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UNIVERSITÉ D’ANTANANARIVO
ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE
Domaine SCIENCES DE L’ÉDUCATION
Mention ÉDUCATION, PLURALITÉ LINGUISTIQUE ET CULTURELLE
Parcours PLURICULTURALISME, PLURILINGUISME : PROBLÉMATIQUE ET
GESTION
MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES POUR L’OBTENTION DU DIPLÔME DE MASTER
Présenté par :
TSITOHAINA Andriamampandry Ando
Sous la co-direction de :
Madame RANDRIAMAROTSIMBA Vololona
Maître de conférences, HDR
Monsieur RAKOTOARISON Angelot Louis Richard
Maître de conférences
Politique linguistique éducative dans le système éducatif
malgache. Exemple d’établissements public, privé et
confessionnel catholique de Talata-Volonondry
20 septembre 2018
UNIVERSITÉ D’ANTANANARIVO
ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE
Domaine SCIENCES DE L’ÉDUCATION
Mention ÉDUCATION, PLURALITÉ LINGUISTIQUE ET CULTURELLE
Parcours PLURICULTURALISME, PLURILINGUISME : PROBLÉMATIQUE ET
GESTION
MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES POUR L’OBTENTION DU DIPLÔME DE MASTER
Présenté par :
TSITOHAINA Andriamampandry Ando
Sous la co-direction de :
Madame RANDRIAMAROTSIMBA Vololona
Maître de conférences, HDR
Monsieur RAKOTOARISON Angelot Louis Richard
Maître de conférences
Politique linguistique éducative dans le système éducatif
malgache. Exemple d’établissements public, privé et
confessionnel catholique de Talata-Volonondry
20 septembre 2018
Membres du jury
Président : Madame RANAIVO Velomihanta
Maître de conférences, HDR
ENS – Université d’Antananarivo
Juge: Monsieur RAKOTOARISON Angelot Louis Richard
Maître de conférences
ENS – Université d’Antananarivo
Directeur: Madame RANDRIAMAROTSIMBA Vololona
Maître de conférences, HDR
ENS – Université d’Antananarivo
Remerciements
Mes remerciements s’adressent à :
- Madame RANDRIAMAROTSIMBA Vololona qui, par son accompagnement, sa
disponibilité à tout moment, son expérience et sa rigueur scientifique et ses encouragements,
m’a permis de mener à bien et à temps le présent travail de recherche.
- Madame RANAIVO Velomihanta qui, malgré ses diverses responsabilités, nous a
grandement aidé dans la finalisation de ce travail, et pour l’honneur qu’elle nous fait de bien
vouloir présider la séance de soutenance.
- Monsieur RAKOTOARISON Angelot Louis Richard pour nous avoir accordé son
temps, sans réserve, pour ces précieux conseils et remarques et qui a accepté de se porter juge
pour ce travail afin de le perfectionner.
- Toute l’équipe scientifique du Master Recherche, mention EPLC, sans le partage de vos
connaissances et expériences, je ne serais jamais arrivé à ce stade.
- Toute ma famille pour leur compréhension, leur soutien et leur encouragement.
- La personne qui a toujours été présente à mes côtés, nul besoin de la nommer, elle se
reconnaitra.
- Cette personne qui dans la dernière ligne droite a été d’un grand secours, je lui souhaite
de réussir dans ce qu’elle entreprend et/ou entreprendra.
- Toutes les personnes qui, d’une manière ou d’une autre, ont permis la réalisation de ce
mémoire.
Liste des abréviations
CAPEN : Certificat d’Aptitude Pédagogique de l’École Normale
CECRL : Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues
CEG : Collège d’Enseignement Général
EPP : École Primaire Publique
PL : Politique Linguistique
PLE : Politique Linguistique Éducative
Sommaire
Introduction ....................................................................................................................... 1
Première partie : Cadre théorique et conceptuel de la Politique linguistique et de la
politique linguistique éducative ................................................................................................. 7
1. Politique linguistique et politique linguistique éducative ....................................... 8
2. État des lieux des recherches sur la politique linguistique et la politique linguistique
éducative dans le contexte malgache ....................................................................................... 17
3. Sociolinguistique, comme approche ...................................................................... 20
Deuxième partie : Clarification du cadrage méthodologique ......................................... 33
1. Méthodologie : Empirico-inductive qualitative .................................................... 34
2. Protocole d’enquête ............................................................................................... 43
Conclusion ...................................................................................................................... 56
Références bibliographiques et sitographiques .................................................................. I
Annexe ............................................................................................................................ VI
1
Introduction
« Toutes choses étant causées et causantes, aidées et aidantes, médiates et immédiates, et
toutes s’entretenant par un lien naturel et insensible qui lie les plus éloignées et les plus
différentes, je tiens impossible de connaitre les parties sans connaitre le tout, non plus que de
connaitre le tout sans connaitre particulièrement les parties » (Pascal cité par Morin, 2008, p.
16).
Réfléchir sur la pluralité linguistique dans le milieu éducatif malgache, c’est aussi
considérer les contextes international et national dans lesquels celle-ci évolue. Selon Lüdi et
Py :
« Le plurilinguisme est la règle, l’unilinguisme l’exception »
(Lüdi et Py, 2002, p. 1).
Boyer ajoute que :
« Le plurilinguisme est la situation la plus répandue sur
l’ensemble des États » (Boyer, 2010, p. 71).
La pluralité linguistique est donc un fait mondial et Madagascar ne fait pas exception.
La situation de pluralité linguistique à Madagascar est en partie liée à son contexte historique.
La présence de l’anglais dans la grande île remonte à l’arrivée de la London Missionary Society
au début du XIXème siècle et celle du français depuis la colonisation française en 1896 (Ranaivo,
2007, p. 1). En effet, en 2012, Randriamarotsimba mentionne ces deux langues à côté
du malgache dans son analyse de la situation de pluralité linguistique malgache sous le concept
de diglossie enchâssée à trois niveaux imbriquées les unes dans les autres (Randriamarotsimba,
2012, p. 39-50). La première, une diglossie endogène qui oppose la variété merina, promue
malgache officielle par le décret royal du 26 mars 1823 et dès lors perçue comme la langue de
domination, aux autres variétés régionales. Le deuxième niveau est une diglossie de contact
opposant le malgache au français, langue de l’ancienne puissance coloniale. Le troisième et
dernier niveau est une diglossie exogène qui confronte le malgache à la concurrence d’influence
entre le français et l’anglais. Selon Ranaivo, ces langues, le malgache et le français d’une part,
le français et l’anglais d’autre part, avaient entretenu un rapport conflictuel depuis la fin
du XIXème siècle jusqu’à l’indépendance (Ranaivo, 2013, p. 55). Actuellement,
Randriamarotsimba constate que le conflit linguistique tend à s’atténuer sans pour autant
aboutir à une relation stable et équilibrée, une relation entre les langues qu’elle définit sous
le concept de « tension linguistique » (Randriamarotsimba, 2014, p. 150). Mises à part ces trois
2
langues, le mandarin se répand dans le territoire malgache. L’expansion économique chinoise
s’accompagne d’une expansion linguistique comme en témoignent l’Institut Confucius à
Antananarivo et une trentaine de centres éparpillés dans tout le pays (Randriamarotsimba, 2014,
p. 148-150).
La pluralité linguistique malgache étant posée, qu’en est-il de sa gestion ? L’approche
scientifique de la gestion des langues en contact est représentée par les sociolinguistes en
général, et notamment Calvet, sous le syntagme « Politique Linguistique » (PL). Ce concept
renvoie à la détermination des grands choix en matière de rapports entre les langues et la société
(Calvet, 1996, p. 3). La Politique Linguistique Éducative (PLE) est l’ensemble des interventions
de la PL dans le milieu éducatif (Beacco et Byram, 2003, p. 15). Dans cet ordre d’idée, en amont
de chaque PLE existe donc une PL dont elle émane.
En ce qui concerne Madagascar, des travaux de recherche les ont décrites (Ranaivoson,
2014 ; Randriamarotsimba, 2005, 2012 et 2014). Le présent travail s’y réfère et va tenter de
les synthétiser pour une meilleure compréhension de la réflexion menée.
Durant la période de royauté, Madagascar a déjà élaboré une PL à travers le Décret royal
du 26 mars 1823 attribuant au merina (variété de la langue malgache) le statut de langue
officielle. Le pouvoir colonial, succédant à cette période, remplace le merina par le français,
donnant également à ce dernier la fonction de langue d’enseignement par la Circulaire du 5
octobre 1896 (Ranaivoson, 2014, p. 168). Cette domination du français perdure jusqu’au retour
à l’indépendance de Madagascar.
À partir de là, chaque PL du pays est définie dans la Constitution de l’État malgache,
généralement dans l’article 4 du Titre premier intitulé « Principes fondamentaux ». La PLE
correspondante est inscrite dans les Lois d’Orientation du système éducatif du pays.
La Constitution malgache de 1959 met fin à ce monolinguisme, elle stipule que le français et
le malgache sont les langues officielles.
Cette présence du français dans le paysage linguistique de Madagascar et ses plusieurs
années de domination font naitre au sein de la population une « doxa linguistique » : croyances
communes sur les langues en contact partagées par une frange des membres de la société
(Randriamarotsimba, 2012, p. 41). Ainsi, la Malgachisation de 1978 est la manifestation d’une
« doxa linguistique » pour la réhabilitation de la langue malgache. Elle concerne deux
tendances institutionnelles, celle du pouvoir Ramanantsoa et celle de Ratsiraka
(Randriamarotsimba, 2005, p. 201-202). La PLE correspondante est inscrite dans la Loi 78-040
3
du 17 juillet 1978. Elle désigne le « malgache commun » comme langue d’enseignement et
prévoit à cet effet une étape intermédiaire, celle d’un bilinguisme français-malgache où
le malgache serait à solliciter durant les cours dans sa version standardisée et dans ses variétés
régionales, selon l’article 10 du Journal officiel n° 1260 du 31 juillet 1978. Nombreux sont
les facteurs linguistiques et pédagogiques qui ont engendré l’échec de la malgachisation. Tout
d’abord, la langue malgache manquait cruellement de lexiques et était donc inapte à
l’expression des concepts philosophiques et scientifiques (Ranaivoson, 2014, p. 169). D’autant
plus que les autres variétés régionales du malgache étaient exclues de la langue d’enseignement.
Par conséquent, les enfants originaires de ces régions avaient des difficultés à appréhender
le savoir car la langue par laquelle ils ont appris à analyser leur monde était proscrite du système
éducatif. Quoiqu’il en soit, l’enseignement à travers les variétés du malgache, outre la variété
standard, serait invraisemblable vu que la plupart de ces dernières n’ont jamais été écrites.
Ensuite, l’enseignement en malgache s’avère également être problématique du fait de
l’inexistence de formation des enseignants en enseignement/apprentissage du malgache. Dès
lors que les enseignants sont incompétents à offrir un enseignement de qualité, et que la langue
d’enseignement n’assume pas sa fonction de médium du savoir : l’échec scolaire est
une conséquence obligée. La malgachisation est alors considérée par la mémoire collective de
« génocide intellectuel » (Ranaivoson, 2014, p. 171), un qualificatif parmi tant d’autres, tous
aussi péjoratifs.
L’échec cuisant de la malgachisation amène une autre « doxa linguistique » en faveur
du français (Randriamarotsimba, 2014, p. 137). Mais face au déboire de la malgachisation,
les successeurs de ces deux régimes, faisant suite à la crise de 1991, ont été plus prudents en
matière de lois linguistiques, de peur d’un fiasco à l’instar des précédents. Ils ont établi une PL
et une PLE plus ou moins floues. En revanche, la tendance fut la réhabilitation du français par
le biais de quelques projets tels que PRESEM I et II. Comme si la solution était le mutisme
des lois et laisser ainsi libre cours à toute une ineptie d’initiatives en matière de langue sans être
adossées à des études orientées dans cet axe.
En 1996, la législation en matière de langue est plus explicite et déclare pour le système
éducatif un bilinguisme précoce. Si la PL de cette époque reste assez floue quant au statut de
la langue française, la PLE parait par contre plus claire sur sa conception de cette langue,
considérée comme langue de prestige au détriment de la langue malgache méprisée dans
son propre contexte (Randriamarotsimba, 2014, p. 138). En effet, le bilinguisme évoqué ici
4
n’instaure pas une relation stable et consensuelle dans laquelle les deux langues évoluent de
manière équilibrée et équitable. Au contraire, cette PLE prévoit que dès la troisième année
du primaire (9ème), le français sera la seule langue d’enseignement pour toutes les matières sauf
pour celles qui véhiculeraient des valeurs exclusivement malgaches (éducation civique,
histoire-géographie de Madagascar, morale) et qui seront enseignées dans la langue malgache.
D’une certaine manière, les responsables proclament officiellement que la langue malgache est
inapte à remplir sa fonction de médium et de moyen pour appréhender le savoir. Cette résolution
peut se comprendre compte tenu des ravages de la malgachisation précédente. Néanmoins,
le retour au français paraitrait-il la solution la plus judicieuse face à ce désarroi linguistique ?
Les douzaines d’années de malgachisation ont laissé quelques séquelles en ce qui concerne
la compétence des Malgaches en français. Selon Rambelo, 10 à 15% des Malgaches seulement
sont des locuteurs francophones, avec une compétence diversifiée allant de celle de français
langue maternelle à celle réduite à une double compétence large (Rambelo, 1991, p. 130). Il
n’est guère étonnant que la génération issue de cette malgachisation, actuellement parmi
les enseignants dans des établissements, éprouve une grande difficulté à enseigner le français
et en français.
Sans avoir pu résoudre cette situation, le pouvoir qui succède au régime précédant intègre
l’anglais dans le paysage linguistique malgache d’une manière solennelle en 2007. Sur fond de
mondialisation et profitant d’une « doxa linguistique » favorable à l’anglais, supposée être
la lingua franca (Randriamarotsimba, 2014, p. 139), les dirigeants mettent en place
un trilinguisme institutionnel. La constitution du 27 avril 2007, dans le journal officiel n° 3014
du 03 mai 2007, établit une PL qui désigne l’anglais, à côté du malgache et du français, comme
langue officielle. La PLE correspondante annonce un bilinguisme tardif où le français
n’intervient qu’à partir de la 6ème année et l’enseignement de l’anglais est obligatoire en 6ème et
5ème, mais recommandé dès la 8ème. Cependant, un problème récurrent cause l’échec de
ce trilinguisme, l’insuffisance sinon l’absence de formation des enseignants en anglais et en
enseignement/apprentissage de l’anglais. Randriamarotsimba rapporte une étude loupe pendant
laquelle elle a assisté à une séance de cours d’anglais que la sociolinguiste a qualifiée de «
surréaliste ». L’auteur y dévoile au grand jour l’incompétence d’une enseignante de la classe
de 7ème non seulement en anglais, mais également ses lacunes en langue française
(Randriamarotsimba, 2014, p.139). L’insertion de l’anglais dans le contexte linguistique
malgache visait sans doute à perturber la dominance du français dans le paysage linguistique
5
de cette époque (Ranaivoson, 2014, p. 169). Cette brève incursion pris fin en 2010 avec la chute
du régime qui l’a mise en place.
À ce trilinguisme institutionnel, succèdent les PL et PLE actuelles. La PL en vigueur
stipule un bilinguisme institutionnel français-malgache et a délaissé l’anglais. La PLE qui
l’accompagne est celle de 1996 ; c'est-à-dire le malgache comme langue d’enseignement
jusqu’en 10ème et à partir de la 9ème le français, seule langue d’enseignement sauf pour
l’éducation civique, l’histoire et la géographie, et le malgache en tant que matière. La gestion
de la pluralité linguistique actuelle fait fi des problèmes concernant la PLE de 1996. Ce procédé
empêche les élèves malgaches de bénéficier d’une école véritablement bilingue
(Randriamarotsimba, 2014, p. 141). Mais plus encore, nous constatons une hérésie plus
flagrante de la part des dirigeants, celle de régresser d’une vingtaine d’années pour gérer
une pluralité linguistique contemporaine du XXIème siècle.
Pourtant, Bavoux et Bavoux pensent que le contexte malgache est propice à une efficace
gestion de sa pluralité linguistique. D’une part, parce que l’existence d’une langue nationale
unique permet une intercompréhension relative sur l’ensemble du territoire et d’autre part,
la présence de plusieurs autres langues en son sein offre aux Malgaches l’opportunité de
s’ouvrir au monde extérieur (Bavoux et Bavoux, 1993, p. 76). Or depuis ces propos de Bavoux
et Bavoux, Madagascar peine à tirer avantage de son contexte, et la situation est d’autant plus
critique dans le domaine éducatif où les élèves sont victimes des revirements des politiques
linguistiques successives (Randriamarotsimba, 2012, p. 39-50). Ce paradoxe dans le contexte
malgache est la raison de notre intérêt pour la thématique de recherche : la PLE, et plus
précisément la problématique des langues d’enseignement à Madagascar.
Nous avons déjà abordé cette thématique dans notre mémoire pour l’obtention
du Certificat d’Aptitude Pédagogique de l’École Normale (CAPEN) en décembre 2016.
Cette recherche nous a permis, à travers une approche écologique, d’identifier différentes PLE
au sein de l’EPP de Talata-Volonondry qui a été notre terrain. La gestion des langues dans
cet établissement public passe par les PLE des acteurs : directeur, enseignants et parents ; celles
des élèves sont fortement influencées par les PLE des enseignants. Ce mémoire de CAPEN
présente toutefois quelques limites. D’abord, il ne comporte pas de cadrage théorique sur
la description d’une situation sociolinguistique, pourtant nécessaire à une réflexion sur
les langues d’enseignement. Ensuite, le terrain s’est limité au niveau primaire du système
éducatif malgache. Nous n’avons donc pas pu, à travers une approche systémique, identifier
6
la cohérence ou non entre les langues d’enseignement dans les différents niveaux du système.
Enfin, elle n’a abordé que le système éducatif public, ne permettant pas une approche
comparative des langues d’enseignement entre les différents types d’établissement.
Pour le présent travail de recherche, nous pensons décrire et analyser la situation
sociolinguistique malgache en considérant le niveau macro-, méso-, et microsociolinguistique,
et l’articuler à notre travail sur les langues d’enseignement. Nous pensons également intégrer
une approche systémique des différents niveaux et une approche comparative entre différents
types d’établissement dans notre opération de la connaissance pour optimiser qualitativement
notre réflexion. Ainsi, notre sujet est « Politique linguistique éducative dans le système éducatif
malgache. Exemple d’établissements public, privé et confessionnel catholique de
Talata-Volonondry ».
Notre recherche vise à comprendre la PLE malgache sur les langues d’enseignement, à
travers l’étude loupe des établissements public, privé et confessionnel catholique de
Talata-Volonondry, en identifiant et en mettant en synergie :
- La PLE définie par l’État malgache.
- Les PLE présentes dans ces différents établissements public, privé, et
confessionnel catholique de Talata-Volonondry, ainsi que leur mise en
œuvre dans les salles de classe par les enseignants.
- Les instruments de la planification linguistique dans ce lieu et milieu.
- Les rapports aux langues des locuteurs, la situation sociolinguistique et
leur relation.
Ainsi, nous nous demandons de quelle(s) manière(s) est mise en œuvre la politique
linguistique éducative institutionnelle dans des établissements situés à Talata-Volonondry,
notamment celui public (EPP, CEG, Lycée), celui privé (Lycée privé Tanjona), et celui
confessionnel catholique (Collège Victoire Rasoamanarivo), aux niveaux primaire et
secondaire ?
En rapport à cette problématique, le présent mémoire étant un projet de thèse comporte
deux parties. La première partie présentera le cadre théorique et conceptuel à adopter.
La deuxième partie constituera en une clarification du cadrage méthodologique pour cette
élaboration de connaissances.
7
Première partie : Cadre théorique et conceptuel de la
Politique linguistique et de la politique linguistique
éducative
8
« Le chercheur ne peut s’attacher à un problème sans le situer d’abord dans son contexte,
sans faire une mise au point claire de l’état actuel de la question » (De Landsheere, 1972, p.
20).
La première partie de notre travail présente dans un premier temps les théories et concepts
déjà élaborés sur les notions de PL et PLE. Ensuite, nous rendrons compte des travaux ayant
abordé ces thématiques dans le contexte malgache afin de pouvoir faire un état des lieux de
la recherche en question. Enfin, à partir de la discussion scientifique, nous construirons
notre cadre théorique et conceptuel pour appréhender notre objet de réflexion.
1. Politique linguistique et politique linguistique éducative
La notion de PL consiste en une approche scientifique de la gestion de la pluralité
linguistique d’un contexte. Des sociolinguistes ont élaboré diverses théories sur la PL et la PLE.
Nous allons les présenter successivement et les discuter afin de construire le cadre théorique
destiné à mieux décrire et à mieux comprendre la PLE malgache. La PLE résulte de l’évolution
de la notion de PL (Beacco et Byram cités par Randriamarotsimba, 2014, p. 134). En ce sens,
en amont de chaque PLE existe une PL dont elle émane. Nous devons donc commencer par
la notion de PL.
1.1. De la Planification linguistique à la Politique linguistique, origine des concepts
Le syntagme « language planning » apparait avec Haugen en 1959, traduit en
français sous les termes de planification linguistique. Le concept est né des problèmes
linguistiques de la Norvège. Elle consiste en une intervention standardisatrice (règles
d’orthographe, etc.) sur la langue norvégienne dominée par la langue danoise pendant
des siècles (Calvet, 1996, p. 6).
L’intervention porte ainsi sur la structure de la langue. Mais elle vise au final
la construction d’une identité nationale norvégienne, un objectif non explicité situant
la planification linguistique dans un champ idéologique. Le caractère national et étatique
du concept est également à souligner.
Apparemment, l’approche de Haugen ne tient pas compte de la situation sociolinguistique
de la Norvège, notamment le plurilinguisme ambiant, les rapports respectifs entre les langues
présentes dans le territoire, entre les langues et la société, rapports entre les langues et
leurs locuteurs. Il est, en effet, difficile à cette époque de procéder ainsi car la connaissance de
9
la langue dans son contexte social reflétait encore la relative jeunesse de la sociolinguistique,
née dans les années 60.
La notion de PL vient avec Fishman en 1970. Il fait la distinction entre PL et planification
linguistique et établit une relation entre les deux, la planification linguistique étant subordonnée
à la PL. Il nous semble que la conception de Calvet clarifie davantage le concept.
1.2. Les politiques linguistiques selon Calvet (1996)
1.2.1. Politique et planification linguistique
Calvet fait également la distinction entre le couple conceptuel PL et planification
linguistique. Le premier désigne la détermination des grands choix en matière de rapports entre
les langues et la société, et le second correspond à la mise en œuvre de ces choix (Calvet, 1996,
p. 3).
Dans ces définitions, nous comprenons qu’entre PL et planification linguistique existe
une relation de complémentarité, le choix politique devant orienter la planification
des interventions, phase de mise en œuvre.
Calvet réitère le caractère national et étatique de la PL. Il souligne, en effet, que n’importe
quel groupe peut élaborer une politique linguistique : une diaspora, un groupe minoritaire à
l’intérieur d’un État. Mais seul l’État a le pouvoir et les moyens de passer au stade de
la planification, de mettre en pratique ses choix politiques (Calvet, 1996, p. 44-63).
1.2.2. Introduction des notions de status et corpus de Kloss (1969) dans la politique
linguistique
Calvet se réfère à Kloss (Kloss, 1969) pour catégoriser les PL suivant les interventions
de leur planification linguistique. Selon lui, ces interventions peuvent porter sur le status ou sur
le corpus d’une langue (Calvet, 1996, p. 17). Il distingue alors planification du corpus et
planification du status. Toutes les deux sont une intervention sur la langue, la première porte
sur la forme (création d’une écriture, néologie, standardisation) et la deuxième sur les fonctions
de la langue, son statut social, et ses rapports avec les autres langues.
10
1.2.3. Politique linguistique : l’in vitro et l’in vivo
Il s’agit d’un autre type de taxinomie élaborée par Calvet (1996, p. 49-54). La PL in vitro
procède de l’intervention de l’État sur les pratiques linguistiques des locuteurs. Elle part de
la description et de l’analyse des linguistes sur les situations linguistiques. Ces derniers émettent
alors des hypothèses sur l’avenir des situations et font des propositions. Le pouvoir les étudie
et prend des décisions en conséquence. En revanche, la PL in vivo procède des pratiques
sociales. Elle est le produit des pratiques linguistiques des locuteurs pour résoudre
les problèmes de communication quotidienne, sans décision officielle, ni décret, ni loi.
Le tableau suivant est une mise en parallèle de ces deux modes de gestion.
Tableau n°1. Gestion in vitro et in vivo
- In vitro - In vivo
* Le fait de l’État
* Procède de l’intervention sur les
pratiques linguistiques
* Produit de l’intervention de l’État
-
* Part de la description et l’analyse des
linguistes sur les situations
linguistiques
Hypothèses sur l’avenir
Prise de décision de l’État (formulation
des choix)
Application de ces choix
* Le fait des locuteurs
* Procède des pratiques sociales
-
* Produit de la pratique (sans décision
officielle, ni décret, ni loi)
-
* Part de la volonté du locuteur pour
résoudre les problèmes de
communication quotidienne
11
Selon Calvet, ces deux modes de gestion du plurilinguisme (l’in vitro et l’in vivo) peuvent
être conflictuels. En ce sens, il est difficile d’imposer à un peuple une langue nationale dont il
ne veut pas et qu’il est également difficile de promouvoir une langue à la fonction de langue
officielle alors que celle-ci est minoritaire. La PL est alors confrontée au problème de cohérence
entre les objectifs que se donne le pouvoir et les solutions intuitives des locuteurs, intuitives
certes, mais néanmoins renferment une volonté et un choix délibéré. La gestion in vivo met en
exergue le poids du locuteur, seul véritable utilisateur de la langue.
1.2.4. Instruments de la planification linguistique
Les instruments de la planification représentent selon Calvet le processus permettant de
passer d’une PL, stade des choix généraux, aux stades de sa mise en œuvre, la planification
linguistique. Il comprend respectivement l’équipement linguistique d’une langue (comme
sa codification, sa lexicalisation ou sa standardisation), l’environnement linguistique
des langues (comme l’absence ou présence des langues orales/écrites dans la vie quotidienne),
et les lois linguistiques destinées à nommer les langues, leurs fonctions, le droit à la langue
des locuteurs (Calvet, 1996, p. 44-63).
Ces instruments nous permettent donc de savoir et de comprendre les modalités de la mise
en œuvre d’une PL. Ils peuvent alors être considérés comme des sources d’informations
destinés à recueillir des données sur celle-ci.
1.3. Les politiques linguistiques selon Chaudenson, un trinôme conceptuel
Chaudenson (cité par Randriamarotsimba, 2014, p. 133) ajoute un troisième concept, et
distingue politique linguistique, planification linguistique et aménagement linguistique. Pour
lui, la politique linguistique renvoie à la prise des décisions majeures en matière de langues
au niveau national ou supranational et la planification linguistique est la définition précise et
les délais de réalisation des objectifs définis par la politique en fonction des réalités et moyens
économiques et humains à disposition. Le troisième concept, c'est-à-dire l’aménagement
linguistique, correspond à la mise en œuvre concrète, nécessairement différenciée et adaptée,
des actions définies par la planification linguistique.
Chaudenson rend compte du caractère national et supranational de la PL. La mise en
parallèle de l’approche de Calvet et de Chaudenson met en exergue différents niveaux
d’appréhension de la PL : supranational et national et groupe ou diaspora.
12
L’introduction du troisième concept par Chaudenson, l’aménagement linguistique,
apparait comme un point fort de son approche. Il préconise une mise œuvre des actions
différenciée et adaptée aux spécificités de chaque contexte.
1.4. L’aménagement linguistique selon Robillard (1997)
1.4.1. Aménagement linguistique : Politique linguistique, planification
linguistique
Bien que Chaudenson et Robillard utilisent le même syntagme, aménagement
linguistique, leur conceptualisation se situe, en revanche, à des niveaux très différents. Pour
Robillard, en effet, l’aménagement linguistique renvoie à un ensemble d’efforts délibérés visant
à la modification des langues en ce qui concerne leur statut ou leur corpus. Cet ensemble
d’efforts comprend une réflexion théorique, des enquêtes préalables à toutes interventions
concrètes sur le terrain et des travaux d’évaluation au cours d’intervention ou après (Robillard,
1997, p. 36).
La PL représente la phase d’une opération d’aménagement linguistique la plus abstraite,
consistant à la formulation d’objectif, postérieurement à l’évaluation d’une situation faisant
apparaître des aspects perfectibles, soit dans le corpus d’une langue (inadéquation de structures
par rapport à des besoins), soit dans le statut des langues (Robillard, 1997, p. 229).
Et enfin, la planification linguistique représente une partie de l’ensemble du processus
d’aménagement linguistique suivant logiquement la phase de l’élaboration d’une PL. Il s’agit
de la traduction de cette dernière en une stratégie d’ensemble composée d’actions viables,
programmées dans le temps, dont les agents identifiés, les moyens prévus (financier, humain,
scientifiques, etc.), etc. (Robillard, 1997, p. 228).
1.4.2. Quatre propositions, bases de la démarche scientifique de l’aménagement
linguistique
Premièrement, les langues et les situations linguistiques ne satisfont pas toujours
leurs locuteurs. Deuxièmement, cette insatisfaction peut se démontrer. Troisièmement,
les problèmes qui le [ici : aménagement linguistique] suscitent peuvent faire l’objet
d’une hiérarchisation fondée sur des critères clairement établis. Et quatrièmement, les langues
13
et les situations linguistiques peuvent être modifiées par les interventions délibérées de la part
de l’homme (généralement à long terme) (Robillard, 1997, p. 38).
1.4.3. Quatre niveaux dans la démarche scientifique de l’aménagement
linguistique
D’abord, il faut procéder à une évaluation de la situation (identification des problèmes
au début, estimation du degré d’efficacité des mesures mises en œuvre à divers stades, jusqu'à
l’évaluation finale). Ensuite, établir une politique (appui d’une instance de pouvoir social) par
la formulation d’objectifs, de stratégies pour atteindre ceci. Après, il convient d’établir
la programmation dans le temps, la prévision et la gestion des ressources ; c’est la planification.
Et enfin, la dernière étape se traduit par le stade des opérations concrètes faisant partie de
l’intervention sur la langue ou sur la situation linguistique (Robillard, 1997, p. 39).
14
Nous nous rangeons, dans le cadre de ce mémoire, à l’avis de Robillard sur la nécessité
d’une collaboration avec d’autres disciplines, comme le montre le schéma, et d’une approche
scientifique d’une situation sociolinguistique, consistant à la décrire, l’étudier, et l’évaluer.
Préalable à toute prise de décision et à une mise œuvre des actions différenciée et adaptée
aux spécificités de chaque contexte, comme le préconise Chaudenson. Néanmoins, ne prendre
des décisions et n’entreprendre des actions que si un ou des problèmes sont constatés et
seulement dans la certitude du caractère perfectible de la situation-problème, se rapportent peut-
Schéma n°1 :
Politique linguistique
Modèle
s
Études de cas
(Synchronie/diachronie)
Planification linguistique
Actions linguistiques
Évaluation
Aménagement linguistique
Pratique Théorie
Contact avec d’autres
disciplines
Aménagement linguistique, Robillard, 1997, p. 39
15
être, selon nous, à une vision réductrice de la science, car étant « une réflexion encore toute
pragmatique » (Romains, 1960, p. 108).
L’approche de Robillard fait la distinction entre objectif global et objectif (tout court)
d’une PL (Robillard, 1997, p. 230). Il donne comme exemple d’objectif global : l’unification
nationale, rapprochement diplomatique, orientation de l’économie vers un nouveau secteur, etc.
; et comme objectif : promotion d’une langue à la fonction de langue officielle, de langue
nationale, etc. Cette distinction des niveaux d’objectif fait en partie la force de sa théorie.
L’objectif global est une idéologie en dehors de toute préoccupation linguistique. Or,
cette idéologie a une influence sur la gestion des langues dans un État et induit à la définition
de la PL de cet État.
1.5. Cichon, Ehrhart et Stegu : Politique linguistique explicite et implicite
Cichon, Ehrhart et Stegu introduisent la notion de PL explicite et implicite (Cichon,
Ehrhart et Stegu, 2012, p. 34-35). La première correspond à la politique linguistique à
proprement parler ; elle est de nature normative, conçue par « des spécialistes ». La deuxième
est le résultat des pratiques communicatives des locuteurs « non-spécialistes », empreintes
des influences de représentations, d’expériences pratiques du mono- ou du plurilinguisme et
parfois de connaissances théoriques.
La PL explicite de ces auteurs parait plus ou moins semblable à la gestion in vitro de
Calvet. Elle est le résultat des interventions linguistiques se basant sur des études et est formulée
explicitement. En revanche, l’implicite, pareil à la gestion in vivo, renvoie aux pratiques
linguistiques des locuteurs qui induisent un autre niveau dans la conception d’une PL, celui de
l’individu.
1.6. Politique Linguistique Éducative
Pour définir la PLE, Beacco et Byram donnent d’abord leur propre conception d’une PL.
PL « se définit comme une action volontaire, officielle ou militante, destinée à intervenir sur
les langues, quelles qu’elles soient, (nationales, régionales, minoritaires, étrangères) dans
leurs formes (les systèmes d’écriture, par exemple), dans leurs fonctions sociales (choix d’une
langue comme langue officielle) ou dans leur place dans l’enseignement » (Beacco et Byram,
2003, p. 15). La PLE est l’ensemble des interventions de la PL dans le domaine
16
des enseignements de langues dans les différents niveaux du système scolaire, de l’école
élémentaire aux enseignements supérieurs et professionnels (Beacco et Byram, 2003, p. 15).
Il importe de faire remarquer que dans la définition des concepts de PL et PLE, Beacco
et Byram mettent l’accent sur l’action et les interventions, semblant exclure leur caractère
politique. Cependant, ils continuent en affirmant que les PL et PLE n’ont de sens que si elles
sont guidées par des « idéologies linguistiques » (Beacco et Byram, 2003, p. 15). Ils distinguent
alors, sans la nommer, une phase de définition ou détermination de ces idéologies devant guider
les interventions dans le domaine des enseignements de langues dans le milieu éducatif.
Qu’entendre par enseignements de langues dans le système éducatif, autrement dit à
l’école ? Rakotofiringa développe à la fois la question de l’école et la mission de celle-ci en
matière de langues. À partir de l’étymologie grecque è scholè, Rakotofiringa a dégagé trois
aspects fondamentaux de l’école : temps, occupation studieuse, et endroit (Rakotofiringa, 2015,
p. 70). L’école est du temps, en dehors des occupations habituelles, que l’élève utilise pour
l’étude, dans un endroit destiné à cela. Par rapport à l’occupation studieuse, « l’école est ainsi
une institution ayant pour fin expresse de dispenser un enseignement » (Rakotofiringa, 2015,
p. 70), dont l’enseignement des langues. Selon Rakotofiringa, en matière de langues, l’école
doit enseigner des langues ; elle doit enseigner par le moyen d’une ou plusieurs langues ; et elle
doit faire adopter une culture par rapport aux langues et faire intégrer une ou des valeurs dans
l’échelle de valeurs personnelles de l’élève (Rakotofiringa, 2015, p. 71). Ainsi, l’enseignement
de langues à l’école comprend une double dimension, cognitive et socio-affective.
Nous retiendrons donc que, la PLE touche :
- les langues enseignées,
- la ou les langues d’enseignement, et
- une culture et des valeurs par rapport aux langues, à l’école.
Langues enseignées et langues d’enseignement se rapportent à la dimension cognitive et
culture et valeurs concernent la dimension socio-affective.
Mais l’école représente aussi du temps pris à l’élève. La PLE concerne aussi la question
des langues à tel ou tel âge, donc à tel ou tel niveau, et dans telle ou telle durée. Et enfin, l’école
est un endroit, une institution. La PLE relève également des usages de langues dans le cadre
scolaire.
17
2. État des lieux des recherches sur la politique linguistique et la politique
linguistique éducative dans le contexte malgache
Notre intention n’est nullement de restituer tous les travaux de recherche sur la PLE à
Madagascar. Elle est de nous donner un aperçu de l’état des lieux afin de justifier la pertinence
de notre objet de recherche, et de construire un cadre théorique pour l’intelligence de celui-ci.
2.1. Sur les politiques linguistiques malgaches
Bavoux et Randriamarotsimba soulignent les caractères communs des PL et PLE
explicites malgaches qui s’assimilent à autant de handicaps empêchant la résolution
du problème de la pluralité linguistique ambiante (Bavoux, 1996, p. 49-50 et
Randriamarotsimba, 2012, p.41). L’un de ces points communs est le caractère foncièrement
interventionniste de celles-ci. Ces interventions sont basées sur la préférence linguistique
des dirigeants et sur la doxa linguistique de la population après chaque crise politico-
économique, c'est-à-dire une croyance commune de la population sur les langues en présence.
Bavoux constate également le manque de moyens financiers, humains et matériels du pays.
L’État se trouve alors incapable de subvenir à ses propres besoins vu les actions considérables
à entreprendre compte tenu de l’immense superficie de l’île et de ses 22,29 millions d’habitants
(Randriamarotsimba, 2014, p. 144-145). La planification linguistique se limite ainsi au domaine
public et réduit à l’état de cobayes les enfants de la classe moyenne et défavorisée fréquentant
les écoles de l’État, subissant les aléas des humeurs linguistiques des dirigeants. S’ajoute à cela
la distorsion entre les phases de la gestion de la pluralité linguistique. Si la politique linguistique
vise à résoudre la diglossie présente dans le pays, les actions de la planification linguistique ne
vont pas dans ce sens. Cette dernière fait intervenir les langues en présence d’une manière
hiérarchisée, valorisant alternativement les unes et les autres, et par voie de conséquence,
contribue à l’affaiblissement respectif de ces langues. Le dernier point commun que met en
exergue Randriamarotsimba est la vision de l’État-Nation. Cette conception selon laquelle
une langue pour une nation est contraire à la dynamique de la pluralité linguistique malgache
qui évolue jusque dans la pratique langagière des locuteurs. Cette vision ne permettant pas ainsi
aux différentes langues d’évoluer conjointement.
Jusqu’à présent donc, la gestion de la pluralité linguistique malgache se trouve
handicapée. Quant à Rabenoro et Rajaonarivo, elles constatent l’inexistence de PL explicite
18
pour Madagascar due à une conscience insuffisante des enjeux dans la détermination de
l’emplois des langues dans le processus de développement national et la crainte d’une réaction
d’ordre ethnique (Rabenoro et Rajaonarivo, 1997, p. 105). Les auteurs se proposent alors de
déterminer les paramètres à considérer dans la définition d’une PL. Selon eux, il faut prendre
en compte : le contexte, les enjeux de la question linguistique et la faisabilité dans la mise en
œuvre, c'est-à-dire la planification linguistique. Ainsi, il faut, pour Madagascar, une PL dans
le contexte actuel de la mondialisation, respectant les identités linguistiques et culturelles,
rapprochant les diverses composantes de la population, et les aidant à s'ouvrir sur le monde
extérieur (Rabenoro et Rajaonarivo, 1997, p. 105-119).
Le côté politique est clairement abordé dans le discours de ces auteurs, distinguant
parfaitement phase de détermination et phase de mise en œuvre. Ils soulignent également
l’obligation de prendre en compte le contexte et les divers moyens à disposition pour la viabilité
des actions.
2.2. Sur les politiques linguistiques éducatives malgaches
En ce qui concerne la gestion des langues dans le milieu éducatif, Rabenoro a écrit
un article par rapport à la réflexion sur les langues du Sud, et plus particulièrement la langue
malgache, en tant que langue d’enseignement/apprentissage des savoirs du Nord. L’auteur met
en exergue cette disparité en articulant l’espace, la langue et l’éducation (Rabenoro, 2005, p.
17-28). L’état des lieux fait par l’auteur énonce que le malgache ne peut remplir sa fonction de
médium du savoir. L’inexistence de plusieurs notions dans la culture malgache rend
cette langue inapte à analyser l’expérience humaine, objet de toutes sciences. Rabenoro conclut
dans son article que la langue malgache peut être utilisée comme langue d’enseignement
jusqu’à un niveau où son utilisation soit prouvée plus efficace que les langues de
communication internationale, entre autres le français et l’anglais. Ainsi, des travaux
d’évaluation doivent être faits, sauf pour les disciplines scientifiques et techniques sinon
le malgache se heurterait à l’inexistence de marqueur de nombre. Rabenoro suggère alors
la promotion d’une éducation multilingue comme solution, reste la question des moyens de
sa mise en œuvre.
Quant à Ranaivo, elle ne se concentre pas uniquement sur la langue malgache dans
le domaine de l’enseignement des langues. Elle parle en termes de politique linguistique dans
le système éducatif malgache :
19
« Passant brutalement et sans évaluation formelle d’un extrême
à l’autre, élèves, enseignants, programmes et évaluations
basculent de la malgachisation dans les années quatre-vingts à
la gallicisation dans les années quatre-vingt-dix. Le fait de
se doter de trois langues officielles depuis cette année, lors
du référendum d’avril 2007, ne résout pas automatiquement
les problèmes. Il y va d’abord des représentations
des locuteurs. » (Ranaivo, 2007, p. 6).
Toujours selon le même auteur, le sujet des langues et des compétences de
leurs utilisateurs est un débat récurent. Pour éviter que la réflexion ne tourne en rond, Ranaivo
préconise « une démarche systémique, systématique et intégrée » (Ranaivo, 2007, p. 6).
Randriamarotsimba constate également dans son article ce changement fréquent de PL à
Madagascar (Randriamarotsimba, 2012, p. 39-50). Selon elle, ce mode de gestion de la pluralité
linguistique tend à pérenniser la diglossie enchâssée (variétés du malgache / malgache officiel/
français/ anglais) du contexte au lieu de la résoudre. Randriamarotsimba de préciser que
la situation est d’autant plus critique dans le domaine éducatif où les élèves sont victimes
des revirements des PL et PLE successives, peu regardant des besoins en langues et des rapports
aux langues des Malgaches. Ces derniers en arrivent dans leur majorité à minoriser leur propre
langue au profit des langues monolingues autres que le malgache et celles bi- ou plurilingues
qu’ils peinent pourtant à maîtriser. La sociolinguiste recommande, pour toute décision en
matière de langue, une étroite collaboration entre les autorités, les chercheurs, dont le linguiste,
et la société civile dont les enseignants et les parents d’élèves.
Selon Rabenoro et Rajaonarivo, Madagascar n’a pas de finalité, autrement dit le pays n’a
pas d’idéologie qui guide le ou les objectifs des PL et PLE. Ou, cette finalité existe-elle, mais
est implicite, non formellement énoncée et mise en rapport avec les lois linguistiques. Dans
tous les cas, tous les autres travaux de recherches, abordant la PL et PLE malgache font
le constat d’une mauvaise gestion de la pluralité linguistique que ce soit au niveau national ou
dans milieu éducatif. Cette mauvaise gestion est une conséquence obligée car ses interventions
et actions n’ont ni fondement ni sens clair. De plus, les PL et PLE malgaches,
toutes interventionnistes, ne tiennent pas compte du contexte, autrement dit, de la situation
sociolinguistique malgache (relation entre les langues, la société et les locuteurs). Une approche
20
sociolinguistique est donc primordiale pour notre réflexion sur la gestion des langues en contact
dans milieu éducatif. En effet, une action sur une des langues entraine des effets sur les autres,
d’où des rapports de force entre les langues (Calvet, 1996, p. 17).
3. Sociolinguistique, comme approche
Le choix de la sociolinguistique comme approche dans ce travail de recherche n’est pas
fortuit. Il s’agit plutôt d’un choix conscient et raisonné. En effet, cette approche, contrairement
à la linguistique structurale élaborée par Saussure, associe la langue et la société et considère
effectivement la langue non pas comme un système mais surtout comme un fait social.
La position de Labov est très claire sur la question. Il énonce que :
« Pendant des années, je me suis refusé de parler de
sociolinguistique, car ce terme implique qu’il pourrait exister
une théorie ou une pratique linguistique fructueuse qui ne serait
pas sociale » (Labov, 1976, p. 37).
Selon Labov donc, la langue ne peut être que sociale ; et l’existence même d’une théorie
ou concept linguistique ne prenant pas en compte ce caractère relève de l’absurde. Dans cette
optique, la distinction entre linguistique et sociolinguistique n’a pas de raison d’être. Ainsi,
la sociolinguistique, ou tout simplement la linguistique, a comme objet d’étude la structure et
l’évolution du langage au sein du contexte social formé par la communauté linguistique (Labov,
1976, p. 258).
La pluralité linguistique dans le contexte malgache a déjà été posée. Il nous parait alors
utile d’apporter des précisions quant aux concepts permettant de décrire et d’analyser une
situation sociolinguistique. D’un côté, parce qu’ils seront évoqués tout au long du travail de
recherche, d’un autre côté, et surtout, parce qu’ils constitueront des outils d’analyse nécessaires
à la compréhension de notre thématique de recherche. Nous expliciterons en conséquence les
choix que nous allons retenir dans le cadre de ce mémoire.
3.1. Plurilinguisme et Multilinguisme
Selon Chaudenson, le terme de plurilinguisme désigne l’existence de plusieurs langues à
l’intérieur d’un même État et multilinguisme renvoie à la pluralité linguistique dans divers États
(Chaudenson, 1991, p. 201). La définition de cet auteur met en évidence deux dénominateurs
communs à ces deux concepts : la pluralité linguistique et l’État. La différence est que le premier
21
concept correspond aux frontières d’un État, le deuxième transcende ces frontières et
correspond à un espace géographique plus vaste.
En didactique par contre, la signification de ces deux concepts est différente. Le CECRL,
par rapport au domaine de l’apprentissage des langues, définit le multilinguisme comme
la connaissance d’un certain nombre de langues ou la coexistence de langues différentes dans
une société donnée (CECRL, 2001, p.11). Quant au plurilinguisme, sa définition est très claire
dans un guide du CECRL élaboré par Beacco et Byram. Il présente deux caractéristiques :
premièrement, le plurilinguisme désigne la capacité intrinsèque de tout locuteur à employer et
à apprendre, plus d’une langue ; deuxièmement, il est une valeur relative à la prise de conscience
par un locuteur du caractère plurilingue de ses compétences, mais cette prise de conscience doit
être accompagnée et structurée par l’école, car elle n’est aucunement automatique (Beacco et
Byram, 2003, p. 15-16).
Nous comprenons donc que ces concepts désignent tous deux une pluralité linguistique,
la différence dépend du niveau considéré : supranational, national ou individuel. Ainsi, ces deux
approches ne prennent pas en compte le ou les niveaux intermédiaires entre l’individu et
la nation. Or, notre recherche porte sur la gestion de de la pluralité linguistique dans le milieu
éducatif malgache, au niveau au-delà de l’individu et en deçà de la nation. Par conséquent, dans
notre approche d’une situation de pluralité linguistique, nous adoptons celle de Lüdi et Py car
en plus de considérer les niveaux qui viennent d’être cités, elle intègre un autre paramètre, celui
de l’institution. Les deux auteurs distinguent les plurilinguismes individuel, territorial et
institutionnel. Le premier correspond à la maitrise de deux ou plusieurs langues par un seul et
même individu (ou une famille entière, un groupe). Le deuxième renvoie à deux ou plusieurs
langues parlées dans un territoire, il est caractérisé par une unité politico-géographique.
Le troisième, et dernier, désigne la pluralité linguistique au niveau de l’administration d’une
ville, d’un département d’un pays, d’une organisation internationale, etc. (Lüdi et Py, 2002, p.
1 et 5).
Parce que notre préoccupation porte sur les langues d’enseignement dans le système
éducatif plurilingue malgache, cette taxonomie permet d’appréhender la pluralité linguistique
au niveau des locuteurs dans ce milieu, au niveau des établissements qui sont des institutions et
au niveau de la zone rurale de Talata-Volonondry, ainsi qu’au niveau du territoire malgache.
De ce fait, nous ne parlerons pas de multilinguisme, mais choisissons d’utiliser le concept de
22
plurilinguisme auquel nous adjoignons les adjectifs individuel, territorial ou institutionnel pour
faire la distinction entre les différents niveaux de pluralité linguistique.
À cette approche du plurilinguisme, nous ajouterons concomitamment le trinôme de
niveaux sociolinguistiques à savoir le macrosociolinguistique, le mésosociolinguistique et
le microsociolinguistique (Py, 2013, p. 71-72). Nous dirons donc que dans le cadre de ce travail,
le macro désigne le niveau national et/ou supranational, le niveau méso englobe l’école, et
le niveau micro concerne la famille et l’individu.
3.2. Diglossie et bilinguisme : conflit, consensus et tension linguistique
Une situation de pluralité linguistique met en contact deux ou plusieurs langues.
Ces dernières entretiennent entre elles des relations de différentes natures. Boyer, dans
son ouvrage de 1997, intitulé : Plurilinguisme : "contact" ou "conflit" de langues, catégorise
ces relations suivant deux modèles : diglossie et bilinguisme. Le modèle diglossique est
caractérisé par le conflit linguistique. Il se traduit par une concurrence déloyale entre les langues
en présence et une distribution inégalitaire des rapports de forces. Se dégage alors un rapport
de dominance et de subordination entre ces langues. Ce modèle se situe au niveau
macrosociolinguistique. Le modèle bilinguiste, quant à lui, se caractérise par un consensus
linguistique. Les relations entre les langues sont collaboratives et pacifiques. Il se rapporte
au niveau microsociolinguistique.
Par ailleurs, Randriamarotsimba décrit autrement la relation entre les langues présentes à
Madagascar. Elle établit le concept de tension linguistique. Il renvoie à un rapport entre
les langues qui sans être conflictuel n’est pas stable ni équilibré (Randriamarotsimba, 2014, p.
150). En ce sens, le conflit linguistique opposant le malgache officiel à ses variétés régionales,
le malgache au français, et le français à l’anglais, tend à s’atténuer.
Dans cette perspective, la description d’une situation sociolinguistique dépend
des relations entre les langues en contact. Ferguson, par exemple, utilise le concept de diglossie
pour désigner une relation stable, donc non conflictuelle, entre des variétés d’une même langue
et perçoit en celui-ci une distribution fonctionnelle complémentaire : variété haute pour
la littérature écrite, l’enseignement et variété basse pour la communication quotidienne
(Ferguson, 1959, p. 245). Or, cette distribution en variété haute et variété basse constitue
un conflit linguistique pour les sociolinguistes « natifs » tels que Lafont (1971) du côté
des Occitans, Prudent (1981) du côté des créolophones, etc.
23
Pour notre part, nous estimons que les langues ne sont en elles-mêmes ni en conflit ni
« en paix », mais c’est dans leurs usages que s’établissent les rapports entre elles.
Notre approche conçoit donc d’un côté, la détermination des statuts et fonctions des langues
au niveau des institutions (État et établissement scolaire), et d’un autre côté, les usages que
les locuteurs font des langues.
3.3. Status et Corpus
Chaudenson développe deux concepts, status et corpus, pour analyser les relations entre
les langues, et plus précisément celle du français avec les autres langues présentes dans l’espace
francophone (Chaudenson, 1991). Premièrement, il désigne par status le sens classique
regroupant les éléments de statut, les fonctions et les représentations d’une langue
(Chaudenson, 1991, p. 22). Deuxièmement, quant à la notion de corpus, elle concerne
les pratiques linguistiques elles-mêmes, depuis les modes d’appropriation ou les compétences
jusqu’aux productions langagières ; considérant le volume de production linguistique réalisé
dans une langue mise en rapport à d’autres langues en usage (Chaudenson, 1991, p. 23).
Nous intégrons l’analyse de Chaudenson dans ce cadrage conceptuel pour deux raisons :
d’une part, elle permet d’étudier les relations entre les langues dans les pays francophones, dont
Madagascar, et d’autre part, elle prend en compte la spécificité des situations nationales et
régionales.
En effet, Madagascar compte parmi les pays de la Francophonie. Il a accueilli à
Antananarivo le XVIème Sommet de la Francophonie les 26 et 27 novembre 20161, un élément
non négligeable vu que notre cadre d’étude se situe dans le contexte malgache. De plus nous ne
nous pencherons pas exclusivement sur le cas du français à Madagascar, mais considèrerons
toutes les langues présentes dans le territoire, notamment dans le lieu et milieu qui constituent
notre terrain. Le fait est que status et corpus permettent une analyse et une mise en évidence de
la spécificité des situations linguistiques. Il s’agira donc de décrire et d’analyser chaque langue
à partir des concepts de status et corpus, d’établir les rapports entre ces langues présentes dans
notre terrain, et ainsi percevoir la situation sociolinguistique de ce lieu et milieu.
Nous comprenons donc qu’une variation du status et/ou du corpus entraine
une modification au niveau d’une situation sociolinguistique, car elle change les relations entre
les langues en présence. Notre objectif est de bien distinguer la PLE institutionnelle malgache
1 http://www.francophonie.org, consulté le 04/09/2018.
24
de celle des établissements scolaires et de celles des enseignants-témoins des établissements
observés.
Cette précision dans notre cadre théorique nous amène à considérer plusieurs autres
concepts.
3.4. Représentations linguistiques et usages de langues déclarés
Le concept de représentations linguistiques relève de l’ethnologie, et il est inhérent
aux questions des contacts de langues (Gueunier, 1997, p. 247). Elles correspondent également
à un concept de la didactique (Sachot, 2007, p. 4). Mais nous nous contenterons de l’approche
sociolinguistique, car s’agissant d’un facteur de changement de situation sociolinguistique.
Lafontaine définit ce concept comme étant des images mentales de la langue, une construction
plus ou moins autonome (Lafontaine, 1986, p. 14). Pour Calvet, les représentations
linguistiques sont des idées, des images des locuteurs sur les langues (Calvet, 1999, p. 15).
Les usages de langues déclarés renvoient aux déclarations faites par les locuteurs sur
leurs pratiques linguistiques dans toutes les sphères d’utilisation, leurs modes d’appropriation
de la langue, leurs compétences linguistiques et leurs productions langagières. En termes de
recherche sociolinguistique, ces déclarations du locuteur sont considérées comme « un fait
représentationnel tout aussi légitime que le sien propre » (Bulot et Blanchet, 2013, p. 37).
Représentations linguistiques et usages de langues déclarés constituent les rapports
aux langues des locuteurs. L’articulation de ces deux concepts n’est pas fortuite, Calvet précise
que « les représentations déterminent les pratiques et ont une influence sur les réalités » (Calvet,
1999, p. 11). Pour notre part, nous nous inscrivons dans l’analyse de Babault. Selon elle, en
effet, la relation d’influence ne va pas seulement des représentations linguistiques vers
les pratiques et les réalités, au contraire ces trois pôles entretiennent des relations d’influences
réciproques (Babault, 2015, p. 68). Nous avons essayé de représenter par un schéma
cette relation d’influence.
25
La minorisation et la minoration sont des conséquences de cette relation d’influence, et
sont une catégorisation de situation sociolinguistique.
3.5. Minorisation et minoration
La minorisation désigne la diminution du nombre d’occurrences et des locuteurs
d’une langue donnée à l’intérieur de son propre groupe originel. Ces derniers adoptent alors
une langue dominante de façon ponctuelle ou considérable (Blanchet, 2000, p. 131).
La minoration, toujours selon Blanchet, résulte de la minorisation. Les locuteurs ont
une représentation péjorative de leur propre langue, ce que Blanchet appelle une péjoration
ethno-socioculturelle (Blanchet, 2000, p. 131). La minoration est d’ordre qualitatif, tandis que
la minorisation est d’ordre quantitatif (Blanchet, 2000, p. 131).
Les phénomènes sociolinguistiques mis en exergue par Blanchet traduisent la diminution
du nombre de locuteurs ou de la proportion d’usage d’une langue à l’intérieur de son groupe
originel et la péjoration ethno-socioculturelle. Cependant, cette perspective ne tient pas compte
du cas où le nombre de locuteurs et les occurrences ne varient pas ou même augmentent ; et
du cas où les locuteurs, au lieu d’une image péjorative, ont des représentations positives sur
leur propre langue. Il ne faut pas, selon nous, écarter ce cas de figure et le considérons ainsi
dans notre cadre théorique. De plus, Blanchet considère le facteur nombre dans la minorisation.
Or, notre recherche est qualitative. À cet effet, nous ne pensons pas établir un pourcentage sur
Schéma n° 2 : Relation d’influence réciproque entre situation sociolinguistique,
usages de langues déclarés et représentations linguistiques
Situation
sociolinguistique
Usages de
langues déclarés
Représentations
linguistiques
26
le nombre de locuteurs d’une langue, mais plutôt analyser et interpréter les occurrences
des usages de la langue dans tel ou tel domaine. Dans cette optique, les concepts suivants
distinguent les langues selon leur domaine d’utilisation.
3.6. Langue véhiculaire et langue vernaculaire
Pour comprendre ces deux concepts nous nous référons à Calvet (1997, p. 289-292).
« Une langue véhiculaire est une langue utilisée pour
la communication entre locuteurs ou groupe de locuteurs n’ayant
pas la même première langue. Cette langue [véhiculaire] peut
être celle d’une des parties prenantes […], une tierce langue […]
ou une langue créée […] » (Calvet, 1997, p. 289).
Si le concept de langue véhiculaire semble clair, celui de langue vernaculaire est
apparemment flou. Calvet se propose de le clarifier en proposant sa définition :
« […] une langue utilisée dans le cadre des échanges informels
entre proches du même groupe, comme par exemple dans le cadre
familial, quelle que soit sa diffusion à l’extérieur de ce cadre
(qu’elle soit ou non véhiculaire) » (Calvet, 1997, p. 292).
Dans ce cas, une langue vernaculaire peut être une langue véhiculaire, la différence
se situant dans la sphère d’utilisation de la langue. Dans le cadre de ce travail, nous retenons
ces définitions avancées par Calvet.
Remarquons que les deux définitions se rapportent à une classification de langues
différentes. Néanmoins, nous adopterons ces critères dans le cas des variétés d’une même
langue. Ainsi, nous parlerons également de variété véhiculaire et variété vernaculaire pour
catégoriser les différentes variétés du malgache.
Comme nous l’avons vu en amont, la description d’une situation sociolinguistique prend
également en compte le statut et les fonctions d’une langue. Les deux derniers concepts de ce
paradigme renvoient à des interventions sur les langues. Nous avons choisi de les expliciter car
ils ont été appliqués dans le contexte malgache.
27
3.7. Standardisation
Selon Calvet, la standardisation est la promotion d’une langue à une certaine fonction
dans le cas d’une situation de dialectalisation, c’est-à-dire que cette langue peut être parlée de
différentes façons sur l’ensemble du territoire, avec une phonologie différente, un vocabulaire
et une syntaxe partiellement différents (Calvet, 1996, p. 48-49). Se pose alors le problème de
savoir quelle sera la forme qui remplira la fonction choisie par les décideurs.
La standardisation peut se faire selon deux processus différents. L’un consiste à
promouvoir une forme en présence, souvent celle de la capitale. L’autre commence par
une description précise de toutes les variations dialectales, nécessaire pour forger une forme
considérée comme un lieu de convergence des différents parlers (Calvet, 1996, p. 48-49).
Chaque option possède une force qui renvoie à la faiblesse de l’autre. La première est
caractérisée par une intervention contraignante sur les variétés dialectales en imposant celle qui
est choisie par les décideurs. Elle peut être confrontée à un problème de rejet de la part
des locuteurs, car n’est pas un consensus. Néanmoins, cette démarche pallie les difficultés
engendrées par les problèmes de graphie, de lexique et de syntaxe dans le cas de la création
d’une forme commune pour toutes les variétés dialectales. Ce dernier point constitue en
revanche la faiblesse de la deuxième démarche qui, contrairement à la première, cherche
un consensus, un lieu de convergence des différents parlers des locuteurs.
Madagascar avait opté pour la première démarche en 1823. Cette dernière consistait à
codifier et à standardiser le merina, la variété de la royauté malgache de l’époque et pratiquée
à Antananarivo et ses environs et ce, au détriment des autres variétés du malgache. L’entreprise
était menée par des missionnaires de la London Missionary Society à la demande de Radama I.
Le décret royal du 26 mars 1823 avait promu la variété merina à la fonction de langue officielle
(Ranaivoson, 2014, p. 176).
3.8. Équipement d’une langue
L’équipement d’une langue consiste à réduire son déficit au niveau de l’écriture et/ou
du lexique pour la promouvoir selon des raisons politiques et qu’elle puisse assurer une certaine
fonction qu’elle ne pouvait pas occuper auparavant (Calvet, 1996, p. 45-48). Ainsi dans
le constat où une langue ne peut répondre aux besoins de communication, mais que pour
des raisons politiques un pays cherche à la promouvoir à une fonction. Il s’agit d’une part, dans
le cas d’une langue orale, ne disposant pas de graphie, de l’équiper d’un système d’écriture
28
alphabétique (latin, arabe) ou non alphabétique (cas des caractères chinois) ; et d’autre part, de
recourir à la terminologie pour équiper une langue afin qu’elle puisse répondre aux besoins de
la modernité par la création des mots (néologie), lutter contre les emprunts et remplacer
un vocabulaire exogène par celui endogène.
En somme, nous appréhendons la situation de pluralité linguistique malgache par rapport
aux différents niveaux du plurilinguisme, les relations entre les langues en présence, dépendant
des status et corpus de chaque langue, et les sphères d’utilisation de la langue.
Nous aimerons attirer l’attention sur le principe d’égalité de toutes les langues qui
se situerait plutôt à un niveau idéologique. Toutes les langues ne peuvent pas remplir les mêmes
fonctions à condition d’une intervention par le moyen de la gestion des langues en présence en
milieu plurilingue. Ces interventions et les choix qui les guident sont au centre de
notre préoccupation dans ce travail.
L’état des lieux de la recherche met en exergue la problématique des langues
d’enseignement dans le système éducatif malgache. Dans ce cadre, nous retenons que la PLE
résulte de l’évolution de la notion de PL. Elle est une gestion des langues en contact dans
le milieu éducatif, notamment sur la détermination des langues d’enseignement.
L’opération de la connaissance sur cet objet s’effectue sur un triptyque :
- Les niveaux sociolinguistiques : macro- (national et supranational),
méso- (milieu éducatif, région, etc.), et microsociolinguistique (individu,
famille, groupe restreint). Ces niveaux sont interdépendants et ne peuvent
pas être appréhendés de manière isolée.
- Le caractère explicite et implicite : explicite si les choix et décisions en
matière de langues sont conscients et formellement énoncés ; et implicite
au cas où celle-ci [la politique] n’est pas formellement exprimée mais
laisse jouer librement les rapports de force entre les langues.
- Les niveaux d’objectif : prise en compte d’une idéologie linguistique ou
non (finalité) pouvant influencer les choix politiques en matière de langues
d’enseignement (objectif).
Premièrement, nous nous inscrivons dans la perspective de Calvet et de Robillard sur
la nécessité d’une démarche scientifique pour décrire et analyser la situation sociolinguistique.
Cette démarche doit être un préalable à toute prise de décision dans la gestion d’une situation
29
de pluralité linguistique, notamment dans la politique au niveau des langues d’enseignement
dans le système éducatif, pour une mise en œuvre des actions différenciée et adaptée
aux spécificités de chaque contexte. En ce sens, une PLE doit être adossée sur des analyses
faites par le linguiste. Il nous incombe donc de faire une description et une analyse de la
situation sociolinguistique malgache suivant les différents niveaux d’appréhension de la PL et
PLE (supranational, national, organisation à l’intérieur d’un État, tel que le système éducatif, et
individuel). Certes, la réflexion porte sur la PLE. Cependant, la PLE est un volet de la PL. C’est
cette dépendance de la PLE par rapport au niveau macrosociolinguistique que nous pensons
considérer. Nous estimons, en outre, qu’il est nécessaire de tenir compte du niveau
microsociolinguistique pour éviter le problème de cohérence entre les objectifs que se donne
le pouvoir et les solutions intuitives des locuteurs.
Deuxièmement, nous adoptons les notions d’explicite et d’implicite de Cichon, Ehrhart
et Stegu dans notre cadre théorique car la gestion des langues dans le système éducatif peut
résulter de choix et décisions formellement énoncés ou au contraire, résulter de pratiques
linguistiques intuitives des locuteurs. Nous parlerons donc de PLE explicite et implicite.
Troisièmement, nous intégrons également l’analyse de Robillard et de Beacco et Byram
dans le volet des niveaux d’objectif. Cette distinction des niveaux d’objectif prend en compte
une idéologie (linguistique ou non) pouvant influencer la gestion des langues dans un État, et
donc au niveau de sa PLE. Beacco et Byram ajoutent que cette idéologie donne sens à la PLE
(Beacco et Byram, 2003, p. 15).
Dans une dernière mise au point, nous ne pensons pas aborder la planification linguistique
en elle-même en tant que phase de mise en œuvre, mais considérons les instruments de
la planification linguistique comme une source d’informations sur la PLE. Nous aborderons
donc les langues présentes dans le milieu éducatif du point de vue de l’équipement
linguistique (l’écriture, le lexique, la syntaxe), l’environnement linguistique (absence ou
présence des langues orales et/ou écrites dans le milieu étudié), et les textes relatifs à la gestion
des langues (ceux de l’État et des établissements pour nommer les fonctions et expliciter
les droits à la langue des locuteurs).
30
À ce cadre théorique, nous adjoignons l’approche écologique. La paternité de
cette approche est attribuée à Haugen. Il a transféré la métaphore de l’écologie de la biologie
sur les langues, et définie l’écologie de la langue comme l’étude des interactions entre
une langue déterminée et son environnement, autrement dit la société et ses locuteurs qui
l’apprennent, la parlent, et la transmettent à d’autres (Haugen, 1972, p. 325). Pour Lechevrel,
les approches écologiques ne se limitent pas à appréhender une seule langue, elles sont fondées
sur « des préoccupations communes propres au domaine du contact des langues,
du plurilinguisme et des politiques et planifications linguistiques » (Lechevrel, 2010, p. 68).
Ainsi, nous mobiliserons cette approche puisqu’elle permet de dégager, d’analyser et de
comprendre les relations entre les langues, leurs locuteurs et la société. Par ailleurs, l’approche
écologique donne à la sociolinguistique, les moyens de rassembler l’ensemble des niveaux
linguistiques et de mettre à jour les conditions sociales, mais aussi cognitives et
environnementales de leurs productions (Lechevrel, 2008, p. 16). L’approche écologique est
donc inhérente à notre thématique, la PLE. Elle sera mobilisée dans ce travail de recherche en
mettant en synergie les différents environnements linguistiques.
Le schéma de Randriamarotsimba sera notre base dans cette approche écologique, car
élaboré pour le contexte malgache à cette fin. Elle analyse la pluralité linguistique sur deux
PLE
Macro
Méso
Micro
Explicite /
Implicite
Finalité /
Objectif
Planification
linguistique
Équipement
linguistique
Textes de lois
Environnement
linguistique
Schéma n°3 : PLE et Planification linguistique
31
axes. Celui vertical correspond au monde et ses enjeux économiques, politiques, linguistiques,
et au contexte social et les couples de paramètres tels qu’historiques/linguistiques,
géographiques/démographiques, et économiques/politiques. Celui horizontal comprend
les trois niveaux sociolinguistiques, à savoir le macro (situation sociolinguistique malgache),
le méso (milieu éducatif) et le micro (locuteurs). Ces cinq (05) environnements sont en
interrelation, comme le met en exergue le schéma suivant :
Notre recherche adopte une approche sociolinguistique. Nous analyserons ainsi la PL et
PLE suivant les outils conceptuels et théoriques relevant de ce champ. Notre cadre théorique
distingue PL et planification linguistique. La première est une phase de détermination des choix
politiques en matière de langues, une réflexion qui doit être en amont de la phase de mise en
œuvre, la planification linguistique, sans pour autant l’exclure de l’analyse. La PLE est
la transposition de la PL dans le milieu éducatif, et l’école est le principal lieu de mise en œuvre
d’une PL (Randriamarotsimba, 2014, p. 136). Parler de la PLE revient à considérer la PL, et
réciproquement, s’intéresser à la PL c’est accorder une place principale à la PLE. Notre objet
de recherche, la politique au niveau des langues d’enseignement dans le système éducatif
Le monde et ses enjeux
1. Économiques
2. Politiques
3. Linguistiques
Le contexte social et les couples de
paramètres
1. Historiques/Linguistiques
2. Géographiques/Démographiques
3. Économiques/Politiques
ENV 2
Le contexte
social
ENV 1
Le monde
ENV 3
Niv. macrosocioL
Situation socioL malgache
ENV 4
Niv. mésosocioL
Milieu éducatif
ENV 5
Niv. microsocioL
Locuteurs
Schéma n° 4 : Projet écologique de la pluralité linguistique
malgache : les 5 environnements (Randriamarotsimba, 2017, p. 108-112).
32
malgache, sera abordé à travers une approche écologique d’établissements public, privé et
confessionnel catholique de Talata-Volonondry, dans les niveaux primaire et secondaire 1er et
2nd cycle.
33
Deuxième partie : Clarification du cadrage
méthodologique
34
« Il paraît essentiel que le chercheur ne se contente pas d’indiquer les résultats obtenus,
mais rende compte de la démarche qui fut la sienne, de la façon dont il a obtenu les données
qu’il fournit » (Grawitz, 2001, p. 564).
En ce qui nous concerne, le présent mémoire est un projet de thèse. Il importe donc de
préciser la démarche que nous adoptons, de la façon dont nous pensons obtenir des données.
Pour ce faire, cette deuxième partie présentera notre choix méthodologique ainsi que l’ensemble
des méthodes y afférent. Nous prévoyons également de faire une enquête sur terrain,
un protocole en rapport à cette dernière sera donc mis en exergue, prévoyant la pénétration
du chercheur sur ledit terrain.
1. Méthodologie2 : Empirico-inductive qualitative
« La spécificité des phénomènes étudiés, les enjeux particuliers de la production de
connaissance, nécessitent des cadres adaptés aux projets de recherche. Cela invite, une fois de
plus, à une attitude réflexive de la part des chercheur(e)s. » (Blanchet et Chardenet, 2011, p. 7).
Rappelons sommairement notre objet de réflexion et ses spécificités à travers quelques
approches définitoires.
Premièrement, sur la langue :
« Une langue est un instrument de communication selon lequel
l’expérience humaine s’analyse, différemment dans chaque
communauté […] » (Martinet, 1980, p. 20-21).
La langue « est la partie sociale du langage. », « La langue est
une institution sociale. » (Saussure, 1985, p. 31, 33).
« Notre objet d’étude [la langue]3 est la structure et l’évolution
du langage au sein du contexte social formé par la communauté
linguistique » (Labov, 1976, p. 258).
Deuxièmement, sur la PLE qui est une évolution de la notion de PL (Beacco et Byram
cités par Randriamarotsimba, 2014, p. 134) :
« On posera que la politique linguistique se définit comme
une action volontaire [de l’homme]4, officielle ou militante,
2 Nous avons choisi expressément ce terme puisque dans notre travail de recherche il s’agit de l’homme qui
se connait lui-même, en référence à Tremblay (1968) 3 L’élément entre crochets est un ajout de notre part. 4 L’élément entre crochets est un ajout de notre part.
35
destinée à intervenir sur les langues, quelles qu’elles soient
(nationales, régionales minoritaires, étrangères) dans
leurs formes (les systèmes d’écriture, par exemple), dans
leurs fonctions sociales (choix d’une langue comme langue
officielle) ou dans leur place dans l’enseignement » (Beacco et
Byram, 2003, p. 15).
Toutes ces approches définitoires s’accordent sur un point selon lequel, notre objet
d’étude est un fait humain et social. Notre recherche se situe bien dans le domaine des sciences
humaines et sociales.
Quelle méthodologie pour un tel objet ? La modalité d’élaboration des connaissances est
représentée par deux polarités : l’hypothético-déductive et l’empirico-inductive (Blanchet et
Chardenet, 2011, p. 15). Nous allons les présenter successivement pour justifier
notre positionnement méthodologique.
1.1. Hypothético-déductive
L’approche hypothético-déductive a été transférée depuis les sciences exactes
aux sciences humaines et sociales (Blanchet, 2000, p. 29). Déjà à ce niveau très général,
cette méthodologie trouve son origine dans les sciences exactes5, se pourrait être inadaptée
au domaine dans lequel s’inscrit notre recherche, celui des sciences humaines et sociales, car
opérée par un simple transfère.
De plus, elle consiste à proposer au départ de la recherche, à titre d’hypothèse,
une réponse à une question, et à valider ou invalider cette réponse en la confrontant par
expérimentation, en situation contrôlée, à des données sélectionnées (Blanchet, 2000, p. 29).
Dès lors, le chercheur détermine à l’avance les conditions de l’expérimentation en laboratoire,
d’une part, il délimite les causes, et d’autre part, il prévoit l’effet. Or, les phénomènes humains
sont riches de leur complexité et sont chaoïdes6. Le chercheur ne peut donc ni contrôler ces
5 L’adjectif « exactes » dans son utilisation sert uniquement à distinguer cette science des sciences humaines
et sociales, sans porter aucunement un jugement de valeur sur l’un ou l’autre domaine. 6 Le terme chaoïde est proposé pour éviter les connotations négatives du terme chaotique : cela semble
totalement désordonné d’un point de vue rationnel mais cela peut correspondre ou contribuer à une organisation
fonctionnelle (Blanchet, 2011, p. 16).
36
phénomènes, ni prévoir les effets. La formulation d’une hypothèse à l’avance reviendrait à
biaiser les données et amènerait ipso facto à produire des connaissances détachées de la réalité.
Par ailleurs, cette approche méthodologique est gouvernée par le principe de disjonction
(Blanchet et Chardenet, 2011, p. 15-16). Elle décontextualise et artificialise les observations
pour neutraliser la complexité des variables et les maitriser, plaçant le chercheur hors de
la réalité qu’il étudie. Cependant, dans les sciences humaines et sociales, le chercheur est à
la fois le sujet connaissant et l’objet de connaissance. Par conséquent, il est impossible pour
le chercheur opérant dans ce domaine d’éluder ce paramètre.
Enfin, l’hypothético-déductive pose comme garant de l’objectivité les valeurs et
les fréquences statistiques (Blanchet et Chardenet, 2011, p. 16). Cependant, les chiffres ne
disent rien en eux-mêmes, il incombe au chercheur de les interpréter. Et dans le cas
d’une hypothèse à valider ou à invalider, l’interprétation sera orientée vers cette réponse posée
au départ de la recherche. À cet effet, l’objectivité par la fréquence statistique n’est
vraisemblablement pas évidente.
1.2. Empirico-inductive
La méthodologie empirico-inductive se caractérise par le souci de l’authenticité
des données (Blanchet, 2000, p. 28). Le chercheur ne formule pas d’hypothèse comme réponse
au début de la recherche et n’a pas d’a priori qui vont filtrer les données. Il s’interroge sur
la signification de phénomènes humains et c’est dans les données empiriques qu’il recherche
les réponses.
De plus, la langue étant un phénomène humain et social, le chercheur étant lui-même un
homme, il ne peut qu’être subjectif étant donné qu’il est à la fois le sujet connaissant et l’objet
de la connaissance (Blanchet, 2000, p. 30). Plutôt que de se dérober à cette évidence,
la démarche empirico-inductive réintègre le sujet dans son contexte d’analyse, ainsi que
la complexité aléatoire et chaoïde des facteurs intervenant dans les phénomènes humains ; tel
qu’il apparaît généralement impossible d’en maîtriser totalement et précisément les variables.
Morin va dans ce sens et énonce que lorsqu’il s’agit de l’homme, « ce n'est pas simplement
la société qui est complexe, mais chaque atome du monde humain » (Morin, 2005, p. 78).
La complexité de l’homme et des phénomènes humains est ici démontrée depuis le plus petit
élément constitutif de l’homme jusqu’au groupe humain.
37
Selon Auroux, des informations sur le langage ne peuvent être recueillies que par
le truchement de données externes (Auroux, 1998, p. 89). À cet effet, l’empirico-inductive
prévoit pour le chercheur adoptant cette démarche, une pénétration7 sur le terrain. Le chercheur
cherche à comprendre des phénomènes à partir d’un tissu de données sans pour autant prétendre
à une représentativité (Blanchet, 2000, p. 30).
« Le projet d’une méthode EI8 est de proposer
une compréhension (une interprétation) de phénomènes
individuels et sociaux observés sur leurs terrains spontanés, en
prenant prioritairement en compte les significations qu’ils ont
pour leurs acteurs eux-mêmes et donc en vivant ces phénomènes
aux côtés des acteurs, comme un acteur parmi d’autres mais
selon des procédures méthodiques qui garantissent
la significativité des situations observées et comparées et qui
exploitent consciemment les relations intersubjectives
entretenues au sein du groupe, notamment celles où le chercheur
est impliqué » (Blanchet et Chardenet, 2011, p. 16).
Cette citation de Blanchet n’a pas fonction de remplissage. Au contraire, nous avons
voulu la restituer intégralement car elle exprime parfaitement l’opération de la connaissance
selon une approche empirico-inductive.
Le choix de la méthodologie empirico-inductive dans le cadre de ce projet n’est donc pas
ex nihilo. Nous renforçons notre positionnement par le constat que les PL et PLE malgaches
n’ont jamais été apportés par les dirigeants en réponse aux besoins réels des usagers
(Randriamarotsimba, 2014b, p. 179). Pour déterminer ces besoins, une pénétration sur le terrain
suivant une perspective empirico-inductive est essentielle.
Voici donc les principes qui fondent notre cadre méthodologique (Blanchet et Chardenet,
2011, p. 16) :
- Le principe d’humanisme : les humains (individus et/ou groupes) sont
considérés comme des sujets autonomes, dignes, respectables et riches de
toute leur singularité.
7 Le choix de ce mot n’est pas fortuit. Il est le refus de l’utilisation du mot « descente » qui pourrait connoter
une hiérarchie entre la construction intellectuelle et le terrain, source de donnée. En effet, pour l’approche
empirico-inductive le terrain est tout au moins égal à la construction intellectuelle, il prime même sur cette dernière. 8 Abréviation faite par l’auteur, EI : Empirico-Inductive.
38
- Le principe d’intersubjectivité : c’est dans et par les interactions entre
les sujets et les significations qu’ils y attribuent, chercheur compris, que
se développent et peuvent être compris les phénomènes humains et
sociaux.
- Le principe d’endoréférentialité : compréhension des sujets à partir de
leur propre système de références, de valeurs et de significations.
- Le principe d’hétérogénéité : les phénomènes humains et sociaux,
les humains, sont avant tout marqués par leur extrême hétérogénéité,
complexe et chaoïde, interdisant ainsi de les réduire à des règles
universelles et qui permettent de proposer des connaissances
profondément situées, mais partielles sans jamais prétendre à l’absolue.
1.3. Approche qualitative
Au regard des principes de notre cadre méthodologique, notre approche sera
nécessairement qualitative. Nous ne recherchons nullement des récurrences statistiques dans
les données. En ce sens, nous ne prétendons pas à la représentativité ou à l’exhaustivité, mais
visons à établir la significativité des phénomènes observés à travers l’interprétation et
la compréhension des données. « Plus on prend compte de variables […], plus le corpus est
réduit en quantité […] » (Blanchet, 2000, p. 38).
En effet, s’agissant de prendre en compte la complexité des phénomènes humains et de
l’humain lui-même, de considérer autant de facteurs et de variables possibles ayant pu amener
aux données recueillies ; convoiter la représentativité et/ou l’exhaustivité serait prétendre à
une scientificité mal cernée. En ce sens, le garant de la scientificité de notre approche qualitative
est la significativité. Comme le dit Blanchet, il s’agira pour nous de donner du sens
aux phénomènes humains en attribuant la primauté aux données de terrain et en étant également
attentif à tous les détails pouvant concourir à la compréhension de ces phénomènes (Blanchet,
2000, p. 31). Dès lors, le chercheur tient compte de tout ce qui peut aider à comprendre les faits
observés : le contexte dans lequel évoluent les personnes ainsi que le passé de ces dernières,
leur système de références, mais également l’effet qu’il produit sur ces personnes.
Nous adossons cette approche qualitative sur la citation de Blanchet :
« La recherche qualitative exige, plus que l’utilisation de
techniques, un savoir-faire : elle n’est pas standardisée comme
39
une approche quantitative et les manières d’y parvenir sont
souples […]. » (Blanchet, 2000, p. 31).
Le phénomène étudié est complexe. Quelle prédisposition, face à ce constat ?
1.4. Interdisciplinarité, comme collaboration disciplinaire
Pour ce faire, nous allons tenter de fonder épistémologiquement le nécessaire recours à
la collaboration disciplinaire dans l’opération de la connaissance. Et après avoir explicité
brièvement les différentes formes de collaboration disciplinaire, nous soulignerons notre choix
en la matière.
D’après Romains, l’homo sapiens s’est détaché de la condition animale par « l’effort de
se rendre compte de ce qui existe réellement, pour y réfléchir » (Romains, 1960, p. 108). À
cet effet, nous comprenons que la connaissance est donc une fonction de l’homme, dans le sens
d’une propriété conditionnant l’homme en Homme, tel que nous le connaissons actuellement.
Homme est celui qui cherche à se rendre compte du réel à travers l’opération de la connaissance.
Dans le cadre de la connaissance par la raison, nous adhérons également aux propos de
Morin selon lesquels :
« Aussi la connaissance scientifique fut longtemps et demeure
encore souvent conçue comme ayant pour mission de dissiper
l’apparente complexité des phénomènes afin de révéler l’ordre
simple auquel ils obéissent » (Morin, 2005, p. 9).
Le réel est donc caractérisé par sa complexité, ou tout au moins une apparente complexité.
« Mais s’il apparaît que les modes simplificateurs de
connaissance mutilent plus qu’ils n’expriment les réalités ou
les phénomènes, dont ils rendent compte, s’il devient évident
qu’ils produisent plus d’aveuglement que d’élucidation, alors
surgit le problème : comment envisager la complexité de façon
non-simplifiante ? » (Morin, 2005, p. 9).
Face à cette complexité du réel, nous appréhendons la collaboration disciplinaire comme
une manière d’équiper notre pensée afin de la rendre capable de « traiter avec le réel, de
dialoguer avec lui, de négocier avec lui » (Morin, 2005, p. 10). Les différentes formes de
40
collaboration disciplinaire sont : la pluridisciplinarité, l’interdisciplinarité, la transdisciplinarité
et la métadisciplinarité (Morin, 1994 et 2008 ; Charaudeau, 2010 ; et Darbellay, 2011).
La pluridisciplinarité se définit par la juxtaposition successive de deux discours
disciplinaires formulant chacun leur point de vue sur un objet (Darbellay, 2011, p. 73 et
Charaudeau, 2010, p. 4).
L’interdisciplinarité consiste à « établir de véritables connexions entre concepts, outils
d’analyse et mode d’interprétation de différentes disciplines » (Charaudeau, 2010, p. 4).
La transdisciplinarité est l’« intégration des savoirs de diverses disciplines qui permet
l’articulation des uns aux autres et l’émergence de savoirs plus riches » (Morin, 2008, p. 299).
Dans la métadisciplinarité, il s’agit d’« "écologiser" les disciplines, c'est-à-dire tenir
compte de tout ce qui est contextuel y compris des conditions culturelle et sociales, c'est-à-dire
voir dans quel milieu elles naissent, posent des problèmes, se sclérosent, se métamorphosent »
(Morin, 1994)9.
Nous constatons à travers ces définitions une dynamique sémantique des interactions
entre les disciplines dont les deux extrémités de l’empan sont représentées par
la pluridisciplinarité et la métadisciplinarité. Ces interactions vont d’une simple juxtaposition
des discours disciplinaires vers une véritable symbiose fusionnelle des disciplines.
Dans le cadre de ce travail de recherche, nous optons pour l’interdisciplinarité. Ce type
de collaboration disciplinaire dépasse le stade d’une simple juxtaposition qui, à notre avis, n’est
pas fécond en réseau de relations interactives pour que « le monde fasse sens » (Blanchet, 2011,
p. 10). Nous envisageons ainsi d’établir de véritables connexions entre les concepts et théories
de disciplines différentes, ainsi que leur mode d’interprétation pour comprendre10 notre objet
d’étude ; sans pour autant diluer la sociolinguistique dans la trans-, voire la métadisciplinarité.
Par ce choix, nous nous positionnons du côté de Charaudeau :
« […] il m’a paru intéressant de proposer cette distinction entre
une pluridisciplinarité qui accumule mais n’articule pas,
une transdisciplinarité qui traverse les lieux de pertinence mais
peut en faire perdre leur horizon, et une interdisciplinarité qui
9 Il n’y a pas de pagination dans le document d’origine. 10 Comprendre est ici pris dans son sens le plus large, « identifier des phénomènes (y compris ceux que l’on
perçoit comme des « objets »), à les classer dans des catégories élaborées à cette fin, à leur attribuer des relations
d’interactions et d’interdépendances éventuelles (dont l’explication de relations causes/conséquences) ainsi que
des valeurs. Il s’agit donc de s’en construire une représentation lisible […]. » (Blanchet, 2011, p. 10).
41
échange, coopère, partage en interrogeant et intégrant de façon
critique » (Charaudeau, 2010, p. 16).
Les concepts et théories que nous ferons coopérer avec l’approche sociolinguistique sont
ceux de l’analyse du discours et de la théorie des actes du langage. D’une part, parce que
la sociolinguistique admet déjà l’aspect discursif de la langue, ce que développe Bulot (2001,
p. 5-11). Elle est non seulement une pratique discursive mais encore des pratiques discursives
sur ce discours. Il existe des interlocuteurs qui la pratiquent et dont elle dépend. Une langue
varie selon le type d’interaction, le sexe des interlocuteurs et le genre du discours. D’autre part,
parce que dans le cadre de cette recherche, nous recueillerons des données sur le terrain, auprès
de locuteurs. Searle, dans la présentation de son ouvrage de 2009 intitulé Les actes de langage,
Essai de philosophie du langage, mentionne que les individus communiquent, disent des
choses, posent des questions, donnent des ordres, font des promesses, présentent des excuses,
etc. Ils ont parfois l’intention de signifier réellement ce qu’ils disent. C’est cette significativité
que nous voulons intégrer dans notre réflexion pour distinguer les relations entre ce qui est dit,
ce que cela veut dire, et ce que veut dire celui qui parle.
Nous intègrerons ainsi de façon critique les interprétations inhérentes à ces outils
d’analyse pour la compréhension de notre objet de recherche.
1.5. Méthodes accompagnant la méthodologie empirico-inductive
1.5.1. Observation
L’observation est un préalable dans la démarche empirique. Elle fonde son caractère
inductif. Selon Blanchet, l’inductif s’appuie sur l’observation des phénomènes, induisant alors
une théorie (Blanchet, 2000, p. 34). L’observation donne ainsi sens à la pénétration
du chercheur sur le terrain pour recueillir des informations sur le langage à partir du truchement
de données externes.
Dans le cadre de ce travail de recherche, nous observerons les pratiques linguistiques,
la situation sociolinguistique et l’environnement linguistique du terrain dans lequel nous allons
pénétrer. Cela pour recueillir des données sur les rapports aux langues des locuteurs, leur besoin
en langue et la gestion des langues dans des établissements public, privé et confessionnel, selon
une approche systémique des niveaux primaire et secondaire, dans la commune rurale de
Talata-Volonondry. Cette phase d’observation comprend le niveau méso- et
microsociolinguistique.
42
1.5.2. Description
Il s’agit de situer les faits observés (situation sociolinguistique, environnement
linguistique, rapports aux langues et besoins en langues des locuteurs, et la gestion des langues
dans les établissements) les uns par rapport aux autres, et en y adjoignant les données du niveau
macrosociolinguistique. Pour ce faire, retracer leur genèse et leur évolution pour rendre compte
de leur dynamisme (Trembley, 1968, p. 207).
1.5.3. Analyse
Mener des réflexions en examinant en détail les données recueillies auprès des acteurs
dans chaque type d’établissement et les données recueillies dans l’établissement lui-même.
Cette méthode conduit nécessairement à une synthèse mettant l’accent sur la globalité pour
chaque type d’établissement, pour chaque niveau du système éducatif et pour chaque niveau
sociolinguistique.
1.5.4. Comparaison
Identifier la singularité d’une situation, mieux cerner chaque situation et avoir une vision
dans la globalité du terrain. De plus, cette méthode permet au chercheur de remettre en question
chacune des données recueillies, et les comparer à d’autres; ce qui induit une progression.
Nous établirons donc un croisement des données entre les différents niveaux sociolinguistiques,
les niveaux du système éducatif, les catégories d’acteurs et les types d’établissements pour
aboutir à un véritable réseau de mise en lien.
1.5.5. Interprétation
Construire une signification à partir des données recueillies. Il ne s'agit pas d'établir
des lois universelles de causalité mais de donner un sens ou des sens aux données de
la comparaison déjà effectuée. De la mise en lien découlera ainsi un réseau de sens issu de
l’interprétation.
1.5.6. Compréhension
L’étape in fine est la compréhension. Les méthodes précédentes se constituent en
un soubassement pour cette finalité : identifier des phénomènes, les classer dans des catégories
43
élaborées à cette fin, leur attribuer des relations d’interactions et d’interdépendances éventuelles
(dont l’explication de relations causes/conséquences) ainsi que des valeurs ; il s’agit donc de
s’en construire une représentation lisible (la moins simpliste possible pour tenter de restituer
la complexité du phénomène) afin que le monde fasse sens (Blanchet et Chardenet, 2011, p.
10).
2. Protocole d’enquête
Le protocole d’enquête est nécessaire pour retracer les lignes directrices du choix
du terrain et de la réalisation de l’enquête. Mais d’abord nous nous proposons de décrire
le contexte dans lequel s’inscrit notre enquête.
Les dirigeants malgaches ont du mal à gérer la pluralité linguistique au sein du pays et ne
peuvent en faire un avantage pour le peuple ; faute de volonté politique et faute de moyens
financiers, humains et matériels. Cette mauvaise gestion des langues en présence se reflète dans
le domaine de l’éducation, et explique les problèmes d’accès au savoir. Les enfants malgaches
sont donc les premières victimes des PL et PLE qui ne tiennent pas compte de la situation
sociolinguistique du pays. Des travaux de recherche ont été déjà entrepris. Initié par la Direction
des Études et de la Recherche Pédagogique (DERP) et la Direction des Curricula et des Intrants
(DCI), le projet « Appui aux réflexions sur le choix d’une PLE à Madagascar » vise à appuyer
la prise de décision quant à l’adoption d’une PLE à Madagascar. Les ministères en charge de
l’éducation sont impliqués dans le processus de réflexion, permettant ainsi de prendre en
compte plusieurs contextes éducatifs : enseignement général du préscolaire au lycée,
enseignement technique et professionnel et enseignement universitaire. Les travaux de l’équipe
du Centre de Recherche Société, Dynamique des Langues en Contact, et Didactologie (SDLD)
à l’École Normale Supérieure d’Antananarivo, ex Centre de Recherche en Linguistique (CRL),
dirigée par Randriamarotsimba Vololona ont été effectués dans le but d’appuyer la prise de
décision quant à l’adoption d’une PLE à Madagascar. Ils ont constaté divers clivages jalonnant
la pluralité linguistique malgache, de la société aux locuteurs en passant par le point névralgique
du milieu éducatif. Les PL malgaches et leurs PLE correspondantes, peu regardantes de
telles réalités, engendrent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent (Randriamarotsimba, 2014,
p. 158).
Notre travail de recherche concourt à la continuité de ces réflexions en matière de PL et
de PLE, vu les résultats alarmants des travaux de recherche précédents. Il constitue
44
une réflexion en amont de la phase de mise en œuvre, celle au niveau des langues
d’enseignement dans le système éducatif malgache.
Comme le prévoit la méthodologie empirico-inductive, une enquête sur terrain est
nécessaire pour recueillir des données sur ce phénomène. Pour la pénétration sur ledit terrain,
nous adopterons la posture intérieure-extérieure (Blanchet, 2000, p. 42-43). Dans un premier
temps, l’enquêteur doit adopter une posture intérieure car il importe d’avoir une pratique
d’immersion, procédant de palier en palier jusqu'à faire partie de la communauté observée et
ainsi apprécier au mieux les spécificités du terrain. Elle présente trois avantages principaux.
Premièrement, elle permet de réduire au maximum le fameux paradoxe de l’enquêteur selon
lequel la présence de l’enquêteur modifie les pratiques qu’il souhaite observer. Puisque
l’enquêté n’est pas en situation d’enquête, les pratiques et échanges seront spontanés.
Deuxièmement, elle permet conjointement d’intégrer à l’analyse et d’assumer les effets
produits par le sujet-chercheur dans son interaction avec les enquêtés, de comparer les pratiques
par rapport au discours sur les pratiques. Et troisièmement, elle permet d’enquêter de l’intérieur
de l’interaction langagière et/ou de la communauté linguistique étudiée(s) et donc d’observer
des phénomènes habituellement cachés aux « étrangers ».
Dans un second temps, le chercheur doit adopter la posture extérieure. Elle permet à
ce dernier de prendre une distanciation critique nécessaire et incontournable avec l’observé
pour une meilleure compréhension des phénomènes auxquels il a participé.
2.1. Objectif d’enquête
Calvet soutient qu’« aucune conception in vitro n’est possible sans une compréhension
fine des pratiques et des mouvements tendanciels in situ car c’est, au bout du compte, là que
vont être mises en œuvre les interventions sur la langue et sur les situations linguistiques »
(Calvet, 1999, p. 223). La question n’est donc pas sur l’efficacité de telle ou telle langue ;
une langue répond ou ne répond pas à des besoins sociaux, elle suit ou ne suit pas la progression
de la demande et mouvement sociaux. Le problème est donc de savoir dans quelle mesure
l’organisation linguistique d’un pays correspond et répond aux besoins de communication
des locuteurs et de la société.
Aussi, l’objectif général de cette enquête est de recueillir des données sur la pluralité
linguistique afin de décrire la situation sociolinguistique dans le milieu éducatif en :
45
- Identifiant les usages de langues déclarés des témoins ainsi que
leurs représentations linguistiques. Les usages de langues, et
les représentations linguistiques constituent les rapports aux langues
des locuteurs et donc des témoins identifiés dans le cadre de l’enquête à
mener.
- Identifiant les réalités de classes, dont les langues d’enseignement et
les langues en circulation dans les salles de classe et le pourquoi de
ces utilisations.
- Identifiant l’environnement linguistique dans le lieu et milieu d’enquête.
- Identifiant les liens entre rapports aux langues des témoins, les réalités de
classe et l’environnement linguistique.
2.2. Présentation du terrain
Dans ce cadre, le terrain est à considérer de la façon suivante : « le terrain n’est pas
une chose, ce n’est pas un lieu, ni une catégorie sociale, un groupe ethnique ou une institution
[…] c’est d’abord un ensemble de relations personnelles où "on apprend des choses". "Faire
du terrain", c’est établir des relations personnelles avec des gens » (Agier, 2004, p. 35).
La sociolinguistique a cette même conception du terrain. Elle ne dénigre pas les acquis
de la branche structuraliste. Au contraire, elle les intègre et y a recourt dans ses analyses.
Sa spécificité par rapport à la linguistique dite structuraliste consiste en sa conception
de la langue qui pour la sociolinguistique est une activité socialement localisée. Autrement dit,
la langue doit être considérée comme définie et délimitée dans l’espace. Cette conception de
la langue est contraire à la pensée que celui-ci renvoie à une et seule acception. En effet,
la langue est liée au contexte social, à la localité dans laquelle et par laquelle elle est produite.
Dans cette optique, une présentation du terrain d’enquête nous parait primordiale et
qu’une simple description de ce terrain ne suffise pas, mais nous allons également évoquer dans
ce qui suit les éléments et les paramètres qui ont été déterminants des choix opérés.
2.2.1. Lieu : Commune rurale de Talata-Volonondry
Le lieu de notre enquête est la Commune rurale de Talata-Volonondry. Elle est située
entre Antananarivo et Anjozorobe, en direction de la route nationale n°3 de Madagascar, à
vingt-sept kilomètres de la capitale.
46
Nous voudrions insister sur le caractère rural de notre terrain d’enquête, cette particularité
est un choix délibéré. Selon Calvet, dire qu’un territoire est plurilingue ne signifie pas que tous
les points du territoire soient plurilingues. De ce fait, le plurilinguisme est un phénomène
généralement urbain (Calvet, 1994, p. 11). Si nous suivons ce fil d’idée, les zones rurales,
comme le cas de notre lieu d’enquête, seraient exclues de cette pluralité linguistique. D’où
l’intérêt et la pertinence de cette contradiction qui a motivé notre choix afin d’explorer plus
profondément le paysage linguistique de ce terrain et voir si l’affirmation de Calvet convient à
notre lieu d’enquête. D’autant plus que la population malgache est majoritairement rurale, avec
un pourcentage s’élevant à 89,85%11.
Une autre raison est également essentielle dans la détermination du lieu d’enquête :
la posture intérieure que nous adoptons pour pénétrer le terrain, prévoyant une phase
d’immersion procédant par paliers vers une participation accrue et directe aux échanges
(Blanchet, 2000, p. 42). Le choix s’est donc porté sur un terrain dans lequel cette phase a été
déjà faite ou tout au moins entamée vu que l’enquêteur, en outre notre personne, appartient à
cette communauté. Ce choix est donc raisonné, d’où la commune rurale de Talata-Volonondry.
2.2.2. Milieu éducatif
En effet, la complexité de la problématique des langues à l’école à Madagascar sollicite
« des observations microsociolinguistiques aussi bien sur le plan des représentations et attitudes
que sur le plan des pratiques et comportements effectifs » (Boyer, 2010, p. 73).
Le milieu éducatif de notre enquête sera constitué par :
- Des établissements publics : EPP, CEG et Lycée de Talata-Volonondry.
- Un établissement privé : Lycée privé Tanjona.
- Un établissement confessionnel catholique : Collège Victoire
Rasoamanarivo.
2.2.2.1. Trois types d’établissement : public, privé et confessionnel
catholique
Notre travail de recherche porte sur la PLE malgache, et le système scolaire public
se trouve directement concerné par les décisions politiques en matière de langue (Bavoux et
11 donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.RUR.TOTL?view=chart, consulté le 28/10/16.
47
Bavoux, 1993, p. 79). Le discours de ces auteurs nous rappelle que les établissements publics
se doivent de respecter et d’appliquer, en principe, les textes juridiques en vigueur dans l’État.
Cette relation de subordination nous intéresse particulièrement du fait que si en théorie la PLE
touche directement les établissements publics, la réalité de sa mise en application se situe
au niveau des responsables et des enseignants dans ces établissements, car un clivage peut être
constaté ou non entre les textes de loi en matière de langues et la réalité du paysage linguistique
de l’école. Les interrogations qui ont guidé notre choix vis-à-vis de ces établissements à
caractère public de Talata-Volonondry sont donc : est-ce que les responsables et les enseignants
ont connaissance de la PLE malgache actuelle ? quelle(s) application(s) font-ils de cette PLE ?
Quelle(s) raison(s) les motive(ent) ?
La commune rurale de Talata-Volonondry présente des établissements privé et
confessionnel. Dire que ces établissements n’ont aucun intérêt serait foncièrement grossier,
chacun a sa particularité et tous sont tous dignes d’étude. Ces choix sur les autres types
d’établissement (privé et confessionnel catholique) ont été adoptés dans une perspective
comparative. Ces derniers sont en effet libres d’appliquer ou non les PLE de l’État.
La comparaison se fera donc entre les acteurs, les PLE et les réalités de classe dans chaque type
d’établissement.
2.2.2.2. Approche systémique
L’appréhension de la gestion des langues dans le système éducatif malgache nécessite
une approche systémique du milieu éducatif (Ranaivo, 2007, p. 6). Notre enquête portera
sur les deux niveaux du système éducatif malgache, définis par les textes de lois en vigueur,
notamment la loi d’orientation du système d’éducation et de formation 2008-01 : niveau
primaire et secondaire 1er et 2nd cycle. Elle permettra d’analyser la continuité ou non,
la cohérence ou non de la PLE et de sa mise en œuvre entre les deux niveaux.
En effet, relevant de la problématique de la PLE, c'est-à-dire dans le milieu éducatif,
« le problème est d’abord et surtout dans l’enseignement primaire » (Chaudenson, 2002, p. 20).
Le primaire représente le niveau d’acquisition des bases fondamentales à la formation
du citoyen développant sa personne et participant au développement de son pays. Ce sont
ces bases qui vont être déterminantes quant à l’avenir scolaire de l’enfant (dans les autres
niveaux), elles vont être un atout ou un handicap. Ces derniers, à l’issu de l’enseignement
primaire, voire même avant la fin de ce cycle, quitte le milieu éducatif et n’ont comme seuls
48
bagages dans leur vie que ce qu’ils ont reçu de leur courte période passée dans les murs de
l’école. Il est d’autant plus nécessaire de mener une réflexion pour les élèves qui arrivent en
secondaire. Que deviennent ces bases, notamment en matière de langues ? Qu’en est-il de
leurs besoins en langues, leurs représentations linguistiques, leurs pratiques linguistiques,
leurs modes d’appropriation de la langue, leur compétence linguistique et leurs productions
langagières dans les deux cycles du secondaire ? Quelles évolutions ?
Nous retiendrons pour l’enquête les classes au début et à la fin de chaque niveau et cycle,
sauf pour le primaire où selon la loi d’orientation du système d’éducation et de formation 2008-
01, encore en vigueur, l’enseignement bilingue commence à partir de la 9ème : le malgache
comme langue d’enseignement de l’histoire, de l’éducation civique, et le français pour les autres
matières. Ainsi nous avons choisi :
- les classes de 9ème et 7ème pour le primaire,
- les classes de 6ème et 3ème pour le secondaire 1er cycle,
- et les classes de 2nde et terminale pour le secondaire 2nd cycle,
en nous focalisant sur le plurilinguisme des profils d’entrée et de sortie dans chaque niveau et
cycle, l’objectif étant de voir l’évolution de ce plurilinguisme. Nous cherchons à faire
une comparaison entre le commencement et la fin de l’enseignement bilingue dans les différents
niveaux du système éducatif malgache, tel a été notre critère de base. Cependant d’autres
variables pourraient être intégrées durant l’enquête proprement dite selon les réalités du terrain,
pouvant affiner notre analyse et notre interprétation.
2.2.3. Population d’enquête
Notre population d’enquête sera constituée par différents acteurs de l’éducation. Elle
comprendra le directeur de chaque établissement, les enseignants de chaque classe prédéfinie,
ainsi que les élèves et leurs parents respectifs.
2.2.3.1. Directeur12
Nous avons choisi le directeur de l’établissement parmi les témoins du fait de son statut.
En effet en tant que représentant de l’autorité garante de l’application de la PLE, et donc étant
le premier responsable, il veille au respect de celle-ci et de sa mise en application dans l’école.
12 Personne qui dirige, Le Petit Robert de la langue français, 2012. L’utilisation de ce terme sera générique
dans ce travail, il comprendra les personnes responsables de chaque établissement primaire, collège ou lycée
49
De par son statut, le directeur peut également établir sa propre PLE et sa propre gestion de
la pluralité linguistique présente dans l’établissement. Le directeur d’un établissement est donc
un acteur essentiel dans la définition de la PLE de l’établissement.
Cette catégorie sera composée par cinq (05) témoins : trois (03) pour les établissements
publics et un (01) pour chacun des établissements privé et confessionnel.
2.2.3.2. Enseignant
L’enseignant est l’exécutant de la PLE de l’établissement. Cette caractéristique de
l’enseignant est la raison qui nous a poussé à le compter parmi les témoins à enquêter. Il est
témoin de l’efficience ou non de cette PLE. En effet, il constate à quel point les différentes
langues sont à même de remplir leur fonction de médium du savoir. De plus, il peut avoir
sa propre PLE et agir en conséquence dans sa classe. Ce possible clivage ou non entre la PLE
de l’établissement et la PLE de l’enseignant rend d’autant plus légitime la place de
cette catégorie de témoin dans notre population d’enquête.
Nous compterons seize (16) enseignants pour l’enquête, selon le tableau suivant :
Tableau n°2 : Enseignant-témoin
Classes Établissements
publics
Établissement
privé
Établissement
confessionnel
catholique
Total
9ème 1 1 1 3
7ème 1 1 1 3
6ème 1 1 1 3
3ème 1 1 1 3
2nde 1 1 0 2
Terminale 1 1 0 2
16
2.2.3.3. Parent
Les parents sont aussi, à leur niveau, fortement impliqués dans la chaine de prise de
décisions relatives aux langues car ils sont soucieux de l’avenir de leurs enfants. Enseignant et
parent sont tous deux des acteurs de l’éducation, l’un dans le cadre scolaire, et l’autre dans
50
le cadre familial. Une comparaison entre les points de vue des deux pôles est nécessaire pour
notre travail sur la PLE.
Les parents-témoins seront au nombre de seize (16), un (01) parent d’élève pour chaque
classe et pour chaque type d’établissement.
Tableau n°3 : Parent-témoin
Classes Établissements
publics
Établissement
privé
Établissement
confessionnel
catholique
Total
9ème 1 1 1 3
7ème 1 1 1 3
6ème 1 1 1 3
3ème 1 1 1 3
2nde 1 1 0 2
Terminale 1 1 0 2
16
2.2.3.4. Élève
L’importance des élèves dans une enquête sociolinguistique comme la nôtre est
considérable. Certes ils n’entrent pas explicitement et activement dans la chaine de prise de
décisions en matière de langues dans le domaine de l’éducation, mais ils en sont les premiers
bénéficiaires ou dans le cas contraire les premiers à en payer le prix de ces décisions. En ce qui
concerne Madagascar, jusqu’à présent c’est le deuxième cas qui lui correspond d’après l’état
de lieux vu en amont. Leurs points de vue méritent alors d’être considérés, et comme
notre démarche empirico-inductive le souligne, tous les points de vue sont précieux, et tous
les sujets sont dignes d’étude (Blanchet, 2000, p. 31).
Nos élèves-témoins seront également au nombre de seize (16), un élève pour chaque
classe et pour chaque type d’établissement.
51
Tableau n°4 : Élève-témoin
Classes Établissements
publics
Établissement
privé
Établissement
confessionnel
catholique
Total
9ème 1 1 1 3
7ème 1 1 1 3
6ème 1 1 1 3
3ème 1 1 1 3
2nde 1 1 0 2
Terminale 1 1 0 2
16
2.2.4. Période d’enquête
Notre intention ici n’est pas de donner une date précise dans le temps. Elle est d’inscrire
l’enquête dans une durée. Compte tenu de la phase d’immersion pour la posture intérieure et
le nombre total des témoins qui s’élève à quarante-huit (48), l’enquête sur terrain pourrait
approximativement durer trois (03) à quatre (04) mois.
2.3. Modalité de réalisation de l’enquête
Les modalités de réalisation de l’enquête font partie intégrante de l’enquête elle-même.
Elles sont aussi importantes que les données recueillies par ladite enquête selon le discours de
Grawitz : « Il paraît essentiel que le chercheur ne se contente pas d’indiquer les résultats
obtenus, mais rende compte de la démarche qui fut la sienne, de la façon dont il a obtenu
les données qu’il fournit » (Grawitz, 2001, p. 564). Ainsi techniques, outils, matériels, etc.
autrement dit tous les aspects de l’enquête doivent être explicités.
2.3.1. Techniques et outils d’enquête
Les techniques d’enquête sont les pratiques effectives qui nous permettrons de recueillir
les données fournies par le terrain. Les différentes techniques auxquelles nous aurons recours
ont chacun leurs avantages et leurs limites.
52
Ces techniques d’enquête s’accompagnent de divers outils d’enquête. Nous entendons par
outils d’enquête la thématique de l’observation participante, les guides d’entretien et les grilles
d’observation de classe. Ces outils sont écrits et établis au préalable pour faciliter l’enquête et
servir de balise.
2.3.1.1. Observation participante
L’observation participante est une technique caractéristique du travail sur terrain.
Cette technique est représentative de la posture intérieure-extérieure de l’enquêteur ; en effet,
il est à la fois enquêteur et enquêté. L’enquêteur, dans une observation participante, recueille
des données tout en participant lui-même aux échanges et aux débats (Blanchet, 2000, p. 42).
Grâce à cette forme de conversation, hors de toute situation explicite et formelle d’enquête,
l’enquêteur faisant parti lui-même de la communauté linguistique peut observer
des phénomènes habituellement cachés aux étrangers. Par cela nous pouvons recueillir
des données riches de la complexité des paramètres observés.
Ces avantages de l’observation participante constituent aussi ses inconvénients car
d’un côté elle implique personnellement l’enquêteur et peut induire une perception très orientée
des phénomènes. D’un autre côté, la richesse des données de par la complexité des paramètres
observés conduit à de multiples conclusions possibles et dont un même phénomène peut donner
deux interprétations contradictoires.
Néanmoins, les points faibles de cette technique peuvent être palliés au moyen des autres
techniques d’enquête (entretien et observation de classe) qui se pratiquent avec plus de
distanciation, l’enquêteur n’est pas impliqué dans le phénomène observé. De plus, l’observation
participante ne se fera qu’avec des adultes pour la simple raison que « d’une part, on ne peut
appliquer toutes les techniques à tous les types de population, et d’autre part, on ne peut
recueillir toutes les données à tous les niveaux par n’importe quelle technique » (Grawitz, 2001,
p. 547). Une observation participante avec les directeurs, les enseignants et les parents sera
donc prévue, pendant laquelle les participants pourront intervenir à tout moment, sans tour de
parole ni de temps de parole.
53
2.3.1.2. Entretien
L’entretien s’effectue face à face à la différence d’un questionnaire, et permet ainsi
une interaction directe entre l’enquêteur et l’enquêté. Il peut être directif ou semi-directif. Dans
un entretien directif, les questions sont fermées, c'est-à-dire que les réponses sont déjà
prédéterminées et les choix de réponses s’excluent mutuellement. Par contre, un entretien à
caractère semi-directif est constitué de questions ouvertes, il n’y a pas de réponses
prédéterminées ni de suggestions de réponses. Les témoins répondent selon leur propre
réflexion, et l’enquêteur les suit même si cela présente un certain écart par rapport à la question.
Dans le cas de notre enquête, l’entretien est à la fois directif avec des questions fermées
et semi-directif avec des questions ouvertes. Cette technique sera appliquée à toute la population
d’enquête sans exception.
Le guide d’entretien comme son nom l’indique est un guide à la disposition de
l’enquêteur. Il comprend plusieurs questions déjà préétablies avant l’entretien avec les témoins.
Ces questions s’articulent autour de trois grandes subdivisions :
A. Usages de langues déclarés
B. Langue(s) et enseignement
C. Représentations linguistiques
Les questions sont à peu près les mêmes pour tous les témoins, mais présentent certaines
variantes suivant la catégorie du témoin, qu’il soit enseignant, élève ou parent. En ce qui
concerne les parents, leur questionnement n’inclut pas la rubrique B. Le guide d’entretien pour
les directeurs est très différent de celui des autres témoins avec seulement quatre questions sur
les usages de langues déclarés et la PLE au niveau de son établissement. La raison est que nous
voulons observer exclusivement sa posture face à la gestion de la pluralité linguistique
ambiante.
Malgré les questions déjà préétablies, nous voudrions souligner la flexibilité du guide
d’entretien au moment de l’interaction.
« Une fois rédigées [les questions], il est rare que l’enquêteur ait
à les lire et à les poser les unes après les autres. C’est un simple
guide, pour faire parler les informateurs [les témoins] autour
du sujet, l’idéal étant de déclencher une dynamique de
conversation plus riche que la simple réponse aux questions, tout
en restant dans le thème. » (Kaufman, 2007, p. 44-45).
54
Cela implique un savoir-faire de la part de l’enquêteur et non pas seulement se limiter
aux techniques.
Ces trois thèmes sont également ceux de l’observation participante. Ainsi nous pourrons
comparer les données recueillies par les deux techniques.
2.3.1.3. Observation de classe et après-cours13
L’observation de classe vise à identifier les langues en contact durant une situation
d’enseignement/apprentissage. L’enquêteur ne participe nullement au cours mais se contente
d’observer l’enseignant, être attentif aux manifestations linguistiques qui s’y produisent.
Cette technique nous permet ainsi de constater la réalité de classe, et par concomitance
comparer les pratiques linguistiques des témoins et leurs discours sur ces pratiques.
Nous observerons ainsi un cours dans chaque classe que nous avons déterminée en amont.
Après chaque cours, nous pensons effectuer un échange avec l’enseignant, non pas pour évaluer
son enseignement mais pour identifier ses raisons sur l’utilisation de telle ou telle langue durant
le cours ; c’est ce que nous entendons par un après-cours.
Notre grille d’observation rapporte donc les activités à observer par l’enquêteur durant
un cours et établira un rapport entre ces activités et les pratiques linguistiques, avec un minutage
minutieux. D’autres informations seront à consigner dans la grille d’observation, tel que
le niveau, la classe, ainsi que la nature du cours.
2.3.2. Matériel de collecte de données
Pour la collecte de données, nous utiliserons deux types d’appareil : dictaphone et caméra.
S’ajouteront à cela les prises de notes de l’enquêteur. Toutes ces dispositions sont prises dans
un souci d’exhaustivité, en d’autres termes pour ne perdre aucun détail, quel qu’il soit,
susceptible d’être interprété.
13 Le syntagme a été inspiré par nos expériences durant nos stages de responsabilité en 4ème année de
formation à l’École Normale Supérieure d’Antananarivo. Il consiste en une auto-évaluation du stagiaire de ses
performances durant un cours, une évaluation par le binôme, par le professeur titulaire et par les enseignants de
l’ENS. Ce dispositif est systématique après chaque cours.
55
2.3.3. Langue d’enquête
Nous laisserons aux témoins le choix de déterminer la langue d’enquête. Le malgache et
le français étant les langues officielles du pays, nous estimons que le témoin est libre de choisir
en quelle langue il voudrait que l’enquête se déroule.
Nous adoptons dans le cadre de ce travail la méthodologie empirico-inductive.
Elle intègre la complexité aléatoire et chaoïde des phénomènes observés, entre autres la gestion
des langues en contacts dans le système éducatif. Elle prend également en compte dans
son analyse le fait que le chercheur, sujet connaissant, soit l’objet de connaissance. L’approche
qualitative est nécessaire pour donner du sens aux phénomènes humains en attribuant
la primauté aux données de terrain et en étant également attentif à tous les détails pouvant
concourir à la compréhension de ces phénomènes, sans chercher une récurrence statistique.
Nous aurons également recours à l’interdisciplinarité. Des concepts et théories de l’analyse de
discours et des actes du langage seront intégrés dans l’approche sociolinguistique.
La pénétration sur terrain est prévue par notre cadre méthodologique. À cet effet,
nous effectuerons une enquête dans la Commune rurale de Talata-Volonondry, auprès de trois
types d’établissement (public, privé et confessionnel catholique), suivant une approche
systémique des deux niveaux du système éducatif malgache. Notre population d’enquête sera
constituée par les directeurs des différents établissements, les enseignants dans les différents
niveaux, ainsi que les élèves et leurs parents. Nous mobiliserons trois techniques d’enquête,
avec leur outil respectif : l’observation participante, l’entretien directif et semi-directif, et
l’observation de classe. Pour ce faire, nous utiliserons un dictaphone et une caméra pour ne
perdre aucun détail, quel qu’il soit, susceptible d’être interprété ou même d’altérer l’analyse
postérieure.
56
Conclusion
Pour conclure le présent projet de thèse, nous allons évoquer ses intérêts et ses limites.
Nous nous sommes basé sur les points forts et les faiblesses de la recherche menée lors
du mémoire de CAPEN. En effet, nous avons déjà abordé, mais de manière peu approfondie,
la thématique de la PLE malgache, avec pour terrain l’EPP de Talata-Volonondry.
Pour appréhender la thématique de la PL au niveau du CAPEN, nous nous sommes référé
à l’analyse de Calvet (1996). L’avantage a été d’avoir pu distinguer deux phases, dont la PL
elle-même et la planification linguistique. Cependant, s’être limité à un seul point de vue ne
nous a pas permis de confronter dans une discussion scientifique l’approche de Calvet avec
d’autres auteurs et leurs approches, d’où un cadre théorique assez léger ne pouvant pas aborder
la thématique en profondeur. Même cas pour la notion de PLE, elle n’a été que survolée.
L’intérêt de ce travail en Master est d’abord le fait que nous sommes parti de différentes
approches sur la PL : origine du concept avec Haugen et Fishman, Calvet, Chaudenson,
Robillard, Cichon, Ehrhart et Stegu. Nous avons fait de même sur la thématique de la PLE avec
la théorie de Beacco et Byram, ainsi que celle Rakotofiringa sur les langues à l’école.
Cette démarche nous a permis de confronter les différentes approches et d’intégrer dans
un cadre théorique les éléments pertinents de chacune d’elles. De ce fait nous avons élaboré
un cadre théorique sur la PLE plus fécond en terme de significativité dans la compréhension de
la gestion des langues dans le système éducatif malgache.
Le mémoire de CAPEN ne présente pas de cadrage théorique sur la description
d’une situation sociolinguistique. Cette dernière est pourtant nécessaire à une réflexion sur
la gestion des langues, notamment celle des langues d’enseignement (Robillard, 1997, p. 39).
La situation macrosociolinguistique malgache étant déjà décrite par Randriamarotsimba sous
les termes de diglossie enchâssée (Randriamarotsimba, 2012, p. 39-50), restent les niveaux
méso- et microsociolinguistique ; dans notre cas le lieu et milieu à Talata-Volonondry. La force
de ce travail est qu’il présente un cadre théorique élaboré à cet effet. Elle permet de mettre en
lien cette description du niveau macro avec les autres niveaux et articule les différents
environnements de la pluralité linguistique malgache dans une perspective écologique.
Le choix de notre terrain pour le présent travail de recherche s’est opéré suivant les points
forts et les limites de celui du CAPEN. Avoir pu situer le point de départ de la réflexion sur
la PLE est primordiale, car « le problème est d’abord et surtout dans l’enseignement primaire »
(Chaudenson, 2002, p. 20). Cependant, en matière de gestion de langues dans le système
57
éducatif, il est nécessaire d’avoir une approche systémique (Ranaivo, 2007, p. 6) pour voir
l’évolution de la politique sur les langues d’enseignement et identifier la cohérence ou non dans
cette gestion. De même pour le caractère public des établissements à observer. En effet, à travers
ce choix, nous pouvons identifier la cohérence ou non entre la PLE institutionnelle et celle de
l’établissement public, ce dernier étant tenu de respecter les lois d’orientation du système
éducatif malgache. En revanche, ce point est aussi une faiblesse du fait que le terrain ne
constituait qu’un seul type d’établissement, ne permettant pas une approche comparative de
la gestion des langues et de la situation linguistique dans le public avec celles présentes
au niveau d’autres types d’établissement. L’élargissement du terrain dans l’actuel projet de
recherche constitue, en ce sens, son intérêt. D’une part, il inclut les niveaux du système éducatif
malgache, entre autres le primaire, le secondaire 1er et 2nd cycle. D’autre part, il intègre
différents types d’établissement (public, privé, et confessionnel catholique). Cependant,
cet élargissement ne cherche pas la représentativité ou l’exhaustivité, mais vise à recueillir
des données plus riches qualitativement.
Notre population d’enquête sera constituée par les directeurs des différents
établissements, les enseignants dans les différents niveaux, ainsi que les élèves et leurs parents.
La prise en compte de ces différentes catégories de témoin permet d’inclure dans
notre recherche les acteurs de l’éducation. En effet, selon l’ordinogramme de Hameline, l’acte
d’éduquer est accompli par des acteurs, à savoir : l’administration (les directeurs
des établissements), les éducateurs (les enseignants), les parents, les élèves (Hameline, 2005,
p. 61). Et d’après Randriamarotsimba, les PL et PLE malgaches sont peu regardantes
des besoins en langue des locuteurs (Randriamarotsimba, 2014, p. 158). L’intérêt est donc de
pouvoir intégrer ces catégories de témoins dans notre population d’enquête car leurs points de
vue doivent être considérés dans le cadre de cette étude sur la PLE.
Vu la courte période de l’enquête lors du CAPEN qui ne nous a pas permis d’identifier
l’environnement linguistique du lieu et milieu observés, l’intérêt dans ce mémoire de master est
que nous pensons inscrire notre enquête sur terrain dans une durée plus longue. Dans ce sens,
nous décrirons cet environnement et l’analyserons en tant que source d’information sur
la situation sociolinguistique, outre les données recueillies auprès des témoins identifiés.
L’utilisation de différentes techniques d’enquête est un avantage de la recherche en
CAPEN. Nous en ferons de même dans ce projet pour recueillir des données auprès
des locuteurs dans notre terrain. Par ce faire, nous pourrons croiser les données obtenues par
58
le moyen de chaque technique et ainsi les comparer, les analyser et les interpréter afin que
celles-ci soient riches en significativité. Un après-cours, non effectué en CAPEN, est un autre
intérêt de ce projet de thèse. Il offre l’occasion d’un échange avec l’enseignant afin de mettre
en lien sa politique en matière de langue d’enseignement et sa pratique durant le cours observé.
Notre cadre méthodologique présente également un intérêt. L’empirico-inductive
qualitative intègre la complexité aléatoire et chaoïde des phénomènes observés. Cette angle
d’approche nous permet un respect absolu des données, et de constituer un corpus authentique
(Kerbrat-Orecchioni cité par Blanchet, 2000, p. 28). Nous avons également choisi de retenir
la posture intérieure-extérieure, déjà un point fort de l’enquête du CAPEN, et de ce fait celui de
cette recherche. La posture intérieure nous permettra de recueillir des données réelles et
spontanées, mais non l’apparence de ce que les témoins identifiés veulent manifester.
Quelques difficultés ont été rencontrées durant l’élaboration de mémoire de master.
Les unes s’enchâssant dans les autres. Par conséquent, le présent projet de thèse comporte
des limites dans son cadre théorique et méthodologique. Elles s’assimilent ainsi à
des perspectives pour la thèse.
Le paramètre temps a été un problème, nous entrainant sans cesse dans une course contre
la montre. En ce sens, nous pensons que certaines théories élaborées sur la notion de PL et PLE
n’ont pas pu être intégrées dans notre cadre théorique. Nous pensons ainsi étoffer
la bibliographie sur les travaux de recherche faits sur la PL et PLE au niveau théorique et sur
ceux des PL et PLE malgaches. Même perspective pour l’appréhension d’une situation
sociolinguistique.
La collaboration entre le linguiste et les décideurs dans les prises de décision en matière
de PL et PLE est une préconisation avancée par Calvet et réitérée par Randriamarotsimba pour
le cas malgache (Randriamarotsimba, 2012, p. 39-50). Un cadre théorique sur cette relation
(dont l’inexistence de relation) entre le pouvoir politique et le pouvoir scientifique est donc à
élaborer. Nous sommes conscient qu’un travail de recherche sur cette thématique est en cours
et représente en lui seul un projet de thèse et constituera donc une thèse. Cependant, ce cadre
théorique nous est nécessaire tout au moins sur l’importance accordée par les décideurs
malgaches dans l’élaboration d’une PL et/ou PLE face aux résultats de recherche des linguistes.
Dans ce projet, il s’agit en partie de déterminer si la PLE institutionnelle malgache,
notamment sur les langues d’enseignement, correspond à la situation sociolinguistique et
59
répond aux besoins des locuteurs. Cela conduit ainsi à évaluer la PLE. Il faudrait donc, en thèse,
déterminer de manière précise les critères de cette évaluation.
Nous pensons faire collaborer la sociolinguistique avec l’analyse du discours et
les théories des actes du langage suivant une interdisciplinarité ; à la fois un intérêt et une limite
de ce projet. Un intérêt, car permet d’équiper notre pensée face au caractère complexe
du phénomène étudié. Une limite, parce que nous n’avons pas préciser quels théorie(s) et
concept(s) nous allons prendre comme outils d’analyse. Nous avons déjà justifié notre choix
par rapport à ces disciplines dans la deuxième partie de ce travail. Il nous faut donc identifier
spécifiquement ces théorie(s) et concept(s) nécessaires à cette collaboration et ensuite
les clarifier dans un cadre théorique.
Ce dernier paragraphe trace les limites du projet de recherche en lui-même dans
sa contribution à la connaissance, selon le principe d’hétérogénéité (Blanchet et Chardenet,
2011, p. 16). Nous ne pouvons que produire des savoirs partiels dans notre champ d’étude mais
jamais des connaissances absolues. En ce sens, ce travail ne prétend pas être représentatif ni de
la recherche sur la PLE malgache, ni du terrain à étudier, c'est-à-dire de la commune rurale de
Talata-Volonondry. Qui plus est, cette recherche n’inclue pas les zones périphérique et urbaine,
ainsi que les autres types d’établissement : établissement confessionnel protestant et
ceux fonctionnant selon un système étranger mais établis à Madagascar.
I
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VI
Annexe
Guide d’entretien pour le directeur d’établissement
1. En quelle langue sont :
- Les réunions à l’école ?
- Les circulaires, les convocations ?
- Activités parascolaires ?
Inona ny teny ampiasaina :
- Amin’ny fivoriana ao an-tsekoly?
- Amin’ny taratasy ofisialy fampahafantarana ny lalàna sy fepetra ary ny
fiantsoana fivoriana?
- Amin’ny hetsika tanterahina ivelan’ny ora fampianarana?
2. Selon le programme scolaire appliqué dans votre établissement, quelle devrai(en)t
être la ou les langues d’enseignement ?
Raha io fandaharam-pianarana ampiharina ao amin’ny sekoly sahaninao io, inona
ny teny tokony hoentina mampianatra?
3. Avez-vous déterminé une politique linguistique éducative pour votre établissement ?
Nisy ve famaritana nataonao ho an’ny sekoly sahaninao momba izay politikan’ny
teny eo amin’ny sehatra fanabeazana?
4. Quelles sont les pratiques langagières effectives dans les classes que vous avez pu
observer?
VII
Inona avy ny teny ampiasaina ary ny fomba fampiasana azy teo anivon’ny sekoly
izay efa narahinao maso ?
Informations sur les témoins :
Nom :
Fonction :
Classe tenue :
Coordonnées :
Age :
Sexe :
Niveau d’étude :
Région d’origine :
Les régions successives d’études :
Les régions successives d’affectations :
Année d’obtention du CEPE, BEPC, BAC, etc.
VIII
Guide d’entretien
Recommandations: bien spécifier la nature du malgache pratiqué: malgache officiel ou
variété régionale (et laquelle)
VERSIONS MALGACHE ET FRANÇAISE
I- ENSEIGNANT
A. Langue et enseignement
1. Inona ny teny nampianarana anao tamin’ny fanabeazana fototra? collège? Lycée?
Université?
2. Nahazoanao tsara ireo taranja nampianarina ve izany sa tsia? Fa nahoana?
3. Raha tsia, inona no tena hitanao fa tokony nampianarana anao t@ primaire, t@
college ary t@ lycée tamin’izany fotoana izany? Fa nahoana?
4. Raha ny fandaharam-pianarana, inona no teny tokony hampianaranao?
5. Manaraka izay ve ianao sa tsia? Fa nahoana?
6. Raha tsia, inona no teny entinao mampianatra ankehitriny? Fa nahoana?
7. Io teny nofidinao io ve no tena tokony ho teny hampianarana sa teny inona no tokony
hampianarana @ ambaratonga ampianaranao? Fa nahoana?
8. Rehefa mampianatra teny vahiny ianao (frantsay na anglisy) amin’ny teny inona no
ampianaranao azy ireo? Fa nahoana?
1. Quelle(s) était (ent) votre langue d’enseignement en primaire ? au collège ? au lycée ? à
l’université ?
2. Ce(s) langue(s) d’enseignement vous ont-elle permis de bien apprendre les différentes
matières en classe ou non ? pourquoi ?: quels atouts ? difficultés ?
3. Si non, quelle langue aurait été plus appropriée pour être langue d’enseignement selon
vous au primaire ? collège ? lycée ? université ? pourquoi ?
4. Selon le programme officiel, en quelle langue devriez-vous enseignez ?
5. Suivez-vous la politique linguistique éducative institutionnelle ? Si oui, quels
atouts/difficultés/stratégies ?
6. Si non, quelle(s) langue(s) utilisez-vous ? Dans quelles proportions ? pourquoi ?
7. Selon vous, quelle(s) devrait (ent) être la/les langue(s) d’enseignement dans le niveau
que vous enseignez ? Pourquoi ?
IX
8. Que pensez-vous du choix des langues lors des examens ?
B. Usages de langues déclarés
1. Ankoatra ny fotoana ampianaranao ao an-dakilasy, inona no teny henonao tenenina ato
an-tsekoly?
2. Ary eo @ fiaraha-monina?
3. Amin’ny fotoana inona no itenenanao teny hafa ankoatra ny fiteny ny faritra misy
anao? Fa nahoana?
4. Miteny ny tenim-paritra eto an-toerana ve ianao? Lazao ny antony na ENY na TSIA?
5. Inona ny teny mahavantana anao raha miresaka:
- Ao an-trano @ vady aman-janakao,
- Any am-pianarana,
- Eo @ fiarahamonina?
Azonao hazavaina tsirairay ve ny antony?
6. Inona indray ny teny mahavantana anao raha mamaky teny? Fa nahoana?
7. Inona avy ireo vakinao: gazety ve? sa magazine? sa roman ?Sns. Fa nahoana?
8. Inona ny teny manavanana anao rehefa manoratra? Fa nahoana?
9. Inona avy ireo fandaharana henoinao @ radio na jerenao @ télé? @ teny inona izy
ireo? Azonao hazavaina ve ny antony?
10. Ary raha mijery video ianao dia amin’ny teny inona? Fa nahoana?
1. En dehors des heures de classe, quelles sont les langues que vous entendez parler à
l’école ?
2. Et dans l’environnement social ?
3. À quels moments parlez-vous la (les) variété (s) du malgache autre (s) que celle (s) de
votre région ? Pourquoi ?
4. Maîtrisez-vous la (les) variété (s) de la région ? Si oui, pourquoi ? si non, pourquoi ?
5. Quelle (s) est (sont) la ( les) langue(s) que vous parlez naturellement (ou avec aisance)
avec :
- Les membres de la famille (conjoint(e) et enfants) ?
- À l’école ?
X
- Dans l’environnement social ?
Précisez les raisons.
6. Quand vous faites de la lecture, quelle (s)est (sont) la (les) langue (s)qui vous est (sont)
familière (s) ? Pourquoi ?
7. Quelles sont vos lectures : journaux ? magazines ? romans ? autres ? précisez les raisons
8. Quand vous écrivez, quelle (s)est (sont) la (les) langue (s) qui vous est (sont)
familière(s) ? Pourquoi ?
9. Quelles sont les émissions que vous suivez à la radio ou à la télévision ? Dans quelle(s)
langue(s) ? Pourquoi ?
10. Quand vous regardez une vidéo, c’est dans quelle(s) langue(s) ? Pourquoi ?
C. Représentations linguistiques
1. Raha ny hevitrao: Inona ny teny tokony hampianarana eto Madagasikara ao @:
- Primaire?
- College?
- Lycée?
- Université?
Fa nahoana?
2. Inona ny teny tena mahatafita @ fianarana? Fa nahoana?
3. Inona ny teny tena mahatafita @ asa eto Madagasikara? Fa nahoana?
4. Inona avy ireo teny tokony ho hain’ny zaza malagasy? Fa nahoana?
5. Azonao alahatra ny teny hainao (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
6. Azonao alahatra ny teny tianao hofehezina (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
7. Inona ny hevitrao mikasika ny fifangaroan’ny fiteny toy ny fran-gasy/variaminanana:
- Tsara.
XI
- Ratsy.
- Mandeha ho azy.
8. Ho anao ny teny Malagasy dia:
- Teny entina miserasera.
- Teny ampiasaina amin’ny sehatry ny asa.
- Hafa, lazao.
9. Raha ny fahatsapanareo azy ve dia misy ny hatao « malagasy madio » ?
1. D’après vous : quelle devrait-être la langue d’enseignement :
- Au primaire ?
- Au collège ?
- Au lycée ?
- À l’université ?
Pourquoi ?
2. Quelle est la langue de la réussite scolaire ? pourquoi ?
3. Quelle est la langue de la réussite professionnelle ? pourquoi ?
4. Quelles sont les langues que les enfants malgaches doivent maîtriser ? pourquoi ?
5. Classez par ordre de préférence les langues que vous parlez.
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
6. Classez par ordre de préférence les langues que vous aimeriez parler.
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
7. Que pensez-vous du mélange des langues comme le fran-gasy/variaminanana
(malgache/français) ?
- C’est bien.
- C’est mal.
- C’est naturel.
8. Pour vous la langue malgache est (une ou plusieurs réponses possibles) :
- Une langue de communication.
- Une langue de travail.
- Autres à préciser .
XII
9. Est-ce que vous avez l’impression qu’il existe un « bon malgache » ?
Informations sur les témoins :
Nom :
Fonction :
Classe tenue :
Coordonnées :
Age :
Sexe :
Niveau d’étude :
Région d’origine :
Les régions successives d’études :
Les régions successives d’affectations :
Année d’obtention du CEPE, BEPC, BAC, etc.
II- . ÉLÈVES
A. Usages de langues déclarés
1. Inona no teny ifampiresahanao:
- Amin’ny ray aman-dreny? Fa nahoana?
- Amin’ny iray tampo? Fa nahoana?
- Amin’ny fianakaviana hafa? Fa nahoana?
- Amin’ny namanao any am-pianarana? Fa nahoana?
- Amin’ny namanao ivelan’ny sekoly misy anao? Fa nahoana?
2. Ianao ve tia mamaky teny? Inona avy ireo zavatra tianao vakina: BD?Boky?
Gazety?sns? Ary amin’ny teny inona avy izy ireo?
3. Inona ny teny manavanana anao rehefa manoratra? Fa nahoana?
4. Inona avy ireo fandaharana henoinao @ radio na jerenao @ télé? @ teny inona avy izy
ireo? Azonao hazavaina ve ny antony nisafidiananao ireo fandaharana ireo sy ireo teny
ireo?
XIII
5. Amin’ny fotoana inona na toerana aiza no ahenoanao teny hafa ankoatra ny fiteny aty
amin’ny faritra misy anao? Azonao ve sa tsia ilay fiteny?
6. Amin’ny fotoana inona na toerana aiza no itenenanao teny hafa ankoatra ny fiteny aty
amin’ny faritra misy anao?
1. En quelle langue parlez-vous :
- À vos parents ? pourquoi ?
- À vos frères et sœurs ? Pourquoi ?
- Aux autres membres de la famille ? Pourquoi ?
- À vos camarades de classe ? Pourquoi ?
- À vos amis qui ne vont pas à la même école que vous ? Pourquoi ?
2. Aimez-vous lire ? Quel genre d’ouvrage lisez-vous : BD ? Livre ? Journaux ? etc. En
quelle langue ces ouvrages sont-ils écrits ?
3. En quelle langue préférez-vous écrire ? Pourquoi ?
4. Quelles sont les émissions radio que vous écoutez ? Les émissions télé que vous
regardez ? En quelles langues ces émissions sont-elles ? Pouvez-vous expliquer les
raisons de vos choix de ces émissions et de ces langues ?
5. Vous arrive-t-il d’entendre parler des langues autres que le dialecte parlé dans votre
région ? Est-ce que vous les comprenez ?
6. Où et à quelle occasion parlez-vous une langue autre que le dialecte de votre région ?
B. Langue(s) et enseignement
1. Inona no teny ifampiresahanao amin’ny mpampianatra? Fa nahoana?
2. Inona no teny ifampiresahanao amin’ny mpandraharaha eto an-tsekoly? Fa nahoana?
3. Amin’ny teny inona no ampianaran’ny mpampianatra anareo ny taranja samihafa ?
4. Azonao tsara ve sa azoazo sa tsy azonao mihitsy ireo teny entin’ny mpampianatra
mampianatra ireo? Inona no antony?
5. Amin’ny teny inona no tianao hampianarana anao ireo taranja ianaranao (taranja/teny)?
Fa nahoana?
6. Inona ny teny ampianarina anareo ao am-pianarana?
7. Ka inona amin’ireo teny ireo no hainao indrindra? Fa nahoana?
XIV
1. En quelle langue parlez-vous à vos enseignants ? Pourquoi ?
2. En quelle langue parlez-vous aux surveillants ? Pourquoi ?
3. En quelles langues vos professeurs enseignent-ils les différentes matières ?
4. Comprenez-vous bien, un peu ou pas du tout les langues utilisées par les professeurs en
classe ? Pourquoi ?
5. En quelle langue souhaiteriez-vous qu’on vous enseigne ces matières ? Pourquoi ?
6. Quelles langues vous enseigne-t-on à l’école ?
7. Laquelle de ces langues maîtrisez-vous le mieux ? Pourquoi ?
C. Représentations
1. Inona no teny tena mba tianao ho hay? Fa nahoana?
2. Ianao ve menatra miteny teny vahiny eo imason’olon-kafa? Fa nahoana?
3. Inona ny teny tena mahatafita @ fianarana? Fa nahoana?
4. Inona ny teny tena mahatafita @ asa eto Madagasikara? Fa nahoana?
5. Inona avy ireo teny tokony ho hain’ny zaza malagasy? Fa nahoana?
6. Azonao alahatra ny teny hainareo (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
7. Azonao alahatra ny teny tianao ho fehezina (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
8. Inona ny hevitrao mikasika ny fifangaroan’ny fiteny toy ny variaminanana?
- Tsara.
- Ratsy.
- Mandeha ho azy.
9. Ho anao ny teny Malagasy dia:
- Teny entina miserasera.
- Teny ampiasaina amin’ny sehatry ny asa.
- Hafa, lazao.
1. Quelle langue aimeriez-vous vraiment maîtriser ? Pourquoi ?
XV
2. Cela vous gêne-t-il de parler une langue étrangère en présence de quelqu’un (qui) ?
Pourquoi ?
3. À votre avis, quelle langue permet vraiment aux élèves de réussir leurs études ?
Pourquoi ?
4. À votre avis, quelle langue permet vraiment de réussir sur le plan professionnel à
Madagascar ? Pourquoi ?
5. Quelles sont, à votre avis, les langues que les jeunes Malgaches devraient maîtriser ?
Pourquoi ?
6. Classez par ordre de préférence les langues que vous parlez.
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
7. Classez par ordre de préférence les langues que vous aimeriez parler.
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
8. Que pensez-vous du mélange des langues comme le fran-gasy/variaminanana
(malgache/français) ?
- C’est bien.
- C’est mal.
- C’est naturel.
9. Pour vous la langue malgache est (une ou plusieurs réponses possibles) :
- Une langue de communication.
- Une langue de travail.
- Autres à préciser.
Informations sur le témoin :
Nom et prénom :
Coordonnées (tél/adresse) :
Sexe :
Age :
École fréquentée :
Classe :
XVI
Lieu d’habitation :
III- PARENTS
A. Usages de langues déclarés
1. Amin’ny teny inona no ifampiresahanareo ao an-tokatrano? Fa nahoana?
2. Mahay teny vahiny ve ianao? Inona? Taiza no nianaranao izany?
3. Miresaka @ teny vahiny @ zanakao ve ianao ao an-trano? Teny inona ary fa nahoana?
4. Mampianatra azy io teny io ve ianao sa mampanao cours azy ahaizany tsara io (ireo)
teny io (ireo) ve ianao?
5. Raha misy voam-bolana tsy azon’ny zanakao @ teny ianarany, manoro azy ve ianao?
Amin’ny fomba ahoana?
6. Ianao ve tia mamaky teny? Inona avy ireo zavatra tianao vakiana: BD?Boky?
Gazety?sns? Ary amin’ny teny inona avy izy ireo?
7. Inona ny teny manavanana anao rehefa manoratra? Fa nahoana?
8. Inona avy ireo fandaharana henoinao @ radio na jerenao @ télé? @ teny inona avy izy
ireo? Azonao azavaina ve ny antony nisafidiananao ireo fandaharana ireo sy ireo teny
ireo?
1. En quelle(s) langue(s) parlez-vous à la maison ? Pourquoi ?
2. Quelle(s) langue(s) étrangères savez-vous (parler, écrire)? Où l’ (les) avez-vous
apprise(s) ?
3. Parlez-vous en langues étrangères à vos enfants ? Pourquoi ?
4. Donnez-vous des cours de langue(s) étrangère(s) à vos enfants ? pourquoi ?
5. Si vos enfants vous demandent des explications sur des termes en langues étrangères,
est-ce que vous l’aidez ? comment ?
6. Aimez-vous lire ? quels genres de document écrits lisez-vous (BD, Magazines, …) ?
Pourquoi ?
7. En quelle(s) langue(s) préférez-vous écrire ? Pourquoi ?
8. Quelles émissions télévisées, radiophoniques aimez-vous ? pourquoi ?
XVII
C. Représentations linguistiques
1. Misy teny tsy tianao tenenin’ny zanakao ve? Fa nahoana?
2. Raranao ve izy(izy ireo) tsy hiteny io (ireo) teny ireo?
3. Inona ny teny vahiny mba tianao ho hain’ny zanakao? Fa nahoana?
4. Raha ny hevitrao, inona ny teny tokony hampianarana eto Madagasikara ao @:
- Primaire?
- College?
- Lycée?
- Université?
Fa nahoana?
5. Inona avy ireo teny tokony ho hain’ny zaza malagasy? Fa nahoana?
6. Ianao ve menatra miteny teny vahiny imason’olon-kafa? Fa nahoana?
7. Inona ny teny tena mahatafita @ fianarana? Fa nahoana?
8. Inona ny teny tena mahatafita @ asa eto Madagasikara? Fa nahoana?
9. Azonao alahatra ny teny hainareo (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
10. Azonao alahatra ny teny tianao ho fehezina (ny tianao no hataonao voalohany).
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
11. Inona ny hevitrao mikasika ny fifangaroan’ny fiteny toy ny variaminanana :
- Tsara.
- Ratsy.
- Mandeha ho azy.
12. Ho anao ny teny Malagasy dia:
- Teny entina miserasera.
- Teny ampiasaina amin’ny sehatry ny asa.
- Hafa, lazao.
1. Y a-t-il une/des langue(s) que vous n’aimez pas que vos enfants parlent ? Laquelle ?
Pourquoi ?
XVIII
2. Interdisez-vous vos enfants de parler cette/ces langue(s) ?
3. Quelle(s) langue(s) autres que le malgache aimeriez-vous que vos enfants maîtrisent ?
4. D’après vous, en quelle(s) langue(s) devrait-on enseigner :
- À l’école primaire ? pourquoi ?
- Au collège ? Pourquoi ?
- Au lycée ? Pourquoi ?
- À l’université ? Pourquoi ?
5. Quelle(s) langues devraient maîtriser les enfants Malgaches? Pourquoi ?
6. Avez-vous honte de parler des langues étrangères en public ? pourquoi ?
7. D’après-vous, quelle(s) langue(s) permet de réussir académiquement ? Pourquoi ?
8. D’après vous, quelle(s) langue(s) permet de réussir professionnellement ? Pourquoi ?
9. Classez par ordre de préférence les langues que vous parlez.
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
10. Classez par ordre de préférence les langues que vous aimeriez parler
1 ……….. 3 ………..
2 ……….. 4 ………..
11. Que pensez-vous du mélange des langues comme le fran-gasy /
variaminanana (malgache/français) ?
- C’est bien.
- C’est mal.
- C’est naturel.
12. Pour vous la langue malgache est (une ou plusieurs réponses possibles) :
- Une langue de communication ?
- Une langue de travail ?
- Autres à préciser.
Information sur le témoin :
Nom et prénoms :
Parent de l’élève :
Coordonnées (tél /adresse) :
XIX
Profession :
Sexe :
Age :
Niveau d’instruction :
Lieu d’habitation :
XX
Grille d’observation de classe
- Établissement :
- Classe :
- Nature du cours :
- Activités à reporter dans le tableau - Sigle
- Trace écrite au tableau - TET
- Trace écrite sur le cahier de l’élève - TEC
- -
- Passation de consigne (par l’enseignant) - PC
- Reformulation de la consigne par l’enseignant - REN
- Reformulation de la consigne par l’élève - REL
- -
- Interactions enseignants-élèves (pendant le cours) - IENE
XXI
- Réponses à une question de l’élève - RQE
- Explications de l’enseignant - EE
- Demande de clarification de l’élève - DCE
- Initiative propre de l’élève - IPE
- Interactions élèves-élèves - IELE
- En relation avec les cours - ERC
- Conversations privées - CP
-
Minutes Activité
s (sigles)
Langues
utilisées
Compréhen-
sion
du/des
destinataire(s)
Recours à la
traduction
Compréhen-
sion
du/des
destinataire(s)
Commentaire
-
-
- - - - - -
-
XXII
Liste des schémas
Schéma n°1 : Aménagement linguistique……………………………………………………..14
Schéma n°2 : Relation d’influence réciproque entre situation sociolinguistique, usages de
langues déclarés et représentations linguistiques……………………………………………..15
Schéma n°3 : PLE et Planification linguistique………..……………………………………..30
Schéma n°4 : Projet écologique de la pluralité linguistique malgache : les 5 environnements.31
Liste des tableaux
Tableau n°1 : Gestion in vitro et in vivo………………………………………………………10
Tableau n°2 : Enseignant-témoin……………………………………………………………..48
Tableau n°3 : Parent-témoin…………………………………………………………………..49
Tableau n°4 : Élève-témoin…………………………………………………………………...50
Table des matières
Introduction ....................................................................................................................... 1
Première partie : Cadre théorique et conceptuel de la Politique linguistique et de la
politique linguistique éducative ................................................................................................. 7
1. Politique linguistique et politique linguistique éducative ....................................... 8
1.1. De la Planification linguistique à la Politique linguistique, origine des
concepts ....................................................................................................................... 8
1.2. Les politiques linguistiques selon Calvet (1996) .......................................... 9
1.2.1. Politique et planification linguistique ...................................................... 9
1.2.2. Introduction des notions de status et corpus de Kloss (1969) dans la
politique linguistique ...................................................................................................... 9
1.2.3. Politique linguistique : l’in vitro et l’in vivo .......................................... 10
1.2.4. Instruments de la planification linguistique ........................................... 11
1.3. Les politiques linguistiques selon Chaudenson, un trinôme conceptuel ..... 11
1.4. L’aménagement linguistique selon Robillard (1997) ................................. 12
1.4.1. Aménagement linguistique : Politique linguistique, planification
linguistique ................................................................................................................ 12
1.4.2. Quatre propositions, bases de la démarche scientifique de l’aménagement
linguistique ................................................................................................................ 12
1.4.3. Quatre niveaux dans la démarche scientifique de l’aménagement
linguistique ................................................................................................................ 13
1.5. Cichon, Ehrhart et Stegu : Politique linguistique explicite et implicite ...... 15
1.6. Politique Linguistique Éducative ................................................................ 15
2. État des lieux des recherches sur la politique linguistique et la politique linguistique
éducative dans le contexte malgache ....................................................................................... 17
2.1. Sur les politiques linguistiques malgaches ................................................. 17
2.2. Sur les politiques linguistiques éducatives malgaches ................................ 18
3. Sociolinguistique, comme approche ...................................................................... 20
3.1. Plurilinguisme et Multilinguisme ............................................................... 20
3.2. Diglossie et bilinguisme : conflit, consensus et tension linguistique .......... 22
3.3. Status et Corpus .......................................................................................... 23
3.4. Représentations linguistiques et usages de langues déclarés ...................... 24
3.5. Minorisation et minoration ......................................................................... 25
3.6. Langue véhiculaire et langue vernaculaire ................................................. 26
3.7. Standardisation ............................................................................................ 27
3.8. Équipement d’une langue ........................................................................... 27
Deuxième partie : Clarification du cadrage méthodologique ......................................... 33
1. Méthodologie : Empirico-inductive qualitative .................................................... 34
1.1. Hypothético-déductive ................................................................................ 35
1.2. Empirico-inductive ..................................................................................... 36
1.3. Approche qualitative ................................................................................... 38
1.4. Interdisciplinarité, comme collaboration disciplinaire ............................... 39
1.5. Méthodes accompagnant la méthodologie empirico-inductive .................. 41
1.5.1. Observation ............................................................................................ 41
1.5.2. Description ............................................................................................. 42
1.5.3. Analyse ................................................................................................... 42
1.5.4. Comparaison .......................................................................................... 42
1.5.5. Interprétation .......................................................................................... 42
1.5.6. Compréhension ...................................................................................... 42
2. Protocole d’enquête ............................................................................................... 43
2.1. Objectif d’enquête ....................................................................................... 44
2.2. Présentation du terrain ................................................................................ 45
2.2.1. Lieu : Commune rurale de Talata-Volonondry ...................................... 45
2.2.2. Milieu éducatif ....................................................................................... 46
2.2.2.1. Trois types d’établissement : public, privé et confessionnel
catholique ......................................................................................................... 46
2.2.2.2. Approche systémique ...................................................................... 47
2.2.3. Population d’enquête .............................................................................. 48
2.2.3.1. Directeur .......................................................................................... 48
2.2.3.2. Enseignant ....................................................................................... 49
2.2.3.3. Parent ............................................................................................... 49
2.2.3.4. Élève ................................................................................................ 50
2.2.4. Période d’enquête ................................................................................... 51
2.3. Modalité de réalisation de l’enquête ........................................................... 51
2.3.1. Techniques et outils d’enquête ............................................................... 51
2.3.1.1. Observation participante ................................................................. 52
2.3.1.2. Entretien .......................................................................................... 53
2.3.1.3. Observation de classe et après-cours .............................................. 54
2.3.2. Matériel de collecte de données ............................................................. 54
2.3.3. Langue d’enquête ................................................................................... 55
Conclusion ...................................................................................................................... 56
Références bibliographiques et sitographiques .................................................................. I
Annexe ............................................................................................................................ VI
Famintinana
Ny lohahevitr’ity vinavinam-pikarohana ity dia ny politikan’ny tenim-panabeazana,
dinihina araky ny haitenim-piarahamonina amin’ny fomba fijery ekolojika. Ny lanjan-kevitra
amin’izany dia ny ahazoana ny politikam-pitantanana ny hamaroan-teny eo anivon’ny toeram-
pampianarana telo ao Talata-Volonondry dia ny sekolim-panjakana, tsy miankina ary ara-
pinoana katolika.
Ho fanatanterahana izany dia ny fomba fiasa « empirico-inductive qualitative » no fidinay
noho ny toetra saro-drafitry ny tranga dinihina. Ny fanadihadiana atao dia mikendry ny hahazo
ireo angona momba ny teny ka ahafaha-mamaritra ny sehatry ny fampiasana teny eo amin’ireo
toeram-pampianarana telo ireo, amin’ny alalan’ny fampiasana tekinikam-panadihadihana
maro. Ny talen-tsekoly, ny mpampianatra, ny ray aman-dreny ary ny mpianatra no olona
hohadihadiana.
Teny fototra : Fahamaroan-teny, politikan’ny tenim-panabeazana, laza fampiasana ny
teny, fahitana ny teny, ekolojian’ny teny.
Résumé
Le présent travail est un projet de recherche sur la thématique de la Politique linguistique
Éducative dans une approche sociolinguistique, appréhendée suivant une perspective
écologique. Il pose comme objectif la compréhension de la politique dans la gestion de la
pluralité linguistique dans trois types d’établissements de Talata-Volonondry, public, privé et
confessionnel catholique.
Pour ce faire, notre méthodologie est l’empirico-inductive qualitative compte tenu du
caractère complexe et chaoïde du phénomène étudié. L’enquête à mener vise à recueillir des
données sur la pluralité linguistique afin de décrire la situation sociolinguistique dans les trois
types d’établissement, à travers une approche systémique, par l’utilisation de diverses
techniques d’enquête. Les témoins identifiés sont les directeurs, les enseignants, les parents et
les élèves.
Mots clés : plurilinguisme, politique linguistique éducative, usages de langues déclarés,
représentations linguistiques, écologie des langues.
Abstract
The present work is a research project on the theme of educational linguistic policy in a
sociolinguistic approach, apprehended from an ecological perspective. The objective is based
on the understanding of politics in the management of linguistic plurality in three types of
institutions at Talata-Volonondry: public, private and Catholic denominational.
To achieve this goal, our methodology is empirico-inductive qualitative taking into
account the complex and chaotic nature of the studied phenomenon. The survey aims to collect
data on linguistic plurality in order to describe the sociolinguistic situation in the three types of
Talata-Volonondry institutions, through a systemic approach, by the use of various survey
techniques. The identified witnesses are directors, teachers, parents and students.
Keywords: plurilingualism, educational linguistic policy, use of declared languages,
linguistic representations, language ecology.
Coordonnées :
Nom et prénom(s) : TSITOHAINA Andriamampandry Ando
Contacts :
N° de téléphone : +261 34 28 139 34
Adresse mail : andotsitohaina@gmail.com
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