4

« Il était temps pour moi - metalobs.com · d’essayer de nouvelles choses ... réussi, car l’Europe aime tout ce qui est heavy. J’ai bon espoir que cet al-bum ne déroge pas

Embed Size (px)

Citation preview

« Il était temps pour moi d’essayer de nouvelles choses »

Deux ans après un Aggressive qui montrait les dents, Beartooth passe le cap du troisième album avec une facilité déconcertante, malgré un thème principal pourtant pas des plus faciles…

[Entretien avec Caleb Shomo (chant) par Philippe Jawor]Votre précédent album, Aggressive, semble avoir marqué un tournant dans votre carrière. Qu’en penses-tu ?J’adore cet album. Cependant, avec le recul, j’y vois tout plein de petit dé-fauts. C’est probablement dû au fait que nous avons fait ce disque dans un laps de temps très court, après deux ans de tournée, et avant de repartir sur les routes… J’aurais voulu avoir plus de temps pour faire cet album, c’est pour ça que l’on a décidé de vraiment prendre notre temps pour Disease.

Il paraît que tu as quelque peu changé tes habitudes également, en quittant ton sous-sol habituel pour un autre studio ?J’ai travaillé dans plusieurs studios, en fait : j’ai écrit à Los Angeles, New York, Tokyo, puis Nashville, puis j’ai enre-gistré l’album à Nashville. Ça n’a pas forcément été facile de sauter le pas, mais il était temps pour moi d’essayer de nouvelles choses : je voulais avoir accès à plus d’instruments, plus de moyens techniques, et je pense que prendre le temps de régler des amplis, de tester différents micros, différentes batteries, ça n’a été que bénéfique pour l’album. J’ai le sentiment d’avoir bénéficié d’une certaine liberté avec cet album, et que le line-up actuel est capable d’absolument tout jouer de ce qui sort de ma tête.

À propos du line-up actuel, que peux-tu nous dire du départ de Taylor Lumley (guitare) et de son remplaçant, Zach Huston ?Taylor voulait s’essayer à d’autres choses ; je crois qu’il parlait d’écrire un livre, ou quelque chose comme ça. Son départ ne s’est pas fait dans la

douleur, ou avec un quelconque res-sentiment : nous avons accepté sa dé-cision, et nous le soutenons dans sa poursuite de nouveaux objectifs. Zach est un mec qui a toujours été actif sur la scène de Colombus ; on l’a croisé à de nombreuses reprises au cours des années, c’est un bon pote à nous et un très bon guitariste, alors quand la place s’est libérée, nous lui avons de-mandé de se joindre à nous le plus na-turellement du monde.

Une fois de plus, vos chansons sont inspirées par ta dépression ; on dirait qu’au lieu de te lancer dans une bataille contre cette maladie que personne ne semble gagner, tu as décidé d’en tirer de la force…C’est même un peu pourquoi j’ai écrit cet album, en fait : j’avais le senti-ment de réprimer énormément de choses depuis très longtemps, et faire un disque est la seule manière que je connaisse d’exorciser un peu tout ça. En commençant à travailler sur cet al-bum, je me suis dit que j’irais plus loin que je n’ai jamais été, que j’en ferai un disque à nouveau très personnel, très émouvant. J’ai compris que la dé-pression est une chose qui m’accom-pagnerait toute ma vie, et que c’est comme ça : j’ai juste des combats per-sonnels différents à mener par rapport aux autres personnes, mais ça ne fait pas de moi une personne faible pour autant.

L’une des chansons les plus étonnantes de cet album est certainement « Enemy », dans laquelle on entend des passages à la Pantera, d’autres à la Slayer… « Fire » est aussi complexe également ; comment expliques-tu

cette variété dans votre musique ?J’imagine que mes chansons sont in-fluencées par ce que je peux écouter le jour ou la semaine de leur création. « Enemy » est une espèce d’hommage appuyé à tous ces groupes qui ont pu nous bercer et nous inspirer, et c’est pour ça que j’ai choisi des sons de guitare et de batterie un peu plus vin-tage, bien ancré dans les 90’s. Chaque titre contient des références à ce que je peux écouter et aimer ; j’essaie d’y distiller tout ça.

Trois titres ont fuité sur Internet avant la sortie de l’album (« Infection », « Disease », et « Believe »), et pourtant ça ne vous a pas empêché de publier deux autres titres, que sont « Bad Listener » et « You Never Know ». Y a-t-il une espèce de stratégie derrière tout ça ?En fait, ces fuites ne m’ont pas vraiment dérangé : ça fait tellement longtemps que j’attends de les sortir que je me suis dit « il était temps que quelqu’un les entende ! » (rires) On avait prévu de sortir le clip de « Disease », on avait vraiment envie de sortir « Bad Liste-ner », alors on a décidé de s’en tenir à ça. Ça n’a pas eu l’air de déranger les gens ! (rires)

Peut-on s’attendre à vous revoir en France en 2019 ?Absolument ! L’Europe nous a toujours réussi, car l’Europe aime tout ce qui est heavy. J’ai bon espoir que cet al-bum ne déroge pas à la règle, d’autant que les premiers retours que nous en avons eu sur cette tournée (le groupe était de passage à Paris le 21 août der-nier, ndr) sont plutôt bons.

METAL OBS’ MAGAZINE – Hors-série spécial Beartooth

BEARTOOTHDisease

MetalcoreRed Bull Records

★★★★★

S’ouvrant sur une guitare acoustique quelque peu dissonante et un Caleb Shomo éraillé, « Greatness or Death » explose quelques secondes plus tard à peine, pour une ouverture convaincante de ce troisième album. Le titre éponyme, « Disease », premier single clippé, est un formidable exutoire à cette maladie qui ronge le frontman du groupe américain et nombre de personnes à travers le monde. À défaut d’y trouver une cure, Shomo livre ici une réflexion lucide sur la dépression, et une possible bouée de sauvetage pour bien des auditeurs dans la même situation, qui ne manqueront pas de reprendre les « oh oh oh » de son pré-refrain et le chorus, tout aussi efficace. « Fire », l’un des titres les plus hardcores de ce disque, est probablement l’une des meilleures chansons de Disease, à la fois très énergique et diablement désespérée. « You Never Know » se montre tout aussi énervé. On passera assez rapidement sur le single « Bad Listener » et « Afterall », très calibrés mais également réussis, pour s’attarder un peu plus sur la relative lourdeur de « Manipulation » et surtout le sublime hommage aux groupes qui nous auront bercés sur « Enemy », un titre extrêmement pêchu et aux références plus que plaisantes (le « Cowboys from Hell » de Pantera ou le « Raining Blood » de Slayer, pour ne citer qu’elles). « Believe » se montre ensuite plus convenu, limite pop-punk, avant qu’« Infection » ne remette un peu les pendules à l’heure, en préambule d’un « Used and Abused » habité, là aussi très réussi. Enfin, « Clever » ferme la marche d’une manière assez douce, comme un dernière caresse après une série d’uppercuts dans le bide. Fatal !

[Philippe Jawor]