les référents du can-domblé sont adoptés par les artistes etintellectuels, qui se lancent dans lacontre-culture, et à travers eux, par lesclasses moyennes, accédant aux biens deconsommation.Les Afro-sambas (1966), de Baden

Powell et Vinícius de Moraes, vont bienau-delà des emprunts instrumentaux ourythmiques et des termes liturgiquesglissés dans les paroles, pour évoquer demanière précise, les entités du candom-blé dans leurs spécificités musicales, dechamps d’action, de caractère. Ainsi, audébut des années 1970, avec l’essor desvidéoclips, Clara Nunes, chanteuse-interprète, construit sa carrière sur l’uni-

vers des traditions afro-brésiliennes nonplus stylisées, comme Carmen Mirandatrente ans plus tôt, mais revendiquéescomme vécues. À chaque entretienaccordé à la presse, l’artiste souligne sonappartenance religieuse. Dans Conto deareia, vidéoclip diffusé sur TV Globo en1974, un dimanche à 20 heures, ClaraNunes, en tenue rituelle, évolue entou-rée de personnages, véritables vignettesdu culte, qui arborent les parures etinsignes de leur divinité.En 1972, en hommage à la prêtresse

d’un célèbre lieu de culte de Salvador,Dorival Caymmi compose Oração deMãe Menininha, devenue un hymnepopulaire, repris par deux célèbres chan-teuses Maria Bethânia et Gal Costa, ini-tiées du candomblé. En 1976, l’école desamba Mocidade independente de PadreMiguel choisit pour thème de son défilé,le fil narratif de la vie de cette religieuse,parmi les plus populaires de l’histoire. Laboucle semble bouclée. Née des percus-sions religieuses, la samba, devenue chefd’orchestre de la plus grande fête natio-nale - le carnaval - rend hommage à sasource, le candomblé. Avec la reconnaissance sociale, se met

en place un nouveau régime de visibi-lité que l’on peut qualifier d’«histoirede la mémoire»9. Il s’agit de fonder his-toriquement les éléments transmis parla mémoire orale du candomblé. PierreVerger en sera l’instigateur, entre autrespar la publication de sa thèse dans uneédition brésilienne en 1985, Flux etreflux du trafic des esclaves entre le Golfe duBénin et la Baie de Tous les Saints, avecl’appui de Fernand Braudel.

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Des années 1980 aux années2000 : le régime depatrimonialisation des cultes

À l’aube des années 1980, l’émissionde télévision Globo repórter programmeun documentaire sur le candomblé, Opoder do machado de Xangô, Le pouvoir dela double hache de Xangô, dieu de la foudre,réalisé par Paulo Gil Soares. Pierre Ver-ger, qui avait refusé de fournir les imagespour O Cruzeiro, contribue activementà l’élaboration du sujet qui a pour filrouge le voyage entrepris par un initiébrésilien au temple de sa divinité enterres africaines. Les similitudes entre desrites des deux continents sont soulignéesà travers les séquences montées en paral-lèle. Filmées dans leur contexte, lestranses ne font pas l’objet d’interpréta-tions médicales ou psychologiques. Ellesfont plutôt vaciller la voix off, qui com-mente, dans un mouvement d’empa-thie : « le puissant héritage […] surgit devantnous». Le candomblé devient ainsi rémi-niscence culturelle dont il serait possiblede retrouver les traces originelles.Lors de la seconde Conférence mon-

diale sur la tradition et la culture des ori-sas (divinités) en 1983, à Salvador, desresponsables de maisons de culte signentune lettre ouverte, largement relayéedans la presse : « Il est clair que notrecroyance est une religion et non unesecte syncrétique. […] Nous ne pou-vons pas penser, ni nous laisser pensercomme folklore, secte, animisme, reli-gion primitive ». Il s’agit de contrer lesstéréotypes désignant le candomblécomme «chose du Diable », «pratiques

africaines primitives ou syncrétiques »,ou moyen de «propagande touristique».Le tournant politique de la revendica-tion religieuse est amorcé.L’affirmation du candomblé comme

religion trouve un écho dans la sérietélévisée Mãe de santo, diffusée en 1990sur TV Manchete. Les mythes des enti-tés divines sont joués au travers des péri-péties vécues par les personnages àchaque épisode. En général, un événe-ment malheureux amène les protago-nistes à s’adresser à une maison de can-domblé qui prend rituellement encharge leur sort. Ainsi le spectateur estinvité à opérer la relation symboliqueentre la vie quotidienne et les épopéesqui racontent les ancêtres divinisés.Dix ans après la lettre ouverte de

1983, une de ses signataires, Mãe Stella,publie l’ouvrage Meu tempo é agora (Montemps est maintenant ). L’auteur expliquecomment elle dirige la maison de cultedont elle a la charge. Entre les lignes,s’édictent des normes destinées à éviterla «profanation» de la religion; la prin-cipale étant le respect de la hiérarchieinitiatique qui préserve, du regard pro-fane et donc des médias, les rites ditsinternes. Les publications10 de MãeBeata, directrice d’une autre maison,semblent affirmer qu’au-delà de ce quidoit rester secret, les adeptes du can-domblé sont détenteurs d’un savoir par-tagé qu’ils souhaitent diffuser : contes,proverbes, récits transmis par les anciens,un corpus porteur d’ethos traduisant unstyle, un mode de vie, d’être au monde. Lieu de culte, lieu de culture, les can-

domblés, à partir des années 1980, sont

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pris dans le mouvement d’historicisa-tion de la mémoire, symptomatique desclassifications au patrimoine historique.Les plus anciennes maisons bénéficientalors d’importantes subventions pour laremise en état de leurs constructions,souvent précaires. L’inauguration deschantiers subventionnés, en présence duministre de la culture, est largementreprise dans les médias, et sur le siteInternet du Ministère11. Avec Internet, les adeptes du can-

domblé se sont saisis de la toile. Désor-mais, une pluralité d’initiés narrent leursexpériences vécues sur leurs pages per-sonnelles, diffusent des articles desciences sociales, postent sur leur blogdes documents d’archives sur leurs mai-sons de culte. Le web est devenu aussiun lieu de visionnement des fêtes pu -bliques, souvent mises en ligne dès lelendemain de leur célébration. Le pré-sentisme induit par Youtube fait que cesévénements semblent immédiatementtransformés en objets que l’on pourraitdire patrimoniaux, c’est-à-dire com-mémorés12, vus, revus, glosés, com-mentés. Cette fragmentation médiatique des

modes d’institution du religieux n’estpourtant pas à confondre avec une déré-gulation généralisée des formes tradi-tionnelles car dans le même mouve-ment, Internet a remis en tension laquestion du partage entre ce qui peutêtre montré et dit, et ce qui doit être pré-servé et tu. Orkut et Facebook consti-tuent le salon privilégié de ces échangesdont la teneur varie selon que les dis-cussions se déroulent au sein des «com-

munautés» ou des «amis» - à l’accès plusou moins sélectif. Internet est également devenu un

lieu de militance politique pour le com-bat contre « l’intolérance religieuse». Ledéveloppement d’églises évangéliques,accompagnées de leur credo prosélyte,se traduit par des campagnes de com-munication offensives. Achetée par l’É-glise universelle du règne de dieu en2000, TV Record, deuxième chaîne dupays après TV Globo, consacre de nom-breuses émissions aux séances de prêcheet d’exorcisme où il s’agit d’expulser lesdivinités afro-brésiliennes du corps deses adeptes. Les bulletins internes de l’Église sont régulièrement condamnéspar les tribunaux pour utilisation abu-sive d’images de membres de candom-blé, présentés comme de dangereuxcharlatans. Les blogueurs du candom-blé dénoncent ces attaques évangé-liques, relaient l’actualité thématique,organisent et promeuvent des manifes-tations d’envergure nationale, telle ladésormais traditionnelle marche contrel’intolérance religieuse, le 21 janvier.En décembre 2009, un fait divers

ayant provoqué une véritable commo-tion nationale témoigne des nouveauxenjeux présidant aux relations entrecandomblé et médias dans le contextecontemporain. Au service d’urgenced’un hôpital de Bahia, les médecins,ayant réalisé des radiographies d’unenfant de deux ans, découvrent que soncorps a été transpercé de plus de cin-quante aiguilles. Son beau-père en seraitle responsable, ayant accompli des ritesde «magie noire » pour se venger de la

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mère de l’enfant. Aussitôt, Mãe Stella,prêtresse de Salvador, donne une confé-rence de presse : « les aiguilles n’existentpas dans le candomblé»13. Sur Youtube etles blogs, cette interview et ses différentsmontages repris des journaux téléviséssont immédiatement relayés. Le Jour national de combat contre

l’intolérance religieuse, créé par le gou-vernement en 2007, est célébré dans lesgrandes villes du pays au cours d’unemarche œcuménique. L’investissementdes adeptes de candomblé dans l’orga-nisation de cet événement fortementmédiatisé témoigne des nouvelles stra-tégies d’affirmation non seulement reli-gieuses, mais aussi politiques. À la veilledes élections de 2012, ces marchesconstituent un terrain de choix pourles campagnes électorales des différentspartis.

Le XXe siècle a donc vu les acteursdu candomblé modifier le regard et lalecture portés sur leurs rituels en se sai-sissant des médias. Ils ont opéré unedynamique de construction de leur visi-bilité religieuse, d’abord à travers la réha-bilitation de leurs traditions, puis lareconnaissance de leur mémoire histo-rique. Sur le web aujourd’hui, ils mar-quent la présence de leur identité col-lective et se livrent à leur propre exé-gèse. La grande fluidité d’Internet per-met d’ouvrir l’éventail des ressourcesidentitaires en multipliant les réseauxd’interaction à l’intérieur de l’hétéro-généité des maisons de culte. En ce sens,la toile n’entraîne ni dissémination par-ticularisante, ni homogénéisation glo-balisée, elle ouvre plutôt sur le renfor-cement des appartenances en tissant denouvelles relations inter-candomblés.

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Notes1 Elle l’est depuis la charte de 1824, qui poseles fondements de la monarchie constitution-nelle, deux ans après l’indépendance. Le textedéclare dans son Titre 1, article 5 : «La Reli-gion Catholique Apostolique Romainecontinuera à être la Religion de l’Empire.Toutes les autres Religions seront permisesavec leur culte domestique, ou particulier, enmaisons destinées à cela, sans aucune formeextérieure de templewww.planalto.gov.br/ccivil_03/constitui-cao/constitui%C3%A7ao24.htm- accès le 31janvier 2011. Traduction réalisée, comme lessuivantes, par l’auteur. 2 www.planalto.gov.br/ccivil_03/Leis/LIM

/LIM-16-12-1830.htm - accès le 31 janvier2011.3 La première constitution de la Républiqueproclamée en 1889 est promulguée en 1891.Le catholicisme cesse d’être religion officielle.La liberté de culte – public, cette fois-ci - estréaffirmée; le droit d’intervention de la policeen vue du maintien de l’ordre est souligné.Une disposition qui concerne directement lescultes afro-brésiliens, dans leur usage de tam-bours nécessaires à la célébration du culte.Constitution de 1891: www.planalto.gov.br/ccivil_03/Constituicao/Constitui%C3%A7ao91.htm - accès le 4/2/20114 Tia Ciata e a pequena Africa no Rio de Janeiro,Roberto Moura, éd. Funarte, Rio de Janeiro :

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1983 (p. 93).5 La rédaction de la constitution de 1934 faitapparaître, dans le paragraphe consacré à laliberté religieuse, l’expression, «bonnes cou-tumes », absente des textes précédents : «Laliberté de conscience et de croyance sontinviolables et le libre exercice des cultes reli-gieux est garanti, dès lors qu’ils ne contre-viennent pas à l’ordre public et aux bonnescoutumes».6 Arthur Ramos lui consacrera un grandnombre de publications entre 1932 et le débutdes années 1960.7 Júlio Braga, Na Gamela do feitiço, ed. UFBA,Salvador : 1995 (p. 157).8 Fernando de Tacca, «Candomblé – imagens

do sagrado» in Campos, Revista de antropologiasocial, São Paulo, 2003: 147-164 (p. 153).

9 François Hartog, Régimes d’historicité. Présen-tisme et expériences du temps, Seuil, Paris : 2002.

10 Caroço de Dendê : a sabedoria dos terreiros, Pal-las, Rio de Janeiro : 1997, Histórias que a minhaavó contava, Terceira Margem, São Paulo: 2004.

11 Pour un exemple récent, 11/02/2011 :www.cultura.gov.br/site/2011/02/11/ile-axe-opo-afonja-2

12 Charles Péguy, «Clio. Dialogue de l’histoireet de l’âme païenne» in Œuvres en prose com-plète, Gallimard/Pléiade, Paris : 1992.

13 www.youtube.com/watch?v=p13OekDCFpk&NR=1

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