d’une photographie de presse et de sa circulation dans les...

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Analyse d’une photographie de presse et de sa circulation dans les médias :

la femme à la couverture ou la « madone de Fukushima »

13/3/2011 Ishinomaki13/3/2011, Ishinomaki, Tadashi Ôkubo, Yomiuri Shimbun

Un format panoramique large, proche de 3 x 2 d d éi d iet des « paysages » du séisme et du tsunami 

Quelques exemples de photos publiées dans le YomiuriQuelques exemples de photos publiées dans le Yomiuri

Ôuchi, départementdépartement 

d’Iwate, ville auxville aux 

10 000 disparus (Yomiuri(Yomiuri, 

14/3/2011)

Exemple de découpage en tiers (mais ce n’est pas le cas de la photo d’Ôkubo)

Angle de prise de vue : un exemple de plongée  

Angle de prise de vue : une contre‐plongée  

inochi-yo : litt., la vie, quoi ! « mais il y a de la vie ! » ou « mais il faut survivre ! »

« Il n’y a pas de mots… » Parmi les décombres, une femme contemple la ville inondée. 3/13 7h38 Miyagi‐ken, Ishinomaki, Ohkubo Tadashi

Autre photo de Tadashi Ôkubo : la visite de l’empereur 

d l’ éet de l’impératrice dans le département de Fukushima lede Fukushima, le  

22/5/2011

h d l’ lPhoto de l’article que le Yomiuri, 

àconsacre à Mme Sugimoto, le  15/4/201115/4/2011

Et Paris Match à son tour… 

Une brève liste des noms et légendes donnés à cette photo : 

写真=言葉もない… がれきの中、水没した街を見つめる女性« Il n’y a pas de mots …» Femme qui, postée parmi les décombres, y p q , p p ,

contemple ce qui reste de la ville, après le tsunami. (13日午前7時38分、宮城県石巻市で)=大久保忠司撮影

(13 mars, 7h38, département de Miyagi, Ishinomaki)photo : Ôkubo Tadashi

毛布の女性 (môfu‐no jôsei )  « femme à la couverture »

« l’icône du Japon meurtri » (Paris Match) « la madone des décombres » (Arrêt sur Images)

« la japonaise qui a fait le tour du monde » (Télérama)« la jeune fille et la mort » (Stratégies.fr)« l’icône d’Ishinomaki » (Médiapart)« l icône d Ishinomaki »  (Médiapart)  

« la pleureuse d’Ishinomaki » (blog Culture Visuelle, André Gunthert)

« La plupart des occurrences éditoriales de la photo larecadrent pour accentuer la solitude apparente dupersonnage féminin, alors que les bords de l’image montrentun environnement urbain peuplé et même la présence desauveteurs. » Objectif : « la simplification qui garantit lalisibilité du message » Blog Culture Visuelle

Le cadrage : C'est un signe indexical (= signe ayant pour fonction d’attirer l’attention sur un objet déterminé, ou de jdonner un certain statut à cet objet). 

Stern : montage en « polyptique », pour montrer que le sujetest assailli par les éléments en furie ; remplacer lesest assailli par les éléments en furie ; remplacer lesdécombres par des éléments en furie (explosions,inondations) c’est chercher à représenter le dynamismeinondations), c est chercher à représenter le dynamisme(meurtrier) de la catastrophe : nette volonté de dramatisation

Otto Dix, La guerre, 1932, galerie Neue Meister, Dresde 

Blog : Culture visuelle, André Guntherthttp://culturevisuelle.org/icones/1496

Femme en pleurs, bas‐relief antique, musée du Capitole, Rome. (g.)           Londres, e e e p eu s, bas e e a que, usée du ap o e, o e (g ) o d es,8 septembre 1940, femmes sans abri après un raid de la Luftwaffe (coll. Getty Images) (centre).         Monuments aux morts, 1914‐1918, Villers‐Bretonneux. (dr.) 

Athéna pensive (Musée de l’Acropole, Athènes)  Delacroix, La Grèce expirante sur les ruines de Missolonghi, 1826, Musée des Beaux‐Arts de Bordeaux) 

Iconographie : l’activité éditoriale qui consiste à recueillir et à choisir des documents visuels pour illustrer un quotidien de presse, un manuel scolaire, un site Internet… I l i l i d é t ti i ll d’ tif lt lIconologie : la science des représentations visuelles d’un motif culturel particulier  (par ex. l’Amour – avec son arc ou non, enfant ou jeune homme ou la Justice – aux yeux bandés ou non tenant une balancehomme, ou la Justice  aux yeux bandés ou non, tenant une balance…, ou la République ‐Marianne)  

La « femme à la couverture » relève‐t‐elle d’un motif précis ? Motif japonais ou européen? La Pietà ? (cf. la « madone » de Benthala) Une l ? ( f A d é G th t) U fi d l t édi ?pleureuse ? (cf. André Gunthert) Une figure de la tragédie grecque ? 

Une allégorie nationale (« Marianne » japonaise)? 

La précision iconologique importe peu. Ce qui compte, c’est un « air de famille » assez vague et assez puissant à la fois pour fonder les nférences qui orientent les choix  des responsables éditoriaux. 

Quel traitement médiatique est réservé à l’image médiatique dans les media /médias?  (cf. blog Culture Visuelle, Audrey Leblanc) / ( g , y )

a) travail du photoreporter (Ôkubo Tadashi) et mise en circulation de la photo : légende brève, date et lieu, en japonais puis en anglais 

b) diffusion par les grandes agences de presse filaires pour les médiasb) diffusion par les grandes agences de presse filaires, pour les médias abonnés 

c) achat par certains organes de presse et recadrage pour leur Une ou leur couverture – en interaction avec des titres, d’autres éléments péritextuels . Ici, un « accident » : l’uniformité – 55 organes de presse utilisent la même photo 

d) nombreux commentaires à propos de ce choix d’image : ce sont des professionnels de l’image qui le commentent dans les médias (effet deprofessionnels de l image qui le commentent, dans les médias (effet de boucle méta‐énonciative) ‐ les commentaires portent sur l’image elle‐même, isolée de tout p g ,contexte éditorial. Pas d’analyse sémiotique.  Pas d’élucidation du processus de circulation de la photographie. ‐ il est dit que la photographie « s’impose d’elle‐même » parce qu’à l’évidence « elle a cristallisé l’événement ». l’icône (ou l’allégorie) devient le modèle absolu de l’image médiatique‐ l icône (ou l allégorie) devient le modèle absolu de l image médiatique. 

À chaque événement son icône et on n’hésite pas à lui donner un surnom (métaphorique).     ( p q )‐ la prise en charge des commentaires sur cette médiatisation est assumée par les médias eux‐mêmes et les autorités convoquées sont des hommes de médias.  C’est un processus de canonisation par le discours : on affirme, de façon répétée une valeur On ne dit pas pourquoi Cela fonctionne parrépétée, une valeur. On ne dit pas pourquoi. Cela fonctionne par saturation, en circuit fermé. Pas de réflexivité, mais de la célébration.   

La photo de Tadashi Ohkubo, telle qu’elle a été exposée à Visa pour l’image (Perpignan, août‐septembre 2011) 

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