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Thème 3 – Dynamiques des grandes aires continentales.
Question 2 - L’Afrique : les défis du développement.
Introduction générale :
Longtemps laissé à l’écart du développement mondial et longtemps déconsidéré dans les représentations
géopolitiques et géoculturelles par les grandes puissances, l’Afrique devient un espace convoité et riche de
contrastes et de ressources : le continent vient de passer le milliard d’habitants. Si une partie du continent est
encore touchée par les conflits, les situations de mal développement (famines, malnutrition), et si les
dictatures ont souvent dominé, le développement durable semble s’y enraciner et de nouveaux systèmes
politiques émerger. Les richesses du sol et du sous-sol sont mieux explorées et exploitées, participant à
l’intégration économique mondiale, alors qu’internet et le téléphone mobile le relient au reste du monde.
Cependant les déséquilibres sont parfois dramatiques au niveau des populations, de même que ce sont
souvent les investisseurs étrangers qui profitent de l’essentiel des richesses. L’Afrique du Sud reflète à elle
seule les contrastes de ce vaste continent et est le symbole de ses mutations actuelles. Le pays fait partie des
BRICS et est la 1ère
puissance économique et politique africaine, mais subit une société et un territoire
fragmentés, héritage d’un passé colonial et dans un contexte d’entrée rapide dans le processus de
mondialisation.
Quelle est la situation de l’Afrique face aux questions de développement ? Quels défis démographiques,
économiques, environnementaux et politiques l’Afrique doit-elle encore relever ?
Notions-clés
Mal-développement : la notion renvoie au déficit qualitatif du développement associé à une mauvaise gestion
politique et économique (corruption, clientélisme), et à une mauvaise répartition des richesses entre populations
(dimension sociale) et entre territoires (dimension spatiale). Dans les États du Maghreb, riches en ressources
énergétiques, les revenus auraient pu contribuer davantage au développement des économies locales et au mieux-être
des populations.
Économie de rente : la richesse du pays est fondée sur l’exploitation d’une ou de quelques ressources privilégiées (le
pétrole, le gaz, le plus souvent), ce qui produit fréquemment des tensions entre ceux qui les détiennent et les autres. En
Algérie, le développement urbain des villes sahariennes a pu se faire grâce à la rente pétrolière et l’essence est très bon
marché dans tout le pays ; cependant, cette richesse est étroitement liée aux cours du brut sur les marchés inter-
nationaux et elle suscite la convoitise des investisseurs étrangers – chinois en particulier.
Enjeu géopolitique : l’expression renvoie aux conflits et tensions entre acteurs dans des territoires déterminés ; par
exemple entre États (entre le Soudan et le Soudan du Sud), ou entre groupes et États (cas des conflits touarègues). On
y intègre aussi les acteurs internationaux (grandes puissances, organisations internationales comme l’ONU ou FTN)
qui interviennent localement. L’exemple de la révolution et de la guerre civile libyenne illustre bien cette association
d’acteurs et d’échelles.
Chapitre 1 - Le Sahara : ressources, conflits (étude de cas).
Introduction :
Le Sahara est un espace de fortes contraintes physiques, mais disposant de vastes ressources. Le nom même,
al-sahra (désert), de cet immense espace (8,5 millions de km²) suggère la contrainte radicale de l’aridité.
Peu peuplé hormis le couloir du Nil, il dispose de ressources, principalement souterraines et il est aussi
propice à un tourisme d’aventure contrarié par une insécurité endémique. C’est un ensemble politiquement
fractionné, source de contestations par les populations locales, de revendications territoriales, de conflits et
de mouvements de populations réfugiées. Pour les États du Maghreb ou du Machreq tournés vers la
Méditerranée, les territoires sahariens constituent des arrières pays en voie d’intégration, et parfois
l’enclavement s’ajoute à l’aridité. C’est enfin un espace convoité entre de multiples acteurs internes à
l’Afrique ou extérieurs : zones d’influence, contrôles de territoires, exploitation de ressources. Ces
convoitises se manifestent dans les investissements étrangers et s’expriment dans des conflits intra et
interétatiques dont les populations subissent les effets, conjugués à ceux de la mal gouvernance. Quels sont
les enjeux économiques et géopolitiques de l’ensemble saharien au regard des ressources qu’il recèle ?
I - Les ressources du Sahara sont-elles moteur du développement ?
→ Des ressources abondantes qui profitent peu aux populations sahariennes
A/ Le Sahara est un espace contraignant et peu peuplé mais qui dispose de nombreuses ressources.
Le poids démographique, économique et politique des régions littorales et urbanisées, où se situent les
capitales et les grandes villes, contraste avec les faibles densités du Sahara, peuplé par des groupes
minoritaires. Longtemps considéré comme une marge peu développée, laissée aux oasiens et aux nomades,
le Sahara a suscité récemment l’intérêt des États, notamment depuis la découverte des ressources de son
sous-sol qui sont en grande partie destinées aux villes littorales.
B/ Ressources alimentaires et aménagements hydrauliques variés mais qui profitent peu.
La mise en valeur des ressources en eau, par des équipements modernes puisant dans la nappe fossile non
renouvelable, pose la question de la durabilité. Ces aménagements nécessitent aussi de lourds
investissements, au détriment de l’agriculture oasienne traditionnelle des paysans qui peut être menacée.
L’agriculture des périmètres irrigués est destinée aux citadins et à l’exportation, alors que les rivières
artificielles libyennes alimentent le littoral. Ainsi, le décalage est grand entre les aménagements étatiques et
leurs retombées pour la population saharienne.
C/ L’exploitation des énergies n’impulse pas le développement.
L’exploitation du pétrole, du gaz et des ressources minières génère des revenus considérables pour les États,
mais se développent en parallèle, et non en complémentarité, des activités locales. Ainsi, les signes de faible
développement persistent : faible IDH, fort taux de chômage et de pauvreté. Au sud, la mise en valeur des
ressources est moindre, plus récente et les ressources sont moins diversifiées, ce qui explique le mal-
développement et l’insécurité alimentaire persistante.
II - Pourquoi le Sahara est-il un espace géopolitique fractionné ?
→ Le Sahara est une zone d’instabilité sous dépendance
A/ Le Sahara est un espace politiquement instable.
Le Sahara a connu ces dernières décennies des conflits interétatiques, des attentats et des guerres civiles.
L’absence de démocratie a conduit aux révolutions de 2011. Dans le cas de la Libye, cette révolution s’est
accompagnée d’une guerre civile et du soutien militaire aux insurgés de la France, de l’Angleterre et des
États-Unis. Ces conflits provoquent des morts et des blessés dans la population civile, mais aussi des
déplacements de population qui trouvent refuge dans les camps de réfugiés, où les conditions de vie sont
extrêmement difficiles.
B/ Les tensions sahariennes dépassent les frontières de la région.
La dimension humanitaire, le rôle de l’ONU dans la gestion des camps de réfugiés ou pour l’observation des
conflits, font que les enjeux dépassent à nouveau les frontières de la région saharienne. La dimension
économique explique aussi l’intérêt que les États étrangers portent à la région, à l’exemple de l’uranium du
Niger exploité par Areva. Enfin, la dimension sécuritaire, liée aux deux précédentes, fait du Sahara un
espace stratégique : aux trafics d’armes et de drogue s’ajoutent le phénomène des migrations et la menace
terroriste qui inquiètent au plus haut point la communauté internationale.
C/ Longtemps à la marge, l’espace saharien est au cœur de la géopolitique internationale.
Pour tenter de limiter les migrations clandestines, l’Europe a établi une barrière de surveillance et négocie
avec les États sahariens le contrôle des migrations, ce qui se traduit par des mesures de répression à
l’encontre des migrants emprisonnés dans des camps d’internement. Les FTN sont aussi concernées par le
terrorisme d’Al-Aqmi, qui s’est concrétisé par des attentats et des enlèvements. Or, le terrorisme s’exporte
aussi hors du Sahara et la sécurisation de la zone, par le biais d’accords de coopération militaire, est une
préoccupation des États étrangers qui y ont des intérêts. Elle pose la question de la mise sous dépendance du
Sahara.
III - Pourquoi le Sahara est-il un espace convoité ?
→ L’accès aux ressources entraîne des tensions à toutes les échelles
A/ Les États et les FTN profitent le plus de ces ressources.
Captée par les États, la rente pétrolière est source de violence pour la population : peu redistributeur de
revenus, le système de rente explique en partie les tensions locales ou la contestation de ceux qui s’estiment
laissés pour compte. Les investissements des FTN sont également peu destinés aux populations locales et
peuvent être en concurrence avec celles-ci, comme pour le tourisme. Les FTN sont surtout intéressées par
l’exploitation des hydrocarbures ainsi que le montre la forte présence chinoise en Algérie ou au Soudan.
Leurs investissements se négocient avec des États caractérisés par des pratiques de corruption et le
clientélisme.
B/ Des conflits sont générés, directement ou indirectement, par ces ressources.
L’eau et l’agriculture suscitent des conflits d’usage et des tensions interethniques au sein des États. À
l’échelle régionale, ce sont encore les ressources énergétiques, ou l’espoir de découvrir des ressources
minières ou en hydrocarbures, qui expliquent en grande partie les conflits armés régionaux et la convoitise
sur les territoires des États voisins. Le conflit du Sahara Occidental entre le Maroc et l’Algérie ou la guerre
de la Bande d’Aozou, entre le Tchad et la Libye qui espérait y trouver du pétrole, ou encore la guerre entre
le Nord et le Sud Soudan, témoignent de l’enjeu stratégique que représentent ces ressources.
C/ L’essor des trafics au Sahara a pris une ampleur internationale.
Face à cette situation tendue, à l’échec des politiques de développement local et à des conditions de vie
difficiles, certains groupes ont mis en place des activités illicites, voire criminelles, bien que protégées par
les responsables politiques et militaires. Les trafics de drogue, d’armes et de contrebande sont mis en œuvre
par des réseaux mafieux, bien au-delà des frontières sahariennes même si certaines villes, au cœur du
carrefour, sont des plaques tournantes de ces trafics.
Chapitre 2 - Le continent africain face au développement et à la mondialisation.
Introduction :
[Accroche] Continent en devenir, l’Afrique est un espace de défis multiples qui connaît une évolution
actuelle rapide face à la mondialisation, alors que les inégalités de développement à toutes les échelles sont
encore très prégnantes.
[Enjeux, limites…] Longtemps mise à l’écart du développement et mise en situation de dépendance extrême
vis-à-vis des puissances occidentales riches, l’Afrique a cumulé de lourds handicaps sur les plans
économique, sanitaire, démographique, politique ou encore alimentaire. Qu’il s’agisse du Sahel, pour lequel
le géographe et agronome René Dumont (premier candidat écologiste aux présidentielles en 1974) avait
lancé une célèbre alerte (Pour l’Afrique, j’accuse !), ou de quelque autre partie du continent, les éléments de
dynamisme ont toujours été présents mais mal développés et mal exploités. Aujourd’hui en pleine expansion
démographique (1 milliard d’habitants), urbaine (villes multimillionnaires : Lagos, Le Caire…),
économiques (ressources d’une grande diversité et richesse), et alors que les vieux conflits politiques
semblent s’apaiser, l’Afrique entre de plain-pied dans la mondialisation et est appelée à y jouer un rôle
majeur d’ici peu.
[Problématique] À quels défis l’Afrique est-elle confrontée face aux défis de la mondialisation et du
développement ?
Plans possibles :
I - Un continent à l’écart du développement et du monde ? I – L’Afrique face aux défis du développement.
II - De nouvelles perspectives pour l’Afrique ? II – Un continent en transition, entre conflits et tensions.
III - Mais encore de nombreux défis à relever. III – Face à la mondialisation : une ou des Afriques ?
I – L’Afrique face aux défis du développement.
A/ Sortir de « la décennie du chaos ».
Selon l’expression consacrée de la géographe Sylvie Brunel, l’Afrique a traversé durant les années 1990 une
décennie de conflits socio-économiques, politiques, militaires liés au mal-développement et au sous-
développement, et au pillage des ressources du sol et du sous-sol par les entreprises étrangères et au profit de
potentats locaux (dictateurs, familles dirigeantes, dynasties, hiérarchies militaires…).
En effet, le continent cumule les indicateurs les plus faibles au monde, signes d’un état de désœuvrement
politique et économique : l’IDH moyen est de 0,46 c’est-à-dire faible et l’on trouve en Afrique 33 des 48
PMA du monde.
Dans ce cadre économique, les structures sont fragiles, avec une faiblesse de l’industrie, des infrastructures
et une quasi absence de nouvelles technologies. Le secteur informel est très présent et assure la survie d’un
grand nombre. Paradoxalement, ce sont ces réseaux illicites qui parasitent l’économie et les investissements
productifs, et aujourd’hui plus de 40% de la population africaine reste en-dessous du seuil mondial de
pauvreté (1,25 dollar/jour).
B/ De forts obstacles au développement.
Alors que la majeure partie des pays africains sont encore dans la transition démographique, leur population
augmente rapidement : elle atteint le milliard d’habitants aujourd’hui en majorité de moins de 15 ans (41%).
Dans le même temps, l’espérance de vie est très faible (55 ans contre 78 ans en France par exemple) par
rapport à la moyenne mondiale (68 ans), pourtant la mortalité baisse relativement. Si la lutte contre le
paludisme depuis les années 1950 porte ses fruits, les très nombreuses guerres des années 1990 et la
pandémie du Sida ont largement fait reculer l’espérance de vie : Rwanda, Sierra Leone, Botswana ont des
taux très faibles. Le sida touche près de 4% de la population du continent contre 0,8% pour l’ensemble du
monde. Le nombre d’enfants par femme reste très fort en Afrique subsaharienne (7 à 8) mais est plus faible
dans les villes et dans les pays arabes de l’Afrique (2 à 3/femme).
Cette population doit faire face à de graves problèmes sanitaires :
D’une part rares sont les réseaux d’égouts et d’assainissement performants : en Afrique subsaharienne, seuls
31% de la population sont raccordés à une installation de base, contre 89% en Afrique du Nord.
D’autre part l’accès à l’eau potable n’est pas assuré pour la majorité, d’autant que l’urbanisation rapide et
anarchique ne résout pas les problèmes, au contraire : les bidonvilles s’étendent et se densifient, 62% des
habitants des villes d’Afrique subsaharienne y vivent. Cette extrême pauvreté se traduit aussi par une sous-
alimentation importante. 230 millions d’habitants connaissent la malnutrition et les émeutes de la faim sont
récurrentes : c’est le fait d’agricultures d’exportation exclusivement (cacao, café, coton) qui détruisent
l’environnement et font délaisser les agricultures vivrières : l’érosion des sols, la déforestation, la
désertification ont des conséquences dramatiques.
Enfin, les conflits armés touchent plus de 20% de la population, notamment des jeunes qui sont
instrumentalisés par les chefs de guerre, dans le cadre de luttes tribales (Somalie) et/ou religieuses (Éthiopie,
Mali, Niger, etc…), pour la prise de contrôle des « diamants de sang » (trafics de diamant en Angola,
Libéria, RDC), ou du pétrole (Sud Soudan et Darfour, Tchad) : ces guerres entrainent invariablement des
famines régulières aggravées par le manque d’infrastructures d’encadrement social.
Toutes ces raisons expliquent pour beaucoup le très fort taux de mortalité infantile : 78‰ en Afrique
subsaharienne.
C/ Les leviers actuels du développement.
Dans un premier temps, les villes sont un levier de développement. La croissance urbaine prend son essor
dans les années 1950, passant de 15% d’urbains à 40% aujourd’hui. Une forte accélération s’est produite au
moment des décolonisations au début des années 1960, créant de gigantesques mégapoles : Le Caire, Lagos,
Abidjan, Kinshasa, Johannesburg. Lagos et le littoral du Golfe de Guinée sont l’un des lieux les plus peuplés
d’Afrique. On considère qu’à ce stade, le taux de 50% d’urbains sera dépassé en 2030.
L’urbanisation est un atout de développement : les conditions de vie sont meilleures en ville qu’à la
campagne, l’accès à la santé, l’eau potable, l’éducation, les services, les technologies y sont moins difficiles.
Ensuite, c’est la démocratisation qui semble depuis la fin des années 2000 s’affirmer. Le premier exemple
fort est le passage d’une société de ségrégation en Afrique du Sud à la « nation arc-en-ciel » des vœux de
Mandela et Frederik de Klerk . Mais en 2011 la fin des dictatures en Tunisie, Libye, Égypte, l’instauration
de la démocratie au Ghana, des élections libres organisées au Libéria en 2006 avec Ellen Johnson-Sirleaf
devenue 1ère
femme présidente sur l’ensemble du continent africain. Prix Nobel de la paix en 2011, elle est
l’emblème d’une avancée dans la scolarisation des femmes, et d’une amélioration des conditions des
femmes, très relative toutefois. Aujourd’hui encore, les dictatures sont plus nombreuses que les démocraties.
D’autre part, on trouve des taux de croissance assez forts dans plusieurs pays africains : entre 2 et 6%, ce qui
permet une intensification des échanges et du commerce. Ici, les PAS (plans d’ajustement structurels du
FMI) ont permis une réduction de la dette des États et ont encouragé la suppression des droits de douane. La
contrepartie est bien sûr la forte concurrence des produits importés de l’étranger qui pénalisent les
producteurs et artisans locaux.
Cependant les déséquilibres de développement sont très forts, entre États et au sein des États : l’Afrique du
Sud représente à elle seule 23% du PIB du continent, puis vient l’Égypte, le Nigéria et l’Algérie (10%
chacun), enfin la Libye, Maroc, Angola, Éthiopie et Tunisie (5%). De ce fait l’aide internationale au
développement apportée par le FMI, la Banque mondiale et autres institutions reste capitale, bien que
plongeant le continent dans une situation de grande dépendance.
II – Un continent en transition, entre conflits et tensions.
A/ Vers le décollage économique.
Plusieurs pays africains connaissent une croissance moyenne de 5% par an dans la décennie 2000-2010, ce
qui fait dire à certains que la situation du continent est identique à celle de l’Asie des années 1970 avec
l’émergence des 4 Dragons du fait de la combinaison de la croissance démographique, de l’urbanisation, de
la hausse du cours des matières premières, etc.
Dans ce contexte, une classe moyenne émerge, et c’est classiquement sur elle que la croissance s’appuie :
environ 100 millions d’individus en Afrique, essentiellement urbains et jeunes : c’est cette classe qui attire
les investisseurs et les FTN. Cependant cette classe est encore faible et les économies encore trop
dépendantes du secteur primaire (matières premières), et du secteur informel.
L’Afrique s’appuie donc sur ses immenses réserves en hydrocarbures et en minerais : Algérie, Libye,
Nigéria, Angola disposent de réserves prouvées abondantes en pétrole et gaz ; le Ghana et le Mali disposent
d’or ; l’Afrique du Sud et la Sierra Leone de diamants ; la Mauritanie de fer ; le cuivre de Zambie ; la
bauxite de Guinée, l’uranium du Niger, mais aussi les bois tropicaux (Gabon, Congo).
La plupart de ces ressources sont très convoitées du fait de la très forte demande mondiale donc c’est un
enjeu stratégique pour la plupart des pays africains rentiers : les pays producteurs sont avant tout des
économies de rente, et sont donc dépendants des cours mondiaux. Ils n’ont fait que peu d’investissements
dans les autres domaines d’activité et n’anticipent quasiment pas sur l’avenir et l’épuisement des ressources.
Pourtant si les États sont riches de ressources du sous-sol, leur populations sont souvent pauvres voire très
pauvres : la redistribution des richesses se fait donc mal.
Enfin, l’autre ressource essentielle des pays africains est l’agriculture qui profite d’immenses étendues
cultivables et de grandes ressources en eau : présence de fleuves majeurs (Nil, Niger, Orange, Sénégal,
Congo, Zambèze) et de grands lacs (Malawi, Victoria, Tanganyika, Turkana, Tchad, …). Cependant les
rendements actuels sont faibles par manque de moyens et de techniques adaptées (irrigation, machines-outils
performantes, engrais…) : l’autosuffisance alimentaire est loin d’être assurée.
Aujourd’hui de trop nombreux obstacles sont à surmonter pour sortir plus rapidement du sous-
développement : infrastructures routières et ferroviaires faibles, régions très enclavées, manque d’électricité
grave en regard des potentialités en hydroélectricité.
De plus, l’intégration régionale est encore très faible du fait de frontières très fermées du fait de conflits et
tensions : les échanges économiques transfrontaliers sont faibles, et si les organisations régionales existent,
elles n’ont que peu de poids encore.
Enfin, les économies sont très peu développées, outre le secteur primaire : la plupart des pays sont des
« pays carrières » qui ne font qu’extraire les matières premières sans même les transformer du fait d’un
secteur industriel basique.
B/ Des tensions et conflits perpétuels…
Plusieurs pays connaissent des périodes d’instabilité de longue durée, la Somalie en étant un exemple
parlant : en guerre civile depuis 1991 du fait de conflits tribaux, le pays n’a plus connu de gouvernement
légitime depuis plus de 20 ans et la situation économique, sanitaire, sociale et alimentaire est totalement
détériorée. C’est de ce pays que la piraterie maritime s’est intensifiée autour de la Corne africaine sur la
route du détroit de Bab al-Mandeb et autour du Yémen. Malgré les interventions extérieures, humanitaires
ou armées, la Somalie reste en guerre : l’opération américaine « Restore Hope » en 1992, celle de l’ONU,
n’ont rien donné à ce jour.
Les conflits sont donc un facteur aggravant de sous-développement : le Libéria a connu plusieurs années de
guerre civile et ne se reconstruit que depuis 2006 alors que ses structures politiques, financières, éducatives,
sanitaires, etc. étaient réduites à rien.
Enfin les conflits touchent souvent plusieurs pays à la fois, du fait de déplacements massifs de population :
ainsi lorsque le Darfour connaît depuis 2008 un conflit lié à l’exploitation du pétrole, des centaines de
milliers de réfugiés quittent le Soudan pour le Tchad voisin, à son tour déstabilisé.
C/ … qui engendrent tensions sociales et environnementales.
Les sociétés sont très marquées par les guerres, notamment dans les pays où les enfants ont été embrigadés
(Sierra Leone, Libéria en particulier). De plus sur les deux dernières décennies les orphelins se comptent en
dizaines ou centaines de milliers, du fait des guerres et épidémies (palu, sida) et vivent dans les rues, surtout
dans les capitales où ils espèrent mendier plus facilement : à Kinshasa en RDC, à Ndjamena au Tchad, à Dar
es Salam en Tanzanie, Monrovia au Liberia, etc.
Par ailleurs les tensions ethniques ou religieuses débouchent sur des situations de crises extrêmes : au
Rwanda avec le génocide des Hutus contre l’ethnie minoritaire Tutsi en 1994 ; en Côte-d’Ivoire, Mali,
Nigéria, Éthiopie, etc. ce sont des conflits religieux entre chrétiens et musulmans qui aboutissent à des
situations politiques difficiles : par exemple en Côte d’Ivoire le président Laurent Gbagbo prétend conserver
le pouvoir à l’issue d’un scrutin défavorable en 2010 face à son opposant Alassane Ouattara. A ces tensions
s’ajoutent le rejet toujours très fort de populations venues des pays voisins : la xénophobie est une donnée
sociale importante dans quelques pays africains, en particulier Côte-d’Ivoire, Kenya, Afrique du Sud.
Enfin nombre de pays connaissent des situations de malaise social intense du fait de situations économiques
et alimentaires catastrophiques : le taux de chômage est globalement supérieur à 50% parmi les jeunes
d’Afrique subsaharienne, mais reste encore très élevé en Afrique du Nord (près de 40%) qui ne tire pas
vraiment son épingle du jeu : le manque de débouchés, associé à la corruption généralisée des classes
politiques et économiques ont été le facteur déclenchant des vastes émeutes des Printemps arabes en Tunisie,
Égypte et Libye en 2011 pour plus de démocratie et de libertés. Cependant les victoires de ces mouvements
sont aujourd’hui plus que relatives face à la récupération par des élites religieuses extrémistes en Égypte et
en Tunisie, ce qui pousse certains à reprendre le flambeau de la révolte. Et à la même époque, entre 2008 et
2011, les mêmes pays ont connu de véritables émeutes de la faim du fait de l’augmentation très forte du prix
des matières premières et denrées de première nécessité.
D’un autre côté, l’Afrique est un continent traversé de tensions environnementales menaçant les
écosystèmes du continent, et du monde de par l’ampleur des impacts mesurés. Dans un premier temps, c’est
l’exploitation des matières premières qui crée une situation dramatique avec la présence de mines à ciel
ouvert exploitées sans prudence ni prévention : les pollutions connues sont déjà d’une ampleur
catastrophique alors que les gouvernements et les FTN étrangères qui exploitent les sites masquent
largement la réalité des phénomènes : fleuves, rivières, nappes phréatiques sont parfois polluées à l’extrême
alors que les populations de villes entières vivent de ces eaux souvent distribuées sans système
d’assainissement. Les littoraux sont épuisés par de multiples marées noires, en particulier dans le Golfe de
Guinée, mais les contrôles sur les navires poubelles sont quasi inexistants : ce sont des milliers de pêcheurs
qui ne peuvent plus travailler et des millions de personnes qui ont un accès toujours plus limité aux
ressources halieutiques. Et pour finir, la plupart des entreprises, africaines ou étrangères exploitent souvent
une main-d’œuvre très bon marché, l’Afrique devenant en cela l’un des nouveaux eldorados de la
délocalisation, la Chine en tête. Ce même Golfe de Guinée est aujourd’hui sur la liste des espaces menacés
gravement par une possible montée des eaux du fait d’un réchauffement climatique, or cela concerne l’un
des espaces les plus peuplés du continent, autour de la capitale du Nigéria (Lagos : 8 millions d’habitants).
Les ONG africaines et internationales (type Greenpeace) n’ont encore que peu de poids face aux grands
exploitants de ressources minières, forestières ou pétrolières venus du monde entier.
III – Face à la mondialisation : une ou des Afriques ?
A/ La place de l’Afrique dans la mondialisation.
La plupart des États d’Afrique sont des économies de rente, basées sur leurs ressources du sous-sol et du sol,
et ce sont des économies extraverties, c’est-à-dire qu’elles échangent davantage avec l’étranger qu’entre
elles et sont tournées essentiellement vers l’exportation et très peu vers les marchés intérieurs, cela du fait de
plusieurs facteurs.
En effet, les États ne contrôlent en fait ni capitaux, ni technologies, ni le marché, ni les prix qui sont fixés et
détenus généralement par les acteurs économiques des pays riches (EU, UE, Japon) et de plus en plus par les
pays émergents (Chine, Brésil) et les États pétroliers du Golfe arabo-persique (Qatar, Émirats).
L’Afrique ne représente que 3,5% à 4% du commerce mondial de marchandises, et il s’agit quasi
exclusivement de produits non transformés (donc des matières premières : pétrole et minerais en tête) Les
premiers partenaires de l’Afrique sont la Chine, l’Europe et les EU qui viennent exploiter les ressources
africaines avec leurs propres technologies, souvent leur propre personnel technique et leurs cadres, ce qui ne
contribue que très peu au développement de l’emploi industriel en Afrique. Ces investisseurs étrangers ont
pour objectif une poignée de pays (10) et y développent largement leurs activités depuis le début des années
2000 : Afrique du Sud, Égypte, Ghana, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Angola, Nigéria ou Kenya qui
captent les 2/3 des IDE. Les pays émergents se distinguent donc de plus en plus en Afrique, notamment
Chine et Brésil, récemment pour l’achat de terres agricoles. Mais ces pays investissent également dans les
infrastructures (ferroviaires surtout) pour désenclaver les pays d’Afrique e t en faire des pôles stratégiques
dans les années à venir.
De ce fait, les migrations à travers l’Afrique sont importantes mais elles se font surtout entre pays africains,
et finalement peu en direction de l’Europe ou des EU. Les migrations de travail se font entre pays
frontaliers : les plus pauvres vont le moins loin, et ce sont au contraire les plus riches et les mieux éduqués
qui parviennent à quitter l’Afrique pour les pays riches d’Occident. Trois pays se distinguent dans l’accueil
d’immigrés, Libye, Afrique du Sud et Côte d’Ivoire, voyant arriver des populations cherchant un meilleur
cadre de vie. L’autre situation de migration qui prévaut en Afrique est bien sûr la déshérence, c’est-à-dire la
fuite face à des situations insupportables (guerres, famines, épidémies), mais ce type de migration se fait
entre pays d’Afrique subsaharienne (migrations Sud-Sud).
Au final, la majeure partie des pays africains est enclavée et faiblement insérée à la mondialisation :
- accès internet faible malgré les progrès récents. Ce sont les pays du Maghreb les mieux connectés
(jeunes notamment avec les réseaux sociaux qui peuvent jouer le rôle de tribune politique dans les
dictatures lors des Printemps arabes), alors que les pays d’Afrique subsaharienne restent mal reliés et
pour des tarifs très élevés. Les disparités sont donc fortes entre Maghreb et Afrique du Sud qui
concentrent la moitié des internautes, et le reste de l’Afrique.
- Ports à faible capacités, mal reliés aux arrière-pays, peu d’infrastructures, peu de multimodalité : les
ports les plus développés sont Durban en Afrique du Sud et Tanger au Maroc.
- Même si les échanges avec l’Asie (Chine, Inde) se développent, les pays africains n’ont pas su
encore adapter leurs capacités portuaires et leurs réseaux de transport pour gérer l’afflux de
marchandises.
Les réseaux illégaux restent en fait très puissants à travers l’Afrique qui joue le rôle de plaque tournante
internationale entre aires productrices et aires de consommation : la cocaïne produite en Amérique latine
transite par le Mali ou le Nigéria avant d’arriver en Europe. De plus les contrebandiers et le braconnage sont
choses courantes car les États africains ne peuvent investir beaucoup dans les services de surveillance et
sécurité : le trafic d’ivoire, de pierres précieuses ont de belles années de développement encore. À cela
s’ajoute le trafic d’armes, massif en Afrique, mais aussi d’êtres humains pour la prostitution ou pour le trafic
d’organes. Enfin, de même qu’en Inde pour les carcasses de navires, les pays africains jouent le rôle de
recycleurs de déchets informatiques et de médicaments, avec le risque extrême de contaminations diverses
aux produits à haute toxicité.
B/ L’Afrique est bien un nouvel acteur de la géopolitique mondiale.
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme international, les EU et l’Europe surveillent de plus en plus
quelques régions africaines, et en particulier le Sahara et la Somalie qui abritent de multiples bases affiliées
à al-Qaïda, ou à la piraterie maritime. Ainsi au large de la Somalie patrouillent les flottes américaine et
française notamment pour surveiller l’entrée de la Mer rouge, passage stratégique vers le canal de Suez et
route du pétrole importante.
D’autre part les littoraux africains s’avèrent de plus en plus des espaces intéressant le commerce
international car ils peuvent jouer le rôle d’interface entre Amérique et Asie. Mais c’est avant tout pour ses
ressources que le continent est aujourd’hui l’une des aires les plus convoitées au monde et le sera davantage
dans le futur : l’Afrique détient 12% des réserves mondiales de pétrole, 60% des réserves de terres
cultivables, elle possède le 2e espace forestier au monde, et actuellement elle détient 80% des réserves de
coltan : minerai utilisé dans la fabrication de composants pour les téléphones portables et appareils
électroniques de grande diffusion.
Enfin, dans la production minière mondiale, l’Afrique du Sud en particulier détient les premières et
deuxièmes places mondiales pour le platine, chrome, or, manganèse ou titane, la RDC est le premier
producteur de diamant et de cobalt… Il s’agit bien là du nouvel eldorado minier mondial.
C/ Les Afriques : un continent d’inégalités.
Les contrastes sont très marqués dans tous les domaines, si bien qu’il faut parler plus justement des
Afriques.
D’abord, au niveau des densités et de la répartition des populations, le contraste est majeur entre zones de
très forte densité sur les littoraux : Golfe de guinée, littoral maghrébin, région des grands lacs. A l’inverse,
des régions vides de population : déserts du Sahara ou de Namibie, forêt tropicale d’Afrique centrale.
Deuxième contraste, celui de la mosaïque linguistique et culturelle : s’il y a 6 grandes langues officielles
(anglais, arabe, français, portugais, espagnol et swahili), il existe des centaines de langues et dialectes à
travers les 54 États qui composent ce continent. Mais surtout il existe de très nombreuse ethnies dont la
répartition fût souvent très mal opérée par les colonisateurs qui tracèrent les frontières au mépris des
territoires tribaux et ethniques, ce qui est aujourd’hui source de graves tensions du Nord au Sud du
continent. Enfin les religions sont très diverses, outre les deux grands monothéismes qui dominent
(christianisme et islam) il existe une multitude de pratiques religieuses (animisme, vaudouisme, fétichismes
divers), quasiment autant que d’ethnies : on parle généralement de religions traditionnelles de l’Afrique.
Celles-ci se teintent parfois de pratiques chrétiennes ou musulmanes (syncrétisme religieux).
Le troisième contraste est celui du climat et des paysages : en effet, sur 7600km d’Est en Ouest et 7000km
du Nord au Sud, la variation climatique est ample et les paysages aussi extrêmes que désert au climat aride
et sec et forêt tropicale au climat très humide accompagnée de mousson.
Hormis ces contrastes géographiques et culturels, le continent semble partagé économiquement en trois :
- L’Afrique émergente, celle de l’Afrique du Sud, la seule puissance complète du continent, intégrée à
la finance mondiale autour de la place de Johannesburg.
- Les puissances régionales, comme le Nigéria, l’Égypte, les pays du Maghreb, l’Éthiopie et la Côte-
d’Ivoire qui ont un fort potentiel de développement, mais qui connaissent pour certains depuis 2011
une période de grande mutation socio-politique (Printemps arabes).
- Les pays de l’Afrique subsaharienne, majoritairement des PMA : économies rentières, totalement
dépendantes, parfois en situation critique, et certaines enclavées (sans accès à la mer ni aux axes
majeurs d’échanges).
On peut enfin distinguer une Afrique rurale, très pauvre, en grande détresse et éloignée de tout service et
accès aux soins, éducation, etc.. et une Afrique urbaine où les classes moyennes se forgent et s’associent aux
diasporas étrangères (libanais, indiens, chinois) : au Kenya, Ghana, …alors qu’à l’inverse les populations
des bidonvilles sont les laissés pour compte et les candidats à la migration.
Chapitre 3 – L’Afrique du Sud, un pays émergent.
Introduction :
[Accroche] Première économie du continent africain et pilier de son développement, l’Afrique du Sud est
l’emblème de la sortie possible du mal-développement et de l’entrée dans la mondialisation, en tant que
nouvel acteur de la scène globale dans de nombreux domaines.
[Limites, enjeux, acteurs] Depuis la fin de l’apartheid (« séparation » en afrikaner) en 1991 et l’accession de
Nelson Mandela à la présidence en 1994, la « nation arc-en-ciel » fait figure d’exemple de réussite à
l’échelle régionale, continentale et mondiale avec son entrée dans le club des BRICS à la fin des années
2000. Cependant si le pays est un pivot politique et économique du continent, attirant touristes et
investisseurs du monde entier (Coupe du Monde de football en 2010), il est encore le lieu de criantes
inégalités qui entretiennent les violences, la ségrégation raciale laissant place à une ségrégation sociale et
alors que la question sanitaire reste un enjeu crucial (sida par exemple). Autour de quelques métropoles
(Johannesburg, Pretoria) se constitue une vitrine nouvelle pour le pays désormais inclus à l’archipel des
métropoles mondiales mais en réalité encore sérieusement fragmenté au niveau économique et social.
[Problématique] Quelles sont les caractéristiques de l’émergence économique de l’Afrique du Sud ?
I – L’Afrique du Sud, pays émergent aux inégalités fortes.
A/ La première économie du continent africain.
La puissance économique de l’Afrique du Sud s’est d’abord construite sur les richesses de son territoire, en
minerais principalement : le pays est passé d’une situation d’économie de rente à une situation de puissance
industrielle complète grâce à une diversification.
À l’origine, l’AS a su exploiter les vastes richesses minières en or et diamants, charbon et fer, éléments très
demandés sur le marché mondial. Le pays a su mettre en valeur ces richesses et s’est appuyé pour cela sur
une main-d’œuvre noire facilement exploitable et peu chère venue de tout le sud du continent africain. Ce
secteur des matières premières a donné naissance à de puissantes firmes et ont assuré la prospérité du
secteur financier. Sur les 500 premières entreprises africaines, 127 sont sud-africaines, et présentes dans tous
les domaines (électricité, téléphonie mobile, grande distribution, …). Aujourd’hui les secteurs minier et
industriel constituent encore les 2/3 du PIB sud-africain.
Le secteur minier assure la moitié des exportations du pays autour de FTN puissantes (Anglo Platinum, De
Beers), le reste étant composé des produits industriels et de l’agroalimentaire : céréaliculture intensive et
élevage intensif, vastes cultures tropicales destinées à l’exportation car l’AS est aujourd’hui autosuffisante.
Mais l’essentiel des zones cultivables est détenu par les grands propriétaires terriens dont les exploitations
immenses sont un héritage colonial. A l’inverse l’AS importe surtout des produits manufacturés dont les
deux premiers fournisseurs sont l’UE, les États-Unis et de plus en plus la Chine : ces pays sont également les
principales destinations des exportations sud-africaines.
Par ailleurs, le secteur tertiaire s’est développé autour du tourisme, haut de gamme en particulier : safaris
dans les parcs nationaux, tourisme littoral fort. Et les services connaissent un essor considérable, ainsi que le
domaine de la recherche biomédicale qui donne lieu à un tourisme médical venu de tout le continent.
Au final, l’AS est une économie émergente, avec le premier PIB du continent (c’est-à-dire ¼ du PIB
continental), mais un IDH encore faible de 0.619 en 2011 (au 123 rang sur 169 !), mais en évolution
constante d’une année à l’autre (IDH de 0,597 en 2010).
B/ Des inégalités persistantes.
La « nation arc-en-ciel » voulue par Mandela et de Klerk dès 1991 avec la fin de l’apartheid n’a pas signifié
pour autant la fin des tensions raciales : près de 80% de noirs, 9% de blancs, 9% de métis et 2% d’asiatiques
constituent la population d’AS, mais les inégalités sociales sont criantes et touchent souvent les noirs. Par
ailleurs 17% de la population vit sous le seuil de pauvreté et la plus grande partie de l’appareil économique
appartient à des groupes financiers blancs.
Même si la classe moyenne noire progresse et que la discrimination positive entraine l’emploi de personnes
de couleur, les communautés se renforcent en AS et ne se mélangent pas.
Le cas de l’AS est celui du passage de la ségrégation raciale à la ségrégation sociale : cela a lieu dans les
townships, les zones urbaines réservées aux non-blancs à l’époque de l’apartheid, à l’écart des centres-villes
et constituées de petites maisons identiques (matchboxes : « boîtes d’allumettes »). Ces quartiers constituent
des ghettos souvent privés d’eau courante et parfois d’électricité, qui sont alimentés par l’exode rural
constant et qui connaissent de fréquentes émeutes.
A l’opposé de ces classes pauvres, la classe moyenne noire se développe : ce sont surtout de jeunes urbains
surnommés « Black diamonds » : ils forment un marché de consommation majeur pour le développement
économique du pays.
Enfin, trois causes expliquent aujourd’hui nombre de difficultés du pays :
- Le sida fait des ravages dans la population, il est la première cause de mortalité et fait chuter
l’espérance de vie de 59 ans en 1990 à 52 ans en 2010 ! Près de 18% de la population des 15-49 ans
est touchée par le VIH.
- Si l’apartheid fut une période de violences policières, de déplacements de population et de tensions
sociales, l’après-apartheid reste encore dominé par ce même type de tensions, en particulier vis-à-vis
des femmes et des Africains étrangers au pays.
- La période coloniale fut celle de l’exploitation des terres par et pour les blancs, or la restitution de
ces terres n’est pas encore faite, et l’exemple du Zimbabwe fait peur : en l’an 2000 les fermiers
blancs y ont été expulsés dans la plus grande violence et les terres accaparées par les proches du
dictateur Robert Mugabe.
II – Une nouvelle puissance à toutes les échelles.
A/ Une puissance à l’échelle régionale.
Les relations diplomatiques se sont détendues depuis la fin de l’apartheid avec les voisins de l’AS : les
frontières avec le Mozambique, le Zimbabwe et le Botswana se sont rouvertes et les échanges économiques,
culturels et les politiques de développement durable s’opèrent désormais entre ces pays.
D’autre part, l’AS étant la puissance économique dominante du continent, les pays voisins tentent de s’y
allier par le biais de coopérations régionales dont deux organisations majeures : la SACU (Union douanière
de l’Afrique Australe) et la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe) créée en 1980 :
l’Afrique du Sud y entre en 1994 au moment où Mandela devient président et mène une politique de
réconciliation qui lui donne une aura morale sans précédent. Sur le modèle de l’UE, l’Afrique du Sud a
voulu instaurer une zone monétaire commune entre plusieurs pays : la monnaie utilisée est le rand.
Parmi tous les pays du continent, l’AS attire le plus d’immigration, légale pour le travail, mais aussi 3 à 4
millions d’illégaux.
La meilleure preuve du centrage de l’AS vers le continent est la concentration des activités économiques
autour du bipôle Prétoria-Johannesburg (Nord-Est du pays) dans la région motrice qu’est le Gauteng. De
plus le pays est signataire du NEPAD, à savoir la charte de bonne conduite économique et politique pour les
États africains depuis 2001.
Enfin, l’Afrique du Sud est une grande puissance diplomatique à l’échelle du continent, ayant joué un rôle
important dans la création de l’UA (Union africaine) en 2002 : c’est une organisation regroupant tous les
pays d’Afrique qui possède une armée pouvant intervenir comme force d’interposition dans les conflits.
Même si les désaccords sont très nombreux avec les autres puissances continentales, l’Afrique du Sud est
intervenue à de multiples reprises dans les crises : RDC, Sud Soudan, Libéria, etc. le seul véritable rival du
pays au niveau économique et diplomatique est le Nigéria mais encore assez loin derrière.
B/ Une puissance à l’échelle mondiale.
En 2011, les BRIC se sont réunis et ont accueilli l’Afrique du Sud dans leurs rangs : on parle désormais plus
communément des BRICS (Brazil, Russia, India, China, South Africa), pour autant l’AS est loin d’avoir le
même poids économique, commercial et diplomatique que les 4 autres pays.
De même, l’AS fait partie du G20 et à ce titre intensifie ses relations avec l’ensemble des partenaires, en
priorité l’UE, la Chine, et aujourd’hui le Brésil et l’Inde. L’UE reconnaît l’AS comme un interlocuteur
privilégié et aujourd’hui le pays est candidat à un siège permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU. Or ce
siège ne serait ouvert qu’en cas de réforme réelle des institutions onusiennes, ce qui n’est pour le moment
pas évident car les 5 membres permanents actuels font barrage et se disputent de futures alliances.
Ensuite l’AS est tournée de mieux en mieux vers les échanges mondiaux, preuve en est le développement de
métropoles littorales : Le Cap, Port-Elizabeth et surtout Durban dont les façades sont de véritables interfaces
vers les grands océans et les espaces dominants de la mondialisation.
Durban est d’ailleurs devenue l’un des premiers centres touristiques de l’AS, dans un contexte où le pays
reçoit chaque année toujours plus de touristes internationaux (6 millions en 2011). Plusieurs événements ont
contribué ces 20 dernières années à donner à créer pour le pays un soft power remarquable : depuis la
fameuse coupe du monde de Rugby de l’après-apartheid (1995 : voir le film Invictus), la Coupe d’Afrique
des nations (CAN en 1996), ou le Mondial de football en 2010, mais encore plus avec le Sommet de la Terre
à Johannesburg en 2003 qui donne au pays une stature internationale dans les débats sur le développement
durable et la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique qui a eu lieu à Durban en 2011.
L’ensemble de ces manifestations a apporté des investissements majeurs pour le pays et permis le
développement d’infrastructures essentielles : l’AS s’est ainsi donné l’image d’une nation unie malgré les
tensions qui persistent.
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