Livre Oeuvres F Penot

Preview:

DESCRIPTION

photography

Citation preview

FrançoisePÉNOT

Œuvres1996-2010

FrançoisePÉNOT

Œuvres1996-2010

6

page précédenteAutoportrait, 2003 Huile sur toile, 50 x 60 cm

Biographie

Introduction

Les femmes

Les natures mortes

Les sculptures

Témoignages

...........................……………………………………… 8

..........………………………………………………… 10

.......................……………………………………… 12

.……………………………………………… 100

………….………………………………………… 142

..................................…………………………… 174

sommaire

8

Françoise Pénot est née le 2 mars 1961 à Beaupréau dans le Maine et Loire. Cette région aux

portes de Cholet est le berceau de sa grande famille. Ses parents Paulette et Georges Pénot installés

à St Léger sous Cholet, ont eu trois autres enfants, Christian (†), Catherine et Alain. Françoise est une

autodidacte, aussitôt fi nie sa scolarité et à sa majorité atteinte, elle quitte la base familiale pour gagner sa

vie.

Après avoir vécu dans diverses villes françaises, elle s’installe à Bordeaux, et y rencontre son

époux Jacques Lurton. Inventive de nature, passionnée par le stylisme, elle conçoit des modèles qu’elle

présente lors de podiums régionaux. Le couple s’installe au domaine de La Martinette, près de Libourne.

C’est l’occasion pour Françoise, à travers un véritable engouement pour le jardinage, de développer sa

créativité. Parallèlement au perfectionnement de cet art, elle est attirée par la sculpture et suit une formation

en modelage ainsi qu’en arts plastiques. Naturellement douée pour le dessin, elle ne cessera plus de

façonner et de peindre.

À l’encontre des tendances abstraites, elle opte pour la fi guration. Françoise se concentre

sur la représentation de femmes, inspirées de la photographie de mode, de Modigliani et de Balthus.

Inlassablement, elle travaille le cadrage de ses toiles, la lumière des chairs et les couleurs des textiles.

Sans jamais se départir de son sujet principal, vers 2005 elle diversifi e sa création avec des fl eurs, des

poissons pour lesquels elle a recours à une brosse plus saccadée et au collage, pour donner du relief à

ses sujets.

Après avoir accumulé plus d’une centaine d’œuvres, qu’elle souhaitait un jour exposer, Françoise

nous quitte le 21 Octobre 2010, emportée par la maladie.

10

Repos, 2002 Huile sur toile, 73 x 92 cm

L’œuvre de Françoise Pénot se décline en grande partie autour de la fi gure humaine et de natures

mortes. Relativement indifférente au problème de l’espace, elle fait porter ses efforts sur la pureté des

lignes ; l’étirement des formes et l’arabesque deviennent les marques personnelles de son style.

Très attachée à la fi guration mais talentueusement émancipée du dessin académique, elle produit des

tableaux léchés où la matière humaine est aussi continue et lisse qu’un textile, accueillant la lumière

comme une surface polie pour la laisser passer avec courtoisie. Éclairage tamisé, poussière chaude sur

les sujets. L’approche est sculpturale, privilégiant la ligne, sa prolongation indéfi nie et sa délicatesse. Les

formes sont stylisées, un contour idéal circonscrit le corps dans ses rythmes essentiels ; la courbe très

pure de l’épaule droite dessine souvent avec le bras un ovale presque parfait pour signifi er un geste de

pudeur codifi é mais d’une grâce infi nie.

La lente maturation de sa pratique picturale l’a particulièrement amenée à se concentrer sur la

carnation. Dans la plupart des tableaux, la plénitude des accords de tons à dominante orangée donne aux

volumes toute leur densité et une apparence doucereuse de la peau devenue maîtresse de la lumière, un

peu à la manière de Modigliani. Mais on peut également remarquer sur certaines toiles une plus grande

liberté de traitement de la chair, accentuée par des touches bleutées qui la marbrent et la fragmentent,

technique spécifi que à Lucien Freud.

L’univers diaphane et la douce équivoque rappellent les nubiles de Balthus. Comme lui, elle a le goût des

aplats mats, de la scénographie de la mise en page et du mystère félin. On retrouve bien dans ces femmes

des airs de chats, sensuelles et câlines aux yeux d’agathe, mais déjà trop furtives et distantes, à l’univers

intérieur inaccessible.

Lignes épurées, visages allongés, yeux fi xes et hors du temps, l’équilibre entre le rêve et le réel est fragile.

Les corps semblent retouchés à l’extrême, allongés, arrondis, lissés comme autant de photos de magazine

esthétisées. Gros plan sur une courbe, une main posée sur la peau comme dans ces photographies de

mode où le poignet n’est que le support d’une montre, le pli du cou celui d’un collier. Ici le cadre est

maintenu mais aucun accessoire n’est vendu au premier plan. Le sujet, c’est la femme, dans sa nudité

voilée, dans son calme stoïque et sensuel, dans sa force silencieuse.

Le dessin simplifi é, l’espace peu profond, la palette carmine donnent à tous ses tableaux un

caractère éthéré, suave et mélancolique. Ses fl eurs sont elles aussi représentées à l’écart, dans leur bulle,

se murmurant des secrets à l’oreille. Le voile pastel jeté sur elles leur octroie une grâce presque divine,

intouchable.

Les poissons viennent en contrepoint de son œuvre distante et douce, avec leurs yeux en forme de cible,

leurs contours décidés, presque enfantins, et leurs écailles impressionnistes et bariolées. Ces peintures

sont plus fi gées, plus fougueuses aussi, presque drôles.

On retrouve le corps humain et le poisson dans ses sculptures. Comme dans les peintures, seules certaines

parties du sujet sont fi gurées, le reste étant laissé en suspens. Des visages, des jambes, des bras, rejetés

dans l’imaginaire. La partie pour le tout avec son lot de mystères donne toute sa sensualité au modelage.

C’est un ange déchu qui conclut le travail de Françoise Pénot : le visage en sang mais les paupières

soulagées d’avoir fi ni de lutter, et d’avoir atteint, même au prix d’une grande souffrance, celle qui ne se

laisse que très rarement attraper, à savoir la beauté.

12

C’est dans la série des femmes que l’on peut admirer toute la puissance expressive de la ligne,

toute la chaleur sensuelle qui en émane. Quelques grands corps minces dépliés comme des signes

cabalistiques sur une toile qui ne saurait les contenir. Le nez fi n, l’épaule ronde, la lèvre charnue et la

jambe gracile, des personnages et des traits élancés par delà le cadre. Les membres se dérobent à la vue,

souvent les visages aussi, jaloux de leurs secrets.

Toute l’attention est concentrée sur une partie du corps ; les fonds unis, indéfi nis, savent se tenir

en retrait. Sobres intérieurs et murs dépouillés s’effacent derrière la profondeur des regards et la langueur

des poses qui donnent à méditer. La couleur est réservée, harmonieuse, sans épaisseur. Courbes et

contrecourbes se marient amoureusement.

Tantôt plats, comme découpés dans du papier, les corps peuvent accuser soudain les coups

d’une brosse énergique et polychrome. Ces variations traduisent l’essence du modèle.

Perdues dans leur distraction consciente, dans leur détachement courageux et absolu, les femmes de

Françoise Pénot ont quelque chose de spirituel. Paisibles, comme ayant renoncé à souffrir, elles semblent

coupées du monde, lovées dans leur beauté discrète. Entre elles et le spectateur s’installe une distance

languide et onctueuse, celle du mystère.

«D’un œil observer le monde extérieur,de l’autre regarder au fond de soi-même.»

Amedeo Modigliani

Les femmes

14

Les sandales, 2000 Acrylique sur toile, 116 x 81 cm

16

Sieste, 2002Huile sur toile, 60 x 72 cm

18

Pose, 2002Huile sur toile, 60 x 72 cm

20

Sans titre, 2000 Acrylique sur toile, 81 x 116 cm

22

Sans titre, 2001 Huile sur toile, 74 x 91 cm

24

La chemise transparente, 2003Huile sur toile, 50 x 60 cm

26

Les escarpins, 2003 Huile sur toile, 54 x 65 cm

28

Autoportrait visage, 2003 Huile sur toile, 50 x 60 cm

30

Night-Club, 2003 Huile sur toile, 65 x 80 cm

32

La robe rouge, 2003 Huile sur toile, 50 x 60 cm

34

Jet-setteuse, 2003 Acrylique, 60 x 73 cm

36

La fenêtre de Vénus, 2003 Huile sur toile et papier de soie, 45 x 78 cm

38

Sans titre, 2003 Huile sur toile, 60 x 73 cm

40

Sans titreHuile sur toile, 60 x 73 cm

42

La robe blanche, 2003Huile sur toile, 50 x 61 cm

44

Sans titre, 2006Huile sur toile, 65 x 100 cm

46

La fi lle au chapeau, 2003Huile sur toile, 50 x 65 cm

48

Sans titre, 2001Sanguine, 42 x 60 cm

50

Sans titre, 2002Gouache sur Kraft, 62 x 77 cm

52

Sans titre, 2002Gouache sur Kraft collé sur toile, 73 x 92 cm

54

Sans titre, 2003Gouache sur Kraft, 72 x 90 cm

56

Sans titre, 2009-2010Pastel, 65 x 80 cm

58

Sans titre, 2004Huile sur toile, 46 x 61 cm

60

Sans titre, 2007-2010Huile sur toile, 60 x 73 cm

62

Sans titre, 2006Huile sur toile, 60 x 73 cm

64

Nu au lit, 2004-2007Huile sur toile, 100 x 140 cm

66

Sans titre, 2010Pastel, 48 x 64 cm

68

Sans titre, 2010Pastel, 48 x 64 cm

70

Sans titre, 2007Acrylique sur bois, 50 x 65 cm

72

Sans titre, 2007Acrylique sur bois, 50 x 65 cm

74

Sans titre, 2008Huile sur toile, 65 x 80 cm

76

Les Mules blanches, 2007Huile sur toile, 75 x 92 cm

78

Indolence / Nonchalance, 2008Huile sur toile, 60 x 81 cm

80

Sans titre, 2009Pastel, 50 x 60 cm

82

Nu couché, 2009-2010Pastel et fusain, 40 x 60 cm

84

Sans titreFusain craie blanche, 42 x 61 cm

86

Sans titre, 2009-2010Pastel, 40 x 50 cm

88

Sans titre, 2010Pastel, 50 x 65 cm

90

Sans titre, 2010Pastel, 50 x 65 cm

92

Femme couchée, main sur la hanche, 2010Huile sur toile, 65 x 80 cm

94

Sans titre, 2010Huile sur toile, 66 x 81 cm

96

Sans titre, 2010Huile sur toile, 60 x 73 cm

98

Lecture abandonnée, 2010 inachevéPremière épreuve 2008Huile sur papier, 65 x 100 cmHuile sur toile, 65 x 92 cm

100

Traditionnellement mineure par rapport au portrait, la nature morte a toujours eu un

destin plus décoratif. Françoise Pénot y apporte cependant un soin très personnel, s’écartant

de la fi guration pure et réaliste pour se concentrer sur l’essence du sujet, sur ses qualités

essentielles.

Ainsi les contours ondoyants rappellent le mouvement des fl eurs et les larges aplats, l’éclat

de leur couleur. Toujours devant un fond indéfi nissable, comme extraites de leur environnement,

elles semblent pourtant bien vivantes, mordant la terre de leurs racines et cherchant le soleil de

leurs pétales.

Les poissons bénéfi cient d’un traitement à part, le dessin et la composition chromatique

se faisant plus enfantins et plus radicaux. Loin de tout réalisme, l’animal perd son volume et

gagne en texture. Ses écailles scintillent de couleurs farfelues, contrastant avec l’opacité de son

œil circonscrit et hagard. Loin de l’eau, excentrique et stylisé comme dans un conte, il semble

dire tout le plaisir que Françoise prenait à peindre.

«Il faut avoir l’âme éteinte pour appeler «nature morte» un bouquet de fl eurs couvert d’insectes.»

Sylvain Tesson

Les natures mortes

102

Magnolia, 2005Acrylique, 105 x 130 cm

104

Lotus sacré, 2006Acrylique + modeling paste, 80 x 80 cm

106

Diptyque «Fleurs de lotus et pavots», 2004Acrylique + modeling paste, 60 x 73 cm

108

Diptyque «les orchidées et les roses», 2004Acrylique + modeling paste, 60 x 73 cm

110

Diptyque «composition Florale»Acrylique + modeling paste, 60 x 92 cm

112

Les chardons Corses, 2006Acrylique, 81 x 100 cm

114

Clématite, 2004Acrylique + modeling paste, 80 x 80 cm

116

Les clématites rose, 2004Carton papier, 60 x 50 cm

118

Les Nénuphars, 2005Acrylique, 73 x 92 cm

120

Héllebore, 2004Acrylique + modeling paste, 80 x 80 cm

122

Oignons, 2002Pastel, 49 x 63 cm

124

Les poivrons, 2001Pastel, 48 x 60 cm

126

Sans titre (3 poissons), 2006Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 62,5 x 140 cm

128

Le poisson long à l’oeil miroir, 2008Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 40 x 140 cm

130

Les deux poissons, 2008Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 62 x 100 cm

132

Sans titre, 2007Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 63 x 70 cm

134

Le poisson rosé, 2007Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois 62 x 70 cm

136

Poisson vert et mauve, 2007Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 41x 48 cm

138

Le poisson orange, 2008Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 37x 60 cm

140

Poisson violet à L’oeil métalique, écailles d’argent, 2008Mixte, collage papiers divers, fi l, bouton, résine et peinture acrylique sur panneau de bois, 39x 70 cm

142

Les sculptures Déformer la matière, la polir, l’amputer, jusqu’à voir apparaître la fi gure qui s’était cachée

en elle. Françoise Pénot aimait le modelage et la sculpture à travers lesquels elle travaillait les

mêmes leitmotivs que dans sa peinture, à savoir les parties du corps et les poissons. Argile,

carton, bronze ou céramique, peu importe le matériau pourvu qu’on ait la courbe d’une nageoire

ou d’une fesse.

Les sculptures sont plus libres que les toiles, les corps et les visages perdent

leurs proportions académiques pour se distordre, enfl er, s’exagérer. Dans une veine plus

expressionniste, l’œuvre d’art s’émancipe des contraintes formelles pour donner à voir le sens

et la sensation.

Créatures tronquées, hybrides ou blessées, elles apparaissent sous leurs traits les

plus primaires et les plus révélateurs de leur âme. Représentations allégoriques de la féminité,

la sensualité et la souffrance, ces sculptures montrent bien dans la détermination de leurs

formes, la passion qui fut celle de Françoise.

«Ce qui est magnifi que dans la sculpture,c’est de deviner tout à coup que les mêmes choses

ne sont pas perçues de la même façon.»

Colette Nys Mazure

144

Sans titre, 1996-1998Argile, H 35 cm

146

Sans titre, 1996-1998Carton papier, H 60 x L 50 cm

148

Bassin féminin, 1996-1998Bronze, H 25 x L 20 cm

150

Les fesses, 1996-1998Bronze, H 15 x L 22 cm

152

Sans titre, 1996Argile cizée, H 26 x L 29 cm

154

Femme en souffrance, 1996-1998Argile + bronze, H 15 x L 21 cm

156

Sans titre, 1996-1998Bronze, H 18 cm

158

Les 3 têtes, 1996-1998Argile + Bronze, H 11 cm

160

Sans titre, 1996-1998Bronze, H 38 cm

162

2 femmes aux seins nus, 2002-2003Céramique, H 37,5 et 47 cm

164

Les vases , 2002-2003Céramique, H 40 - 35 et 27 cm

166

Poisson , 2002-2003Céramique, H 14,5 x L 35 cm

168

Femme poisson , 2002-2003Céramique, L 30 cm

170

Tête de poisson , 2002-2003Céramique, H 20 x L 17 cm

172

L’ange blessé, 2002 - 2003Céramique, H 20 x L 18 cm

174

témoignages

176

Jacques, 2006Huile sur toile, 100 x 80 cm

178

La mode, le jardinage, et l’art ont fait partie des multiples talents et centres d’intérêts de Françoise.

Quand je l’ai connue en mai 1991, elle dessinait ses propres vêtements et participait à quelques podiums

régionaux pour présenter ses créations. Elle avait une perception extraordinaire de l’harmonie des couleurs,

un talent hors du commun pour les marier. En quelques secondes, elle jugeait le chic d’un vêtement, l’allure

d’une coupe, l’harmonie entre les teintes et les textures.

En mars 1995, elle apprenait qu’elle était malade du Sida. Cette période a coïncidé avec notre

installation à La Martinette où elle s’est découvert une vocation pour le jardinage. L’art d’aimer, de faire

pousser et d’associer les fl eurs et les plantes devint sa nouvelle passion. Elle s’y consacra sans modération,

dévorant journaux et ouvrages professionnels sur le sujet et se levant à l’aube du printemps à l’automne

pour voir son jardin s’épanouir.

En 1999, elle se lança dans la sculpture, mais c’est lors d’un détour par la peinture qu’elle s’aperçut

de sa compétence en la matière, le dessin ayant depuis longtemps fait partie de son travail de styliste.

Très vite, elle trouva sa voie et explora un genre assez original, où les «morceaux de femme», les attitudes

et les positions, constituaient un héritage éloquent de son goût pour la mode. Ce fut le début d’une nouvelle

passion qu’elle développa sans pour autant délaisser les autres.

Dans les livres et les revues spécialisées, elle découvrit et étudia ceux qui allaient l’inspirer et devenir ses

références : Suzanne Valadon, Picabia, Modigliani, Lucien Freud... En cet aréopage, Balthus occupait de

loin la place d’honneur. Sa peinture méticuleuse mettant en scène de jeunes fi lles nubiles dans des poses

équivoques l’émouvait particulièrement. L’un des grands moments de sa vie d’artiste fut de le voir exposé

à la fondation Pierre Gianadda en Suisse.

Grâce à ses recherches, son application et son énergie, Françoise progressa rapidement mais elle

ne put atteindre le niveau dont elle rêvait, faute de pouvoir trouver de nouveaux professeurs suffi samment

brillants comme l’étaient Marie Céline et Sylvia Chenudet. Le manque d’émulation dans la région et ses

soucis de santé n’entamèrent pourtant jamais sa détermination. Elle participa à tous les cours qui s’offraient

à elle pour ne pas pratiquer seule et trouver dans le regard et les conseils des autres la force qui manquait

parfois à son corps.

Si je dois retenir un élément du caractère de Françoise, c’est cette détermination mise au service

d’une grande sensibilité. Elle se fi xait avec rigueur des objectifs dans le travail, puis y mettait toute son

énergie, ne laissant rien au hasard. Un tableau n’était pas commencé qu’elle pensait déjà au suivant en

collectionnant les photos puisées dans les magazines de mode dont elle collectait les pages dans les

salles d’attente des innombrables services médicaux par lesquels elle eut malheureusement à passer.

Françoise n’a jamais exposé «ses femmes», comme elle les appelait. Elle souhaitait en réunir

suffi samment pour les montrer de façon signifi cative et exhaustive, or une exposition requiert une énergie

dont elle a beaucoup manqué, ces dernières années. Malgré tout, c’était sa façon courageuse et quotidienne

de se battre contre sa maladie, et la somme de ses œuvres est aussi la fabuleuse et émouvante contrepartie

de cette terrible souffrance.

Elle avait un coup d’œil unique pour voir et embrasser les couleurs d’un seul regard. Cet œil,

elle l’avait pour tout, que ce soit le jardin, la décoration, la table ou la peinture. Cette exigence et cette

tendresse s’illustraient dans les arts comme dans le choix de son entourage. Françoise possédait les traits

primordiaux que l’on attend d’un être humain : la simplicité, l’humilité, l’honnêteté et la générosité.

Puissent ses œuvres et ce recueil qui les dévoile prolonger l’excellent souvenir qu’elle a laissé en chacun

de nous.

Jacques

180

Françoise faisait partie de ces rares élèves qui vous donnent le plaisir d’enseigner et l’envie

de donner le meilleur de vous-même. Contrairement à la plupart des personnes qui venaient à l’atelier,

la peinture n’était pas pour Françoise une distraction ou un passe-temps. J’avais plutôt le sentiment qu’elle

peignait par nécessité et qu’il y avait dans le fait de peindre quelque chose de tout à fait essentiel et d’intime

pour elle. Son travail témoignait d’une vraie démarche, d’une quête et d’un cheminement personnel.

Dans les tableaux qu’elle réalisait à l’époque de notre rencontre, les portraits, autoportraits et les

corps féminins, étaient ses principaux sujets. Ils laissaient entrevoir un questionnement sur la féminité.

Ses choix de cadrage étaient proches de la photographie. Les visages et les corps sortaient de la toile,

se dérobaient, comme pour signifi er qu’il y a toujours quelque chose d’insaisissable qui échappe au regard

et fait sentir l’existence d’un au delà du tableau et de son sujet. Sa peinture se voulait lisse, pure, sans

aspérité, presque sans matière. La lumière émanant de la chair ou des tissus s’avérait douce, enveloppante.

Les corps y étaient sensuels, graciles, maladroits parfois, fragiles aussi. Ils se déployaient avec pudeur sur

des toiles aux formats de plus en plus grands. Les couleurs participaient à la retenue, elles se voulaient

sourdes, terreuses, mais harmonieuses.

En attente d’enseignements, toujours à l’écoute de conseils, Françoise restait néanmoins

intransigeante sur ses choix. Elle détenait l’essentiel. J’étais très sensible à sa détermination et son

exigence qui sont pour moi deux qualités propres à l’artiste. Elle savait ce qu’elle voulait peindre.

Le désir était à l’œuvre dans son travail et son style était sa signature.

L’accompagner sur ce chemin fut une expérience précieuse et inoubliable.

Marie-Céline Delibiot

182

Je garde de Françoise le souvenir d’une femme exceptionnelle dans tous les domaines.

J’ai eu le plaisir de lui donner des cours de dessin, peinture et d’apprécier son talent.

Je me souviens qu’elle insistait sur l’importance du dessin précis. Son goût pour les couleurs, son côté très

personnel dans la réalisaiton de ses oeuvres démontraient une grande artiste d’une profonde sensibilité.

Sylvia Chenudet

184

L’œuvre de Françoise à mes yeux, c’est ce parcours de vie qui a forgé son âme au feu de la

souffrance, physique et morale, jusqu’au fond de ses cellules.

C’est aussi cette centaine de beaux tableaux et de sculptures qu’elle nous laisse en héritage.

J’y vois les traces tangibles de sa créativité spécifi que qui par un tracé épuré cherchait, il me semble,

à exprimer avant tout l’essentiel : cette beauté simple et harmonieuse résidant en toute chose.

Françoise était une artiste accomplie, aimant le bel ouvrage. Elle préparait ses ébauches de tableaux très

à l’avance et perfectionnait au fi l des ans ceux qui semblaient achevés. Elle exprimait naturellement son

sens artistique dans des thèmes variés en utilisant différentes techniques : croquis, huile, acrylique, pastel,

modelage, céramique et autres matériaux de sculpture... Quelle diversité, quelle passion, quelle vitalité

dans les couleurs, les formes, les textures !

La richesse et la beauté émouvante de ses œuvres ont su me toucher et me faire aimer aussi bien

ma force intérieure que ma propre vulnérabilité.

Dans la dernière œuvre picturale de Françoise, la belle alanguie sur son canapé restera assoupie,

la main abandonnée sur un livre en cours de lecture, comme sa propre vie et ce qu’elle nous en donne

à méditer...

Ce tableau inachevé laisse la porte ouverte à l’indicible, pas encore déposé sur la toile... celui

d’une jeune femme qui est partie dans un rêve, là, de l’autre côté de la toile, pas si loin, juste derrière

le voile des apparences. Grâce à ses œuvres, elle reste parmi nous.

Marie-Odile Lurton

Alain Benoit - Conception

Marion Benoit - photographies

Antoine Calafat - Mise en page

Cécile Eveno - Textes, coordination éditoriale

Julie Esteban - Assistante photo

Sylvie Farges - Coordination fabrication

Odile Lurton - Coordination, régie des œuvres

Edith Ricaux - Préparation et retouches des images

Remerciements

188