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De sombres besoins: quels vices
consumaient Tolstoï et Dostoïevski?
Oleg Egorov
6-7 minutes
L’amour du jeu et de la drogue, l’adultère, ou encore la boisson, même les plus
grands auteurs russes sont passés par là.
Nul n’est parfait, et même les plus éminents doivent lutter contre leurs
faiblesses, oscillant entre victoire et défaite. Étudier les biographies des
meilleurs auteurs et poètes russes permet de comprendre qu’ils n’étaient pas
différents, et que vivre auprès d’eux pouvait parfois être un lourd fardeau.
Voici comment ces brillants auteurs russes ont souffert de leurs vices et
comment ils s’en sont sortis.
1. Fiodor Dostoïevski: le jeu
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Dostoïevski (1821-1881), célèbre pour ses romans d’une grande profondeur
psychologique, reflétant les plus sombres recoins de l’âme humaine, a lui-
même connu une vie éprouvante, et l’un des monstres qu’il a eu à combattre a
été son addiction au jeu. En 1862, lors d’un séjour en Allemagne, l’écrivain
s’est essayé à la roulette et la passion s’est aussitôt emparée de lui.
Lire aussi : Cinq écrivains occidentaux pour qui Fiodor Dostoïevski fut une
source d’inspiration
Une décennie durant, Dostoïevski y a joué comme s’il était possédé, tentant
toujours de gagner gros, mais perdant sans cesse. Sa femme, Anna, se
rappelait : « Il rentrait à la maison pâle et exténué, demandant de l’argent, puis
retournait au casino… encore et toujours, jusqu’à ce qu’il ait perdu tout ce que
l’on avait. Il pleurait, se mettait à genoux devant moi, implorant mon pardon…
».
L’écrivain comprenait bien à quoi tenait sa faiblesse. « Ma nature est vile et
trop passionnée », a-t-il écrit à un ami, lui réclamant de l’argent après avoir
tout perdu à la roulette. Il est cependant resté assez fort pour vaincre cette
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addiction. Après 1871 et la naissance de son premier fils, il n’a plus jamais
rejoué à la roulette. Plus tôt, en 1866, il avait écrit un roman qui était le reflet
de sa propre addiction : Le Joueur.
2. Léon Tolstoï: l’addiction au sexe
Toute sa vie, Léon Tolstoï (1828-1910), un noble humaniste, a combattu son
ardent désir pour les femmes. « Je dois dormir avec une femme. Autrement,
mon désir ne me laisse aucun répit », a-t-il noté dans son journal en 1853. Il a
eu des relations sexuelles hors mariage avec de nombreuses femmes - tant
des nobles que des paysannes - et a dû par au moins deux fois être soigné de
maladies vénériennes.
Lire aussi : 25 ouvrages fortement recommandés par Léon Tolstoï
Combiné à ses critères moraux élevés (que Tolstoï se fixait mais ne parvenait
jamais à tenir), cela le menait à un sentiment permanent de culpabilité. Son
journal déborde de notes pénitentielles : « Je suis dégoûtant ». Après s’être
marié avec Sofia en 1862, il a toutefois cessé et a même rédigé en 1890 La
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Sonate à Kreutzer, roman critiquant l’entière notion de relation sexuelle et
appelant à la chasteté.
3. Sergueï Essenine (et bien d’autres): l’alcoolisme
Poète célébrant la paisible vie de campagne et la nature russe, Sergueï
Essenine (1895-1925) est lui-même tombé dans l’alcoolisme et s’est suicidé
après avoir subi une sévère dépression causée par la boisson.
Comme se souvenaient ses amis, son image de bon vivant appréciant
accumuler les verres les uns après les autres n’était au départ qu’un
personnage, mais plus tard, cette addiction s’est véritablement emparée du
poète. « Je me suis empoisonné avec ce poison amer… les yeux bleus
s’embuent avec de la vodka », a écrit Essenine un an avant son suicide. «
Comment se fait-il que tu ne comprennes pas, je ne peux m’empêcher de
boire … Comment survivrai-je à cela si je ne buvais pas … », aurait-il-dit, cité
par Vladimir Tcherniavski, l’un de ses amis. Finalement, il n’a effectivement
pas survécu.
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Lire aussi : Sept livres russes qui vous aideront à trouver un sens à votre vie
Essenine est loin d’être le seul auteur russe ayant eu un problème avec
l’alcool. Cela est aussi vrai pour Alexandre Fadeïev, qui était à la tête des
auteurs de l’Union soviétique, l’écrivain dissident Venedikt Erofeïev et Sergueï
Dovlatov, un auteur émigré qui a fui Leningrad pour New York. Fadeïev s’est
suicidé, tandis que les deux autres sont morts relativement jeunes - il semble
que l’obsession des écrivains russes pour l’alcool ne se finisse jamais bien,
mais c’est souvent le cas pour tout le monde.
4. Mikhaïl Boulgakov: la toxicomanie
Boulgakov (1891-1940), connu pour son roman mystique Le Maître et
Marguerite et d’autres grandes œuvres, n’a pas choisi la vie de toxicomane. Il
est devenu accro à la morphine par accident, en officiant comme médecin
dans la Russie provinciale en 1917. Après s’être malencontreusement infecté,
il a dû prendre de grandes doses de morphine pour faire cesser la douleur, et
la drogue a pris le dessus.
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« Chaque jour, il se lève et me dit : +va à la pharmacie, rapporte-moi de la
morphine+, se rappelait Tatiana Lappa, sa première femme. Il me fallait courir
toute la ville pour en obtenir et il m’attendait, sombre et terrifiant, mais
m’implorant toujours de ne pas l’amener dans un hôpital ». Sans morphine,
l’auteur pouvait devenir dangereux : il a un jour lancé une lampe sur sa
femme, et a même une fois été prêt à lui tirer dessus au pistolet (mais ne l’a
pas fait, malgré tout il n’était pas William S. Burroughs).
Lire aussi : Dix citations de grands écrivains sur le mystère de l'âme russe
Tatiana a aidé Boulgakov à se remettre, en réduisant lentement la dose de
morphine qu’il prenait. Boulgakov a ensuite rédigé Morphine, un roman
reflétant son addiction. Contrairement à lui, le héros se suicide sans personne
à ses côtés. Tatiana Lappa a empêché une telle fin pour Boulgakov, mais cela
n’a pas empêché celui-ci de la quitter par la suite.
S’il est une habitude que certains écrivains russes sont parvenus à
surmonter, c’est la consommation de viande. Découvrez ici quels grands
auteurs nationaux étaient végétariens !
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