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Commande n°: 0000112043 0 S Du : 27/09/2016 Commandé par : Evelyne Lohr Région : Auvergne Rhône Alpes Type de prestation : D Références MAR 2016-Cesaar2-0039 Analyse géographique, sectorielle, filière, technologique (dimension régionale, interrégionale, voire internationale) « Étude Cellulose Valley pour la filière chimie en région Auvergne Rhône Alpes »

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Commande n°: 0000112043 0 S Du : 27/09/2016

Commandé par : Evelyne Lohr Région : Auvergne Rhône Alpes

Type de prestation : D

Références MAR 2016-Cesaar2-0039

Analyse géographique, sectorielle, filière, technologique (dimension régionale, interrégionale, voire internationale)

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SOMMAIRE 1 CONTEXTEETOBJECTIFS.................................................................................................................4

1.1 LECONTEXTE.......................................................................................................................................41.2 LESOBJECTIFS......................................................................................................................................41.3 LAMETHODOLOGIE..............................................................................................................................4

2 PERIMETREDEL’ETUDEETCHAINEDEVALEURDELAFILIEREDEDECONSTRUCTIONETDEVALORISATIONDESRESSOURCESLIGNOCELLULOSIQUES......................................................................5

2.1 UNEDIVERSIFICATIONPOURLESINDUSTRIELSDUCARTONETDUPAPIER........................................................52.2 UNEPLACEPOURLESBIORAFFINEURSETLESCHIMISTESDESMATIERESVEGETALES..........................................62.3 ÀL’AVAL,LESINDUSTRIESCHIMIQUES......................................................................................................72.4 L’IMPORTANCEDESLABORATOIRESDERECHERCHEETLESCENTRESTECHNOLOGIQUES.....................................8

3 UNEPRODUCTIONSCIENTIFIQUEREGIONALERECONNUEMAISPEUINDUSTRIALISABLE?............103.1 CARTOGRAPHIEDESPRINCIPAUXPOLESDERECHERCHESREGIONAUX...........................................................10

3.1.1 ÀGrenoble,unerechercheinternationalefortementdédiéeauxbioraffineriesassociéesauxusinesdepâtesàpapier...............................................................................................103.1.2 ÀLyon,unechimieuniversitairepositionnéesurlesprocédésdetransformationdelamatière.......................................................................................................................................123.1.3 L’IFPENacteurmajeurdesprincipauxdémonstrateursenFrance.........................................14

3.2 DESFREINSCOMMUNSALAVALORISATIONINDUSTRIELLEDESTRAVAUXDERECHERCHE.................................15

4 LEPAYSAGEINDUSTRIELDELAFILIERE..........................................................................................174.1 LESACTEURSETLESRELATIONSREGIONALES...........................................................................................17

4.1.1 Uneforteimplicationindustriellerégionaledanslatransformationetlaformulation..........174.1.2 Deshabitudescollaborativesauservicedelaformalisationdelafilièrerégionale...............18

4.2 LACHIMIEDUVEGETALD’ORIGINELIGNOCELLULOSIQUE:UNAXEDEDEVELOPPEMENTPOURUNEMAJORITED’ENTREPRISES............................................................................................................................................19

4.2.1 Unrecourstrèslimitéàlamatièrelignocellulosique..............................................................194.2.2 Uneambitionaffichéeforteetvolontaire..............................................................................214.2.3 Desfreinsmultiplesaudéveloppementdelachimieduvégétald’originelignocellulosiquedanslesentreprises............................................................................................................................21

5 ANALYSEDESFORCES,DESFAIBLESSES,DESOPPORTUNITESETDESMENACES.............................23

5.1 MATRICEAFOM...............................................................................................................................235.2 PROPOSITIONSD’ACTIONS...................................................................................................................25

5.2.1 Développeruneculturedeladéconstructionetdelavalorisationdelamatièrelignocellulosique.................................................................................................................................255.2.2 Développerlespartenariatsentrelespôlesrégionaux...........................................................265.2.3 DévelopperunpartenariatavecIAR,XylofuturetrejoindreleBioBasedIndustriesConsortium..........................................................................................................................................27

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5.2.4 Rapprocherlesoutilstechnologiquesdel’amontetdel’avaldelachaînedesprocédés......275.2.5 Organiserlarencontrerégulièredel’Amontetdel’aval........................................................285.2.6 Positionnerlarégioncommeunlieud’accueilpourlesdémonstrateursindustriels..............28

6 ANNEXES......................................................................................................................................30

6.1 PANORAMADESPRODUITS,MATERIAUXETPROCEDESDEVELOPPESAUSEINDESPROJETSLABELLISESPARAXELERA..............................................................................................................................................306.2 GUIDEDESENTRETIENSETQUESTIONNAIRE............................................................................................326.3 RESULTATSDEL’ENQUETE...................................................................................................................32

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1 CONTEXTE ET OBJECTIFS

La mission est réalisée au profit de la DIRECCTE Auvergne Rhône Alpes

1.1 Le contexte

Alors qu’il existe globalement un climat favorable à l’émergence de produits biosourcés (réglementations, épuisement des ressources naturelles d’origine fossile…), la région Auvergne Rhône Alpes n’a pas encore été en mesure de tirer profit d’un écosystème jugé favorable pour faire émerger une filière valorisant les ressources lignocellulosiques locales Son statut de 1ère région française de production chimique (près de 650 établissements) associé à la forte présence d’un tissu d’industriels et d’académiques issu de l’industrie papetière sont des atouts apparemment indéniables. Il s’avère cependant que les compétences scientifiques et techniques de renommée mondiale, qui s’expriment notamment au sein du Carnot Polynat, de l’école d’ingénieurs Pagora, de l’INP Grenoble et du Centre technique du papier (CTP), trouvent peu de relais et d’écoutes auprès des industriels locaux.

1.2 Les objectifs

L'objectif principal de l'étude est de réaliser un état des lieux de la filière lignocellulosique (Bois) en Auvergne-Rhône-Alpes de manière à en dégager les forces, les faiblesses et les leviers d’actions envisageables pour en développer les partenariats, les développements industriels et la production de produits biosourcés sur le territoire régional. Les travaux à engager s’attacheront à étudier les voies de valorisation de la ressource lignocellulosique régionale pour l’industrie chimique afin de développer des molécules et des matériaux à haute performance biosourcés. Il s’agit notamment de mettre en évidence les problématiques, les contraintes et les besoins des industriels pour accompagner et soutenir le développement d’activités pilotes et industrielles de production, de transformation et de formulation de molécules chimiques biosourcées et obtenues à partir de bois.

1.3 La méthodologie

Pour atteindre ces objectifs, le Consortium CeSAAr a proposé un cadre d’intervention en plusieurs étapes. La méthodologie mise en œuvre consiste respectivement à :

• Définir les maillons de la filière régionale et la typologie des acteurs présents en Auvergne Rhône Alpes ;

• Caractériser l’offre de compétence et l’offre technologique régionale, en la positionnant par rapport aux compétences et offres présentes sur le territoire national ;

• Qualifier l’intérêt des industriels pour le développement de la filière régionale et identifier les possibles maillons manquants à l’amont ou à l’aval de la chaîne de valeur et les facteurs de développement associés ;

• Formuler, en s’appuyant sur les facteurs de développement de la filière, des préconisations en termes d’actions à engager pour répondre aux enjeux de la filière.

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2 PERIMETRE DE L’ETUDE ET CHAINE DE VALEUR DE LA FILIERE DE DECONSTRUCTION ET DE VALORISATION DES RESSOURCES LIGNOCELLULOSIQUES

La déconstruction lignocellulosique à des fins de valorisation pour l’industrie chimique des molécules structurelles du bois se présente comme une voie de diversification pour la filière Bois. Ce sont ainsi notamment les bois d’industrie cultivés par les sylviculteurs et les exploitations forestières, le bois d’élagage et d’abattage et les produits connexes issus des scieries qui sont amenés à alimenter en matière première cette potentielle nouvelle filière industrielle régionale.

Figure 1 : filière de déconstruction et de valorisation des ressources lignocellulosiques issues du bois

2.1 Une diversification pour les industriels du carton et du papier

Dans le cadre d’une démarche de diversification de ces activités, l’Industrie du carton et du papier est amenée à jouer un rôle central pour organiser l’apport des matières en amont et pour réaliser en interne ou en collaboration les premières étapes de conversion de la biomasse (fractionnement, extraction, séparation et purification), voire davantage en fonction de leur appétence à évoluer vers l’aval de la chaîne de valeur. Ce rôle résulte de sa capacité historique à extraire et valoriser pour ses activités principales, la cellulose grâce à différents procédés dont le procédé

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thermomécanique, le procédé dit kraft et le procédé bisulfite. L’évolution de ces procédés permet aujourd’hui d’envisager de valoriser autrement que thermiquement, les coproduits dont l’hémicellulose et la lignine. Elle a conduit certains industriels et notamment des unités françaises de production de pâte de cellulose à engager de nouvelles initiatives (intégration d’une bioraffinerie) pour améliorer leur compétitivité en offrant de nouvelles valorisations à leurs coproduits. Ces industriels déconstruisent le bois et valorisent directement plusieurs de ses constituants. C’est le cas de l’entreprise Tembec France à Tartas dans les Landes qui à partir d’un procédé bisulfite valorise de nombreux constituants sous la forme de pâte de cellulose, de celluloses de spécialités, et de lignines. De son côté Fibre Excellence s’appuie sur une R&D active dans le domaine de la diversification produits pour expérimenter la possibilité de valoriser une part des hémicelluloses présentes dans les bois de feuillus traités par le site de Saint Gaudens (Occitanie). Depuis peu, il est également possible de citer le papetier Norske Skog à Golbey les Vosges dont la stratégie de développement et diversification le conduit à participer à la création d’une filière « du bois à l’alimentation » en collaboration avec Arbiom (ex-Biométhodes). L’intégration d’une bioraffinerie permet d’alimenter directement les marchés avec des molécules biosourcées et/ou d’alimenter d’autres maillons de la chaîne, qui se chargent de réaliser d’autres transformations et de formuler de nouveaux produits. Elles peuvent également fournir des entreprises spécialisées dans l’extraction végétale, qui profitent du travail de fractionnement pour notamment extraire, modifier et formuler les composés extractibles du bois. Comme exemple, il est possible de citer DRT, qui est spécialisée dans la valorisation de la colophane et de l’essence de térébenthine extraites de la résine du pin. D’autres entreprises spécialisées dans l’extraction végétale se fournissent directement auprès des acteurs amont de la filière bois. Biolandes se fournit en écorce de pin maritime de la forêt des Landes de Gascogne via les scieries qui traitent ce bois. L’intégration d’une activité de bioraffinage n’est pas une voie mise en œuvre par l’ensemble des industriels. Si ces dernières ne se fournissent pas directement en pâte de cellulose pour mener à bien leur activité principale, elles sont amenées à continuer de maîtriser en interne les procédés de fractionnement du bois. La valorisation chimique des co-produits qui peuvent notamment se retrouver dans la liqueur noire (procédé kraft), est alors en compétition avec une valorisation thermique et semble limiter la possibilité pour ces acteurs d’alimenter l’aval de la filière en matière fractionnée. Cet apport n’est pourtant pas à exclure, dans le cadre du développement d’une filière. Selon le mémento 2016 de la FCBA (données 2015), le territoire français compte 8 usines produisant de la pâte de cellulose. Ensemble elles ont produit 1 724 600 tonnes de pâte en 2015.

2.2 Une place pour les bioraffineurs et les chimistes des matières végétales

Les bioraffineurs et les industriels de la chimie du végétal déconstruisent, fractionnent, extraient, séparent et purifient les différents constituants grâce à des procédés chimiques ou biotechnologiques. Leurs technologies et leurs procédés permettent de transformer la biomasse en biocarburants, ou en molécules plateformes ou en des spécialités chimiques. En France, les acteurs du raffinage des coproduits de fabrication de pâtes sont peu nombreux et peu d’acteurs des biotechnologies sont actifs dans le domaine de la fermentation de la lignocellulose. Ces acteurs sont des fournisseurs de technologies. Leurs développements impliquent des rapprochements et des partenariats avec des acteurs présents en amont ou en aval. Dans le cadre de la valorisation des produits agricoles, les entreprises qui mettent au point ces technologies sont essentiellement entrées en collaboration avec les agro-industriels. Dans le cadre de la filière de déconstruction et de valorisation de la matière lignocellulosique issue du bois, ces acteurs sont confrontés au manque de compétitivité de l’industrie papetière et à la concentration des moyens R&D en dehors du territoire français en raison d’un actionnariat étranger très majoritaire. Ceci limite la mise en œuvre de partenariat avec ces acteurs.

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L’entreprise Arbiom extrait chaque fraction de la matière végétale non alimentaire. Elle utilise un procédé dit « bio-compatible » qui combine un prétraitement chimique et une hydrolyse enzymatique. Procédant à basse température, ce dernier permet d’éviter la dégradation involontaire de la structure de la matière. A l’issue du procédé, l’entreprise obtient des hydrolysats de C5 et de C6 (sucres) ainsi que la lignine. La société Arbiom accompagne actuellement le papetier Norske Skog implanté dans les Vosges et développe avec lui un pilote industriel de bio-raffinage alimenté par du bois et des sous-produits papetiers. Ce pilote s’intègre dans un projet de développement initié par Norske Skog Golbey dans le cadre de la Green Valley vosgienne lui permettant de pérenniser son site et diversifier ses revenus. Plus récemment dans le cadre du projet européen Sylfeed soutenu par le partenariat public-privé européen Bio Based Industries (BBI), l’exploitation du pilote (et son développement) permet de mettre en place une nouvelle chaîne de valeur allant de l’approvisionnement en biomasse (déchets de bois) à un produit fini destiné à l’alimentation en aquaculture.

Figure 2 : représentation d'une bioraffinerie (source IFPEN)

2.3 À l’aval, les industries chimiques

Les industries chimiques et notamment de spécialité transforment et formulent les composants biosourcés pour des applications à valeur ajoutée. Ils sont le plus souvent acheteurs d'une molécule et de sa fonction au meilleur prix, valorisant éventuellement la caractéristique "biosourcée" et, plus rarement, le caractère "biosourcé non agricole". De tels industriels peuvent être actifs en R&D sur certaines molécules dont l'origine est le bois mais ils ne s'impliquent que rarement dans l'amont de la filière et n'ont donc guère d'autre fonction structurante que la visibilité commerciale qu'ils peuvent offrir à leurs fournisseurs. Les bioraffineurs ne peuvent donc que rarement espérer créer des collaborations structurantes et nécessaires à leur développement industriel. Les principaux projets de R&D et d’innovations, qui ont été soutenus par la force publique au cours des dernières années permettent d’identifier des acteurs français majeurs comme Arkema, L'Oréal, Michelin, Seppic (filiale d’Air Liquide), de Total, mais aussi des références internationales comme Solvay. Des entreprises chimiques plus petites apprécient également le potentiel des produits biosourcés issus du bois, comme Rescoll, Rolkem, Minakem.

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2.4 L’importance des laboratoires de recherche et les centres technologiques

Les recherches menées en France sur la chimie du bois sont nombreuses, couvrant la diversité des thématiques, avec un niveau de qualité élevé. Le risque est cependant important qu’un bon nombre des industrialisations qui en sera issu, soit mené dans d'autres pays. Au cours de la dernière décennie, une quarantaine de projets ont été soutenus financièrement par les acteurs publics français et européens. Ils représentent un effort financier de près 500 millions d’euros, auquel s’ajoute les efforts des équipes de recherche des laboratoires et des centres techniques (45 entités identifiés) présents essentiellement en Nouvelle Aquitaine, en Occitanie et en Auvergne Rhône Alpes. Mais seuls quelques projets représentent des investissements lourds et conséquents dans le but de développer des pilotes industriels et qui ont généralement été co-financés par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie ou Bpifrance. Il s’agit des projets dédiés à une valorisation en produits énergétiques comme le projet Gaya porté par Engie dans le domaine du biométhane de seconde génération, de Biotfuel porté par Bionext et dédié à la démonstration de la faisabilité d’une chaîne de procédés de production de carburants BTL (biomass to liquid) et du projet Futurol porté par Procethol 2G et dédié à la production d’éthanol cellulosique (biocarburant de seconde génération). Malheureusement aucun projet d’envergure équivalent et français n’a pu profiter des appels à projets du consortium public privé européen Bio Based Industries (BBI).

Figure 3 : couverture de la chaîne de procédés de conversion de la biomasse par les projets menés depuis 2007

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Les autres projets, qui interviennent sur des thèmes variés et couvrent très largement l’ensemble des procédés de conversion de la biomasse sont plus en retrait en termes d’investissements, ce qui suggère des projets à la maturité technologique encore limitée et financés dans le cadre de l’Agence nationale de recherche ou les projets innovants des pôles de compétitivité.

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3 UNE PRODUCTION SCIENTIFIQUE REGIONALE RECONNUE MAIS PEU INDUSTRIALISABLE ?

3.1 Cartographie des principaux pôles de recherches régionaux

3.1.1 À Grenoble, une recherche internationale fortement dédiée aux bioraffineries associées aux usines de pâtes à papier

Historiquement Grenoble présente un intérêt fort et remarquable pour tous les constituants de la chimie du bois. Le Centre de recherches sur les macromolécules végétales (Cermav), le Centre technique du papier (CTP) et l’école d'ingénieur de l'industrie papetière, Pagora ont développé une forte spécialité dans la chimie du bois et de ces constituants (et notamment les polysaccharides). Les travaux de recherche de ces institutions s’intéressent à l’ensemble des constituants de la matière lignocellulosique couvrant essentiellement les procédés allant du fractionnement de la matière à la purification des constituants à valoriser. Les travaux de recherche menés à Grenoble sont très fortement liés aux relations historiques avec l'industrie papetière. Dédié à l’écoproduction de matériaux biosourcés fonctionnels à haute valeur ajoutée, l’Institut Carnot PolyNat met en commun l’expertise grenobloise pour la valoriser. Le renouvèlement de son label en 2017 lui permet de continuer cette mission et notamment contribuer à la maturation des technologies développées, tout en pouvant compter sur une nouvelle initiative dont l’objet est d’apporter de la visibilité à la maîtrise technique de la recherche grenobloise dans le domaine des sucres. Le projet Glyco@alps de l’Initiative d’excellence de l’Université Grenoble Alpes a en effet l’ambition d’éclairer davantage les compétences historiques grenobloises via des collaborations interdisciplinaires, ouvrant le champ des possibles en termes de collaborations et notamment avec les industriels.

Unrôleimportantdonnéàl’industriepapetièrepourlavalorisationdelamatièrelignocellulosiqueActuellement, les approches mises en œuvre par le CTP et Pagora s'inscrivent notamment dans le cadre du développement de la notion de bioraffinerie et plus particulièrement d'unités de raffinage associées aux usines de pâtes à papier. Pour ces sites industriels, qui façonnent depuis longtemps la cellulose, les autres constituants du bois sont des co-produits de leurs procédés de production, qui restent peu valorisés. Ces approches sont en total cohérence avec les relations de l'école et du centre technique avec l'industrie papetière. Ils s'expliquent également par le fait, que l'organisation de la filière d'approvisionnement du bois y est maîtrisée, ce qui doit limiter les risques liés aux approvisionnements de matières si une nouvelle filière de valorisation se développait. Pour la région Auvergne Rhône Alpes, l'absence de tels acteurs industriels limite aujourd’hui la valorisation régionale des travaux de recherche. La possibilité de développer des voies technologiques permettant l'intégration d'une bioraffinerie auprès d'usine valorisant des fibres recyclées est également envisagée par les acteurs de la recherche, et pourrait davantage correspondre au tissu industriel local, et correspondre à des besoins actuels.

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Une recherche applicative concentrée sur la mise au point de composés desubstitutiondansledomainedesmatériaux.De manière complémentaire, le Cermav déploie ses expertises selon deux approches en fonction du fait qu’il s’agisse d’étudier les différents constituants de la matière lignocellulosique et notamment les relations structures/propriétés ou d’intervenir dans le domaine de la recherche sur les matériaux. D’essence plus applicative, la recherche sur les matériaux se nourrit de contrats avec des industriels notables comme Arkéma, Solvay, Michelin par exemple. Dans ce contexte, les demandes sont essentiellement focalisées sur la question de la mise au point de composés de substitution de type me too (produit identique mais biosourcé). Pour les chercheurs, il s’agit d’un positionnement qui reflète une certaine frilosité de la part des industriels et qui ne permet pas de donner une chance réelle aux composés chimiques biosourcés. Dans ce contexte, la comparaison directe avec les produits chimiques pétrosourcés est régulièrement en faveur de ces derniers. L’exception majeure à cette prise de position des industriels dans le domaine de la recherche sur les matériaux est le fruit des travaux menés dans le cadre du Carnot Polynat qui a permis la mise au point des procédés de fabrication des microfibrilles de cellulose, un matériau qui cherche actuellement ses marchés.

DesoutilspourinitierundéveloppementindustrielDu fractionnement à la séparation, l’expertise grenobloise a conduit les acteurs à développer des connaissances très spécifiques et reconnues, des outils permettant le travail à l'échelle du pilote, ainsi que la simulation des procédés industriels. Ceci est notamment vrai pour ce qui constitue la base de recherches historique en lien avec l’industrie de la pâte à papier. Ainsi des installations permettent notamment d’extraire les molécules de différentes biomasses, afin de valider le concept de bioraffinerie associé à la fabrication de pâtes à papier, de raffiner et de produire des micro-nanofibrilles de cellulose. Les applications visées par les différents centres de recherche sont multiples et correspondent à une valorisation des différents constituants du bois, qui s’inscrivent ainsi au-delà des frontières de l’industrie papetière :

• au-delà des besoins pour le papier, la cellulose est utilisée comme fibre dans le domaine des textiles et des matériaux (microfibrilles de cellulose);

• La valorisation des unités de sucres qui constituent l’hémicellulose, sous différentes formes est étudiée : éthanol, tensioactifs/surfactants, furfural et dérivés ;

• les unités phénoliques que la lignine contient, permettent d'envisager des usages dévolus à la substitution des polymères phénoliques synthétiques. Les recherches portent notamment sur la production de composés phénoliques par liquéfaction de la lignine.

Au cours des dernières années, la recherche dédiée à la valorisation des produits lignocellulosiques a permis quelques développements notables, essentiellement à l’échelle du laboratoire, mais pas uniquement :

• l'incorporation des microfibrilles dans les élastomères ;

• l'incorporation des microfibrilles dans les peintures ;

• la transformation de la cellulose en matière thermoplastique ;

• la chromatogénie, qui permet la transformation des propriétés de surface des papiers d'emballage ;

• la préparation de composants prébiotiques destinés aux systèmes digestifs. Dans le cadre d’une démarche régionale destinée à la constitution d’une filière de déconstruction et de valorisation des ressources lignocellulosiques issues du bois, le tissu grenoblois constitue une force interne pour la région Auvergne Rhône Alpes ; la chimie du bois est intégrée à son ADN. Il a participé et participe encore à de nombreux

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projets soutenus par le pôle Axelera depuis 2005 : 1000Cazymes, Funlock, Cellical, Placelmat, Phenoliq, BIO3, Chemlival, Sucrol…

3.1.2 À Lyon, une chimie universitaire positionnée sur les procédés de transformation de la matière

Au sein de l'Institut de chimie de Lyon, les constituants couverts par les différents travaux de recherche sont la cellulose, l'hémicellulose et la lignine. Les laboratoires de recherche lyonnais sont essentiellement positionnés sur la transformation de la matière lignocellulosique. La recherche lyonnaise ne couvre ainsi pas ou peu les autres aspects de la chaîne des procédés permettant la déconstruction de la matière bois.

Une recherche universitaire fondamentale à la maturité technologiqueglobalementfaibleLes travaux lyonnais sont motivés par deux aspects principaux :

• la curiosité scientifique et l'effet d'entraînement de la communauté pour étudier des objets qui ont des fonctions particulières et dont l'observation et la caractérisation permettent de faire de la biomasse des sources de nouveaux building blocks ;

• la motivation contractuelle, qui se réfère aux partenariats avec les industriels notamment. Au sein des laboratoires lyonnais et plus particulièrement du laboratoire Ingénierie des Matériaux Polymères (IMP), l'intérêt pour les fibres de cellulose remonte aux années 1995. À cette période, le laboratoire est sollicité par l'industrie automobile et par les Ministères pour rechercher des voies de valorisation industrielle pour les fibres naturelles issues de l'agriculture. Cette recherche est à l'époque fortement soutenue et conduit certains industriels notamment du secteur de l'automobile (constructeurs et équipementiers) à mener des projets collaboratifs. L'effet moteur s'estompe au début des années 2000. Malgré des développements intéressants (sur les fibres de lin avec Renault et Plastic Omnium, notamment), la motivation industrielle n'était pas suffisante face aux fortes problématiques d'industrialisation. Aujourd'hui, il y a un réel retour d'intérêt. Il est porté par l'évolution des réglementations, qui offrent une pertinence écologique, environnementale et économique nouvelle aux produits biosourcés. Les applications visées sont ainsi l'allègement des matériaux et des structures ou encore la substitution complète ou partielle de molécules visées par la réglementation Reach. Des travaux du laboratoire ont été valorisés auprès des industriels de l'automobile présents en région. Il s'agit notamment des résultats issus du champ de recherche dédié aux matériaux renforcés par des fibres naturelles. Le niveau de maturité était relativement élevé avec un TRL de 5-6. Concernant la lignine, le positionnement des laboratoires et plus particulièrement le Laboratoire catalyse, synthèse et environnement implique essentiellement la réalisation de travaux de défrichage et de nature essentiellement fondamentale, pour déconstruire partiellement la lignine par des traitements catalytiques et biocatalytiques. L'expertise mise en œuvre est ainsi celle de la catalyse chimique (collaboration suivie avec l'Institut de recherche sur la catalyse et l'environnement de Lyon - Ircelyon) et l'objectif est de mettre au point des voies de traitements processables pour obtenir des oligomères valorisables, ainsi que des solvants organiques aromatiques biosourcés. Les travaux concernant la lignine ont débuté il y a 7 à 8 ans et présentent aujourd’hui un niveau de TRL inférieur à 3. La chimie des sucres est la spécialité du Laboratoire de chimie organique et bioorganique. Les différentes approches mises en œuvre par le laboratoire sont dépendantes :

• de la ressource utilisée : il s'agit de mettre au point des protocoles et des transformations performantes et efficaces pour produire de nouvelles molécules. Leurs applications potentielles ne sont pas prises en compte dans un premier temps ;

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• de la volonté d’obtenir une molécule cible particulière : il s'agit de travailler à la synthèse d'une molécule déjà connue et d'en reproduire une version à partir de constituants issus de la biomasse. Dans ce cadre, l'application est généralement connue et elle est souvent à la base du choix de la molécule cible ;

• des propriétés recherchées : il s'agit d'un travail de synthèse, qui cherchera à produire à partir de la matière biosourcée, une molécule disposant des propriétés recherchées et ciblant donc une application.

Actuellement ces différentes approches conduisent le laboratoire à s'intéresser au développement de tensio-actifs, d'émulsifiants, de monomères biosourcés et de molécules plateformes. Dans ce dernier cas, il s'agit notamment de la plateforme furanique : furfural, HMF et dérivés. Le HMF est obtenu à partir de fructose, mais également à partir de sucres plus complexes (hexoses issues de la cellulose et de l'hemicellulose) et permet de cibler notamment la synthèse d’acide furane dicarboxylique (FDCA), un diacide dont l'utilisation principale consiste à remplacer des diacides pétro-sourcés et ainsi à développer des plastiques biosourcés. Les travaux du Laboratoire de chimie organique et bioorganique ont permis de développer une expertise pointue concernant la chimie des sucres. Si elle n’a pas été valorisée d’un point de vue industrielle, elle a permis l’émergence de liens privilégiés avec des producteurs mais essentiellement des amidonniers (Téréos). Le laboratoire n’a pas de contacts particuliers avec des industriels valorisant les sucres issus du fractionnement de la matière lignocellulosique. Les développements technologiques réalisés se caractérisent essentiellement par une maturité technologique relativement faible par rapport à de possibles valorisations industrielles : TRL inférieur à 3.

Concernant la plateforme furanique, d’autres laboratoires lyonnais s’illustrent. C’est notamment le cas de l’Ircelyon dont les travaux ont permis le dépôt d’un brevet dans le cadre du projet Pentoval et dont voici la référence : H. Ait Rass, M. Besson, N. Essayem "Procédé de préparation d'acide 2,5-furane dicarboxylique" FR 1351138

Figure 4 : portefeuille brevets de l'Ircelyon (source : http://www.ircelyon.univ-lyon1.fr/)

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(PCT/EP2014/052622). Ce dernier fait partie d’un portefeuille de brevets en cours de développement concernant des molécules plateformes issues des matières lignocellulosiques. L’Ircelyon est actuellement le seul laboratoire a présenté de manière aussi évidente ses réalisations en termes de technologies et de chimie biosourcée basée sur les matières lignocellulosiques.

3.1.3 L’IFPEN acteur majeur des principaux démonstrateurs en France

Dans le domaine de la valorisation de la matière lignocellulosique, les applications visées par l'IFPEN sont multiples et se concentrent notamment sur les biocarburants de nouvelles générations et sur les substituants biosourcés des grands intermédiaires de la pétrochimie. L'IFPEN intervient sur la matière lignocellulosique comme elle le fait dans le domaine Oil & Gas, agissant ainsi sur la quasi-totalité de la chaîne des processus de déconstruction et de valorisation des bioressources. Les voies mises en œuvre par l'IFPEN sont dépendantes des applications visées :

• dans le domaine des biocarburants, le projet Futurol exploite la voie de l'hydrolyse et de la fermentation biochimique pour transformer de la matière lignocellulosique pré-traitée en bioéthanol de deuxième génération. Le projet BioTfuel utilise la voie thermochimique impliquant un prétraitement via une phase de torréfaction de la matière, suivi d'une gazéification de la matière et de la purification des gaz de synthèse qui seront finalement transformés en carburant (biodiesel et biokérosène) en recourant au procédé Fischer-Tropsch.

• dans le domaine des travaux dédiés aux grands intermédiaires chimiques, le projet Bio-TCat fait appel à un procédé de pyrolyse catalytique de matières lignocellulosiques prétraitées, suivi d'un hydrotraitement pour synthétiser du benzène, du toluène et des xylènes. Le projet BioButterfly vise la production de biobutadiène à partir de bioéthanol de deuxième génération par voie catalytique chimique.

Avec les projets Futurol et BioTfuel, l'IFPEN participe aux deux plus importants démonstrateurs présents en France et dédiés à la valorisation de la matière lignocellulosique. La valorisation industrielle de ces travaux (figure 6) est le cœur du travail et de l'action menés par l'IFPEN en relation directe avec Axens, sa filiale qui assure la fourniture de technologies et de catalyseurs des domaines du raffinage et de la pétrochimie, en particulier pour la production de carburants propres et de grands intermédiaires tels que le paraxylène. Dans le domaine des biocarburants (1ère génération), les procédés de transestérification développés par l'IFPEN sont notamment utilisés par le groupe Avril pour la production de diester. Jusqu’à présent, il n'y a pas eu de transferts vers des industriels régionaux. Une réalisation potentielle sur le territoire pourrait découler du projet BioButterfly, qui n'en est encore qu'au stade du pilote et dont le site du démonstrateur est encore recherché. Pour mener de tels projets en région, l’accès à du foncier à proximité immédiat d’un site industriel est un pré-requis. L’accueil de ce type d'outil industriel est facilité sur des sites industriels existants, afin de prendre en compte les réglementations en vigueur, de profiter du partage de certaines utilités et de développer un projet qui s’inscrit dans une démarche d’écologie industrielle et territoriale. La capacité de mobiliser des gros acteurs industriels est donc indispensable pour le passage des différentes phases de scale-up. Pour l’IFPEN, le manque de valorisation au niveau régional n’est pas une barrière ; la prospection est mondiale pour valoriser l’expertise et les technologies à travers Axens. Dans le domaine des procédés pour les bioénergies de deuxième génération notamment les capacités industrielles se développent et décollent en Europe et dans le monde. En 2015, les capacités industrielles construites ou en cours de construction représentent plus de 10 000 t par an.

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Figure 5 : projets de démonstrateurs impliquant l'IFPEN (source : brochure développement durable Axens)

3.2 Des freins communs à la valorisation industrielle des travaux de recherche

La maturation des travaux engagés par les acteurs de la recherche sur le territoire grenoblois et lyonnais est aujourd’hui dépendante de la relation entre les potentiels producteurs industriels de matières biosourcées et les utilisateurs. Même quand les structures de valorisation excellent dans leur capacité à réunir des industriels et à lancer des projets pilote ou de démonstration comme l’IFPEN, la valorisation industrielle des travaux tarde à se développer dans la région. Plutôt bien placé selon l’état de l’art international que chacun fait de l’avancée des thèmes de recherche qui les préoccupent, les chercheurs évoquent plusieurs freins pour expliquer cette situation. Ils soulignent ainsi :

• l’absence d’une communauté assez large et visible disposant d’objectifs communs concernant la valorisation des matériaux lignocellulosiques. Il s’agit de lutter contre le manque de connexion entre les différentes structures régionales engagées sur la thématique, en cherchant à identifier l’ensemble des compétences du territoire. Des liens sont notamment à créer avec l'Université de Clermont-Ferrand dans le domaine notamment de la biocatalyse ou avec le CEA à Grenoble qui met en œuvre un programme Biomasse au sein du Liten et dispose d’une plateforme expérimentale Génépi dotée d’outils de pré-traitement et de gazéification ;

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• le besoin de rapprocher les acteurs de l’amont et de l’aval. Il s’agirait aussi d’aller au-delà de l’industrie du bois et du papier, en se rapprochant notamment régionalement de la filière des composites pour qui l’utilisation des fibres de cellulose comme renfort ou la production de nouveaux monomères/oligomères biosourcés pourraient faire du sens ;

• le besoin de s’adjoindre des compétences industrielles pour la valorisation des travaux dédiés aux phases amont de la chaîne des procédés permettant la déconstruction et la valorisation des ressources lignocellulosiques. Il s’agit de limiter les effets négatifs de l’absence de producteur de pâte de cellulose vierge ou recyclée intégrant une bioraffinerie ;

• le besoin d’améliorer le niveau d’acceptation des industriels aval, notamment les chimistes et les plasturgistes. Ces derniers portent un certain intérêt sur les molécules issues de la matière agricole, mais sont dans la retenue par rapport aux travaux de valorisation des matières lignocellulosiques. Par exemple, certains ne croient pas à la mise en œuvre industrielle des travaux de valorisation de la lignine par déconstruction partielle ou isolement de molécules spécifiques, notamment en raison des coûts et la recherche de substituant est trop centrée sur les me too ;

• la nécessité de maintenir les efforts et l’intérêt pour la recherche sur la valorisation des matières lignocellulosiques pour ne plus risquer de perdre du temps, des connaissances et des savoir-faire en cours de développement, par manque de continuité ;

• le manque de relations et de projets communs entre les acteurs industriels de l'amont (industrie forestière, industrie du papier) et de l'aval de la future filière. Le développement des échanges entre l'amont et l'aval est un prérequis. Il ne s’agit pas uniquement de solliciter les grands groupes, mais de recourir à des collaborations avec des entreprises de tailles inférieures pour permettre le recours aux fonds de soutien nationaux et européens.

Au-delà de la question de l’efficacité des transferts de technologies à travers le maillage des réseaux et des liens entre les acteurs, la mise en œuvre industrielle des travaux de recherche concernant la valorisation de la matière lignocellulosique se heurte à un manque de visibilité d'un côté et un manque d'incitations de l'autre. Si l'État et la Région souhaitent voir se développer de telles activités industrielles, il est également nécessaire que :

• la France s'engage clairement avec des règles du jeu stables. Il ne s'agit pas comme avec la première génération de biocarburant d'introduire des évolutions de la réglementation en cours de route, qui stoppent les efforts des industriels, malgré des investissements importants. Les industriels ont besoin de se projeter pour investir, un horizon jusqu'à 2030 pourrait être idéal en ce qui concerne la valorisation de la matière lignocellulosique, et notamment le bois ;

• si l'horizon des possibles est plus clair, les grands industriels seront davantage en mesure de comparer la rentabilité de leurs investissements. Aujourd'hui, les investissements Oil&Gas restent les plus intéressants. Il faut donc trouver les leviers permettant d'inciter les grands industriels à investir dans la filière : pénalité si pas assez de constituants biosourcés, fiscalité appropriée en faveur des produits biosourcés …

• ensuite si l'État agit au niveau national et européen, la Région pourra également à son échelle apporter son concours en proposant des aides à l'investissement et en accompagnant notamment la structuration des acteurs de la biomasse sur son territoire pour leur permettre d'alimenter en matière les industriels à un coût raisonnable et avec une organisation industrielle. À l’échelle des travaux de recherche et des premiers pilotes, l’approvisionnement n’est pas problématique pour les acteurs régionaux. Il le sera davantage pour la mise en œuvre d’exploitations des procédés à des échelles industrielles.

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4 LE PAYSAGE INDUSTRIEL DE LA FILIERE

Afin d’analyser le paysage industriel de la filière, une enquête a été menée avec l’appui de la DIRECCTE et du pôle Axelera. Ouvert du 28/07/2017 au 15/09/2017, le questionnaire a été complètement rempli par 55 entreprises sur les 88 entreprises sélectionnées ; soit un taux de retour de plus de 62%.

4.1 Les acteurs et les relations régionales

4.1.1 Une forte implication industrielle régionale dans la transformation et la formulation

Sur la base des réponses obtenues, l’analyse du positionnement des différents acteurs le long de la chaîne des procédés permettant la déconstruction et la valorisation des ressources lignocellulosiques souligne une prédominance pour les métiers de la formulation (65,5% des répondants) et de la transformation (34,6% des répondants). Les procédés de déconstruction (fractionnement, extraction, séparation et purification) de la matière lignocellulosique sont moins représentés et couverts chacun par au maximum 10 entreprises (18,2% des répondants) (figure 10).

Figure 6 : Positionnement des entreprises sur la chaîne des procédés de déconstruction

et de valorisation des ressources lignocellulosiques

Ces données démontrent au sein des réseaux régionaux mobilisés une concentration des compétences industrielles sur l’aval de la chaîne des procédés, soit la valorisation des matières biosourcées. Globalement 56,4% des répondants n’interviennent qu’une fois les molécules valorisables purifiées, et 43,6% uniquement sur le dernier maillon via les procédés de formulation.

Fractionnement

Extraction

Séparation

Purification

Transformation

Formulation

Aucun

Positionnement sur la chaîne des procédés

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Une autre constatation vient amplifier le sentiment de l’existence d’une concentration des compétences industrielles régionales sur les maillons dédiés davantage à la valorisation des constituants biosourcés. Dans le cadre des projets de développement, les entreprises qui s’ouvrent à la collaboration industrielle (42,0% des répondants) sollicitent des partenaires disposant essentiellement de compétences dans les domaines de la transformation et de la formulation (figure 11).

Figure 7 : Positionnement sur la chaîne des procédés de déconstruction

et de valorisation des ressources lignocellulosiques des partenaires industriels

Finalement, très peu d’acteurs industriels régionaux interviennent de manière globalisée sur la chaîne des procédés de déconstruction et de valorisation des ressources lignocellulosiques, maîtrisant des procédés dédiés à la déconstruction et à la valorisation. Seules 6 entreprises se présentent ainsi :

• 2 peuvent se positionner sur l’ensemble des procédés ;

• 1 se positionne sur les procédés d’extraction, de séparation, de purification et de transformation ;

• 1 se positionne sur les procédés d’extraction, de séparation, de transformation et de formulation ;

• 1 se positionne sur les procédés de séparation, de purification et de formulation ;

• et une dernière se positionne sur le fractionnement, la transformation et la formulation.

4.1.2 Des habitudes collaboratives au service de la formalisation de la filière régionale

42,0% des répondants collaborent avec d’autres industriels régionaux et 54,5% des répondants collaborent avec des acteurs de la recherche régionale. Ces données soulignent des habitudes collaboratives plutôt intéressantes dans le cadre d’un futur travail de formalisation d’une filière en Auvergne Rhône Alpes. Dans le cadre des projets avec des industriels régionaux, les réponses suggèrent, comme indiqué précédemment, une focalisation des acteurs sur des compétences dans le domaine de la valorisation des produits biosourcés ; peu de collaborations amont-aval. Mais plus globalement, l’enquête met davantage en évidence la faible capacité des

Fractionnement

Extraction

Séparation

Purification

Transformation

Formulation

Autres

Positionnement sur la chaîne des procédés des partenaires industriels en région

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acteurs à juger la réalité régionale d’une filière à peine naissante ; 56,4% des entreprises indiquent ne pas être en mesure de donner un avis sur l’absence ou non de compétences industrielles en région. Pour les entreprises qui se prononcent sur cette question, 15 (27,3% des répondants) indiquent qu’il ne manque pas de compétences, et 9 (16,4%) pensent le contraire et ciblent majoritairement les compétences dans le domaine de la transformation des composés biosourcés. Encore une fois, les acteurs semblent regarder uniquement vers l’aval de la chaîne des procédés de déconstruction et de valorisation. La question des fournisseurs de matières premières et des producteurs de produits biosourcés régionaux semble alors plutôt délaissée : 2 entreprises soulignent néanmoins le manque de producteurs de matières biosourcées ou d’un site industriel disposant de suffisamment de ressources en biomasse. Au niveau de la recherche, 54,6% des entreprises indiquent avoir des relations avec des laboratoires, des centres de recherche et des centres technologiques régionaux. Les principaux acteurs de la recherche cités par les entreprises sont ceux mis en évidence dans le cadre de la première partie de l’étude. Ce qui suggère une certaine visibilité auprès des entreprises informées et à la recherche de compétences en recherche. Il s’agit ainsi :

• du CSTB, du CTP, de l’INP Pagora, du Cermav, du CEA à Grenoble ;

• de l’IFPEN, de l’Institut de Chimie de Lyon, de la Plateforme AxelOne à Lyon ;

• du Laboratoire d’ingénierie des matériaux polymères à St Etienne ;

• du Laboratoire microorganismes, génome et environnement à Clermont-Ferrand. Enfin, 43,6% des répondants collaborent ou ont collaboré à des projets de démonstrateurs technologiques ou industriels financés via le fonds unique interministériel (2BIMULCH, RESPIRE, OPTIMOUSSE2, BIOCATAROM, POLYWOOD, BIOPROOF), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (DIVA, IBIS, CARPAT, BIOTFUEL, BIOBUTTERFLY), BPIFrance (FUTUROL), les financements européens (VALORPLUS, NANOMEC2, GRACE, VALCHEM), le programme de recherche du CTP. Si une majorité des projets conduise à des réalisations en dehors de la région Auvergne Rhône Alpes, le niveau d’implication des industriels soulignent leur intérêt pour ce thème et accompagne l’acculturation du territoire. 74,6% des répondants sont ainsi favorables à l’idée de s’associer à des projets de démonstrateurs en région dans le futur.

4.2 La chimie du végétal d’origine lignocellulosique : un axe de développement pour une majorité d’entreprises

4.2.1 Un recours très limité à la matière lignocellulosique

Selon les données récoltées dans le cadre de l’enquête, actuellement 34 entreprises (62% des entreprises répondantes) utilisent des produits intermédiaires biosourcés et 13 entreprises (environ 24%) en produisent. En dehors de toute considération sur l’origine (filière amidon, filière sucre, filière des huiles végétales, filières lignocellulosiques), il s’avère que très peu d’entreprises (7%) disposent de fournisseurs installés en région pour se fournir en matière première et/ou en intermédiaire biosourcés. Les produits intermédiaires biosourcés utilisés par les entreprises répondantes sont dans l’ordre essentiellement des additifs fonctionnels, des résines et des polymères, des intermédiaires chimiques, des solvants ou des surfactants. Le bois n’est pas la matière première végétale principale de ces produits ; ainsi seulement 10 entreprises (29%) ont recours actuellement à au moins un produit biosourcé issue de la filière lignocellulosique bois. Dans ce cas, il s’agit essentiellement de fibres de cellulose, de pâtes à papier ou de papier.

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Figure 8 : Nature des produits intermédiaires biosourcés produits ou utilisés par les entreprises

Les produits intermédiaires biosourcés produits par les entreprises répondantes sont dans l’ordre des intermédiaires chimiques, des additifs fonctionnels, des molécules actives, des résines et des polymères et des surfactants. Ces derniers sont destinés principalement aux secteurs de la santé, du parfum/cosmétique et de l’agroalimentaire (figure 8).

Figure 9 : Secteurs d’applications des produits intermédiaires biosourcés produits par les entreprises

Additifs fonctionnels

Intermédiaires chimiques

Fibres de renforcement

Molécules actives

Résines et polymères

Solvants

Surfactants

Autres

Nature des produits intermédiaires biosourcés produits

Nature des produits intermédiaires biosourcés utilisés

Agroalimentaire

Bâtiment et BTP

Biocarburant 1ère génération

Biocarburant 2è génération

Électronique

Parfum/Cosmétique

Santé

Transports

Autres

Secteurs d'application des produits intermédiaires biosourcés produits

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Le bois est très rarement la matière première végétale de ces produits ; ainsi seulement 2 entreprises produisent au moins un produit biosourcé issu du bois. Parmi elles, une seule dispose actuellement d’une production commerciale dédiée notamment à des clients présents sur le territoire régional.

4.2.2 Une ambition affichée forte et volontaire

Dans le futur, la chimie du végétal (origine lignocellulosique) se présente comme un axe de développement pour la majorité des entreprises répondantes à l’enquête. Plus de 67% d’entre elles envisagent de développer ou de recourir à de tels produits. Parmi elles, une vingtaine d’entreprises ambitionnent d’être en mesure de créer un portefeuille de produits biosourcés à court terme, soit au cours des 3 prochaines années. Une dynamique qui apparaît très positive, voire très volontariste au regard des données présentées précédemment. Elle sera complétée par les efforts de huit autres entreprises, qui envisagent sur la même période d’élargir leur portefeuille de produits biosourcés. À moyen terme, soit dans 4 à 6 ans, 8 autres entreprises envisagent la possibilité de créer un portefeuille de produits biosourcés issu du bois. Elles contribuent à la dynamique qu’entretiennent les entreprises qui se sont lancés un peu plus tôt et qui maintiennent désormais leur portefeuille (16 entreprises) ou qui continuent de le développer (12 entreprises). À plus long terme, l’expression générale de l’ambition des acteurs régionaux reste positive et créative ; la grande majorité des entreprises envisagent en effet soit de créer un portefeuille de produits biosourcés (8 entreprises) soit de maintenir les efforts engagés et d’élargir le portefeuille (19 entreprises). Une ambition propice à la production de nouveaux produits biosourcés et qui semble mettre en évidence une demande sous-jacente, amenée à se développer au cours de la prochaine décennie. Pour les 18 entreprises, qui n’envisagent pas cette chimie comme un axe de développement, les raisons évoquées sont par exemple : « les molécules accessibles sont inadaptées » « l’origine des matières premières n’est pas un facteur déterminant » « la chimie issue du pétrole offre encore une palette extrêmement variée de produits chimiques à bas coût » « la filière lignocellulosique ne produit pas d’intermédiaires chimiques ayant les propriétés dont nous avons besoin ». La porte n’est néanmoins pas fermée chez toutes ; certaines soulignent en effet être dans une position de veille par rapport à des produits issus de la filière lignocellulosique et qui pourraient disposer des caractéristiques nécessaires à leurs activités.

4.2.3 Des freins multiples au développement de la chimie du végétal d’origine lignocellulosique dans les entreprises

Si les ambitions affichées sont positives, les entreprises restent confrontées à de nombreux freins, qui limitent le développement actuel de la chimie du végétal d’origine lignocellulosique. Que les entreprises considèrent ou pas la chimie du végétal d’origine lignocellulosique comme un axe de développement, les trois principaux freins sont dans l’ordre :

• la compétitivité d’autres voies de valorisations des matières premières végétales qui questionne la viabilité économique des produits issus de la filière lignocellulosique (citées par 58,2% des entreprises) ;

• le coût, l’acessabilité et la variabilité des matières premières (citées par 50,9% des entreprises) ;

• les marchés clients qui aujourd’hui ne sont pas réceptifs (citées par 45,5% des entreprises). La contribution de plusieurs entreprises répondantes illustrent très bien les enjeux liés à ces trois principaux freins : « Les composés lignocellulosiques sont la cible de nombreux projets. Il faut bien prendre en compte les filières existantes et en développement afin de limiter les risques de compétitions et des pertes d'investissements dans des projets qui bien que techniquement fonctionnels ne seront pas viables économiquement. Dès le début du projet, le prix de production doit être en lien avec les prix attendus du marché. Si les acteurs sont attirés par le biosourcé le prix

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pétrosourcé reste la norme, hormis dans certains marchés de niche. Ces marchés niches peuvent être d'excellentes cibles notamment pour la filière de la déconstruction de la biomasse avec la production de molécules inacessibles ou difficilement atteignables à partir du pétrole ». Il est ainsi nécessaire de trouver les « voies de constructions de filières viables », ce qui n’implique pas uniquement de réunir des compétences, car « la problématique industrielle ne se situe pas à [ce] niveau, [il s’agit de développer] la volonté d’investir industriellement ».

Figure 10 : les principaux freins au développement de la chimie du végétal (source lignocellulosique)

Malgré ses freins, la région bénéficie certainement d’une dynamique intéressante sur laquelle, il serait intéressant de construire. 52,7% des répondants affirment en effet avoir des projets de développement et ou de création d’activités avec des composés lignocellulosiques. Ces projets de développement se situent à des échelles de maturité encore relativement bas ; les besoins en investissement pour soutenir la réalisation de ces projets sont principalement de l’ordre de la recherche et développement (besoin de 72,4% des entreprises ayant un projet) et dans une moindre mesure de la transformation d’une unité de production (besoin de 41,4% des entreprises ayant un projet).

Compétitivité d'autres voies de valorisations, viabilité économique

Concurrence des pays étrangers

Coût, accessibilité, variabilité des matières premières

Coûts des outils industriels nécessaires

Difficultés techniques de mise en œuvre

Insuffisance de réseaux

Manque de structuration des filières de valorisation

Marché(s) clients non réceptif(s)

Méconnaissance des substitutions possibles

Autres

Freins au développement

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5 ANALYSE DES FORCES, DES FAIBLESSES, DES OPPORTUNITES ET DES MENACES

5.1 Matrice AFOM

L’ambition très volontaire des entreprises exprimée au cours l’enquête est vraiment intéressant. Elle met en évidence la présence d’un pool d’entreprises pour qui le développement de produits biosourcés représente un intérêt fort, malgré les obstacles et le fait qu’actuellement il s’agisse surtout :

• d’une filière régionale en phase de R&D, qui a conscience que si les recherches liées aux procédés industriels à développer se multiplient, les pilotes sont encore trop souvent à construire ;

• d’une filière qui doit se structurer pour permettre les échanges entre l’amont et l’aval sur le territoire régional et au-delà ;

Atouts Faiblesses

• Une recherche de qualité qui couvre l’ensemble de la chaine de valeur des procédés de déconstruction et de valorisation de la matière lignocellulosique

• Une forte implication industrielle dans les procédés de transformation et de formulation des matières chimiques et des matériaux

• La dynamique du pôle Axelera en termes de projets collaboratifs dans le domaine des molécules biosourcées

• Une filière en phase de R&D et qui a conscience que si les travaux de recherche se multiplient, les pilotes sont encore trop souvent à construire ;

• L’absence d’une communauté large, visible et unie dans le domaine de la déconstruction et de la valorisation de la matière lignocellulosique

• Des écosystèmes industriels (amont – aval) qui ne se rencontrent pas ;

• L’absence de grands industriels en amont prêts à se diversifier et à évoluer vers l’aval de la chaîne de valeur

Opportunités Menaces

• Une ambition affichée forte et volontaire de développer au cours des prochaines années l’utilisation ou la production de produits biosourcés

• La rencontre des domaines d’excellence régionaux grâce au développement du biosourcé

• Le développement général de la chimie du végétal

• La difficulté de mobiliser les acteurs industriels pour valoriser sur le territoire les travaux des acteurs régionaux, nationaux ou internationaux

• La non identification des voies de constructions de filières de valorisation de la matière lignocellulosique viables

• La non organisation industrielle de l’approvisionnement en matière lignocellulosique, notamment le bois.

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• une filière dont la compétitivité sera liée à sa capacité à trouver simultanément une valeur à chaque fraction de produits que les procédés mis en œuvre génèreront ;

• une filière qui s’intègre dans une compétition globalisée à l’échelle de l’Europe et du monde. Aujourd’hui le manque de structuration empêche d’exploiter l’importante expertise en R&D régionale non seulement dans le domaine des bioénergies, mais aussi des molécules et des matériaux biosourcés. Malgré de véritables forces, il semble que ces domaines n’arrivent pas à atteindre une visibilité suffisante et en tout cas apparaissent moins visibles que les autres domaines d’excellence régionaux : industrie du futur et production industrielle, bâtiments et travaux publics, numérique, santé, agriculture/agroalimentaire/forêt, énergie, mobilité/systèmes de transports intelligents, sport/montagne/tourisme). Alors qu’elle pourraient d’ailleurs être un vrai fil conducteur entre plusieurs domaines d’excellence régionaux, elle souffre régionalement de l’absence d’importants industriels de l’amont (Figure 11). Cette absence ne permet pas de mettre en valeur ce qui pourrait déjà se tenter dans le domaine de la déconstruction de la matière lignocellulosique, alors que des procédés de bioraffinage de la matière lignocellulosique se développent régionalement au sein de l’IFPEN, de l’INP Pagora, du CTP et également au sein de structures comme Metabolix exploirer et la start-up Afyren.

Figure 11 : sites industriels de production de pâte de cellulose (source FCBA)

La gestion de la question de l’approvisionnement en matière est nécessairement concomitante au développement des procédés industriels qui permettront de faire émerger une filière régionale. Pour la région, la gestion industrielle de la matière première à des fins de valorisation en biocarburant de deuxième génération ou en molécules et matériaux biosourcés est un chantier à mettre en œuvre rapidement. Aujourd’hui, deux visions existent et ne se rencontrent pas par manque de communication amont/aval :

• celle des représentants régionaux de la filière bois, pour qui il y a peu de doutes sur le fait que la ressource disponible et les compétences régionales seront en capacité d’étudier finement cette question (expertise du FCBA) et de fournir (entreprise de la filière bois régionale), le cas échéant, la matière première aux

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industriels déconstruisant la matière. Le bois présente l’avantage d’être une matière dont la fourniture n’est pas touché par une quelconque saisonnalité et dont la qualité des constituants (hors extractibles) n’est pas soumise à des variations ;

• celle des acteurs de l’aval de la filière, qui s’appuyant par réflexe sur les problématiques d’approvisionnement saisonnier et de variations de qualité des agro-ressources, soulève régulièrement des inquiétudes vis-à-vis de l’accès à la matière première. La centrale thermique de Gardanne alimente ces inquiétudes.

Pour un développement local, la logistique amont des matières lignocellulosiques à valoriser est stratégique. La rencontre des acteurs de la filière est donc primordiale. Plus en aval, le bioraffinage de la matière lignocellulosique ne s’est pas développé dans la région. Il n’y a actuellement pas de site industriel de bioraffinage et seul Michelin porterait le projet d’accompagner la création d’une bioraffinerie produisant du biobutadiène en Auvergne à partir de déchets forestiers. Le projet serait arrivé au terme d’une phase d’exploration de trois ans en collaboration avec l’IFPEN. Le chemin technologique serait identifié et 2020 pourrait être l’année d’une mise en œuvre. Il pourrait s’agir d’un premier test pour savoir si la région Auvergne Rhône Alpes est capable dans le futur de jouer un rôle moteur. Au-delà de l’IFPEN, d’autres établissements de recherche et entreprises peuvent contribuer au développement du bioraffinage dans la région (Afyren, Processium, Metabolic Explorer, le CTP, le Laboratoire de génie des procédés papetiers, l’Ircelyon). En aval grâce au pôle Axelera, l’industrie chimique régionale semble réellement à l’écoute des opportunités des filières de produits biosourcés. Pour autant, elle ne s’implique pas assez et semble limiter sa relation avec les acteurs de la filière bois, se focalisant sur les questions de valorisation de la matière biosourcée. Les chimistes régionaux mettent en place le même modèle, qui prévaut dans la production de matières biosourcées à partir d’agro-ressources. Dans ce cas, si ce sont les acteurs de l’amont qui doivent se diversifier en évoluant vers l’aval de la chaîne de valeur, il est important de pouvoir rapprocher davantage les acteurs présents aux deux extrémités de la chaîne des procédés. Comme il n’est pas inscrit dans la culture de la région de se recroqueviller sur elle, une action ouverte et collaborative doit l’amener à ne pas hésiter à chercher les compétences qui lui manqueraient ailleurs en France ou à l’étranger, tout en chercher à multiplier les réalisations en région. À l’image des écosystèmes qui se sont développés dans les Hauts de France, dans le Grand-Est autour de Reims, la région Auvergne Rhône Alpes est certainement capable de fédérer et de collaborer avec les autres acteurs du territoire national pour développer de manière cohérente une filière lignocellulosique inventive (limité les me too, les composés biosourcés identiques aux produits pétrosourcés) et visible.

5.2 Propositions d’actions

5.2.1 Développer une culture de la déconstruction et de la valorisation de la matière lignocellulosique

- Organiser le partage de connaissances et d’expériences résultant de la participation des acteurs à des

projets collaboratifs de différents niveaux (régionaux, nationaux, européens) - Développer une culture commune et forte - Engager un échange continu avec les acteurs de l’industrie amont ; représentants et entreprises intéressées

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La dynamique du pôle Axelera en termes de projets d’innovation est importante et une réelle force pour le territoire. Les projets ont permis la constituion de nombreuses pièces technologiques aujourd’hui pas encore assez matures, mais qu’il est important de conserver dans une mémoire collective. Cette mémoire collective se matérialise au sein du pôle Axelera par la création de groupements d’entreprises représentant une combinaison astucieuse des compétences nécessaires à la déconstruction et à la valorisation de la matière lignocellulosique. Des relations directes sont à créer de l’amont à l’aval et rapidement des réflexions équivalentes à celle ayant conduit à la création de la SAS Absra (approvisionnement en matière bois pour une valorisation énergétique sur la vallée de la chimie) sont à lancer.

Axelera, FIBOIS (fusion Fibra-Promobois), FCBA-CTP

5.2.2 Développer les partenariats entre les pôles régionaux

- Découvrir des enjeux communs régionaux pour lequel la valorisation matière du bois peut être une réponse - Afficher un engagement commun, rapprochant les acteurs structurants et leurs adhérents - De l’industrie chimique à la plasturgie, renforcer l’expression des besoins et des dynamiques en produits

biosourcés - De la biomasse à sa valorisation matière, renforcer la visibilité sur les compétences et savoir faire

transversaux existants en région

Axelera, Plastipolis, Elastopôle sont l’expression de la forte compétence de la région dans les secteurs aval à une potentielle filière de déconstruction et de valorisation de la matière lignocellulosique. Parallèlement, Céréales Valley- Terralia – Trimatec exploitent la biomasse pour la valorisation en énergie, mais également matières. Ensemble, il offre une meilleure visibilité sur l’ensemble des compétences et savoir faire de la région. La création d’une filière industrielle doit être le fil rouge pour permettre via leur consolidation de développer des partenariats et des actions nouvelles.

Axelera, Plastipolis, Elastopôle, Céréales Valley, Terralia, Trimatec

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5.2.3 Développer un partenariat avec IAR, Xylofutur et rejoindre le Bio Based Industries Consortium

- Positionner la région comme un territoire ouvert aux partages de compétences dans ce domaine - Développer davantage les synergies Bioraffinerie-Chimie-Matériaux et identifier les filières accessibles à la

matière bois - Rejoindre le consortium BBI et permettre à des entreprises régionales d’y adhérer.

En s’appuyant sur des adhérents communs ou des entreprises régionales membres d’IAR et de Xylofutur, les trois pôles développent un continium autour de la bio-industrie développant les synergies Bioraffinerie-Chimie-Matériaux en lien avec les matières lignocellulosiques (pas uniquement le bois). Ce continium permet d’affiner les choix stratégiques concernant les filières viables et d’aggréger plus finement autour les compétences régionales. La présence des représentants de la filière bois régionale Auvergne Rhône Alpes sera dans ce contexte, un signe de leur implication et de leur intérêt pour la bioéconomie.

Axelera, IAR, Xylofutur, FIBOIS

5.2.4 Rapprocher les outils technologiques de l’amont et de l’aval de la chaîne des procédés

- Développer la visibilité auprès des différentes populations d’entreprises des outils technologiques

disponibles - Rapprocher l’univers du bois, du papier et de la chimie et identifier ce qui peut les unir - Créer un événement commun permettant la réunion de cette large communauté

Dans le cadre du développement d’une filière qui sollicite des compétences de Clermont Ferrand à Grenoble en passant par Lyon, il est nécessaire que les outils technologiques d’ores et déjà disponibles soient visibles sur l’ensemble du territoire et dépasse certaines frontières territoriales. Ainsi le rapprochement s’effectue notamment en initiant les relations nécessaires à la thématique de la déconstruction et de la valorisation de la matière lignocellulosique en décloisonnant le projet Glyco@Alps, les instituts Carnot régionaux associés à la thématique, la plateforme Axel’one, la plateforme TekLiCell. Le décloisonnement permettra d’envisager la création d’un réseau unique dédié à la déconstruction et à la valorisation de la matière lignocellulosique et d’une stratégie commune en termes de recherche et de technologies. Le forum international organisé par l’Institut Carnot Polynat peut servir d’événement agrégateur, pour réunir les différents acteurs.

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La Région, Axelera en association avec les porteurs des différents projets structurants

5.2.5 Organiser la rencontre régulière de l’Amont et de l’aval

- Réduire les distances qui ne permet pas aux acteurs de se comprendre - Permettre d’identifier le rôle joué par chacun aujourd’hui et comprendre leurs évolutions - Forcer les rencontres dans des salons dédiés à l’un et à l’autre

En prenant en compte le résultat des travaux communs avec IAR et les relations avec le BBI consortium, organiser des conférences où se rencontrent les acteurs de l’amont et de l’aval. Imaginer et concevoir un événement de référence dans le domaine des bio-industries sur le territoire français dans le but de développer la visbilité des acteurs français et d’attirer les représentants des industriels français et étrangers très actifs (Metsä Group, Finnpulp Oy, Rayonnier, Borregaard…). L’organisation alternée du Plant Based Summit, événement annuel de référence en Europe, pourrait ainsi être envisagée. La région Auvergne Rhône Alpes pourrait ainsi rejoindre les Hauts-de-France au sein des régions leaders.

L’État, la Région, Axelera, IAR

5.2.6 Positionner la région comme un lieu d’accueil pour les démonstrateurs industriels

- Permettre la mise en œuvre de projets porte drapeau - Une intégration amont/aval élargie sur les plateformes chimiques avec la production installée de matières

biosourcées

En lien avec la stratégie du territoire pour accompagner les plateformes chimiques, prospecter et attirer les industriels et les consortiums développant des projets pilotes et cherchant dans le cadre d’une démarche de scale-up un terrain et un environnement industriel propice. Permettre la réalisation d’au moins un projet initié par des acteurs régionaux et réussir à attirer un autre projet d’ici 2020.

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L’État, la Région, la Métropole du Grand Lyon, les plateformes chimiques régionales

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6 ANNEXES

6.1 Panorama des produits, matériaux et procédés développés au sein des projets labellisés par Axelera

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6.2 Guide des entretiens et questionnaire

Le guide d’entretien et le questionnaire validé par la DIRECCTE sont associés à ce livrable sous la forme de deux fichiers pdf :

• GuideEntretien_VF.pdf

• Questionnaire_VF.pdf

6.3 Résultats de l’enquête

L’ensemble des données récoltées au cours de l’enquête sont associés à ce livrable sous la forme d’un fichier xls :

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Adresse postale : Cetim 52, Avenue Félix-Louat - CS 80067 - 60304 Senlis Cedex