chez le coronarien - Réalités Cardiologiques · La mirtazapine (Norset) est un anti-dépresseur...

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R E P E R E S P R AT I Q U E S

� Insuffisance coronaire

L’un des volets de la prise encharge d’un état dépressif chezle coronarien consiste en la pres-

cription d’un traitement antidépresseur.Ce dernier sera choisi en fonction, biensûr, de son efficacité, mais aussi de seseffets secondaires éventuels et de sespossibilités d’interaction avec les traite-ments à visée cardiologique [1, 2].

❚❚ LES ANTIDEPRESSEURSTRICYCLIQUES (ATC)

Longtemps considérée comme le traite-ment antidépresseur de référence, enparticulier chez les sujets ne présentantpas d’atteinte somatique, cette classemédicamenteuse n’est pas indiquée chezles patients coronariens [3-5]. En effet,les ATC ont des propriétés anti-aryth-miques similaires à celles de la quini-dine, et risquent d’augmenter la morta-lité chez les coronariens au décours d’uninfarctus du myocarde [6, 7].

Ils présentent en outre un risque d’hypo-tension artérielle et ont des effets secon-daires qui peuvent être difficiles à tolérerpar des patients ayant déjà des traitementsmédicamenteux à visée cardiologique.

Les ATC sont donc à éviter en premièreintention.

❚❚ LES INHIBITEURS SELECTIFSDE LA RECAPTURE DE LASEROTONINE (ISRS)

Il s’agit du citalopram (Seropram), dela fluoxétine (Prozac), de la fluvoxa-

mine (Floxifral), de la paroxétine(Deroxat, Divarius), et de la sertraline(Zoloft). Ce sont des antidépresseursefficaces qui présentent moins d’ef-fets secondaires que les ATC.

Etant donné leur efficacité compa-rable, le choix se fera sur le profild’effets secondaires et le risque d’in-teraction avec d’autres traitementsmédicamenteux.

Ce sont les antidépresseurs les plusprescrits chez les coronariens. Ils ontpeu d’effets cardiovasculaires : ils sontfaiblement bradycardisants et hypoten-seurs, et entraînent peu de modificationsélectrocardiographiques sur l’intervallePR, QRS ou QT [8].

Les principaux effets secondairessont des troubles digestifs (nausées)et des troubles de la libido. Les effetsdigestifs sont diminués lorsque lesISRS sont pris au moment des repas,et ils s’estompent généralementquelques jours après le début du trai-tement.

Les ISRS présentent un risque d’inter-action avec d’autres médicaments, enraison de l’inhibition des iso-enzymesdu cytochrome P450 [9-12]. Les ATCpeuvent potentialiser les anticoagu-lants oraux, ce qui nécessite une sur-veillance plus fréquente de l’INR chezles patients auxquels sont prescrits cestraitements. Le citalopram inhibe plusfaiblement les iso-enzymes du cyto-chrome P450, et a donc un risque dimi-nué d’interaction avec d’autres traite-ments pharmacologiques.

❚❚ LES INHIBITEURS DE LARECAPTURE DE LA SEROTONINEET DE LA NORADRENALINE

La venlafaxine (Effexor) bloque larecapture de la sérotonine à faible dose,alors qu’à forte dose elle bloque larecapture de la sérotonine et de la nora-drénaline. A forte dose, cette moléculepeut favoriser une élévation tension-nelle. Les effets secondaires sontproches de ceux des ISRS. La venla-faxine inhibe faiblement le cytochromeP450 et interagit peu avec les traite-ments associés.

❚❚ AUTRES ANTIDEPRESSEURS

La miansérine (Athymil) est un anti-dépresseur tétracyclique sédatif etanxiolytique dénué d’effets anticholi-nergiques et de toxicité cardiaque.Parmi les effets indésirables, on noteune prise de poids et des sensationsvertigineuses par hypotension ortho-statique. Des rares cas d’agranulocy-tose ont été décrits chez les sujets âgésde plus de 65 ans.

La mirtazapine (Norset) est un anti-dépresseur chimiquement proche de lamiansérine, sans toxicité cardiaque etavec un effet anticholinergique faible.

Choix pratique d’un antidépresseurchez le coronarien

K. LAHLOU-LAFORETService de Psychologie Clinique et

Psychiatrie de Liaison, Hôpital EuropéenGeorges Pompidou, PARIS.

� Insuffisance coronaire24

❚❚ CONCLUSION

Il existe actuellement plusieurs anti-dépresseurs indiqués dans le traitementdes états dépressifs chez le coronarien.Les ISRS se sont avérés efficaces etdénués de toxicité cardiaque. Les effetssecondaires et le risque d’interactionavec les anticoagulants oraux nécessi-tent certaines précautions d’emploi.

Les essais interventionnels ne permet-tent pas à l’heure actuelle de démontrerque les antidépresseurs améliorent le

pronostic vital chez le coronarien [13].Néanmoins, il a été démontré que laprescription d’un antidépresseur chezles coronariens déprimés améliore leurcompliance au traitement cardiolo-gique [14]. ■

B i b l i o g r a p h i e

1. LESPERANCE F, FRASURE-SMITH N. Depressionin patients with cardiac disease : a practicalreview. J Psychosom Res, 2000 ; 48 : 379-91.

2. VIEWEG WV, JULIUS DA, FERNANDEZ A, WUL-SIN LR, MOHANTY PK, BEATTY-BROOKS M, HAS-NAIN M, PANDURANGI AK. Treatment of depres-sion in patients with coronary heart disease. Am JMed, 2006 ; 119 : 567-73.

3. BELILES KE, STOUDEMIRE A. Psychopharmaco-logic treatment of depression in the medically ill.Psychosomatics, 1998 ; 39 suppl. : S2-S19.

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12. RICHELSON E. Pharmacokinetic drug interac-tions of new antidepressants : a review of theeffects on metabolism of other drugs. Mayo ClinProc, 1997 ; 72 : 835-47.

13. TAYLOR CB, YOUNGBLOOD ME, CATELLIER D,VEITH RC, CARNEY RM, BURG MM, KAUFMANN

PG, SHUSTER J, MELLMAN T, BLUMENTHAL JA, KRI-SHNAN R, JAFFE AS. ENRICHD Investigators.Effects of antidepressant medication on morbidityand mortality in depressed patients after myocardialinfarction. Arch Gen Psychiatry, 2005; 62: 792-8.

14. GEHIA, HAAS D, PIPKIN S, WHOOLEYMA. Depres-sion and medication adherence in outpatients withcoronary heart disease: findings from the Heart andSoul Study. Arch Intern Med, 2005; 165: 2508-13.

PO

INT

SF

OR

TS � Les antidépresseurs tricycliques

sont à éviter chez le coronarien.

� Les inhibiteurs sélectifs de la recap-ture de la sérotonine sont dénués detoxicité cardiaque.

� Le risque d’interaction avec les anti-coagulants oraux incite à contrôlerl’INR lors de l’instauration d’un trai-tement par ISRS.

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