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Les enjeux de la
restructuration urbaine
Comment organiser les professionnels et mobiliser les habitants pour
renouveler l’espace urbain?
Programme « Restructuration urbaine » animé par le GIE Villes et Quartiers
Réalisation de l'ouvrage (décembre 2002) :
Jean-Luc Bossavit, CREPAH,
Michel Bonetti, CSTB
SOMMAIRE
Sommaire
Présentation 3
I Quelles intentions, quelles actions et quels effets ?
Des conceptions issues de cultures différentes 6
II Organiser la maîtrise d’ouvrage et conduire les projets
Douze préconisations 14
III Pourquoi recourrir aux études de définition?
Une procédure particulière 24
Six questions clé 32
Niveaux de débat et modalités de mise en œuvre 43
En guise de conclusion 50
Colmar, Palais Royal (67) 52
Epernay, Bernon (51) 58
Le Havre, Caucriauville (76) 66
Marseille, Les Flamants (13) 72
Nantes, Les Dervallières (44) 79
Reims, Wilson (51) 83
` Troyes, Les Chartreux (10) 88
Wattignies, Le Blanc Riez (59) 93
I Fondements d’une restructuration urbaine
Présentation
II Organiser la maîtrise d’ouvrage et conduire les projets
III Pourquoi recourir aux études de définition?
IV La gestion urbaine dans la restructuration urbaine
V La place des habitants dans les restructurations urbaines
IV Fiches monographiques sur huit villes
Présentation
Les éléments de synthèse retenus dans ce rapport final sont issus d’une
démarche de capitalisation des opérations de restructuration urbaine sui-
vantes :
Ces projets ont tous fait l’objet d’une contractualisation avec le GIE Villes et
Quartiers. Commencée en 2000, la mission de capitalisation a duré 18 mois.
Les enseignements correspondent donc à une étape des projets, principale-
ment celle de définition et d’organisation de la maîtrise d’ouvrage. Ils ne sau-
raient donc être lus comme définitifs.
Ces enseignements sont organisés autour de trois questions particulières qui
étaient au cœur de la commande du GIE Villes et Quartiers :
- L’organisation de la maîtrise d’ouvrage et le pilotage du projet,
- La place des habitants dans les démarches restructuration urbaine,
- Le lien entre gestion urbaine de proximité et restructuration urbaine.
Toutefois un regard particulier a été porté sur les marchés d’étude de défini-
tion, deux sites (Troyes et Marseille) ayant eu recours à cette procédure.
3
EpernayReims
TroyesColmar
Nantes
Marseille
Wattignies
Le Havre
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE4
1. FONDEMENTS D’UNE RESTRUCTURATION URBAINE 5
FONDEMENTS D’UNE
RESTRUCTURATION
URBAINE1
Mantes-la-Jolie, 1992
La conception d’un pro-grame nécessite deprendre en compte denombreux préalables.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE6
Les projets de restructuration
reposent sur différentes
conceptions qui sont surtout
liées à la culture des maîtres
d’œuvre, mais qui se retrouvent éga-
lement chez les maîtres d’ouvrage.
Il nous semble important, en intro-
duction, de repérer et d’interroger
ces conceptions, car elles sous-ten-
dent ces projets sans que l’on s’en
rende toujours compte. Elles fonc-
tionnent bien entendu également
pour les 8 projets ayant participé à la
démarche de capitalisation.
1
La posture à l’égard de l’architec-
ture des grands ensembles
Il y a tout d’abord la position de prin-
cipe à l’égard de l’architecture des
grands ensembles, certains urba-
nistes estimant que ces formes archi-
tecturales sont obsolètes ou aber-
rantes et qu’il faut en démolir le
maximum, alors que d’autres consi-
dèrent qu’ils représentent des formes
très élaborées, témoignant d’une
période historique de l’architecture
moderne qu’il faut préserver.
Une autre posture consiste à s’inter-
roger sur les modes de fonctionne-
ment social et urbain induits par ces
formes urbaines et architecturales en
lien avec les évolutions économiques
et sociales, et à s’efforcer de les
adapter sans préjuger a priori de leur
valeur et de leur pertinence.
2
La posture à l’égard des habitants
La conception des projets est égale-
ment liée à la posture à l’égard des
habitants. Certains urbanistes sont
favorables à des démolitions mas-
sives, car ils considèrent que les
habitants vivent dans des conditions
Des conceptions issues
de cultures différentes
1. FONDEMENTS D’UNE RESTRUCTURATION URBAINE 7
inacceptables et qu’il est difficile
d’améliorer leur situation en se
contentant de réhabiliter les bâti-
ments et de requalifier l’espace
urbain.
Une autre position consiste à consi-
dérer que les habitants vivent dans
ces bâtiments de manière transitoire,
en moyenne cinq à dix ans, et qu’il
ne faut donc pas concevoir le devenir
de ces quartiers en fonction des
occupants actuels. Les restructura-
tions doivent être conçues pour satis-
faire une nouvelle demande. D’autres
concepteurs sont a contrario sou-
cieux d’améliorer les conditions
d’habitat de la majorité des occu-
pants et de limiter les démolitions,
car il faut prendre en compte l’atta-
chement des personnes à leur loge-
ment, considérant en outre que c’est
leur appréciation qui conditionnera
l’attractivité du quartier et pourra
générer une nouvelle demande.
3
Préserver ou remettre en cause
des formes urbaines?
L’approche de la restructuration peut
viser à préserver les formes urbaines
et architecturales en cherchant à les
améliorer, ou bien à rompre avec des
modes d’organisation géométriques
de l’espace, avec la massivité et l’uni-
formité des bâtiments, notamment
en réalisant des constructions de
taille plus réduites (écrêtage des
tours, segmentation des grandes
barres).
Cette position conduit également à
diversifier la modénature des façades
et des entrées, à installer des toitures
à deux pentes, ce qui est considéré
comme sacrilège par les tenants de
l’architecture moderne.
4
Imposer une nouvelle trame
urbaine ou adapter l’existante?
Les positions diffèrent également sur
la transformation de la trame
urbaine. Certains urbanistes qui se
fondent sur des analyses typo-mor-
phologiques se réfèrent à des trames
urbaines types. Ils reprennent parfois
la trame d’une partie du quartier pour
l’appliquer à l’ensemble, ou bien cal-
quent la trame de certaines parties de
la ville sans tenir compte de la com-
plexité existante.
Navette, Strasbourg
Les restructurations doi-vent être conçues poursatisfaire une nouvelledemande.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE8
D’autres, au contraire, analysent fine-
ment la trame existante, identifient
les points problématiques pour la
modifier en essayant d’optimiser
l’efficacité des interventions. Une
autre conception consiste à s’intéres-
ser essentiellement à certains
aspects comme la création de pers-
pectives ou bien le désenclavement,
le rattachement à l’environnement
urbain sans toujours se soucier des
modes d’organisation internes.
5
Renforcer l’unité ou segmenter ?
Une différence de conception très
importante concerne la position des
concepteurs à l’égard de l’unité du
quartier. Il est fréquent qu’ils soient
soucieux de préserver l’unité des
grands ensembles, ou de la reconsti-
tuer quand il est composé d’îlots
hétérogènes. Cela conduit à vouloir
reconstituer une centralité urbaine à
laquelle ils s’efforcent de rattacher
les différentes parties du quartier.
Cette approche revient à renforcer les
relations internes et se trouve de fait
en contradiction avec la volonté
d’améliorer l’intégration à l’environ-
nement. Elle peut également se tra-
duire par le rattachement de ces par-
ties à un grand axe traversant
l’ensemble du quartier.
Une autre approche consiste a
contrario à rompre cette unité, à
décomposer le quartier en unités
relativement autonomes, en favori-
sant leur différenciation et leur ratta-
chement à l’environnement extérieur.
Cette approche consiste à prendre
appui sur les différences de localisa-
tion, de composition, de fonctionne-
ment social existantes pour les
amplifier. Elle part notamment des
attentes et des pratiques des habi-
tants concernant plus particulière-
ment la localisation des circulations
et des lieux qu’ils fréquentent pour
leurs courses, leurs loisirs, leurs acti-
vités professionnelles. Elle prend en
compte l’identité de chaque sous-
quartier, à laquelle les habitants
s’identifient ou veulent s’identifier.
6
Homogénéiser ou différencier les
ambiances urbaines?
Les conceptions des projets urbains
se distinguent également selon qu’ils
cherchent à différencier les
ambiances urbaines ou qu’ils tendent
à conserver une ambiance homo-
gène, ce qui renvoie pour une part à
la préservation de l’unité évoquée
précédemment.
7
Faut-il croire en l’efficacité sociale
des formes urbaines et des équi-
pements ?
Les approches dépendent également
de la conception de ce que l’on pour-
rait appeler "l’efficacité sociale de
l’organisation urbaine". Certains
urbanistes considèrent en effet qu’il
suffit de créer une place ou un boule-
vard urbain pour développer la socia-
bilité. Une position plus nuancée
conduit à penser que l’organisation
urbaine influence les pratiques
sociales, mais ne les déterminent pas
pour autant. Les aménagements
urbains constituent des supports
potentiels au développement des
pratiques sociales, mais leurs effets
dépendent pour une large part du
contexte qui leur donne un sens par-
ticulier. On retrouve le même débat
en ce qui concerne les commerces et
les équipements publics, certains
urbanistes ayant tendance à vouloir
1. FONDEMENTS D’UNE RESTRUCTURATION URBAINE 9
installer ces équipements dans les
espaces laissés vides suite aux
démolitions, sans toujours s’assurer
de leur utilité ou de leur viabilité et
en surestimant parfois leur impact
sur le fonctionnement social des
quartiers.
8
Les enjeux de mixité sociale
Un autre enjeu de la conception des
projets de restructuration concerne le
développement de la mixité sociale à
travers la diversification des formes
et des statuts des opérations de
reconstruction. Des acteurs considè-
rent qu’il faut absolument recons-
truire sur place pour créer une cer-
taine mixité sociale sans toujours
tenir compte du contexte. Dans cer-
tains cas, la réputation des quartiers
est tellement dégradée qu’elle ne
peut s’améliorer qu’à long terme
grâce aux efforts de restructuration.
Le fait de reconstruire rapidement
sur place ne peut qu’aboutir à un
échec, les nouvelles réalisations
étant alors absorbées par cette répu-
tation. Par contre, dans certains
contextes, il est possible de recons-
truire de nouvelles formes d’habitat,
notamment aux franges des quartiers
restructurés car, de manière parfois
surprenante, elles ne sont pas affec-
tées par cette mauvaise réputation
des espaces restructurés même si
elle persiste.
Plus profondément, il existe un débat
sur l’impact de la recherche de mixité
sur le fonctionnement social des
quartiers. Pour certains, l’apport
d’une nouvelle population suffit à
générer une vie sociale plus harmo-
nieuse. Même si cet apport peut
effectivement réduire l’importance de
la population paupérisée, cela
n’aboutit pas nécessairement à créer
des liens entre les anciens et les nou-
veaux habitants. Ces derniers, d’un
niveau social plus élevé, peuvent
chercher à se protéger et s’isoler des
quartiers dans lesquels ils s’installent
ou bien se retrouver en conflit avec
les anciens habitants, voire devenir
les cibles privilégiées de délinquants.
9
L’ampleur et la temporalité des
restructurations
Les conceptions divergent également
sur la temporalité des restructura-
tions. Certains préfèrent réaliser des
transformations en profondeur dans
Square, Orly/Choisy
L’organisation urbaineinfluence bien les pra-tiques sociales, mais ellene les déterminent pas.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE10
le cadre d’un seul projet défini par
avance, alors que d’autres préfèrent
réaliser des transformations progres-
sives, en modifiant les modes d’inter-
vention en fonction de l’évolution du
quartier générée par la dynamique
du processus engagé. Les projets de
grande ampleur définis de manière
globale conduisent à différer de plu-
sieurs années l’engagement effectif
du processus d’intervention en rai-
son des contraintes financières
qu’elles représentent et des difficul-
tés de relogement d’un nombre très
important d’habitants. Ces délais
entraînent une accentuation de la
dégradation des quartiers. Les opéra-
tions de restructuration progressive
permettent d’engager les opérations
plus rapidement et d’enrayer ces pro-
cessus de dégradation.
10
La prise en compte des enjeux de
gestion
Les modes de prise en compte des
enjeux de gestion dans la conception
des projets de restructuration diffè-
rent profondément (voir chapitre 4
sur le lien entre gestion urbaine et
restructuration urbaine).
Certains projets sont conçus sans
même engager une réflexion sur la
nécessité d’améliorer les modes de
gestion ou prévoient la mise en
œuvre d’améliorations de la gestion
indépendamment de la conception
des projets. A contrario, on peut
concevoir des projets de restructura-
tion qui visent à faciliter la gestion et
à réduire les coûts, ou bien aller plus
loin en organisant l’espace urbain de
manière à construire des territoires
de gestion, voire articuler les projets
de gestion et de restructuration en
les adaptant mutuellement.
Les conceptions des projets de
restructuration dépendent égale-
ment des modes de prise en compte
des attentes et des pratiques des
habitants, et des dynamiques rési-
dentielles. Il n’est pas rare que des
projets soient élaborés sans une
analyse préalable de ces attentes,
sans que les zones qu’ils apprécient
et celles qu’ils jugent probléma-
tiques soient identifiées, aboutissant
Orly/Choisy
Les restructurations pro-gressives permettentd’engager les opérationsplus rapidement etd’enrayer les dégrada-tions
1. FONDEMENTS D’UNE RESTRUCTURATION URBAINE 11
parfois à détruire des espaces convi-
viaux. On peut, par contre,
construire des projets en visant à
supprimer les espaces qui sont
sources de tension et d’insécurité, et
s’efforcer de créer des unités rési-
dentielles conviviales.
11
Les conceptions de la résidentiali-
sation
Le modèle de transformation qui vise
à "résidentialiser" les quartiers peut
également donner lieu à différentes
interprétations. Cette approche peut
se limiter à enclore des groupes de
bâtiments, ce qui peut conférer un
aspect carcéral à ces ensembles, ou
bien viser à les différencier et à leur
conférer une identité propre.
On peut aussi améliorer les espaces
de proximité des bâtiments sans réel-
lement se préoccuper de leur rapport
à l’espace public ou bien, au contraire,
viser à construire des espaces publics
cohérents et à les valoriser à travers le
traitement attentif des interfaces avec
les espaces privés
12
Les échelles d’intervention : l’arti-
culation de la restructuration et
de la requalification urbaine
Une différence de conception fonda-
mentale réside dans le traitement des
différentes échelles urbaines. La
restructuration peut se limiter à réor-
ganiser le plan masse, sans réelle-
ment se soucier des modes de traite-
ment des différents espaces. Une
autre approche peut se préoccuper
de la requalification des multiples
espaces qui composent un quartier,
depuis la recomposition de l’espace
urbain jusqu’à l’aménagement des
pieds d’immeubles et des accès aux
bâtiments.
13
La place conférée au traitement
paysager de l’espace
La place conférée au traitement pay-
sager de l’espace affecte fortement la
conception des projets, selon qu’ils
conservent aux quartiers un aspect
essentiellement minéral, seulement
ponctué par des espaces verts, très
Aulnay-sous-Bois
La résidentialisation desquartiers donne lieu à dif-férentes interprétations.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE12
délimités, ou qu’ils visent à paysager
les voiries, les parkings, les places,
les pieds d’immeubles, et à créer de
véritables ambiances paysagères.
Pour conclure cette introduction sur
les différentes problématiques de
conception des projets de restructu-
ration urbaine, on peut considérer
que ces conceptions s’opposent en
fonction de la posture adoptée à
l’égard de la spécificité du contexte
urbain et sociologique. D’un côté cer-
taines conceptions font pratiquement
abstraction de ce contexte et appli-
quent les mêmes principes quel que
soit le lieu, alors qu’à l’opposé
d’autres s’efforcent d’acquérir une
compréhension fine de ce contexte
pour traiter les problèmes qui s’y
posent et développer ses potentiali-
tés.
Villiers-le-Bel
Le traitement desespaces extérieurs estdéterminant.
132. ORGANISER LA MAITRISE D’OUVRAGE ET CONDUIRE LES PROJETS
ORGANISER LA
MAITRISE D’OUVRAGE
ET CONDUIRE LES
PROJETS
22
Marseille, Les Flamants
Orientations générales etpartis d’aménagement.A. Grumbach & Associés.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE14
Douze préconisations
L’élaboration et la mise en
œuvre des projets de restructu-
ration urbaine comportent de
multiples enjeux et nécessitent de ce
fait l’organisation et la mise en place
d’une Maîtrise d’Ouvrage Concertée
associant :
- les bailleurs,
- les collectivités locales,
- les services de l’État,
- les financeurs (notamment la
CDC).
Cette organisation de la maîtrise
d’ouvrage concertée est soumise à
un certain nombre de principes et
doit se traduire par la mise en place
d’un dispositif de conduite de projet
cohérent.
Le texte qui suit présente un certain
nombre de préconisations en la
matière.
1
Mettre en place la maîtrise
d’ouvrage dès l’engagement des
diagnostics
Il est fréquent d’associer les parte-
naires à la sélection des maîtres
d’œuvre pressentis, mais la maîtrise
d’ouvrage concertée n’est souvent
réellement mise en place qu’au
moment de la sélection des projets.
Ceci conduit souvent à laisser les
maîtres d’œuvre définir eux-mêmes
les enjeux et le contenu des études,
voire à définir le programme. Parfois
les projets de restructuration sont éla-
borés sans que la maîtrise d’ouvrage
ne définisse préalablement les orien-
tations stratégiques qu’elle poursuit et
esquisse un programme. La maîtrise
d’ouvrage se met alors en situation de
dépendance par rapport aux maîtres
d’œuvre. En outre, des désaccords
2. ORGANISER LA MAITRISE D’OUVRAGE ET CONDUIRE LES PROJETS 15
peuvent surgir entre les maîtres
d’ouvrage au moment de la sélection
des projets si les intentions et les
enjeux respectifs de chacun n’ont pas
été préalablement clarifiés. Avant
d’engager un travail approfondi de
diagnostic et d’élaboration des pro-
jets, il importe de s’assurer que les dif-
férents acteurs concernés par le deve-
nir du quartier sont effectivement dis-
posés à s’investir dans sa restructura-
tion et avoir une estimation des
moyens qu’ils peuvent y consacrer et
des possibilités d’action dont ils dis-
posent. On risque en effet de laisser
les maîtres d’œuvre s’engager dans
des perspectives de transformation
gigantesques, hors de portée des
financeurs potentiels. On risque égale-
ment d’envisager la démolition ou la
transformation de certains équipe-
ments (écoles, commerces, etc.), alors
que les maîtres d’ouvrage impliqués
ne sont pas propriétaires du foncier
ou des constructions. La mise en
place d’une maîtrise d’ouvrage
concertée en amont de l’engagement
des études permet de clarifier les
enjeux et les intentions de chacun et
d’associer chaque partenaire à la défi-
nition du contenu des études, afin que
ses préoccupations et les questions
qu’il se pose soient prises en compte.
Les études doivent en effet répondre
aux questions que se pose chaque
acteur, sachant que ces réponses
conditionnent leur implication ulté-
rieure dans la mise en œuvre concrète
des projets. L’implication des acteurs
dans la définition du contenu des
études leur permet ensuite de
s’approprier les résultats des analyses
et d’en débattre, sans quoi ils risquent
ensuite de les percevoir comme des
réflexions qui ne les concernent pas
directement ou comme des instru-
ments pour faire pression sur eux.
2
Mobiliser les partenaires pour
constituer la maîtrise d’ouvrage
concertée
Il ne suffit pas qu’un acteur souhaite
engager une opération de restructu-
ration urbaine pour que les autres
partenaires s’associent spontané-
ment à son initiative. Tout un travail
de contacts préalables, qui peut
prendre un an ou deux, comme le
montre l’expérience de Marseille, est
indispensable pour convaincre les
partenaires potentiels, car leurs
enjeux prioritaires peuvent concerner
d’autres domaines ou d’autres terri-
toires. Nous n’insisterons pas sur le
doigté que requiert ce travail de
mobilisation des partenaires.
Réunion de travail
Les études doiventrépondre aux questionsque se pose chaqueacteur pour mieux l’impli-quer dans la mise enœuvre.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE16
3
Associer les collectivités locales
et l’État aux initiatives des orga-
nismes d’HLM
La plupart des opérations soutenues
par le GIE Villes et Quartiers concer-
nent des projets amorcés à l’initiative
de bailleurs sociaux auxquels sont
progressivement associés les collec-
tivités locales et l’État.
Ceci est compréhensible dans la
mesure où les bailleurs sociaux ont
des enjeux économiques très impor-
tants dans ces quartiers : logements
vacants, impayés élevés, dégradation
et vandalisme, etc. La question de la
démolition se pose souvent
lorsqu’un bailleur doit envisager une
nouvelle réhabilitation, alors que la
proportion de logements vacants est
très élevée.
Dès lors qu’il apparaît économique-
ment nécessaire de démolir certains
bâtiments, l’enjeu est alors de faire
de cette nécessité une opportunité
pour engager une restructuration et
une requalification de l’espace
urbain, ce qui nécessite l’appui des
collectivités locales.
Le problème se pose en d’autres
termes lorsque la collectivité locale
souhaite restructurer un quartier, car
il faut alors que cela corresponde aux
enjeux économiques des bailleurs,
qui n’ont pas toujours intérêt (ou les
moyens) de démolir.
4
Convaincre et impliquer les diffé-
rents services concernés
La conduite des opérations de
restructuration urbaine est générale-
ment assurée par la direction du
patrimoine des organismes de loge-
ments et par les services Urbanisme
des villes. Tout le monde est
convaincu qu’il est indispensable
d’organiser leur coopération, mais on
oublie parfois que d’autres services
sont également concernés : services
du logement, services d’action sociale
et services technique des villes, ser-
vices de maintenance et services de
gestion locative de bailleurs.
Il est indispensable de convaincre les
La Cité des 4 000
L’enjeu est de faire d’unedémolition une opportu-nité pour requalifierl’espace urbain.
2. ORGANISER LA MAITRISE D’OUVRAGE ET CONDUIRE LES PROJETS 17
responsables de ces services et de
les associer aux démarches entre-
prises, sinon ils risquent de freiner
voire de s’opposer à la réalisation
des opérations projetées. Il est égale-
ment indispensable de prendre en
compte leurs points de vue au risque
de faire des erreurs graves dans la
conception et la mise en œuvre des
projets.
5
Associer les services de mainte-
nance et de gestion à la conduite
des projets
La réussite d’une opération de struc-
turation nécessite généralement une
amélioration significative voire une
transformation en profondeur de la
gestion urbaine.
Cet objectif nécessite d’impliquer for-
tement les services de maintenance
et de gestion à la conception et à la
conduite des projets, afin de restruc-
turer les quartiers de manière à facili-
ter leur gestion et réduire les coûts
de maintenance comme on le verra
dans le chapitre consacré à la gestion
urbaine.
6
Amorcer la réflexion et la coopé-
ration entre les acteurs en réali-
sant des études exploratoires
Avant de s’engager dans une
démarche nécessairement complexe
et ambitieuse de restructuration
urbaine, il apparaît souvent utile
d’engager des études exploratoires
relativement légères. Ces études per-
mettent d’amorcer la réflexion et
d’acculturer les acteurs à la compré-
hension des différents enjeux, sans
pour autant préjuger des décisions
ultérieures. Elles permettent d’identi-
fier les problèmes que peut poser
une opération de restructuration et
d’explorer des solutions envisa-
geables, de se faire une idée des
coûts que cela représente.
L’engagement d’études exploratoires
peut constituer un support pour
amorcer les échanges et la coopéra-
tion entre des partenaires qui ont une
faible culture de travail en commun.
- Dans un site, une étude explora-
toire avait été réalisée par le GERU
et le CREPAH pour explorer la pos-
sibilité d’écrêter la tour. Cette
étude a permis d’identifier les pro-
blèmes techniques et les coûts
relativement élevés d’une telle
solution.
- Dans un autre site, la coopération
entre la ville, l’office HLM et les
services de l’État s’est engagée à
partir d’une analyse des problèmes
majeurs du quartier et d’une explo-
ration des orientations straté-
giques de restructuration envisa-
geables. Cette étude a permis de
construire un diagnostic et des
orientations partagées et a servi de
base au travail de préprogramma-
tion ultérieur.
7
Distinguer clairement le pilotage
stratégique et la conduite opéra-
tionnelle des projets
Au sein de la maîtrise d’œuvre
concertée, il est indispensable de dis-
tinguer clairement :
- le pilotage stratégique des projets,
qui appartient aux décideurs et aux
financeurs ;
- la conduite opérationnelle, qui est
assurée par les cadres et les tech-
niciens des villes et des bailleurs.
Les cadres et les techniciens assurant
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE18
la conduite opérationnelle sont char-
gés de :
- l’organisation de la démarche
d’élaboration et de mise en œuvre
du projet ;
- l’animation des groupes de travail ;
- l’organisation et la synthèse des
diagnostics ;
- la préparation des scénarios de
restructuration et des montages
financiers ;
- la conduite des projets d’adapta-
tion de la gestion ;
- l’organisation de la participation
des habitants.
Les démarches, les dispositifs et les
méthodes de travail qu’ils préconi-
sent doivent être préalablement
débattus et validés par le comité de
pilotage stratégique. Celui-ci débat
ensuite des propositions de scéna-
rios, de montage financier et des pro-
jets d’adaptation de la gestion en
intégrant les attentes exprimées par
les habitants. Il choisit le scénario qui
sera mis en œuvre, opère les arbi-
trages financiers et définit les modali-
tés de réalisation du projet retenu,
notamment son phasage.
Le comité de pilotage stratégique se
réunit une fois tous les trois ou
quatre mois pendant la phase d’éla-
boration du projet, alors que les
acteurs chargés de la conduite opéra-
tionnelle se rencontrent régulière-
ment, au moins une fois par mois.
8
Faire nommer les chefs de projet
par la ville et les bailleurs et consti-
tuer une équipe opérationnelle
Il est indispensable que la ville et les
bailleurs nomment un chef de projet
assurant la mise en place et l’anima-
tion de l’ensemble du dispositif. S’ils
ne souhaitent pas choisir un chef de
projet commun, ils peuvent désigner
chacun un chef de projet, sachant
que la qualité de leur coopération
conditionnera l’efficacité de la
démarche. Cette formule a l’avantage
de permettre à chacun d’eux de
mobiliser les services de leur organi-
sation respective et de réguler les
désaccords entre les partenaires.
Il est également souhaitable de dési-
gner des correspondants chargés de
Il est souhaitable de dési-gner des correspondantschargés de participer àl’élaboration du projetdans chacun des servicesamenés à contribuer à saréalisation.
2. ORGANISER LA MAITRISE D’OUVRAGE ET CONDUIRE LES PROJETS 19
participer à l’élaboration du projet
dans chacun des services amenés à
contribuer à sa réalisation. Il est en
effet très utile de disposer d’interlo-
cuteurs stables qui sont au courant
de l’évolution des réflexions ; ils peu-
vent alerter rapidement les respon-
sables du projet des difficultés tech-
niques, économiques et sociales,
auxquelles peuvent se heurter cer-
taines propositions et suggérer des
solutions alternatives. Ces correspon-
dants jouent également un rôle
d’information au sein de leurs
propres services et peuvent mobiliser
leurs collaborateurs, et faire évoluer
leurs conceptions.
Chaque fois que cela paraît possible,
il est préférable de former une véri-
table équipe opérationnelle réunis-
sant ces correspondants, de manière
à ce qu’ils se répartissent les diffé-
rentes tâches et l’animation des
réunions de travail.
9
Organiser l’information et la
concertation avec les différents
partenaires
Au-delà des acteurs directement
impliqués dans l’élaboration des pro-
jets de restructuration, un certain
nombre de partenaires plus périphé-
riques doivent être tenus régulière-
ment informés de la démarche mise
en œuvre et des orientations choi-
sies, afin qu’ils ne découvrent pas
brutalement le projet retenu au
moment où il est mis en œuvre, ce
qui peut les conduire à réagir négati-
vement.
Certains partenaires (élus locaux,
acteurs sociaux, représentants de dif-
férentes administrations) peuvent être
concernés par divers aspects du projet
et il peut être nécessaire d’engager un
processus de concertation avec eux
sur des points particuliers, afin qu’ils
contribuent à la mise en œuvre.
10
Distinguer clairement et valider
les phases de diagnostic, de pro-
grammation et de conception
De nombreuses opérations sont
confiées à des équipes de maîtrise
d’œuvre qui, sur la base d’un dia-
gnostic relativement rapide, élabo-
rent directement un projet de restruc-
turation. Ils travaillent souvent sans
que les maîtres d’ouvrage aient clai-
rement formulé leurs attentes. Les
décideurs sont alors en partie dessai-
sis de leur capacité d’orientation stra-
tégique et ne peuvent que procéder à
des ajustements des propositions qui
leur sont faites par les maîtres
d’œuvre. Une part importante de
leurs préoccupations ne peut pas être
intégrée dans un tel processus.
Il nous paraît important de distinguer
clairement les phases de diagnostic,
de programmation et de conception,
et de n’engager une nouvelle phase
qu’après avoir validé la phase précé-
dente, en s’étant assuré que les
enjeux et les problèmes majeurs ont
bien été pris en compte.
La distinction de ces phases permet à
chaque acteur de prendre connais-
sance des problèmes, des contraintes
et des potentialités d’amélioration, et
de faire évoluer ses représentations
de la situation et des enjeux. Cela
permet également de solliciter l’avis
des habitants à chaque étape.
Il importe d’associer les différents
acteurs à l’analyse de la situation,
afin de construire un diagnostic par-
tagé qui servira de base à la réflexion
sur les orientations stratégiques. La
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE20
phase de programmation doit per-
mettre aux décideurs de clarifier les
objectifs qu’ils poursuivent et de défi-
nir des orientations stratégiques qui
serviront de base à la conception du
projet.
Cela leur permet de poser les exi-
gences qu’ils fixent aux maîtres
d’œuvre et d’orienter le travail de ces
derniers. Ceux-ci bénéficient ainsi
d’une commande et d’un cadre de tra-
vail précis et ne risquent pas de
s’engager dans des voies en contra-
diction avec les objectifs poursuivis
par les maîtres d’ouvrage. Ils ne peu-
vent pas travailler efficacement si les
maîtres d’ouvrage n’ont pas préala-
blement formulé leurs attentes et défi-
nis les enjeux majeurs de l’opération.
11
Créer les conditions de faisabilité
tout au long de l’élaboration du
projet
La réalisation de nombreux projets
tout à fait pertinents se heurte à de
multiples difficultés ou bien conduit à
réduire de manière drastique les
ambitions initiales, faute d’avoir anti-
cipé les problèmes de faisabilité et
d’avoir créé les conditions facilitant
leur mise en œuvre. Or c’est à travers
le processus d’élaboration du projet
que l’on peut créer ces conditions de
réalisation et anticiper sur les pro-
blèmes de faisabilité.
Ces problèmes de faisabilité peuvent
concerner notamment :
- le financement des démolitions et
des aménagements urbains ;
- la création de commerces, d’activi-
tés économiques ou d’équipe-
ments collectifs ;
- le relogement des ménages tou-
chés par les démolitions ;
- la gestion future des espaces
urbains et des équipements ;
- le financement et l’équilibre
d’exploitation des immeubles
reconstruits ;
- l’évolution de la vacance à l’issue
des démolitions ;
- l’évolution du peuplement et les
possibilités d’améliorer l’équilibre
de l’occupation sociale.
Il n’est pas rare que l’on envisage
de construire des commerces ou
des équipements publics à la place
des immeubles démolis sans mesu-
rer le coût des investissements
nécessaires et les diff icultés
d’exploitation ou bien que l’on envi-
sage de démolir 300 à 400 loge-
ments sans prendre en compte la
situation financière des bailleurs et
l’impact sur leur compte d’exploita-
tion et sans évaluer les difficultés de
relogement. On espère générale-
ment que le processus de démoli-
tion-reconstruction permettra de
faire évoluer son occupation sans
toujours tenir compte du fait que la
requalification d’un quartier ne se
traduit pas immédiatement par une
amélioration de sa réputation.
On oublie parfois que la démolition
d’un immeuble entraîne souvent le
départ de la population la plus sol-
vable et ne restent que les familles
les plus en difficulté, accroissant la
proportion de ces ménages dans la
population restante.
Toutes ces questions concernant les
effets économiques et sociaux du
projet, et donc son efficacité et la
gestion du risque, doivent être
posées au cours de la phase d’élabo-
ration et peuvent amener à modifier
la stratégie envisagée ou le phasage
de la réalisation.
2. ORGANISER LA MAITRISE D’OUVRAGE ET CONDUIRE LES PROJETS 21
Leur prise en compte dépend pour
une large part du dispositif et du pro-
cessus d’élaboration du projet adop-
tés. Ces questions ne sont en effet
prises en compte que dans la mesure
où les acteurs compétents dans ces
domaines ou qui en ont la responsa-
bilité sont associés au processus
d’élaboration et de décision. En
outre, certains acteurs pourront parti-
ciper à la résolution de ces pro-
blèmes ou contribuer au financement
de certaines opérations s’ils ont été
impliqués dans le processus d’élabo-
ration, car il est alors possible d’inté-
grer leurs contraintes, leurs
méthodes et leurs apports potentiels
dans la conception même du projet
et dans la démarche de réalisation
projetée.
Cela montre qu’un projet de restruc-
turation urbaine ne se réduit pas à un
projet d’urbanisme et d’architecture,
il s’agit d’un projet de développe-
ment intégrant la réalisation de diffé-
rentes formes d’action et d’investis-
sement, et nécessitant une stratégie
de gestion du risque.
Au risque d’énoncer une banalité, il
convient de rappeler qu’un projet a
d’autant moins de chance de se réali-
ser conformément aux finalités que
l’on poursuit qu’il est plus ambitieux,
et sa réalisation prend toujours beau-
coup plus de temps que ne le pen-
sent généralement ses promoteurs. Il
est donc indispensable de le scinder
en plusieurs phases relativement
indépendantes les unes des autres,
en s’assurant de la faisabilité des pre-
mières phases, sachant que les sui-
vantes sont plus aléatoires et pour-
ront être réajustées en fonction des
résultats effectifs des premières
actions engagées.
12
Intégrer la participation des habi-
tants et l’adaptation de la gestion
dans l’élaboration des projets
Il n’est pas rare que la participation
des habitants soit menée parallèle-
ment à la conduite opérationnelle des
projets de restructuration. Au lieu de
fonder la conception même des pro-
jets sur la compréhension des modes
d’habiter et des attentes des habi-
tants, ceux-ci sont souvent consultés
a posteriori pour donner leur avis sur
Jeunes dans une entrée
La prise en compte deshabitants doit être inté-grée tout au long de laconduite du projet.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE22
différents projets en concurrence ou
pour opérer des ajustements sur le
projet choisi par les décideurs.
La question de la prise en compte
des habitants sera développée ulté-
rieurement, mais il importe de rappe-
ler qu’elle doit être intégrée dans
l’organisation du dispositif de
conduite des projets et dans les pro-
cessus d’élaboration en développant
des modalités d’échange entre les
habitants et les décideurs, l’équipe
opérationnelle et les maîtres d’œuvre
dès l’engagement des démarches de
diagnostic et au cours des phases de
programmation et de conception des
projets.
Il en est de même pour les
démarches d’adaptation de la gestion
urbaine, qui sont souvent considé-
rées comme des actions d’accompa-
gnement engagées parallèlement à
l’élaboration des projets de restructu-
ration, voire à l’issue de leur mise en
œuvre.
A notre sens, les projets d’adaptation
de la gestion doivent orienter la
conception des projets de restructu-
ration, afin de restructurer l’espace
urbain et les immeubles de manière
à faciliter la gestion, la rendre plus
efficace et réduire les coûts de main-
tenance. La mise en œuvre des pro-
jets d’adaptation de la gestion doit
précéder la réalisation des projets de
restructuration, sans quoi les inves-
tissements engagés sont le plus sou-
vent promis à une rapide dégrada-
tion.
3. POURQUOI RECOURIR AUX ETUDES DE DEFINITION ? 23
POURQUOI RECOURIR
AUX ETUDES DE
DEFINITION?23
Marseille, Les Flamants
Orientations générales etpartis d’aménagement. A. Grumbach & Associés.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE24
1
Une procédure de recours
Il apparaît que le recours à cette pro-
cédure intervient dans des situations
extrêmement contrastées.
Un outil pour explorer des
démarches alternatives en situa-
tion d’incertitude
Quand un maître d’ouvrage est per-
plexe face à la complexité des pro-
blèmes et qu’il est en pleine incerti-
tude quant aux solutions envisa-
geables, l’étude de définition est un
outil qui permet d’explorer des
démarches alternatives. Le fait de
pouvoir disposer de différentes
approches sur le même problème
permet d’ouvrir des perspectives de
transformation inattendues. Les
études de définition permettent de ne
pas se lancer dans un concours de
maîtrise d’œuvre sans disposer
d’orientation et d’un programme
préalable, ni de s’enfermer dans une
seule option de programmation.
Un outil pour réintérroger les certi-
tudes de certains responsables
Quand certains responsables sont
convaincus de connaître par avance
la solution pertinente, alors que celle-
ci ne paraît pas aller de soi étant don-
née la complexité du problème, les
études de définition offrent un sup-
port pour réinterroger ces certitudes
par l’intermédiaire de tiers (le tiers
est important). L’ouverture de diffé-
rentes perspectives opératoires per-
met de faire évoluer ces représenta-
tions a priori des problèmes et des
solutions. Le marché d’études de
définition modifie également le rap-
port entre la commande publique et
les prestataires par la mise en jeu de
la pluridisciplinarité, les interactions
entre propositions et entre maîtrise
d’œuvre. Il permet une approche plus
sensible des problèmes.
Une procédure particulière
3. POURQUOI RECOURIR AUX ETUDES DE DEFINITION ? 25
2
Le pilotage de la procédure
Il s’agit d’une procédure relativement
lourde qui nécessite :
- Des interventions dans différents
domaines (restructuration bâtie,
aménagement urbain, adaptation
de la gestion…) ;
- L’organisation de la coopération
entre de nombreux acteurs ;
- La coordination de plusieurs
équipes de maîtrise d’œuvre, pluri-
disciplinaire (architecte-urbaniste,
paysagiste, BET, sociologue, éco-
nomiste).
La conduite des projets de renouvel-
lement urbain ne peut se faire sans la
mise en place d’un Comité de pilo-
tage et d’un chef de projet. Dans le
cadre de cette procédure, l’organisa-
tion de ces instances est absolument
indispensable et conditionne l’effica-
cité des démarches engagées. De
manière générale, les instances liées
à la procédure doivent être pensées
au regard des dispositions réglemen-
taires en vigueur (le code des mar-
chés publics ne reconnaissant pas la
notion d’ouvrage complexe).
L’organisation d’un Comité de
Pilotage
Le Comité de Pilotage doit réunir les
principaux décideurs et surtout se
doter d’une organisation du travail
rigoureuse :
- Planification des réunions ;
- Ordre du jour précis ;
- Préparation des documents de tra-
vail ;
- Réalisation de compte rendu et
relevés de décision.
La régularité des réunions du comité
et la stabilité de ses membres condi-
tionnent son efficacité.
Nommer un chef de projet est
impératif
Le travail de préparation amont, l’éla-
boration du cahier des charges, la
mise en place de la procédure et
l’organisation des phases de travail
des équipes, ainsi que de leur coopé-
ration avec les acteurs, nécessitent
impérativement la mise en place d’un
chef de projet assurant une coordina-
tion de ces différentes tâches.
L’analyse d’une opération ne faisant
pas partie du programme du GIE, a
montré que sans la nomination d’un
véritable chef de projet et sans l’orga-
nisation d’une démarche rigoureuse,
on assistait à une dérive se traduisant
par des conflits entre les équipes et
des difficultés de coopération avec
les différents acteurs.
Le chef de projet ne joue pas seule-
ment un rôle de monteur d’opération
car il doit :
- Articuler différents champs d’inter-
vention (aménagement urbain,
réhabilitation, gestion, etc.) ;
- Mener des négociations "poli-
tiques" avec les principaux déci-
deurs et organiser leur coopé-
ration ;
- Coordonner le travail des diffé-
rentes équipes ;
- Organiser l’implication des habi-
tants.
3
La mise en œuvre de la démarche
Le travail de préparation amont
Le recours aux études de définition
nécessite un travail de préparation en
amont très important de manière à
construire une maîtrise d’ouvrage
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE26
concertée associant les différents
partenaires concernés et notamment
la collectivité locale et l’État lorsque
c’est l’organisme HLM qui prend l’ini-
tiative.
Ce travail de préparation concerne
également l’organisation de la
coopération interne entre les diffé-
rents services de l’organisme HLM de
manière à définir un point de vue
commun sur la démarche à engager.
Enfin, il est également nécessaire de
définir un cahier des charges préci-
sant clairement :
- Les processus d’élaboration du
programme ;
- Les modes de coopération des
équipes ;
- Les modalités de participation des
habitants ;
- L’intégration des enjeux de ges-
tion.
Un travail d’ajustement devra être
opéré après la phase de choix des 32
équipes de maîtrise d’œuvre.
L’organisation des 3 phases du pro-
gramme et la coopération entre les
équipes
La maîtrise d’ouvrage doit préciser
dans le cahier des charges les phases
d’élaboration du programme et du
projet et les modalités de coopéra-
tion entre les équipes, puis en
concurrence des équipes retenues.
Mais il ne suffit pas d’indiquer ces
modalités opératoires dans le cahier
des charges, il faut ensuite organiser
de manière rigoureuse le phasage et
l’organisation de la coopération entre
les équipes. Cette organisation cor-
respond au mode de déroulement
suivant :
1re phase de coopération : diagnostic
et hypothèse de programmation
Des réunions d’échange sont organi-
sées entre les équipes au cours d’une
première phase de travail correspon-
dant à l’élaboration d’un diagnostic
et à l’exploration de différentes hypo-
thèses de programmation. Pour être
efficaces et stimulantes au regard
des travaux, ces réunions doivent
avoir des règles du jeu explicite, des
contenus ou thèmes précis et annon-
cés, des dates prévues dès le démar-
rage.
2e phase de travail séparé pour pré-
parer un programme et des
esquisses de projet
A l’issue de la première phase qui
dure 4 à 6 mois les équipes se sépa-
rent pour élaborer chacun de leur
côté un programme et une esquisse
de projet. Les équipes disposent de 2
à 3 mois.
3e phase : mise en concurrence et
sélection d’une seule équipe de maî-
trise d’œuvre
Un concours est organisé pour sélec-
tionner l équipe de maîtrise d’œuvre
qui sera retenue pour réaliser le pro-
jet définitif. Le concours porte sur la
présentation d’un programme et
d’une esquisse de projet, voire d’un
avant projet, sans que la distinction
entre le programme et l’avant projet
ne semble très claire.
4
Deux précautions nécessaires à la
réussite de la démarche
Des règles du jeu dans la transmis-
sion des informations.
Il est nécessaire de définir des règles du
jeu très claires sur la transmission des
informations et d’obtenir un engage-
ment des équipes sur le respect de ces
règles; il importe ensuite d’être vigilant
sur le respect effectif de ces règles.
Ces règles du jeu sont généralement
3. POURQUOI RECOURIR AUX ETUDES DE DEFINITION ? 27
les suivantes :
- Le maître d’ouvrage fournit les
mêmes documents et les mêmes
informations à toutes les équipes ;
- Si une équipe demande des infor-
mations au maître d’ouvrage,
celui-ci informe les autres équipes
de cette demande et leur transmet
les réponses qu’il donne à l’équipe
demandeuse.
- Si des réunions ou des débats sont
organisées entre une équipe et cer-
tains acteurs toutes les équipes
peuvent y participer.
Il convient de souligner l’importance
que jouent les informations et les
analyses que fournit le maître
d’ouvrage aux différentes équipes.
La place et le rapport aux habitants
dans la procédure
Il semble difficile de laisser les
équipes organiser elles-mêmes des
réunions ou la collecte d’information
auprès des habitants. Quand cela se
passe ainsi il y a de grands risques :
- Que cela crée une confusion pour
les habitants qui sont alors sollici-
tés par plusieurs équipes ; Cette
situation met en difficulté les habi-
tants (appropriation difficile) et fra-
gilise la maîtrise d’ouvrage.
- Que des groupes d’habitants
soient "pris en otage" par certaines
équipes pour soutenir leur propre
projet.
Deux types de solutions ont été trou-
vés par le maître d’ouvrage :
Dans un cas, le maître d’ouvrage a
délégué à un prestataire les enquêtes
et l’organisation des réunions avec
les habitants. Ce prestataire média-
tise les relations entre les différentes
équipes et les habitants ;
Dans un autre, le maître d’ouvrage a
organisé un système de participation
s’appuyant sur des habitant-relais et
contrôle les relations entre eux et les
équipes.
5
Les interrogations sur les
logiques induites par la procédure
On voit bien l’intérêt que représente le
fait de faire travailler différentes
équipes sur le même problème, ce qui
permet de disposer de solutions alter-
natives, de voir comment elles abor-
dent les situations à traiter et com-
ment elles coopèrent avec les acteurs.
Néanmoins cette procédure soulève
un certain nombre d’interrogations
relatives aux logiques qu’elles indui-
sent. Il convient de les avoir à l’esprit
pour donner et conserver à la procé-
dure toutes ses potentialités.
Une maîtrise d’ouvrage et une
organisation structurée
Nous avons vu que la mise en œuvre
de cette procédure nécessite à la fois
une maîtrise d’ouvrage et une organi-
sation de la conduite du projet très
structurées. Or ces conditions ne sont
pas toujours réunies et les maîtres
d'ouvrage risquent de l’utiliser sans
avoir les moyens de mettre en place
une telle organisation.
La dispersion des moyens d’investi-
gation
Même si on mobilise des moyens
importants de l’ordre de 700 kF, si on
retient 3 équipes chacune d’elle dis-
pose de moins de 200 kF hors TVA.
De ce fait aucune équipe ne peut réel-
lement mener des investigations
approfondies. Cela suppose un enga-
gement fort de la maîtrise d’ouvrage
qui doit fournir ses éléments de
connaissance du site et de son fonc-
tionnement (rapport, études,
enquêtes…).
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE28
La difficile coopération avec les
habitants
On a vu que pendant la phase de pro-
grammation la coopération directe
des équipes de maître d’œuvre avec
les habitants était problématique.
Cette coopération peut se construire
plus aisément au cours de la phase
d’élaboration des projets avec
l’équipe qui est retenue. Néanmoins
la participation des habitants risque
d’être plus limitée au cours de ce
processus, les grandes orientations
étant déjà définies.
La difficile intégration des enjeux
de gestion urbaine
Bien que les équipes assurant la pro-
grammation soient pluridiscipli-
naires, les équipes généralement
retenues, si l’on n’y prend pas garde
sont dominées par des architectes
urbanistes qui n’ont pas tous une cul-
ture d’analyse des organisations de
la gestion. Elles ne s’adjoignent pas
toujours des consultants spécialisés
dans le diagnostic et la transforma-
tion de la gestion de l’habitat et des
espaces urbains. Plus profondément,
les programmes de renouvellement
urbain devraient viser en premier lieu
l’adaptation de la gestion des terri-
toires avant même d’envisager leur
transformation. Or cette démarche
est rarement jugée prioritaire. En
outre les transformations urbaines
sont rarement pensées de manière à
faciliter la gestion des territoires et à
en réduire les coûts.
Ces démarches correspondent aux
3 schémas ci-dessous.
Le MO a une intentionde projet sans programme
Le Maître d’œuvre choisidéfini seul le programme...
...puis il réaliseensuite le projet
Le MO a précisé ses intentions et il a défini le programme Le MŒ choisiréalise le projet
Le MO a une intentionde projet sans programme
Le MO défini le programme
avec les 2 ou 3 MŒ choisisL’un des MŒ est choisipour réaliser le projet
Concours
Concours
Concours
Intention de projet Programme Projet
Les trois démarches
1. Concours programme/projet
2. Concours après élaoration du programme
3. Etude de définition.
1
2
3
3. POURQUOI RECOURIR AUX ETUDES DE DEFINITION ? 29
DEUX RISQUES LIÉS À L’ÉTUDE
1. Un risque de confusion programme-projet
La procédure permet au maître d'ouvrage de choisir un programme parmi
les différentes propositions élaborées par les équipes de maîtrise d’œuvre.
Elle assure une continuité et une cohérence entre le programme et l’élabo-
ration du projet.
Néanmoins cette procédure crée une zone de confusion entre ces deux
phases de programmation et d’élaboration des projets, confusion attestée
par le fait que l’on ne sait pas si l’équipe de maîtrise d’œuvre choisie en
définitive le sera sur la base d’un programme ou de sa traduction en terme
d’esquisse ou d’avant-projet.
Il se peut que le programme proposé par une équipe soit pertinent, mais
que sa traduction en terme de projet architectural et urbain ne soit pas
satisfaisante, et inversement. Que va-t-on donc choisir ?
Mais le problème majeur vient du fait que les équipes retenues sont des
équipes de maîtrise d’œuvre auxquelles il est demandé d’élaborer un pro-
gramme. Implicitement elles seront conduites à concevoir le programme
en fonction de la conception du projet qui se forme rapidement, voire
inconsciemment dans leur esprit. Au lieu de déduire le projet du pro-
gramme préalable, c’est l’inverse qui tend à se produire : le programme est
préformé par les projets qu’il anticipe.
2. Un risque de dessaisissement du maître d'ouvrage
Normalement le programme est élaboré par le maître d'ouvrage, avec
l’assistance éventuelle d’un programmiste. Le programme constitue la
base du contrat que le maître d'ouvrage passe avec le Maître d’œuvre et
que celui-ci doit traduire en projet. Le programme constitue donc le sup-
port qui permet de définir les exigences que le maître d'ouvrage fixe au
maître d’œuvre et qui lui permet de contrôler ce dernier.
Avec les études de définition, ne prend-on pas le risque que ce soit le
maître d’œuvre qui définisse le programme ? Alors dans ce cas, même si le
maître d'ouvrage doit valider le programme, nous serions dans une situa-
tion ou le maître d’œuvre s’engage à répondre en terme de projet aux exi-
gences qu’il a lui-même défini !
Il y a donc un risque de dessaisissement du maître d'ouvrage, de perte de
la maîtrise de l’élaboration du programme. Ce risque est d’autant plus
grand que les maîtres d'ouvrage recourent précisément aux études de défi-
nition quand ils éprouvent des difficultés à élaborer des orientations de
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE30
programmation. Ils sont donc dans une situation de dépendance au
départ, même s’ils ont la possibilité de choisir entre 3 propositions.
La procédure d’étude de définition est préférable à certaines procédures
de concours très fréquentes en urbanisme et en réhabilitation, ou un seul
maître d’œuvre se voit confier de fait l’élaboration du programme et du
projet. Dans ce cas de figure, la dépendance du maître d'ouvrage envers le
maître d’œuvre est totale et il n’a pas réellement de réflexion programma-
tique, on passe directement à l’élaboration du projet.
Par contre, on peut se demander s’il ne faut pas néanmoins que le maître
d'ouvrage engage une réflexion programmatique avant d’engager une
étude de définition, de manière à conserver un certain contrôle sur l’élabo-
ration du projet.
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 31
LA GESTION URBAINE
DANS LA
RESTRUCTURATION
URBAINE
24
Il serait vain de restructu-rer l’habitat et l’espaceurbain si on n’améliorepas de manière significa-tive leur gestion et leurmaintenance.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE32
Avant d’examiner les ques-
tions liées aux modes de
gestion mis en œuvre dans
le cadre des projets de restructura-
tion urbaine, il convient de situer le
rôle des enjeux de gestion dans les
décisions d’engager des opérations
de restructuration et les formes que
peuvent prendre les interactions
entre l’élaboration de ces projets de
restructuration et les initiatives en
matière d’amélioration ou d’adapta-
tion de la gestion.
Les enjeux de gestion à l’origine
des décisions de restructuration
urbaine
Les enjeux de gestion sont souvent à
l’origine des décisions de restructura-
tion des quartiers d’habitat social. Ce
sont en effet les difficultés de gestion
au plan économique, technique ou
social qui amènent à vouloir restruc-
turer le patrimoine.
Ces difficultés peuvent en effet être
de différentes natures :
- Pertes d’exploitation liées à la
vacance des logements, elle-même
due au manque d’attractivité du
parc ou à la réduction de la
demande de logement liée au
déclin économique et démogra-
phique du bassin d’habitat ;
- Inadaptation de la structure du
parc de logement par rapport à
l’évolution de la demande liée elle-
même aux changements de la
structure des ménages ;
- Inadaptation ou dégradation de la
structure des immeubles et notam-
ment des circulations (entrées,
coursives, cages d’escalier,
manque d’ascenseur…) dont la
réhabilitation ou la restructuration
représenteraient des coûts prohibi-
tifs par rapport aux produits loca-
tifs espérés ;
- Problèmes d’insécurité technique
graves, difficiles à résoudre ;
- Nécessité de faciliter la gestion et
la maintenance pour en réduire les
coûts ou améliorer leur qualité ;
- Paupérisation de la population,
Six questions clé
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 33
aggravation du vandalisme, de la
délinquance et de l’insécurité qui
aboutissent à une perte de contrôle
de la situation que les respon-
sables estiment ingérables.
Dans certains cas, on peut se deman-
der si la dégradation de la situation
qui conduit à une décision de restruc-
turation ne résulte pas d’une inadap-
tation ou d’une déficience du sys-
tème de gestion urbaine.
Hormis les enjeux de gestion, c’est la
volonté de réorganiser l’espace
urbain ou de désenclaver les quar-
tiers qui conduit à la décision de
démolition de certains immeubles,
même s’ils sont d’excellente qualité.
Les modalités d’interaction entre
les projets de restructuration et
l’adaptation de la gestion
On peut identifier trois types d’inter-
actions entre les projets de restruc-
turation et les formes de gestion. Ils
vont de l’absence d’amélioration de
la gestion à l’adaptation mutuelle
des projets de gestion et des projets
de restructuration, en passant par
des améliorations de la gestion qui
n’affectent pas la conception des
projets de restructuration. Chacun
de ces types d’interaction peut à son
tour se traduire à travers différentes
modalités.
1
L’absence d’amélioration de la
gestion voire sa dégradation
De nombreux projets de restructura-
tion ne donnent pas lieu à la mise en
œuvre d’amélioration sensible des
modes de gestion. Les acteurs espè-
rent que la transformation du bâti et
de l’espace urbain suffira à accroître
l’attractivité du site. Il arrive même
que la perspective de réaliser un
projet de restructuration conduise à
relâcher les efforts de gestion et à
différer certains travaux. Comme la
réalisation des opérations de
restructuration nécessite cinq à dix
ans selon l ’ampleur des projets,
cette position conduit à accentuer la
dégradation des sites concernés et
leur réputation.
2
Des améliorations de la gestion
conduites indépendamment des
projets de restructuration
Des projets d’amélioration sont sou-
vent conduits indépendamment des
projets de restructuration. Ces der-
niers sont alors conçus sans réelle-
ment intégrer les contraintes de ges-
tion des bâtiments et des espaces
urbains.
On peut distinguer différents types
de projets de gestion selon plusieurs
critères :
- Les projets de gestion peuvent être
engagés avant la conception des
projets de restructuration pour
créer des conditions permettant
d’optimiser ces investissements ou
bien seulement après leur réalisa-
tion ;
- Les projets peuvent aller de l’amé-
lioration des modes d’intervention
jusqu’à la transformation du sys-
tème de gestion ;
- Les projets peuvent concerner les
modes d’action et d’organisation
du bailleur ou bien porter sur la
mise en place d’actions d’améliora-
tion qui restent extérieures et viser
l’insertion sociale des jeunes, la
régulation des tensions par des
médiateurs, l’amélioration de la
gestion des espaces urbains, etc.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE34
3
Des projets de gestion qui inflé-
chissent ou orientent la concep-
tion des projets de restructura-
tion
Les projets les plus ambitieux
conduisent à intégrer les enjeux de
gestion dans la conception même
des opérations de restructuration.
Cette interaction peut se traduire par
trois modes d’approche :
- Une conception de la restructura-
tion soucieuse de faciliter la ges-
tion et la maintenance et d’en
réduire les coûts ;
- Une restructuration de l’espace
visant à construire des territoires
de gestion pour en faciliter la maî-
trise ;
- Une adaptation mutuelle de la
conception de la restructuration et
de l’organisation de la gestion
pour optimiser l’interaction entre
ces deux formes d’organisation.
Il convient de noter qu’il existe un
certain paradoxe dans ces relations
entre la conception de la gestion et la
conception de la restructuration
urbaine. Les difficultés de gestion
sont souvent à l’origine des décisions
de restructuration, les dysfonctionne-
ments des systèmes de gestion peu-
vent même être à l’origine de proces-
sus de dégradation du patrimoine.
Mais l’adaptation de la gestion
n’accompagne pas toujours la réali-
sation des projets de restructuration
et ces derniers sont rarement conçus
en fonction des enjeux de gestion.
Ces deux types de projets renvoient à
des cultures professionnelles très dif-
férentes et sont conduits dans le
cadre de démarches qui n’obéissent
pas aux mêmes logiques.
4
Les six questions clé
On retiendra, après ce préalable
6 questions qui nous apparaissent clé
dans le lien entre gestion urbaine de
proximité et restructuration urbaine.
1 L’efficacité de la gestion condi-
tionne l’efficacité de la restructura-
tion urbaine
Les processus de dégradation des
quartiers d’habitat social sont la
résultante de la paupérisation de la
Les dégradation sont sou-vent dues à l’inadaptationet aux dysfonctionne-ments de la gestion desespaces urbains et del’habitat.
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 35
population, de l’inadaptation de
l’habitat et de l’organisation des
espaces urbains, ce qui nécessite de
les requalifier et de les restructurer.
Mais ces processus de dégradation
sont également dus à l’inadaptation
et aux dysfonctionnements de la ges-
tion de ces espaces et de l’habitat,
ainsi qu’aux dysfonctionnements des
équipements et des services publics
(police, éducation, action sociale et
culturelle, etc.).
Ces organisations contribuent de
manière non négligeable à la structu-
ration des relations sociales qui se
développent dans un quartier et
influencent les pratiques et les com-
portements des habitants. De ce fait,
leurs dysfonctionnements peuvent
favoriser le développement de la vio-
lence et de la délinquance ou le ren-
forcement d’une anomie sociale. On
constate en effet que ces phéno-
mènes tendent à s’accroître quand la
gestion de ces quartiers se dégrade,
et a fortiori lorsqu’ils sont laissés à
l’abandon, car les règles d’usage de
l’espace dont les organisations char-
gées de cette gestion sont porteuses
ne sont plus appliquées et respec-
tées. Il serait donc vain de restructu-
rer l ’habitat et l ’organisation de
l’espace urbain si on n’améliore pas
de manière significative l’efficacité
des organisations qui participent au
fonctionnement social des quartiers
concernés et en premier lieu celles
qui assurent la gestion et la mainte-
nance de l’habitat et de l’espace
urbain. Par ailleurs, la conception
init iale des immeubles et des
espaces urbains rend leur gestion
très difficile et très coûteuse.
La confusion des espaces publics et
des espaces privés, le statut peu clair
de ces espaces et des responsabilités
des propriétaires, l’étendue considé-
rable des espaces qu’il faut entrete-
nir, la complexité et la fragilité des
aménagements, la multiplication des
espaces interstitiels voire délaissés,
l’existence de nombreux vides
urbains, la mauvaise organisation
des dispositifs de gestion des
déchets, les difficultés de lisibilité et
de repérage des fonctions assignées
aux différents espaces, complexifient
considérablement la gestion de ces
espaces et ne permettent pas de cla-
rifier les responsabilités respectives
des bailleurs, des collectivités locales
et des institutions contrôlant les
équipements publics. C’est pourquoi
les opérations de restructuration
urbaine doivent avoir pour objectif
prioritaire la simplification de la ges-
tion de l’habitat et de l’espace
urbain, la réduction des coûts de
gestion et l’accroissement de l’effica-
cité des moyens de gestion dispo-
nibles. L’efficacité des investisse-
ments consacrés à la restructuration
urbaine des quartiers et l’accroisse-
ment de leur attractivité dépendent
pour une large part de l’adaptation
réciproque de l’organisation de
l’espace et de l’organisation de la
gestion et de l’amélioration de l’effi-
cacité des systèmes de gestion.
2 Les conceptions de l’adaptation de
la gestion : améliorations fonction-
nelles, démarches qualité,
démarches stratégiques
Les projets d’adaptation de la gestion
reposent sur différentes conceptions,
plus ou moins ambitieuses et plus ou
moins adaptées aux problèmes et
aux enjeux spécifiques de chaque
opération.
Les démarches d’amélioration fonc-
tionnelle
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE36
Ces démarches consistent à repérer
les principaux dysfonctionnements et
à améliorer les modes d’intervention
ou à renforcer les moyens mis en
œuvre. Ces améliorations concernent
essentiellement les méthodes de tra-
vail, les outils et les procédures utili-
sées. Elles peuvent également viser
l’amélioration de l’encadrement des
agents, la transmission des informa-
tions (par exemple le recueil et le
traitement des réclamations) et les
procédures de contrôle.
Ces démarches n’impliquent pas
d’adaptation en profondeur des orga-
nisations, de modification de la
répartition des fonctions et des rôles
des agents, de recomposition des
services et des métiers, de transfor-
mation des méthodes d’encadrement
et de gestion des ressources
humaines.
Les démarches d’amélioration de la
qualité
Ces démarches, plus ambitieuses
que les précédentes, consistent à
faire une analyse systématique des
dysfonctionnements, à définir des
normes de qualité et à refondre les
procédures que doivent mettre en
œuvre les agents, en mettant en
œuvre des dispositifs de contrôle
standardisés de la qualité des diffé-
rentes prestations. Ces démarches,
inspirées de l’amélioration de la qua-
lité des produits industriels, condui-
sent souvent à une spécialisation des
agents, à une standardisation des
modes de gestion en appliquant les
mêmes normes et les mêmes procé-
dures dans les différents quartiers
que gère une municipalité ou un
bailleur. Ces approches laissent peu
de place à la prise en compte des
problèmes spécifiques de chaque
quartier et tendent à instrumentaliser
les agents chargés essentiellement
d’appliquer des procédures rigou-
reuses.
Les démarches stratégiques d’améliora-
tion de la gestion de proximité
À la différence des précédentes, ces
démarches visent à élaborer des stra-
tégies de gestion adaptées aux pro-
blèmes spécifiques de chaque quar-
tier, en identifiant les enjeux majeurs
et les dysfonctionnements des
modes d’organisation et des modes
d’intervention.
Ces démarches consistent à élaborer
et mettre en œuvre un projet
d’adaptation de la gestion fondé sur
une transformation des modes
d’organisation, une recomposition
des fonctions des différents services
et des rôles des agents, une modifi-
cation des méthodes d’encadrement
et de contrôle. Sous la responsabi-
lité des directions générales, ces
démarches supposent d’associer les
cadres et les agents à la réalisation
d’un diagnostic approfondi et aux
processus de changement des
modes d’organisation et des
méthodes de travail. Elles visent à
développer les capacités d’initiatives
et les compétences des agents et
passent donc par la mise en place
de processus de formation-action.
Ces démarches consistent à considé-
rer chaque quartier comme une
entité de gestion relativement auto-
nome, éventuellement redécoupée
en secteurs dont la gestion est
confiée à des équipes disposant
d’un budget propre et qui en assure
la responsabilité.
Dans le cadre d’une opération de
restructuration, pour que cette res-
ponsabilité soit effective, cette
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 37
équipe doit être associée à la concep-
tion du projet de restructuration
urbaine, afin qu’elle puisse proposer
des modes de réorganisation de
l’espace lui permettant d’optimiser
ses modes d’intervention et de
mettre en œuvre la stratégie de ges-
tion dont elle a la responsabilité.
3 L’adaptation de la gestion dans les
opérations de restructuration : au
fondement de la conception des
projets ou en accompagnement de
leur mise en œuvre
Si la plupart des maîtres d’ouvrage
sont conscients de la nécessité
d’améliorer la gestion de proximité
dans le cadre des opérations de
restructuration urbaine, cet objectif
reste généralement secondaire. La
complexité des enjeux liés à la
restructuration du patrimoine et des
espaces urbains et l’importance des
investissements qu’il est nécessaire
de mobiliser, font qu’il est difficile de
faire de l’amélioration de la gestion
un enjeu prioritaire.
L’organisation des bailleurs et des
collectivités locales sépare les bud-
gets d’investissements consacrés au
patrimoine et à l’aménagement, les
services assurant la gestion et la
maintenance. La culture qui sous-
tend ce mode d’organisation, fait
qu’il est difficile de mettre les respon-
sables de la gestion en position
d’infléchir les projets de restructura-
tion et a fortiori de fonder ces projets
sur les exigences liées à l’organisa-
tion de la gestion. De leur côté, les
maîtres d’œuvre sont peu enclins à
se baser sur une telle problématique,
car leur culture en la matière est limi-
tée. De ce fait, les projets d’améliora-
tion de la gestion sont généralement
élaborés parallèlement à la concep-
tion des projets de restructuration, et
considérés comme des "actions
d’accompagnement". Il arrive même
que la réflexion sur l’amélioration de
la gestion soit différée dans l’attente
de la réalisation de l’opération de
restructuration.
Dans certains cas néanmoins, l’élabo-
ration d’un projet de gestion est
engagée en amont ou dans le cadre
de l’élaboration du projet de restruc-
turation et en fait partie intégrante.
Les responsables de l’élaboration de
ce projet de gestion sont alors asso-
ciés à la programmation du projet de
restructuration. Il vise en priorité à
concevoir la réorganisation de
l’espace, de manière à optimiser
l’efficacité du système de gestion qui
est lui-même adapté en consé-
quence.
4 La requalification de l’espace entre
l’articulation de l’aménagement et
l’amélioration de la gestion
La restructuration urbaine porte sur
la transformation des immeubles et
des voiries et sur la recomposition
des espaces publics. Elle se situe à
une échelle globale, requiert des
investissements lourds qui s’amortis-
sent sur une durée longue et s’inscrit
dans un processus de transformation
à moyen et long terme. La valorisa-
tion des actions de restructuration
lourde nécessite cependant la mise
en œuvre de programmes de requali-
fication progressive des multiples
espaces qui composent un quartier, à
une échelle plus réduite : améliora-
tion des entrées et des abords des
immeubles, implantation de jeux,
revalorisation des espaces paysa-
gers, installation de bancs, améliora-
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE38
Un exemple de restructuration du patrimoine fondé sur
l’organisation de territoires de gestion autonomes
Le projet de restructuration du quartier de Bernon (1 400 logements) à
Épernay a été fondé sur un découpage du patrimoine permettant de consti-
tuer cinq territoires de gestion relativement autonomes, dont la responsa-
bilité a été confiée à des gérants.
Ce quartier est constitué de quatre ensembles de bâtiments de grande hau-
teur. Chacun de ces ensembles est composé d’immeubles entièrement
reliés les uns aux autres et comportait entre 100 et 400 logements. Cette
organisation se traduit par une multitude de halls et de passages traver-
sants servant de passages publics, et par un éloignement des voiries reje-
tées à la périphérie du quartier. Les ascenseurs sont situés dans des
immeubles d’angle et desservaient également des immeubles à coursives
reliés à ces immeubles d’angle, de sorte que les halls où sont situés les
ascenseurs desservent une centaine de logements.
La suppression de trois immeubles à coursives de 30 à 40 logements cha-
cun suffit à réduire la taille de chacun de ces ensembles, à supprimer plu-
sieurs halls et passages traversants, et à reconstituer des îlots de taille plus
réduite, séparés par des voiries, ce qui permet à la fois :
- de réduire l’intensité des circulations à l’intérieur des immeubles et
d’empêcher qu’ils soient traversés par des circulations publiques ;
- de faciliter l’accès aux immeubles pour les habitants tout en améliorant le
contrôle des espaces ;
- de permettre aux habitants de s’identifier à leur îlot au lieu d’être noyés
dans un magma inquiétant de 300 à 400 logements ;
- de supprimer la majorité des bâtiments à coursives où 30 à 50 % des loge-
ments sont vacants.
L’espace urbain fait également l’objet d’un travail de clarification des fonc-
tions et des usages, ce qui permet de confier aux gérants une responsabi-
lité de contrôle du territoire jouxtant les immeubles dont ils ont la charge,
car ce territoire est aisément identifiable.
Les bureaux des gérants seraient installés de manière à leur assurer la plus
grande visibilité possible sur les entrées des immeubles et sur leur terri-
toire, et de façon à réduire les distances qu’ils ont à parcourir pour
rejoindre les différents immeubles et, bien entendu, pour limiter les par-
cours que doivent faire les habitants pour se rendre dans ces bureaux.
Cette fonction de gérant a été créée en transformant l’organisation anté-
rieure pour l’adapter à la configuration du territoire. Elle a entraîné une
redéfinition des responsabilités et des fonctions confiées aux agents de ter-
rain et un remodelage de l’ensemble de l’organisation.
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 39
tion de l’éclairage et de la signalé-
tique, réfection des trottoirs, etc.
Ces actions peuvent être engagées
relativement rapidement et se situent
à l’articulation de la gestion courante
et des investissements lourds. Elles
peuvent s’inscrire dans des pro-
grammes d’embellissement plurian-
nuels dans le cadre de budgets de
grosses réparations.
I l est nécessaire de prendre en
compte les enjeux de gestion dans
la conception des restructurations,
mais ces travaux restent l’affaire des
spécialistes de l’aménagement, alors
que les programmes de requalifica-
tion urbaine doivent être conçus en
étroite collaboration avec les ser-
vices de gestion et de maintenance,
car ils connaissent les pratiques et
les attentes des habitants. Ces der-
niers peuvent d’ailleurs être aisé-
ment associés à l’élaboration de ces
micro projets. On peut aussi réaliser
une partie de ces travaux dans le
cadre de chantiers d’insertion des
jeunes. Grâce à ces travaux de
requalification, on peut rompre la
monotonie et la massivité des
grands ensembles, et diversifier les
ambiances urbaines, ce qui permet
de renforcer l ’ identité d’unités
d’habitat à l’échelle de 100 ou 200
logements. On facilite ainsi l’appro-
priation de l’environnement pas les
habitants et on réduit le vandalisme,
on améliore la sécurité. Bien qu’une
stratégie et un plan d’ensemble
soient nécessaires pour guider la
réalisation de ces travaux, ils peu-
vent être engagés progressivement
à travers un processus d’investisse-
ment continu, car il est important
pour les habitants de voir leur quar-
tier s’améliorer en permanence.
5 Le processus d’adaptation de la
gestion peut être engagé quelques
mois après le lancement des opé-
rations de restructuration
Le temps nécessaire à l’élaboration
des programmes et des projets de
restructuration et à la mobilisation
des financements fait que leur mise
en œuvre ne démarre qu’au bout de
quatre à cinq ans. Entre temps, les
quartiers concernés risquent de
continuer à se dégrader. Les habi-
tants et les agents assurant la gestion
se sentent alors floués et tendent de
ce fait à se décourager et à perdre
tout espoir. Or il est possible d’enga-
ger rapidement un processus de
revalorisation des quartiers à travers
l’engagement rapide d’un processus
d’adaptation de la gestion. Il suffit en
effet de quelques mois pour réaliser
un diagnostic de la gestion urbaine et
concevoir un projet d’adaptation. Au
bout de six à neuf mois, il est pos-
sible de mettre en place progressive-
ment une nouvelle organisation de la
gestion et de nouvelles méthodes de
travail et d’encadrement. On peut
notamment améliorer sensiblement
le nettoyage et la maintenance cou-
rante et satisfaire les réclamations
des habitants les plus pressantes.
L’expérience montre en effet que cer-
taines organisations sont tout à fait
capables d’engager un tel processus
au bout de quelques mois, mais il
faut reconnaître que certaines d’entre
elles ne passent à l’acte qu’au bout
de plusieurs années.
Les processus de transformation en
profondeur de l’organisation de la
gestion nécessitent environ trois ans.
On peut donc mettre à profit le temps
nécessaire au montage des opéra-
tions de restructuration urbaine pour
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE40
transformer la gestion. De cette
manière, on enraye rapidement les
processus de dégradation des quar-
tiers et on amorce une dynamique de
revalorisation, créant ainsi les condi-
tions qui permettent d’optimiser
l’efficacité des investissements et des
programmes de restructuration.
6 Concevoir l’adaptation de la ges-
tion de manière à rétablir le
contrôle public de l’espace et à
développer les relations sociales
Le développement de l’insécurité et
de la dégradation des grands
ensembles est pour une large part dû
à la perte de contrôle public de
l’espace et à l’isolement social crois-
sant des habitants. L’adaptation de la
gestion doit certes améliorer la qua-
lité fonctionnelle des prestations,
mais elle doit s’inscrire dans une
stratégie permettant d’utiliser l’amé-
lioration de ces prestations comme
un support pour rétablir le contrôle
public de l’espace et développer les
relations des agents de gestion avec
les habitants et les relations de voisi-
nage. Le nettoyage et l’entretien des
espaces, l’évacuation rapide des
encombrants et des épaves, la répa-
ration du mobilier urbain et des élé-
ments techniques endommagés, le
contrôle des stationnements, etc.,
améliorent le cadre de vie, mais sont
autant de signes symbolisant le réta-
blissement d’un contrôle public du
territoire et d’une attention à l’égard
des habitants qui se sentent aban-
donnés, dévalorisés et méprisés
quand les espaces sont laissés à
l’abandon.
Ceci ne peut se faire qu’en confiant
des responsabilités claires sur des
territoires précis aux équipes de ges-
tion et en renforçant le contrôle de
leur activité par un encadrement
rigoureux. Mais ces équipes de ges-
tion doivent développer leurs rela-
tions avec les habitants, leur rappeler
les règles de vie collective et favori-
ser le développement de leurs rela-
tions sociales. Le renforcement de la
cohésion sociale permet en effet de
redonner confiance aux habitants et
de développer leur capacité de maî-
trise sur leur environnement. Ils peu-
vent ainsi participer au contrôle
public du territoire en réinvestissant
l’espace urbain, car ils tendent à se
L’entretien et le net-toyage sont des signessymbolisant le rétablis-sement d’un contrôlepublic du territoire etd’une attention à l’égarddes habitants.
4. LA GESTION URBAINE DANS LA RESTRUCTURATION URBAINE 41
replier dans leur logement et sont
insécurisés lorsqu’ils sont isolés
socialement et ne se sentent pas sou-
tenus par les institutions qui n’assu-
rent même pas un entretien décent
de l’espace.
Exemple d’un projet de restructuration et de résidentialisation
conduit par une agence de gestion
Sous la responsabilité d’un comité de pilotage stratégique associant la
direction générale de l’Office HLM Nantes-Habitat et la ville de Nantes,
l’Agence assurant la gestion du quartier des Dervallières (2500 logements)
assure la conduite opérationnelle de l’élaboration d’un projet de restructu-
ration et de résidentialisation de ce quartier. Ce projet s’inscrit dans un pro-
cessus d’adaptation de l’organisation de l’agence, qui doit déboucher sur la
mise en place de trois ou quatre équipes assurant la gestion de secteurs de
600 à 800 logements, encadrées par un responsable.
La démarche de restructuration et de résidentialisation repose sur une ana-
lyse socio-urbaine de l’organisation du quartier, croisée avec une analyse
de l’attractivité des différents îlots fondée sur les données de gestion
(vacance des logements, rotation, composition sociale des ménages,
dégradations, conflits de voisinage, etc.). Il s’agit de repérer les unités
d’habitat qui constituent des entités de vie sociale et d’identifier le "poten-
tiel identitaire socio-spatial" dont dispose chacune d’elles. Ce potentiel
identitaire est constitué par les éléments de l’environnement qui caractéri-
sent l’identité de chaque unité, auxquels les habitants sont sensibles :
forme urbaine, proximité d’un boulevard ou d’un parc, d’équipements
publics, aménagements paysagers spécifiques, etc. Le travail consiste à
identifier les démolitions nécessaires en raison de la faible attractivité de
certains immeubles et pour assurer la cohérence de ces unités d’habitat, et
d’examiner comment on peut segmenter ces unités et les différencier par
des interventions architecturales, urbaines et paysagères, et en adaptant
leur gestion.
Cette démarche repose sur un principe qui consiste à dissocier et différen-
cier les îlots pour rompre l’unité et l’uniformité des quartiers et les ratta-
cher autant que faire se peut à l’environnement urbain. Les secteurs de
gestion disposent d’agents de gestion de proximité qui assurent l’entretien
et les relations avec les locataires de 200 logements. Chacun de ces agents
gérera donc deux ou trois unités résidentielles.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE42
LA PLACE DES
HABITANTS DANS LES
RESTRUCTURATIONS
URBAINES
25
5. LA PLACE DES HABITANTS DANS LES RESTRUCTURATIONS URBAINES 43
Associer les habitants aux
opérations de restructuration
urbaine est une demande
croissante, pouvant aller jusqu’à
l’injonction systématique. Or l’impli-
cation des habitants pose la question
de leur pertinence à faire remonter
leurs modes de vie. Les questions de
l’implication des habitants sont celles
relatives aux méthodes et outils qui
la favorisent, sans les instrumentali-
ser, tout en prenant en compte leur
diversité.
Au-delà de l’actualité de cette ques-
tion qui peut parfois être perçue
comme un effet de mode, la partici-
pation des habitants s’inscrit dans
une histoire et un cadre légal :
- Une histoire de la concertation
locative, des administrateurs loca-
taires (1978) aux modalités de
concertation de la loi SRU en pas-
sant par les dispositifs de débat du
mouvement HLM avec les organi-
sations nationales de locataires.
- Une histoire de la démocratie par-
ticipative locale qui organise les
modalités de consultation des
citoyens lors de projets d’aména-
gement et les formes du débat
avec les élus dans les villes
(conseils de quartier).
- Une histoire plus récente de
concertation dans les services qui
décrit les dispositifs de débat avec
les usagers pour l’amélioration des
services publics.
C’est fort de ce cadre et des expé-
riences acquises que nous sommes
aujourd’hui face à une nouvelle exi-
gence d’association des habitants à
la production d’une amélioration de
leur cadre de vie. La réponse à cette
exigence oblige à comprendre ce que
veut dire habiter pour chacun.
Partant du constat que la satisfaction
à l’égard d’un logement est différente
du rapport à l’habitat il apparaît que
le sens du "chez soi" se construit
Niveaux de débat et
modalités de mise en
œuvre
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE44
dans la relation aux autres et à la col-
lectivité1. Cela signifie que la fragilité
du sentiment de "se sentir chez soi"
est le résultat des difficultés de
construction de chacun à l’environne-
ment social dans lequel il se trouve
(relation à l’autre – mon voisin –, aux
autres – les locataires de mon
immeuble –, à l’environnement les
habitants de mon quartier).
Cette analyse a pour conséquence de
relativiser les démarches participa-
tives qui se centrent uniquement sur
le logement ou la notion de client.
Elle relativise également le caractère
explicatif des données socio-démo-
graphiques dans le rapport à l’habi-
ter. Elle oblige à travailler sur les
représentations sociales des habi-
tants c’est-à-dire prendre en compte
l’histoire et l’imaginaire social d’un
quartier.
Cette perspective renforce l’exigence
de toute analyse initiale (diagnostic)
pour développer un processus d’asso-
ciation des habitants dans des projets
de renouvellement urbain. Il nous faut
comprendre la diversité des représen-
tations sociales des habitants, com-
prendre leurs interactions
1
Trois niveaux de débat
La faisabilité de ce travail est facilitée
si l’on accepte que la notion d’habi-
tant recouvre de fait 3 postures arti-
culées2 :
- Des postures privées relatives à
l’histoire des individus.
- Des postures publiques relatives à
la place que l’on tient seul ou en
groupe dans la communauté de
citoyens.
- Des postures sociales relatives à
l’ensemble des pratiques sociales
en milieu urbain.
Ces quelques points de repère doi-
vent être complétés par la prise en
compte des différentes échelles terri-
toriales pour penser et agir la partici-
pation des habitants. Avoir une
vision globale de la ville suppose un
décloisonnement de regards, des
analyses, elle permet une appréhen-
Expo publique, Marseille
Associer les habitants estune demande croissante,voire une injonction sys-tématique.
1 Travaux du CSTB (B. Allen, M. Bonetti)2 Travaux de Rose-Marie Royer (CREPAH)
5. LA PLACE DES HABITANTS DANS LES RESTRUCTURATIONS URBAINES 45
sion de la diversité des acteurs et des
territoires. Considérer que la ville est
un bien commun rend difficile un
zonage fonctionnel ou social très
marqué.
Cette perspective met en avant les
diverses échelles où s’exerce la
citoyenneté :
- L’îlot (unité résidentielle…) : c’est le
territoire de la sociabilité de proxi-
mité, le cadre de la relation de voi-
sinage avec autrui et avec les
autres.
- Le quartier : c’est l’ensemble des
services autour du logement ;
espace de la vie quotidienne et de
l’inscription sociale.
- La ville : c’est l’espace de l’urbanité
articulant les dimensions écono-
miques culturelles et sociales et celui
de la démocratie représentative.
La prise en compte de ces échelles
territoriales clarifie alors ce qui doit
fonder la place des habitants dans la
conduite d’un projet de renouvelle-
ment urbain :
- L’association des habitants au
niveau de la ville consistera à faire
partager les priorités de dévelop-
pement.
- L’association des habitants au
niveau du quartier consisterait à
faire partager le projet de restruc-
turation.
- Le niveau de l’îlot est celui de la
mise en débat, tout en restant vigi-
lant à ce qu’il y ait une validation
des propositions à une autre
échelle ce qui permet d’articuler
intérêt collectif et intérêts indivi-
duels.
Ces quelques remarques permettent
alors de mieux aborder la question
de l’organisation de la concertation.
2
Repères pour le pilotage d’un dispo-
sitif de participation des habitants
Comme pour la maîtrise d’ouvrage et
le pilotage d’un projet de restructura-
tion urbaine, les dispositifs d’implica-
tion et de participation des habitants
requièrent une organisation, une ges-
tion dans la durée qui est corrélée à
l’objet principal du processus de
concertation, des modalités tech-
niques, des règles du jeu.
Le pilotage de la concertation.
L’analyse des différents sites de
restructuration urbaine permet de
repérer trois formes distinctes de
pilotage :
- Un pilotage unique : le dispositif de
concertation est piloté soit par la
ville, soit par le bailleur. Et c’est ce
même acteur qui, lorsque la
concertation s’inscrit dans une
opération plus vaste (ex. réaména-
gement d’un quartier) est égale-
ment en charge de mener ce pro-
jet. Cette première forme concerne
la majorité des sites étudiés.
- Un pilotage double : deux
démarches de concertation sont
menées parallèlement, l’une par la
ville, l’autre par le bailleur, avec
dans certains sites des moments
de rencontre entre les deux
démarches. Chacun des deux
acteurs (ville/bailleur) est pilote
d’un projet et du dispositif de
concertation s’y rattachant.
- Un pilotage conjoint : il s’agit dans
ce cas d’un dispositif de concerta-
tion mené par la ville et le bailleur,
ensemble. La démarche et les
modalités sont élaborées et
menées conjointement, avec une
recherche de répartition des rôles
de chacun.
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE46
Les champs de la participation
• Concertation sur la restructuration
urbaine (réaménagement, requali-
fication…).
Pour les sites de ce type, l’objet de la
concertation correspond au projet
plus large dans lequel elles s’inscri-
vent. Le projet est limité dans le
temps, avec une durée définie en
amont : le dispositif de participation
l’est aussi. Une évolution est possible
vers une forme de participation non
limitée dans le temps.
• Concertation sur les aspects ges-
tion de proximité, services, dyna-
misation de la vie sociale, qualité
de la relation partenaires/habitats
Pour les sites ici concernés, la concer-
tation ne s’inscrit pas nécessairement
dans un projet plus global. C’est bien
la concertation qui est au cœur du dis-
positif mis en place. Ce sont des sites
où le dispositif est suffisamment
ouvert pour que les habitants puissent
définir les thèmes sur lesquels porte la
participation. Il y a donc reconnais-
sance de la capacité de l’habitat à pro-
duire lui-même les objets de la partici-
pation. Ces objets sont d’ailleurs évo-
lutifs. Ces dispositifs sont en général
conçus comme non limités dans le
temps, puisque les objets également
sont d’une durée indéfinie (ex. travail
sur le service, la qualité de la relation,
la gestion ou la vie sociale). C’est
aussi dans ces sites que la qualité de
la relation peut devenir un objet en soi
: l’enjeu de la concertation est alors le
maintien et l’évolution de la relation
entre les habitants et la Ville, et/ou les
habitants et le bailleur, et/ou les habi-
tants entre eux.
3
Les modalités techniques de mise
en œuvre de la concertation
Un mode d’organisation unique de la
concertation (par exemple : les moda-
lités de rencontres avec les habitants
se font uniquement sous forme de
réunions par cages d’escalier).
Un double mode d’organisation.
Parmi les sites concernés par ce
double mode d’organisation, on doit
distinguer :
- les sites où les deux modes d’orga-
nisation de la participation corres-
pondent en fait à deux démarches
distinctes menées respectivement
par la ville et le bailleur,
- les sites où différents niveaux de
concertation sont mis en place par
un seul acteur, qui est aussi pilote
de la concertation.
Selon les sites, il y a soit création
d’un lieu ad hoc ou utilisation d’un
lieu existant qui sera dédié à la
concertation pendant un temps
déterminé, soit absence d’un lieu
identifié. La création d’un lieu dédié
à la concertation fait partie des élé-
ments qui confèrent une place cer-
taine au dispositif et facilite la parti-
cipation au plus près du terrain
(pour les institutions et les habi-
tants).
4
La question de la formalisation et
de la définition des règles du jeu
de la participation.
D’une manière générale, on peut dire
que le degré de formalisation du dis-
positif de concertation et de ses
règles de fonctionnement est très
variable d’un site à l’autre. Il est tou-
5. LA PLACE DES HABITANTS DANS LES RESTRUCTURATIONS URBAINES 47
tefois utile de distinguer :
- les sites où le dispositif de concer-
tation s’inscrit et s’appuie sur un
cadre de référence qui lui préexiste
: cadre réglementaire, juridique ou
contractuel (administrateurs loca-
taires, concertation dans le cadre
d’une réhabilitation…) pratiques
usuelles qui tiennent comte de
l’histoire locale de la concertation
(comités de résidents, habitants-
relais…).
- Les sites où les règles de la partici-
pation sont construites par le(s)
pilote(s) à l’occasion de la mise en
place du dispositif. La mise en
place de règles et leur formalisa-
tion peut se faire aussi à la
demande des habitants eux-
mêmes.
Dans certains dispositifs bien sûr, les
deux types de règles coexistent.
Par ailleurs, il faut souligner que les
sites où le dispositif de concertation
est piloté conjointement par la ville
et le bailleur sont ceux qui donnent
lieu à un véritable travail de forma-
lisation par les deux acteurs, ne
serait-ce que dans le but de répartir
les tâches et rôles de chacun des
pilotes et de les rendre lisibles aux
habitants. Le fait que des règles
aient été formalisées ne veut pas
dire que celles-ci sont déterminées
une fois pour toutes : cela signifie
plutôt qu’un cadre a été pensé et
mis au point, ce qui n’exclut pas la
possibi l i té d’une souplesse ou
d’une évolution à l’intérieur de ce
cadre.
Pour autant, la formalisation n’est
pas en soi pour les habitants une
garantie de la qualité du processus.
Dans certains sites, on a pu obser-
ver un rejet de toute formalisation
par les habitants tant qu’une cer-
taine confiance ou une reconnais-
sance de leur place n’était pas ins-
taurée.
5
Éléments de méthodes pour réus-
sir une concertation
Faire participer les habitants aux dif-
férents types de projets ne s’impro-
vise pas. Il faut trouver le bon niveau
d’implication et ne pas se méprendre
sur le niveau de représentativité des
habitants consultés Il est donc impor-
tant de définir des modes et des
règles d’association et de contribu-
tion des habitants en prévoyant les
moyens nécessaires à leur formation
et au développement de leur capacité
d’expression.
Principes préalables pour engager une
démarche de participation réussie :
• Établir une relation de confiance
avec les habitants qui vont tester la
capacité de dialogue des parte-
naires. Cela signifie d’être capable
d’entendre les habitants, d’appor-
ter une réponse à leur demande
(positive ou négative) de manière à
prouver le poids de leur parole.
Pour cela, il est nécessaire :
- d’accepter des remises en cause,
des hiérarchisations nouvelles et
des délais en apparence plus
longs ;
- de préciser en permanence les
différentes échéances et termes,
ainsi que les raisons des actions
programmées, et de respecter ses
engagements.
• Distinguer les rôles et responsabili-
tés des décideurs et des habitants
en intégrant ces derniers au pro-
cessus de décision, même si les
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE48
instances stratégiques se réunis-
sent sans eux, pour garantir la
prise en compte d’intérêts collec-
tifs qui peuvent leur échapper.
• Reconnaître la diversité des habi-
tants, notamment par la bonne
échelle de débat et la prise en
compte des attentes et revendica-
tions de tous les groupes. À cet
effet, on distingue :
- Les habitants engagés et volon-
taires (les habitants élus et/ou
représentants les locataires, repré-
sentants d’associations), qui peu-
vent constituer des personnes res-
sources pour identifier les motifs
d’insatisfaction résidentielle. Ils
sont souvent bien identifiés par le
personnel de proximité.
- Les résidents, qui ne constituent
pas un groupe homogène, les pro-
fils et les modes de vie des rési-
dents apparaissant très différen-
ciés (adolescents, familles, per-
sonnes âgées, etc.).
- Les usagers, qui utilisent les ser-
vices, équipements ainsi que les
activités économiques et commer-
ciales d’un quartier.
• Mettre en cohérence l’échelle de
participation avec l’organisation de
la vie sociale et les territoires de
gestion. Le meilleur dispositif est
celui qui répond de façon souple
aux spécificités du patrimoine (dif-
fus ou non, petits groupes, grands
groupes, agences ou non…) et de
son territoire d’implantation :
• Appuyer la participation sur un dis-
positif de communication et un
système d’information rigoureux et
cohérent.
• Être prêt à engager des modifica-
tions substantielles des procédures
de gestion urbaine de proximité, et
dans le rythme de certains chan-
tiers de requalification patrimo-
niale.
Plus concrètement, l’organisation
de la concertation doit dans tous
les cas :
• Mettre en place une organisation
lisible de la maîtrise d’ouvrage.
Les habitants font rarement le
découpage des responsabilités
incombant aux uns et aux autres.
Ils apprécient un tout, intégrant le
logement, ses abords, les services
liés et le cadre de vie du quartier.
De fait, la qualité de la gestion
urbaine procède d’une démarche
globale avec une obligation de
réussite commune.
• Mobiliser des outils adaptés.
- Les supports d’information (jour-
naux, affiches, site internet…)
fournissent une information claire
et accessible sur ce qui va être
réalisé et qui aura un impact dans
la vie quotidienne des habitants.
Ces outils sont utilisés dans un
souci de transparence des poli-
tiques menées. C’est une condi-
tion nécessaire de la capacité
d’intervention des habitants et
des professionnels.
- Les outils de concertation
(réunions publiques, permanence
sur le quartier, numéro de télé-
phone unique mis à disposition
des habitants) constituent un
moyen de recueillir de l’informa-
tion sur les attentes des locataires
à un moment donné par rapport à
une question ou un projet précis.
Ils sont généralement mobilisés
dans la phase d’analyse, mais
5. LA PLACE DES HABITANTS DANS LES RESTRUCTURATIONS URBAINES 49
plus systématiquement encore
dans les phases de préparation
des arbitrages.
- Les moyens de coproduction de
services (groupes d’habitants
relais et groupes d’usagers d’un
service public) aident à structu-
rer la décision des partenaires
par une évaluation progressive
et continue des actions engagées
et des résultats produits. Il s’agit
de groupes ressources qui ont
vocation à être pérennisés dans
le temps. I ls sont partie inté-
grante du suivi particulier des
actions de gestion urbaine de
proximité.
Les outils de médiation reposent
pour une part sur les acteurs qui
interviennent auprès des habitants
pour les sensibiliser à une question
et les inciter à modifier leur compor-
tement, donc à réduire les opposi-
tions et prévenir les conflits.
Enfin les enquêtes de satisfaction
permettent de recueillir régulière-
ment les réactions des résidents d’un
territoire donné par rapport à des
prestations. C’est plus un outil d’éva-
luation de la qualité de services que
de participation des habitants. Elles
sont largement utilisées dans le suivi
et le pilotage des actions
LES ENJEUX DE LA RESTRUCTURATION UBAINE50
I l apparaît donc que changer la
ville et dynamiser la citoyenneté
vont de pair. Ceci signifie que
l'évolution des villes concerne les
formes et structures urbaines et leurs
habitants. Renouveler renvoie à un
changement, une innovation à partir
des structures existantes et héritées,
telles qu’elles sont habitées et avec
leurs habitants. C’est en ce point que
restructuration urbaine et démocratie
s’articulent.
Le renouvellement urbain est ainsi à
l’opposé d’une création ex nihilo.
L’histoire est là fondamentale. Une
histoire qui se fait au jour le jour et
qui prend son origine dans le passé.
Cette histoire n’est pas abstraite, les
espaces urbains l’expriment, la
condensent. Les habitants l’incar-
nent, la promeuvent, la vivent.
Le renouvellement urbain pose
concomitamment la question du
renouvellement de la citoyenneté. Et
quelles qu’en soient les difficultés ou
résistances, il s’agit alors de
construire une histoire urbaine dans
laquelle les habitants se reconnais-
sent c’est-à-dire qu’ils soient acteurs
de ce renouvellement urbain en se
découvrant citoyens à part entière, à
savoir sujets de leur propre histoire.
Autrement dit l’enjeu est de recher-
cher à reconstruire une cité, au-delà
de zones urbaines dans lesquelles
vivent des habitants usagers. À cet
égard, habiter n’est pas seulement
résider et se déplacer dans des
espaces instrumentaux et fonction-
nels.
C’est enfin redonner du sens à la
notion d’espace public qui est sou-
vent ramené à la notion d’espaces de
déplacements, de rencontres et
d’usages, tels que les rues, les
places, les escaliers, les lieux com-
merciaux ou de marché… Or l’espace
public est l’espace où se débat la
chose publique renvoyant alors à des
pratiques de citoyens. De ce point de
vue, associer les habitants à la
restructuration de leur quartier, dis-
cuter du devenir d’un immeuble ou
d’un équipement c’est transformer le
lieu de ce débat en un espace public,
en un espace de débat public.
En guise de conclusion
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