DPI : don à public indétermine - numéro bêta (0)

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DPI : don à public indéterminé est une revue appartenant au domaine public. Ma volonté est de proposer des écrits abordant les cultures du numérique, le droit d’auteur et le domaine public, ou encore la place de la création graphique contemporaine dans le cyber-espace qui nous est donné. Pour ce numéro 0, dit bêta, j’ai souhaité mettre en avant l’importance de la neutralité du web. En effet, comme l’explique Lawrence Lessig, nous sommes aujourd’hui confrontés à une volonté de réduction du web par les gouvernements. Ce cyber-espace, ouvert, construit par le code, est menacé dans sa neutralité par la pression de lobbys marchands et les volontés sécuritaires afin de créer plusieurs nets à différentes vitesses. Dans un second temps, j’ai voulu exposé également deux écrits concernant le livre, la gratuité, le don et le domaine public. TOUS LES TEXTES ET IMAGES PUBLIÉES DANS DPI PEUVENT ÊTRES LIBREMENT REPRODUITS, TRADUITS OU ADAPTÉS MÊME SANS INDICATION D’ORIGINE.

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dpi :don à publicindéterminé

SHUT Up

ANd TAKE MY MONEY

numéro 0

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éditorialDPI : don à public indéterminé est une revue appartenant au domaine public.Ma volonté est de proposer des écrits abordant les cultures du numérique, le droit d’auteur, le domaine public, ou encore la place de la création graphique contemporaine dans le cyber-espace qui nous est donné.

Pour ce numéro 0, dit bêta, j’ai souhaité mettre en avant l’importance de la neutralité du web. En effet, comme l’explique Lawrence Lessig, nous sommes aujourd’hui confrontés à une volonté de réduction du web par les gouvernements. Ce cyber-espace, ouvert, construit par le code, est menacé dans sa neutralité par la pression de lobbys et les volontés sécuritaires afin de créer plusieurs nets à différentes vitesses.Dans un second temps, j’ai souhaité exposé également deux écrits concernant le livre, la gratuité, le don et le domaine public.

Bonne lecture !

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sommaireMèmes part. 1@p.9

Neutralité du Net : un grand pas en avant pour l’internet libre !@p.13

#OurNETmundial : Notre internet mérite mieux qu’une gouvernance@p.19

de la gratuité (extrait)@p.25

Fac similé : Le livre, que faire ?Quelques questions hétérodoxes@p.39

Mèmes part. 2@p.51

index et liens@p.55

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After reading about net neutrality dying this is how I imagine Netflix responding

10How ISPs would charge you if Net Neutrality was gone.

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World War Web

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Net neutrality debate explained

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Neutralité du Net : un grand pas en avant pour l’internet libre !Bruxelles, 3 avril 2014 — Après des années d’inaction, le Parlement européen vient d’adopter lors d’un vote en séance plénière et en première lecture le Règlement sur le Marché Unique des Télécommunications. En adoptant les amendements déposés par les groupes sociaux-dé-mocrates (S&D), verts (Verts/ALE), de la gauche unitaire (GUE/NGL) et libéraux (ADLE), les eurodéputés ont fait un pas historique pour la protection de la neutralité du Net au sein de l’Union européenne. La Quadrature du Net remercie chaleureusement tous les citoyens européens, toutes les organisations et tous les parlementaires qui ont pris part à cette campagne, et les appelle à rester mo-bilisés pour la suite de la procédure législative. En septembre 2013, après des années d’inaction et quelques mois seulement avant la fin de son mandat, la commissaire européenne Neelie Kroes(1) a présenté une proposition de Règlement sur les

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télécommunications de l’Union européenne. Même s’il prétendait protéger la Neutralité du Net, ce texte définissait en réalité ce principe de sorte à le vider de son véritable sens. Malgré les nom-breuses critiques(2) dont son texte faisait déjà l’objet, la Commissaire a fait le choix d’en préci-piter l’examen au Parlement européen, afin qu’il puisse être voté avant les élections européennes de mai 2014.

Ce vote est le résultat direct d’une très forte mobilisation citoyenne(3) et du travail construc-tif des eurodéputées Amelia Andersdotter (Verts/ALE – SE), Catherine Trautmann (S&D – FR), Petra Kammerevert (S&D – DE) et Marietje Schaake (ALDE – NL). Le texte adopté inclut une définition rigoureuse de la neutralité du Net, en lui confé-rant une portée normative(4). Tout en permettant aux opérateurs de développer des offres d’accès avec une qualité de service optimisée pour des applications qui ne pourraient pas fonctionner correctement sur l’Internet classique, ce texte en-cadre efficacement de tels services spécialisés » en assurant qu’aucune discrimination ne puisse être réalisée entre les différents fournisseurs de telles applications et en protégeant la bande passante allouée à Internet(5).

Soutenons La Quadrature du Net !

Même si certains amendements visant à donner au texte une plus grande cohérence et à clarifier certaines notions ont été laissés de côté, le texte adopté aujourd’hui constitue une nette victoire

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pour la protection d’un Internet libre, particuliè-rement en comparaison de la proposition initiale de Neelie Kroes. La Quadrature du Net remercie chaleureusement l’ensemble des citoyens et des organisations qui se sont investis dans cette campagne pour la neutralité du Net, ainsi que les eurodéputés qui se sont battus pour un Internet libre, à quelques jours de la fin de leur mandat.

Au cours des semaines à venir, la procédure lé-gislative suivie par ce règlement passera à l’étape suivante : nous devons tous maintenir notre plus grande vigilance. C’est désormais au Conseil de l’Union européenne – co-législateur avec le Par-lement européen – de délibérer sur un premier rapport d’orientation les 5 et 6 juin prochains. La docilité des gouvernements face aux lobbies des télécoms est telle qu’une participation citoyenne soutenue sera capitale pour éviter que les avancées obtenues aujourd’hui ne soient défaites. Ainsi, à quelques heures du vote, le gouvernement fran-cais s’est joint aux lobbies des grands opérateurs télécoms pour soutenir une définition des services spécialisés incompatible avec une protection pleine et entière de la neutralité du Net et du principe de non-discrimination, donnant un avant-goût des positions en présence au sein Conseil. Il est donc fondamental de ne pas laisser ce sujet sortir du débat public et de rappeler collectivement aux gou-vernements nationaux où est l’intérêt général dans le débat sur la neutralité du Net.

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La victoire d’aujourd’hui sur la neutralité du Net est la plus importante pour la protection des libertés en ligne depuis le rejet de l’ACTA en juillet 2012. Le parlement européen a clairement indiqué que le bien commun qu’est Internet doit échapper à l’em-prise de l’industrie et rester un espace où la liberté de communication et d’innovation peuvent prospérer. Nous remercions vivement l’ensemble des organisa-tions, des citoyens et des eurodéputés qui ont rendu ce résultat possible. Nous devons maintenant rester vigilants quant à la suite de la procédure, car le texte va désormais devant le Conseil de l’Union européenne, où de nombreux gouvernements nationaux vont chercher à démanteler les dispositions relatives à la neutralité du Net afin de satisfaire leurs oligopoles télécoms.

Même si nous avons gagné aujourd’hui, le combat pour un Internet libre n’est pas terminé !,

déclare Félix Tréguer, cofondateur de La Quadrature du Net.

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1. Neelie Kroes est la commissaire européenne en charge de la société numé-

rique. Au cours des mois ayant suivi sa nomination au poste de commissaire

européenne en 2010, la position de Neelie Kroes sur la neutralité du Net a évolué

d’un franc soutien à un alignement sur les exigences des lobbies des opérateurs

télécoms.

2. Une critique fuitée rédigée par les services de la commissaire Viviane Reding

souligne par exemple que Si elle n’est correctement encadrée, la liberté illimitée des

fournisseurs de contenus à établir des accords contractuels pour la priorisation de leurs

contenus avec les FAI conduira à des conséquences anti-concurrentielles et discrimina-

toires non souhaitées à moyen ou long terme. (traduit par nos soins) :

http://www.edri.org/NN-negativeopinions

Le Contrôleur européen de la protection des données a quant à lui déclaré dans

un communiqué de presse publié le 15 novembre 2013 que le principe de neutralité

du Net était dépourvu de sa substance en raison du droit presque illimité des fournis-

seurs d’accès de gérer le trafic Internet dans la proposition de Neelie Kroes.

3. Le nombre d’appels passés avec le Piphone pour ce vote a même dépassé le

précédent record établi lors du vote final d’ACTA en 2012.

4. Cf. articles 2.14, 23.1 et 23.5 par. 1.

5. Cf. articles 2.15 et 23.2.

La quadrature du nethttps://www.laquadrature.net/fr/neutralite-du-net-un-grand-pas-

en-avant-pour-linternet-libre

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#OurNET mundial : Notre internet mérite mieux qu’une gou-vernance !São Paulo, 25 avril 2014 — Sous l’influence des gou-vernements et de l’industrie, le document final du forum NETmundial est devenu un texte inefficace et décevant. Malgré le discours courageux de la présidente du Brésil, NETmundial montre simplement à quel point les efforts pour une gouvernance mondiale et multipartite sont risibles et inutiles. Si l’Internet devait être gouverné, ce devrait être par les citoyens directement, indépendam-ment de ces structures, et sans attendre un consensus global. Notre infrastructure de communication partagée doit être considérée comme un bien commun, défini poli-tiquement et défendu comme tel.

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Le discours courageux de la présidente Dilma Rousseff en faveur des libertés numériques, de la neutralité du Net et contre la surveillance de masse a eu un impact négligeable sur les conclusions de NETmundial. La version finale du document sur les principes de gouvernance d’Internet est pire que les brouillons antérieurs : des mentions de la non-discrimination des com-munications (neutralité du Net), qui étaient déjà très faibles, ont été enlevées, alors que des pas-sages sur le respect du droit d’auteur ont été ajoutés. En même temps, les passages du texte consacrés à la surveillance de masse – la raison initiale pour laquelle NETmundial a été convo-qué ! – sont ridicules, n’appelant à rien de plus que d’avantage de dialogue, échouant totalement à appeler à une quelconque action concrète.

NETmundial a eu cependant un résultat positif majeur : il montre la gouvernance globale et multipar-tite de l’Internet telle qu’elle est, ce cirque absurde de dix ans de Forums pour la Gouvernance de l’Internet (IGF), de discussions stériles qui laissent les citoyens dé»us, où les industries et les gouvernements ont le dernier mot, et dont rien de concret n’est jamais sorti pour la défense de l’intérêt général. La farce de la gouvernance de l’Internet par NETmundial doit servir à réveiller les citoyens qui veulent réellement la fin de la sur-veillance de masse et favoriser les libertés numé-riques.

»

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Nous devons mener un combat politique pour obtenir la protection de nos droits et libertés, en créant un contexte global qui forcera les gouvernements à protéger Inter-net comme un bien commun, inspiré par les précédents siècles de lutte pour les droits civiques et humains. Partout dans le monde, nous devons exiger de nos gouvernements qu’ils s’inspirent de la récente loi brésilienne Marco Civil da Internet : bien qu’elle soit loin d’être parfaite1, elle constitue un modèle que les citoyens courageux peuvent soutenir auprès de leur gouvernement pour agir concrètement pour la protec-tion des droits et libertés fondamentales et l’Internet libre déclare Jérémie Zimmermann, co-fondateur de La Quadrature du Net.

1 - L’article 15 de la Marco Civil prévoit que les fournisseurs d’accès à Internet conservent des traces des connections de leurs utilisateurs, une violation flagrante du droit à la vie privée, récemment condamnée par la Cour de Justice de l’Union européenne. Sa définition de la neutralité du Net laisse également la porte ouverte aux exceptions choisies par le régulateur du réseau.

La quadrature du nethttps://www.laquadrature.net/fr/ournetmundial-notre-internet-me-

rite-mieux-quune-gouvernance

22Internet

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De la gratuitéJean-Louis Sagot-Duvauroux

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Par tradition, la « culture de la gratuité » est associée à l’envers du marché, à un mode

alternatif de penser les échanges, à des démarches d’émancipation sociale, au don.

Mais elle subit aujourd’hui de puissants effets de brouillage. Le développement d’Internet

entremêle inextricablement vraies et fausses gratuités. Les stratégies marketing annexent

sans complexe l’attrait du mot « gratuit ». Les télévisions ou les journaux « gratuits » sont le cheval de Troie du tout-marchand publici-taire, alors que de grandes gratuités sociales comme l’école publique ou l’assurance mala-die subissent une crise grave et que la méca-

nique du profit semble occuper tout l’horizon. Quels enjeux de civilisation couvent sous cette question ? À quel prix peut-on encore dire avec Bruce Sterling: « Gratuit comme l’air, l’eau... gratuit comme la connaissance » ? Jean-Louis

Sagot-Duvauroux tente de répondre à ces ques-tions et propose une éthique de la gratuité.

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La poésie n’est pas une marchandise

Mortelles tensions sur l’espace commun, révolution du libre échange grâce à la prolifération Internet,

vacillement de notre rapport au temps sur les fron-tières qui séparent le marchand de l’inaliénable…

La dernière décennie a connu de brutales avancées du marché encadrées par la montée du contrôle et de la répression. Mais elle a vu aussi s’ouvrir

à la gratuité des perspectives tout à fait inédites. Pas uniquement des perspectives. Déjà de l’expé-rimentation. Pas seulement l’ouverture d’un rêve.

Mais de nouvelles mises en œuvre.

Travaillons un exemple, un seul, de cette utopie à l’œuvre. Il est possible que l’exemple choisi paraisse très périphérique à certains lecteurs. Mais ce sera, me semble-t-il, par un de ces effets d’optique que

provoque la puissante gravitation du marché et qui tord la lumière de la gratuité à la façon dont des

trous noirs tapis dans l’espace dérivent le rayonne-ment des étoiles. L’exemple est la poésie, ou plutôt

l’économie de la poésie. Ce précieux canton de l’acti-vité humaine est en train de sortir du marché. De A à Z. Depuis le travail et le temps qu’il faut pour écrire jusqu’aux rencontres où les textes se partagent. Dans la poésie, dans l’économie

de la poésie, toutes les crises dont ce texte a décrit le nœud trouvent comme une issue.

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Engager le combat pour conquérir à la gratuité des positions nouvelles

On peut dire, parce que l’expérience l’a montré, que sont particulièrement propices à la gratuité les biens dont l’usage est ressenti ou peut être ressenti comme un droit (la santé, l’éducation). Au départ et à l’origine de ce sentiment, il y a un besoin reconnu comme vital. Cette reconnaissance n’est pas spon-tanée, elle naît dans les affrontements de l’histoire.

Le besoin de savoir lire, écrire et compter est apparu comme vital à un certain stade du développement

historique. Des conditions objectives rendaient souhaitable sa satisfaction; il prenait forme aussi grâce à la volonté politique d’hommes et de forces qui proposaient comme objectif une société plus

instruite. Dès lors, ce besoin était mûr pour la gra-tuité. Et c’est dans la lutte pour obtenir cette gra-

tuité que l’éducation également proposée à tous les enfants a été désignée comme un droit (belle arme idéologique!) Ceci donne à penser que des besoins

qui apparaissent aujourd’hui périphériques – ou qui n’ont pas encore surgi – peuvent un jour être dési-gnés et considérés comme vitaux, puis porter des

luttes qui les transformeront en droits. On peut très bien imaginer, par exemple, et à perspective hu-

maine, que l’accès aux réseaux de communication connaisse une telle évolution, ce qui devrait faire

réfléchir à l’enjeu d’une éventuelle privatisation de France Télécom. Et déjà, devant la multiplication

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des coupures pour impayés que provoquent la mi-sère et le chômage, certains syndicats d’Électricité de France proposent que le service public de distri-

bution d’énergie assure un droit minimum, gratuit, au courant électrique.

De façon générale, peut être considéré comme vital tout bien dont, en fonction de l’évolution

de la société, on ne peut se passer sans être d’une manière ou d’une autre exclu

de la vie normale.

À l’opposé de ces besoins vitaux, il existe une multitude de biens dont

on peut se passer, ou plutôt de biens auxquels on attache d’autant plus d’importance qu’on peut y re-

noncer pour en préférer d’autres, tout ce qui, peu ou prou, sera désigné comme étant du luxe (« les belles

fringues, je m’en fiche, mais pour rien au monde je ne me priverais de voyager »). Ce luxe-là est très subjectif: il n’est pas le même à vingt ans qu’à cin-quante ; ce qui est du luxe à une certaine époque

historique peut devenir vital à une autre. On peut aussi, par amertume ou renoncement, dire « c’est du

luxe » à propos d’un bien qu’on n’a pas les moyens d’acquérir et qui pourrait être néanmoins considéré comme vital. Mais sur le fond, et pour une immense part des richesses produites par le travail humain, il existe bien des choix non contraints, un rapport de plaisir à la consommation et qui intervient lar-gement dans l’art de vivre. Certains biens sont du luxe par leur raffinement, leur rareté, leur prix, et la taille malgré tout limitée des ovaires de l’estur-

geonne est un grave obstacle à la libre distribution

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du caviar. S’offrir un petit luxe, c’est également introduire dans la consommation une fantaisie,

une particularité, se différencier, choisir. Une belle automobile, un papier peint délicat, une cravate originale, une bonne bouteille, un livre rare, une

nuit dans un grand hôtel ne méritent peut-être pas qu’on les vénèrent religieusement, mais il faudra

longtemps avant de trouver plus efficace que le marché, même capitaliste, pour alimenter

cet univers de la variété.

Dans ces domaines, la gratuité peut attendre.

Entre le luxe déclaré et les biens indispensables à la survie, il existe des domaines plus mélangés.

Certains produits de consommation sont tout à fait vitaux, mais avec cette particularité que le dévelop-

pement qualitatif et quantitatif de la production ainsi que l’évolution des mœurs y ont intégré dans la quotidienneté même de leur utilisation une cer-taine dose de variété, de luxe, même s’il est souvent

rendu illusoire par la faiblesse des revenus. C’est le cas par exemple de la nourriture ou de l’ha-billement. Le « socialisme réel » a montré combien il était délicat et périlleux d’y manipuler le marché. Même si elle permet la survie biologique, la relative uniformisation des produits alimentaires ou vesti-

mentaires entraîne une pénible frustration.

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Il faut donc réfléchir à la manière de faire respecter le droit de manger à sa faim ou d’être chaudement

habillé l’hiver sans rompre le lien subtil que les mé-canismes du marché ont établi entre le producteur

et le consommateur.

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`

Certains biens, enfin, sont rares, chaque fois originaux, leur besoin n’est aujourd’hui

consciemment ressenti que par une minorité et pourtant, on leur consent presque spontanément une part de gratuité. C’est par exemple le cas du

spectacle vivant, théâtre, opéra, ballet, concerts de musique savante, qui bénéficie souvent de larges subventions publiques. Disons tout d’abord que

profitant, par la force des injustices de la vie, à une élite intellectuelle et financière, ces biens avaient

davantage de chance d’attirer les fonds publics. Pas suffisamment néanmoins pour que, la part faite aux

subventions, le prix des places les rende vraiment accessibles à tous. Cependant, l’intervention pu-

blique et la part de gratuité qui en découle restent indispensables à la survie même de ces arts. Et il

est très intéressant de constater que l’entretien et le développement du patrimoine contiennent déjà, avec l’assentiment public, de sérieuses amorces de gratuité. On touche là, en effet, au domaine socia-lement vital – mais dans l’univers de l’esprit – de

l’identité collective sans laquelle s’installe l’inconfort mental, la dérive des points de repères, l’incapacité de juger, d’agir, de donner.

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Étendre qualitativement et quantitativement l’offre des biens qui étayent cette identité (conservation et développement du patrimoine culturel, mais aussi

naturel) est sans doute un autre territoire, très vaste, ouvert aux chantiers de la gratuité.

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Ces réflexions circonscrivent des familles de biens dont on peut raisonnablement souhaiter

qu’ils deviennent totalement ou partiellement gratuits. Elles invitent à penser un vrai rééqui-

librage qui ouvrirait une dialectique nouvelle entre efficacité économique et justice sociale, entre

un marché aux coudées franches mais recentré sur les domaines où il reste irremplaçable et

un vaste secteur d’intérêt public vraiment dégagé, dans ses objectifs, de la course au profit, ses lois,

ses contraintes. Les entreprises du marché peuvent d’ailleurs y trouver elles aussi de puissants avan-

tages comme c’est déjà le cas avec la fluidité que permettent le libre accès à la voirie

ou des transports en commun subventionnés. Grâce à ce rééquilibrage, bien des aspirations que

le marché avoue n’être plus en mesure de satisfaire ou ne pas avoir l’intention de traiter peuvent retrouver un commencement de perspective :

retour à des tâches utiles de la main d’œuvre inem-ployée, mise en valeur de l’environnement naturel, humanisation des villes, revitalisation de l’espace rural, aménagements et services susceptibles de

rétablir la convivialité perdue, tout ce que la gestion capitaliste laisse sur le bord de la route pour courir

après les taux de profit. Or peu à peu, ces rebuts de l’efficacité libérale représentent

les aspects humainement les plus prometteurs

de la modernité.

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Traduction économique de l’exercice d’un droit, la gratuité s’appuie sur des outils profondément ancrés dans la culture républicaine de la France. Pouvoir ou non les mobiliser constitue même un critère de faisabilité pour le passage à la gratuité

totale ou partielle de tel ou tel domaine aujourd’hui tenu par le marché. Bien public, parce que le simple fait pour un bien d’être sous contrôle ou propriété de la collectivité qui en a l’usage crée la base d’un

accès de droit pour ses membres ; utilité publique, pour établir la hiérarchie entre les avantages in-dividuels et l’intérêt général, pour marquer la lé-

gitimité supérieure de la solidarité et, quand c’est nécessaire, faire appel à la cotisation ; service public,

comme type d’organisation du travail où, dans le cadre des ressources mises

à disposition, la satisfaction des besoins peut l’emporter sur le critère du plus fort profit financier.

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extrait de

De la gratuité

Jean-Louis Sagot-Duvauroux

Éditions de l’éclatVersion lyber « ceci n’est pas un livre »

http://www.lyber-eclat.net/lyber/sagot1/gratuite.html

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Fac similé :

Le livre, que faire ?Quelques réflexions hétérodoxesFrancis Combes

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Free

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Free petrol

53Free macdo

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Free means free !

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indexetliensNeutralité du Net : un grand pas en avant pour l’internet libre ! (p.13)La Quadrature du nethttps://www.laquadrature.net/fr/neutralite-du-net-un-grand-pas-en-avant-pour-linternet-libre

#OurNETmundial : Notre internet mérite mieux qu’une gouvernance !(p.19)La Quadrature du nethttps://www.laquadrature.net/fr/ournetmundial-notre-in-ternet-merite-mieux-quune-gouvernance

de la gratuité(p.25)Jean-Louis Sagot-DuvaurouxÉditions de l’Éclat, version lyberISBN: 2-84162-121-9http://www.lyber-eclat.net/lyber/sagot1/gratuite.html

Le livre : que faire ?(p.39)R. Alberto, F. Combes, J. Faucilhon, E. Hazan, H. Korb, F. Salbans, A. Schiffrin, J. VidalLa fabrique éditionsISBN978-2-91-337274-0http://www.lafabrique.fr/catalogue.php?idArt=265

http://9gag.com/

Oh Internet, Internet

ColophonRevue dpi : don à public indéterminénuméro 0, version bêta test

Couverture sérigraphie (blanc sur papier noir), atelier 47

Imprimé à l’É.S.A.D. Orléans par ArkonJuin 2014

Cette revue est naturellement partageable, modifiable, sans indication d’origine.

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Direction éditorial et graphique :Clément Lecocq (Kirin) : clémentkirin.tumblr.comclementlecocq@gmail.com

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