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Concours du second degr Rapport de jury
Concours : CAPES INTERNE DE LETTRES
Sections : LETTRES CLASSIQUES ET MODERNES
Session 2015
Rapport de jury prsent par :
Anne VIBERT prsidente du jury
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SOMMAIRE
1. PRSENTATION DU CONCOURS
2. JURY DU CONCOURS
3. BILAN DE LADMISSIBILIT ET DE LADMISSION
4. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSIBILIT
5. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSION
6. RAPPORT SUR LPREUVE DE TRADUCTION IMPROVISE EN LANGUES ANCIENNES (OPTION LETTRES CLASSIQUES)
ANNEXES : EXEMPLES DE DOSSIERS POUR LPREUVE ORALE
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1. PRSENTATION DU CONCOURS
Le CAPES interne de lettres et le CAER correspondant ont vu leurs modalits modifies par larrt du 19 avril 2013. La session 2015 tait donc la deuxime de ces concours dans leur forme rnove. Si lpreuve crite est reste inchange et consiste toujours depuis 2011 en un dossier de reconnaissance des acquis de lexprience professionnelle (RAEP), lpreuve orale est, depuis la session 2014, une preuve sur dossier. On trouvera ci-aprs le texte de larrt dfinissant ces preuves.
En ce qui concerne lpreuve crite, nous redirons ici ce que disaient les rapports prcdents : nous insistons sur la ncessit de ne pas prsenter le mme rapport que celui fourni pour une sessions antrieure, quand bien mme celui-ci aurait obtenu une note qui a permis ladmissibilit. Tout lintrt du dossier de RAEP est de faire tat dune exprience rcente permettant de tmoigner au plus prs de ltat des comptences acquises et la rdaction mme du rapport doit tre considre comme un moyen de progresser dans sa pratique professionnelle. En outre, sagissant dun concours, les notes y ont une valeur relative et non absolue, et reprsenter le mme rapport ne garantit pas lobtention dune note similaire.
Nous attirons aussi lattention des candidats sur le fait que le dossier de RAEP doit tre personnel et doit rendre compte dune exprience pdagogique quils ont rellement conduite : si des squences trouves sur internet ou mme des analyses de squence peuvent tre des sources de travail, tout emprunt doit tre signal sous peine de relever du plagiat. La session 2015 a malheureusement connu plusieurs cas de plagiat qui ont conduit le jury signaler les dossiers concerns et ont pu entraner, dans certains cas, une exclusion du concours.
Le jury valorisera linverse les rapports qui rendent compte dune exprience personnelle, avec ses russites et ses questionnements comme ses difficults, qui sont nourris de lectures et de rfrences de premire main et qui, sils prennent appui sur des propositions labores par dautres, non seulement signalent ces emprunts mais sont capables de les adapter un autre contexte et de les mettre en perspective.
Lpreuve orale a confirm son caractre exigeant mais galement ouvert aux propositions des candidats. Elle suppose quon sy prpare en lisant rgulirement pour dvelopper ses comptences de lecteur et sa culture littraire, quon dveloppe ou conforte ses connaissances linguistiques et sa rflexion didactique. Elle suppose aussi quon sy entrane pour prendre la mesure de sa dure (3 heures 50 au total) et de la gestion du temps quelle suppose dans ses diffrentes parties mais aussi pour matriser sa communication orale et faire preuve de ractivit dans lchange avec le jury. Des candidats qui avaient bien compris les objectifs de lpreuve et maitrisaient les tapes de son droulement ont su lire vritablement les textes du dossier et faire partager au jury des propositions de squence convaincantes, nourries de leur exprience denseignant et de leur culture personnelle, susceptibles de nourrir en retour les lves, de les intresser et de favoriser leurs apprentissages. La moyenne dadmission du concours en lettres modernes est dailleurs plus leve en 2015 quen 2014, alors que le nombre de postes tait suprieur en 2015, pour le CAPES et plus encore pour le CAER, signe que les candidats se sont mieux prpars et ont abord lpreuve en connaissance de cause. La situation est plus proccupante en lettres
4 classiques o le vivier des candidats est peu important et o on a vu certains se prsenter cette anne encore avec des connaissances lacunaires ou inexistantes dans une des deux langues anciennes qui font lobjet de lpreuve de traduction improvise. Or loption lettres classiques sadresse des candidats qui ont fait du latin et du grec et lpreuve orale permet de vrifier quils ont des connaissances dans les deux langues, mme sils nont pas eu loccasion denseigner le grec.
Enfin, quil sagisse des lettres modernes ou des lettres classiques, rappelons quau-del de la prparation aux preuves du concours, on attend plus gnralement des candidats quils fassent preuve non seulement des connaissances ncessaires la matrise de la discipline mais encore de la culture, de louverture desprit, et de la curiosit intellectuelle et artistique ncessaires aujourdhui comme hier un professeur de lettres.
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Nouvelles modalits du CAPES interne compter de la session 2014
Arrt du 19 avril 2013 Section lettres Les candidats ont le choix au moment de l'inscription entre deux options : - option lettres classiques ; - option lettres modernes. Les candidats proposs pour l'admissibilit et pour l'admission par le jury du concours font l'objet de classements distincts selon l'option. A.Epreuved'admissibilit Epreuve de reconnaissance des acquis de l'exprience professionnelle dfinie l'annexe III (coefficient 1). Pour les candidats ayant choisi l'option lettres classiques, le dossier de RAEP porte, au choix du candidat au moment de l'inscription, soit sur le franais, soit sur une langue ancienne (latin ou grec). B.Epreuved'admission Epreuve professionnelle. Dure de la prparation : deux heures et trente minutes. Dure totale de l'preuve : une heure et vingt minutes maximum (dure de l'expos : quarante minutes maximum ; dure de l'entretien : quarante minutes maximum). Coefficient 2. L'preuve comporte : 1. Une analyse d'une situation d'enseignement. Le jury propose au candidat un dossier de nature professionnelle et prcise le niveau d'enseignement (collge ou lyce) auquel la situation d'enseignement doit tre aborde. L'preuve consiste laborer, pour un niveau donn et partir d'un dossier comportant un ou plusieurs textes littraires ventuellement accompagns d'un ou de plusieurs documents, un projet de squence d'enseignement assorti de l'explication d'un texte de langue franaise choisi par le jury. La mthode d'explication est laisse au choix du candidat. La squence devra comporter une sance d'tude de la langue. 2. L'expos est suivi d'un entretien qui a pour base la situation d'enseignement propose et est tendu certains aspects de l'exprience professionnelle du candidat.
a) Il inclut, pour les candidats de l'option lettres modernes, un temps d'interrogation relatif la matrise de la langue franaise et comportant une ou plusieurs questions d'analyse grammaticale (dure : dix minutes maximum) ;
b) Il inclut pour les candidats de l'option lettres classiques une traduction improvise, sans dictionnaire, d'un court texte de latin ou de grec choisi par le jury parmi les auteurs du programme des classes (dure : dix minutes maximum).
Pour les deux options, le programme de l'preuve est celui des lyces d'enseignement gnral et technologique et des collges.
Lors de l'entretien, dix minutes maximum pourront tre rserves un change sur le dossier de reconnaissance des acquis de l'exprience professionnelle tabli pour l'preuve d'admissibilit, qui reste, cet effet, la disposition du jury.
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2. JURY DU CONCOURS
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3. BILAN DE LADMISSIBILIT ET DE LADMISSION
Option lettres modernes
CAPES CAER
Nombre de postes 111 105 Nombre dinscrits 1497 817
Nombre de candidats non limins 788 560 Barre dadmissibilit 10 / 20 10 / 20
Nombre dadmissibles 249 236
Moyenne des candidats admissibles 11,08 / 20 11,08 / 20
Nombre de candidats non limins et prsents loral
235 218
Nombre dadmis 111 105
Barre dadmission de la liste principale
10 / 20 10 / 20
Moyenne des candidats admis sur liste principale (total de ladmissibilit et de ladmission)
12,92 / 20 13,25 / 20
Option lettres classiques
CAPES CAER
Nombre de postes 16 11
Nombre dinscrits 78 40 Nombre de candidats non limins 40 24
Barre dadmissibilit 7 / 20 7 / 20
Nombre dadmissibles 30 16 Moyenne des candidats admissibles 10,03 / 20 9,69 / 20
Nombre de candidats non limins et prsents loral
26 12
Nombre dadmis 16 11
Barre dadmission de la liste principale
8,67 / 20 9,67 / 20
Moyenne des candidats admis sur liste principale (total de ladmissibilit et de ladmission)
11,07 / 20 13,44 / 20
12 4. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSIBILIT
PREUVE DE RECONNAISSANCE DES ACQUIS DE LEXPRIENCE PROFESSIONNELLE (RAEP)
Rapport prsent par Adeline LIBERT
Fonde sur un dossier devant permettre dvaluer les acquis de lexprience
professionnelle des candidats, lpreuve dadmissibilit du CAPES interne et du CAER nest
plus nouvelle et les dossiers en conformit avec les attentes du jury sont de plus en plus
nombreux. Pour cette quatrime anne dexistence de lpreuve, on est nanmoins surpris de
constater que trop de dossiers continuent de ne pas satisfaire aux exigences fixes par le
ministre et prcises chaque anne par les rapports de jury. Tandis que Jean-Pierre Grosset-
Bourbange revenait la suite de la session de 2012 sur la prsentation matrielle du dossier et
posait les principes fondamentaux de lpreuve, les rapports de Christine Deronne et Sylvain
Gonzales mettaient laccent lun sur la question de la problmatisation et de lanalyse de la
situation denseignement, lautre sur les modalits dcriture dun texte qui est un exercice
de communication devant permettre de saisir en deux pages un parcours professionnel et
en six pages une ralisation pdagogique significative . Un candidat soucieux de se
prparer srieusement au concours ne saurait faire lconomie de la lecture de ces trois
rapports, dans la continuit desquels se situe celui-ci.
Pour enrichir la rflexion du candidat sur les attendus du dossier RAEP, nous partirons
de la notion de choix, qui prside invitablement lcriture dun tel dossier puisquil sagit
de montrer au jury, dans les huit pages imparties, plus quelques annexes, toutes les facettes de
lenseignement : une certaine manire de savoir, de transmettre et de questionner, une volont
de partager, de construire et de sengager, afin que les lves en retour construisent leur
propre rapport au savoir et au monde.
Choisir, cest galement le quotidien des enseignants, tous les moments de la
prparation des cours et de la vie en classe. Nous tenterons ainsi dans un second temps de
donner aux candidats quelques conseils sur la manire dont ils peuvent en rendre compte.
Enfin, nous souhaitons revenir sur le joli mot dlve, qui renvoie lide dune
lvation rendue possible par une situation denseignement. Comment montrer dans un
13 dossier RAEP ce que lon met en uvre pour faire grandir, spanouir et ouvrir au monde
ceux dont on a la charge ? partir de quelques exemples, nous nous pencherons sur cette
question dans le troisime temps de ce rapport.
Prcisons demble tout ce que ces lignes doivent lensemble des membres du jury,
aux nombreuses remarques que jai reues, et aux fructueuses discussions qui ont
accompagn chaque tape de cette session 2015. Que chacun en soit remerci.
I. LES CHOIX QUI PRSIDENT LCRITURE DU DOSSIER
1.1. Rendre compte dun parcours professionnel
Dans leur grande majorit, les candidats ont saisi les enjeux de cette premire partie de
leur dossier et proposent au jury une approche rflexive de litinraire qui les a mens se
prsenter au concours. Dans les deux pages qui leur sont imparties, ces candidats ne se
contentent pas dun simple rcit de leurs expriences, et parviennent, au-del du factuel,
donner du sens un faisceau dvnements, de ralits et de choix professionnels ayant abouti
au projet dtre titularis au sein de lducation nationale comme professeur de lettres.
Chaque parcours a sa logique et ses spcificits quil convient au candidat de mettre en
vidence, sans luder, le cas chant, les changements dorientation professionnelle, qui sont
souvent riches et significatifs et dont on aurait tort de croire quils sont rdhibitoires. On
regrette aussi que tel candidat titulaire dune matrise dhistoire nexplicite pas les raisons
layant port se prsenter un concours de lettres, et lon aurait aim que cette autre
candidate dispose prparer le concours de professeur des coles explique ce qui a amen
lun de ses enseignants lui conseiller de [s]inscrire pour faire des remplacements , la
considrant davantage faite pour le second degr , considration qui par ailleurs na suscit
aucun commentaire.
Sans doute par crainte dtre disqualifis, certains candidats ne mentionnent pas leur
formation initiale. Cela permettrait pourtant de se faire une ide de lassise culturelle et
mthodologique avec laquelle le candidat sest lanc dans la vie professionnelle, sachant l
encore quun engagement rcent mais justifi dans la voie des lettres ne prsage pas moins de
qualits littraires et pdagogiques que le maladroitement rebattu jai toujours voulu tre
14 professeur de franais . De mme, le jury nest ni plus ni moins sensible une longue
exprience de lenseignement du second degr qu un parcours professionnel commenc
dans un domaine trs diffrent. L encore, tout est dans la justification. La cohrence dun
parcours est rendue par un cheminement rtrospectif, il s'agit donc d'un processus de
construction et danalyse.
On rappellera enfin que si le premier rapport saluait un bon usage du rfrentiel de
comptences de lenseignant, le rapport rdig par Sylvain Gonzals mettait en garde contre
certaines drives visant plaquer inutilement des rfrences des documents officiels, sans
que la rflexion sen trouve enrichie. Nous en profitons pour renouveler le conseil qui avait
t donn de recourir, de faon modre, aux notes de bas de page, lorsque celles-ci
permettent dallger le propos, et nous suggrons par ailleurs aux candidats dviter les
parenthses qui court-circuitent la logique du discours.
travers son retour rflexif sur ses comptences et ses expriences, il sagit donc bien pour le
candidat de faire des choix dans la manire dont il mettra en lumire les grandes tapes de son
exprience professionnelle et danalyser les moments clefs de son parcours en fonction du
projet quil manifeste en se prsentant au concours.
1.2. Choisir une exprience pdagogique
Le jury ne saurait assez insister sur la ncessit de prsenter une exprience personnelle.
La reprise sans vritable appropriation dune squence de manuel, dactivits pdagogiques
ou de squences mises en ligne sur les sites acadmiques (ou dautres sources plus ou moins
valides par les instances officielles) rend le travail du jury plus difficile, car il doit faire la
part de ce qui relve du candidat, et de ce qui a t conu par ailleurs. Lhonntet
intellectuelle exige que toute source soit mentionne. Aussi convient-il que les candidats
prcisent en note les rfrences des manuels, des ouvrages et des sites consults
pralablement ou au cours de lexprience pdagogique quils prsentent.
On dplore de devoir mentionner ici des cas de plagiat particulirement regrettables pour des
enseignants, lesquels sont en premire ligne dans la lutte contre lineptie pdagogique du
copier-coller. Cest dommageable lorsque la reprise de sources extrieures sans citations ni
rfrences explicites est le fait dlves, cest affligeant lorsquelle mane de professeurs, qui
plus est en situation de concours. Pour viter dimposer au jury de faire lui-mme la part de ce
qui relve de leur parole et de ce qui a t emprunt, nous invitons les candidats tre trs
15 rigoureux dans leurs rfrences. La reprise de paragraphes entiers, voire de pages compltes,
relve videmment de la tricherie et les dossiers concerns, fort heureusement une infime
minorit, sont sanctionns par une note trs basse.
Enfin, on rappellera que les conditions dune bonne communication ncessitent que le
rcepteur sache de quoi il est question, et que, par exemple, la rfrence aux textes littraires
soit prcise. Par rigueur, le candidat peut prciser de quel livre est tire telle fable de La
Fontaine, par ncessit, il convient de prciser pour un pome le nom du recueil do il
provient, ou encore la situation dun passage extrait dun roman ou dune pice de thtre.
Enfin, on aimerait que les candidats contextualisent mieux les textes choisis, et en prcisent
avec concision et efficacit les enjeux, afin que le jury puisse concrtement suivre les analyses
littraires et les dmarches pdagogiques mises en uvre. En revanche, il est inutile
denvoyer une copie du texte en question, ce nest pas le rle des annexes.
Ces prcisions tablies, nous laisserons la parole une candidate qui soulve explicitement
La question que tous se posent : Faire un choix au niveau de la squence est mon
humble avis un vrai dilemme. Quelle squence va reprsenter au mieux le travail accompli
avec les lves ? .
Il est vident que ce choix est primordial, et certains candidats se fourvoient. Ainsi on a pu
lire un dossier intressant sur des activits dexposs mens par des lves autour de romans
daventures, mais le travail ordinaire de la classe tait compltement occult, rendant le
dossier extrmement difficile valuer. Autre exemple, une candidate prsente deux sances
de langue sur la phrase complexe : ce choix dactivit a le mrite de proposer une rflexion
sur la grammaire, trop peu souvent prise en charge par les candidats, mais la liste de toutes les
phrases inventes par la candidate tait-elle ncessaire ? Le tout aurait mrit de gagner en
concision, et dtre augment dune prsentation de la manire dont la notion a pu tre
rinvestie dans des activits de lecture ou dcriture La dernire phrase du dossier est
dailleurs significative : Mais ai-je contribu structurer leur pense ? . Cest justement sur
cette question que le jury aurait aim lire au moins lesquisse dune rponse.
Heureusement, cette session a t riche en propositions de squences ou dactivits
vritablement originales, avec notamment des problmatiques intressantes et des choix de
textes moins souvent proposs aux lves que ceux que lon trouve dans de nombreux
manuels de collge, descriptifs pour loral du baccalaurat au lyce, ou encore sur Internet.
Un enseignant qui se contente de reprendre ce que dautres ont construit avant lui oublie que,
16 parmi les comptences requises communes tous les professeurs, figure celle-ci :
construire, mettre en uvre et animer des situations d'enseignement et d'apprentissage . Ce
rle de btisseur est une inpuisable source de satisfaction pour les enseignants, et certains
dossiers savent adroitement en tmoigner.
Par ailleurs, on aimerait croire quil ny a pas que la nouvelle fantastique ou la nouvelle
raliste dans le programme de 4e, et que pour cette dernire il existe dautres uvres que La
Parure ou Aux champs de Maupassant Certes, par la force des choses, les candidats
prsentent souvent des squences de dbut danne, mais le peu de varit dans le choix des
entres du programme en dit long sur la manire dont les progressions annuelles ont tendance
se figer sur un cheminement plutt quun autre.
Ajoutons quil convient de proposer une exprience pdagogique rcente, et quil est
souhaitable que les candidats qui ont dj prsent le concours fassent voluer leur dossier,
ventuellement en r-exploitant lactivit pdagogique prsente avec une autre classe, et
avec les modifications quun enseignant apporte ncessairement dans sa reprise de travaux
antrieurs.
Aux candidats qui ne peuvent prsenter une exprience professionnelle directement en lien
avec lenseignement du franais et de la littrature, il nous semble important de rappeler que
lactivit prsente doit donner lieu une proposition de transferts didactiques et
pdagogiques. Un dossier bien construit sur un travail ralis en classe de CE2/CM1 visant
faire dcouvrir aux lves luvre de Jules Verne et notamment son roman Voyage au centre
de la terre na malheureusement pas pu obtenir une note suffisante parce quaucune vritable
transposition de cette ralisation pdagogique avec des lves de collge na t propose,
alors que le programme de 5e et son entre sur le roman daventure aurait pu tre lobjet
dun rinvestissement intressant. Dautres professeurs des coles sont mieux parvenus
convaincre le jury grce un va-et-vient constant entre les activits proposes, notamment sur
le rcit Alice aux pays de merveilles de Lewis Caroll, et un travail susceptible dtre men en
classe de 6e.
Le jury salue par ailleurs les candidats qui, dans des conditions parfois compliques,
parviennent se faire prter une classe pour quelques sances afin de sortir de la situation
priphrique dans laquelle ils se trouvent. Dautres, qui enseignent luniversit ou
destination dlves non francophones, sont parvenus montrer une rflexion convaincante
sur la manire dont lactivit quils prsentent serait susceptible de nourrir une squence
17 denseignement ou une activit en classe de franais. En revanche, pour un module de
remobilisation et de raccrochage , un atelier sur la posie comme fentre sur le monde ,
nous considrons qu'il est trop limit de se contenter dune conclusion telle que : ce projet
datelier me semble transposable dans une classe de secondaire classique : tout lve,
particulirement ladolescence, a besoin de se construire par lexpression .
Pour terminer sur la question des choix de lactivit propose, telle candidate qui
accompagne deux lves anglaises scolarises en classe de 5e et 4e et se demande si cette
exprience sera reconnue comme une exprience professionnelle dducation , le jury a
rpondu oui (une telle question, inhrente lcriture du dossier et aux choix possibles plus
ou moins tendus en fonction de lexprience de chacun, ne mritait cependant pas dtre
pose explicitement), mais na pas t convaincu par les choix didactiques et pdagogiques
oprs pour rsoudre les difficults propres aux enfants anglophones dans leur apprentissage
de la langue franaise.
1.3. Analyser cette exprience dans une prsentation adquate et avec des mots
choisis
Lanalyse doit tre omniprsente. Elle nquivaut pas un bilan, ni une simple prise
de recul mme si celle-ci est ncessaire. Trop de candidats pensent que la dimension rflexive
de leur dossier commence aprs la prsentation de lactivit propose ; or elle doit tre
permanente. Analyser, cest revenir sur les choix que lon a faits, sen expliquer et continuer
les questionner. Cest pourquoi diviser les six pages dvolues la prsentation de lactivit
pdagogique tel que le fait un candidat qui spare le droulement de la squence et un
bilan et retour rflexif sur la squence ne nous semble gure pertinent. La prsentation
dune squence ne se rsume dailleurs en aucun cas un droulement de celle-ci, et trop de
candidats numrent les unes aprs les autres les activits menes, sans donner voir et
comprendre les articulations qui permettent de passer de lune lautre, les chos, les
approfondissements, les retours, qui seffectuent dans toute dmarche pdagogique rflchie.
Cest pourquoi la prsentation chronologique, sans tre rdhibitoire, nest bien souvent pas la
plus efficace. Dans le cas frquemment choisi de la prsentation dune squence pdagogique,
le candidat doit avoir cur dorganiser une restitution mme de rendre compte
efficacement de la problmatique mise en uvre, des savoirs pris en compte, des comptences
vises, des activits qui ont t menes, et plus gnralement de toute cette attitude rflexive
qui est au cur des mtiers de lenseignement.
18 Nous attirons ici lattention des candidats sur limportance de la prsentation matrielle du
dossier, qui, tout en respectant les contraintes fixes par les instances officielles, doit
permettre une lecture fluide, avec ventuellement quelques titres susceptibles dimprimer une
dynamique au propos. Labsence de retrait en dbut de paragraphe impose aux candidats ne
doit pas les empcher de recourir au passage la ligne pour marquer un changement dide, et
un espacement dune ligne lorsquils le jugent ncessaire, afin darer leur texte et den
matrialiser la logique.
Nous invitons les candidats tre particulirement attentifs aux mots quils emploient. Un
professeur de lettres sait que chaque mot compte, et que les formulations ne sont pas
anodines. Lorsquune candidate affirme avoir pris conscience en corrigeant ses copies que ses
attentes taient trop grandes , elle semble rejoindre cette annonce bien maladroite dune
autre candidate : si je devais recommencer, je me montrerais moins ambitieuse . Car peut-
on tre trop ambitieux, ou avoir trop dattentes vis--vis de ses lves ? Une formulation plus
juste aurait analys lcart entre les ralisations espres et la ralit, afin ventuellement de
justifier une autre approche, non pas moins ambitieuse, mais en meilleure adquation avec des
contraintes matrielles (par exemple le temps limit dvolu la ralisation dune squence),
ou mieux mme de faire progresser les lves avec les objectifs que lon sest fixs et qui
doivent bien sr tre en conformit avec les programmes officiels.
Souvent, aprs avoir videmment indiqu le niveau concern par lexprience pdagogique
propose, lentre des programmes qui est en jeu, et ventuellement la progression annuelle
dans laquelle lexprience sinscrit, les candidats prsentent le profil de la classe ou des
classes impliques. Cest bien sr fondamental. Cependant, l encore la manire est
essentielle. Les candidats donnent parfois limpression de compartimenter leurs classes entre
lves dys (sic) et lves prcoces, avec des dnombrements prcis qui ne permettent
finalement gure au jury de se rendre compte de latmosphre dune classe alors que dautres
candidats russissent camper tout au long de leur dossier un climat de travail et un certain
profil de leurs lves, sans tomber dans un jugement de valeur du type le niveau intellectuel
de mes lves est correct .
Autre mise en garde, certains candidats semblent croire en lexistence de mots magiques
dont la seule mention suffirait. Ainsi le terme significatif na rien de performatif et
lemploi de cet adjectif ne prsage de rien. Dautre part, certains candidats semblent penser
que faire une distinction thorique entre valuation diagnostique et valuation
sommative suffit justifier de la pertinence des consignes dun devoir, que mentionner sans
19 lexpliciter une dmarche inductive ou affirmer sans rien en dire que lon pratique une
pdagogie diffrencie remplacent lanalyse dune pratique pdagogique efficace et
soucieuse de ses lves. Il ny a pas non plus des mots attendus qu'il serait ncessaire
d'employer et on met en garde les candidats contre un jargon non matris venu des sciences
de lducation.
loppos de ce jargon, on dplorera labsence de rflexion lexicale dun candidat qui
nhsite pas dire quil a saucissonn la nouvelle tudie avec ses lves. Enfin, sans
tablir la liste des nombreuses coquilles releves, et qui semblent dans certains cas tmoigner
de lacunes dommageables au niveau des rgles daccord ou en matire de conjugaison, on se
permettra de rappeler aux candidats quune phrase contenant une proposition subordonne
interrogative indirecte ne se construit pas de la mme manire quune phrase interrogative, et
que la question Comment lauteur fait-il comprendre son point de vue au lecteur ? devient
dans une tournure assertive : Nous nous demanderons comment lauteur fait comprendre
son point de vue au lecteur. .
1.4. Ne pas occulter limprvu
De nombreux candidats semblent croire quils gagnent en crdibilit en ne mentionnant
pas les imprvus qui ne manquent pas de rythmer le quotidien des professeurs. Or enseigner,
cest devoir faire face des imprvus, ne serait-ce que parce que des ajustements sont
ncessaires par rapport ce qui a t pens en amont. Cest pourquoi les prsentations qui
listent des sances une par une sont trs rarement les plus efficaces. Les dossiers gagneraient
questionner les carts, modulations, et autres surprises qui accompagnent toute ralisation
pdagogique. Pour illustrer brivement ceci, nous aimerions citer, propos dune sance en
histoire des arts, une remarque dune candidate qui a laiss le jury perplexe : je navais pas
anticip les questions incongrues sur la nudit ou sur les tableaux abstraits . Outre que
ltonnement des lves pouvait tre prvisible, on est drang ici de ce quune question
lgitime puisse tre perue comme incongrue.
linverse, une phrase du type jai alors dcid de pallier la difficult en bouleversant ma
progression est de bon augure, de mme que semble pertinente la dcision suivante cet
crit a t not alors que ce ntait pas prvu car il a t trs bien russi par les lves. , ou
encore ce constat bien explicit par ailleurs : ltude de la langue la plus difiante a t sans
doute celle qui reposait sur les connecteurs. Paradoxalement, cest une sance qui ntait pas
20 prvue en tant que telle quand jai prpar la squence, mais le travail sur les connecteurs
sest avr un outil indispensable pour comprendre la nouvelle "Un mariage damour" .
Notons enfin que les alas des remplacements imposent parfois de tenir compte des choix dj
engags par le professeur dont on reprend la classe. Or certains candidats parviennent
tourner cette contrainte leur avantage en montrant comment ils trouvent leur place dans une
ralisation pdagogique amorce par quelquun dautre. Nous citerons assez longuement une
candidate qui, aprs avoir dcouvert en dbut de remplacement des lves trs rticents et
hostiles aux savoirs enseigns, a su rorienter une squence sur la posie engage pour mieux
impliquer ses lves rfractaires : Llaboration de cette squence repose sur une volont de
trouver un questionnement qui fasse effectivement sens pour ces lves []aborder
frontalement et au moyen des seuls savoirs universitaires la notion dengagement en posie ne
semble pas cohrent dun point de vue pdagogique. [] Les textes sont donc choisis afin
que soient progressivement dvoils les enjeux de la posie engage, et afin quils puissent
rgulirement clairer la problmatique initiale suivante : dans quelle mesure lcriture
potique peut-elle tre une forme dexpression efficace de la colre ?
II. LES CHOIX LIS CE QUE LON VEUT TRANSMETTRE AUX LVES
2.1. Matriser les savoirs savants
Il est vident que les connaissances littraires et linguistiques dun professeur de
franais doivent tre assures. Cependant, que les candidats nayant pas une solide formation
initiale en littrature se rassurent : choisir lenseignement, cest aussi savoir que lon na
jamais totalement explor la discipline que lon a lue, et la manire dont les savoirs savants
sont abords dans les dossiers est souvent une indication prcieuse sur les rapports
questionnant et curieux que leur auteur entretient avec lhistoire littraire, les textes, les outils
danalyse, les savoirs grammaticaux. Certains candidats parviennent montrer comment des
lectures scientifiques ont nourri leur rflexion, et lon sest flicit, par exemple, de voir que,
sur le registre fantastique, tel candidat ne sest pas content des analyses bien connues de
Todorov, avec notamment des rfrences matrises et utiles louvrage de Pierres-Georges
Castex Le conte fantastique en France, de Nodier Maupassant, paru aux ditions Corti.
Nous mentionnerons galement le dossier dune candidate qui, prsentant une squence en 6e
21 sur le conte merveilleux, a su sappuyer sur une bibliographie savante trs riche dont elle sest
servie avec beaucoup de pertinence. L encore, tout est dans les choix et la manire, car
transposer des savoirs savants pour en faire bnficier les lves et accrotre leurs
comptences de lecture et dcriture suppose de trier, hirarchiser les informations, et les
adapter sans en modifier lessence.
En matire dhistoire littraire, certains candidats gagneraient relire les manifestes ou crits
thoriques posant les bases de telle cole, de tel mouvement, puis de simprgner des uvres
qui en dcoulent. On viterait de fcheuses remarques, telle cette candidate qui considre que
les personnages fictifs des romans ralistes constituent une limite au ralisme. Concernant les
outils narratologiques, les lments de rhtorique, le vocabulaire de lanalyse dun texte
argumentatif ou thtral, certains candidats semblent manquer de recul : les notions de point
de vue ou de focalisation ne semblent pas toujours trs claires, de mme que les ralits
linguistiques auxquelles renvoient certaines figures de style. Il pourrait tre judicieux que les
candidats lisent ou relisent la partie Discours du rcit de Grard Genette dans son essai
Figures III, de mme que certains ouvrages de la collection 128 chez Nathan Universit
pourraient les aider affermir leurs connaissances scientifiques. Quelle que soit leur
formation initiale, les enseignants se doivent davoir un esprit rigoureux et clair, et on ne
comprend pas que certains candidats utilisent le terme monologue pour faire rfrence
une tirade, ou emploient indiffremment les mots genres ou thme , avec des
formulations du type : ma squence a port sur le thme de la posie .
Aprs ces quelques constats, il nous semble indispensable de rappeler le bon usage de ces
savoirs savants, qui sont au service des textes quils doivent permettre dclairer, denvisager
dans toute leur richesse et leur profondeur. Ils doivent ainsi rester des instruments permettant
de saisir la singularit des textes, leur polysmie constitutive, pour que se joue ce dialogue
entre des consciences et des sensibilits qui est lun des grands enjeux de la littrature. En ce
sens on ne saurait trop recommander aux candidats de frquenter le plus souvent possible les
auteurs travers leurs uvres intgrales. Mme lorsque lon travaille sur des groupements de
texte, la construction dune lecture analytique est souvent bien plus riche lorsque lenseignant
connat luvre complte.
2.2. Sintresser la spcificit des textes
Les textes sont au cur du cours de franais. Aussi leur choix est-il primordial, et il
convient den rendre compte au sein du dossier RAEP. Avancer que lon a choisi tel conte
22 pour faire travailler ses lves sur le schma narratif notion qui rappelons-le nest plus
inscrite dans les programmes en vigueur ne justifie en aucun cas le choix de ce conte prcis
plutt quun autre. En outre, comment le professeur fera-t-il ensuite sentir ses lves que
personne, pas mme leur professeur, ne lit un conte pour reprer llment perturbateur, mais
parce que les contes parlent notre sensibilit et notre raison ?
Le rle de lenseignant est de tmoigner de la singularit de chaque texte, ce qui suppose une
stratgie particulire fonde la fois sur la spcificit de ce texte, et le profil des lves de la
classe. Ajoutons que trop de justifications sur le choix des textes proposs en lecture
analytique portent sur le niveau des lves, comme sil y avait un corpus duvres rserv
une lite, et un autre pour les lves dits en difficult . On apprcie au contraire la
remarque de cette candidate : au dbut jadaptais le texte en fonction du niveau des lves,
maintenant, jaborde plus facilement des extraits duvres dont le sens est moins explicite,
car llve, lorsquil parvient la comprhension dun texte difficile, ressent du plaisir et une
satisfaction.
Choisir, cest renoncer, aussi est-il intressant, lorsque le dossier repose sur la prsentation
dune squence, de mentionner les textes retenus dans un premier temps de rflexion sur la
squence, puis de montrer en quoi ils ont t carts. Lamour dun texte est videmment trs
important lorsque lon veut le faire aimer de ses lves, mais il est bon que les choix soient
rendus rationnels, comme dans le glissement qu'opre cette candidate entre ses gots et les
chos quelle souhaite susciter entre les textes dune mme squence, voire entre diffrentes
uvres travailles dans lanne : En texte complmentaire, jai choisi de travailler le conte
La Boule de cristal des frres Grimm. Jaime ce conte qui nest pas au programme mais
qui, comme le conte La Biche au bois de Madame dAulnoy, aborde le thme de la
mtamorphose. Thme qui sera abord en cours danne avec les Mtamorphoses dOvide.
Enfin, le jury est las des squences qui proposent des listes de textes sans lien plus prcis
entre eux que lentre du programme. Il apprcie les entres qui soulignent la cohrence du
corpus, par exemple une rflexion sur le mariage pour une squence en 4e sur le ralisme, un
travail sur la figure du pre dans le cadre des rcits denfance et dadolescence en troisime,
ou encore une approche du fantastique partir de la figure de la bte. De mme, dans le cadre
de ltude dune uvre intgrale, le choix des extraits ne simpose pas, il dpend de la
problmatique adopte.
23 Le travail sur la problmatique est un autre point essentiel de la rflexion pdagogique, et elle
doit tre bien dfinie pour que lon puisse saisir la manire dont un professeur oriente la
lecture des textes quil a choisis pour ses lves. Le rapport de Christine Deronne (session
2013) rappelait quune problmatique est une manire dinterpeller les lves, une question
quon leur pose pour quils sachent mettre en tension les textes, entendre des chos,
interprter des carts. Cest pourquoi la problmatisation ne va pas de soi, et il convient
dexpliquer ce qui a men telle ou telle formulation. Le titre de squence na pas la mme
fonction, et constitue avant tout un repre pour llve. Bien souvent la simplicit est
privilgie, ce qui est plus efficace que des jeux de mots douteux, mais le jury a galement
relev quelques trouvailles avec des formulations la fois rigoureuses et attractives.
La grande majorit des dossiers proposs par des enseignants en exercice dans le secondaire
rend compte de sances de lecture analytique. Cette restitution est un exercice difficile car il
sagit de montrer au jury comment les lves se sont empars du texte tudi pour quil leur
parle. Recourir un argument dautorit comme le fait cette candidate ne suffit videmment
pas : Yves Pinguilly a dit quil avait t tonn de la varit, de la pertinence des questions
sur son roman. Il a senti que les lves se ltaient appropri . On ne doute pas de la vracit
de cette remarque, mais malheureusement le travail de la classe tel quil avait t prsent na
pas permis au jury de sen faire une vritable ide.
Par ailleurs, le jury est trs sceptique lorsque les lectures analytiques semblent suivre un
schma immuable : prsentation biographique de lauteur, lecture du texte, questionnaire puis
rponses. On apprcie davantage la souplesse, par exemple dans le choix du lanceur , qui,
pour permettre aux lves de vritablement rencontrer le texte qui leur est soumis,
sappuie sur la spcificit du texte, de la classe et du moment, afin que la lecture analytique
soit un vnement dont llve saura se souvenir. On invite galement les candidats tre
attentifs aux fausses bonnes solutions, qui font prconiser par lun deux, partir dune
remarque pertinente selon laquelle les lves prouvent des difficults lire un texte loral
quils ne connaissent pas : la prochaine fois je donnerai lire les extraits en prambule des
sances . On doute quen dcouvrant seuls la maison un texte difficile, les lves soient
mieux mme de le lire voix haute une fois arrivs en classe.
24
2.3. Manifester la prise en compte des lves et de leur htrognit
Lexprience du jury dans la lecture des dossiers RAEP montre que cest lorsquil sent la
prsence des lves dans la classe quil peut se faire une ide suffisamment prcise de la
manire dont une activit a t mene. Certains candidats oprent des analyses remarquables,
et savent utiliser bon escient quelques paroles dlves pour montrer comment le cours a
progress, telle cette phrase par laquelle une candidate fait la jonction entre deux sances de
lecture analytique : un lve attentif ma fait remarquer que cette fois-ci Maupassant utilisait
beaucoup dadjectifs, linverse du prcdent extrait . Cependant, rendre prsents ses lves
dans le dossier, donner entendre les interactions entre le professeur et ses lves, ce nest
pas les citer tort et travers. Ainsi on se demande en quoi la phrase suivante apporte
quelque chose au dossier : Mdame vous dites des trucs chelous aujourdhui (sic). De
mme, il ne suffit pas daffirmer ce quil aurait fallu montrer, comme on a pu le lire dans un
dossier portant sur la lecture intgrale des Misrables : Les lves sont arrivs la
conclusion que les personnages sont empreints de la subjectivit de lauteur . Un tel propos
ne prend sens que si sont donns voir les moments qui ont permis aux lves de tirer cette
conclusion de leur lecture. Ainsi, les dossiers qui sappuient sur des gnralits ne permettent
pas au jury de se faire une ide des aptitudes de lenseignant.
Bien souvent, mentionner les erreurs des lves permet au jury de saisir les enjeux d'une
situation d'enseignement. Ainsi, une candidate voque les difficults rencontres par ses
lves pour se reprer au sein de la phrase complexe, puis explique les mtaphores quelle
utilise pour faire comprendre aux lves le rapport de la proposition subordonne la
proposition principale. Cette explication convaincante est plus utile au jury qui cherche
valuer des comptences pdagogiques quune mention du type les lves ont bien russi le
devoir, seuls trois nont pas eu la moyenne .
Un bon pdagogue doit bien entendu prendre en compte les spcificits de ses classes. Or le
jury regrette que cette prise en compte semble aboutir un tiquetage des lves, donnant
limpression que les choses sont figes et que les lves concerns sont condamns une fois
pour toutes avoir des difficults. Ainsi, en guise de pdagogie diffrencie, et avec
lintention louable doffrir les mmes chances de russite chacun , on en arrive des
solutions systmatiques du type : je donne toujours mes lves dys des textes trous
afin de leur faciliter la tche .
25 Le jury a au contraire t convaincu par de belles ides, tel ce candidat qui propose des jokers
ses lves, sous forme dindices et dides supplmentaires, pour les rengager dans une
criture dinvention quils peinent dployer.
Notons enfin que toutes les consignes donnes aux lves, quel que soit le travail demand,
doivent tre clairement exposes, avec une analyse des choix qui ont men telle ou telle
formulation.
III. Tmoigner dun esprit de rigueur et douverture
3. 1. Donner de la cohrence aux ralisations pdagogiques menes
Les lves sont sensibles la cohrence de ce que lon entreprend avec eux, et un
dossier RAEP bien men doit pouvoir en tmoigner. Un candidat fait le bon constat : jai
remarqu que les lves ont parfois des difficults percevoir le lien entre les diffrentes
sances et lordre de leur tude . Cependant la suite est dcevante : jattends par
consquent des lves quils ne perdent pas de vue les notions de la sance 1 car ils vont
devoir les conjuguer celles de la sance 2 . Les meilleurs dossiers rendent au contraire
compte de la manire dont les lves sapproprient un savoir ou un savoir-faire, en
tmoignant de moments de retour ou d'activits de bilan sur des notions vues antrieurement.
Dans le mme ordre dides, il parat difficile de prsenter un atelier dcriture qui ne soit pas
fond sur des lectures et un travail littraire sur des textes. Le jury a t sensible la manire
dont une candidate a su rellement rendre compte de l importance de la lecture dans le
processus de cration et dexpression crite , travers un travail sur deux nouvelles de
Maupassant, Le Modle et Une Vendetta , la seconde ayant t distribue sans son
incipit, que les lves ont t invits crire en fonction de la suite du rcit, mais aussi du
travail de lecture analytique propos pour lincipit de la premire nouvelle.
Au-del des annonces selon lesquelles la classe a progress en liant plaisirs et savoirs , ou
qu il est important avant tout de montrer que lon prend plaisir tudier et lire les textes
choisis , le jury a plusieurs fois eu la satisfaction de sentir une relle mise en apptit des
lves, et ce avec ce quils sont, leurs ventuelles rserves et rticences.
26
3.2. Ouvrir les lves lpaisseur du monde
Il est mille et une faons dintresser les lves au monde qui les entoure, de leur faire
prendre conscience que les textes dhier parlent aux hommes daujourdhui, quune vie,
ncessairement situe dans lespace et dans le temps, et avec dautres dterminations
historiques et sociales que les ntres, peut nanmoins ne pas nous rester trangre, tant il est
vrai, comme le dit Montaigne, que chaque homme porte la forme entire de lhumaine
condition . Il convient donc de dpasser le propos a priori pertinent dun lve sur Les
Bonnes de Genet, rapport par une candidate : on ne peut pas en vouloir Madame de ne
pas comprendre ses bonnes car on ne comprend pas ce quon na jamais vcu . Car la
littrature nous permet justement de nous projeter dans dautres univers et de vivre dautres
expriences que les ntres. Pourtant, cette aptitude nimplique nullement une confusion des
valeurs. Cest pourquoi on mettra en garde un candidat qui, dans une squence sur les
Lumires, a cru bon dorganiser un dbat sur le racisme dont on na pas compris quel tait
lobjet et dont on ose esprer quil na pas conduit certains lves dvelopper des arguments
en faveur du racisme. Une simple opinion na pas de lien ncessaire avec la vrit et ne mrite
pas forcment dtre dfendue.
Souvrir au monde, cest aussi ne pas tre ignorant de ce qui est proche, et certains
candidats montrent bien comment ils tiennent compte des particularits de leur rgion, dun
vnement ou dune commmoration clbre dans la ville o ils enseignent, pour proposer
des activits qui enrichissent le regard des lves sur une ralit quils navaient jamais
aborde dun point de vue rflexif.
Certains candidats parviennent enfin rellement articuler le cours de franais avec les
enjeux fondamentaux de toute ducation et de tout enseignement. Le jury a t enthousiaste
la lecture de propos sur la formation dune culture humaniste qui taient parfaitement articuls
la squence prsente. Mentionnons galement une problmatique de squence trs
ambitieuse dont le dveloppement na pas du le jury et qui visait montrer comment la
lecture des contes en 6e fait mditer les lves sur la condition humaine.
3.3. Le rle des annexes
Dans la prsentation de lpreuve pour la session 2016, il est indiqu que les candidats
peuvent joindre, sur support papier, un deux exemples de documents ou travaux, raliss
dans le cadre de l'activit dcrite, et qu'ils jugent utile de porter la connaissance du jury. .
27 On voit que le nombre des annexes doit ainsi rester limit, et quun choix rflchi est essentiel
la cohsion du dossier.
Comme cela a t prcis dans les autres rapports, il convient de rappeler aux candidats que la
photocopie dun texte connu ou dune page de manuel na pas dintrt. Un document
construit par lenseignant, la production dun lve, peuvent au contraire clairer la cohrence
du travail propos et tmoigner de la manire dont les lves ont progress, se sont appropri
une notion, ont t ports vers lautonomie, etc.
Par ailleurs, les pages dannexe ne viennent pas illustrer ce qui prcde, elles doivent tre
exploites au sein du dossier lui-mme, cest--dire explicites et analyses, la simple
mention de lannexe entre parenthses ne suffisant videmment pas montrer en quoi elle
claire le propos. Plutt que des copies entires, le jury apprcie quand on lui propose en
annexe des documents qui confrontent diffrentes tapes dun travail par un mme lve, ou
qui comparent diffrentes ralisations Sur des copies annotes, on sattend voir des
corrections significatives, voire un commentaire sur les corrections. Le contenu du dossier
appelle parfois de lui-mme un certain type dannexes, par exemple une rflexion sur
quelques crits ou fragments dcrits dlves lorsque la ralisation pdagogique met laccent
sur un travail dcriture, ou encore des transcriptions de temps forts dune sance de cours
ayant fait lobjet dune analyse particulire, des exemples de prise de notes dlves, un
tableau de synthse sur une notion, une carte mentale ralise par un lve, la photographie de
pages significatives dun cahier de voyage, un document pdagogique utilis comme support
une sance dhistoire des arts, etc.
Pour conclure, on voudrait avoir suffisamment insist sur limportance de la restitution
des dmarches, des choix oprs tous les moments de la ralisation pdagogique. Sil sagit
de rendre compte dune exprience, le dossier ne doit pas tre un simple compte-rendu parce
quau-del du factuel, lapproche doit tre dynamique. De mme quil est souhaitable quun
professeur ne cesse jamais de se remettre en question, un dossier RAEP qui ne rvle pas les
interrogations du candidat face aux choix quil est amen raliser ne permet pas de
reconnatre les acquis de lexprience professionnelle du professeur en question.
28 En toute conscience de la difficult de lexercice demand, nous souhaitons que la lecture de
ce rapport, la suite de celle des rapports prcdents, permette aux candidats de tmoigner
plus efficacement de leurs pratiques professionnelles.
29 5. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSION
EPREUVE DADMISSION
Rapport prsent par Pascal DUCHNE et Sylvie LELEU
Ce rapport qui sattache rendre compte des preuves orales de la session 2015 du
CAPES interne de lettres se veut une analyse constructive des observations faites par les
membres du jury. Il sinscrit dans la continuit des propos tenus dans le document rdig par
Catherine Daumas et Fabrice Carnet pour les preuves de 2014. Ceux-ci explicitaient le cadre
de cette rcente preuve dadmission dont les modalits sont dcrites par larrt du 19 avril
2013 paru au Journal Officiel du 27 avril 20131.
Le prsent rapport cherche quant lui complter les informations dlivres lanne
dernire et, en revenant sur les attentes du jury, affiner les conseils pour prparer au mieux
ces preuves, dun double point de vue, pratique et mthodologique. Ce rapport est donc
construit, dans une perspective de formation, comme une srie de rponses commentes aux
questions que les candidats peuvent se poser :
En quoi consiste lpreuve orale ?
Quels sont les sujets proposs ?
Quels auteurs retrouve-t-on le plus frquemment dans les sujets ?
Y a-t-il des auteurs inconnus ?
Quelle place donner aux documents iconographiques ?
Quelle forme peut prendre le corpus ?
Quel type de problmatique est attendu pour la squence ?
Comment faut-il organiser la prsentation de la squence ?
Faut-il proposer dtoffer le corpus ?
Faut-il prciser les travaux que les lves auraient faire dans la squence ?
1 http://www.education.gouv.fr/cid51250/descriptif-des-epreuves-capes-interne-caer-capes-section-lettres.html
30
Lexplication de texte doit-elle prendre une forme particulire ?
Quelle place donner la sance de langue ?
Quelles questions de langue peuvent tre poses ?
Sur quoi se construit lentretien ?
Y a-t-il un temps rserv pour des questions sur le Raep ?
Comment prparer loral au mieux ?
Ainsi, dans le bilan de cette session 2015 seront abords dans un premier temps les
sujets proposs, des auteurs, du corpus et de la forme du dossier. Ensuite, le rapport propose
une analyse des enjeux de la prsentation de la squence, de llaboration de la
problmatique, et de lexploitation du corpus. Puis il sefforcera de nourrir la rflexion de
chaque prparationnaire sur lexplication littraire et la question de la langue : la place et la
forme quelles peuvent prendre ainsi que les qualits ou les difficults rvles lors de
lpreuve. Enfin il s'attardera sur lentretien, qui constitue une situation de communication
spcifique, et conclura plus gnralement sur la ncessaire prparation aux diffrents aspects
de cet oral. Ce compte rendu a t rdig en prenant appui sur les remarques de lensemble
des membres du jury dont la prcieuse contribution, nous a permis dillustrer les diffrents
aspects abords par des exemples concrets : nous les en remercions vivement.
En quoi consiste lpreuve doral ?
Les candidats peuvent choisir entre une option Lettres Modernes et une option
Lettres classiques . Lpreuve orale est dote dun coefficient 2, soit le double de la note
attribue au dossier RAEP de lcrit. Loral, prcd dun temps de prparation de 2 heures, a
une dure dune heure vingt, rpartie en deux temps distincts :
- Les quarante premires minutes correspondent un expos du candidat, au cours
duquel il est engag dvelopper ses rponses aux consignes du sujet (projet de squence,
incluant une sance de langue et une explication de texte).
- Les quarante minutes suivantes sont consacres un entretien dialogu avec le jury,
portant dabord sur un point de grammaire ou sur une traduction de latin ou de grec selon les
31 options, puis au retour sur les propositions faites dans la premire partie de lpreuve. Ce
deuxime temps pourra galement comporter des questions portant sur le dossier RAEP. Les
candidats, pour ce faire, devront en apporter un exemplaire.
Quels sont les sujets proposs ?
La formulation de lnonc donn en dbut dpreuve est normalise. Cest pourquoi il
est important de se familiariser avec sa prsentation, sa formulation, et den tirer parti lors de
la prparation lpreuve. On y trouve, dans lordre, les lments suivants :
- La liste des extraits duvres et les documents qui constituent le corpus, comme, par
exemple :
1. Gustave FLAUBERT, Madame Bovary, Premire partie, V (1857)
2. Emile ZOLA, LAssommoir, extrait du chapitre 2 (1877)
3. Guy de MAUPASSANT, Bel Ami, partie 2, extrait du chapitre 7 (1885)
4. Emile ZOLA, Plan de la grande maison
- des indications sur la classe dans laquelle proposer la squence :
Dans le cadre de lenseignement de franais en classe de seconde.
- des prcisions sur les objets dtude :
.et plus particulirement de lobjet dtude le roman et la nouvelle
au XIXme sicle : ralisme et naturalisme .
- et enfin les diffrents lments traiter :
vous analyserez le corpus propos.
Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun
projet de squence qui comportera une sance dtude de la langue.
Vous proposerez lexplication du texte n1 : Gustave FLAUBERT,
Madame Bovary, 1857
La connaissance des programmes, de la sixime la premire, constitue la condition sine
qua non dune apprhension raisonne du sujet. Dans le cas du dernier sujet prsent, ayant
trait au ralisme et au naturalisme, un enseignant en collge ou en lyce, peut, partir de sa
32 matrise des textes officiels, cerner le sujet pour l'exploiter. L'objectif que le candidat peut se
fixer est de montrer comment le roman ou la nouvelle s'inscrivent dans le mouvement
littraire et culturel du ralisme ou du naturalisme, de faire apparatre les caractristiques d'un
genre narratif et la singularit des uvres tudies, et de donner des repres dans l'histoire de
ce genre. La frquentation rgulire des programmes permet chacun de cadrer et
contextualiser la prsentation de squence. Un prparationnaire rigoureux, susceptible
denseigner tous les niveaux, se doit de connatre lensemble des programmes
correspondants..
Voici un second exemple prsent sous sa forme finale.
1. Manon ROLAND, Mmoires de Madame Roland (1795)
2. STENDHAL, Vie de Henry Bruslard (dition posthume de 1890)
3. Victor HUGO, Aux Feuillantines , Les Contemplations (1856)
4. Jean GIONO, Jean le Bleu (1932)
5. Jean-Honor FRAGONARD, La Liseuse (1772) Huile sur toile, 81,1 x 64,8,
National Gallery of Art, Washington
Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de 3me et plus
particulirement de ltude des rcits denfance et dadolescence , vous analyserez le
corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun
projet de squence qui comportera une sance dtude de la langue. Vous proposerez
lexplication du texte n4.
Ds la premire lecture, il est primordial d'tre attentif aux diffrents lments du sujet
pour les mettre en relation efficacement, et construire ainsi le cadre de son expos. La lecture
du paratexte ne doit pas non plus tre nglige pour saisir les enjeux de la squence.
Il est judicieux dans le travail prparatoire de prvoir un temps pour chaque tape
donne dans lnonc et de saccorder des repres temporels pour organiser la prestation
orale. La prparation dune squence en temps rduit nest pas chose aise : un entranement
rgulier la gestion de ce temps de prparation est ncessaire. Bien quil ny ait aucune
indication ni aucune exigence dordre dans la conduite de lexpos lors de lpreuve orale,
chaque candidat doit tre conscient quil est judicieux de rpartir le temps de prparation entre
les diffrentes parties prsenter. De mme, un entranement pendant lanne la prise de
notes, lutilisation ordonne des feuillets de brouillon permet de rendre plus sereine la prise
33 de parole. Faute de quoi, le jury a pu constater les consquences dun manque dorganisation :
un candidat lit intgralement des phrases, pralablement crites. Un second se perd dans ses
notes, ou cherche nerveusement une conclusion introuvable ; un autre ne garde quune dizaine
de minutes pour faire lexplication de texte en ayant pralablement consacr beaucoup de
temps des remarques disperses sur les autres textes.
Il est possible par ailleurs de consulter un dictionnaire pendant le temps de prparation :
la candidate qui a parl de quatre romans africains en ce qui concerne Une enfance crole,
de P. Chamoiseau, LAfricain de J-M G. Le Clezio, La rue Cases-Ngres de J. Zobel,
Lenfant de sable, de T B Jelloun, aurait pu au moins spargner cette erreur en vrifiant le
sens de ladjectif crole dans le dictionnaire, comme elle aurait pu, ainsi que dautres
candidats, sappuyer galement sur les indications du dictionnaire pour rflchir sur lemploi
que fait Chamoiseau du terme ngre et le commenter bon escient. Le dictionnaire est
donc une aide prcieuse, quil ne faut pas cependant transformer en pige. Il ne sagit pas de
consacrer inutilement du temps un exercice de copie. Plusieurs candidats ont ainsi utilis
mot pour mot le mme extrait de biographie de Maupassant, pour raliser leur introduction,
sans se lapproprier.
Quels auteurs retrouve-t-on dans les sujets ?
Les sujets proposs abordent tous les sicles et tous les genres littraires cits dans les
programmes officiels du collge et du lyce. On y trouve ainsi frquemment les auteurs les
plus tudis dans chaque classe :
- XVIe : Montaigne, Ronsard.
- XVIIe : Pascal, Racine.
- XVIIIe : Beaumarchais, Rousseau, Voltaire.
- XIXe : Baudelaire, Feydeau, Flaubert, Hugo, Maupassant, Stendhal, Verlaine,
Zola.
- XXe : Anouilh, Apollinaire, Camus, Cline, Giono, Ionesco, Prec.
Les programmes du collge et du lyce tablissent une liste des ouvrages et des auteurs qui
doivent tre abords pour chaque niveau. Il est indispensable de sy rfrer. Il nest donc pas
inutile, pour prparer le concours, certes de se servir des manuels explorant les diffrents
34 objets dtude, mais aussi, et surtout, des ouvrages dhistoire littraire2, voire des revues
dactualit littraire. Il convient surtout de relire (ou de lire) les romans, pices de thtre et
posies qui fondent le socle d'une culture littraire. La prparation ne peut donc stablir en
quelques semaines, une fois reue la bonne nouvelle de ladmissibilit. Il sagit bien de se
constituer une culture personnelle vivante des uvres, en complment dune approche plus
scientifique de la littrature.
Outre les uvres, les notions de genre, de mouvement littraire et de registre sont
autant de repres efficaces permettant de susciter la rflexion et de produire des hypothses
fiables : Orient par le contrat de lecture, le lecteur [] construit sa rception en sappuyant
sur les lieux de certitude fournis par le texte. Ces points dancrage balisent la lecture et
lempchent de se perdre dans nimporte quelle direction3.
Ainsi, lunit gnrique du corpus autour de MOLIERE, Tartuffe ou lImposteur, de
BEAUMARCHAIS, Le Mariage de Figaro, de FEYDEAU, La Dame de chez Maxims,
conduit une analyse des variations du motif thtral du tmoin cach et une tude de la
mise en abyme et du systme dnonciation mis en uvre.
La connaissance des mouvements littraires permet danticiper des enjeux importants,
comme diffrencier ralisme et naturalisme et ne pas confondre Maupassant et Zola, linstar
de cette candidate qui pense Maupassant naturaliste. La Prface de Pierre et Jean aurait pu
utilement la guider : Le raliste, s'il est un artiste, cherchera, non pas nous montrer la
photographie banale de la vie, mais nous en donner la vision plus complte, plus saisissante,
plus probante que la ralit mme. Raconter tout serait impossible, car il faudrait alors un
volume au moins par journe, pour numrer les multitudes d'incidents insignifiants qui
emplissent notre existence. Un choix s'impose donc, ce qui est une premire atteinte la
thorie de toute la vrit. Lcriture raliste et lcriture naturalise procdent donc de
diffrences remarquables, dans leur rapport la ralit. Une connaissance ferme simpose ds
lors sur l'ensemble des mouvements littraires et leurs ralisations dans les diffrents genres.
La notion de registre mrite elle aussi dtre bien cerne pour conduire une analyse
assure, recommandation importante, dj explicite la page 24 du rapport de 2014. Ainsi,
2 La littrature franaise (t.1 et 2) sous la direction de J.-Y Tadi, Folio Essais n476 Editions Gallimard, 2007 Dominique Viart et Bruno Vercier, La littrature franaise au prsent, Hritage, modernit, mutations, Bordas, Paris, 2005 3 Vincent Jouve, La lecture, Collection Concours littraire, Hachette Suprieur, 1993, pages 50 -51
35 M. Navaez4 dfinit le registre littraire comme le "code" selon lequel iI faut dchiffrer
l'uvre, et sa tonalit principale, cest--dire sa dominante affective, lie une attitude
fondamentale face lexprience : il traduit la vision que l'auteur a du monde (pessimiste,
nostalgique, enthousiaste...), i1 indique l'motion qu'il cherche susciter chez le lecteur : rire
ou sourire, exaltation, indignation, tristesse, piti, peur... [...] Le registre littraire est la
caractrisation dominante du style d'une uvre [...]. Le registre nous rvle donc l'motion, la
subjectivit de l'auteur, mais il indique galement l'effet que celui-ci souhaite produire sur le
lecteur.
A ces ressources, il est judicieux dadjoindre la connaissance des formes fixes,
notamment potiques. On pourra ainsi questionner les sonnets assembls en groupement en se
penchant sur la tradition qui associe volontiers cette forme lexpression lyrique de lamour
pour mieux en interroger les spcificits. Par exemple une candidate peroit correctement la
cohrence textuelle autour du thme de la femme reprsente dans des sonnets divers5 et
interroge le texte : En quoi la femme est-elle une source dinspiration pour le pote ? sans
identifier le fait que parfois la femme est dsigne comme absente et que mme absente, elle
inspire : pourquoi, comment ? Comment le pote comble-t-il cette absence ? la compense-t-
il ? lcrit-il ? Et pourquoi dans un sonnet, forme traditionnelle rserve lexpression lyrique
de lamour ? On voit bien que ces questions prparent autant dhypothses qui viendront
nourrir la problmatique
4 Dans la dcouverte des genres littraires, Ellipses. Un des rles spcifiques de la littrature et des arts est d'exprimer et de fixer des motions et des mouvements de sensibilit qui ne s'expriment pas dans les langages scientifiques ou utilitaires et qui, par les langages artistiques et par l'art du langage, peuvent tre changs mme grande distance dans le temps et dans l'espace. [...] Les registres sont la manifestation par le langage de ces grandes catgories d'motions et de mouvements de sensibilit. La joie, l'angoisse, la colre, l'indignation, l'admiration, la plainte, la compassion, la mfiance, le doute trouvent l leur lieu, travers des formes d'expression multiples.
5 Pierre de RONSARD, Sur la mort de Marie , Second livre des Amours (1578) ; Charles BAUDELAIRE, une passante , Les Fleurs du Mal (1861) ; Paul VERLAINE, Mon rve familier , Pomes saturniens (1866) ; Yves BONNEFOY, Le bel t , Hier rgnant dsert (1958)
36
Tous les corpus se fondent-ils sur des auteurs canoniques ?
La plupart des auteurs sont des rfrences absolument incontournables pour des
enseignants de franais. Certains, sils sont moins unanimement connus, comme E. Robls, ou
Y. Bonnefoy (dailleurs au programme des Terminales littraire il y a quelques annes, et de
lagrgation cette anne) chappent difficilement une culture gnrale solide. De plus,
lintrt que les enseignants doivent porter la littrature d'aujourd'hui devrait leur permettre
de ne pas tre dsaronns par des auteurs plus contemporains comme J.-P. Simon. Au
demeurant, mme un auteur inconnu du candidat sinscrit dans un corpus qui permet des
hypothses de lecture judicieuses. Les sujets proposs ne sont jamais conus comme des
piges. Il sagit moins davoir des connaissances trs approfondies sur chaque extrait que de
mettre en uvre des dmarches qui permettent daborder un texte sans contresens. Il faut donc
allier culture et mthodologie pour explorer un texte que lon na jamais lu. Le candidat devra
alors se placer dans la position de llve dcouvrant une uvre et montrer quels outils sont
efficaces pour laborder, sans toutefois se cantonner de timides propositions.
Il sagit souvent moins de connatre la totalit des uvres dun corpus que de les relier
des objets dtude ou des enjeux littraires, comme par exemple ceux de la littrature
francophone. partir dun corpus qui associait des textes de P. Chamoiseau (Une enfance
crole), J. Zobel (Rue Cases-Ngres), de T. B. Jelloun (LEnfant de sable) et de J.M-G. Le
Clzio (LAfricain) autour des rcits denfance et dadolescence , le jury a pu stonner la
fois de la mconnaissance de Le Clzio, pourtant rcent prix Nobel de littrature, de celle de
la littrature antillaise, et de labsence de prise en compte des contextes dcriture de ces
textes : certains candidats nont pas cern les enjeux spcifiques que la langue et la culture
mtropolitaines ont pu susciter chez les auteurs francophones doutre-mer ou de ltranger.
Cela a souvent conduit des faux-sens et des analyses peu fiables alors mme que les textes
se faisaient lcho explicite des difficults de la construction dun je dans ces
circonstances particulires.
Chaque corpus propos suppose au moins la connaissance des oeuvres au programme,
mais invite s'appuyer sur une culture littraire plus large. Cela constitue un axe de
prparation essentiel des preuves. Le CAPES interne est un concours qui sadresse des
candidats ayant une exprience de lenseignement, mais dont la culture ne se limite pas ce
quils ont ralis en classe, et l'preuve doral vise justement valuer ces comptences de
culture littraire et d'aptitude se confronter des texte.
37
Quelle forme peut prendre le corpus ?
Majoritairement, les corpus sont constitus de trois ou quatre textes, et parfois dun
document iconographique, en gnral une reproduction duvre picturale. Les textes sont
dune longueur variable, mais ceux qui sont soumis lexplication de texte sont calibrs pour
que leur lecture voix haute ne dpasse pas trois minutes.
Les candidats ne doivent cependant pas smouvoir de corpus composs de deux textes,
voire dun seul dans le cas dune nouvelle donne en intgralit ou en trs grands extraits. De
mme, ils ne doivent pas stonner de la nature varie des documents iconographiques (carte
postale, photographie, plan) ou mme leur absence. Ce qui importe, cest dtre attentif la
logique gnrale du corpus. Celui-ci est conu comme un tout cohrent ; il est donc attendu
que tous les lments soient exploits. La squence qui sera labore doit faire une place
tous les textes et documents, le candidat ayant soin de justifier cette place dans sa proposition
didactique.
Les documents iconographiques : quelle place ? Quel(s) rle(s) ?
Comme nous lavons prcis, les corpus peuvent comporter des documents
iconographiques de nature varie. Leur prsence revt chaque fois une porte particulire
quil convient de cerner, en ayant toutefois clairement en tte quils sinscrivent dans
lconomie gnrale du dossier. Une image trouvera son sens dans son lien aux autres
documents, et ne saurait tre considre comme une simple illustration ou un lment
accessoire.
Dans un corpus consacr au rcit du XIXe pour une classe de 4me, une carte postale
reprsentant une rempailleuse de chaises mrite dtre analyse selon les critres
sociologiques et esthtiques propres ce support, sans perdre de vue que cette spcificit
permettra de mieux discerner les autres rponses que les artistes donnent leur recherche de
ralisme. Cette confrontation alimentera la squence tout entire. Ainsi la valeur de
38 tmoignage et la recherche dune authenticit donne voir par la photographie
compltent la rflexion sur le ralisme mise en uvre par Flaubert et Maupassant dans Un
cur simple ou La rempailleuse . La reprsentation du peuple et des petites gens sur
cette carte postale, de leurs mtiers et de leurs outils, rpond des exigences de vracit mais
les fige aussi dans les conventions du pittoresque quil convient de dcrypter. Dans ce cas
prcis, ouvrir la squence sur la comparaison entre les deux portraits de rempailleuses, lun
photographique et lautre littraire, lun statique, lautre en mouvement, pouvait permettre
dentrer dans une problmatique riche, nourrie du regard attentif port sur chaque document.
Le traitement du document iconographique exige la matrise de connaissances
spcifiques : le vocabulaire ncessaire ltude des images construit un discours clair et
fiable. Le tableau intitul Auto-da-fe (1853) de Eugenio Lucas Velsquez, dans un corpus
labor pour une classe de premire et relevant de La question de lhomme dans les genres
de largumentation du XVIe sicle nos jours , mritait une analyse pousse de sa
composition, des choix chromatiques, des lments reprsents, de lutilisation de la lumire.
Toutes les remarques pouvaient ensuite tre mises au service de la dnonciation de la torture
qui constitue le fil directeur de la squence. Dans ce cas prcis, il fallait galement tre
attentif au paratexte et faire preuve dune culture historique et artistique pour ne pas
confondre le peintre du XIXe sicle avec son clbre homonyme, Diego, ayant uvr au
sicle prcdent, ce qui changeait bien sr la porte du tableau. Rappelons que pendant la
prparation, des dictionnaires sont consultables en cas de doute.
Les documents officiels, l-encore, donnent les pistes essentielles de rflexion. Les
programmes du lyce soulignent quil faut mettre en relation avec l'histoire des arts, un
choix de textes et de documents montrant comment l'esthtique raliste concerne plusieurs
formes d'expression artistique et traverse tout le XIXe sicle. On peut rflchir en amont la
faon dont les arts visuels, notamment, ont introduit la ralit quotidienne, qu'elle soit
naturelle ou sociale, dans le champ de l'art et dtermin des choix esthtiques qui entrent en
rsonance avec l'volution du genre romanesque, depuis le XVIIe jusqu'au XXe sicle.
L'influence de la photographie sur les romanciers du XIXe sicle peut galement faire l'objet
d'un travail avec les lves. Les documents officiels concernant l'enseignement de histoire
des arts6, de mme que le socle commun de connaissances et de comptences peuvent nourrir
les propositions dobjectifs : tre capable de lire et dutiliser diffrents langages, en
6 Encart Bulletin officiel n 32 du 28 aot 2008, Organisation de l'enseignement de l'histoire des arts l'cole primaire, au collge et au lyce
39 particulier les images ( reprsentations d'uvres d'art, photographies) et de situer dans le
temps les vnements, les uvres littraires ou artistiques, d'avoir une approche sensible de la
ralit .
Quel type de problmatique le jury attend-il pour la squence ? Comment
trouver une problmatique satisfaisante ?
Le jury se flicite du fait que la grande majorit des candidats propose une entre
problmatise dans le corpus. C'est en effet un prlable absolu une construction didactique
solide, pour peu que la question qui structure le travail soit bien dfinie. Il est assez logique
que les problmatiques aient un lien avec les programmes et le niveau de la classe en jeu. Par
exemple, pour un groupement incluant des pomes de Verlaine, Laforgue, Apollinaire,
Maulpoix et une photographie de Cartier Bresson, portant sur lobjet dtude de premire
Ecriture potique et qute de sens , le jury a apprci les problmatiques explorant le
lyrisme Comment dire le monde et se dire soi-mme ? ou lcriture potique Comment
re-crer le monde par lart ? . Pour dautres corpus, le jury a pu apprcier les problmatiques
telles que Comment les genres de largumentation directe permettent-ils de faire voluer les
esprits ? , Comment le thtre du XXe sicle fait-il entendre la voix de la rsistance ? ,
Comment crer du conflit dans un monologue ? .
Les candidats, craignant parfois de proposer une problmatique mal oriente, prfrent une
formulation vague et passe-partout qui risque de ne pas rendre compte de lintrt spcifique
du groupement. Ainsi la question Comment luvre romanesque rend-elle compte de la
ralit de son poque ? , applique aux cinq extraits tirs du Bonheur des Dames, passe sous
silence lenjeu essentiel de ces passages prcis qui, tous, sattachaient au grand magasin en
tant quentit. Dautres candidats ont-ils pu lgitimement construire une rflexion autour du
naturalisme ou autour du genre romanesque : Comment Zola fait-il du grand magasin le
personnage principal de son roman ? ou Comment Zola transforme-t-il le rel travers
ltude du grand magasin ? .
Il est intressant de donner voir le cheminement qui permet d'aboutir l'nonc d'une
problmatique : prendre le temps non seulement dannoncer clairement celle-ci, mais aussi
den expliciter les mcanismes de construction, est bienvenu. Les candidats sont parfois tents
40 de se dbarrasser de cette tape, alors que le jury attend que cette phase dlicate, sur laquelle
repose tout le travail ultrieur, soit dtaille avec rigueur et prcision. Par exemple, la
formulation au sujet des quatre textes de littrature francophone voque plus haut : Dans
quelle mesure le rcit dadolescence met-il en scne un je en cours de construction ?,
oubliait la distorsion entre ralit gographique et diktats culturels pourtant fondateurs des
constructions de personnalits dveloppes dans ces textes.
Ce fil directeur gagnera ensuite tre mis en vidence durant tout le droulement de la
squence. Revenir la problmatique gnrale chaque tude de texte ou chaque tape
importante de la squence est gnralement un gage de rigueur et de russite. Loriginalit et
lacuit de certaines problmatiques ont permis des candidats de se distinguer et de
convaincre un jury galement sensible des problmatiques qui souvraient judicieusement
sur lactualit et permettaient de relier littrature et monde contemporain.
La formulation de la problmatique est modulable et polymorphe. Elle peut prendre
une tournure directe ou indirecte, avoir la forme :
- dune question, voire de plusieurs questions relies entre elles, prsentant des
concepts associs par juxtaposition ( La passion de lire, une contribution la formation de la
personnalit ? , ou par relation logique ;
- dune alternative ( Peut-on dire non au thtre, dsobir pour sengager ou se
soumettre invitablement ? ) ;
- dun lien de cause effet ( le rcit denfance engendre-il ou/et rvle-t-il la gense
dun crivain en construction ? ) ;
- ou enfin dun rapport dopposition ou didentit entre deux phnomnes.
Les questions qui napportent quune dfinition, les propositions qui se cantonnent
une juxtaposition de remarques catalogues arbitrairement, les descriptions paraphrasant un
texte ou encore lvocation dun thme ne permettent pas de constituer une rflexion
problmatise.
41
Comment faut-il organiser la prsentation de la squence ?
Lexpos de quarante minutes doit comporter la fois le projet de squence,
lexplication de texte et la sance de langue, mais lordre des points abords est laiss au
choix de chaque candidat. Il est bienvenu de ne pas oublier de prsenter les diffrents
documents sur lesquels il tait demand de travailler et de justifier par l sa problmatique. Le
temps que chaque candidat consacre cette premire tape est trs variable. Certains font
preuve dun esprit de synthse tout fait louable et permettent ainsi de rentrer dans le vif de la
squence avec dynamisme.
Diffrentes modalits dans la suite de lexpos ont pu tre observes et apprcies par le
jury : des drouls chronologiques de squence au cours desquels les sances de langue et
lexplication de texte prennent place naturellement dans le cours de la prsentation, ou bien
des prsentations procdant en plusieurs tapes : par exemple, dabord la squence, ensuite la
sance de langue et enfin lexplication de texte. Aucune solution nest rejeter a priori. Il faut
simplement que les candidats aient bien identifi leur dmarche et la prsentent au jury. La
clart du propos et la capacit faire partager ses choix son auditoire sont des qualits
importantes dans lenseignement.
Inversement, il a parfois t dplor que les propos senchanent sans quune trame soit
explicite, voire mme que certains candidats jouent la montre en juxtaposant des ides
trop disparates. Lorsque le fil directeur est trop relch, lexpos risque de se perdre dans des
dveloppements peu judicieux. Lorganisation rythme du temps de parole est une qualit qui,
pour se manifester le jour de loral, doit tre rgulirement travaille.
Un mme sujet, consacr lautobiographie (annexe 3) a pu donner lieu des
propositions diverses, sur lesquelles il peut tre clairant de sarrter. Lune, pointant les
spcificits de ces rcits denfance et dadolescence, sest construite essentiellement autour
des interactions entre lecture et criture. Les extraits sont lus comme des textes sources
dmancipation, de transfiguration du rel et dinspiration pour rcrire le monde et la
squence se construit par des aller-retours entre plonges dans les textes et rdaction. Il sagit
l dun vritable projet dcriture dont la matrice serait le texte de Giono, nourri ensuite des
lectures des autres textes.
Une autre candidate, moins inspire, sest parpille en activits isoles. Sa lecture des
textes souffrait dun manque de recul qui empchait de porter un regard densemble sur le
42 corpus ; le souffle pique du texte de Giono est pass inaperu. En effet, elle na pas identifi
lpithte dinspiration homrique de la colline aime des btes , ni lvocation potique
dune guerre raconte depuis lAntiquit, et, plus largement, na pas compris la faon dont la
lecture de LIliade nourrit vritablement le jeune Giono. Cette page nest reste pour elle
qu une mise lhonneur des agriculteurs .
Un troisime candidat sattache quant lui travailler loral et en fait son axe directeur.
La squence souvre sur un dbat : Doit-on raconter ses souvenirs ? , bientt suivi par un
autre sujet de discussion soumis la classe sur la place de la lecture aujourdhui . Le jury
reste perplexe devant une squence dont lenjeu argumentatif et linsistance sur lexpression
orale paraissent sans lien avec la tonalit et la nature du corpus o chaque texte tmoigne de
limportance de la lecture ds lenfance et en montre le cheminement dans lcriture elle-
mme.
Ds 1995, Claudine Garcia Debanc sinterroge dans crire pour lire 7 sur cette
complmentarit fort productive : [] je voudrais interroger la lecture sous l'angle de
l'criture en situant leurs places respectives []. En quoi la mise en place de situations
d'criture peut-elle aider les lves lire davantage ? Comment, par confrontations entre
leurs propres essais d'criture et les textes d'auteurs, peuvent-ils tre conduits lire
mieux, c'est--dire avec le regard de l'artisan interrogeant les procds d'criture, et
ainsi s'initier trs tt l'analyse de textes littraires ? Dans quelle mesure, au cours
mme de l'criture, la lecture est-elle partie intgrante du processus d'criture et intervient-elle
tous les moments de l'laboration d'un texte ? .
Enfin, nous ne rentrerons pas dans les dtails de la fabrication dune sance : la pratique
quotidienne peut laisser supposer que tout candidat matrise cette comptence. De nombreux
ouvrages y contribuent ; citons toutefois une ressource disponible sur le site de lAcadmie de
Lille8 pour les candidats qui souhaiteraient une mise au point efficace.
7 Dans Didactique de la lecture Regards croiss, textes runis par C. Garcia-Debanc, M. Grandaty et Angeline Liva, Presses Universitaires du Mirail, CRDP Midi-Pyrnes, 1996, page 191. Dautres comme Y. Reuter, B. Schneuwly proposent aussi des dveloppements trs formateurs sur le sujet de lcriture et ses liens avec la lecture.
8 Question : Quest-ce quune sance et comment la prparer ? disponible sur le Net : http://lettres.discipline.ac-lille.fr/ressources/entree_metier_approfondir_pratiques/construire-une-sequence-et-une-seance-denseignement/quest-ce-quune-seance-comment-preparer-une-seance.pdf
43
Faut-il proposer dtoffer le corpus ?
Un certain nombre de candidats prsentent des squences enrichies par des apports
dautres textes et dautres uvres. Il est bien sr judicieux douvrir les perspectives de travail
et de ne pas se cantonner une entre trop troite dans un groupement. Cependant, le corpus
initial est conu dans une logique quil convient justement de cerner. Il est donc
contreproductif de vouloir toute force y adjoindre des textes, ce qui peut conduire ngliger
le traitement de certains extraits. La squence prsenter doit en effet faire rfrence tous
les lments du sujet, sans exception.
Lorsquun candidat propose, pour complter les textes de J.M-G. Le Clzio, J.Zobel,
P.Chamoiseau et T. Ben Jelloun, de rutiliser deux exemples sur lesquels il stait appuy
pour nourrir son dossier RAEP, ( Nous autres de Zamiatine et un livre de Hampt B),
lintention est louable, pour peu que les liens avec les uvres du corpus soient explicits, et
que le rapprochement dpasse le stade de lassociation dides. Les similitudes pressenties ne
donneront leur pleine mesure quaccompagnes de justifications et darguments.
Lorsquun candidat propose en lecture cursive, dans le cadre dune squence sur
lautobiographie, Un secret, de Philippe Grimbert, il ne faut pas quil nglige de cerner la
spcificit de ce roman , o tmoignage, fiction et procd thrapeutique sentremlent. Ce
mme corpus prendra une toute autre direction si le texte complmentaire convoqu est
Aliocha de Henri Troyat. Il sagira alors de montrer comment le rcit individuel sefface
derrire le processus de rejet de la culture sovitique. Il faut avancer avec suffisamment de
prudence et de rflexion et prendre le temps de valider des propositions surgies spontanment.
Le jury a pu pointer un autre cueil : sil est intressant de convoquer dautres
rfrences pour apporter une part personnelle au travail circonscrit par le corpus, y recourir
doit apporter quelque chose la squence que lon prvoit. Il faut viter les prtextes ou les
rapprochements artificiels : ainsi lvocation d un tableau de Tissot pour entrer dans un
corpus qui contenait un extrait de Bel Ami dcrivant une rception mondaine peut avoir du
sens, mais prendre plusieurs minutes dun temps prcieux pour dtailler la place de lventail
dans un tableau dcrit de mmoire est peu pertinent, dautant que cela napporte aucun
renseignement utile pour la suite. Il est prfrable, pour les uvres dart, de travailler sur de
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