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7/30/2019 La Theorie Monetaire Chez Myrdal
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Les prix dans la thorie montaire de
Myrdal
Alexander Tobon*
PHARE, Universit de Paris X-Nanterre
Rsum. Cet article prsente la contribution de la thorie montaire de
Myrdal la connaissance du comportement des prix en dsquilibre. Une fois
dfini lquilibre, on peut dmontrer lexistence dun processus cumulatif en
utilisant la capacit des entrepreneurs anticiper la variation des prix. Dans ce
processus, les prix varient de faon non proportionnelle la quantit de
monnaie, et cest cette non proportionnalit qui justifie la persistance duprocessus cumulatif, ce qui ntait pas le cas dans la thorie de Wicksell. Lesens et la grandeur de la variation des prix montaire sont parfaitement
dtermins. Cette analyse permet de rejeter la thorie quantitative de la
monnaie en utilisant lapproche de Wicksell, alors mme que ce dernier
pensait la valider. Ainsi, nous montrons quelques lments thoriques et
historiques en vue de fortifier la critique adresse la thorie quantitative de
la monnaie.
Mots cls : Myrdal, quilibre montaire, processus cumulatif, prix, profit.
Classification JEL : B22, D84, E21, E22, E31, E41.
* Universit de Paris X-Nanterre, Btiment K-131, 200 Avenue de la Rpublique, 92001,
Nanterre Cedex, France. Ml: atobon@u-paris10.fr. Je tiens remercier Carlo Benetti,
Alain Braud, Gilles Dostaler, Jrme de Boyer et Antoine Rebeyrol pour leurs
commentaires.
1
mailto:atobon@u-paris10.frmailto:atobon@u-paris10.fr7/30/2019 La Theorie Monetaire Chez Myrdal
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Introduction
Gunnar Myrdal est un des conomistes qui a tabli une relation entre la
monnaie et les prix dans le cadre de la thorie de Wicksell. Son texte,
Equilibre Montaire [1931], est cit frquemment dans la littrature
conomique mais malheureusement peu analys en dtail.1 Il est considr
comme lauteur ayant introduit dune faon cohrente la distinction ex
ante/ex post, laquelle est le point de dpart de la thorie de lquilibre
temporaire, dveloppe ensuite par Hicks [1939]. Cependant, lanalyse de
Myrdal continue tre mconnue sur ce qui constitue sa
contribution majeure : lapprofondissement de la connaissance sur la
variation des prix dans une situation de dsquilibre montaire.
Lorigine de labsence de reconnaissance de la thorie de Myrdal, et dune
grande partie de la littrature sudoise, a t la consolidation de la synthse
noclassique/keynsienne. Le consensus autour de la lecture de la Thorie
Gnrale a effac presque toute possibilit de dbat face aux thories qui la
prcdaient.2
Le schma IS-LM, dans la version du modle des anticipations
rationnelles de Lucas, na jamais essay dtablir explicitement un rapport
avec la tradition sudoise dans laquelle les anticipations jouent aussi un rle
fondamental. Dans la macrodynamique actuelle, les efforts ont t axs sur
la construction dun modle dquilibre avec des fondements
microconomiques. Les prix montaires ont dans ce modle une place
secondaire, au contraire des modles de Lucas et de Myrdal. Lamacroconomie actuelle se trouve de plus en plus loigne des intuitions
que lui ont donn origine. Face ce constat, la thorie de Myrdal nest pas
anachronique.
Lanalyse de Myrdal est construite comme une critique de la dfinition dun
quilibre montaire dans lapproche de Wicksell [1898]. 3 Depuis sa
1 Ldition originale de lEquilibre Montaire a t publie en sudois et intitule Om
penningteoretisk jmvikt, Ekonomisk Tidskrif 1931, publie en 1932. Une version
allemande est intitule Der Gleichgewichtsbegriff als Instrument der geldtheoretischen
Analyse, publie dans Beitrge zur Geldtheorie, edite par Hayek, Vienne 1933. Laversion dfinitive apparat en anglais en 1939. Pour plus de dtails sur les modifications
entre chaque version, voir Palander [1941].2 Une partie du dbat sur la relation entre Keynes et les conomistes sudois porte sur lide
selon laquelle ces derniers ont anticip les rsultats de la Thorie Gnrale. Cette ide est
dfendue notamment par Ohlin [1937, 1978], Shackle [1967] elle est attaque par Patinkin
[1978, 1982].3 Une critique du concept dquilibre montaire de Wicksell avait t dj formule par
Lindahl dans son texte Penningpolitikens Medel (Methods of Monetary Policy) de 1930.
Traduit partiellement dans Lindahl [1939] dans la partie II, intitule The Rate of Interest
and the Price Level. Myrdal va sopposer la critique de Lindahl, notamment sur la
question des prix.
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dissertation doctorale de 1927 intituleLe problme de la formation des prix
et le changement conomique, Myrdal avait port son attention sur le
problme classique de la dtermination des prix dquilibre. Il utilise uneapproche microconomique et introduit les ides de risque et de profit
anticip. En continuit avec cette tradition, le programme de recherche de
son Equilibre Montaire porte aussi sur la question des prix. Dans une
approche macroconomique, lanalyse des prix apparat explicitement dans
ce quil appelle la troisime condition de lquilibre montaire. A travers
cette condition, Myrdal propose une thorie des prix dquilibre et de
dsquilibre, laquelle constitue en mme temps une critique et une solution
aux problmes de la thorie de Wicksell.
Malgr son importance, lanalyse des prix de Myrdal apparat obscure et
apparemment dconnecte du reste de sa thorie. Ces deux difficults nontpas t surmontes par ses commentateurs. Ils se consacrent ltude des
deux autres conditions de lquilibre montaire : celle relative lgalit
entre le taux montaire et le taux naturel et celle relative lgalit entre
linvestissement et lpargne. Les travaux les plus remarquables sont
notamment Palander [1941], Shackle [1945] et Shackle [1967], lesquels sont
consacrs exclusivement ltude de lEquilibre Montaire. Ces tudes
mettent trop laccent sur la justification des anticipations comme une forme
de dynamisation de la thorie de Wicksell et, surtout dans lintention de
dfendre une politique de stabilisation du niveau des prix. La troisime
condition de lquilibre nest traite en dtail que par Palander [1941].
Nanmoins, son analyse des prix ne se rvle cohrente que dans le cadre la
thorie de Lindahl.4
Dans cet article, nous essayons de prsenter la spcificit de lanalyse des
prix de la thorie de Myrdal par rapport celle de Wicksell. Nous
nessayons pas seulement denrichir la comprhension du concept
dquilibre montaire mais aussi de prsenter le modle de Myrdal comme
une solution larrt du processus cumulatif des prix dans la thorie de
Wicksell. Il est ainsi possible de dterminer le sens et la grandeur de la
variation des prix montaires. Le caractre spcifique des propositions de
Myrdal tient la capacit des entrepreneurs danticiper la variation nonproportionnelle des prix. Cela permet aux entrepreneurs lobtention dun
profit additionnel positif en termes rels. Au fond, lanalyse de Myrdal sert
4 Parmi les travaux consacrs exclusivement ltude de la pense de Myrdal, on trouve par
exemple Hicks [1982], Dostaler [1990] et Dostaler et all [1990]. Les travaux plus
nombreux sont ceux qui prsentent certains aspects de la thorie de Myrdal dans le cadre de
lEcole de Stockholm, par exemple Ohlin [1937], Lerner [1940], Ohlin [1978], Patinkin
[1978, 1982], Hansen [1981], Hansson [1982], Jonung [1991, 1993], et rcemment Laidler
[1999].
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complter celle de Wicksell mais rejette la thorie quantitative de la
monnaie.
Pour accomplir notre objectif, nous avons divis ltude en six parties. La
premire section est consacre lidentification de lquilibre montaire,
autant chez Wicksell que chez Myrdal. La deuxime prsentera lanalyse du
dsquilibre ou processus cumulatif des prix. Puis, dans la troisime partie,
nous prsentons le processus de variation du niveau gnral des prix dans le
cadre de la distinction ex ante/ex post. La quatrime partie prsentera les
avantages de la thorie de Myrdal par rapport celle de Wicksell. La
cinquime section suggre un mcanisme de formation des prix de march,
et enfin, dans la dernire section on prsentera les conclusions.
1.La dfinition de lquilibre montaireLe point de dpart consiste tablir la distinction entre lquilibre montaire
de Wicksell et celui obtenu travers la critique de Myrdal. Il est bien connu
que dans la thorie de Wicksell, lquilibre montaire est dfini par trois
conditions : 1) lgalit entre le taux montaire et le taux naturel , 2)
lgalit entre linvestissement
mi ni
Iet lpargne , et 3) le niveau gnral des
prix est constant (ou stable), donc son taux de variation dans le temps
S
P& est
gal zro. On a alors :
nm ii =
SI=
0=P&
Le taux dintrt montaire est dfini comme celui auquel les banques
prtent la monnaie aux entrepreneurs5
et, le taux dintrt naturel est dfini
comme la productivit marginale physique des facteurs du processus
dtourn de production. Lorsque ces deux taux sont gaux, aucun
entrepreneur nest incit modifier son niveau de production puisquil
naperoit pas la possibilit dobtenir un profit additionnel. Cette situation
se reflte au niveau global, puisque linvestissement sera gal lpargne,ou la mme chose, loffre globale des biens est gale la demande globale.
Etant donn cet quilibre, le niveau gnral des prix doit rester constant,
donc les prix relatifs vont aussi rester constants. La persistance de cet
quilibre dans le temps, implique que le taux dinflation est zro. Voil les
trois conditions dun quilibre montaire neutre.
5 Pour simplifier notre tude, nous supposons que lentrepreneur est le propritaire du
capital. Il est donc un entrepreneur-capitaliste.
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Myrdal considre que cette dfinition dquilibre montaire est
partiellement fausse et loin dtre claire (p. 44). Il procde sa critique
immanente, non pas pour rejeter le concept dquilibre mais pour leremplacer par une notion dquilibre plus claire et mieux fonde du point
de vue thorique (p. 44). Daprs Hicks [1982] la critique de Myrdal aux
trois conditions de lquilibre de Wicksell peut tre rsume de la faon
suivante: professor Myrdal [...] finds, as others have found, that (1) and
(2) are consistent, but that the fulfilment of conditions (1) and (2) does not
necessary imply the simultaneous fulfilment of (3) (p. 43). Nous allons
voir que la critique de Myrdal est plus complexe.
Dans la thorie de Myrdal, sil y a plein emploi et flexibilit des prix,6
lquilibre montaire est dfini par le trois conditions suivantes: 1) la valeur
des nouveaux biens de capital (ou nouvel investissement) est gale au
cot de production de ces nouveaux biens de capital , 2) linvestissement
brut rel est gal au capital libre disponible W, et 3) le niveau gnral
des prix peut varier de faon proportionnelle, donc son taux de variation
dans le temps
2c
2r
2R
P& est gal une constante k. Cette constante sera positive si
les prix augmentent ou ngative si les prix baissent. On a alors7
:
22 rc =
WR =2
kP =&
La premire condition signifie que pour lentrepreneur, le prix de demande
des biens de capital (ou biens dinvestissement) est gal au cot de
production de ces biens.8
Lentrepreneur ne peut quobtenir un profit
normal, aucun profit additionnel nest possible. Shackle [1967] prcise
encore que sil existe une galit entre et , this equality is the
condition for2c 2r
ceteris paribus constancy, not of the general price level but of
the size of the aggregate net investment flow (p. 114). Cest pour cela quil
ny a pas de profits additionnels. Il faut remarquer que cette condition est
dfinie seulement pour les nouveaux biens et non pour tous les biens commechez Wicksell.
6 Nous ne considrerons pas lanalyse avec une situation de chmage et de rigidit des prix,
laquelle est aborde par Myrdal la fin du chapitre VI de son ouvrage.7 Nous avons prfr conserver la mme notation de Myrdal pour permettre au lecteur une
confrontation directe avec son texte. Lindice 2 signifie que la valeur se rapporte au nouvel
investissement et non au capital rel existant lequel est marqu par lindice 1.8 Il semble que cette premire galit provienne de la thorie de la capitalisation de Walras
introduite en Sude par Cassel. Ainsi, lanalyse de lquilibre temporaire de Myrdal est plus
proche de la pense de Walras que celle de Marshall.
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Dans la seconde condition, dune part, linvestissement rel brut
comprend le rinvestissement aussi bien que le nouvel investissement.
Dautre part, le capital libre disponible W comprend lpargne brute Splusune grandeur montaire appele le facteur D qui reprsente lcart entre la
dprciation et lapprciation. On a alors que
2R
DSW += . Cest sur ce terme
D que repose toute la nouveaut de Myrdal en ce qui concerne la connexion
entre les prix montaires et les anticipations. Ainsi lpargne apparat
dfinie dune manire tout fait originale, laquelle ne sera pas reprise par la
suite dans lanalyse macroconomique de type keynsien. Tout cela mrite
une explication dtaille.
Le facteur D est dfini comme le terme qui mesure les anticipations. Plus
exactement, il correspond au changement net anticip de la valeur du
capital. Daprs Myrdal, le facteurD est calcul pour la mme priode en
prenant en considration toutes les prvisions de revenu et de cots pour
toute la dure de vie des biens capitaux et aussi les taux dintrt qui sont de
rgle dans lavenir. On donne ici au changement de valeur anticip un signe
positif, pour le cas ordinaire o le changement se manifeste par une
dprciation, ce qui signifie quune apprciation compte pour une
dprciation ngative. Ce changement de valeur est alors dfini comme la
diffrence entre la valeur prsente du capital rel et la valeur du capital
attendu la fin de la priode unitaire, changement net qui doit aussi tre
ramen sa valeur prsente par le calcul de lescompte (p. 68). Ainsi, si
cette diffrence est ngative, le facteur D est compris comme un profitadditionnel ou plus-value et, si la diffrence est positive, le facteur D est
compris comme une perte.
Une fois le facteurD ajout lpargne, on comprend pourquoi le capital est
considr comme libre. Myrdal explique que cette disposition de capital
W, est libre du point de vue de lentrepreneur priv, en ce sens que,
abstraction faite de la part pargne de son revenu, sans vendre ni
hypothquer son capital rel, il peut disposer exactement de cette partie de
la valeur de la proprit investie qui correspond au montant de la
dprciation moins lapprciation (p. 102). Ainsi, comme il est indiqu par
la seconde condition, lconomie dans son ensemble dispose dun montantde ressources W, lequel est compos par la somme entre lpargne Set une
plus-valueD. Ce montant West pris en charge par linvestissement rel brut
.2R
Dans lquilibre de Myrdal, les conditions 1) et 2) tant satisfaites, toute
variation proportionnelle du niveau gnral des prix laisse ces deux
conditions inchanges en termes rels. En effet, tant en quilibre, lorsque le
taux de variation de la quantit de monnaie est constant chaque priode, le
niveau gnral des prix varie de faon proportionnelle. Cette
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proportionnalit implique que la structure des prix relatifs ne se modifie pas.
Ainsi, le taux dinflation est constant dans le temps et non nul comme dans
le modle de Wicksell. Daprs Myrdal, Wicksell acceptait la formulerconfortante dun niveau de prix constant plus par sentiment et comme
consquence dune intuition normative, a priori (p. 129). Voil les trois
conditions dun quilibre montaire neutre dans lapproche de Myrdal. Nous
devrons mme dire quil sagit dun quilibre montaire superneutre.
La dfinition de lquilibre montaire de Myrdal scarte de celle de
Wicksell notamment lorsquil considre une interaction entre le facteurD et
la troisime condition de lquilibre, celle relative aux prix. Cela est plus
clair lorsquon introduit explicitement la distinction ex ante/ex post.9
Dans
une priode, il existe trois moments : le moment ex ante dlaboration des
plans sur la base des anticipations, la priode elle-mme pendant laquelle lesplans se ralisent et, le moment ex postpendant lequel les rsultats des plans
sont enregistrs. Selon Myrdal, la dfinition de lquilibre montaire a un
intrt dans le cadre de la thorie de Wicksell si lon tablit les trois
conditions de lquilibre au moment ex ante. Cet quilibre ex ante est
possible si les plans de vente et dachat des entrepreneurs sont compatibles
entre eux. Cela signifie que tous les entrepreneurs anticipent les mmes prix
pour les mmes biens, cest--dire que les prix anticips sont dquilibre.10
Cela est comprhensible puisque en quilibre le taux dinflation est
constant.
Etant donn cette compatibilit, la premire condition est satisfaite ex ante
puisque aucun entrepreneur ne peut anticiper un profit additionnel. La
seconde condition est aussi vrifie, linvestissement ex ante est gal au
capital libre disponible ex ante et la troisime condition est respecte
puisque tous les prix anticips varient dans la mme proportion. Le taux
dinflation continue tre constant et lquilibre ne se modifie pas en termes
rels. Une fois que lquilibre montaire est dfini, lintrt doit tre port
sur lexplication du dsquilibre montaire. Daprs Myrdal, en partant
dune situation dquilibre montaire, dfini par les trois conditions, un
9 Lindahl [1939] reconnat limportance dune distinction pour lanalyse des prix, il crit : Ltude du mcanisme des prix [] a t rcemment grandement facilite par ladoption
de la distinction entre calculs faits ex ante et ex post []. Cette mthode sest rvle
fructueuse et permet une solution simple dun certain nombre de points discuts,
particulirement dans lexplication des mouvements gnraux de prix, dans la mesure o ils
sont dtermins (entre autres choses) par la relation entre pargne et investissement. Nous
devons au Professeur Myrdal de lavoir suggr et davoir indiqu ses rpercussions dans
lanalyse des mouvements de prix (p. 59).10 Selon Hicks [1939], les grandeurs ex ante ne seront obligatoirement gales que si les
plans sont compatibles (p. 171). De la mme faon, Palander [1941] crit: monetary
equilibrium in general implies a certain degree of congruence between different economic
subject expectation about the same things (p. 56).
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dsquilibre ex ante peut provenir des changements dans les anticipations
sur les prix ou des changements dans le taux dintrt montaire. Dans le
cadre de la thorie de Wicksell, le dsquilibre est clairement identificomme un processus cumulatif des prix. Lanalyse de ce processus est
lobjet de la section suivante.
2.Vrification du dsquilibre montaireSupposons un quilibre montaire ex ante o 22 rc = , WR =2 et .
Etant donne cette situation dquilibre, les banques dcident au dbut dune
priode de baisser le taux dintrt montaire . Comment lquilibre
montaire est-il perturb ? Tout dabord, la dcision dinvestissement dun
entrepreneur est calcule sur la base du revenu net actualis e, lequel est
calcul partir du taux montaire ex ante et dun systme des prix anticips.
Ces deux variables permettent de calculer la recette brute actualise b, les
cots actualiss m et, notamment un facteur d net de
dprciation/apprciation. Nous avons alors lquation
kP =&
mi
'''' dmbe = .
Si le taux montaire baisse au dbut de la priode, le revenu net ex ante doit
augmenter par actualisation11
mais aussi par lanticipation des entrepreneurs
dune hausse du niveau gnral des prix qui ne correspond pas au taux
dinflation de la priode prcdente. Les prix vont augmenter puisque la
demande sera suprieure loffre. La compatibilit des plans est dtruiteparce que chaque entrepreneur anticipe de faon indpendante une hausse
diffrente des prix. Les entrepreneurs anticipent un profit additionnel
puisque le facteur d diminue, ce qui signifie une diminution des cots de
dprciation et/ou une augmentation des revenus par apprciation. 12 La
hausse des prix affecte le facteur d puisque ce dernier dpend des prix
anticips. Myrdal prcise : la dprciation et lapprciation ne sont en
aucune faon dtermins par les prix courants dans la situation prsente,
mais par les prix futurs anticips (p. 104).
On a alors une augmentation du revenu net qui se traduit par
laccroissement de la valeur de capital, laquelle est suprieure son cot de
11 Selon Hicks [1939], une baisse des taux dintrt aura pour effet daugmenter le revenu
si elle augmente la valeur actuelle des recettes prvues plus quelle naugmente la valeur
actuelle du flux normal (p. 172).12 Shackle [1945] dmontre le rattachement de lide de Myrdal dune productivit en
valeur dchange (utilise dans la premire condition) au facteur net d (utilis dans la
deuxime condition). Dans notre notation, le facteur d est gal la variation de la valeur
des nouveaux biens de capital dans le temps : )/(' 2 dtdcd = . Le signe ngatif veut dire
une diminution du facteur d.
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production.13
On a donc , ce que Myrdal appelle un tat
doptimisme. La premire condition nest plus respecte au moment ex ante,
donc un dsquilibre au niveau individuel est constat. Les anticipations surla variation des prix sont relies lexistence du profit additionnel travers
le facteur d. Selon Myrdal les anticipations nacquirent une signification
pour la marge de profit quen liaison avec des changements dans les valeurs
de capital (p. 132).
22 rc >
Etant donne lincompatibilit des plans individuels, qui apparat travers
lcart entre et , un dsquilibre global est aussi constat. Les
entrepreneurs augmentent leur demande de crdit, donc linvestissement
2c 2r
2R
augmente ex ante. Mais que se passe-t-il avec le capital libre disponible W
ex ante ? Myrdal donne beaucoup dimportance cette question puisquellepermet de dterminer de faon plus exacte le dsquilibre global. Dabord,
nous avons dj dfini le capital libre disponible par lquation .
Ensuite, nous avons galement dfini le revenu net ex ante pour chaque
entrepreneur par lexpression
DSW +=
'''' dmbe = . Par consquent, au niveau
agrg, le revenu net global ex ante E est dfini par
lquation DMBE = . Si le facteur d diminue pour chaque
entrepreneur, le facteurD global diminue aussi. Ainsi, le revenu net global
ex ante saccrot. Nous avons deux cas possibles. 1) Si nous supposons que
la consommation demeure constante malgr laugmentation du revenu, le
capital libre disponible W ne peut pas changer, puisque lpargne S
augmente dans la mme proportion dans laquelle D diminue. Ainsi, il y a
une compensation entre ces deux termes. Dans ce cas, avec W
constante.
WR >2
Mais, 2) si nous supposons que la consommation augmente tant donne
laugmentation du revenu, le capital libre disponible W doit diminuer,
puisque les entrepreneurs deviennent de plus en plus optimistes. Ainsi, le
facteurD diminue encore plus par rapport laugmentation de lpargne S.
Dans ce cas, avec W en diminution. Quelle que soit lhypothse
impose sur la consommation, linvestissement dpasse toujours le capital
libre disponible. Bref, la seconde condition de lquilibre nest pasrespecte. Le march des biens est en dsquilibre global ex ante puisque la
demande globale est suprieure loffre globale. Le niveau doffre globale
WR >2
13 Shackle [1945] explique de faon exacte la signfication de cette ingalit : [ ] is
a belief or working assumption in an individuals mind as to the profit he can make,
expressed as a capital value at a point of time, by laying out money on accessions to his
capital equipment according to certain time-schedule which appears, by balancing the
advantage of earlier completion against the extra cost of accelerated construction, to be
optimal (p. 57).
22 rc >
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dpend de lhypothse faite sur la consommation. Le march du crdit
demeure toujours en quilibre puisque les banques satisfont toutes les
demandes de crdit.
Il sagit maintenant danalyser en dtail les consquences dune baisse du
taux montaire sur la troisime condition dquilibre, celle relative au
niveau gnral des prix.
3.Variation du niveau gnral des prixUne fois que le dsquilibre individuel et global est constat ex ante, un
processus cumulatif des prix doit se dclencher. Etant donn que la
demande globale est suprieure loffre globale ex ante, tous les prixmontaires doivent alors augmenter pendant la priode. Il y a deux
questions rsoudre. Premirement, il sagit de savoir si cette augmentation
des prix est proportionnelle ou non proportionnelle lorsquon obtient les
prix de march. Deuximement, il sagit de savoir si cette augmentation des
prix (proportionnelle ou non) a t celle que chaque entrepreneur avait
anticipe au moment ex ante.
Pour rpondre ces deux questions, il faut reconstruire largument jusqu
prsent. Au moment du dsquilibre ex ante, les entrepreneurs ont des plans
dinvestissement qui, a priori, ne sont pas compatibles. Une fois que les
entrepreneurs vont sur le march (pendant la priode), ils peuvent confronterleurs plans dachat et de vente. Les prix de march se forment et les
transactions stablissent.14 On constate le dsquilibre global selon lequel
la demande globale est suprieure loffre globale et tous les prix de
march se fixent la hausse. A la fin de la priode, ex post, les
entrepreneurs constatent que les prix de march ont vraiment augment
comme ils lavaient prvu lors de la diminution du taux montaire . Mais
quel est le rapport entre ces prix de march ex postavec ceux quils avaient
anticips ex ante?
mi
Le rapport entre prix anticips et prix de march stablit par trois cas
possibles : i) une hausse proportionnelle des prix qui na pas t anticip par
les entrepreneurs, ii) une hausse non proportionnelle des prix qui a t
parfaitement anticipe et, iii) une hausse non proportionnelle des prix qui
nest pas celle quils avaient anticipe. Dans le cas i), lorsque tous les prix
augmentent de faon proportionnelle, les entrepreneurs obtiennent un profit
rel additionnel nul. Ainsi, les entrepreneurs nont aucune raison de
demander plus de crdit, donc le processus cumulatif doit sarrter. Les
14 Dans la section 5, un mcanisme de formation des prix de march est suggr dans la
thorie de Myrdal.
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entrepreneurs doivent alors rviser leurs anticipations pour la priode
suivante. Le cas ii) implique la ralisation parfaite des anticipations sur le
march. Dans ce cas, si les prix augmentent de faon non proportionnelle,comme il avait t prvu, tous les entrepreneurs peuvent obtenir un profit
rel additionnel positif, ceux ci vont continuer demander plus de crdit,
donc le processus cumulatif peut continuer.15
Enfin, le cas iii) implique que certains entrepreneurs peuvent obtenir un
profit rel positif, dautres continueront recevoir leur profit normal (profit
rel additionnel nul) et dautres vont subir des pertes. Pour les priodes
suivantes, tous les entrepreneurs peuvent rviser leurs anticipations
indpendamment du niveau du profit reu.16
Ceux qui ont un profit rel
positif continueront demander plus de crdit. Les prix continuent
augmenter en justifiant ainsi la persistance du processus cumulatif. Dans cecas, le dsquilibre dcrit dans la section 2 (celui expliqu sous la deuxime
hypothse de changements dans la consommation) se rptera, jusquau
moment o les banques dcident daugmenter le taux montaire son
niveau dquilibre.17 Il est clair que les banques ne sont pas incites
modifier leur taux montaire parce que la monnaie est pur crdit.
La question maintenant consiste savoir avec lequel de ces trois cas le
modle de Myrdal est compatible. Premirement, Myrdal souligne que
tout homme daffaires sait quil nexiste pas de niveau de prix homogne.
Il connat plutt la signification des changements dans les relations de prix
lintrieur du niveau gnral des prix (p.34). Cela veut dire que les
entrepreneurs sintressent aux variations des prix qui leur sont favorables,
cest--dire lorsque la hausse du prix du produit dpasse la hausse des cots.
Cela nest possible que sils anticipent une variation non proportionnelle des
prix par rapport laugmentation de la quantit de monnaie. Ainsi, sil
existe une liaison entre ce que les entrepreneurs anticipent et ce quils
dcident (et trouvent) sur le march, la variation des prix doit tre non
proportionnelle. Myrdal lui-mme remarque le fait que les dcisions
dacheter et de vendre une marchandise manent dindividus tout fait
diffrents (p. 38). Le cas i) est donc cart. En bref, la variation non
proportionnelle des prix par rapport la variation dans la quantit demonnaie, implique la modification de la structure des prix relatifs.
15 Ce profit se ralise par le phnomne de lpargne force. Celle-ci est lie lexistence
de revenus nominaux qui varient de faon non proportionnelle par rapport aux prix
montaires. Ces revenus sont fixs par des contrats qui sont actualiss sporadiquement. Les
profits en sont exclus puisque la fonction de profit est homogne de degr 1 en prix.16 Les entrepreneurs vont rviser leurs anticipations sur la base de ce que Myrdal appelle
les fonctions de raction .17 Le nouvel quilibre nest pas le mme que celui de dpart. La comparaison de ces deux
quilibres temporaires a t le point dappui de la thorie de lquilibre complet qui soutient
la thorie des cycles conomiques, notamment celle de Hicks et de Hayek.
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Deuximement, nous savons que chez Wicksell, lquilibre implique
labsence de variation des prix et que le dsquilibre implique quant luiune variation des prix, cest--dire un processus cumulatif. Chez Myrdal, les
prix varient tant en quilibre quen dsquilibre. Alors, la dfinition de ces
deux tats dpend de la nature de la variation des prix. Myrdal insiste sur le
fait que lquilibre montaire est dfini comme labsence de processus
cumulatif. Cette dfinition nest cohrente que si lon prcise quen
quilibre les prix varient proportionnellement et quen dsquilibre les prix
ne varient pas proportionnellement. De manire plus prcise, lquilibre est
dfini par labsence dun processus cumulatif des prix dont la variation nest
pas proportionnelle. De cette faon, la dfinition de lquilibre montaire de
Myrdal a un sens seulement si lon accepte le cas iii) du paragraphe ci-
dessus.18
Bref, en acceptant le cas iii) Myrdal attaque la thorie quantitative de la
monnaie. Lorsque la quantit de monnaie augmente, le niveau gnral des
prix augmente aussi mais de faon non proportionnelle. La structure des
prix relatif se trouve modifie en indiquant labsence de la neutralit de la
monnaie. Voil la contribution de lanalyse des prix de Myrdal la thorie
montaire. Il faut remarquer que notre tude des prix est contraire celle de
Palander [1941]. Il considre ncessaire lanalyse des squences de Lindahl
pour dmontrer de faon cohrente un processus cumulatif des prix dans la
thorie de Myrdal. Il obtient un processus dajustement par les quantits o
les prix sont dtermins de faon arbitraire par les entrepreneurs. Dans la
section suivante, nous allons prciser que, mme si Myrdal rejette la thorie
quantitative dans la version wicksellienne, il propose une solution au
problme de lexistence du processus cumulatif dans la thorie de Wicksell.
4.Myrdal, Wicksell et le problme des prixanticips
Dans le cadre de la thorie quantitative de la monnaie, la contribution du
processus cumulatif de Wicksell consiste en une prsentation prcise dumcanisme indirect. Ce dernier relie la monnaie aux prix par lintermdiaire
du taux dintrt montaire pour assurer une monnaie neutre. Lors dune
perturbation sur lquilibre montaire wicksellien, tel que nous lavons dj
dfini, un processus cumulatif des prix est dclench. Supposons que les
18 Dans le cadre dun modle avec chmage et rigidit des prix montaires, Myrdal sappuie
aussi sur la non proportionnalit des prix. Il crit : En raison de cette rigidit de certains
prix, chaque changement primaire, de quelque importance dans le systme des prix, dtruira
le paralllisme dans lensemble des relations de prix (p. 134).
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banques baissent le taux montaire, le taux naturel sera alors suprieur au
taux montaire . Les entrepreneurs envisagent un profit rel additionnel
positif sur la base de la stabilit des prix courants. Ils vont donc augmenter
leur demande de crdit. Ainsi, linvestissementIest suprieur lpargne S,
cest--dire que la demande agrge des facteurs de production est
suprieure leur offre globale. Cela signifie quil y a un dsquilibre sur le
march des biens puisque les entrepreneurs ne peuvent pas acheter la
quantit des facteurs de production dont ils ont besoin.
ni
mi
Si les banques ne sont soumises aucune contrainte, elles vont satisfaire
toutes les demandes de crdit, donc le march du crdit est toujours en
quilibre. Dans une situation de plein emploi, lorsque la demande des
facteurs de production est suprieure loffre, la loi de loffre et de lademande assure que tous les prix vont augmenter. De cette faon, les
entrepreneurs vont voir tous les prix des facteurs de production augmenter
proportionnellement et, par consquent, ils vont recevoir un profit nominal
plus lev mais un profit rel additionnel nul. A la priode suivante, sur la
base de la stabilit des prix courants, les entrepreneurs vont continuer
demander plus de crdit. Le dsquilibre sur le march des biens persiste et
les prix continuent augmenter sans arrt. Aucun changement ne se
prsentera, ni sur les prix relatifs (puisque tous les prix augmentent dans la
mme proportion), ni sur le salaire rel, ni sur le niveau demploi. La
neutralit de la monnaie est donc dmontre. Le niveau des prix reste
instable ou indtermin jusquau moment o les banques dcident de fixer letaux montaire au niveau dquilibre. Ainsi, le niveau des prix est dtermin
par les banques.
Lexistence dun processus cumulatif suppose que les entrepreneurs
continuent demander du crdit malgr le fait quils reoivent un profit rel
additionnel nul. Ceci est inacceptable. Si, dans un premier moment les
entrepreneurs reoivent un profit rel additionnel nul, il nexiste aucune
raison pour que les entrepreneurs demandent plus de crdit la priode
suivante. A ce moment, le processus cumulatif sarrte. Le niveau des prix
se trouve dtermin avant mme que les banques aient dcid daugmenter
le taux montaire son niveau dquilibre. Ce nest pas le cas dans lemodle de Myrdal. Dans ce dernier, le processus cumulatif ne peut pas
sarrter. Une fois que les entrepreneurs anticipent une variation non
proportionnelle des prix, certains pourraient recevoir un profit additionnel
positif en termes rels.19
Le processus de production devient plus
19 Chez Myrdal, la monnaie considre est aussi pur crdit. Il crit : Toute lanalyse
montaire centrale est construite sur lhypothse de libre circulation ce qui signifie
principalement, dans ce cas, que le systme bancaire peut pratiquer nimporte quelle sorte
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capitalistique, comme Wicksell voulait le dmontrer. Cela a t la
consquence de lacceptation du cas iii).
Le modle de Myrdal se prsente comme une solution larrt du processus
cumulatif de Wicksell. En mme temps, lorsque les prix montaires varient
de faon non proportionnelle la variation de la masse montaire, la
structure des prix relatifs se modifie. Cest ainsi que la neutralit de la
monnaie nest pas vrifie. Myrdal obtient un rsultat intressant : il remet
en cause la thorie quantitative de la monnaie dans lapproche de Wicksell,
lorsque ce dernier prtendait la valider.
Daprs Myrdal, Wicksell tablissait un contact troit avec les traditions
de la vieille thorie quantitative quil navait jamais eu lintention de
dtrner, mais seulement de perfectionner (p. 130). Myrdal est convaincuque sa thorie rejette enfin les postulats de la thorie quantitative dans le
cadre wicksellien. Nanmoins, il est bien connu que le fait de considrer
Wicksell comme un thoricien quantitativiste nest pas partag par
lensemble des conomistes, notamment Schumpeter [1954]. En revanche,
Marget [1938] cite une srie de passage qui prtendent dmontrer ladhsion
de Wicksell la thorie quantitative. La position de Robinson [1939] est
plus nuance. Elle croit que : Wicksell deposed the Quantity Theory, while
believing himself to adhere to it (p. 494). Indpendamment de la position
de Wicksell, le message de Myrdal est enfin que les anticipations sur la
variation des prix constituent une manire de dtruire la neutralit de la
monnaie impose par la thorie quantitative.20
5.La formation des prix de marchNous avons vu qu travers la modle de Myrdal, il est possible de
dterminer le sens de la variation des prix : lorsque le taux montaire baisse,
les entrepreneurs anticipent la hausse des prix. Cependant, nous navons
rien dit sur la dtermination de la grandeur de cette variation.21
Il sagit alors
de dterminer les prix de march, lesquels permettront de connatre lgalit
de conditions de crdit ; ce qui implique que le systme bancaire peut satisfaire toutes les
demandes de crdit (p. 113).20 Limportance des anticipations dans lanalyse montaire est exprime explicitement par
Myrdal. Il crit : Cest donc essentiellement la mme objection de principe que je dois
opposer la fois Keynes et Hayek [] : leur expos thoriques du problme ne tient pas
un juste compte [] des anticipations []. Cette objection est tout fait dcisive puisque
[] toute la question montaire dpend du facteur danticipation (p. 47).21 Dans la thorie de lquilibre gnral walrasien, le problme de la formation des prix de
march est rsolu par le ttonnement. Celui-ci est capable de dterminer le sens de la
variation des prix mais la grandeur dune telle variation ne peut pas tre tablie.
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ou lcart des prix anticips par rapport aux prix de march. Il est possible
ainsi dtablir un jugement des anticipations des entrepreneurs.
Daprs Palander [1941], It seems difficult to find any explicit or even
implicit- assumption about price determination in Myrdal or other authors
of the Stockholm School (p. 44). Myrdal ne parle pas explicitement dune
telle dtermination. Il se contente de remarquer limportance des
vnements qui se droulent pendant la priode. Il crit : les tendances
existant dans une certaine situation de prix [] sont dtermines par les
anticipations []. Ces anticipations dterminent le comportement des sujets
conomiques et, par consquent, ces changements dans lensemble du
systme des prix, qui durant une priode, se manifestent effectivement
comme le rsultat des actions des individus. Ceci doit tre fortement
soulign (p. 124).
Nanmoins, un mcanisme de formation des prix de march peut tre
suggr. Dans le chapitre I de son texte, Myrdal se pose la question
suivante : quel est le contenu exact de la notion offre et demande pour
lensemble de tous les biens ? (p. 37). A cette question il rpond par une
expression qui tablit une relation entre le niveau des prix des biens de
consommation , le revenu global E, la production totale de biens de
consommation , et la propension marginale pargner s. Cette
expression est lquation de Lindahl
CP
CQ22
: CCQPsE = )1( . Daprs cette
quation, les prix des biens de consommation assurent que le profit
additionnel est dpens dans son intgrit dans lachat des biens de
consommation. Ainsi, linvestissement net (du remplacement du capital) est
gal zro. Il ny a pas de dpense dans les biens de capital pour largir la
production. Lquation de Lindahl nest pas approprie pour le modle de
Myrdal puisquelle ne permet pas de considrer les prix des biens de capital.
Un premier pas vers la dtermination des prix des biens de capital consiste
introduire linvestissement I dans lquation de Lindahl. On a alors
. Maintenant, P indique le niveau gnral des prix
montaire (prix des biens de consommation et prix des biens de capital) et Qla production global dun unique bien de production. Ainsi, il nexiste quun
type de bien qui est consomm et investi. La production globale est
reprsente par la somme entre la production des biens de consommation
PQIsE =+ )1(
22 Cette quation apparat dans le texte Penningpolitikens Medel (Methods of Monetary
Policy), 1930, traduit partiellement dans Lindahl [1939]. Elle reflte lide de Took, reprise
ensuite par Wicksell, que la dpense du revenu dtermine le niveau des prix. La proposition
de Took est appele lapproche du revenu. Daprs Patinkin [1982], travers cette quation
on peut voir le Lindahls central message: prices, not output (p. 44).
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CQ et la production des biens de capital . On a alorsIQ IC QQQ += . En
sachant que EsS= , le niveau gnral des prix montaires est :
Q
ISEP
+=
Dans le cadre du modle de Myrdal, on a:
Q
RWEP 2
+=
Le prix montaire du bien Q est dtermin par le rapport entre la quantit
totale de monnaie dpense sur le march et la quantit de ce
bien. Plus prcisment, la production globale est vendue en change de la
monnaie dpense sur le march. Cette quantit de monnaie est dtermine
au moment ex ante par les acheteurs et la production est mise effectivement
sur le march par les vendeurs. Cette expression ne constitue pas une
quation quantitative : il ny a pas de vitesse de circulation de la monnaie, la
quantit de monnaie est endogne et, la production globale ne reprsente pas
le volume des transactions de lquation de Fisher.
)( 2RWE +
Lquation de prix P est semblable la seconde quation fondamentale de
Keynes dans son A Treatise on Money [1930]. Elle nest pas la mmepuisque dans le modle de Myrdal les anticipations ont un rle explicite : le
revenu E et le capital libre disponible W dpendent du facteur net de
dprciationD qui mesure le changement dans la valeur du capital, cest--
dire le facteur qui permet lintroduction des anticipations.23
Myrdal est plus
direct, il crit : Il est clair que dans ce systme dides [celui de Keynes],
il ny a pas de place pour le risque et les anticipations, ni pour les gains et
23 Lindahl [1939] adresse une critique aux quations fondamentales de Keynes en
introduisant une quation pour le calcul des prix anticips. Lindahl crit : Ces quations,
comme on le sait, ont t poses sous une forme qui nen permet lapplication que dans des
hypothses trs simplifies (telle que celle qui consiste voir dans laccroissement net delinvestissement une somme de biens concrets) alors quen ralit, il reprsente la somme
obtenu par soustraction de la valeur du rendement brut des biens dinvestissement et de la
dprciation des investissements antrieurs. Il nest cependant pas difficile dexprimer la
mme notion sous une forme absolument gnral (p. 62, n.1). Cette forme gnrale est
compose de deux quations de prix : 1) lquationCC QsEP /)1( = qui dtermine le
niveau des prix de march des biens de consommation et, 2) lquation
qui dtermine le niveau des prix anticips des biens de
consommation. O
C
be
C QIEP /)( +=
I reprsente linvestissement rel anticip etb reprsente le
diffrentiel des ventes anticipes des biens de production et des achats anticips de ces
mmes biens.
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les pertes de capital, ni pour une expression utilisable des accroissements ou
diminutions anticips dans la valeur du capital rel. Telle est, je crois, la
raison pour laquelle les concepts keynsiens d investissement etd pargne sont si obscurs et contradictoires, et son systme gnral
dquilibre si peu satisfaisant (p. 46).
Nanmoins, les deux quations des prix, celle de Myrdal et celle de Keynes
expriment le mme message : la possibilit dobtenir un profit additionnel
(ou pertes) lorsque linvestissement diffre de lpargne. Ainsi, autant
Myrdal que Keynes adhrent fidlement lapproche de Wicksell. Dans ce
sens, si par exemple le prix de march est suprieur au prix anticip,
linvestissement dpasse le capital libre disponible et un profit additionnel
global apparat. Celui-ci est clairement mesur par un cart positif entre
et W. Le profit additionnel global2R
est dfini par la diffrence entre le
revenu et les dpensesE. Ainsi on a :)(2 WER +
EWER += )(2
WR = 2
Si le prix de march est gal au prix anticip, linvestissement est gal au
capital libre disponible et il ny aura pas de profit additionnel global. Dans
ce cas, . Les prix de march ont t fixs seulement par le
cot moyen de la production totale, cest--dire par lexpression .
02 == WR
QEP /=
Jusquici nous navons dtermin que le niveau gnral des prix. Il sagit
maintenant de dsagrger cet indice et de dterminer les prix de march des
biens de consommation et les prix de march des biens de capital .
Lapproche de Keynes est directement pertinente. Le prix des biens de
consommation est dtermin par la premire quation fondamentale et le
prix de biens de capital est driv par symtrie de cette dernire quation.
CP IP
24
Pour le modle de Myrdal, nous avons :
C
CQ
WIQEP
+= '
24 Lquation qui permet de dterminer le prix des biens de capital nest pas explicite chez
Keynes. On peut vrifier quelle est inclue dans la dtermination du niveau gnral des prix
montaires. Il suffit de remplacer les deux quations des prix dans lexpression
, on obtient alors lquationQQPQPP IICC /)( += QRWEP /)( 2+= .
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I
IQ
IR
Q
EP
'2 +=
La variable 'I reprsente le cot de production des biens de capital. Cesdeux quations de prix expriment de faon plus prcise la possibilit
dobtenir des profits additionnels. 25 Le prix de march des biens de
consommation dpend du capital libre disponible, cest--dire quil est fix
dans le choix des entrepreneurs entre la quantit de monnaie quils dcident
dpargner et de consommer. Le prix de march des biens de capital dpend
de linvestissement, cest--dire quil est fix dans le choix des
entrepreneurs entre lachat des nouveaux biens de capital et dactifs
financiers.
Une fois que le prix de march est fix pour chaque bien, les plans
dinvestissement des entrepreneurs sont jugs. Ce jugement est constat au
moment ex post. Dabord, les entrepreneurs pourront comparer le prix de
march avec le prix anticip. Si les prix sont les mmes, les entrepreneurs
ralisent leur profit additionnel. Mais si les prix diffrent, il y aura des gains
pour certains entrepreneurs et des pertes pour dautres. Cependant, quelle
que soit la situation de lentrepreneur, un quilibre global ex post est
toujours vrifi, puisque au niveau agrg, les gains et les pertes sont
compenss. Myrdal a insist largement sur ce point.
Daprs lanalyse de Keynes, les prix des biens de consommation et le prixdes biens de capital sont dtermins indpendamment lun de lautre. Cette
indpendance exprime lcart entre le capital libre disponible et
linvestissement, en permettant lapparition du profit additionnel (ou pertes).
Mais dans le modle de Myrdal, une telle indpendance nest pas du tout
exacte, puisque nous navons suppos quun seul bien qui est en mme
temps consomm et investi. Les prix des biens de consommation et les prix
des biens de capital sont relis par le mme mcanisme de formation des
prix o un seul type de bien Q intervient dans la dtermination de ces deux
prix. Chez Keynes, lindpendance des prix nest pas dmontre parce quil
ne rend pas explicite le mcanisme de formation des prix des biens de
capital. En tout cas, ce mcanisme de formation des prix de march permetde dterminer la grandeur de la variation des prix. Tel quil est prsent ici,
il ne constitue quune suggestion dapplication dans le cadre de la thorie de
Myrdal.
6.Conclusion25 Il faut remarquer que dans la section 5 du chapitre VI, Myrdal propose le calcul dun
indice de prix au niveau individuel et un indice au niveau global. Ces deux indices
dpendent de lexistence du profit additionnel.
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Nous avons tabli la spcificit de la pense montaire de Myrdal vis--vis
de celle de Wicksell. Pour la plupart des commentateurs de Myrdal, cettespcificit est dduite de lanalyse des anticipations, lesquelles donnent
naissance aux tudes dynamiques. Cependant, nous dmontrons que la
vritable spcificit dcoule de lanalyse de la troisime condition de
lquilibre montaire : la variation des prix montaires. A travers cette
condition, Myrdal prsente sa thorie comme une critique Wicksell. Nous
avons reconstitu la thorie des prix de Myrdal, expos dans la troisime
condition de lquilibre, pour la rendre plus claire et cohrente avec
lanalyse des autres deux conditions.
Nous savons que chez Wicksell, lquilibre est dfini par les trois conditions
qui assurent la neutralit de la monnaie. Si la quantit de monnaieaugmente, tous les prix vont augmenter proportionnellement, en laissant
inchange la structure des prix relatifs. Pour Myrdal ce rsultat ne peut pas
tre obtenu lorsquon considre la capacit des entrepreneurs pour anticiper
la variation des prix. Dans son modle, si la quantit de monnaie augmente,
tous les prix vont augmenter dans de proportions diffrents. En labsence de
proportionnalit, la structure des prix relatifs se trouve modifie. De cette
manire, lquilibre montaire nest pas un quilibre neutre et la thorie
quantitative de la monnaie est donc remise en cause. Alors, cest la
dfinition mme de la monnaie qui est remise en cause.
Lorigine de ce rsultat est bien le rle de la distinction ex ante/ex post.Ex
ante, un quilibre montaire est vrifi sil existe une compatibilit globale
des plans des entrepreneurs, telle que les conditions 1) et 2) du modle de
Myrdal soient respectes. Toute variation proportionnelle des prix
(condition 3) laissera ces conditions inchanges en termes rels. Une telle
compatibilit implique une hypothse trs particulire : celle de lexistence
a priori dun systme des prix dquilibre. Mais lintrt de la thorie de
Myrdal se trouve justement dans le fait que cette compatibilit des plans est
rompue, cest--dire que lconomie est dans une situation de dsquilibre.
Si on suppose une baisse du taux montaire, chaque entrepreneur envisageex ante la possibilit dobtenir un profit additionnel ex post. Il sait que les
prix vont monter mais il ne sait pas si cette augmentation lui sera favorable
par rapport celle quil avait anticipe. Sous lhypothse de concurrence
parfaite, chaque entrepreneur anticipe indpendamment la variation non
proportionnelle des prix. La structure des prix relatifs se trouve modifie.
Pendant la priode, un processus cumulatif est dclench, les prix se
forment la hausse sur le march par la confrontation des diffrents plans
des entrepreneurs. Le march est vu comme un mcanisme sanctionnant des
anticipations optimistes sur la variation des prix. Ex post, certains
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entrepreneurs vont avoir un profit additionnel, dautres des pertes et dautre
un profit normal.
Dans ce modle, le processus cumulatif peut continuer puisque les
entrepreneurs qui reoivent des profits additionnels continueront
demander des crdits. Voici ce qui nest pas possible dans la thorie de
Wicksell, puisque dans son modle les prix augmentent de faon
proportionnelle en permettant un profit additionnel nul en termes rels. Les
entrepreneurs ne peuvent donc pas anticiper la variation des prix. Le
processus cumulatif doit sarrter lorsque les entrepreneurs reoivent un
profit additionnel nul en termes rels. Le modle de Myrdal est donc une
solution au problme de lexistence du processus cumulatif dans la thorie
de Wicksell. Cependant, cette solution carte toute obtention de la neutralit
de la monnaie : la thorie quantitative est donc rejete puisque les prixvarient de faon non proportionnelle.
Le sens et la grandeur de la variation des prix montaires sont parfaitement
dtermins. Toute variation du taux dintrt montaire agit sur les prix dans
le sens contraire. La grandeur de cette variation est dtermine par un
mcanisme de formation des prix de march. Celui-ci est suggr partir
des ides de Lindahl et Keynes. Les prix de march sont fixs
indpendamment de la situation de lquilibre ou dsquilibre qui rgne
pendant la priode. Les anticipations des entrepreneurs sont ainsi juges
travers lapparition des gains additionnelles ou pertes.
Dans lapproche de Myrdal, on exprime de faon plus cohrente lide de
Wicksell selon laquelle le dsquilibre montre le comportement risqu des
plans dinvestissement des entrepreneurs. La distinction ex ante/ex post
permet deux choses : dune part, de donner une place lintroduction de la
monnaie avant le march et dautre part, de comprendre ce dernier comme
un mcanisme sanctionnant des anticipations individuelles sur les prix,
lesquelles sont construites indpendamment les unes des autres. Le
dsquilibre peut tre accept comme une situation favorable. Ce rsultat est
encore plus frappant si lon considre quune grande partie de la thorie
montaire moderne, notamment celle propose dans le cadre de la synthsenoclassique, est dveloppe sur la notion dquilibre optimum.
La reconstruction rationnelle de la troisime condition de lquilibre dans la
thorie de Myrdal nous permet de comprendre sa principale contribution :
lanalyse du comportement des prix montaires en dsquilibre. Son
explication rvle que dune certaine faon, les prix de march sont
dtermins par les dcisions prises dans la mconnaissance du futur,
indpendamment des dcisions des autres entrepreneurs. La thorie de
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Myrdal voque ainsi limportance des prix dans lanalyse
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