Ni en boîte ni chez soi. Le travail en tiers-lieu · 2019-10-28 · 20 octobre 2019 l’ami hebdo...

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20 octobre 2019 l’ami hebdo - 17

Espace de coworking, bureaux partagés… Quelle que soit l’appellation employée, force est de constater que les lieux de travailimplantés hors de l’univers circonscrit de l’entreprise se développent et rivalisent d’inventivité pour séduire les travailleurs sansbureau fixe…

Qu’ils soient télétravailleurs, free-lance ou startuper, mais aussi libé-raux, étudiants, artisans ou en re-cherche d’emploi, le nombre de per-sonnes en quête de lieux alterna-tifs pour travailler est en constanteaugmentation. Mutation des modesde vie, décloisonnement du rythmemétro-boulot-dodo. Les explica-tions foisonnent et c’est précisémentlà qu’interviennent les tiers-lieux.Pensés pour les travailleurs no-mades qui se déplacent avec pourseuls outils leur ordinateur et leursmartphone, les tiers-lieux alsa-ciens, au-delà de leur personnalité,ont pour point commun d’opérerune alchimie complexe entre at-mosphère propice à la concentra-tion et ambiance détente, propre àgénérer des rencontres, favoriser leséchanges de compétence, brefcréer une « communauté », commele soutien Julien Moyne, créateur deWelcome coworking, à Strasbourg. « Seul, on a davantage de mal àse motiver», relèvent Justine et Co-line, respectivement étudiante etthésarde attablées à l’Anticafé, àStrasbourg. « Ici, c’est studieux,mais pas autant que dans une bi-bliothèque et plus stimulant quechez soi, à proximité du canapé ». De L’Espace partagé à Neewiller-près-Lauterbourg ou Le Pavillon, àHaguenau, au 34, déployé au seinde la pépinière d’entreprises duTechnopôle de Mulhouse, en pas-sant par l’Espace affaires Poincaréou le Square, dédié aux profes-sionnels du digital, à Colmar, Bu-reau-Mobile à Reichstett ou bien en-core La Plage digitale (l’un despionniers), Welcome, Hello Workinget l’Anticafé à Strasbourg, l’ouvertured’espaces partagés se multipliedans ou à la périphérie des villes.Si leur principe demeure celui la lo-cation d’un espace de travail poursoi – du simple coin de table, voire

tivité mais aussi les générations.C’est pour cette raison qu’une mi-cro-crèche a été implantée dansnotre espace pour permettre auxparents de disposer d’une solu-tion de garde d’enfants à proxi-mité de leur lieu de travail », ex-plique Jean-Christophe Uhl, ges-tionnaire de l’espace qui reçoitaussi des réseaux d’affaires… au-tours d’un barbecue. Et si les ateliers les plus divers fontaussi partie de la panoplie, ces der-niers sont souvent organisés par lesrésidents eux-mêmes. Comme unmoyen de mettre en valeur leur sa-voir-faire. De l’initiation aux bienfaitsde la rigologie chez Hello Working,à l’initiation au marketing data del’Anticafé, en passant par les coursde yoga prénatal, c’est Prévert quis’invite à la fête. Côté design, si la plupart des tiers-lieux calquent leur agencement etleur mobilier sur celui des bureaux,souvent impersonnels et décloi-sonnés, d’autres, à l’instar de Wel-come, Hello Working ou l’Anticafése démarquent pour une déco plustendance de nature à capter l’air dutemps et attirer un public plusbranché.

Frédéric Rihn

la journée, à la semaine ou au mois. Une offre qui peut aussi s’accom-pagner d’un panel de prestations,différentes selon le lieu : si le wifiet l’imprimante font partie du mi-nimum requis, les tiers lieux offrentaussi, selon le cas, de louer un ca-sier, d’y recevoir son courrier, voired’y domicilier leur entreprise (Wel-come, Bureau-Mobile). D’autres,plus imaginatifs, associent aux lieux

de pupitre, dans un environne-ment paysagé, au bureau fixe avecses tiroirs, en passant par l’alcôveplus intimiste (Le 34, à Mulhouse),voire un bureau fermé capabled’héberger plusieurs collaborateurs(Bureau-Mobile), tous facturentleur prestation au temps passé. Par-fois à l’heure, plus fréquemment à

de travail une micro-crèche ou unjardin partagé, comme chez Bureau-Mobile, à Reichstett. « Il nous a paru important demixer les usages, les types d’ac-

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Ni en boîte ni chez soi. Le travail en tiers-lieu

Thierry Milone et Christèle Vaast, gérants de l’Anticafé à Strasbourg. « Seule la présence d’une cuisineest imposée par la franchise, le reste de la déco est l’œuvre de ma compagne», explique Thierry Milone.

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L’Anticafé, à StrasbourgIci, pas de bureau fixe ni de domiciliation d’entreprise. A peine trois-quatre casiers – très peu utilisés. Si la possibilité d’acheter son tempsau mois existe, celle-ci n’est pas davantage employée, reconnaît ThierryMilone, fondateur, avec sa compagne Christèle Vaast de cette franchised’un concept né en 2013. « Nous sommes à mi chemin entre le café,l’espace de coworking et la maison » revendiquent les dirigeants dece tiers-lieu (un peu) différent.L’espace strasbourgeois est confortable et dans l’air du temps questiondéco, avec même un espace salon. Il y règne une ambiance calme etstudieuse. « Si les gens viennent d’abord ici pour travailler, ils cher-chent aussi à recréer du lien », assure celui qui dit avoir assisté à desrencontres business ayant débouché sur des contrats.A l’Anticafé, tout est compris dans le temps payé. Pour 5 € de l’heure(24 € la journée ou 240 € la semaine…) vous pouvez ainsi consom-mer autant de café latte (de chocolat, de thé ou de jus de fruits…) quevous le souhaitez. Et même grignoter, « comme chez soi » en admirantles toiles de l’artiste Silke Host qui ornent les murs : salades faites mai-son, tartinades variées, fruits frais, petits gâteaux, thés et bonbons, toutest compris. « On s’y retrouve reconnaissent les créateurs de l’Anticafé, mêmes’il faut encore beaucoup expliquer, les gens n’ayant pas l’habitudede payer au temps passé ». 130 m2 au rez-de-chaussée et 40 à l’étage, pour soixante-dix places autotal, avec une salle de réunion de six places équipée d’un écran etd’une autre de vingt places avec whiteboard et vidéoprojecteur ; leslieux, qui peuvent aussi être privatisés, ressemblent en cela à tous lesespaces de coworking. Avec un zeste de home, plus marqué ici, quele working, prédominant ailleursEnfin, si côté clientèle, l’Anticafé accueille presque à parts égales 30%de free lance et autant d’entrepreneurs, le reste est plutôt calqué surla clientèle habituelle d’un café. « Mais nous avons aussi un employédont les sessions de télétravail sont payées par son employeur etdes étudiants qui viennent réviser leurs partiels comme dans unebibliothèque… » assure le créateur, relevant tout le paradoxe de cesnouveaux modes de travail : « les gens se retrouvent seuls derrière leurécran. Ils sont donc en quête de lieux comme l’Anticafé pour recréer dulien. » Plus d’infos: www.anticafe.eu/lieux/strasbourg-67000

Des chiffres qui parlentA en croire Leonid Goncharov, fon-dateur du réseau des Anticafés quivient de lever 1,6 million d’eurospour développer son réseau etdont la franchise strasbourgeoise aouvert en 2017, il y aurait de laplace pour tout le monde. Les chiffres semblent bel et bienlui donner raison…Prenez le télétravail. Cela fait desannées que l’on en parle en se di-sant que le phénomène neconcerne qu’un tout petit nombred’employés hyper connectés dansun micro monde ultra branché.Pourtant, à bien y regarder, la si-tuation est toute autre : 29% dessalariés du privé seraient au-jourd’hui concernés par le télétra-vail selon une étude Ipsos réaliséepour Malakoff Médéric, début2019. Presque un travailleur sur

trois ! Selon le site collaboratifd’évaluation des entreprises glass-door, la possibilité d’avoir accès autélétravail serait même considéréepar les employés comme un desprincipaux critères d’appréciationde leur entreprise. A l’heure oùbeaucoup d’entre-elles peinent às’attacher les collaborateurs com-pétents, cette « carotte » pourraitbien être actionnée de plus enplus souvent. Pareil pour les indépendants. « Lefreelancing s’est fortement dé-veloppé en France. Avec unehausse de 126%, le nombre detravailleurs freelances a atteintplus de 830 000 individus en2017 » peut-on lire sur le site ducabinet de portage salarial stras-bourgeois Benett Portage. Etcomme le note encore ce cabinet :

« 75% des freelances se disentépanouis dans leur travail contre65% des salariés ». L’explosion nesemble donc pas prête de s’en-rayer.Quid du phénomène des startup ?Une forme d’auto emploi vers la-quelle s’engage un nombre tou-jours croissant de jeunes diplô-més, au point que les Echos.fr ci-taient en 2018 le chiffre de « 46%des 18-24 ans qui souhaiteraientcréer leur boîte. » Et s’il existebien des structures, de type pépi-nière d’entreprises et autre incu-bateur, pour accueillir ces jeunespousses et les aider à croître – ence sens, l’écosystème alsacien estparticulièrement bien pourvu –toutes n’ont pas atteint un stadede maturité suffisant pour intégrerces couveuses.

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