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La consommation
collaborative :
« Une des dix idées amenées à changer le
monde » ?
Julie CABANNE
MCS 5ème année
Antoinette LACOSTE
Directrice de mémoire
2
Sommaire
Sommaire .............................................................................................. 1
Avant Propos ......................................................................................... 5
Introduction ........................................................................................... 5
Partie I : Pourquoi remettons nous en question notre façon de consommer ?
.............................................................................................................................. 10
A. La crise économique, élément déclencheur et facteur de la
redécouverte du lien social ......................................................................... 11
1. La crise économique : nécessité de développer une culture de « l’achat
malin »
a) L’impact de la crise ............................................................................ 11
b) Le comportement du néo consommateur ........................................... 13
2. De la montée de l’individualisme à la redécouverte du lien social ....... 14
a) La montée de l’individualisme ............................................................. 14
b) Les nouvelles formes de liens sociaux ............................................... 16
c) Comment la consommation collaborative crée du lien social ?........... 17
B. Une prise de conscience grandissante de l’importance d’une
consommation plus durable et qualitative ................................................ 19
1. Les préoccupations environnementales : vers une optimisation des
ressources et une réduction déchets .......................................................... 19
a) Croissance et développement durable : une coexistence difficile ....... 20
b) Une nécessaire coexistence de la croissance et du développement
durable .................................................................................................... 22
3
2. La fin du consumérisme grâce à la multiplication des consom’acteurs .. 24
a) La montée de la consommation responsable ..................................... 25
b) Les alterconsommateurs .................................................................... 28
c) L’exigence de la santé avant tout: un retour vers le local ................... 29
C. La démocratisation des nouvelles technologies, évolution
indissociable de cette nouvelle économie. ............................................... 31
1. La révolution du « peer to peer »: un partage à grande vitesse ............ 31
a) L’apparition du « peer to peer » .......................................................... 31
b) La diffusion du « peer to peer » et ses répercussions ........................ 32
2. Le web 2.0 : la clé de voute de la création de communauté. ................. 35
a) L’émergence du web 2.0 et de l’Internet participatif ........................... 35
b) Une multiconnectivité qui s’étend au monde réel ............................... 41
c) Les systèmes de réputation, pierre angulaire indispensable .............. 44
3. La génération Y, déjà familiarisée avec ces nouvelles formes de
consommation ............................................................................................ 45
Partie II : De l’hyperconsommation à la consommation collaborative : une
redécouverte du lien social ................................................................................ 50
A. Les différents types de systèmes collaboratifs : un mouvement qui
s’étend à tous les secteurs ......................................................................... 51
1. La redistribution des marchés ............................................................... 52
a) La vente et l’achat d’objet d’occasion ................................................. 53
b) Le troc : « le nouveau contrat de confiance » ..................................... 54
4
2. Les styles de vie collaboratifs ................................................................ 57
a) Le couchsurfing .................................................................................. 58
b) Le Social Food .................................................................................... 61
c) Le Landshare ...................................................................................... 62
d) Le Coworking ...................................................................................... 63
e) Le Crowdfunding ................................................................................ 64
3. Un système de service de produits ..................................................... 67
a)L’évolution du rapport à la voiture ........................................................ 68
b) Le covoiturage .................................................................................... 69
c) L’Autopartage ..................................................................................... 70
d) La location de voitures entre particuliers. ........................................... 73
B. L’impact sur les entreprises classiques et leur business model ..... 74
1. Le bouleversement des acteurs économiques classiques .................. 74
a) L’impact sur les entreprises classiques : la désintermédiation ........... 74
b) Une opportunité à saisir pour les entreprises ..................................... 77
2. La consommation collaborative : un phénomène à nuancer ............... 80
a) La consommation collaborative… c’est encore de la consommation . 80
b) L’économie du partage alimente la crise ............................................ 82
c)Les conséquences pour les consommateurs : le revers de la médaille 82
Conclusion .......................................................................................... 85
Tables des annexes ............................................................................ 88
Bibliographie ..................................................................................... 103
5
Avant Propos
La perte de confiance des citoyens envers les institutions traditionnelles, la politique,
les syndicats…les amène à se rapprocher alors de leur réseau d’amis, de collègues
ou de voisins. La confiance se trouve ainsi rétablie, donc le partage peut s’installer et
ainsi se bâti l’édifice de l’économie collaborative. Ce mouvement à commencer à
poindre lors de la crise de 2008, en faisant émerger de nouvelles stratégies de
consommation.
De plus, les citoyens, sensibilisés, depuis plus de vingt ans, aux signaux portant sur
la dégradation de notre environnement, si nombreux et pressants se rendent compte
que nous ne pouvons plus échapper à la réalité environnementale. En effet, par
notre consommation outrancière, la capacité de notre planète peine à se régénérer
et à survivre.
D’autant plus, qu’aujourd’hui, l’ère du numérique est un facilitateur pour parvenir à
une mutation profonde de nos modes de consommation, loin de la société d’
hyperconsommation. Grâce à ces évolutions, la consommation collaborative s’étend
inexorablement et dépasse le stade de simple tendance pour devenir un véritable
phénomène mondial.
On peut penser que son succès est lié à sa volonté d’inspirer des innovations
sociales et durables « en douceur » tout en restant en adéquation avec le cadre
capitaliste traditionnel. En effet, « la rentabilité économique, l’équité sociale et le
respect de l’environnement ne sont pas incompatibles ». 1 La consommation
collaborative s’insère dans une économie de fonctionnalité, se positionnant entre
Capitalisme Vert et décroissance. Il s’agit d’une solution intermédiaire et plus
réalisable pour conserver notre niveau de consommation au sein d’une planète aux
ressources restreintes.
L’économie du partage constitue une porte ouverte envisageable, une voie
inéluctable vers la création d’une forme nouvelle d’économie, plus respectueuse de
l’environnement.
1 Tristan Leconte, fondateur d’Alter Eco
6
Introduction
"Un jour, nous regarderons le vingtième siècle et nous nous demanderons pourquoi
nous possédions autant de choses" Bryan Walsh
Une culture de la location s’installe et cette dynamique s’inscrit dans l’évolution de la
société de consommation depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Dans les
années 1950-1960, l’accumulation de bien était le signe que l’on sortait de la période
noire. A cette époque, le modèle économique était basé sur un système classique de
vendeurs et d’acheteurs échangeant des produits. Les années 1970 marquent une
autre étape : «avoir » ne suffit plus il faut aussi « être ». La recherche de bien être et
du développement personnel sont devenus essentiels.
Dans les années 2000, nous sommes entrés dans une nouvelle ère, celle du « bien
avoir », en rupture avec celle du « toujours plus ».
Selon Jeremy Rifkin, célèbre économiste américain, nous entrons dans la troisième
révolution industrielle, celle de l’accès. Cette nouvelle ère voit les réseaux prendre la
place des marchés et la notion d’accès se substituer à celle de propriété. Les
entreprises et les consommateurs commencent à perdre contact avec la vie
économique moderne, celle de l’échange de biens sur un marché de vendeurs et
d’acheteurs. La propriété ne disparait pas pour autant, elle reste une réalité, mais
elle se situe de moins en moins sur un marché.
Les propriétaires de bien continuent d’exister, mais ils contrôlent désormais l’accès
en définissant un usage provisoire des biens ou des services. Le client continue
d’acheter mais à travers le partage, la location, l’échange…et ce phénomène touche
tous les secteurs.
Ainsi, nous passons de « l’ère de la possession » à « l’ère de l’usage », où
l’expérience prévaut sur la propriété.
De plus, le capital intellectuel est un véritable moteur de cette ère nouvelle. Ce sont
les concepts, les idées, les images et non plus les choses qui ont une vraie valeur.
Ce capital intellectuel n’obéit pas aux lois de l’échange.
7
C’est dans ce contexte que s’est développé le terme de « consommation
collaborative », appelé aussi « économie du partage» ou «économie participative».
Le concept n’est pas nouveau, mais il devient aujourd’hui un phénomène. Le
consommateur, de plus en plus méfiant à l’égard du système marchand traditionnel,
va chercher un moyen de consommer différemment. La baisse du pouvoir d’achat
engendre le développement d’un système D, où l’utilisation de biens prévaut sur la
possession. Jeremy Rifkin avait déjà anticipé ce phénomène, en 2000 dans son livre
« l’Age de l’accès ».
Le terme de consommation collaborative a été introduit par Ray Algar dans la revue
Leisure Report en avril 2007. Ce rapport avait pour but de mettre en évidence
l’augmentation du pouvoir de négociation des acheteurs, mieux informés grâce à
internet. Ainsi, ils peuvent s’organiser pour baisser les prix grâce à des commandes
groupés.
Aujourd’hui le phénomène a contaminé le monde entier : c'est un phénomène
global, 90 pays y participent. Mais chaque région adapte bien sûr son offre en
fonction des attentes des clients.
Il est à l’origine d’un profonde mutation des modes de vie à tel point que le TIME le
cite comme l’ « une des dix idées qui vont changer le monde ». « La consommation
collaborative est un mouvement qui pose les limites de la consommation actuelle et
propose un nouveau mode de consommation alternatif à celui actuellement à l’œuvre
dans nos sociétés. On assiste à l’émergence d’une nouvelle économie basée sur le
partage, qui prend notamment appuie sur les outils numériques. »2
“La consommation collaborative correspond au fait de prêter, louer, donner,
échanger des objets via les technologies et les communautés de pairs” Collaborative
Consumption.
Elle s’étend à de nombreux biens, on répertorie 25 catégories qui vont de l'immobilier
à l'automobile, en passant par l’habitat, la nourriture et en allant jusqu’aux
2 What’s mine is your’s? the rise of collaborative Cosumption Rachel Botsman et Roo Rogers
8
compétences. On recense, par exemple, plus de 25 sociétés automobiles qui
expérimentent l’autopartage, en adaptant l'offre à leur territoire.
Toutefois, les bases de ce phénomène ne sont pas récentes, alors pourquoi ce
nouveau mode de consommer apparait-il aujourd’hui ?
La croissance de ces formes d’échanges entre particuliers a été notamment permise
par l’avènement et la démocratisation des nouvelles technologies. Si les formes de
troc et d’échange ne sont pas nouvelles, Internet, les systèmes pair-à-pair et la e-
réputation ont permis leur développement à une toute autre échelle.
En effet, Internet est la clé de voute de cette nouvelle économie. Le web a non
seulement changé la manière dont les gens organisent leurs relations personnelles
et professionnelles, mais aussi modifié leurs modes de pensée. Le plus marquant
dans cette révolution Internet, est, à la fin du XXe siècle, le passage d’une
communication centralisée sur le modèle des grands médias, tels que la télévision, la
radio…, à un modèle distribué en réseau. Aujourd’hui, Internet est distribué,
collaboratif et horizontal, plus de 2 milliards de personnes communiquent entre elles
dans le monde en temps réel. Ce révolution permet de développer un pouvoir de
« pair-à-pair », d’égal à égal, sans hiérarchie, ce qui change beaucoup de choses
telles que : les relations sociales, les modèles économiques, les formes
d’organisation….
Toutefois, l’émergence et l’engouement de ces nouvelles pratiques n’est pas
seulement du à la démocratisation du web. En effet, la crise financière et la baisse du
pouvoir d’achat ont peu à peu conduit à une prise de conscience des
consommateurs face à leurs habitudes d’achats. Dans ce contexte, la crise a modifié
les pratiques de consommation. En effet, les Français semblent attentifs à leurs
consommation et dépenses, sans pour autant sacrifier la qualité. Une consommation
dominée par la recherche du meilleur rapport qualité-prix et plus utilitaire.
De plus, les préoccupations pour le développement durable ont aussi contribué aux
évolutions de notre façon de consommer. Les citoyens ont aujourd’hui tendance à
privilégier un bien de qualité et durable, entrainant ainsi une diminution de la
9
surproduction et la surconsommation. C’est ainsi une source d’évitement de déchets.
Cela permettra aux citoyens de jeter moins leurs objets potentiellement réutilisables.
Parallèlement aux préoccupations environnementales, un nouveau contexte
favorable au « local » se développe. En effet, le nombre d’AMAP (association pour le
maintien de l’agriculture paysanne) ne cesse d’augmenter. Il en existe désormais
1400 dans toute la France.
Dans ce contexte en pleine mutation, dans quelles mesures la consommation
collaborative peut elle changer notre façon de consommer, ce phénomène constitue-
t- il une tendance passagère ou durable? Comment les entreprises s’adaptent-elles à
ce mouvement et quelles sont les mutations concrètes engendrées par la
multiplication de start up du web sur le marché ?
Nous allons donc, dans un premier temps, approfondir les raisons de cette remise en
cause de notre façon de consommer. Pour cela, nous analyserons les répercussions
de la crise économique, la prise de conscience d’une consommation plus durable et
la démocratisation des nouvelles technologies.
Dans un second temps, nous étudierons la transition de l’hyperconsommation à la
consommation collaborative et l’essor de nouvelles start up. Enfin, nous mettrons en
avant l’impact de ce phénomène sur les entreprises et les limites qui s’y rattachent.
10
A. La crise économique, élément déclencheur et facteur de la
redécouverte du lien social ......................................................................... 11
1. La crise économique : nécessité de développer une culture de « l’achat
malin »
2. De la montée de l’individualisme à la redécouverte du lien social ....... 14
B. Une prise de conscience grandissante de l’importance d’une
consommation plus durable et qualitative ................................................ 19
1. Les préoccupations environnementales : vers une optimisation des
ressources et une réduction déchets .......................................................... 19
2. La fin du consumérisme grâce à la multiplication des consom’acteurs .. 24
C. La démocratisation des nouvelles technologies, évolution
indissociable de cette nouvelle économie. ............................................... 31
1. La révolution du « peer to peer »: un partage à grande vitesse ............. 31
2. Le web 2.0 : la clé de voute de la création de communauté. .................. 35
3.La génération Y, déjà familiarisée avec ces nouvelles formes de
consommation ............................................................................................ 45
Partie I : Pourquoi remettons nous en
question notre façon de consommer ?
11
Phénomène antique pour certains, mouvement moderne pour d’autres, l’essor de la
consommation collaborative a pour origine la crise économique globale, les
préoccupations environnementales pressantes. L’émergence de ce phénomène est
facilitée par l’importance de la notion de communauté, favorisée par l’explosion du
web 2.0 et des réseaux sociaux.
A. La crise économique, élément déclencheur et facteur de la redécouverte
du lien social
1. La crise économique : nécessité de développer une culture de
« l’achat malin »
a) L’impact de la crise
L’activité économique est régulièrement confrontée à des périodes de crise. On peut
citer les crises financières de ces dernières années comme : la crise des années
1930, suite au krach boursier de 1929, la crise pétrolière des années 1970, la crise
asiatique en 1997, le krach boursier des valeurs technologiques en 2000 et enfin la
crise des subprimes de 2006, déclencheur de la crise économique actuelle.
La crise correspond à une période de dépression ou de stagnation durable de la
conjoncture économique. On peut considérer qu’il s’agit également d’un processus
de retournement du cycle économique qui interrompt la phase d’expansion et
entraîne donc l’économie dans la dépression.
Selon F.Peroux, célèbre économiste français, la croissance est une augmentation
soutenue pendant une ou plusieurs périodes d’un indicateur de dimension. Cet
indicateur est généralement le Produit Intérieur Brut (PIB) en volume. Ces dernières
années, la croissance connaît des fluctuations sans précédent. En effet, la
croissance française, qui atteignait 2,3% en 2007, a chuté à -0,1% en 2008, jusqu’à
2,7% en 2009 pour amorcer une légère reprise à 1,5% en 2010 et 1,7% en 2011. En
2012, la France devrait connaitre une décélération et atteindre une taux de
croissance de 0,4%, selon des prévisions. L’éclatement de la bulle financière aux
Etats-Unis en 2006, déclenchée par la crise des « subprimes », avec le krach des
prêts immobiliers s’est vite transformé en crise financière mondiale depuis 2007.
12
Cette crise n’est pas restée cantonnée à la sphère financière mais elle atteint la
sphère réelle engendrant de nombreuses répercussions sur l’économie. En effet,
cette crise a provoqué un ralentissement de l’activité économique des entreprises
(arrêt des embauches, des investissements, baisse du prix des actifs, des
licenciements…) ce qui a provoqué une augmentation du chômage, une baisse de
revenu et donc une baisse de la consommation.
C’est ainsi que les Etats-Unis sont rentrés en récession en décembre 2007, suivis
par plusieurs pays dont la zone euro en 2008. La France atteint -0,1 % du PIB, les
Etats Unis et l’Union européenne 0,4 % du PIB, selon l’INSEE.
Fin 2008, on assiste à un nouveau mouvement, celui des « décroissants ou
objecteurs de croissance ». La croyance de ce mouvement est que l’on serait plus
heureux si l’on consommait moins et mieux.
Nous entrons dans une ère nouvelle, celle de la fin de l’hyperconsommation :
« Les Français réalisent que la société de consommation ne mène pas au bonheur.
En trente ans, le pouvoir d’achat a plus que doublé mais ils ne sont pas deux fois
plus heureux. ». 3
La crise renforce ce changement qui s’instaure durablement dans nos modes de
consommation. « L’achat malin et la prise en compte des exigences
environnementales constituent des tendances de fond que la sortie de crise ne
remettra pas en cause ». 4
Ce constat n’a cessé de se confirmer au fil du temps jusqu’à aujourd’hui. En effet, on
assiste à l’émergence de nouvelles pratiques de consommation, avec un
dénominateur commun : la recherche de la bonne affaire à tout prix. Trouver un bien
ou une prestation au meilleur prix est devenu l’obsession du moment.
C’est dans ce contexte particulier de la peur du lendemain, alliée à la société de
consommation, ont fait naître un nouveau système économique basé sur l’économie
du partage.
3 Robert Rochefort, économiste et homme politique français
4 Thierry Hamelin, directeur de Benchmark Group
13
b) Le comportement du néo consommateur
Le nouveau consommateur de la fin des années 2000, à défaut d’être
systématiquement « plus radin », veut définitivement être « plus malin ».
Le consommateur est toujours à la recherche du meilleur produit au meilleur prix,
pour cela, il a de nombreux moyens à sa disposition : comparatifs, avis de
consommateurs, essai de nouvelles pratiques de consommation, revente d’objets….
Avec l’essor d’internet, la collecte d’informations et leur comparaison systématique
n’ont jamais été aussi simples.
Les journaux et revues les plus sérieux proposent désormais des dossiers
thématiques comparant les caractéristiques de tel ou tel bien de consommation.
En second lieu, qu’il ait décidé ou non d’acquérir les biens proposés, le néo-
consommateur va tenter d’en optimiser l’usage. Une myriade de nouvelles pratiques
de type communautaire est née de la sorte, favorisée par le développement du Web.
Si les sites permettant d’échanger appartements et maisons pour les vacances, dans
le but de limiter son budget loisir, au prix du transport, sont désormais connus ;
l’auto-partage, qui permet la mise à disposition d’un véhicule auprès de plusieurs
usagers est promis à un bel avenir.
Il en est de même pour le co-voiturage, son reflet inversé (partage d’un trajet et donc
de son coût), ces pratiques ne sont pas dénuées d’une dimension écologique. Moins
d’essence consommée, moins d’acquisitions de véhicules donc économie de
l’énergie déployée pour leur fabrication...
Enfin, en troisième lieu, si le néo-consommateur n’a finalement pas trouvé d’offres lui
permettant de trouver la voiture, l’appartement, le matériel de bricolage au moment et
au lieu qui lui convenait, il va se résoudre à en faire l’achat, mais en se constituant
lui-même le budget nécessaire.
Qu’il trouve un « trésor » dans son grenier ou revende ses vieux bijoux en or, ces
pratiques reviennent véritablement en force. Avec la crise, l’or a en effet repris sa
fonction de valeur refuge, ce qui a fait grimper ses cours à des sommets rarement
égalés. S’en est suivi une déferlante de propositions de rachat d’or, par des sociétés
créées ad hoc ou par des chaînes de bijouterie bien installées.
14
L’économie de crise, grâce aux méthodes qu’elle propage, propose ainsi de pallier la
crise économique actuelle.
Ainsi, la crise économique, en entrainant une dégradation du pouvoir d’achat, suscite
une recherche d’optimisation des budgets et une vigilance quant au prix.
La crise engendre un changement de mentalité, les consommateurs favorisent le
développement de nouveaux moyens pour effectuer des économies et récolter de
l’argent grâce à leurs biens. Toutefois, la crise fait aussi naître la nécessité d’être
ensemble, de créer une communauté de liens, fragilisés en ces temps de crise. On
assiste à la redécouverte du lien social, facteur d’une quête de sens généralisé.
2. De la montée de l’individualisme à la redécouverte du lien
social
a) La montée de l’individualisme
Alexis de Tocqueville, penseur politique, historien et écrivain français, met en avant
le fait que les liens entre les individus sont fragilisés par notre société, qui a tendance
à être individualiste. En effet, en France, 15% de la population vit seule ; le divorce
touche la moitié des couples mariés et le nombre de mariage est en baisse. De plus,
la France est un des pays ou la consommation d’anxiolytiques est la plus importante,
elle a été multiplié par sept ces vingt dernières années. Ces faits prouvent bien que
la société est baigné dans un individualisme croissant.
Dès le XIXe siècle, de nombreux sociologues ont déjà compris les tendances à
l’individualisme qui s’affirment toujours plus aujourd’hui dans la société, de même
que les menaces pour la démocratie avaient déjà été identifiées.
L’individualisme « est un sentiment réfléchi qui dispose chaque citoyen à s'isoler de
la masse de ses semblables de telle sorte qu’après s'être créé une société à son
usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même ».5 La démocratie
5 Alexis de Tocqueville
15
moderne est certainement celle de la valorisation de la sphère privée. On assiste à la
naissance du désintérêt pour la vie publique. Les individus se définissent par eux
même et non plus par leur appartenance à un groupe.
Plus largement, l’émergence de l’individualisme signe aussi le début de l’ère des
choix : on peut tout choisir, même nos liens sociaux qui sont devenus sélectifs et se
sont par là même affaiblis. Ainsi l’entité de base qu’est la famille pour la société s’est
vue bouleversée par la crise du lien conjugal. De même, l’émergence de l’individu au
sein du couple, ne fait qu’augmenter les contraintes de la vie à deux, qui doit
concilier l’individualité des deux êtres et en même temps leur désir d’être ensemble.
Les liens conjugaux et familiaux deviennent de plus en plus précaires, car on peut
choisir de les rompre n’importe quand. La division du travail va dans le même sens,
de même que le développement de la propriété privée avec le modèle maison et
jardin privatif.
La cellule familiale est tout d’abord le premier lieu de cette mutation du fait de la
baisse du nombre d’enfants, de l’insertion plus importante des femmes sur le marché
du travail, la famille est bouleversée. Ceci se traduit par l’augmentation du nombre de
divorces et par un changement de la vocation de la famille. On peut corréler cette
modification profonde de la structure familiale, avec l’augmentation franche du
nombre de personnes vivant seules. Ceci nous permet de déduire que
l’individualisme croissant de la société provoque la solitude de nombreux individus et
coupe leurs liens sociaux.
Par ailleurs, le repli sur la sphère privée se traduit par une désertion de la vie
citoyenne. De nos jours, le taux de syndicalisation n’est en France que de 8% pour
70% en Suède par exemple. Le milieu associatif accuse aussi les conséquences de
cette crise. Certes, un grand nombre des Français sont membres d’une association,
mais la composition du paysage associatif, est quant à elle, remodelée en
profondeur au détriment des associations militantes et au profit des associations
sportives, qui participent à l’épanouissement personnel.
De plus, le modèle d’intégration républicaine français et ses ratés sont aussi à la
source du malaise. L’immigration concerne environ 20%6 de la population française
6 INSEE
16
si on remonte jusqu’aux petits enfants d’immigrés. Pour cette population, le taux de
chômage des jeunes, est entre deux et cinq fois plus élevé que pour les autres
citoyens. Cette différence s’explique par les divergences des parcours scolaires et
par les discriminations à l’embauche. De ces humiliations naissent des attitudes de
rupture avec la République et ses autres citoyens.
Toutefois, on peut se demander s’il est juste de parler de crise sociale ou devrait-on
plutôt parler de mutation du lien social moderne par rapport à ses formes anciennes.
b) Les nouvelles formes de liens sociaux
Aujourd’hui, les adolescents ont tendance à s’isoler du reste de leur famille et de la
société, au profit du temps passé devant les écrans d’ordinateur. Ce moyen de
communiquer avec leurs amis réels et même virtuels. Bien que virtuel, le lien créé
par Internet avec de multiples correspondants est bien une nouvelle forme du lien
social. De nos jours, on célèbre toujours plus d’unions d’individus ayant fait rencontre
sur le web. Les réseaux sociaux (Facebook, Twitter…) sont quant à eux un exemple
de cette nouvelle sociabilité virtuelle et aussi de la mise en place de mécanismes de
solidarité virtuelle. Les contacts, qui parfois ne se connaissent pas, s’envoient des
messages, s’entraident et parlent de leur vie à des gens qu’ils n’ont jamais vus.
De même que l’usage croissant du téléphone mobile et des SMS entretient aussi le
lien social, dans ses dimensions affectives. Ainsi, les conversations téléphoniques
sont plus nombreuses chez les personnes vivant seules ; en effet elles donnent
l’impression de pallier à l’absence des autres relations.
On peut finalement voir à travers les nouvelles technologies d’information et de
communication des matrices sociales qui permettent d’élargir les perspectives de
communication et de construire des liens qui n’auraient pas pu l’être dans la réalité.
Ce constat amène à une remise en cause de la théorie de la rupture du lien social.
Cette rupture serait du à la diminution de l’implication des citoyens dans la sphère
publique, à la montée de l’isolement et à l’incivisme. Mais ces mutations pourraient
en fait n’être que le résultat de l’adaptation à la modernité de notre société.
17
c) Comment la consommation collaborative crée du lien
social ?
Les échanges marchands provoquent un sentiment d’exclusion sociale croissant,
alors que l’économie du partage, basé en partie sur le don, entraine une modification
de nos comportements et relations par le biais de la reconnaissance.
Lors d’un échange marchand, il n’y a pas de reconnaissance, la rémunération pour le
service rendu (issu du travail de chacun) correspond à ce que nous devons ; les
dettes sont alors soldés.
« L’échange marchand suppose donc le retour au même, à une situation initiale.
L’équivalent de ce que l’on a donné, étant reçu en retour il n’y a plus de rapport de
dette envers l’autre. L’échange permet d’être quitte. Il est en quelque sorte une
relation qui abolit la relation : il efface le lien à l’autre, renvoyant chacun dans son
indépendance. » 7
Les échanges marchands rendent les individus plus dépendants les uns des autres
et aussi paradoxalement plus seuls, puisque personne ne doit rien à personne.
Le don quant à lui provient de la seule volonté d’une personne et ne demande pas
d’équivalence. Toutefois, il peut sous entendre une dette morale qui incite à donner à
son tour. Même si un contre don est effectué, la relation ne sera pas annulée car
celle-ci n’avait pas fait l’objet de rémunération. La dette n’est pas soldée et laisse
une empreinte durable.
Marcel Mauss, anthropologue fin du 19ème siècle, a mis en pratique ce système basé
sur le don, appelé Potlach, dans plusieurs sociétés.
Le système du Potlach est basé sur le fait qu’un donneur donne un objet que le
receveur, doit en contre partie, accepter afin que le rapport social se crée. Le
receveur doit à son tour lui donner un objet avec une valeur supérieur de préférence,
mais pas dans l’immédiat.
7 Frédéric Laupiès, Leçon Philosophique sur l’échange
18
« Ce qui fonde la relation dans l’économie du Potlach, ce n’est pas un contrat mais
la reconnaissance du don, qui est aussi la reconnaissance de sa propre
dépendance. » 8
Le lien social est crée grâce à l’acceptation de la dépendance. Cette dépendance
entraine un besoin de rendre la pareille, de s’acquitter se sa dette et crée ainsi un
lien entre les uns et les autres.
Pour Marcel Mauss, l’acte social de donner sous entend que son propre bonheur
passe aussi par le bonheur des tiers, régit par des règles éthiques : donner, recevoir
et rendre.
On constate qu’il existe de nombreuses similitudes entre la consommation
collaborative et le système de Potlach.
Internet permet de mesurer cette dépendance. Une personne qui rédige un article
sur Wikipédia, met ainsi à disposition des autres ses connaissances, de même pour
la musique, les vidéos…Les forums permettent aussi de répondre aux internautes.
« En agissant ainsi, ces donateurs numériques envoient une gigantesque
proposition d’alliance à l’ensemble de la société. Chacun de nous peut l’accepter (ce
qui signifiera l’acceptation du rapport social) et offrir par la suite un nouveau contre-
don. »
Que ce soit l’économie du partage ou l’économie du « don », la confiance est un
élément primordial basé sur la propension à collaborer et sur un certain nombre de
règles tacites. Cette nouvelle forme de consommation permet de créer un nouveau
lien social, de poser les bases de nouvelles structures sociales.
De plus, la crise, pousse les gens vers ces nouvelles formes d’échanges. Nous
sommes en quête de sens, celle-ci se traduit par la redécouverte du lien social. En
effet, la crise fait naitre une nécessité de s’assembler qui devient par la suite un
plaisir et qui crée une communauté de liens.
8 Marcel Mauss
19
De nombreuses initiatives sont mises en place afin de partager des moments
conviviaux avec des individus que l’on ne connait : un voyage (couchsurfing), un
repas (colunghing), des apéritifs avec les membres d’un communauté (apéros
Facebook ou apéritweet). En dehors de notre facon de consommer, toutes ces
nouvelles habitudes sont l’illustration du développement d’un esprit de coopération.
Nos styles de vies deviennent plus collaboratifs.
Ces nouvelles formes de partage débouchent sur une remise en question de notre
façon de consommer afin qu’elle soit moins nuisible pour l’environnement mais aussi
moins superficielle pour soi. Nous entrons dans l’ère du « bien avoir ».
B. Une prise de conscience grandissante de l’importance d’une
consommation plus durable et qualitative
1) Les préoccupations environnementales : vers une
optimisation des ressources et une réduction déchets
« Les richesses naturelles sont inépuisables car sans cela nous ne les obtiendrions
pas gratuitement. Ne pouvant être multipliées, ni épuisées, elles ne font pas l’objet
de la science économique. »9 Considérer les richesses naturelles comme
inépuisables était une manière de penser commune jusqu’au milieu du 20ème siècle,
alors que la question est devenue préoccupante du point de vue de la pérennité des
réserves. En effet, il a fallu attendre la fin des années 1960 pour que l’on prenne
véritablement conscience des nuisances de la croissance économique. Ce n’est
qu’au début des années 1970 que l’on s’est interrogé sérieusement sur la
surexploitation des écosystèmes et l’épuisement des ressources naturelles. Les
dérives de la croissance ont pour conséquence de négliger les ressources naturelles,
et la civilisation humaine. Aujourd’hui donc, si nous continuons à produire autant,
certains pensent que nous courons à notre perte au travers de la croissance laquelle
désigne l’augmentation des quantités produites.
9 Jean-Baptiste Say, économiste français (1767-1832)
20
a) Croissance et développement durable : une
coexistence difficile
La croissance suppose une production grandissante d’énergie et de ressources
naturelles, lesquelles sont considérées comme gratuites. Elle se mesure
essentiellement par l’accroissement au cours du temps de la production nationale,
calculée au moyen de l’indicateur PIB, lequel dans son mode de calcul, ignore un
certain nombre de phénomènes.
Il ne prend pas en considération les coûts de l’environnement. Si cela était le cas, on
remarquerait que dans certains pays, la croissance serait moins forte ou négative. Le
PIB est actuellement calculé grâce à la prise en compte de la production de biens et
de services, système de calcul présentant des défauts. On ne comptabilise pas les
services rendus à l’environnement à titre gratuit. Par exemple, le secteur agricole est
payé pour la production agricole qu’il fournit et pas pour les services d’entretien qu’il
assure.
D’autre part, les nuisances produites sur l’environnement ne sont pratiquement
jamais comptabilisées en flux négatifs. Enfin, un autre défaut subsiste dans le fait
que les dépenses de protection consacrées à la protection de l’environnement sont
souvent comptabilisées de manière à faire augmenter le PIB. C’est le cas pour de
nombreuses dépenses : coûts de réparation de l’environnement, coûts induits par les
dégradations des conditions de vie.
Finalement, un pays qui épuise ses ressources naturelles augmente son PIB. Par
exemple, une usine qui rejette de l’air pollué accroît sa valeur ajoutée, ce qui n’est
pas le cas pour une autre ayant financé des filtres de protection ; une forêt qui brûle
fait augmenter le PIB par la prise en compte du coût d’intervention des pompiers.
Par conséquent, il est nécessaire de revoir les modes de calcul du PIB et donc de la
croissance en tenant véritablement compte du PIB vert. Il consiste dans le fait qu’en
produisant des richesses, on en détruit d’autres. La comptabilité doit donc prendre en
compte les coûts environnementaux qui devraient être déduits du PIB, dans la
mesure où ils engendrent l’épuisement des actifs naturels tels que le pétrole, l’eau
potable, ou encore les poissons par exemple. Ainsi, si le facteur environnemental est
pris en considération, le calcul du PIB vert ne l’est toujours pas en France qui stagne
21
dans une phase d’expérimentation, contrairement à certains pays tels que la Suisse
ou encore l’Autriche.
On peut dire que la croissance économique élevée a des conséquences négatives
pour le développement durable, mais il n’en reste pas moins que le réchauffement
climatique, en est une autre, dont les répercussions pourraient se révéler
désastreuses.
On peut dire que l'accélération des émissions de dioxyde de carbone au cours du
dernier millénaire est intervenue essentiellement depuis le début de l'ère industrielle.
La croissance perpétuelle engendrée depuis l’ère industrielle a marqué l'accélération
des émissions de gaz carbonique dans l'air. En effet, les experts ont noté que le taux
annuel d'accroissement des émissions de CO2 depuis 1980 est de 0,4 % par an. Au
cours des vingt dernières années, 70 % à 90 % des émissions de dioxyde de
carbone proviendraient de la combustion des carburants et entre 10 % à 30 %
seraient issus de la déforestation.
Les émissions de gaz à effet de serre et d'aérosols dues aux activités humaines
continuent d'altérer l'atmosphère d'une manière qui affecte le climat. Le
réchauffement climatique et la non prise en compte du développement durable dans
la croissance sont à l’origine d’un bouleversement qui n’atteint pas seulement le
climat. En effet, on assiste à l’augmentation du nombre de catastrophes naturelles, à
la disparition d’espèces naturelles, à la fonte de glaciers, à la sécheresse…
La non prise en considération du développement durable dans la croissance a des
conséquences malheureuses sur les générations futures ; toutefois, la croissance est
tout de même indispensable.
En effet, une des conditions sine qua non pour que le développement durable puisse
se faire est de créer des innovations technologiques et organisationnelles. En effet, il
faut que les innovations déjà en cours continue de se développer à une plus large
échelle. Par exemple, les filières éoliennes ne représentent que 0,2% de l’offre
mondiale, de même pour la filière photovoltaïque, qui n’est surtout présente qu’aux
USA, en Allemagne et au Japon.
22
Il est important que les recherches se dirigent vers un processus de croissance
moins gaspilleurs. L’énergie solaire est celle qui minimise le plus l’épuisement des
ressources et la pollution. Concrètement, il s’agit de reconvertir les technologies à
exploitation intensive de ressources non renouvelables, à un usage économe des
ressources primaires et au recyclage maximum des matériaux. Mais tout cela
demande un développement autant sur le plan technologique, que sur le plan
financier.
Ainsi, s’il s’avère difficile de faire coexister la croissance avec un développement
durable respectueux des générations futures, la croissance reste cependant
indispensable dans bien des domaines, c’est pourquoi la coexistence des deux est
une nécessité.
b) Une nécessaire coexistence de la croissance et du
développement durable
Les questions d’environnement apparaissent comme le revers inévitable de la
médaille obtenue à la suite d’une croissance à rythme effréné, de faible chômage, de
production en essor, de consommation de masse durant « Les Trente Glorieuses ».
Un premier rapport fut alors remis au Club de Rome « Les limites de la croissance ».
S’ensuit une liste de conférences : la conférence des Nations Unies à Stockholm en
juin 1972, l’Assemblée Générale des Nations Unis, en 1983 qui met en place une
Commission Mondiale sur l’environnement et le développement. En 1987, le rapport
« Our Common Future » (notre avenir à tous) est délivré par la Commission. Le but
de ce rapport met en place des indications afin que le développement soit plus
respectueux des ressources naturelles.
Le premier sommet de la Terre à Rio en 1992 avait proposé : un monde divers et
sans inégalité, dans un lien harmonieux avec la nature, où l’innovation écologique se
diffuserait sans entrave pour les générations présentes et sans mettre en péril la vie
des générations futures.
En 1997, 188 pays s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre par
leur signature du protocole de Kyoto. Mais les USA responsables de 36,1% des
émissions se retirent du protocole en 2001. En septembre 2002, se tient le Sommet
du développement durable à Johannesburg en Afrique du Sud est appelé. En juin
23
2012, une nouvelle conférence aura lieu au Brésil accueillera la conférence des
Nations Unies pour le développement durable.
Ainsi, si les réunions officielles internationales n’ont pas été aussi fructueuses
qu’espéré, elles se font quoi qu’il en soit les garantes de la nécessité d’une
conciliation entre croissance et développement durable. Cette conciliation peut
aboutir au travers de solutions qui assurent les conditions du durable sans oublier les
exigences et les limites de la croissance.
Certains économistes refusent la notion de développement durable et dénoncent les
méfaits de la croissance, ainsi que la nécessité de produire et de consommer
toujours davantage. La décroissance qui consiste en la diminution régulière de la
production d’un pays, caractérise alors un courant de pensée. Selon eux, la
décroissance est la solution pour résoudre les problèmes écologiques. En effet, ils
considèrent que la croissance de la production de biens et services est incompatible
avec le respect de l’environnement et par conséquent avec le développement
durable. A l’évidence, la décroissance doit s’imposer comme un impératif dans
certains domaines des activités prédatrices de l’humanité : par exemple, l’usage des
combustibles fossiles ou la surpêche dans les grandes zones poissonneuses.
Les populations de grands prédateurs, indicateur essentiel de la santé d'un
écosystème, disparaissent à une vitesse effrayante et 90 % des grands poissons,
tels que le thon rouge, ont été surpêchés depuis que la pêche industrielle a
commencé dans les années 1950 et sont aujourd’hui menacés de disparition.
Par conséquent, la croissance économique, synonyme de dégradation des
ressources de matière et d’énergie, ne doit pas excéder le taux de renouvellement
des richesses environnementales.
Ainsi, la coexistence entre croissance et développement durable est complexe. En
effet, la croissance a des conséquences néfastes sur le développement durable ;
cependant, la croissance reste indispensable, par exemple pour la résolution des
problèmes de pauvreté dans les pays du Tiers Monde.
24
C’est pourquoi, sans chercher à trancher pour l’un ou l’autre, la conciliation de la
croissance et du développement durable est véritablement nécessaire. Il faut donc
changer nos valeurs et nos habitudes avant qu’il ne soit trop tard. C’est dans ce
contexte que le mouvement des consom’acteurs se développe.
2. La fin du consumérisme grâce à la multiplication des
consom’acteurs
La consommation compulsive est la base de tous nos systèmes économiques :
consommation d’objets, de kilomètres, de bien être…tout est consommation. Elle
apporte croissance économique, créations d’emplois, richesse, et mieux être
matériel, mais elle apporte aussi épuisement de nos ressources non renouvelables,
pollutions en tout genre, atteintes à la santé ou éradication de la biodiversité.
Aujourd’hui nous devrions diviser par quatre nos consommations et dégagements
polluants dans les vingt ans à venir pour revenir à l’équilibre. Selon l’indicateur qu’à
développé WWF, appelé empreinte écologique : si tous les hommes consommaient
comme les français, il faudrait 2,4 planètes pour subvenir à nos besoins.
Face à ce constat, si nous voulons conserver les bienfaits de la société moderne
(médecine, internet…) il est devenu nécessaire que les consommateurs se
transformer en consomm’acteur responsables et exigeants vis-à-vis des
commerçants. Nous entrons dans une nouvelle l’ère, celle du post moderne, ou les
maitres mots seront la sobriété, la simplicité, la durabilité, la valeur ajoutée humaine,
la responsabilité sociale…
« Dans la création de toute chose, la perfection est atteinte, non pas quand il y a
rien à ajouter, mais quand il n’y a rien à retrancher »10
10 Saint Exupéry
25
a) La montée de la consommation responsable
La plupart du temps lorsqu’un consommateur achète un produit, on ne se demande
pas d’où il vient, comment il a été fabriqué, ni quelles seront ses conséquences sur
la santé ou sur l’environnement. Les consommateurs prennent généralement en
compte les critères simples, tes que la marque, la qualité, le prix, la disponibilité,
l’impulsion d’achat…et ils négligent d’autres critères plus complexes comme l’impact
social et environnemental du produit tout au long de son cycle de vie.
La base du pouvoir du consommateur est d’avoir une meilleure connaissance des
enjeux sociaux et environnementaux liés aux produits achetés, mais aussi à leur
condition de conception et de production. Cependant, il est encore difficile, malgré
les labels et les informations figurant sur les étiquettes de connaitre l’histoire des
produits. Beaucoup d’entreprises indiquent une responsabilité sociale et
environnementale, mais très peu d’entre elles ont significativement changer leurs
pratiques. C’est donc le consommateur qui doit se mobiliser et « surveiller » les actes
des entreprises, dans lesquelles de nombreux abus sont encore réalisés : conditions
de travail inhumaines, enfants au travail, rejets toxiques…
Aujourd’hui, les entreprises, les institutions publiques, mais surtout les
consommateurs peuvent « voter avec leurs achats » en préférant des produits moins
nocifs, comme les produits alimentaires équitables ou biologiques, les détergents
sans produits chimiques, l’électricité verte ou les véhicules moins polluants. Partout
dans le monde, la classe des consommateurs, les personnes qui consomment mais
aussi celles qui ont accès à la télévision et à internet, aux idées et à la culture
diffusées par les médias, est en pleine croissance. En effet, on constate
l’augmentation des ventes de voitures ou de produits électroniques, le
développement des chaines de fast food…
D’après des études11, 1,7 milliard de personnes, soit plus d’un quart de l’humanité,
font désormais partie de cette catégorie de citoyens : près de 300 millions d’entre
elles vivent en Amérique du Nord et en Europe occidentale et 200 millions au Japon.
11 Rapport « State of the world » du Worldwatch Institute
26
Ce qui est nouveau aujourd’hui est que la moitié des consommateurs vit dans les
pays en développement, dont 250 millions en Chine et 150 millions en Inde.
Ces chiffres n’on pas cessé d’augmenter depuis 20 ans au même rythme que la
mondialisation. En effet, la mondialisation a permis à des millions de personnes de
se servir des produits de grande consommation, en permettant la diffusion de la
technologie et du capital nécessaire. Cependant, cette consommation excessive a
pour conséquence un nombre considérable de décharges polluantes.
Parallèlement, cette hyperconsommation coexiste avec la sous consommation de
près de 3 milliards de personnes (pauvreté, manque accès à l’eau, à un domicile…).
On constate que 20% de la population mondiale consomme 80% des ressources. Il
est nécessaire de ne plus accumuler des biens et d’apprendre à consommer mieux,
avec un impact environnemental moindre pour que chacun puisse avoir une
meilleure qualité de vie.
Pour cela, il s’agit dans certains cas de consommer moins, ce que prônent les
tenants de la « décroissance » ou encore de la « simplicité volontaire »12. Dans tous
les cas, il faudrait consommer mieux, en privilégiant les produits ou les services qui
apportent le plus de valeur ajoutée (sociale, environnemental, économique) avec le
moins possible de « coûts cachés » : pollution, impact social négatif, consommation
de ressources ou productions de déchets, c'est-à-dire pour lesquels nul n’est tenu de
payer aujourd’hui (producteur ou consommateur) mais qui resteront à la charge de la
société et des générations futures.
Les français intègrent de plus en plus des critères éthiques dans leur comportement
d’achat : « 38% d’entre eux disent tenir compte des engagements de citoyenneté des
entreprises lorsqu’ils achètent des produits. De plus, une personne sur deux se
déclare prête à payer un supplément de prix pour des produits qui représenterait une
garantie éthique »13. Les consommateurs prennent conscience que derrière les
marques se trouvent des hommes.
12 Article de Libération « objecteur de croissance », 2009
13 Etude credoc
27
Les consommateurs veulent aujourd’hui connaître l’histoire des produits qu’ils
achètent, ils sont même prêts à changer leurs habitudes : « 44% des consommateurs
français et 72% des consommateurs ayant fait des études supérieurs et ayant un bon
niveau de vie se déclarent prêts à changer de marque pour des raisons liées à la
responsabilité sociale des entreprises. De plus, 82% des consommateurs attentifs à
ce qu’ils achètent se disent prêts à boycotter une marque dont ils apprendraient
qu’elle ne garantit pas des conditions de travail correctes à ses employés.»14.
Prenons l’exemple de la marque Max Havelaar, dont la vente de café s’est
généralisée dans tous les Monoprix et est même devenu la deuxième vente du
rayon. Auparavant, cette marque n’était réservée qu’à des magasins spécialisés.
Max Havelaar est un label du commerce équitable, qui achète ses produits à des
petits producteurs dans des pays en développement à un prix juste. « Aujourd’hui,
plus de la moitié des français connaissent le commerce équitable et 19% des
consommateurs sont certains d’avoir déjà acheté un produit qui en est issu. De
même, les produits de l’agriculture biologique connaissent un succès croissant : le
progrès est de 20 à 30% par an. »15
Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux conditions sociales ou
environnementales de fabrication des produits qu’ils achètent. En effet, ils sont de
plus en plus conscients de l’impact de leurs choix quotidiens, que ce soit dans les
rayons de supermarchés ou pour leurs activités de loisirs, multipliées par la loi des
35 heures. Ainsi, le tourisme vert connait un succès grandissant. Enfin, les jeunes
aspirants de plus en plus à faire changer le monde, ne sont pas en reste : ils sont
40% à prendre en considération les aspects environnementaux ou sociaux dans
leurs achats. En France, on les retrouve en assez grand nombre dans les rangs des
altermondialistes ou même des tagueurs qui s’attaquent aux messages pro
consommation des affiches publicitaires du métro parisien. De plus, 70% des jeunes
diplômes disent vouloir intégrer les critères de développement durable dans leur
recherche d’emploi.
14 Rapport PNUE.
15 Elisabeth Laville. Achetons responsable !
28
b) Les alterconsommateurs
15 à 25 % des français seraient ce que l’on appelle des « alterconsommateurs ». Ils
souhaitent reprendre le contrôle sur leurs besoins, selon des règles éthiques et du
respect de l’environnement. Le plus souvent, ils appartiennent à des catégories
socioprofessionnelles supérieures et ont un fort pouvoir d’achat.
Ils ne sont pas sensibles aux marques et à la publicité. Ils sont décidés à utiliser leur
pouvoir de consommateurs afin de faire changer les choses, de faire évoluer le
système pour qu’il soit plus durable.
Les alter consommateurs sont de plus en plus puissants, ce qui s’explique par une
baisse de la vente des produits de grande consommation pour la première fois,
depuis plus de 10 ans. Ils veulent se différencier des hyper consommateurs, qui
recherchent toujours la nouveauté, aime la publicité et s’exprime grâce aux marques.
Aujourd’hui, l’hyper consommateur ne représente plus la société.
De plus en plus de marques se positionnent sur le secteur de l’alter consommation :
Natures et Découvertes, le commerce équitable Max Havelaar, les marques des
grandes enseignes, Carrefour Bio, Monoprix Bio. Ainsi, dans les grandes surfaces,
les ventes de produits labellisées AB ont connu une augmentation sans précédent de
43% entre 2010 et 201116. Les industriels de tous les secteurs se disputent ce
marché en faisant toujours plus preuve d’initiatives marketing.
De nombreuses marques de niches se situent aussi sur ce marché, les vêtements
bios équitables (Ideo) et les salons consacrés au bio se développent de plus en
plus.
Aujourd’hui, il faut aller encore plus loin et revoir en profondeur nos modes de
production et de consommation non durables. Toutefois, les consommateurs sont
mieux en mieux informés: du côté des acteurs privés comme du public (ex :
lancement par les pouvoirs publics du site consodurable.org).
16 Rapport ADEME
29
Les références au commerce équitable ou à la consommation responsable se
multiplient aussi dans les médias : dans la presse grand public et dans les rubriques
shopping des magazines.
En effet, en matière de renseignement sur les produits alimentaires par exemple, les
médias et la publicité restent la principale source d’informations (45%) avec les
emballages (49%) devant les professions de santé (24%) et les parents ou les amis
(16%)17. On constate donc que les médias et les industriels ont une grande
responsabilité sur ces questions de consommation durable.
85% des consommateurs souhaiteraient lorsqu’ils achètent un produit, être
davantage informés sur son origine, 80% sur l’impact de sa fabrication sur
l’environnement et 67% sur les conditions de travail des salariés18.
c) L’exigence de la santé avant tout: un retour vers le local
La qualité sanitaire des produits, est devenue une priorité face aux enjeux
environnementaux, qui bien que toujours présents, ont laissé leur première place.
Ce phénomène continue de s’accroitre au fur et à mesure des découvertes dans
différents secteurs tels que : le bisphénol A dans le biberon, la pollution par les
pesticides et leurs répercussions sur la santé, plus récemment, le scandale du
Médiator a accentué la suspicion des français par rapport à l’usage des produits
chimiques. A tel point que cette pollution, 4ème préoccupation des français, l’année
dernière est devenue aujourd’hui priorité19 devançant le changement climatique et le
manque d’eau. Ainsi, on constate 63% des sondés placent la santé en priorité face à
l’impact d’un environnement pollué.
Le gouvernement a annoncé comme mesure phare du Grenelle de l’environnement,
l’affichage environnemental des produits de consommation courante. Depuis le 1er
juillet 2011 et pour une durée d’un an, cette pratique sera testée par 160 entreprises.
17 Barometre « santé nutrition » du comité français d’éducation pour la santé.
18 60 millions de consommateurs, décembre 2010.
19 Baromètre Ethicity
30
Par ailleurs, un projet parallèle est en cours en vue de la généralisation de
l’affichage.
Le consommateur sera ainsi informé de la quantité de gaz à effet de serre émise
pour la fabrication et le transport du produit, de la consommation d’eau nécessaire et
de la quantité de matériaux recyclés utilisés.
Il ressort que le mode d’alimentation est devenu un moyen de prévention de la santé.
36% des sondés placent en priorité l’argument « bon pour la santé » par rapport à
celui bon pour la planète. (27%).
La pensée que l’on peut préserver sa santé en ayant une alimentation saine se
répand dans les esprits pour contrer les dangers de la pollution. Cette posture
indique le goût des consommateurs pour les produits locaux.20
Par ailleurs, 57% des français pensent qu’il est préférable d’acheter des produits
locaux que des produits bio21. De plus, un français sur deux estime qu’un produit
durable doit être fabriqué localement dans deux buts : faire des économies de
transport favorables à la planète et favoriser l’emploi local.
Les consommateurs sont également satisfaits de pouvoir acheter à des producteurs
à qui ils font confiance ; d’autre part, en achetant local, ils ont le sentiment de faire
jour à une nouvelle société ou le lien social se trouve en bonne place. Nous nous
trouvons ainsi devant un type de consommateurs, baptisé locavores. Ce mot provient
de l’association du mot « local » et « vore ». La communauté des locavores s’étend
partout dans le monde, des Etats Unis à l’Australie en passant par le Royaume Uni.
Le locavore consomme et achète auprès de producteurs locaux. Il a ainsi une
politique du contrôle de ses achats, qu’il effectue selon le calendrier des saisons ;
pour cela, il fréquente les AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture
paysanne). Le nombre d’AMAP ne cesse d’augmenter (1400 en France), il s’agit d’un
regroupement de consommateurs qui s’engage à acheter la production d’un
agriculteur de la région.
20 Elisabeth Pastore-Reis, directrice Ethicity
21 Etude annuelle « Les chiffres de la consommation responsable » publiée par le site
mescoursespourlaplanete.com
31
Conscient de ces émergences, Alter Eco et Equithable commercialisent les premiers
produits équitables issus de fermes françaises ; ainsi est apparu un commerce
équitable Nord-Nord en réponse à la nouvelle demande.
Ainsi, le consommateur français concerné par les crises économiques et
environnementales s’implique de plus en plus dans la formule « penser et agir
local », ce qui est favorable à la consommation collaborative. Cette consommation,
en préservant la santé est en même temps, plus responsable, plus durable. Enfin,
internet en généralisant l’accès à l’information permet aux consommateurs
d’effectuer ses choix en « connaissance de cause ».
C. La démocratisation des nouvelles technologies, évolution indissociable
de cette nouvelle économie.
Internet est devenu un média à part entière, sur lequel passent de plus en plus de
temps les Français. Selon un rapport du Crédoc, sur la diffusion des TIC dans la
société française en 2011, trois quarts des Français ont un ordinateur à domicile et
disposent d’un accès à Internet. C’est désormais un média dominant : les personnes
ayant accès au web déclarent passer presque autant de temps sur Internet que
devant leur télévision (15 heures par semaine pour Internet contre 17 heures par
semaine pour la télévision). En ce qui concerne les cadres et les professions
intellectuelles supérieures, ainsi que chez les adolescents, Internet est même devenu
le média prépondérant.
1. La révolution du « peer to peer »: un partage à grande vitesse
a) l’apparition du « peer to peer »
Avec l’essor d’Internet et des progrès effectués en informatique, de nombreuses
innovations ont été découvertes, notamment le « peer to peer ».
La révolution du « peer to peer » a été à ses débuts mal comprise, mal considérée,
mais elle est aujourd’hui devenue une habitude. Aujourd’hui, il est considéré comme
un modèle de communication à part entière qui change le monde du web.
32
C’est Shawn Fanning, un étudiant de Boston, en 1988, qui est à l’origine du « peer to
peer ». En effet, il développe un logiciel gratuit Napster, permettant d’échanger des
fichiers mp3 grâce à internet. La particularité de ce logiciel est que les fichiers ne
sont pas transmis par le biais d’un serveur mais simplement d’un internaute vers un
autre internaute ; le principe du « peer to peer », d’usager à usager est né.
Ainsi, le "peer to peer » a permis de rendre possible le déploiement d’internautes
intéressés par les mêmes types d’échanges en permettant et en optimisant la
rencontre entre ceux qui possèdent et ceux qui recherchent (des biens, services,
compétences, argent, ressources, …)
Ce système a radicalement modifié Internet dans son essence. Auparavant, les
ordinateurs étaient connecté à internet de manière discontinu et n’appartenait pas au
réseau. Grâce au « peer to peer », aujourd’hui les ordinateurs font partie du réseau.
De plus, le « peer to peer » est un réel avantage pour le travail collaboratif, qui se
réalise aujourd’hui en temps réel. Le « peer to peer » a permis de développement de
l’Intranet, ce qui permet d’exploiter et de partager l’information, les fichiers…Groove
est une des applications « corporate peer to peer », permettant aux utilisateurs de
collaborer en temps réel. Elle propose de multiples services comme, la messagerie
instantanée, la visioconférence, le partage de fichiers, des outils de planning
partagé…
b) la diffusion du « peer to peer » et ses répercussions
Depuis la création de Napster, des sites comme Ebay, Amazon, Airbnb (location
entre particulier de logements), Zilok (location entre particulier d'objets) ont vu le jour
et ont ainsi permis aux consommateurs d'obtenir des produits/services qui
correspondent plus à leurs attentes et de s'organiser entre eux.
En effet, aujourd’hui le « peer-to-peer » s’infiltre toujours plus dans nos pratiques
quotidiennes et pourrait même devenir le prochain modèle économique. Le « peer to
peer » n’est pas seulement ancré dans l’immatériel et le virtuel, il s’agit aussi d’un
partage en temps réel, en réseau, de connaissances et d’informations. Il existe à ce
33
jour des milliers de plateformes « peer to peer » qui viennent de voir le jour ou sont
en train de naître. Nous entrons dans l’ « ère du peer to peer » basé sur la
collaboration et la coopération. Il ne s’agit plus simplement d’échanges direct,
comme cela été le cas par exemple avec Wikipédia, aujourd’hui des projets concrets
et communs se mettent en place. L’intérêt collectif se marie avec l’intérêt individuel
grâce au « peer to peer ».
Le « peer to peer » a souvent été réduit aux questions de téléchargement et fait
référence à une forme d’architecture d’un réseau informatique, dénoncé en ce
moment par la loi Hadopi.
Ce modèle est en train de devenir une alternative au modèle capitaliste, il imprègne
peu à peu nos modes de pensée et d’engagement. Michel Bauwens, théoricien
reconnu des réseaux pair-à-pair et fondateur de la « P2P Fundation » soutient cette
thèse.
Aujourd’hui, internet et plus particulièrement le « peer to peer » a une grande
capacité de sociabilisation, de partage de valeurs communes par le biais de
connaissances : c’est une collaboration à l’échelle mondiale sur de grands projets
matériels, scientifiques ou culturels : Libre office, Wikipédia…
On peut aussi citer l’exemple de The Nutridense Project. Ce projet regroupe des
agriculteurs et des chercheurs du monde afin qu’ils étudient l’efficacité des
nutriments dans le sol. Le but de cette communauté est de partager les expériences
de chacun, les bonnes pratiques afin que chacun puisse progresser dans son propre
travail en impliquant les avancées des autres membres de la communauté. On
perçoit bien la rupture avec le monde uniquement virtuel et l’imbrication entre la
collaboration des idées et leurs applications directes dans le monde matériel.
Internet impacte donc notre quotidien grâce à la multiplication de nouvelles formes
de collaboration. Mais on peut même dire qu’il s’agit d’une révolution du point de vue
de la propriété intellectuelle. En effet, il n’y a plus de privatisation de la
connaissance.
Les brevets freinent l’innovation et créent des monopoles. Par exemple, en Californie
dans les années 1970, le développement des énergies renouvelables a été freiné, ce
34
qui a entrainé un ralentissement du développement économique et social à cause de
cette privatisation de la connaissance. L’urgence climatique actuelle ne nous permet
pas ce genre de privatisation de la connaissance.
Pourtant la loi Hadopi et les traités « ACTA » et « SOPA » entretiennent la notion de
propriété intellectuelle…Toutefois, ces lois permettent aussi de créer de nouvelles
initiatives, de favoriser le changement. En effet, elles permettent la création d’un
monde alternatif.
Avec le « peer to peer », basé sur la collaboration et le partage, la richesse est créée
dans la valeur d’usage. En effet, très peu de richesses monétaires sont générées,
l’important est de recréer du lien. Mais, aujourd’hui notre société est faite de façon à
maximiser le profit. L’idéal serait de créer un nouveau type de société qui travaille
pour la communauté, comme par exemple, les entreprises sociales ou le but social
prime sur le profit. Dans les AMAP, par exemple, les gens sont solidaires entre eux
de par leur investissement envers les producteurs.
Cependant, les entreprises ont des marges de manœuvre limitées, en effet elles sont
soumises à de nombreux impératifs économiques. C’est là que les modèles
alternatifs prennent tous leur sens. Pour cela, il faudrait favoriser le développement
d’entreprises qui contribuent au commun, telles que les coopératives de
développement de logiciel libre. De plus, il serait pertinent que les acteurs de
l’économie sociale développent leur production entre pairs. C’est grâce à cette union
qu’une nouvelle économie éthique pourra voir le jour dans laquelle les entreprises
soutiennent le bien commun parce qu’elles en vivent.
Ainsi, c’est grâce à la technologie du « peer to peer » que la naissance du web 2.0 et
de l’économie de partage ont été possible. 22
22 Cf Annexe 1 : Du peer to peer à la consommation collaborative
35
2. Le web 2.0 : la clé de voute de la création de communauté.
Le web 2.0 regroupe une multitude d’application émergente depuis l’explosion en
2001 de la « bulle » internet. En effet, en France, le nombre d’internautes a connu
une augmentation fulgurante, il est passé de 10 millions en 2001 à 38 millions en
2011. Cette évolution touche toutes les tranches d’âge de la population.23 Dans ce
contexte ; le web 2.0 constitue une révolution ; il n’y avait jamais eu auparavant de
phénomène aussi important sur la toile. Les sites et applications innovantes
naissaient avec une régularité déconcertante. Symbolisé par des applications phares
tel que YouTube, Facebook, Flick’R mais aussi les blogs et les wikis.
L’utilisateur n’est désormais plus considéré comme tel. Il est co-développeur, c'est-à-
dire qu’il est un des acteurs de la chaine d’élaboration du produit et de ses mises à
jour.
Ainsi en 2005, on pensait déjà que : « Le business model de Microsoft dépend de la
remise à niveau que chacun fait sur son PC tous les deux ou trois ans. Celui de
Google ne dépend que de la capacité des utilisateurs à se servir des nouvelles
fonctionnalités qui lui sont proposées. » 24
a) L’émergence du web 2.0 et de l’Internet participatif
Les internautes français utilisent de plus en plus le web 2.0 : 75% visitent
régulièrement des forums de discussion, 71% des blogs, 67% des sites de partage
de vidéos comme YouTube ou DailyMotion, et 67% sont inscrits sur des réseaux
sociaux en ligne comme Facebook ou Twitter.
Force est de constater, à travers ces pratiques que le web est devenu social et
participatif. Il joue un rôle de plus en plus important dans la décision d’achat, puisqu’il
est fréquent que l’on cherche à faire de bonnes affaires en utilisant un comparateur
de prix ou en se rendant sur un site de e-commerce offrant les meilleurs prix, ou
encore que l’on consulte l’avis de ses pairs sur Internet à propos d’un produit pour
23 cf Annexe 2 : Le nombre d’internautes et leurs âges en France.
24 Article Zdnet 2005
36
faciliter son choix, notamment pour des achats fortement impliquant qui nécessitent
une longue phase de renseignement préalable. L’exemple type étant celui du voyage
: l’internaute recherche de plus en plus les prix les plus bas des vols et des hôtels
grâce à des sites spécialisés comme Tripadvisor ou Hotels.com, et consulte les avis
des internautes ayant fréquenté l’établissement pour prendre sa décision finale.
Le terme de web 2.0 a été employé pour la première fois en 2003 par Dale
Dougherty, membre de la société O’Reilly Media lors d’une conférence avec
Medialive. Il y notait l’importance majeure qu’avait prise le web avec l’apparition de
nombreux nouveaux sites et applications innovantes, ayant survécu à l’explosion de
la bulle Internet de 2001.
Selon lui, Internet est entré dans une nouvelle ère, celle du « web 2.0 », marquée
entre autres exemples par le passage de sites comme Brittanica Online à Wikipédia,
d’Ofoto à FlickR, de la publication à la participation, ou encore de la rigidité du
contenu à la syndication de contenu. A l’issue d’une première conférence sur le web
2.0, le terme se popularise. Il est ensuite explicité en détail en 2005 par Tim O’Reilly,
qui développe ce que signifie et englobe cette expression dans son article fondateur
What is Web 2.0
Tout d’abord, cette nouvelle ère de l’Internet se caractérise selon lui par le fait que le
web est vu en tant que plate-forme, cette dernière supplantant les applications ou
simples logiciels propriétaires. Par exemple, Netscape, navigateur emblématique du
web 1.0, a disparu, pendant que Google installait son hégémonie sur la toile, en
plaçant « sa valeur dans l'espace situé entre le navigateur et le serveur de contenu,
comme un opérateur entre l'utilisateur et son usage du web ». Ce nouveau web est
possible grâce à l’apparition du « peer-to-peer. L’idée est désormais de tirer partie de
l’intelligence collective, et de créer de la valeur à partir des diverses actions des
utilisateurs. L’intelligence collective permet de créer, innover et inventer grâce à la
coopération d’internautes entre eux. Cette capacité collective a une importance
fondamentale, puisque notre société devient dépendante de son savoir.
Par conséquent, les sociétés du web 2.0 s’attachent à collecter un maximum de
données d’utilisateurs, outre l’utilisation normale de leur application, pour créer de la
valeur. C’est cette vision qui est à l’origine du succès de l’Open Source, fondée sur
37
l’architecture de la participation. Un autre exemple emblématique est celui de
l’encyclopédie en ligne Wikipedia, « basée sur le principe peu commun qu’une entrée
puisse être ajoutée par n’importe quel utilisateur du web et modifiée par un autre »,
permettant un enrichissement permanent et une base d’informations considérable et
autocontrôlée par l’ensemble de ses membres.
En outre, le web 2.0 voit aussi l’apparition du concept de « folksonomy », fondée sur
un principe de « catégorisation collaborative des sites utilisant des mots clés
librement choisis » par un système de tags permettant des associations multiples
facilitant la recherche sur des moteurs. L’implication des utilisateurs devient donc un
facteur clé de succès dans l’univers du web 2.0.
Autre phénomène remarquable dans cette nouvelle ère, celui des blogs. Sorte de
journaux intimes en ligne, créés par des internautes désireux de partager sur leur
passion, leur vie, ou un domaine qui les intéresse particulièrement. Un succès qui a
été facilité par la technologie RSS (real simple syndication), permettant à un
utilisateur non seulement d’afficher une page, mais de pouvoir s’y abonner en étant
prévenu dès que son contenu change. Cette technologie a rendu possible le
développement d’agrégateurs de contenus tels que le portail web Netvibes, par
exemple, qui permet à ses utilisateurs de se créer une page web personnalisée,
regroupant les contenus de leurs choix en provenance d’autres sites (articles de
quotidiens ou de magazines en ligne, billets issus de blogs, météo, programme TV,
page Facebook ou Twitter, etc.) grâce à un système de widgets, outils s’apparentant
à de petites boîtes au contenu personnalisable.
Pour résumer, toutes ces évolutions ont en commun de mettre l’internaute au cœur
de la toile, lui permettant de créer lui même son propre contenu, de filtrer le contenu
qui l’intéresse, de partager données et informations avec ses pairs, de rester en
contact avec ses amis, et en somme, de devenir lui-même un média. Les concepts
clés du web 2.0 sont donc interaction et partage. Par exemple, nombreux sont
désormais les sites d’information comme ceux des quotidiens Le Monde ou
Libération qui permettent à leurs lecteurs de réagir à chaque article mis en ligne, et
de les partager sur leur réseau social préféré en cliquant sur un simple bouton. Ces
38
notions sont parfaitement assimilées par ces réseaux sociaux en ligne, plateformes
sociales et interactives en plein essor.
Les réseaux sociaux numériques sont un phénomène relativement récent, issu de
l’avènement du web 2.0 qui a rendu possible l’interactivité, la création et la
syndication de contenu par n’importe quel utilisateur sur Internet. Ils attirent des
millions d’utilisateurs et rendent le web social. Les réseaux sociaux numériques sont
définis par Boyd et Ellison (2007) comme des « serveurs web qui permettent aux
individus de se construire un profil public ou semi-public au sein d’un système
délimité, d’élaborer une liste des autres utilisateurs avec qui ils sont en contact, et de
voir et explorer les listes de ces contacts et celles faites pas d’autres au sein du
système». Les auteurs en dénombrent alors plusieurs centaines, dont les
caractéristiques varient du partage de photos au regroupement de personnes par
intérêt, opinions politique ou encore origine ethniques. Ces réseaux sociaux en ligne
innovent en permettant à leurs utilisateurs d’articuler et de modéliser leur propre
réseau social. On n’y cherche pas nécessairement à se faire de nouveaux contacts,
mais d’abord et avant tout à communiquer avec les personnes faisant déjà partie de
son réseau social étendu.
Les réseaux sociaux en ligne drainent aujourd’hui une audience massive sur
Internet. En termes d’usages, leur fréquentation est même passée devant l’envoi d’e-
mail, selon une étude Nielsen, qui rapporte également que deux tiers de la
population internaute mondiale visite des réseaux sociaux en ligne ou des blogs, si
bien que le secteur représente désormais 10% du temps total passé sur le web. Ces
communautés de membres ont pris la quatrième place du secteur, derrières les
moteurs de recherche, les portails web généralistes.
En France, 78% des internautes sont membres d’au moins un réseau social en ligne,
et un internaute est inscrit à 2,9 réseaux sociaux en moyenne, selon l’IFOP. Les plus
connus sont Facebook, Twitter , Viadeo et LinkedIn…
Facebook est sans aucun doute du réseau social en ligne le plus célèbre et le plus
fréquenté au monde, ayant été particulièrement mis sous les feux des projecteurs en
2010 avec le film The Social Network de David Fincher, qui raconte l’histoire de son
créateur, Mark Zuckerberg. A l’origine, le jeune étudiant de Harvard avait conçu en
39
2004 son réseau, thefacebook.com, comme un site fermé réservé aux étudiants de
l’université, avant que celui ne s’étende aux autres universités. Comme son nom
l’indique (le trombinoscope) permet à ses utilisateurs, outre la création de leur profil,
de télécharger leurs photos et de regarder celles de leurs amis.
Dès lors, le réseau social voit son audience croître de façon exponentielle. On
dénombre 900 millions d’utilisateurs au premier semestre 2012, le site étant devenu
le troisième le plus visité au monde25. En France, Facebook est le 4ème site le plus
visité avec environ 25 millions d’utilisateurs en janvier 201226, soit environ 60% de la
population internaute27,
Son intérêt et son succès s’expliquent sans doute par le fait que Facebook synthétise
en quelque sorte les avantages de la majorité des autres réseaux sociaux en ligne,
comme l’explique le bloggeur Cédric Déniaud : « Comme MySpace, il permet
facilement de se créer une page personnelle et d’y mettre en avant ses goûts, ses
activités ; comme Copains d’avant et Viadeo, il joue le rôle d’entremetteur et
découvreur d’amis actuels et passés; comme Meetic, il permet de faire de nouvelles
rencontres ; comme DailyMotion, YouTube ou FlickR, il permet de partager ses
vidéos ou ses photos avec ses amis; comme Twitter, il permet d’être en contact
instantané avec la vie de son entourage (mini-feed) ; comme MSN Messenger, il
permet de communiquer en messagerie instantanée avec ses amis ; comme
Friendfeed, il propose des outils de filtre des mini-feed de ses amis afin de mieux
filtrer l’information ; comme un blog, il permet de communiquer sur ses envies, ses
goûts, ses idées via les applications ou les groupes permettant l’enrichissement de
son profil Facebook; et comme un site e-commerce, il permet de trouver des idées
d’achat : recommandation d’amis, applications e-commerce de marque ».
Des recherches académiques effectuées aux États-Unis auprès d’étudiants montrent
que Facebook est avant tout un réseau social d’appartenance en faisant apparaître
que les principales motivations qui les poussent à utiliser Facebook : il s’agit avant
tout de reprendre contact avec d’anciens amis, de rester en contact avec ses amis
25 étude mondiale du cabinet comScore publiée par Les Echos.
26 cf Annexe 3 : Le nombre d’utilisateurs Facebook dans le monde fin 2011.
27 Institut Médiamétrie
40
actuels, et de poster et de regarder des photos. Même si des exceptions existent, les
recherches indiquent que la plupart des réseaux sociaux en ligne formalisent des
relations sociales déjà existantes. Facebook est utilisé principalement pour maintenir
et renforcer des relations qui existent hors ligne dans la vie « réelle » plutôt que pour
rencontrer de nouvelles personnes, même si les liens entre ces personnes peuvent
être relativement faibles.
Des sites comme MySpace ou Facebook permettent aux jeunes américains de
socialiser avec leurs amis quand ils ne peuvent pas se réunir physiquement, et sont
des espaces « publics » qui permettent la socialisation.
Twitter, quant à lui, est un réseau social en ligne dit de « microblogging » qui permet
à ses utilisateurs de poster des messages courts de 140 caractères au maximum,
appelés «tweets » (gazouillis en français) via Internet, SMS ou messagerie
instantanée. Ces courts messages, comparables aux statuts Facebook, sont
accessibles à une communauté de membres abonnés ou un public plus large
(comme les blogs). En février 2011, le nombre d'utilisateurs de Twitter dans le
monde était près de 400 millions et de 5 millions en France28. Le microblogging est
certainement la forme de média social qui connaît la plus grande croissance parmi la
population internaute mondiale.
Contrairement à Facebook, Twitter est bien plus un réseau d’information que d’amis.
On l’utilise principalement en France pour chercher, échanger et lire des informations
(pour 51% des utilisateurs). 29
41% des URLs ouvertes via des tweets sont des actualités, et 55% de ses
utilisateurs n’ont d’ailleurs jamais posté un seul tweet, limitant leur usage à une
simple consultation. Comparativement aux autres sites communautaires comme
Facebook, Twitter est également bien plus centré sur les affaires (on y fait de la veille
stratégique) et sur l’actualité des célébrités. L’utilisateur type de Twitter est assez
jeune, la trentaine, technophile et adepte du téléphone. C’est également un média de
prédilection pour les célébrités, les bloggeurs et certains hommes politiques. En effet,
on parle souvent de Twitter comme d’un média de leaders d’influence.
28 cf. Annexe 4: Le nombre d’utilisateurs Twitter.par pays
29 étude Twitter Study by faberNovel & l'Atelier
41
Parmi les nombreux réseaux sociaux en ligne existants, certains se sont spécialisés
dans le réseautage professionnel. C’est le cas de LinkedIn et Viadeo, pour ne citer
que les plus connus. Apparus également à l’ère du 2.0, ces réseaux permettent à
leurs utilisateurs de mettre leur CV et leur carte de visite professionnelle à disposition
sur la toile pour que chacun puisse les consulter. Il s’agit également de se créer des
contacts issus du monde professionnel ou de rester en contact avec des collègues.
b) Une multiconnectivité qui s’étend au monde réel
L’accès à internet grâce au mobile est en train de révolutionner notre façon d’utiliser
le web. En effet, 4 milliards de mobile sont utilisés dont 27% sont des smartphones
dans le monde. En France, les mobinautes ont été estimés 19 millions fin 2011. D’ici
3 à 4 ans, l’accès à internet par l’intermédiaire du mobile sera supérieur à celui par
l’ordinateur. Dans le monde, en 2011, on comptait 1 milliard de mobinautes contre
1,4 milliard d’utilisateurs sur l’ordinateur. En 2015, la tendance s’inversera, on estime
qu’il y aura environ 2 milliards de mobinautes et seulement 1,6 milliards d’utilisateurs
de l’ordinateur.30
Aujourd’hui, les internautes deviennent des « everynautes », ils représentent un tiers
des internautes et sont multiconnectés. Ils ont l’habitude de se connecter au moins
sur au moins deux types d’écran tels que : smartphone, ordinateur, tablette,
télévision connectée, ordinateur portable.
En outre, les usages évoluent aussi, les internautes consultent davantage les
réseaux sociaux sur leur mobile. En effet, Facebook, Twitter et You Tube font partie
du top 5 des marques les plus consultés sur les mobiles. Un tiers des utilisateurs de
Facebook utilisent l’application sur leur mobile. Quant à Twitter, les utilisateurs se
partagent la consultation par moitié sur leur mobile et l’ordinateur. De plus, chaque
jour, 200 millions de vidéos sont consultés sur You Tube par l’intermédiaire de
30 cf. Annexe 5 : Le panorama du marché mobile et son avenir dans le monde
42
smartphones.31 En résumé , on constate l’utilisation grandissante du web 2.0 et des
réseaux sociaux sur les smartphones.
Par ailleurs, on voit apparaitre un nouveau marché, celui du paiement mobile, qui
n’en est encore qu’à ses balbutiements, mais on compte de nombreux exemples
concluants dans le monde notamment au Japon, ou ce mode de paiement s’est
démocratisé, il est basé sur une technologie NFC (Near Field Communication).
Il s’agit d’une technologie qui rend le paiement complètement sans contact et permet
de dématérialiser les titres de transport, les cartes de fidélité, d’identité, les
coupons…
Ce type de mode paiement commence à se répandre, il peut constituer un réel
avantage pour la consommation collaborative. En effet, à Toulouse, des industriels et
des entreprises d’auto partage (Mobilib et Ly Berta) se sont associés pour lancer une
expérimentation concluante utilisant la NFC. Cette expérience permet aux agents
équipés de mobiles avec la technologie NFC de réserver, d’ouvrir et de démarrer le
véhicule à l’aide seulement de leurs mobiles. Ce mobile permet aussi de s’assurer
que tous les équipements de sécurité sont présents et le cas échéant, de transmettre
l’information aux services dédiés.
Cette nouvelle technologie permet de déposer des données, d’emmagasiner
plusieurs cartes virtuelles dans son mobile et ainsi de pouvoir accéder à des services
multiples.
D’autre part, au-delà du web 2.0, la multiconnectivité, actuellement possible grâce
aux smartphones et aux tablettes ira encore plus loin avec l’arrivée du web 3.0, de
l’internet des objets. Aujourd’hui, Internet nous permet de connecter nos maisons,
nos voitures et d’autres appareils
L’internet des objets nous permettra d’étendre Internet à des choses ou à des lieux
de la vie quotidienne. Ces nouvelles technologies (étiquettes codes, puces RFID…)
augmenteront les liaisons entre notre quotidien et les services en ligne. Ces
31 cf. Annexe 6 : Les utilisateurs des réseaux sociaux sur les mobiles dans le monde
43
« étiquettes » pourront être lues par des dispositifs spécifiques sans fil et aussi par
des mobiles, ce qui contribuera surement à l’émergence de la réalité augmentée.
La consommation collaborative constitue un premier pas vers la démocratisation de
l’internet des objets. En effet, les produits sont aujourd’hui amenés, avec l’économie
du partage, à avoir plusieurs vies et donc plusieurs propriétaires. Grâce à l’internet
des objets, les produits pourront alors « raconter leurs histoires ».
Ainsi, au Royaume Uni, la société TOTem et l’ONG Oxfam, célèbres pour leur
boutiques de vêtements et d’objet d’occasion, ont donné vie à leurs produits.
Chaque propriétaire enregistre l’histoire, l’anecdote liée aux produits. Les clips audio
sont alors associés à une étiquette dotée de la technologie RFID et d’un QR code
que le client peut scanner grâce à son mobile. Les clients peuvent entendre l’histoire
des articles d’occasion avant de l’acheter ou non. Une façon de faire comprendre
que la valeur des produits n’est pas seulement pécuniaire, mais qu’elle est aussi
« affective ».
De même, la société brésilienne de Music Branding, Gomus, met en place des tags
RFID permettant d’associer des vêtements à un univers sonore et musical spécifique
pendant l’essayage en magasin.
De plus, on peut penser que le web 3.0 facilitera les systèmes de réputation en
fusionnant l’ensemble des données des plateformes collaboratives et des réseaux
sociaux et en créant un sorte d’avatar virtuel.
44
c) Les systèmes de réputation, pierre angulaire
indispensable
La consommation collaborative ne fonctionne que grâce à deux conditions : il faut
que l’on soit en présence d’un certain nombre d’utilisateurs (masse critique) et il faut
développer la confiance envers le système et ses utilisateurs. Qui aurait pu se
douter, il y a quinze ans que les gens pourraient acheter des objets à des inconnus
en toute confiance ?
Tout d’abord, l’émergence de nouveaux marchés n’a été possible que grâce aux
possibilités offertes par le web collaboratif. On assiste à la création de véritables
systèmes de réputation qui ont permis la construction de la confiance des acheteurs
ainsi que la sauvegarde de la sincérité des vendeurs.
Ebay est en l’exemple même, ce site a ouvert un nouveau marché, celui de la
revente sur internet. De plus, il permet aux acheteurs d’évaluer un vendeur et ainsi
de créer sa e-réputation. La web réputation devient la nouvelle valeur d’échange. Un
acheteur fera davantage confiance à un vendeur ayant une bonne réputation sur
Ebay plutôt qu’à un nouveau membre, ce que lui confère un avantage certain sur les
sites de consommation collaborative.
De plus, le partage d’information virtuelle entraine une augmentation des échanges
dans la vie réelle, par exemple, location de voitures, d’objets… Les internautes font
confiance en ligne, ce qui les entraine à échanger afin de réformer notre société pour
qu’elle soit plus collaborative.
En effet, selon une étude sur l’économie du partage, « 78% des participants qui ont
des expériences de partage en ligne admettent qu’ils seront plus enclins à partager
avec des étrangers et 75% d’entre eux pensent que leurs échanges hors ligne va
s’accroître dans les années à venir. ».32 De plus, 67% des interrogés considèrent
aussi important de faire des économies que le « bien engendré pour la société. »
Il serait intéressant dans l’avenir que chacun ait un profil transversal de toutes les
communautés auxquelles il participe :
32 Etude réalisée par Shareable Magazine et Latitude Research « the new sharing economy »
45
« Aujourd’hui, chaque site développe son propre profil avec la réputation qui
l’accompagne. Demain, on pourrait imaginer d’agréger ses différentes réputation afin
de crédibiliser un profil global ».33
C’est l’objet de Klout, plateforme collaborative, qui souhaiterait créer un système de
réputation regroupant les multiples réputations sur le web. Ce service pourrait être
attenant aux réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter ainsi qu’aux portraits
d’agrégation de profil (about me, flavors me)
3. La génération Y, déjà familiarisée avec ces nouvelles formes de
consommation
On constate qu’une majorité d’adeptes de ces nouvelles formes de consommation
sont issus de la génération Y. En effet, les réseaux sociaux qui n’ont pas de secret
pour eux, ont un impact incroyable. Cette génération est en train de franchir le pas
en se mettant à tout partager et ils n’ont aucun mal à le faire puisqu’ils sont prêts à
faire confiance à de parfaits inconnus.
Il est nécessaire pour mieux comprendre les particularités de la génération Y de
mettre en perspective les caractéristiques des générations précédentes.
Tout d’abord, une génération est un « groupe d’individus qui partage dans un
contexte économique et social donné la même histoire »34. Chaque génération est
marquée pour la vie par les expériences initiatrices vécues au temps de la jeunesse
(20 ans). L’impact est d’autant plus important que les ruptures sont fortes.
L’histoire influence profondément les « moteurs » de chaque génération. Ainsi, on
constate que celles qui apparaissent dans la première partie du XXème siècle se
construisent autour des critères économiques (crash boursier, guerres mondiales…).
Les générations nées ensuite subissent plus l’influence des critères culturels ou
sociaux (Mai 68, sida…), alors que les dernières générations dépendent plus
33 Antonin Léonard, créateur du blog consommation collaborative
34 « La génération Y, mode d’emploi » Daniel Olivier, Catherine Tanguy
46
fortement des mutations technologiques. Cette classification dépasse les frontières
géographiques. Mondialisation oblige, on retrouve aujourd’hui des comportements
similaires dans les pays émergents.
Aujourd’hui, trois générations différentes cohabitent : les baby boomers, la
génération X et la génération Y. L’accélération du changement fait que l’on peut déjà
prévoir l’apparition de la génération Z.
La génération des baby boomers (1945-1965) a bénéficié de la croissance, du plein
emploi et de la liberté sexuelle. Cette génération a mis en valeur l’estime de soi et
l’importance accordée à la carrière. Mai 68 a été un marqueur décisif, qui illustre la
prise de pouvoir d’une génération qui le détient aujourd’hui. Eprise de liberté, elle a
paradoxalement inventé la société de consommation.
La génération X (1965-1980), pour génération sacrifiée a connu la crise économique,
l’effondrement des valeurs et le choc technologique. Ils ont été les premiers à vivre
massivement la séparation de leurs parents, les premières victimes de la crise de
l’emploi. Désabusée, elle a perdu sa confiance en l’avenir et en elle-même et ne
s’exprime guère à travers une contestation constructive.
La génération Y (1980-1996), qui reprend un certain nombre des caractéristiques de
sa devancière, nourrit l’ambition d’être pionnière et pas seulement suiveuse. Son
nom trouve son origine dans le fait que ces jeunes Y incarnent à travers le
« pourquoi » (why d’où le Y), la remise en cause des valeurs et des contraintes qu’on
peut leur imposer.
En France, on compte environ 13 millions de personnes, soit 21% de la population
qui sont nait entre 1978 et 1994, c’est la génération la plus importante depuis les
baby boomers. Aux Etats Unis, elle regroupe environ 70 millions de personnes et en
Chine, 200 millions.
La vision du monde et les comportements de cette génération trahissent un décalage
important avec la manière de vivre des baby boomers et des X, mais relèvent aussi
une formidable adaptabilité à la société actuelle.
47
Cette génération est marquée par l’accélération des progrès technologies. Jamais
dans le passé, une génération n’a eu à ce point et aussi rapidement les moyens
d’affirmer son pouvoir.
Ces adolescents et jeunes adultes ont grandi au moment ou l’usage d’internet se
généralisait : l’e-culture est leur royaume, c’est pour cela que l’on les désigne par le
terme de digital natives.
Ils ont grandi avec l’évolution des nouvelles technologies et sont très à l’aise avec
ces dernières. Ils sont constamment entourés par ces nouveaux outils, que ce soit
via leurs ordinateurs, mp3, téléphones portables (en 2010, 80% des 16-24 ans
utilisaient un ordinateur de manière quotidienne).
Cette génération n’a donc quasiment pas connu le monde sans Internet ou les
téléphones portables. Ils ont toujours été hyper connectés (Iphone, ordinateurs
portables, etc.) et savent se servir du Web mieux que quiconque. Ils sont donc en
permanence en contact les uns avec les autres que ce soit via email, messageries
instantanées ou réseaux sociaux de type Facebook (une grande majorité d’entre eux
possède un compte).
Sachant utiliser les nouvelles technologies, ayant le réflexe « google » avant le
réflexe bibliothèque, journaux papiers (en forte baisse d’intérêt chez les jeunes) ou
encyclopédies (qu’ils considèrent comme immédiatement obsolètes puisque non
remises à jour quotidiennement) ; il en résulte une difficulté à l’attente pour obtenir
l’information recherchée : une culture du rapide.
Aujourd’hui, Internet semble être devenu leur média privilégié. C’est un média réactif
en constante évolution et amélioration qui partage les valeurs de cette jeunesse :
inter connectivité, individualisme, réactivité face à l’environnement, consommateurs
et comparateurs, besoin de rapidité.
Ils sont également très attirés par les dernières technologies et souhaitent
généralement posséder ce qui se fait de mieux. Ce secteur étant en constante
évolution, les innovations se succèdent très rapidement et ils deviennent donc de
grands consommateurs de nouveautés.
48
Cette hyper connexion les rend très réactifs, beaucoup plus multitâches que leurs
parents. Ils démontrent un fort intérêt à la consommation d’informations sur les sujets
les intéressants puisque capables de trouver sans cesse de nouvelles sources de
documentation (réseau, Google news, flux RSS, etc.) : ils n’apprennent plus, mais
trouvent l’information en temps voulu.
De plus, depuis l’avènement du web 2.0, les digital natives ont pris l’habitude de
réagir, de commenter, d’argumenter, de partager leurs idées et vies personnelles sur
Internet. Cette dimension participative entraine une plus grande facilité des moins de
30 ans à exprimer directement et spontanément leurs avis.
Antonin Léonard, jeune entrepreneur à l’initiative du blog de la consommation
collaborative souligne que les adeptes de la consommation collaborative sont en
majorité issus de la génération Y. «Facebook, Twitter, tous ces sites de partage
d’infos ont un impact incroyable. La génération Y est en train de franchir le pas en se
mettant à partager biens, objets et activités commerciales. Ce sont les mêmes qui
font du covoiturage, du couchsurfing et se lancent, pour certains, dans le domaine de
la consommation collaborative via des start-up.»35 Par exemple, les fondateurs
d’Airbnb avaient seulement 26 ans lors du lancement de leur startup; le fondateur de
RelayRides avait 28 ans etc.
Par ailleurs, la génération Y a aussi un rapport différent à l’accès à l’information et la
valorisation des sachants.
La conception classique met en avant le sachant comme celui qui détient un savoir.
Dans les entreprises, nous retrouvons cette même conception, mais c’est le manager
qui est détenteur de l’information vis-à-vis des autres salariés.
Toutefois, la génération Y s’attache davantage au partage et à la diffusion du savoir.
Aujourd’hui, les jeunes opposent le classique « je sais donc je suis » au « je partage
donc je suis ». Ce nouveau credo, met en avant le partage de connaissance et la
réputation, qui découle de la reconnaissance de groupes de personnes, appelé
communautés, à la fois « apprentis » et « maitres ».
35 Cf. Annexe 7 : L’utilisation des plateformes participatives selon l’âge en 2011
49
Ainsi, dans ce contexte de crise économique, où chacun cherche à optimiser son
bugdet, la consommation collaborative est apparue comme une alternative à
l’hyperconsommation. La sensibilité à la question environnementale, illustrée par la
consommation durable et locale vont dans le sens d’une démocratisation de ces
nouvelles formes de consommation. De plus, l’essor de cette tendance est
indissociable de l’émergence de plateformes collaboratives ouvertes par le web 2.0
et la naissance de communautés.
Il s’agit aujourd’hui de posséder moins mais de vivre davantage d’expériences de
consommation et de manière collaborative. Ce terreau fertile entraine le
développement de nombreuses startups qui veulent profiter de ce nouvel
engouement.
50
A. Les différents types de systèmes collaboratifs : un mouvement qui
s’étend à tous les secteurs ......................................................................... 51
1. La redistribution des marchés ............................................................. 52
2. Les styles de vie collaboratifs .............................................................. 57
3. Un système de service de produits ..................................................... 67
B. L’impact sur les entreprises classiques et leur business model ..... 74
1. Le bouleversement des acteurs économiques classiques .................. 74
2. La consommation collaborative : un phénomène à nuancer ............... 80
Partie II : De l’hyperconsommation à
la consommation collaborative : une
redécouverte du lien social
51
A. Les différents types de systèmes collaboratifs : un mouvement qui
s’étend à tous les secteurs
L’expression Consommation collaborative provient de la traduction du mot anglais
« Collaborative Consumption », utilisée par Rachel Botsman et Roo Rogers, auteurs
du livre « What’s mine is yours ? The rise of collaborative consumption », paru en
2011. Rachel Botsman, consultante en stratégie et innovation est la première à avoir
écrit sur cette révolution des modes de consommation.
On peut définit ce terme de la façon suivante : « La consommation collaborative
correspond au fait de prêter, louer, donner ou échanger des biens grâce aux
technologies nouvelles du web (web 2.0) via des places de marchés mondiales ou
locales et des communautés peer-to-peer. »36
Cependant, ce mode de consommation n’est pas récent. En effet, le troc existe
depuis l’époque de l’Egypte Ancienne et des Amérindiens. Il constituait le seul mode
d’échange. L’apparition de la monnaie est survenu lors la Grèce Antique, toutefois le
troc est toujours resté présent et revient au goût du jour en temps de guerre ou de
crise.
L’échange, quant à lui, constituait un gage de paix entre les sociétés primitives. Le
partage, le don font partie intégrante de notre quotidien. Nous les exerçons auprès
de notre entourage, famille, amis, mais aussi auprès des plus démunis.
Phénomène antique pour certains, mouvement de grande ampleur pour les autres, il
n’en reste pas moins que la Consommation Collaborative est en train de
« réinventer à la fois ce que nous consommons, mais également comment nous
consommons ».
Ce phénomène remet toutefois en question les convictions marketing et
managériales. Les marques devront s’adapter au changement de cycle de vie des
produits et ainsi passer à la conception de services en se focalisant sur l’utilisation et
l’expérience.
36 Antonin Léonard, créateur du portail consocollaborative.com et de la communauté Ouishare
52
« On se rend compte que ce mouvement n’est pas qu’une tendance passagère. Les
publications se multiplient, les consultants commencent à s’intéresser au
phénomène, les politiques envisagent de nouvelles lois pour favoriser le
développement de cette économie du partage, les startups font des levées fonds
impressionnantes : tout converge pour nous faire dire qu’une nouvelle économie est
vraiment en train d’émerger. »37
Rachel Botsman a ainsi identifié trois approches caractéristiques de cette révolution :
la redistribution des marchés, les styles de vie collaboratifs et le système de services
de produits.
1. La redistribution des marchés
Comme dans tout magasin de seconde main, des sites comme Ebay ou Freecycle
permettent aux gens de vendre des articles dont ils n’ont plus l’utilité. Cependant, le
fait qu'ils soient en ligne apporte une nouvelle dimension. Rachel Botsman, se réfère
au web comme un moyen de relier un éventail incroyablement large de personnes
avec de nombreux besoins à d’autres ayant une grande gamme d'offres.
37 Neal Gorenflo, fondateur et rédacteur en chef du magazine Shareable
53
Les systèmes de redistribution, organisent le passage de biens d’une personne les
possédant à une personne les recherchant. C’est le principe du C to C, de Thredup
et des plateformes comme LeBonCoin mais aussi du troc, du don, de l’échange.
Ce système est très intéressant puisqu’il aide à maximiser l'utilisation d'un produit. Il
est de plus en plus considéré comme le 5ème R : réduire, réutiliser, recycler, réparer
et redistribuer puisqu’il étend le cycle de vie des produits et par conséquent diminue
les déchets.
a) La vente et l’achat d’objet d’occasion
En France en 2010, 49% des gens ont déjà acheté un objet ou plusieurs d’occasion
et 28% en ont déjà vendu38. Le marché de l’occasion pèse près de 6 milliards
d’euros en France, Internet en est responsable à raison de 53% pour les ventes,
63% pour les achats39. Le marché a donc bon espoir ;il est l’un des seuls à voir son
chiffre d’affaires augmenter en période de crise. Les ventes de produits d’occasion
progressent sans cesse, on note d’ailleurs une hausse importante entre 2010 et
2011 des internautes achetant ou vendant en ligne. Parmi les articles les plus
achetés en ligne, on trouve les livres (21%), les vêtements (14%) et les jeux vidéo
(13%).
Leboncoin est l’un des sites les plus représentatifs. Les annonces s’étendent à la
France entière et ne rassemblent quasiment que des produits de seconde main
vendus par des particuliers.
Leboncoin.fr, c’est 2,2 millions de visiteurs uniques par jour, 9 millions d’annonces
disponibles, 250 000 nouvelles par jour, 4 milliards de pages vues par mois40. Ce site
est le leader en audience des sites de commerce « Customer to Customer »41.
38 « Internet booste le marché de l’occasion ». Le journal du net
39
« Chiffre d’affaire du marché de l’occasion en France ». www.planetoscope.com
40
« Leboncoin dépasse Ebay » www.clubic.com
41 « Client à Client »
54
b) Le troc : « le nouveau contrat de confiance »
Après la fièvre Ebay et du Boncoin, l’échange sans monnaie se développe.
Perçu comme un acte militant, le troc connait aujourd’hui une véritable effervescence
et séduit de plus en plus.
“Le troc est un transfert réciproque de biens et/ou de services, identifiés, entre
plusieurs acteurs. L’objectif du transfert est marchand et une fois les mouvements
effectués selon les termes de l’accord, la relation entre les protagonistes est close.
Le troc ne fait pas directement appel à un élément tiers pour évaluer la valeur des
biens et services transférés. L’absence de ce tiers implique des négociations pour
déterminer les termes de l’échange entre les biens et services transférés.” 42
Le troc existe depuis longtemps, il représente l’un des premiers modèles d’échange.
A l’époque de l’Egypte des pharaons et des peuples amérindiens, il est caractérisé
par l’absence de monnaie lors de l’échange de possession. Même s’il a perduré dans
toutes les civilisations, avec l’arrivée de l’argent, cette pratique est devenue plus en
plus archaïque, face à la monnaie, plus moderne.
Aujourd’hui, une nouvelle forme de troc se dessine grâce à l’essor du web. De
nombreux acteurs, aux business models variés se positionnent sur ce marché. On a
retenu en particulier Myrecyclestuff, Pretachanger, Kiditroc et Guest to Guest.
Le cofondateur de Myrecyclestuff.com, déclare : « Nous avons une vraie vision
communautaire du troc : notre système a été conçu pour permettre aux utilisateurs
d’échanger avec des personnes à proximité. Sur notre site, dans 80% des cas, le
troc est permis par la rencontre. L’Internet en tant que réseau permet de multiplier les
contacts entre personnes, génère la confiance plus rapidement et facilite la prise de
décision entre inconnus. Une fois la prise de contact et la négociation effectuées,
l’échange peut avoir lieu dans la vraie vie. »
D’autres plateformes mettent en place un troc basé sur la praticité en proposant des
biens de mêmes types.
42 économiste Pierre Alary
55
C’est le cas de prêtachanger.fr qui annonce « Renouvelez gratuitement votre
dressing : 1 article envoyé, 1 article reçu en retour. ».
Benjamin Augros, co-fondateur de Pretachanger : « Je me suis rendu compte que le
problème principal est la friction (il est compliqué de se mettre d’accord pour troquer
deux biens différents). Pour résoudre ce problème, nous avons mis au point un
algorithme qui permet de mettre en place des boucles d’échange. »
Ces boucles d’échanges fonctionnent en donnant les informations sur les vêtements
qui nous intéressent et de proposer les siens. L’échange est réalisé, dès qu’une
boucle de troqueurs est obtenue.
Certaines autres plateformes ont ou vont introduire une unité de compte afin de
permettre de profiter d’une offre plus importante. C’est le cas de Kiditroc, qui va
insérer dans son système des points d’échange. Il s’agit d’une plateforme web, qui
permet l’échange de vêtements, le principe est de rendre accessible tous les
vêtements que l’on a chez soi et que l’on utilise plus.
Emmanuel Arnaud, fondateur de Guest to Guest (échange de maisons) a aussi mis
en place un système de guestpoints :
« Les points permettent de multiplier les échanges, il suffit de trouver des gens qui
veulent bien vous accueillir pour pouvoir partir, de votre côté, vous gagnez des points
quand des personnes utilisent votre maison. »
Le Business model prend aussi en compte ce système de points : « à terme, une
petite fraction (5-10%) des GuestPoints seront vendus. Ainsi, si vous accueillez
autant que vous partez, vous n’achèterez jamais de GuestPoints, mais si vous partez
plus que vous n’accueillez, vous aurez besoin d’acheter des GuestPoints. »
Ainsi, avec Internet, le troc se démocratise mais il rend aussi désuet la dimension
majeure du troc, la négociation. “Williams Stanley Jevons43 identifie clairement la
nécessité de négocier pour déterminer les termes de l’échange lors d’une relation ou
la monnaie métallique n’intervient pas.”
43 Economiste , logicien britannique (1835-1982)
56
Cette phase est importante puisqu’elle permet de différencier le troc du don et de
définir la valeur du bien. Ces plateformes s’attèlent à compenser cette phase :
Dans le cas de Kiditroc de GuestToGuest, la négociation n’a plus lieu d’être. En effet,
le système de points d’échange est cumulable et la valeur des biens est connue à
l’avance. Le « tiers homogénéisant » est représenté par le système de points.
Quant au site myrecyclestuff, une interface permet de proposer des suggestions de
produits correspondant aux attentes de l’utilisateur, pour ensuite élaborer la
négociation.
Le site Prêt à changer dispose d’une boucle d’échange. Marina Calmes, responsable
marketing et communication de Pretachanger explique:
« Chez nous, l’algorithme est le cœur du service, c’est ce qui permet d’organiser des
boucles d’échange et de les démultiplier. C’est l’efficacité et la simplicité qui sont
recherchées et l’assurance de trouver quelque chose en échange de ce qu’on
propose : nous permettons cela. »
En seulement 6 mois d’activité, Prêt à changer dénombre « 8000 inscrits et 32 000
articles disponibles ». La plateforme envisage même de se diversifier vers d’autres
secteurs (hi-tech, puériculture)
Ainsi, ces systèmes de boucles de troqueurs et d’unité de compte peuvent rassurer
les plus septiques. En effet, le troc n’associe pas les mêmes biens que dans d’autres
formes de consommation collaborative. Les produits proposés sont d’une durée
utilisation restreinte par rapport à leur durée de vie initiale. (Livres, vêtements…)
« Pour la majorité des personnes, le troc reste perçu comme un moyen alternatif,
une activité préhistorique qui n’a pas d’avenir. »44
Toutefois, le contexte actuel, économique, social et écologique est propice au
développement du troc. « Le troc n’est pas dénué de valeurs. Au-delà de répondre à
un besoin d’usage, il réinjecte de la solidarité, de la responsabilité sociétale tout en
44 Vincent de Montalivet fondateur de Myrecyclestuff
57
surfant sur la tendance de l’upcycling. »45 Cette technique consiste à transformer des
objets déjà utilisés en objets de meilleure qualité.
Ainsi, le retour en force du troc illustre la remise en cause du rôle que tient la
monnaie. On peut se demander si l’argent perd de sa valeur en tant que catalyseur
d’échanges et donc créateur de lien social.
Le troc est en train de redevenir une pratique commerciale, qui illustre le changement
de comportement des consommateurs.
2. Les styles de vie collaboratifs
Les technologies en réseau permettent de faciliter l’émergence de modes de vie
collaboratifs.
Ce système regroupe les formules de partage de ressources immatérielles entre
particuliers : telles que l’espace, le temps, les compétences, l’argent. On parle de
couchsurfing (hébergement chez l’habitant), de colunching (regroupement de
personnes pour prendre un repas ensemble), de coworking (partage de l’espace de
travail avec une mise en commun des compétences), de crowdfunding (prêt entre
particuliers)…
45 Karina Benamer, planneuse stratégique digitale à Influencia
58
Dans ce genre de plates formes en ligne, la confiance et le système de réputation
sont primordiaux : les contributeurs sont évalués et examinés par les autres
membres de la communauté. Ceci est caractéristique d'une transition vers une
économie « définie, non pas par ce que nous consommons, mais par ce que nous
utilisons."
a) Le « couchsurfing »
Dans le monde du voyage, les bons plans entre internautes se développent sous
toutes les formes et génèrent une offre croissante qui attire tous les publics, jeunes
couples, célibataires, seniors, familles…Le couchsurfing est très en vogue
aujourd’hui.
Le couchsurfing est un nouveau concept touristique qui tend à démocratiser le
voyage.
Le couchsurfing consiste à offrir généreusement l’hospitalité d’une ou deux nuits ou
bien plus aux « globetrotters-internautes » du monde entier via Internet.
Le couchsurfing est un anglicisme qui vient des Etats-Unis et qui désigne
littéralement le « surf sur canapé ».
Ce genre de pratique touristique existe depuis l’an 2000. L’inventeur de ce concept,
Casey Fenton, souhaitant faire profiter à tous de son expérience, crée en 2003, le
site internet mondial gratuit, couchsurfing.com.
« Le couchsurfing a pour but de connecter les gens et les lieux au niveau
international, de créer des échanges culturels, de promouvoir conscience collective
et tolérance et de faciliter la compréhension entre les cultures ». 46
Cette pratique offre la possibilité d’un hébergement alternatif aux offres dites
«traditionnelles» de l’industrie touristique (hôtels, camping,…) et repose sur une
forme de convention sociale et amicale passée entre les membres du site Internet,
qu’ils soient hôtes ou invités. Ce réseau virtuel est une « cybercommunauté » qui a
pour mission de détourner les voyageurs du tourisme de masse au profit d’un
tourisme personnalisé, à visage humain.
46 Casey Fenton,
59
Le concept favorise les comportements respectueux et hospitaliers envers la «
communauté d’accueil » et « renforce la compréhension culturelle » entre les
voyageurs du monde entier.
Le couchsurfing appartient à la famille des voyages 2.0, c'est-à-dire que le concept
replace l‟internaute-voyageur au centre de la relation d’échange, dans une
dimension sociétale prônant le relationnel, le service, le partage, et ce à travers les
forums, blogs et autres communautés virtuelles.
Le concept repose sur l’idée que l’on ne connaît véritablement un pays que lorsque
l’on a partagé et échangé avec l’autochtone. Le couchsurfing, c’est une autre façon
de voyager, un voyage à travers l’autre. Le but premier n’est pas d’économiser des
frais d’hôtels mais plutôt d’échanger avec l’autre : offrir de son temps, de ses
connaissances, de son envie de partager et d’échanger.
« Il n’y a pas de culture, ni de lien social sans un principe d’hospitalité »47. Pour lui,
lorsqu’on s’interroge sur les mécanismes sociaux qui établissent la rencontre avec
l’étranger, on ne peut ignorer l’importance du rapport à l’hospitalité.
Cette utopie sociale du retour à l’hospitalité est associée aux usages collectifs et aux
communautés nées avec Internet. Le succès récent des blogs, forums ou wikis ont
donné une place centrale à l’utilisateur, témoignant du besoin de s’exprimer des
internautes.
Ce genre de plateforme communautaire tel que couchsurfing.com ou encore la start
up Airbnb sont des cyberespaces qui permettent une communication interactive entre
les internautes. Cette communauté virtuelle est une véritable « cyber-société » qui
regroupe des voyageurs qui ont les mêmes aspirations. Cette société s’envisage
comme une sorte de « bulle sociale » dans laquelle ces individus se retrouvent pour
partager leur conception utopique du voyage et de la vie en général. Ce site web est
un « refuge » pour ceux qui veulent s’évader des difficultés et des déceptions du
tourisme « moderne ».
47 Jacques Derrida, philosophe français du vingtième siècle
60
Le couchsurfing est un phénomène en pleine croissance qui fait chaque jour de plus
en plus d’adeptes dans le monde.
Divers facteurs peuvent expliquer l’engouement pour ce nouveau concept touristique
tel que : le développement des voyages Low Cost, la disparition des hôtels bon
marché dans les grandes villes, la tendance « colocation », les programmes
d’échanges universitaires, les réseaux sociaux…
Tous ces facteurs pourraient laisser penser que le couchsurfing a un potentiel de
développement énorme dans le monde et dans l’hexagone, prouvé par le succès
international de la start up Airbnb.
Airbnb, est une plateforme communautaire payante qui met en relation des
particuliers qui ont un logement à louer (appartement, maison ou une chambre) et
des voyageurs du monde entier qui cherchent à voyager autrement et à avoir une
expérience authentique en vivant comme un « local ».
L’objectif est de voyager autrement, de « se sentir non pas comme un touriste à
Paris, mais comme un Parisien », souligne Brian Chesky, 30 ans, co-fondateur
d’Airbnb. « Apôtre de la consommation collaborative, il rêve de rassembler les gens
dans une nouvelle économie de partage. Aujourd’hui, les gens se sentent partie d’un
tout plus grand qu’eux, et cherchent à partager leurs expériences“
Depuis son lancement en 2008, Airbnb comptabilise 5 millions de nuits réservées,
dont plus de 4 millions en 2011, ce qui illustre bien la croissance fulgurante de ces
derniers mois.48 Avec 270 000 nuitées, la France est le deuxième plus gros marché
dans le monde après New York.49
Avec une croissance en 2010 de 800 %, la start up vient, en avril 2012 de clôturer
une levée de fond à plus de 110 millions de dollars, portant ainsi sa valorisation aux
milliards de dollars.
48 Cf. Annexe 8: L’évolution du nombre de nuits réservées depuis le lancement d’Airbnb
49 Cf. Annexe 9: L’évolution d’Airbnb entre 2011 et 2012 dans le monde
61
Récemment installé à Paris, Airbnb, s’internationalisera bientôt à Barcelone,
Copenhague, Milan, Moscou et Sao Paulo.
“Depuis la fin des années 2000, on constate l’émergence d’un nouveau type de
tourisme. Les gens cherchent des expériences uniques lorsqu’ils voyagent“, estime
le directeur général d’Abritel, Cyrille Coiffet, concurrent du groupe Airbnb
Abritel, filiale du groupe HomeAway, né en 2005, grandit lui aussi à grand vitesse en
levant 400 millions de dollars auprès d’investisseurs. Il est devenu le leader mondial
de la location de vacances en ligne, avec 625 000 logements dans le monde, dont
70 000 en France.
b) Le « Social Food »
Deux startups se distinguent sur le marché francais, le Colunching et Super-marmite.
Le concept Colunching a été inventé par Sonia Zannad, qui a crée le site
colunching.com. Il s’agit de déjeuners organisés entre amis virtuels par le biais de
Facebook. Le groupe compte déjà 350 membres qui se retrouvent régulièrement
dans un lieu différent. Ce succès réside dans le fait que de nombreux entrepreneurs
free lance, qui travaillent seuls peuvent se retrouver et ainsi faire une vraie pause
pour se changer les idées et manger plus sainement.
Le but du colunching est de se retrouver dans un lieu sympathique, informel et
surtout de partager un moment agréable, de rencontrer de nouvelles personnes et
ainsi de créer des relations personnelles ou professionnelles.
Le site Super-marmite vient d’être récompensé par le prix de l’originalité par Leweb,
conférence européenne et mondial du web, qui sélectionne les plus « belles »
startups.
Il s’agit du premier réseau social de vente de plats faits maison. Le but est de
partager sa part, ses restes avec la communauté et à l’inverse de manger un repas
original et sain, près de chez soi, cuisinés par les voisins. De plus, les fondateurs de
Super-marmite ont mis en place un système de notation permettant d’évaluer la
notoriété, la réputation.
62
Une belle viralité générée par une communauté qui ne cesse de croitre avec près de
8000 fans.
c) Le « Landshare »
Landshare a été crée en 2009, au Royaume Uni, afin de promouvoir une façon de
jardiner originale. Cette plateforme met en relation des particuliers qui n’ont pas de
jardin, mais qui souhaitent démarrer un potager avec des propriétaires.
Le phénomène de l’auto consommation est en constante évolution, en effet au
Royaume Uni, les listes d’attente pour des jardins atteignent 100 000 personnes.
Pour répondre à la demande, Landshare étend son offre à tout le territoire et propose
un listing interactif de parcelles privées grâce à une plateforme virtuelle.
Une fois que le particulier a choisi un propriétaire qui lui convient, les deux parties se
mettent d’accord sur les termes d’un contrat, qui à valeur légale et qui définit les
droits et devoirs de chacun (durée, accès, eau…)
Le but de Landshare n’est pas seulement de faciliter à la mise en relation des
propriétaires-particuliers, il encourage aussi la création de communautés
rassemblant des amateurs et des experts autour d’un projet commun. Pour cela, des
groupes locaux, des forums, des blogs dédiés au jardinage sont mis en place.
Landshare compte aujourd’hui 65 000 membres et est en train de développer en
Australie et au canada, depuis 2011.
Le phénomène est en train de gagner la France. En effet, les français sont déjà
assez nombreux à cultiver leur petit bout de jardin et 51% souhaiteraient en faire de
même. 50
Parti du constat qu’il existe une surproduction dans les jardins, l’entreprise Potiron a
profité de cette opportunité.
50 Etude de Lightspeed Research
63
Il s’agit d’un des premiers sites internet en France à proposer de mettre en relation
les particuliers et les producteurs, dans le but « d’échanger, de vendre ou de donner
le surplus de production de leur jardin aux personnes qui cherchent à
s’approvisionner localement. »
Cette startup est le résultat de la première édition de la startupweekend organisé à
Paris en 2009.
La force de Potiron est de proposer à la fois une offre amateur et professionnelle
situé à proximité de son domicile.
d) Le « Coworking »
"Le coworking, on pourrait dire que c'est une forme de partage de bureaux, dans un
esprit communautaire et collaboratif plutôt que commercial. C'est une solution qui
attire typiquement des indépendants travaillant dans le milieu de la technologie ou
d'internet, mais qui n'ont pas toujours besoin d'un bureau de façon permanente… »
Ce marché répond à une nouvelle demande de nomades, d’indépendants, de
télétravailleurs… 51qui considèrent les bureaux traditionnels inflexibles et trop
onéreux.
En effet, le poste de travail dans les espaces de coworking, tel que « La Cantine »
ou « La Mutinerie » à Paris, se réserve à la demi-journée, à la journée ou au mois.
Les entrepreneurs ne paient que pour ce dont ils ont besoin.
Ces espaces ne sont pas seulement plus pratiques et moins chers, il s’agit aussi d’un
changement de l’organisation du travail et de la perception du lieu de travail. Ces
nouveaux travailleurs désirent aujourd’hui échanger et coproduire avec des acteurs
d’autres secteurs. On entre dans une nouvelle ère ou le lieu de travail se transforme
en réseau, en communauté de pratiques et n’est plus structuré autour d’une
entreprise.
51
Annexe 10 : Le coworking : population de La Cantine
64
e) Le « Crowdfunding »
Le crowdfunding est « un système de micro-financement collectif qui permet de faire
appel à un réseau de multiples micro-financeurs pour tester la validité et l’intérêt du
lancement d’un nouveau projet. »
« Du crédit entre particuliers à l’investissement collectif dans des startups, en
passant par le micro-crédit solidaire ou le financement participatif, voici autant
d’initiatives qui semblent montrer la voie pour la finance traditionnelle : plus de
pouvoir aux citoyens, moins d’intermédiaires, des pratiques plus responsables. »
Les nombreuses plateformes lancées sur Internet aux Etats-Unis ont donné des
idées aux Français qui souhaitent profiter de ce nouveau marché qui par ailleurs
connait une expansion dans le monde entier.52
Aujourd’hui, il existe plusieurs raisons à l’ouverture de ce genre de services.
Tout d’abord, les internautes sont plus « matures » : ils n’hésitent plus à effectuer
des paiements en ligne ou à effectuer des enchères (Ebay).
De plus, l’exposition croissante d’informations personnelles sur la toile avec le
développement des réseaux sociaux contribue aussi à l’essor de ce phénomène. Les
internautes exposent de plus en plus leurs idées, leurs projets, leurs problèmes …
C’est une véritable évolution sociologique de fond
Enfin, on assiste à l’explosion de sites communautaires de production artistique, tel
que My Major Company pour produire des artistes musicaux ou bien People for
Cinema pour participer à la production de prochains films français.
On peut également rajouter à cela la mauvaise image que le public a des banques
en général. Il existe de nombreux particuliers aujourd’hui qui ont une défiance vis-à-
vis de la banque traditionnelle et qui recherchent alors une source alternative de
financement.
Ces aspects sont un véritable coup d’accélérateur pour le crowdfunding.
52 Cf. Annexe 11 : La montée du crowdfunding
65
En effet, le nombre de plateformes de financement participative ne cesse de croitre :
en 2011, 40 nouvelles startups ont été lancées. De nombreux spécialistes
s’accordent à dire qu’il s’agirait de l’une des 7 tendances clé de 2011.
Ce phénomène connait ses origines dans les sites dédiés au micro crédit, dont le but
est de récollecter des fonds pour financer l’activité d’entreprises dans les pays en
voie de développement. Depuis 30 ans, le micro crédit a été utilisé par plus de 190
millions de micro entrepreneurs. La plateforme la plus connue est Kiva, elle est
apparu aux Etats Unis et a déjà délivré plus de 300 millions de dollars de crédits et
compte plus de 1 millions de membres. Toutefois, on ne répertorie que 25
plateformes de la sorte dans le monde.
Ensuite, sont arrivées les plateformes soutenant des projets créatifs, tels que
Kickstarter, IndieGoGO, Mymajorcompany en France.
Par ailleurs, il existe aussi des plateformes de don. Ce sont des « plateformes de
mécénat collaboratif qui permettent le financement de projets par du don contre don.
Les projets ont un objectif financier, et fournissent des contreparties non-financières
à leurs soutiens»53. De nombreuses structures se sont développées, telles que
Babeldoor, Ulule, Kisskissbankbank, Izicollect ou Mailforgood. Grace à elles, plus de
900 projets ont été financés.
Aujourd’hui se développe des plateformes de prêt classique, à la base d’un
« concept vieux comme le monde : la mise à disposition des moyens des uns pour
pour permettre aux autres d'entreprendre (mutuelles et coopératives dans le monde
agricole, puis ouvrier, tontines diverses, etc...). » De nombreuses plateformes voient
le jour comme Wiseed, qui propose un investissement participatif auprès de start up
54 ou encore Friendsclear.
En octobre 2008, le site FriendsClear se présente tout d’abord comme un service
d’accompagnement d’un particulier à un autre particulier (FriendsClear Family). Ce
53 Intervention d’H. Garand et A-L.Brun Bruisson à la conférence « la finance participative interpelle les
candidats » 26 mars 2012
54 Annexe 12 : Wiseed : Le processus de fonctionnement du crowdfunding
66
sont les particuliers qui choisissent eux-mêmes les conditions du prêt. Un
prélèvement automatique est alors mis en place pour le paiement des intérêts et le
remboursement de l’investissement initial. Le plafond est fixé à 10 000 euros, par
transaction et le taux d’intérêt inférieur à 10 %. FriendsClear se rémunère en
facturant une commission de 19,90 euros par prêt effectué.
Le métier de FriendsClear est ainsi une véritable mise en relation, via le Web, de
particuliers ayant des besoins de financement avec d’autres particuliers souhaitant
prêter de l’argent.
Puis Friendsclear a lancé le 01 février 2010 sa nouvelle plateforme (FriendsClear
Pro) avec une mise en relation entre porteurs de projets professionnels et
internautes. Ainsi, le site acquiert une véritable vocation financière, qui ne pouvait
pas voir le jour avant l’autorisation récente du gouvernement.
Toutefois, par rapport au reste de l’Europe et aux Etats Unis, la France fait preuve de
retard dans le domaine des plateformes d’emprunts entre particuliers. Après les
Pays-Bas, le Danemark, l’Allemagne et l’Italie, le gouvernement français vient tout
juste d’autoriser le « peer to peer lending ».
Cependant, d’autres barrières restent à franchir en France. En effet, ce genre de
plateforme doit demander une licence à la Banque de France afin d’exercer l’activité
d’établissement de crédit. Celle-ci, est très réticence à l’octroie de ces licences, ce
qui freine depuis des années l’émergence du « peer to peer lending » dans
l’hexagone.
Faute d’avoir obtenu l’autorisation de la Banque de France, Friendclear a donc du
nouer un partenariat avec le Crédit Agricole. De nombreuses plateformes seraient
aussi en attente de dossiers similaires.
Les fondateurs de Prêt d’Union ont connu les mêmes déboires et ont patienté
pendant plus de deux ans pour obtenir l’agrément bancaire de l’Autorité de Contrôle
Prudentiel (ACP).
“Ce fut loin d’être facile d’autant que nos actionnaires potentiels attendaient
l’agrément de l’ACP avant d’investir, tandis que dans le même temps cette dernière
67
voulait s’assurer que nous avions les fonds nécessaires avant de nous délivrer
l’agrément”.55
Au final, le principal problème, c’est que le crowdfundng n’existe pas. En effet, la
législation française financière et bancaire n’est pas adaptée.
Ainsi, les entrepreneurs de la finance participative travaillent ensemble afin de faire
progresser le cadre législatif et de sensibiliser les décideurs politiques et financiers.
3. Un système de service de produits
Lorsqu’un consommateur achète un objet, ce qu’il veut réellement c’est l’utiliser. Le
système de product service systems permet de payer pour le bénéfice du produit, ce
qu’il apporte sans avoir à le posséder. Ce système permet de faire évoluer et
transformer un produit vers un service : l’autopartage, les vélos en libre-service, la
location… Ces plate-formes s’inscrivent dans le cadre plus général de « l’économie
de fonctionnalité », c’est à dire, faciliter et fluidifier les pratiques quotidiennes.
55 Thomas Beylot, cofondateur de Prêt d’Union
68
Si l'on applique cette idée à des entreprises de voitures par exemple, cela signifie
que plutôt que de vendre des voitures, elle vend des services de mobilité. D'où
l'émergence d'entreprises d'auto-partage comme Zipcar, de mécanismes de partage
de vélos (Vélib…). Si l'on considère que, en moyenne, 90% ou les objets que nous
possédons sont utilisés au moins une fois par mois, nous commençons à
comprendre le potentiel de ces systèmes pour traiter les questions de durabilité.
a) Evolution du rapport à la voiture
Aujourd’hui, au moment d’acheter une voiture, le consommateur résonne en termes
de prix, de sécurité et de cout d’utilisation. L’image de soi que renvoie la voiture
(personnalité, niveau de vie) est un critère devenu de moins en moins important. La
voiture est en train de devenir un simple moyen de transport, une commodité.
En effet, pour les jeunes générations, la voiture n’est plus symbole de liberté, elle est
détrônée par les nouveaux moyens d’expression numérique.
Au XX ème siècle, la voiture était assimilée à un bien suprême, symbole d’un certain
niveau de vie, de virilité…elle représentait une extension de nous même et il était
inenvisageable de conduire moins, de se passer de sa voiture.
On assiste à un réel changement avec la généralisation d’internet, l’ordinateur est
devenu le nouveau véhicule, synonyme d’épanouissement, de divertissement et de
moyens de communication.
En effet, en 1988, 45% des américains de 16 ans détenaient le permis de conduire.
Depuis, 2011, ce taux est passé à 28%.56
« De plus en plus d’études montrent que les jeunes générations ont un rapport
différent à l’automobile, qui n’est plus vue comme vecteur de liberté. Au lieu de cela,
les technologies numériques portables – qu’il s’agisse de smartphones, ordinateur
portable, ou MP3, etc -leur fournissent un moyen alternatif d’expression personnelle
les rendant libres de faire ce que bon leur semblent… Il apparaît que les jeunes
56
Etude du Washington Post
69
générations trouvent moins d’intérêt à la voiture, s’installer dans des villes bien
desservies et adaptées aux piétons correspondant à leurs styles de vie naturels. »57
Ainsi, la voiture, en devenant un simple moyen de transport permet la résurrection
des bus, des vélos et la marche. On constate de plus en plus que conduire ne vaut
plus le coup avec notamment l’augmentation des frais liés au véhicule. En effet, la
possession d’une voiture en France coûte environ 6000€ par an, sachant surtout
qu’elle n’est utilisée qu’à 6% de ces capacités.58
Cela sous entend une modification profonde de nos lieux de vie, quartiers.
b) Le covoiturage
Pour limiter ses frais de déplacement, certains ont opté pour le covoiturage entre
amis ou entre collègues. Pour ceux qui n’ont pas l’opportunité d’instaurer un tel
système avec leur cercle de connaissances, des sites Internet existent pour
permettre aux gens de se mettre en contact. Les sites jouent un rôle d’intermédiaire
entre les passagers et les conducteurs.
Ce sont les jeunes qui pratiquent surtout le covoiturage, et principalement sur de
longs trajets, comme pour les vacances. Un sondage a été réalisé en 2010 sur le site
covoiturage.fr. On peut constater que 60% des personnes inscrites sur le site qui ont
déjà pratiqué le service de covoiturage avaient moins de 30 ans. De plus, grâce à ce
sondage, on peut voir qu’il y a 56% d’utilisateurs qui utilisent ce service pour aller ou
revenir d’un lieu de vacances et que 47% l’utilisent pour se rendre à des festivals ou
à des concerts.
Pour 70% des internautes questionnés, le facteur économique est la première raison
qui pousse les utilisateurs du site à recourir à ce système59.
57
Rapport du GWL Realty Advisors Toronto
58 Cf. Annexe 13 : Les chiffres de la mobilité partagée
59Covoiturage : Zoom sur le profil des utilisateurs
70
De nombreux acteurs se bousculent sur ce marché, tel que Golovo, Quivaou,
Covoiturage.fr, ce qui représentent un vrai problème puisque les informations sont
éparpillées, alors que le covoiturage demande de récolter un nombre important
d’informations.
Covoiturage a tout de même franchi le cap du million d’utilisateurs60, chaque mois,
plus de 250 000 trajets sont effectués, soit 6 millions de voyages depuis son origine
en 2004.
En outre, on peut penser que la société Goloco, a fait le bon choix : en effet, sa
plateforme est greffée sur celle de Facebook, il n’y a qu’un pas entre le partage
virtuel (réseaux sociaux) et concret de sa voiture, un piste à creuser…
c) L’Autopartage
Le service d’auto partage (ou car sharing) consiste à mettre à la disposition
d’usagers préalablement inscrits des véhicules, disponibles 24h/24 et 7j/7 sans
formalité pour des déplacements courts et occasionnels. Le service de l’auto partage
offre une solution à un problème récurrent de nos jours : comment pouvoir disposer
librement d’une voiture sans en être le propriétaire. En effet, certaines personnes
n’ont pas besoin d’une voiture à tout moment, mais juste ponctuellement.
Tout d’abord, l’auto partage est un concept qui existe depuis 20 ans dans le monde,
et qui est plus particulièrement répandu en Suisse (c’est là que le concept est né), en
Allemagne et aux Pays-Bas. Il existe aussi sur le continent Américain et au Canada.
Le car sharing en France est plus récent puisqu’il a été développé à partir de 1999 à
Paris. Après Paris et Strasbourg, d’autres villes ont tenté l’expérience et l’auto
partage se développe peu à peu. La proposition de loi de Roland RIES a pour but
d’utiliser l'auto partage comme réel outil d’une politique de transport à grande
échelle. La France trace la voie suite à l'adoption de la loi promouvant l'auto partage,
notamment avec la création en décembre 2011, par la mairie de Paris, d’Autolib. Un
60 Cf. Annexe 13: Les chiffres de la mobilité partagée
71
succès qui bat son plein, avec 100 000 utilisateurs au compteur en avril 2012. Plus
de milles stations devraient être installées d’ici l’été 2012.
En France, la voiture n’est pas utilisée pendant 92% de son temps de vie. De plus,
dans les grandes villes disposant d’un réseau de transports en commun important, la
voiture n’est utilisée que rarement, quelques heures par semaine.61
De même en Allemagne, « le fief » de l’automobile en Europe, de plus en plus
d’allemands rejettent le fait de posséder une voiture :62
Aujourd’hui, seulement un allemand sur trois, âgé entre 18 et 29 ans possède une
voiture, alors qu’en 1992, ils étaient un sur deux. Pour eux, il n’est pas utile de
posséder une voiture en ville et cela n’est pas considéré comme « cool » de nos
jours.63
Dans ce contexte, l'auto partage vise à encourager les ménages à utiliser une voiture
ponctuellement, en fonction de leurs besoins, plutôt que d'être propriétaires d'un
véhicule plus souvent au garage que sur la route. Ce nouveau mode de
consommation est bien sur plus économique pour les automobilistes occasionnels
qui souhaitent pouvoir se servir d’une voiture de tems en temps.
Un autre intérêt réside dans ce système, il s’agit de l’environnement. Lorsque l'on est
propriétaire de son automobile, on a naturellement tendance à l'utiliser au maximum,
que ce soit pour amortir son coût ou pour toute autre raison. En revanche, les
abonnés d'un organisme d'auto partage font un usage plus rationnel de la voiture.
Les deux critères jugés les plus importants par les consommateurs pour un service
d’auto partage sont le prix (60%) et la simplicité de la réservation (26%).
D’après un sondage effectué début 2010 par l’institut AC Nielsen auprès de 23 500
automobilistes issus de quarante-deux pays, 45 % des personnes interrogées
61 Etude réalisée par le CERTU, Centre d’études sur les réseaux de transport et de l’urbanisme
62 Cf. Annexe 13: Les chiffres de la mobilité partagée
63 German car makers see car sharing as way to revive sales? The National
72
indiquent qu’elles utilisent moins leur véhicule en raison de la flambée des prix des
carburants. En moyenne, 26% des personnes interrogées ont déjà pensé à se
séparer de leur voiture, 18 essentiellement pour des raisons de coût, de difficultés de
stationnement ou simplement pour non utilisation. En Europe, le tiers des personnes
sondées se déclarent durement touchées par la hausse des prix du pétrole (la
proportion dépasse 50 % en France et en Italie) et 20 % indiquent avoir réduit
d’autres dépenses pour faire face à cette hausse.
En ce qui concerne la segmentation des clients actuels de l’auto partage en France,
41% ont entre 34 et 45 ans, dont 61% sont des hommes, avec une surreprésentation
des formations supérieures (57% ont au moins Bac + 3). On peut ajouter que 31%
sont des cadres et 27% des professions libérales.
Par ailleurs, l’autopartage nécessite l’instauration d’un climat de confiance avec
l’opérateur et le loueur de voiture. Les membres ont ainsi besoin d’avoir confiance
dans le professionnalisme de l’opérateur, mais aussi dans l’inconnu qui leur loue sa
voiture.
Les acteurs de l’autopartage font partie d’un marché local, ou la proximité de la
station est un atout majeur. Inspirées par le succès outre manche de Streetcar et
celui de Zipcar aux Etats Unis, de plus en plus de start up se développent. Excepté
dans quelques régions, la France connait un succès mitigé par rapport à d’autres
pays, comme la Suisse avec Mobility et les Etats Unis avec Zipcar. Le
développement d’Autolib pourrait constituer un point de départ.
De gros acteurs ont déjà commencé à se positionner sur ce marché, tels que
Hertz(Connect), Veolia (Mobizen) et Vinci (Okigo).
Certains écologiques critiquent ce nouveau modèle, qui ne favorise pas les
approches collaboratives ; ils prônent davantage le covoiturage et la location de
voiture, synonymes de réel partage d’une voiture déjà existante.
73
d) La location de voitures entre particuliers.
On peut comparer la location de voiture à l’autopartage, mais c’est un modele de
partage bien plus révolutionnaire. Il s’agit de mettre en relation les particuliers entre
eux, afin qu’ils partagent leur voiture.
De nombreux acteurs se positionnent sur ce marché en France : Zilok, Deways,
Cityzencar, Livop et Buzzcar (crée par le leader mondial de Zipcar, Robin Chase)
« Je ne partage ma voiture que quand je n’en ai pas besoin (et soyons honnête,
c’est la plupart du temps). Et je sais que “le conducteur que je ne connais ni d’Eve ni
d’Adam” n’est pas un complet étranger. Je vois son permis de conduire et sa carte
d’identité, ses photos et les notations et commentaires des autres membres. Je
dépense moins en assurance et plus sur ce qui me fait plaisir ! »64
Voiturelib, pionner de la location de voiture en France, met en contact les particuliers
qui souhaitent optimiser l’utilisation de leur voiture et ceux qui n’a possède pas et qui
ont besoin d’en louer une. Le petit plus de Voiturelib est l’offre d’une assurance
permettant de rassurer les membres.
On peut se demander quelle légitimité va accorder le consommateur à ces services
de mobilité partagée : les mairies (Autolib), les agences d’autopartage ou les
loueurs …
Ainsi, l’essor de ces nombreuses startups, en phase avec les nouvelles attentes du
consommateur, forcent les entreprises classiques à réinventer leur mode de
distribution.
64 Robin Chase, fondateur de Buzzcar et Zipcar
74
B. L’impact sur les entreprises classiques et leur business model
Dans l’avenir, on imagine que les entreprises qui sont censés vendre leurs produits,
proposent eux-mêmes des systèmes alternatifs. Certaines entreprises ont déjà
compris ce phénomène. Les constructeurs automobiles, qui se lancent dans la
location, mais aussi des distributeurs…
1. Le bouleversement des acteurs économiques classiques
a) L’impact sur les entreprises classiques : la
désintermédiation
Le système de la collaboration collaborative, visant à obtenir la meilleure prestation
et le meilleur service au meilleur coût, entrainent la disparition progressive d’un très
grand nombre de professions, dans tous les domaines de l’économie.
L’économie de marché, alliée à la mondialisation, avait avant elle ébranlé les piliers
de l’économie traditionnelle, entraînant dans les secteurs primaires et secondaires
des bouleversements majeurs.
La concurrence internationale a en effet fait disparaître nombre d’acteurs de notre
économie : concentration des parcelles agricoles entre les mêmes mains et
diminution massive du nombre d’agriculteurs, fermeture d’usines et
désindustrialisation.
La nouveauté induite par la consommation collaborative réside dans l’écrémage
qu’elle opère dans le secteur tertiaire. L’optimisation des coûts se traduit en effet bien
souvent par une désintermédiation, précipitant la disparition d’une multitude de
professions caractérisées par la fonction d’intermédiaire.
On pourrait citer par exemple les domaines de l’immobilier, des transports, du
tourisme, de la vente et de la revente.
Les agences immobilières sont désormais concurrencées par les sites de petites
annonces de particuliers en ligne : reposant sur le principe qu’épargner les frais de la
« commission d’agence » permet de faire baisser le prix d’un bien donné, un grand
nombre de sites sont ainsi nés sur le Web, rendant superflue ou presque le recours
75
aux agents immobiliers, du moins pour ce qui concerne la mise en relation d’un
acheteur et d’un vendeur.
Le phénomène touche également le domaine des transports. Le transport ferroviaire
et le taxi sont ainsi concurrencés par la pratique du co-voiturage et l’autopartage.
Le transport aérien est également sous l’influence du phénomène. Il est marqué par
le recours au charter et la remarquable percée du « low cost», technique à laquelle la
compagnie Air France elle-même s’est récemment résignée. Elle offre désormais la
possibilité de voyager à moindre coût vers l’international, sans, d’après elle, remettre
en cause la qualité du service.
On peut d’ailleurs constater à cet égard que l’économie du partage a pour effet
secondaire de jeter un certain discrédit sur les pratiques des entreprises et de les
placer dans une situation très délicate : si elles proposent de baisser leurs tarifs, c’est
qu’elles pratiquaient jusqu’à présent des marges injustifiées. Mais si elles ne font pas
cet effort, elles sont condamnées à succomber face à aux concurrents acceptant de
s’adapter.
Si on sort des transports pour s’intéresser au tourisme, quel effet l’adoption de la
pratique de l’échange d’appartements ou de maisons pour les vacances a-t-elle, si ce
n’est se passer des services de l’hôtelier ou de la location d’appartements meublés à
la semaine, tâche autrefois dévolue aux agents immobiliers ?
C’est toutefois les domaines de la vente et de la revente qui paient le plus lourd tribut
au triomphe du système.
D’une part, les enseignes de grande distribution rivalisent d’ingéniosité pour se
passer des services des « hôtesses de caisse », peu à peu remplacées par des
scanners portatifs ou fixes.
D’autre part, les enseignes dédiées à la revente d’objets, ferment peu à peu leurs
portes, tuées par le succès des sites du marché de l’occasion en ligne, tel que le Bon
coin. Les prix pratiqués y sont en effet forcément plus chers, frais de fonctionnement
de la structure, comme le coût de la location des entrepôts, les dépenses d’électricité
ou les charges de personnel. C’est pourquoi les faillites de franchises de dépôts-
vente comme Troc de l’île ou Cash Converters, qui fleurissaient à l’aube des années
2000.
76
Dans le marché des jeux vidéo par exemple, qui est l’un des marchés les plus
concernés, on a constaté qu’en 2010, 4 jeux achetés sur 10 sont de seconde main,
ce qui a fait reculer de 16% le chiffre d’affaires total par rapport à l’année précédente.
Des chiffres inquiétants qui font réagir les fabricants de jeux vidéo, comme le leader
du marché, EA Sports.
Pour éradiquer ou du moins minimiser l’impact de la revente de jeux d’occasion sur
son chiffre d’affaires, le fabricant a instauré un nouveau système de code à usage
unique qui empêche l’acquéreur du jeu d’occasion de jouer en ligne sans ce précieux
code, déjà utilisé par le nom du premier acheteur. La revente de ces jeux reste
possible mais elle nécessitera l’achat en ligne du code à usage unique.
Cette démarche de la part du célèbre fabricant montre l’ampleur du marché de
l’occasion et comment celui-ci peut s’avérer être un ennemi pour la consommation
traditionnelle.
Le monde de l’édition est également l’un des secteurs les plus concernés par la
vente d’articles d’occasion. Par exemple, la plus grande chaîne de librairie
d’occasion du Japon, « Bookoff Corp », a vu son chiffre d’affaire augmenter de plus
de 22% lors des trois derniers trimestres 2011 ;65 l’ascension continue pendant que
les sites de ventes de livres neufs font face à des chutes des ventes considérables.
La librairie en ligne books a vu son chiffre d’affaires baisser de 1,3% en janvier 2011
soit une perte de 7 millions de dollars66. L’ensemble de sa concurrence a également
vu son chiffre d’affaires chuté 3,8% en 2011.
L’industrie du meuble est aussi un secteur qui vit des jours difficiles : les ventes de
meubles neufs sont devenues difficiles depuis la crise et le consommateur se tourne
plus facilement vers le marché de l’occasion. En effet, il y trouve des objets d’un bon
rapport qualité prix. C’est encore l’un des exemples clés qui démontrent le recul de
l’achat d’objets neufs alors que les ventes d’objets d’occasion n’ont jamais connu de
si beaux jours.
65
Article du Japan Times de mai 2011
66 Article du Publisher Weekly de mars 2011
77
Par ailleurs, face à l’émergence du peer to peer, l’industrie culturelle et les maisons
de disque ont tenté de se protéger, sans grands succès. En ne sachant pas
s’adapter aux nouvelles exigences de la consommation, tels que les services vendus
sur Itunes, elles ont subi des pertes importantes.
Ce mouvement de désintermédiation doit cependant être nuancé puisque sont
essentiellement concernées les professions qui offraient pour seule prestation, la
mise en relation d’un acheteur et d’un vendeur. En effet, pour d’autres entreprises,
l’économie du partage représente une aubaine, à condition de réinventer leur mode
distribution.
b) Une opportunité à saisir pour les entreprises
Les entreprises classiques sont aujourd’hui obligées de s’adapter aux nouvelles
attentes des consommateurs, en changeant leur mode de distribution. Selon Robert
Rochefort, à l’initiative du nouvel Observatoire Consommation et Société, Obscoco,
« ce nouveau genre de consommation va bouleverser l’offre des acteurs
économiques ».
Selon lui, à l’avenir les entreprises proposeront elles mêmes des systèmes alternatifs
et certaines d’entre elles ont déjà commencé.
On peut penser qu’il serait bénéfique que cette nouvelle façon de consommer se
généralise, puisque les entreprises seraient alors gérantes de l’entretien des biens à
la location. Par conséquent, les industriels fabriqueraient des produits plus durables,
freinant ainsi la raréfaction des ressources naturelles et répondant aux attentes des
consommateurs.
Certaines entreprises ont déjà saisis cette opportunité.
Les marques et les distributeurs se lancent sur ce nouveau marché afin de créer une
nouvelle relation de confiance, de fidélité.
78
C’est le cas de Décathlon, qui vient de lancer son « Trocathlon ». Chaque année,
Décathlon organise un Trocathlon, une semaine pendant laquelle chacun peut
vendre ou acheter du matériel de sport d’occasion. Cet événement permet de se
débarrasser du matériel inutilisé. Ce sont des experts de la marque qui évaluent le
prix de vente et par la suite les vendeurs sont responsables de la transaction. Si la
vente est effectuée, le particulier reçoit un bon d’achat équivalent à la vente utilisable
dans le magasin Décathlon.
Le géant du briocolage, Castorama s’intéresse aussi de très près à cette nouvelle
forme de consommation en proposant du troc de compétences, les « Troc’heures ».
Le principe est simple, Castorama crée une communauté de bricoleurs amateurs qui
s’échangent des heures de bricolage entre eux. Cette plateforme met en relation des
personnes à la recherche d’aide pour des travaux et d’autres possédants des
compétences dans certains domaines. De plus, les offres et les demandes sont
géolocalisées, de manière à être dépanné le plus rapidement possible.
Toutefois, ce système n’est pas si évident puisqu’il est nécessaire de trouver une
personne ayant les compétences recherchées et qui possède aussi des capacités
dans les domaines souhaités par cette personne. Dans certains cas, le troc peut
s’avérer impossible.
De même, les Accorderies soutenus par la fondation Macif sont aussi un exemple
illustrant la consommation collaborative. L’accorderie est un système solidaire qui
favorise la mixité sociale, lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Il s’agit de regrouper
les « accordeurs » qui échangent des services gratuitement : « une heure se service
reçu équivaut à une heure de service rendu ».
Intermarché met en place la page Facebook, Family Troc, une plateforme permettant
à chacun de troquer des objets qui ne sont plus utiles contre d’autres dans toute la
France. La recherche d’offre est effectué par catégories (mobilier, vêtements…).
L’avantage pour Intermarché est d’illustrer sa stratégie de communication « tous unis
contre la vie chère ». Cette application permet aussi d’inciter les internautes à se
rendre sur la page de promotion d’Intermarché.
79
Pour tous ces acteurs de la grande distribution, le troc constitue un moyen de se
différencier de ses concurrents en matière de social service marketing. Il permet
aussi de valoriser l’image de marque et de renforcer la fidélisation. Le troc peut
s’avérer être un levier marketing important incorporé dans une stratégie plus globale.
Il met en avant des valeurs recherchées par les marques et les consommateurs
telles que la solidarité, le partage et la convivialité. Le troc permet ainsi d’être au
service de la « brand equity » et surtout de la « brand utility ».
La brand utility a pour but d’améliorer le quotidien des consommateurs. Les marques
doivent aujourd’hui créer une relation avec les consommateurs, être utiles et
pertinentes. Elles doivent privilégier la qualité à la quantité.
Par ailleurs, les constructeurs automobiles s’engouffrent aussi sur ce marché, ils
prennent conscience de l’importance des nouvelles attentes des consommateurs. Ils
présentent ainsi des offres de mobilité partagée.
Peugeot, avec son offre « Mu by Peugeot » se place en tête des constructeurs
proposant de l’autopartage. Lancée en 2010, les consommateurs peuvent ainsi
choisir leur moyen de transport allant du vélo électrique au cabriolet en passant par
la citadine ou le scooter. Ses utilisateurs peuvent accéder à tout types de véhicules,
y compris hybrides sans avoir à dépenser pour la possession et l’entretien d’une
voiture. On peut se demander si Peugeot n’est pas en train de perdre des clients et
de faire du tort à ces propres produits. On constate que ce n’est pas le cas puisque
« 55% des utilisateurs de « Mu » ne possèdent pas de voiture, 60% ont moins de 35
ans, et 85% n’ont jamais possédé de véhicule Peugeot. »67
Le constructeur automobile Citroën a lui aussi lancé une offre de mobilité partagé,
« Multicity », semblable à celle de Peugeot.
En Allemagne, face au désintérêt croissant pour la voiture, notamment de la part des
plus jeunes, les constructeurs mettent à disposition de réelles solutions
d’autopartage.
67 Article Génération y end love affair car owners. The guardian
80
Ces initiatives se rapprochent davantage de tests du marché que d’évolutions
stratégiques réelles, pour le moment surtout en France. Toutefois, les constructeurs
(63%) sont intéressés dans l’avenir, d’ici 2020, à fournir de la mobilité en tant que
service afin de répondre aux attentes des consommateurs.68
Cet intérêt grandissant s’explique par une volonté d’être présent sur ce nouveau
marché de l’autopartage, florissant et de minimiser l’impact de la baisse de la vente
de voitures. Ces constructeurs préfèrent faire vivre l’expérience de leur marque par le
biais de l’autopartage, en attendant qu’ils souhaitent éventuellement acheter un
véhicule de leur marque, qu’ils connaitront déjà.
Ainsi, les entreprises, pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs,
doivent savoir saisir cette opportunité et modifier leur perspective. Cette aubaine est
l’occasion d’innover, entretenir la fidélité des clients, d’avoir une image de marque,
des valeurs plus responsables... Cela demande un changement en profondeur en
matière de marketing et de cycle de vie des produits.
2. La consommation collaborative : un phénomène à nuancer
a) La consommation collaborative… c’est encore de la
consommation
La consommation collaborative est souvent mise en avant sous les aspects du don et
du partage, mais ce ne sont pas toujours les principaux moteurs. Par exemple,
l’élément déclencheur du phénomène de l’autopartage ou du covoiturage n’est pas
seulement une vision altruiste, de partage, il s’agit surtout d’un intérêt financier. En
effet, les fervents de l’autopartage cherchent avant tout à amoindrir les
conséquences de la crise 69: moins de dépenses et en quelques sortes, la possibilité
des revenus complémentaire.
68 Cf. Annexe 14 : Le point de vue des constructeurs automobiles sur les offres de mobilité partagée
69 Etude de l’institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile de France -2010
81
La principale motivation n’est pas la décroissance ou le développement durable.
Selon le philosophe Gilles Lipovetsky, la consommation collaborative est encore de
l’hyperconsommation, il s’agit d’une nouvelle étape de la marchandisation des
rapports humains et non pas d’une réponse à la crise planétaire.
Par exemple, le site Super-marmite, qui propose de vendre une partie de son repas
ne correspond en fait à la « part du pauvre », notion qui a disparu avec le temps. De
même pour les covoitureurs, il s’agit des anciens autostoppeurs qui voyageaient
gratuitement. Le couchsurfing, quant à lui, pourra dans l’avenir remplacer l’accueil
chez soi, en monétisant sa chambre d’ami.
Ainsi, il est important de dissocier les différents sites de consommation collaborative.
Il faut distinguer les services gratuits qui relèvent du don, des payants, qui sont une
nouvelle forme de marchandisation de la société. En effet, il existe un risque, celui du
social washing ou encore « blanchiment social », qui consiste à faire passer pour
social, ce qui ne l’est pas.
“Car vendre un service (l’usage d’un bien) plutôt qu’un objet (la possession d’un
bien), c’est plus encore que dans l’économie marchande faire commerce de la mise
en relation entre fournisseurs et consommateurs”,70
On peut penser que la consommation collaborative est altruiste, mais ce nouveau
phénomène comporte des conséquences. Il y a une différence entre un particulier
qui loue sa voiture et un commerçant qui propose une offre de location. La
conséquence se trouve dans la transformation des rapports sociaux. Il est important
de différencier la consommation collaborative des services de partage.
Par exemple, les entrepreneurs du « peer to peer » et du streaming génèrent des
revenus énormes grâce à la publicité et ne sont en rien des entreprises
philanthropiques. De même, pour l’entreprise Groupon, pour laquelle de nombreuses
critiques ont été émises.
70 Vincent Truffy. « Partageux, mais bien marketés » Mediapart
82
b) L’économie du partage alimente la crise
La crise, condition indispensable à ce nouveau modèle, se nourrit de ses effets,
comme la désintermédiation, « phénomène économique et commercial qui se traduit
par la réduction ou la suppression des intermédiaires dans un circuit de distribution. »
L’économie du partage a besoin d’un contexte de crise pour naître et s’épanouir :
l’optimisation des ressources n’éveille d’intérêt qu’en période de manque. Il n’y a
donc aucun avantage, pour les partisans plus ou moins conscients du modèle, à
sortir de cet état.
C’est là une illustration du principe d’autoréalisation des conditions du modèle : la
crise est déplorée, proclamée par les médias qui exposent mille indicateurs
démontrant son emprise, mais en n’exposant que ces indicateurs négatifs, ils
contribuent à entretenir et prolonger ce climat difficile.
La perte de confiance se répercute sur les comportements des chefs d’entreprise
notamment, et plus globalement de tous les acteurs de la chaîne : baisse des
investissements, report des embauches, avec pour conséquence, hausse du
chômage peu propice à la reprise économique, tendance à l’épargne au détriment de
la consommation, donc de la production industrielle et du commerce.
La focalisation sur la crise et les moyens de survie en période de crise fait donc par
principe échec à la reprise économique. Elle y contribue aussi par l’un de ses
principes clés : le recours systématique à la désintermédiation.
c) Les conséquences pour les consommateurs : le
revers de la médaille
La consommation collaborative est en train de devenir un business lucratif, à tel point
qu’on peut douter de ses vertus : comment l’idéal du dépenser mieux peut-il générer
autant d’argent, à moins de le faire au détriment du consommateur ?
En effet, l’économie du partage connaît un succès sans précédent, faisant son
apparition jusque dans les journaux télévisés.
Ainsi, des rubriques entières lui sont consacrés à dans les émissions relatives à la
consommation (exemple : 100% MAG).
83
Elle apparaît comme la panacée, l’argument de la bonne affaire étant devenu
inattaquable, une vérité absolue à laquelle le consommateur peine toujours plus à
résister. Ainsi donc, plus on s’enfonce dans la crise, et plus les dépenses des
ménages s’envolent. Le culte du dépenser mieux semble donc primer sur les
stratégies d’épargne qui sont pourtant l’apanage traditionnel des périodes de crise.
Le business de l’économie de crise s’incarne dans la réussite d’un site internet
comme Le Bon coin. Il permet à ses visiteurs d’acheter d’occasion des biens au
meilleur prix. Lancé en 2005 en France, le site de petites annonces en ligne
supplante tous les autres sites par le nombre de pages visitées (4 milliards de
milliards de pages par mois), à tel point que le géant Ebay est contraint d’intégrer à
son modèle un module dédié aux petites annonces entre particuliers.
Le « plus grand vide-grenier de France », avec 16 millions de visiteurs uniques par
mois, génère un chiffre d’affaires de 19 millions d’euros en 2010, et se trouve depuis
dans le top 10 des termes les plus recherchés sur le moteur de recherche de Google.
Le principe de cette nouvelle économie n’est pas sans contradiction : si les
consommateurs souhaitent optimiser leurs achats, les vendeurs souhaitent optimiser
leurs profits. C’est là une des limites du modèle.
En matière de vente, l’union fait la force : la vente de plus grands volumes permet en
effet de minimiser les coûts. Cette loi connaît de multiples applications, c’est elle qui
justifie l’existence des grossistes et des centrales d’achat.
Son avatar le plus récent est le site Groupon, basé sur le principe de l’achat groupé.
Les abonnés du site sont ainsi invités à s’inscrire sur l’encart du produit ou du service
qu’ils ont repéré, affichant une ristourne de 50% au minimum. Si le seuil critique
d’inscrits est atteint dans le délai imparti, le marché est emporté, et l’abonné pourra
se rendre auprès du commerçant pour bénéficier de la marchandise ou du service
proposé.
Le site connaît un franc succès. Estimé à 1,35 milliard de dollars fin 2010, il a fait
l’objet de deux tentatives de rachat, par Yahoo puis Google, pour environ 5 milliards
de dollars.
Un tel succès n’est pourtant pas sans ombres au tableau, la qualité des services
proposés n’étant pas toujours au rendez-vous. La tentation est en effet grande pour
les commerçants de gonfler artificiellement leurs prix de façon à pouvoir financer la
ristourne proposée. Les flux d’abonnés sont parfois tels que les commerçants ne
84
sont pas en mesure de répondre à la demande, entraînant des mécontentements (un
restaurant servant 30 couverts ne sera pas forcément en mesure d’en servir
correctement 100).
En résumé, les clients de Groupon sont loin d’en avoir toujours pour leur argent, ce
qui affecte l’idéal de cette nouvelle économie.
85
Conclusion
La consommation collaborative dépasse le stade de simple tendance pour devenir
un véritable phénomène de consommation. Une dynamique extrêmement puissante
aux implications commerciales et culturelles est en train de se développer. La
technologie et les réseaux sociaux nous ramènent en arrière avec le retour du troc,
de l’échange, du partage, mais ils sont réinventés par l’utilisation du web. L’économie
de « ce qui à moi est à toi » se généralise.
En effet, elle est devenue un phénomène mondial, né des innombrables possibilités
de connexion sur le web, entre individus qui ne se connaissent pas. En effet, un
torrent de réseaux sociaux, de pair à pair et de technologies en temps réel changent
notre manière d’être. L’importance de la notion de communauté est renouvelée et on
assiste à la redéfinition des termes « amis » ou « voisins ». De plus, la récession
mondiale, accompagnée des préoccupations environnementales urgentes sans
réponses entrainent un bouleversement du comportement des consommateurs.
Ces facteurs fusionnent ensemble et créent un grand tournant s’éloignant du 20ème
siècle, défini par l’hyperconsommation et allant vers le 21ème siècle, défini par la
consommation collaborative. Les comportements de partage via les réseaux sociaux
deviennent une seconde nature en ligne, qui s’appliquent à des domaines hors ligne
de la vie quotidienne.
Par ailleurs, tous ces systèmes exigent un degré de confiance, une pierre angulaire
pour que cela fonctionne : la réputation. Auparavant, la réputation n’avait pas de
réelle importance puisque notre historique de crédit, était plus important que
n’importe quel avis de pair à pair. Mais avec le web, nous laissons des traces, à
chaque idée postée, chaque commentaire partagé, on signale notre plus ou moins
bonne collaboration et notre indice de confiance. On assiste ainsi, à l’émergence
d’une nouvelle monnaie sociale.
86
Dans ce contexte, des centaines de startups sont promises à un bel avenir. D’autant
plus que l’économie du partage présente l’avantage d’être spécifique tout en restant
très ouvert. Les projets qui peuvent s’inscrire dans cette dynamique sont très variés.
Le champ des possibles recouvre tous les secteurs de l’économie.
De nombreuses startups se sont déjà implantées sur ce nouveau marché aux
nouvelles opportunités et accomplissent des levées de fonds sans précédent. Ce
phénomène est en passe de devenir un des segments les plus prometteurs des
startups américaines. En France, plusieurs éléments sont aussi annonciateurs d’une
prochaine et jolie percée de la consommation collaborative, avec l’apparition de
conférences et rendez-vous spécifiques, l’attention croissante portée par les médias
traditionnels. Ces nouveaux sites ont déjà commencé à transformer les relations
classiques commerciales, la façon de consommer et même les modes de vie.
Cependant, pour les entreprises classiques, c’est une idée qui fait son chemin, mais
en réalité les choses sont difficiles à réaliser. Il faut créer un certains nombres de
conditions qui vont bien au delà de la simple création d’un site internet. En effet, ces
entreprises doivent faire preuve de créativité, d’inventivité, de « bricolage »,
puisqu’elles sont les pionnières de ce mouvement. De plus, elles doivent faire face à
de nombreuses contraintes économiques, financières et fiscales qui pèsent
aujourd’hui de plus en plus. En effet, tout reste à définir, normalisé, il faut déchiffrer
un nouveau territoire qui parait très prometteur.
Ainsi, on assiste à l’apparition d’un système plus durable construit, qui constitue la
réponse à nos besoins primitifs individuels et communautaires. On en parlera comme
d’une révolution lorsque la société face à de grands défis sera passé des dépenses
individuelles à une redécouverte du bien collectif. Cela peut réserver les modes de
commerce dépassés, aider les consommateurs à abandonner des formes
d’hyperconsommation qui gaspillent beaucoup trop.
Mais ce modèle va encore plus loin, avec la naissance de « communautés
intelligentes ».
Ces communautés permettent de créer des espaces communs pour optimiser les
ressources et la communication entre les habitants d’un même quartier. Ils peuvent
87
ainsi partager l’environnement dans lequel ils habitent : la nature, les lieux de vie
(voiture, outils, électroménager…). Ces nouvelles organisations sont conçus de
manière à regrouper l’énergie, l’eau, les déchets…
Ces « communautés intelligentes » ont déjà vu le jour au Japon, au Danemark et
confèrent des résultats très prometteurs. Ces expériences d’habitats groupés
pourraient-elle faire école ailleurs ? Sommes-nous prêts à partager nos lieux de vie ?
Par ailleurs, on peut se demander quel rôle joue l’Etat dans ce modèle. En effet, on
constate un manque d’intérêt des politiques pour ce phénomène, qui a été absent
des campagnes présidentielles. Cependant, est-il vraiment nécessaire de légiférer et
d’encadrer ce modèle ? On peut penser que pour l’instant, nous ne sommes qu’aux
prémices d’un changement majeur concernant cette nouvelle économie et qu’il n’est
pas nécessaire que l’Etat exerce un contrôle sur celle ci. En effet, cela engendrerait
des barrières au niveau de l’innovation. Toutefois, il serait favorable que les
institutions soutiennent la promotion de ces innovations, pour que de nouveaux
modèles participatifs se développent.
On peut imaginer que dans le futur, cette nouvelle organisation implique des
montages juridiques innovants. Les avocats devront alors modifier les lois
accompagnant ces projets de co-partage et changer leurs pratiques quotidiennes.
Quel seront l’avis et le soutien des institutions politiques et législatives face à
l’émergence de ces nouveaux modèles participatifs ?
Enfin, ce modèle a été analysé selon l’économie des pays occidentaux, celui-ci
pourrait-il être adaptable aux pays en voie de développement ?
88
Tables des annexes
Annexe 1 : Du peer to peer à la consommation collaborative................................... 89
Annexe 2 : Le nombre d’internautes et leurs âges en France .................................. 90
Annexe 3 : Le nombre d’utilisateurs de Facebook et Twitter dans le monde fin 2011
................................................................................................................................. 91
Annexe 4 : Le nombre d’utilisateurs de Twitter par pays début 2012 ....................... 92
Annexe 5: Le panorama du marché mobile et son avenir dans le monde ................ 93
Annexe 6 : Les utilisateurs des réseaux sociaux sur le mobile dans le monde ........ 94
Annexe 7 : L’utilisation de plateformes participatives selon l’âge en 2011 ............... 95
Annexe 8: L’évolution du nombre de nuits réservées depuis le lancement d’ Airbnb 96
Annexe 9: L’évolution d’Airbnb entre 2011 et 2012 dans le monde .......................... 97
Annexe 10 : Le coworking : population de La Cantine .............................................. 98
Annexe 11 : La montée du crowfunding ................................................................... 99
Annexe 12 : Wiseed : Le processus de fonctionnement du crowdfunding .............. 100
Annexe 13: Les chiffres de la mobilité partagée ..................................................... 101
Annexe 14 : Le point de vue des constructeurs automobiles sur les offres de mobilité
partagée ................................................................................................................. 102
89
Annexe 1 : Du peer to peer à la consommation
collaborative
Source : Car Futur
90
Annexe 2 : Le nombre d’internautes et leurs âges en
France
Source : France Info (Ipsos/ Médiamétrie...)
91
Annexe 3 : Le nombre d’utilisateurs de Facebook et
Twitter dans le monde fin 2011
Source : France Info (Ipsos/ Médiamétrie..)
92
Annexe 4 : Le nombre d’utilisateurs de Twitter par
pays début 2012
Source : Semiocast
93
Annexe 5: Le panorama du marché mobile et son
avenir dans le monde
Source : Microsoft Tag
94
Annexe 6 : Les utilisateurs des réseaux sociaux sur
le mobile dans le monde
Source : Microsoft Tag
95
Annexe 7 : L’utilisation de plateformes participatives
selon l’âge en 2011
Source : Zipcar
96
Annexe 8: L’évolution du nombre de nuits réservées
depuis le lancement d’ Airbnb
Source : site Airbnb
97
Annexe 9: L’évolution d’Airbnb entre 2011 et 2012
dans le monde
Source : site Airbnb
98
Annexe 10 : Le coworking : population de La Cantine
Source : La Cantine
99
Annexe 11 : La montée du crowfunding
Source : crowdsourcing.org
100
Annexe 12 : Wiseed : Le processus de
fonctionnement du crowdfunding
Source : wiseed
101
Annexe 13: Les chiffres de la mobilité partagée
Source : magazine SFR player
102
Annexe 14 : Le point de vue des constructeurs
automobiles sur les offres de mobilité partagée
Source : IBM
103
Bibliographie
Référence de livres
Rachel Botsman, What’s mine is yours? The rise of Collaborative Consumption,
Edition Haperbusines, 2011
Monique Dagnaud, La génération Y, les jeunes et les réseaux sociaux, de la dérision
à la subversion, Edition Nouveaux Débats, 2011
Lisa Gansky, The mesh, Why the Future of Business is Sharing, edition Portfolio,
Julien Pouget, Intégrer et manager la génération Y, Edition Vuibert, 2010
Elisabeth Laville et Marie Balmain, Achetons responsable !, Edition Seuil, 2006
Myriam Levain et Julia Tissier, La Génération Y, par elle-même,
Jeremy Rifkin, Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Vers une
civilisation de l’empathie, Edition Les liens qui libèrent, 2011
Jeremy Rifkin, L’âge de l’accès : la Nouvelle culture du capitalisme, Edition La
découverte, 2000
Référence vidéo
http://www.dailymotion.com/video/xoz7hb_2012-02-22-bfm-business-consommation-
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http://www.youtube.com/watch?v=Gt5m7S8zWcQ&feature=youtu.be
http://videos.arte.tv/fr/videos/landshare_mon_terrain_est_ton_terrain-6402260.html
http://www.lobsoco.com/actualites/110-creation-obsoco.html
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http://service-en-plus.com/service-en-crowdsourcing/economie-echange
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