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INTERNATIONAL JOURNÉES QUÉBÉCOISES DE LA SOLIDARITÉ CAHIER THÉMATIQUE H L E D E VO I R , L E S SA M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N OV E M B R E 2 01 5 La solidarité, un main à main qui se conjugue au féminin Page H 5 Vers l’égalité et l’ autonomie pour les femmes et les filles Page H 2 L’ŒUVRE LÉGER en solidarité avec les femmes du monde Marie Denise Pelletier Porte-parole de L’ŒUVRE LÉGER, Actions internationales leger.org ÉRIC ST-PIERRE Kalizeta lors d’un cours d’alphabétisation en dioula au centre d’étuvage de l’Union des groupements d’étuveuses de riz de Bama, au Burkina Faso Laisser les femmes prendre leur destinée en main HÉLÈNE ROULOT-GANZMANN D ix jours pour mettre de belles ini- tiatives en valeur. Dix jours de ren- contres, d’échanges d’expériences, de visionnements de docu- mentaires. Dix jours pour clamer haut et fort que lorsque les femmes prennent leur destinée en main, il en ressort souvent de très belles choses. «L’AQOCI a beaucoup appuyé la Marche mondiale des femmes, ce mouve- ment lancé en 2000 par le mouvement des femmes québécois, en faveur de l’émancipation des femmes partout sur la planète, explique la nouvelle prési- dente de l’association, Michèle Asselin. Tous les cinq ans, une grande action de mobilisation internationale est organisée, et celle de cette an- née s’est terminée le 17 octobre dernier. Quand nous avons voulu définir notre thématique à nous pour nos Journées québécoises de la solida- rité internationale [JQSI], il nous est apparu tout naturel de poursuivre avec la probléma- tique des femmes. » Femmes, précaires parmi les précaires Tout naturel parce que lorsque l’on parle de pauvreté dans le monde, on en arrive inévitable- ment à parler des femmes, les précaires parmi les précaires. Mais aussi parce que lorsque l’on souhaite ardemment sortir une communauté de la pauvreté, toutes les études démontrent que c’est en se reposant sur les femmes que les résultats sont les meilleurs. « La femme est la pauvre de l’homme, lance la chanteuse Bïa, porte-parole des JQSI cette année. Partout où il y a des inégalités sociales, on retrouve les femmes au bas de l’échelle. C’est donc vrai au Bré- sil, le pays dont je suis originaire. Mais ce qui est intéressant dans les politiques so- ciales menées par les gouvernements so- cialistes ces quinze dernières années, c’est qu’ils ont décidé de les faire gérer par les femmes. Ils ont donné les plans, versé l’argent aux femmes, aux mères. Car on sait qu’elles ont, en gé- néral, plus à cœur le bien-être de leur famille, de leur communauté. Notamment pour tout ce qui a trait à l’éducation. » Bïa a accepté d’être la porte-parole cette an- née parce qu’elle croit en la thématique, mais surtout en l’approche de l’AQOCI. Cette vo- lonté de laisser les femmes décider par elles- mêmes. De mettre en avant toute une mo- saïque de visages féminins à travers le monde qui ont su se démarquer, prendre des initiatives afin de proposer des conditions de vie meil- leures aux générations futures. C’est ce que sa mère, « femme réalisée professionnellement », lui a légué, ce en quoi elle croit profondément. Réaliste mais pas victime. « Nous vivons tous dans une société patriar- cale, commente Michèle Asselin. C’est systé- mique. Malgré tous les progrès que nous avons faits en Occident en général et au Québec en particulier, ce sont encore les hommes qui domi- nent en politique. Donc les hommes qui pren- nent les décisions majeures. C’est vrai à l’échelle du monde, c’est vrai dans nos communes, dans nos villages. » Des femmes omniprésentes Si les membres de l’AQOCI ont accueilli fa- vorablement cette thématique de la mobilisa- tion des femmes, c’est aussi parce que concrè- tement, sur le terrain, ils travaillent très sou- vent avec des groupes de femmes. Et qu’en adoptant la démarche participa- tive, qui consiste à soutenir les initia- tives locales et non à arriver avec une solution clé en main qui ne serait bien souvent pas adaptée au contexte, ils avouent avoir beaucoup appris de ces femmes de terrain. « Ce que nous leur apportons, c’est une aide à la fois financière et stratégique, une organisation plus efficace, explique M me Asselin. Les défis sont très grands, que ce soit dans le domaine de l’éducation, bien sûr, ou des violences, sexuelles ou autres, de la gouvernance, du travail, car bien sûr on ne re- connaît leur travail en tant que mère, mais en plus, lorsqu’elles ont une activité à l’extérieur du foyer, elles sont souvent dans l’économie infor- melle, d’où des revenus de misère et aucune pro- tection sociale. Elles sont également les premières victimes lors des conflits, dans les camps de réfu- giés, etc. Malgré tout, elles sont quelques-unes à avoir le courage et le leadership pour faire avan- cer les choses. Notre rôle est de les soutenir.» Et de les protéger également, ces actions n’étant pas toujours vues d’un bon œil. En Ré- publique démocratique du Congo (RDC) par exemple, les femmes qui veulent dénoncer les viols dont elles sont victimes doivent poursui- vre des militaires, et ça peut être dangereux. « Nous soutenons les groupes qui se lèvent pour défendre les droits de la personne, explique la di- rectrice de l’AQOCI. Nous les accompagnons, nous leur donnons de la visibilité, nous documen- tons leur action, nous partageons leurs expé- riences, nous faisons en sorte qu’ils existent afin qu’il soit plus difficile de s’en prendre à eux. » Lorsqu’elle observe tout le travail abattu par l’AQOCI, Bïa avoue se sentir un peu comme «le pot d’orchidée posé sur le coin de la table ». « C’est joli, c’est mélodieux, ça a son charme, résume-t-elle. Ça me fait plaisir de donner ma voix, d’avoir ce petit rôle qui consiste, je crois, à mettre ma noto- riété au service d’une cause en laquelle je crois. Mais le vrai travail, c’est eux qui le font. Les conférenciers qui seront là pendant les Journées, ils connaissent leur sujet. Les femmes de la mosaïque, elles sont formidables. Tous les gens qui travaillent dans les organismes de coopé- ration internationale dégagent tellement d’huma- nité. Je sais qu’il y a encore pas mal de chemin à parcourir. Mais quand je vois ça, je ne peux m’empêcher d’être optimiste. » Collaboratrice Le Devoir Deux semaines seulement après la clôture de la Marche mondiale des femmes, les organisa- teurs des 19 es Journées québécoises de la solidarité internationale, qui ont lieu du 5 au 14 no- vembre, prolongent l’aventure en prenant pour thématique « La mobilisation des femmes ». L’occasion de mettre en avant l’approche participative prônée par les membres de l’Associa- tion québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), qui, auprès de toutes les communautés avec lesquelles ils œuvrent à l’échelle de la planète, ne sont pas là pour dire quoi faire, mais pour appuyer les initiatives locales. Michèle Asselin Bïa

INTERNATIONAL...INTERNATIONAL H 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 7 ET DIMANCHE 8 NOVEMBRE 2015 Activités dans 12 régions du Québec Lettre au Premier ministre du Canada …

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INTERNATIONALJOURNÉES QUÉBÉCOISES DE LA SOLIDARITÉ

C A H I E R T H É M A T I Q U E H › L E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5

La solidarité,un main à main qui se conjugue au fémininPage H 5

Vers l’égalité et l’autonomiepour les femmeset les filles Page H 2

L’ŒUVRE LÉGER en solidarité avec les femmes du monde

Marie Denise PelletierPorte-parole de L’ŒUVRE LÉGER, Actions internationales

leger.org

ÉRIC ST-PIERRE

Kalizeta lors d’un cours d’alphabétisation en dioula au centre d’étuvage de l’Union des groupements d’étuveuses de riz de Bama, au Burkina Faso

Laisser les femmes prendre leur destinée en main

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

D ix jours pour mettre de belles ini-tiatives en valeur. Dix jours de ren-contres, d’échanges d’expériences,de visionnements de docu-mentaires. Dix jours pour

clamer haut et for t que lorsque lesfemmes prennent leur destinée enmain, il en ressor t souvent de trèsbelles choses.

« L’AQOCI a beaucoup appuyé laMarche mondiale des femmes, ce mouve-ment lancé en 2000 par le mouvementdes femmes québécois, en faveur del’émancipation des femmes partout surla planète, explique la nouvelle prési-dente de l’association, Michèle Asselin. Tousles cinq ans, une grande action de mobilisationinternationale est organisée, et celle de cette an-née s’est terminée le 17 octobre dernier. Quandnous avons voulu définir notre thématique ànous pour nos Journées québécoises de la solida-rité internationale [JQSI], il nous est apparutout naturel de poursuivre avec la probléma-tique des femmes. »

Femmes, précaires parmi les précairesTout naturel parce que lorsque l’on parle de

pauvreté dans le monde, on en arrive inévitable-ment à parler des femmes, les précaires parmiles précaires. Mais aussi parce que lorsque l’onsouhaite ardemment sortir une communautéde la pauvreté, toutes les études démontrent

que c’est en se reposant sur les femmesque les résultats sont les meilleurs.

« La femme est la pauvre de l’homme,lance la chanteuse Bïa, porte-parole desJQSI cette année. Partout où il y a desinégalités sociales, on retrouve les femmesau bas de l’échelle. C’est donc vrai au Bré-sil, le pays dont je suis originaire. Mais cequi est intéressant dans les politiques so-ciales menées par les gouvernements so-cialistes ces quinze dernières années, c’estqu’ils ont décidé de les faire gérer par les

femmes. Ils ont donné les plans, versé l’argent auxfemmes, aux mères. Car on sait qu’elles ont, en gé-néral, plus à cœur le bien-être de leur famille, deleur communauté. Notamment pour tout ce qui atrait à l’éducation.»

Bïa a accepté d’être la porte-parole cette an-née parce qu’elle croit en la thématique, maissurtout en l’approche de l’AQOCI. Cette vo-lonté de laisser les femmes décider par elles-mêmes. De mettre en avant toute une mo-saïque de visages féminins à travers le mondequi ont su se démarquer, prendre des initiatives

afin de proposer des conditions de vie meil-leures aux générations futures. C’est ce que samère, « femme réalisée professionnellement», luia légué, ce en quoi elle croit profondément.Réaliste mais pas victime.

« Nous vivons tous dans une société patriar-cale, commente Michèle Asselin. C’est systé-mique. Malgré tous les progrès que nous avonsfaits en Occident en général et au Québec enparticulier, ce sont encore les hommes qui domi-nent en politique. Donc les hommes qui pren-nent les décisions majeures. C’est vrai à l’échelledu monde, c’est vrai dans nos communes, dansnos villages. »

Des femmes omniprésentesSi les membres de l’AQOCI ont accueilli fa-

vorablement cette thématique de la mobilisa-tion des femmes, c’est aussi parce que concrè-tement, sur le terrain, ils travaillent très sou-vent avec des groupes de femmes. Etqu’en adoptant la démarche participa-tive, qui consiste à soutenir les initia-tives locales et non à arriver avec unesolution clé en main qui ne serait biensouvent pas adaptée au contexte, ilsavouent avoir beaucoup appris de cesfemmes de terrain.

«Ce que nous leur apportons, c’est uneaide à la fois financière et stratégique,une organisation plus ef ficace, expliqueMme Asselin. Les défis sont très grands,que ce soit dans le domaine de l’éducation, biensûr, ou des violences, sexuelles ou autres, de lagouvernance, du travail, car bien sûr on ne re-connaît leur travail en tant que mère, mais enplus, lorsqu’elles ont une activité à l’extérieur dufoyer, elles sont souvent dans l’économie infor-melle, d’où des revenus de misère et aucune pro-

tection sociale. Elles sont également les premièresvictimes lors des conflits, dans les camps de réfu-giés, etc. Malgré tout, elles sont quelques-unes àavoir le courage et le leadership pour faire avan-cer les choses. Notre rôle est de les soutenir. »

Et de les protéger également, ces actionsn’étant pas toujours vues d’un bon œil. En Ré-publique démocratique du Congo (RDC) parexemple, les femmes qui veulent dénoncer lesviols dont elles sont victimes doivent poursui-vre des militaires, et ça peut être dangereux.

«Nous soutenons les groupes qui se lèvent pourdéfendre les droits de la personne, explique la di-rectrice de l’AQOCI. Nous les accompagnons,nous leur donnons de la visibilité, nous documen-tons leur action, nous par tageons leurs expé-riences, nous faisons en sorte qu’ils existent afinqu’il soit plus difficile de s’en prendre à eux. »

Lorsqu’elle observe tout le travail abattu parl’AQOCI, Bïa avoue se sentir un peu comme «le

pot d’orchidée posé sur le coin de la table».« C’est joli, c’est mélodieux, ça a son

charme, résume-t-elle. Ça me fait plaisirde donner ma voix, d’avoir ce petit rôlequi consiste, je crois, à mettre ma noto-riété au service d’une cause en laquelleje crois. Mais le vrai travail, c’est euxqui le font. Les conférenciers qui serontlà pendant les Journées, ils connaissentleur sujet. Les femmes de la mosaïque,elles sont formidables. Tous les gens quitravaillent dans les organismes de coopé-

ration internationale dégagent tellement d’huma-nité. Je sais qu’il y a encore pas mal de chemin àparcourir. Mais quand je vois ça, je ne peuxm’empêcher d’être optimiste. »

CollaboratriceLe Devoir

Deux semaines seulement après la clôture de la Marche mondiale des femmes, les organisa-teurs des 19es Journées québécoises de la solidarité internationale, qui ont lieu du 5 au 14 no-vembre, prolongent l’aventure en prenant pour thématique « La mobilisation des femmes ».L’occasion de mettre en avant l’approche participative prônée par les membres de l’Associa-tion québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), qui, auprès de toutesles communautés avec lesquelles ils œuvrent à l’échelle de la planète, ne sont pas là pour direquoi faire, mais pour appuyer les initiatives locales.

MichèleAsselin

Bïa

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INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5H 2

Activités dans 12 régions du QuébecLettre au Premier ministre du Canada

Dix jours pour appuyerl’action locale des femmes

afin d’atteindre l’égalitépartout dans le monde!

#jqsi

#qsf

Pour plus d’information sur les programmes de solidarité internationale financés par le ministère, visitez le site Internet www.mrif.gouv.qc.ca

LE QUÉBEC ENGAGÉ À L’ÉGARD DES FEMMES EN SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Je suis heureuse de m’associer à la 19e édition des Journées québécoises de la solidarité internationale (JQSI), sous un thème qui me tient à cœur : l’appui aux groupes locaux de femmes. Cette année, les JQSI nous feront découvrir les liens de solidarité qui unissent les femmes du Nord et du Sud et les initiatives des organismes québécois de coopération internationale pour les appuyer.

Les JQSI offrent des activités riches et variées partout au Québec afin de favoriser l’engagement du public envers un monde d’égalité et de justice. Nous sommes fiers de soutenir l’AQOCI et ses membres dans l’organisation de cet événement. Je tiens d’ailleurs à les féliciter pour leur apport à la construction d’un monde meilleur. Je vous invite à participer en grand no mbre!

Christine St-PierreMinistre des Relations internationales

et de la Francophonie

Cette année, les Journées québécoises de lasolidarité internationale se veulent « un épi-logue complémentaire » à la Marche mon-diale des femmes, qui s’est déroulée le17 octobre dernier. Après l’élection d’unnouveau gouvernement à Ottawa en octobreet l’adoption des Objectifs de développementdurable (ODD) par les pays membres del’ONU en septembre, l’égalité des sexes re-çoit-elle l’attention qu’elle mérite dans l’aideau développement ?

É T I E N N E P L A M O N D O N É M O N D

L e discours du gouvernement canadien ausujet de l’égalité des sexes dans l’aide au

développement s’est transformé sous la hou-lette des conservateurs. « Sous l’ancienne mi-nistre Bev Oda, ironiquement une femme, la no-tion de genre a été marginalisée et largementabandonnée. Les fonctionnaires avaient été infor-més de ne pas inclure ce concept dans leurs mé-mos au ministre », souligne Stephen Baranyi,professeur à l’Université d’Ottawa, qui codirigeactuellement un livre, à paraître l’année pro-chaine, sur les actions du Canada en la matière.«La dynamique a continué et s’est même dégra-dée avec Julian Fantino, avant de se modérer du-rant la dernière année avec Christian Paradis. »

L’organisation Match International, qui tra-vaille en soutien aux groupes de femmes àl’étranger, a notamment vu son financement fé-déral se réduire de façon draconienne en 2010.

Avec l’Initiative de Muskoka, annoncée en2010, le gouvernement Harper a fait de la santédes mères, des nouveau-nés et des enfants soncheval de bataille en matière d’aide internatio-nale, mais il a évacué de sa proposition l’avorte-ment et la planification des naissances. Desgroupes féministes ont rapidement soulevé lacontradiction. Selon les chiffres de l’Organisa-tion mondiale de la santé (OMS), 47 000femmes meurent chaque année de complica-tions liées à des avortements réalisés dans desconditions non sécuritaires, ce qui représente13% des décès maternels. Le Comité québécoisfemmes et développement (CQFD) de l’Asso-ciation québécoise des organismes de coopéra-tion internationale (AQOCI) a réalisé une dé-marche de plaidoyer auprès de Christian Para-dis, ancien ministre du Développement interna-tional, et Kellie Leitch, ancienne ministre de laCondition féminine, pour inclure les droits re-productifs dans le programme de santé mater-nelle et des nouveau-nés. « Ç’a toujours été re-fusé, affirme Anne Delorme, coordonnatrice duCQFD. Mais on a un peu d’espoir avec le nou-veau gouvernement. »

En réponse aux questions envoyées par leConseil canadien de la coopération internatio-nale (CCI) à tous les partis politiques durant ladernière campagne électorale, le Parti libéral,désormais au pouvoir, a indiqué que « la politi-sation de l’initiative vedette sur la santé mater-nelle du gouvernement Harper va à l’encontredes faits et de l’intérêt supérieur des femmes dansles pays en développement ». Il a ajouté qu’unefois au pouvoir, il s’assurerait que cette initia-tive « s’appuie sur des faits et des résultats, et nonsur une idéologie. La réduction des écarts en ma-

tière de droits génésiques [reproductifs] et desoins de santé peut sauver des vies, et c’est cequ’elle accomplira ». De plus, il a indiqué que,dans la foulée de cette initiative, un gouverne-ment libéral offrirait « une gamme complète deservices de santé génésique [reproductive]».

M. Baranyi considère tout de même que legouvernement Trudeau n’aura « pas à recom-mencer de zéro ». Dans la conception du livresur lequel il travaille, les plus récents travauxde Liam Swiss, professeur à l’Université Memo-rial de Terre-Neuve, démontreraient que lessommes allouées par le gouvernement fédéralà l’aide au développement liée à l’égalité dessexes n’auraient pas diminué durant le passagedes conservateurs à la tête du pays. «Pourquoi,malgré les tendances de certains ministres de cegouvernement conservateur, y a-t-il eu certainsacquis qui ont été maintenus ou élargis ? On enrevient essentiellement à l’activisme réalisé, touten gardant profil bas, par cer tains fonction-naires », suppose M. Baranyi. En Haïti, pays quia été l’objet de plusieurs de ses recherches, il aremarqué qu’un certain dynamisme a été main-tenu autour de cette question dans la coopéra-tion canadienne, ce « qui crée des possibilitéspour le nouveau gouvernement libéral ».

À l’échelle planétaire, l’ONU a dressé, dans sondernier rapport sur les Objectifs du millénairepour le développement (OMD), un bilan en demi-teinte au sujet de l’égalité entre les sexes et l’auto-nomisation des femmes. Parmi les aspects posi-tifs, la scolarisation des filles a fait un bond consi-dérable entre 2000 et 2015: près des deux tiersdes pays en développement ont atteint la paritédes sexes dans l’éducation primaire. Des avan-cées importantes en matière de représentationdes femmes en politique ont aussi été constatéesdans presque toutes les régions du monde.

En revanche, l’ONU a reconnu que « l’inéga-lité entre les sexes persiste ». Elle précise dansson rapport que « les femmes continuent [de seheurter] à des discriminations dans l’accès autravail, les biens économiques et la participationaux prises de décisions privées et publiques ». Lebilan note aussi qu’elles sont «plus susceptiblesque les hommes de vivre dans la pauvreté».

Selon les statistiques onusiennes, seulementla moitié des femmes en âge de travailler oc-cupe un emploi contre les trois quar ts deshommes. De plus, celles-ci gagnent enmoyenne un salaire 24 % moins élevé. L’ONU

note aussi un taux de chômage plus importantchez les femmes parmi les personnes qui ontreçu une éducation supérieure.

« Il y a une très grosse concentration [desfonds qui ont été destinés à] l’enseignement,surtout au primaire et un peu au secondaire,constate Anne Delorme. Donc c’était une défini-tion très restreinte de l’égalité entre les femmes etles hommes. »

Depuis septembre dernier, les Objectifs du dé-veloppement durable (ODD) prennent le relaisdes OMD en tant que guides pour les actions àmener en matière de coopération internationale.L’objectif numéro cinq consiste à parvenir, d’ici2030, à l’« égalité des sexes et à autonomiser lesfemmes et les filles». Cet ajout du mot « filles» ré-jouit d’ailleurs Mme Delorme. Les projets d’auto-nomisation des femmes, souvent basés sur leurimplication dans des activités génératrices de re-venus, engendraient parfois un effet pervers :«Les jeunes filles se retiraient de l’école pour s’oc-cuper des enfants, explique-t-elle. Avec le temps,

on a réalisé l’importance de penser non seulementaux femmes, mais aussi aux filles.»

Mme Delorme se montre particulièrement en-thousiaste à propos de l’une des cibles desODD, qui vise à « faire une place aux soins etaux travaux domestiques non rémunérés et lesvaloriser par l’apport de services publics, d’infra-structures et de politiques de protection sociale»,un enjeu pour la première fois soulevé dans cetype de texte. Elle note que bien qu’on nenomme pas les hommes, il s’avère intéressantque cette même cible invite aussi à faire la«promotion du partage des responsabilités dansle ménage et la famille ». L’idée de travailleravec et sur les hommes autour de la questionde l’égalité des sexes nourrit d’ailleurs actuelle-ment les réflexions d’organismes de coopéra-tion internationale d’ici participant aux chan-tiers du CQFD.

CollaborateurLe Devoir

ONU

Vers l’égalité et l’autonomiepour les femmes et les filles

Le programme Québec sansfrontières (QSF) célèbre ses20 ans de voyages qui for-ment la jeunesse. Depuis1995, ce projet assure la re-lève dans l’aide au développe-ment avec ses stages d’initia-tion à la coopération interna-tionale. Près de 7000 sta-giaires québécois, âgés de 18à 35 ans, ont voyagé dans unpays en voie de développe-

ment grâce à ce programmecopiloté par l’Association qué-bécoise des organismes decoopération internationale(AQOCI) et le ministère desRelations internationales(MRI) du Québec. Environ350 jeunes s’envolent encorechaque année en direction del’un des 34 pays partenairesde l’Afrique, de l’Amérique la-tine ou des Antilles, où ils sé-

journent durant deux ou troismois pour mener à bien unprojet avec une ONG locale.Trente-deux organismes decoopération internationale duQuébec proposent des stagesQSF. Un volet Réciprocitépermet aussi à des jeunes desorganismes partenaires despays du Sud d’effectuer unstage de deux ou trois moisau Québec.

QSF souffle ses 20 bougies

GIANLUIGI GUERCIA AGENCE FRANCE-PRESSE

Selon les statistiques onusiennes, seulement la moitié des femmes en âge de travailler occupe unemploi contre les trois quarts des hommes. De plus, celles-ci gagnent en moyenne un salaire 24%moins élevé. L’ONU note aussi un taux de chômage plus important chez les femmes parmi lespersonnes qui ont reçu une éducation supérieure.

La politisation de l’initiative vedette sur la santé maternelle du gouvernement Harper vaà l’encontre des faits et de l’intérêt supérieur des femmes dans les pays en développementDéclaration du Parti libéral

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INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5 H 3

A N D R É L A V O I E

Depuis sa fondation en 1958,le Centre d’étude et de coo-

pération internationale (CECI)n’a pas dérogé à sa mission pre-mière, celle de combattre lapauvreté et l’exclusion dans lesendroits les moins favorisés dela planète. Actif dans 19 pays, saprésence fait souvent la diffé-rence, comme pour ces étu-veuses de riz du Burkina Faso,permettant à des femmes nonseulement de travailler et defaire vivre leur famille, maisaussi de développer leur sensdes affaires, ou tout simplementd’apprendre à lire et à calculer.

Le riz constitue un des ali-ments de base des 16 millionsde Burkinabés, la consomma-tion annuelle totalisantplus de 300 000 tonnes.Selon le CECI, elle de-vrait atteindre 466 000tonnes d’ici 2018, maispour l’instant, ce paysde l’Afrique de l’Ouestne produit que 30% dece qu’il consomme, undéséquilibre qu’il estpossible de corriger enpartie. Les étuveuses deriz s’y activent aux qua-tre coins du Burkina Faso,même dans ces régions ruralesbalayées par l’harmattan, cevent chaud, sec et poussiéreuxen provenance du Sahara et duSahel. Le défi quotidien de cesfemmes, avec la complicité deleur conjoint cultivateur, est detransformer le riz, d’augmentersa qualité et de le commerciali-ser, le tout dans une perspectivedurable. Pour un pays situé au181e rang sur 187 selon l’indicede développement humain 2014du Programme des Nationsunies pour le développement,l’objectif apparaît très audacieux.

Pauline Marois,ambassadrice du CECI

Ce constat ne décourage enrien l’ex-première ministre du

Québec, Pauline Marois, fièreparticipante du Club des am-bassadrices du CECI, un re-groupement d’une vingtaine deQuébécoises d’exception prê-tant leur notoriété (et leursbons contacts !) pour soutenirfinancièrement certains pro-jets d’entrepreneuriat féminin.Le PAERIZ (projet d’appui auxétuveuses de riz) était tout dé-signé, et il n’a pas été difficilede convaincre l’ancienne chefdu Parti québécois d’apportersa notoriété et sa vaste expé-rience politique pour les ci-toyennes d’une région dumonde qu’elle a visitée à plu-sieurs reprises à titre de minis-tre de l’Éducation et de vice-première ministre.

Pour celle qui se réjouitd’avoir repris en mainsa vie personnelle et fa-miliale, acceptant lesdemandes d’entrevueavec parcimonie (« J’enreçois une à deux parsemaine, mais je neveux pas être sur laplace publique de façonsystématique. »), soute-nir le PAERIZ relèvede l’évidence. « Ce quim’a plu, dans ce projet,

c’est d’abord le fait que ce sontdes femmes qui s’approprientdes outils leur permettant de de-venir autonomes ; dans le bonvieux jargon du travail commu-nautaire, on appelle ça de l’em-powerment », déclare cette di-plômée en ser vice social del’Université Laval. Pour celledont les actions politiques ontsouvent accompagné l’émanci-pation des femmes québé-coises, par exemple avec lacréation des centres de la pe-tite enfance, le travail des étu-veuses leur permet « de fairevivre leur famille, de grandirau sein d’une entreprise et decréer de la richesse dans leurcommunauté, si petite soit-elle».

L’atteinte de ces objectifs, éta-blis en accord avec les organi-

sations locales de développe-ment, passe bien sûr par l’injec-tion de ressources financières.C’est en bonne partie le rôledes ambassadrices du CECI desolliciter des fonds, et cesfemmes provenant du milieu ar-tistique (Anne-Marie Cadieux,Véronick Raymond), des com-munications (Madeleine Pou-lin) ou des affaires (ChristianeBeaulieu, Eliane Gamache La-tourelle) s’y activent, chacunechargée de recueillir environ3000$ par année, pour un objec-tif de 75 000 $. « Nous sommesrendus à 69 000 $ et l’annéen’est pas terminée », déclareavec confiance Pauline Marois.

Le PAERIZ fonctionne avecdes sommes plus importantes,bénéficiant du soutien du mi-nistère des Affaires étrangères,du Commerce et du Dévelop-pement du Canada (MAECD),totalisant 5 740 000 $ pour lescinq années d’un projet qui en

est à sa deuxième phase. Cemontant est loin de couvrirtous les frais pour appuyer les5000 étuveuses vivant dans lesplaines de Bama, de Sourou oude Founzan, et le MAECD ré-clame qu’un pourcentage ducoût total du projet soit re-cueilli auprès d’autres sourcescanadiennes : citoyens, fonda-tions, entreprises privées, etc.

« Ça complexifie un peu lachose, admet France-IsabelleLanglois, directrice des com-munications du CECI et autremembre du Club des ambassa-drices. C’est dans ce cadre quenous avons pensé à fonder ceclub l’an dernier. Nous sommestoujours en recrutement pourde nouvelles ambassadrices,mais aussi pour trouver d’au-tres activités de visibilité et decueillette de fonds. » Toutes cesinitiatives sont essentiellesdans un contexte où le CECI« est en compétition non seule-

ment avec toutes les autres or-ganisations non gouvernemen-tales, mais avec tout le mondequi collecte des fonds », sou-ligne Mme Langlois.

Désengagement du Canada

Pauline Marois a endossé cerôle avec enthousiasme, maisse désole tout de même devoir « la baisse constante del’aide internationale du gouver-nement canadien ». Dans ledernier budget fédéral, elleétait située à 0,24 % du revenuintérieur brut alors que la ci-ble proposée par les Nationsunies est de 0,7 %. Certains ci-toyens semblent approuver cedésengagement, af firmantqu’il faut d’abord aider les pau-vres d’ici.

Ce discours populiste, Pau-line Marois le connaît, et s’endésole. « Oui, nous avons despauvres chez nous, souligne-t-

elle, mais nous avons mis enplace des outils, des services etdes politiques qui permettentl’existence d’un véritable filetsocial. Ce n’est pas suf fisant,vous le savez aussi bien quemoi, mais on a toutes sor tesd’aides aux itinérants, auxanalphabètes, aux mères en dif-ficulté, aux femmes victimes deviolence. Quand on regarde larichesse dont on dispose, ça si-gnifie un véritable devoir de so-lidarité envers les plus démunisd’entre tous. Nombre de ci-toyens du monde ont eu la mal-chance de naître dans un payspauvre. J’ai été profondémentbouleversée par la photo du pe-tit Aylan, cet enfant syrienmort sur une plage de Turquie,mais je crois que l’émotion doitaussi servir à agir. À ne pasrester les bras croisés. »

CollaborateurLe Devoir

CECI

Solidaires et sans frontières

ÉRIC ST-PIERRE

Asita Sana étuve du riz au centre d’étuvage de l’Union des groupements d’étuveuses de riz de Bama, au Burkina Faso.

PaulineMarois

C L A U D E L A F L E U R

E n 1994, des coopérants québécois se sontunis afin de faire les choses différemment.

« Souvent, on intervient dans un pays pour ré-gler un problème — porter secours ou mettre enplace une structure —, mais nous, nous vou-lions intervenir d’une façon dif férente, raconteMichel Lambert, l’un des cofondateurs d’Al-ternatives et maintenant directeur général del’organisme. Nous voulions travailler avec les

gens de la place afin de lesaider à résoudre leurs pro-blèmes. Nous avions d’ail-leurs remarqué que, sou-vent, ils n’ont besoin qued’un peu d’aide, d’un peude formation ou d’un peud’argent… »

C’est ainsi qu’au fil desans Alternatives a donnéun coup de pouce à nom-bre de groupes de ci -toyens et de militants enAfrique et au Moyen-

Orient. L’organisme s’attaque à des pro-blèmes concrets tout en cherchant à faire pro-gresser les droits de la personne.

Veuves et femmes en politiqueL’un des « exemples les plus percutants » rela-

tés par Michel Lambert est l’initiative mise enplace par Alternatives pour les femmes deve-nues veuves à la suite de l’invasion américainede l’Irak, dans les années 2000.

« On a aidé les groupes irakiens de toutesorigines ethniques, linguistiques et religieusesà travailler ensemble pour monter une cam-pagne nationale afin que les veuves irakiennespuissent bénéficier d’une pension de la part del’État, explique M. Lambert. Ç’a été super in-

téressant puisque, dans d’autres circonstances,ces gens-là ne collaborent jamais. Et là, ils sesont unis pour résoudre un problème qu’ilsavaient tous en commun. »

Cette campagne a fait en sor te que lesveuves de guerre aient désormais droit à unepension, indique-t-il. «On est vraiment très fiers,non seulement du résultat obtenu, mais aussi dufait qu’on est parvenus à faire travailler ensem-ble des gens qui, autrement, ne collaborent pasentre eux. »

De même, en Tunisie, à la suite du Prin-temps arabe, Alternatives est inter venu deconcert avec les groupes de femmes afin d’en-courager les formations politiques à inclurecelles-ci dans leurs rangs. « Nous cherchionsnon seulement à ce que les par tis politiquescomptent parmi leurs candidats une proportionégale de femmes, mais également à ce quecelles-ci aient un réel poids politique », préciseMichel Lambert. Il ne s’agissait donc pas uni-quement d’obtenir 50 % de candidates fémi-nines, mais elles devaient aussi jouer des rôlessignificatifs au sein des formations politiques.

Le directeur général d’Alternatives rapporteque cette campagne a, dans un premier temps,encouragé nombre de femmes à s’impliquer enpolitique, mais surtout, relate-t-il, lorsque la Tu-nisie s’est récemment dotée d’une constitution,« il y avait beaucoup de femmes dans l’Assemblée,ce qui a donné lieu à une constitution passable-ment progressiste ».

« Je pense que nous avons fait par tie dubouillonnement qu’il y a eu en Tunisie à ce mo-ment-là, dit-il avec satisfaction, et profité de larévolution pour faire avancer les droits desfemmes — et non l’inverse, comme certains ontcherché à le faire…»

CollaborateurLe Devoir

ALTERNATIVES

Aider, mais de façon différente

Et voici que, depuis deuxans, Alternatives apprendaux militants au Moyen-Orient et en Afrique à se ser-vir d’Internet tout en se pro-tégeant contre la surveil-lance un peu trop étroiteexercée par les autorités.Il s’agit du projet Digital Secu-rity Schools (DSS), un centrede formation informatiqueinstallé à Tunis.« L’idée d’une DSS est que,dans un contexte où Internetest de plus en plus utilisé poursurveiller les blogueurs, lesmilitants, les activistes, etc.,on pense qu’il est important

de former nos partenairespour qu’ils comprennent quelssont les enjeux et les risques,et de leur apprendre à utiliserInternet de façon à se proté-ger », explique M. Lambert.C’est ainsi, ajoute-t-il, qu’il ya un certain nombre de no-tions à savoir et quelquestrucs simples à appliquer…La DSS de Tunis est donc uncentre de formation qui a pi-gnon sur rue. «Souvent, nousfaisons venir des formateursd’un pays afin que, par lasuite, ceux-ci puissent eux-mêmes former les militantsdans leur pays», dit-il.

Étonnamment, Michel Lam-bert préconise même l’ouver-ture d’une Digital SecuritySchool ici à Montréal ! «On avu sous l’ancien gouvernement[celui de Stephen Harper] lasurveillance spécifique desgroupes écologiques et autoch-tones ainsi que de certains mi-litants en particulier, rappelle-t-il. Et compte tenu du projetde loi C-51, qu’ont appuyé leslibéraux de Justin Trudeau, onestime qu’il faudrait se proté-ger des services que le gouver-nement met en place et quin’ont de compte à rendre àpersonne. »

Internet en toute sécurité

FETHI BELAID AGENCE FRANCE-PRESSE

Des députés tunisiens lors d’une séance parlementaire en juillet 2015«Je pense quenous avons faitpartie dubouillonnementqu’il y a eu en Tunisie à cemoment-là»

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INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5H 4

Dans de nombreux pays, les femmes n’ont pasaccès au crédit, beaucoup sont marginaliséeset vivent en situation de grande pauvreté.C’est le cas au Niger, où Développement, Ex-pertise et Solidarité Internationale (DESI) aun projet. En Inde également, où les veuvessont littéralement chassées des villages,comme l’a constaté l’Aide internationale pourl’enfance (AIPE). Le travail de ces organismesdans ces pays en est un de longue haleine.

M A R T I N E L E T A R T E

U ne Indienne a reçu du microcrédit de Re-source Educational Society, un organisme

de la région de l’Andhra Pradesh, partenairede l’AIPE, afin de s’acheter une chèvre. No-made, elle se promène de champ en champpour la faire brouter. Toutefois, étant veuve,elle est considérée comme impure, alors lesgens du village s’opposaient à ce que sa chè-vre se nourrisse dans leurs champs et boivel’eau du puits. Elle devait marcher 10 km pourfaire brouter et boire sa chèvre, ce qui n’étaitpas sans risque. Tout un travail de négociationa été fait. Deux travailleurs sociaux, unhomme et une femme, accompagnés de deuxprofesseurs, sont allés rencontrer le chef duvillage. L’opération a été couronnée de succès,mais cette histoire illustre bien les défis ren-contrés sur le terrain afin d’aider les femmes àse sortir de la misère.

« Le microcrédit est impor tant, mais ungrand travail d’éducation doit être fait aussi au-près de ces femmes qui connaissent très peuleurs droits et des autres personnes dans le vil-lage pour éviter de mettre ces femmes en dan-ger », soutient Roxana Robin, fondatrice et di-rectrice de l’AIPE.

On doit convaincre le chef que ces femmespeuvent apporter quelque chose à la commu-

nauté comme entrepreneuses. Les mentalitéschangent, mais l’AIPE est active dans ce villagede pêcheurs depuis de nombreuses années.

« Il n’y a pas si longtemps, les femmes étaientbrûlées vives sur le bûcher de leur mari ; ce n’estplus le cas, mais elles restent extrêmement vulné-rables de par la culture, constate Mme Robin, quis’est rendue en Inde plusieurs fois. Ces veuvesont zéro ressource et puisqu’elles ont souvent com-mencé à travailler vers sept ou huit ans dans lesmines ou les carrières de pierre, elles se retrouventà une trentaine d’années avec de grands pro-blèmes de santé. Elles s’endettent à des taux d’inté-rêt de 25 à 35% auprès de prêteurs usuriers afind’avoir accès à des soins et à des médicaments.»

Briser le cycle de l’extrême pauvretéEn plus des veuves, le programme aide aussi

des mères célibataires, des femmes abandon-nées par leur mari et d’autres femmes très pau-vres. L’objectif est de briser le cycle de l’ex-trême pauvreté en permettant à ces femmesd’avoir accès à un revenu afin qu’elles puissentenvoyer leurs enfants à l’école.

Grâce à l’AIPE et à son par tenaire, cesfemmes ont accès à 200 $, sans intérêts, pourdémarrer de petites entreprises. Plusieurs vontcultiver le chili, le faire sécher et le revendre ensachets. D’autres cuisinent de petites collationset les vendent chez elles, un peu sur le principed’un dépanneur.

Elles ont seulement le capital à rembour-ser après avoir discuté des modalités avec latravailleuse sociale du projet. Malgré l’accèsau microcrédit, les défis de ces femmes de-meurent grands.

« Il y a toujours beaucoup d’imprévus, commedes intempéries qui détruisent les récoltes ou desproblèmes de santé, alors leur quotidien demeureprécaire, mais elles arrivent à dépasser le stadede la survie», constate Mme Robin.

Microentreprises au NigerAu Niger, DESI travaille avec son partenaire

local, Promotion de l’entrepreneuriat jeunesse etdu leadership féminin (PEJELF). Les femmespauvres ont accès à du microcrédit et on leurdonne également six mois de cours d’alphabéti-sation, de même que des formations en gestion,en leadership et sur les droits des femmes.

Depuis 2013, 80 femmes ont bénéficié de ceprogramme. Quatre microentreprises ont étécréées et les femmes peuvent s’y joindre. ÀNiamey, on retrouve un salon de coiffure et unatelier de couture, puis à Gothèye, un site ma-raîcher et une banque céréalière.

Ces entreprises sont gérées par ces femmeset permettent un plus grand pouvoir d’action.

« Par exemple, pour l’atelier de couture, on afourni le local et les machines, mais chaquefemme utilise son prêt pour acheter du tissu et dufil et elles décident comment vendre leurs pro-duits, explique Noémie Legendre, directrice deDESI. Elles mettent aussi une part de leurs reve-nus en commun pour continuer d’avoir un sa-laire en cas de problème, comme lorsqu’unefemme doit cesser de travailler pour une certainepériode de temps. Cela leur donne un filet social. »

Environ le quart des femmes décident plutôtde lancer leur propre entreprise, comme de pe-tits kiosques de nourriture.

Les femmes ont la responsabilité d’établir lesméthodes de remboursement des prêts et letaux de remboursement est de 100%.

« Grâce à ces projets, les femmes acquièrentune indépendance, elles peuvent contribuer àpourvoir aux besoins de leur famille et elles aug-mentent grandement leur confiance en elles », re-

marque Noémie Legendre, qui s’est rendue auNiger en janvier.

Assurer la pérennitéAlors que les résultats sont au rendez-vous, il

faut maintenant relever le défi de pérenniserces initiatives.

DESI peut compter pour le moment sur le fi-nancement du ministère des Relations interna-tionales et de la Francophonie et souhaite que leprojet soit reconduit, mais l’organisme travailleégalement pour trouver du financement local.

« L’organisme PEJELF est encore jeune etun appui local permettrait de le solidifier et deréaliser encore plus d’activités », indique Noé-mie Legendre.

L’AIPE, qui a déjà aidé 200 femmes avecson projet, souhaite pour sa par t assurer lemaintien des services en travail social de sonpartenaire.

«C’est difficile de trouver du financement pourpayer le salaire de notre travailleuse socialeparce que les bailleurs de fonds souhaitent plutôtdonner de l’argent pour le microcrédit, affirmeMme Robin. Pourtant, notre travailleuse sociale,une femme de la communauté, fait un travaild’éducation et d’encadrement essentiel. Elle tra-vaille avec nous depuis 2003 et elle a vraimentréussi à créer un lien de confiance avec les gensdu village. Nous souhaitons même en embaucherune deuxième. Les besoins sont là. »

CollaboratriceLe Devoir

DESI ET AIPE

Permettre à des Indiennes et à des Nigériennes d’avoir un revenu

AIPE

Ambati Polamma a fait partie du premier groupe de femmes aidées par l’AIPE dans le village del’Andhra Pradesh, en Inde. Depuis l’ouverture de son commerce, elle peut envoyer ses enfants àl’école et a remboursé ses dettes au prêteur usurier local.

M A R T I N E L E T A R T E

La chanteuse Marie DenisePelletier est allée en Bolivie

il y a six ans et elle y est retour-née cet automne pour l’orga-nisme de bienfaisance L’ŒuvreLéger, dont elle est porte-paroledepuis plus de 20 ans. Dans cepays le plus pauvre de l’Amé-rique du Sud, où plus d’un habi-tant sur huit vit avec moins de1 , 2 5 $ U S p a r j o u r, e l l e aconstaté de grands progrès,pour les femmes notamment.Elle a poursuivi cette année sonpériple jusqu’au Pérou, où elle avu des avancées marquantes,particulièrement du côté desproductrices laitières. Récit.

«Cultiver des terres pour pro-duire le fourrage à 4000 mètresd’altitude, c’est assez sportif ! »s’exclame Marie Denise Pelle-tier, qui célèbre cet automneses 30 ans de carrière.

Au Pérou, le partenaire deL’Œuvre Léger Cindes s’ef-force d’améliorer les conditionsde travail des producteurs lai-tiers, et Marie Denise Pelletiery a été marquée par un groupede 125 femmes qui ont chacuneleur petite ferme laitière et quitravaillent ensemble.

« Elles réussissent très bien,parfois mieux que les hommeset cela cause même des ten-sions, raconte-t-elle. Elles ontrempor té plusieurs concourspour mettre la main sur del’équipement ultramoderne.Elles diversifient leurs pro-duits, notamment en fabri-quant du fromage. J’ai rencon-tré des femmes très fières deleurs accomplissements, desfemmes inspirantes. »

En Bolivie, le par tenaireAmultiagros travaille aussiavec les producteurs laitiers,notamment pour construire

des puits afin d’irriguer lesterres et pour améliorer la gé-nétique des vaches afinqu’elles produisent de trois àquatre fois plus de lait.

« J’ai vu les efforts en 2006 etles résultats sont maintenantau rendez-vous », se réjouit laporte-parole.

Dépasser le stade de survie

Dans la zone périphériquenord de la ville de La Paz, à4000 mètres d’altitude, on re-trouve une for te migrationd’Autochtones. Ils proviennentdu milieu rural et les femmessont particulièrement vulnéra-bles puisqu’elles ont de la diffi-culté à accéder à un emploi, àobtenir de la formation tech-nique et, donc, à nourrir leurfamille. Le par tenaire deL’Œuvre Léger FundaciónCentro de Cultura Popular(FCCP) travaille avec elles de-puis plus de 35 ans.

« Il y a six ans, j’ai vu chezFCCP des femmes souvent à larue, ostracisées, d’une extrême

pauvreté, souvent avec des en-fants, raconte Marie DenisePelletier. On leur donnait desnotions de comptabilité et unaccès à du microcrédit. »

Aujourd’hui, la situation aévolué. « Socialement, il y aeu de grandes avancées en Bo-

livie en matière d’égalitéhommes/femmes, notammentgrâce au travail du présidentEvo Morales, lui-même au-tochtone, et les programmes deFCCP se sont diversifiés », ex-plique Marie Denise Pelletier.

Par exemple, FCCP fait main-

tenant de la conscientisationpour améliorer l’alimentationdes Boliviens, traditionnelle-ment basée sur des pommes deterre, du manioc et du quinoa.

« C’est ce qui pousse dans lepays, mais maintenant, beau-coup de légumes ver ts arri-vent de l’Amazonie, et les inté-grer à leur alimentation per-mettrait de diminuer l’obésitétrès présente chez les Boli-viens », explique Marie De-nise Pellet ier qui , enfant,voyait ses parents d’originemodeste mettre leurs sousdans la petite boîte de donsde L’Œuvre Léger pour aiderles plus mal pris qu’eux.

D’anciennes bénéficiairesde FCCP sont aujourd’hui de-venues intervenantes et aidentà leur tour d’autres femmes.

« Énormément de femmess o n t p a s s é e s p a r F C C P,constate Marie Denise Pelle-tier. C’est beau de voir ce chan-gement de génération. »

CollaboratriceLe Devoir

L’ŒUVRE LÉGER EN BOLIVIE ET AU PÉROU

Des femmes maintenant autonomes, pleines de projets

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JACQUES PELLETIER L’ŒUVRE LÉGER

Marie Denise Pelletier en compagnie du directeur général deL’Œuvre Léger, Norman MacIsaac, et de productrices laitières auPérou, aidées par Cindes

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INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5 H 5

N A T H A L I E D E R A S P E

A u chapitre des économies parallèles, phé-nomène foisonnant dans les pays en voie

de développement, les femmes brillent de dé-termination, et pour cause. Aucune tâche nesera suffisamment ingrate pour indigner unemère cherchant à nourrir sa famille. Ici et là depar le monde, la Confédération des syndicatsnationaux (CSN) a décidé d’alléger leur far-deau en soutenant plusieurs de leurs projets.

On connaît la CSN pour son engagement en-vers la défense des travailleurs québécois. Cequ’on sait moins, c’est que depuis bientôt 30 ansl’organisme appuie les initiatives de différentesorganisations paysannes locales établies dans lespays pauvres. L’objectif à terme ? Décupler lemouvement syndical à l’international pour établirun rapport de force dans un contexte de mondiali-sation planétaire. Au cœur de cet imposant chan-tier, l’égalité des sexes demeure une priorité.

En réplique à la mondialisation, la mobilisa-tion. «Notre sort est interrelié à celui des autrestravailleurs de la planète, explique NathalieGuay, responsable des relations internatio-nales, adjointe au comité exécutif de la CSN etmembre de l’exécutif du Centre internationalde solidarité ouvrière (CISO). Les accords com-merciaux internationaux signés par les patronatsvisent souvent l’uniformisation des réglementa-tions dans le but d’établir un terrain de jeu pla-nétaire qui leur soit favorable, mais cela affecteles conditions de travail de l’ensemble des sala-riés dans le monde. Quels sont les intérêts quiprévalent? La crise, les banquiers, le 1% des plusriches versus l’austérité, les gens commencent àvoir clair dans les actions de la classe domi-nante. Il faut soulever ces contradictions et éta-blir une solidarité de base avec nos camaradesd’autres pays. Actuellement, nous sommes àarmes inégales. Et les travailleurs d’ici sont vul-nérables aux délocalisations de la production desentreprises de chez nous. »

La CSN œuvre par l’intermédiaire de l’Alliancesyndicats et tiers-monde (ASTM), fonds de coo-pération internationale mis sur pied en 1986. «Àl’époque, des famines sévissaient un peu partout.La sécurité et la souveraineté alimentaire de plu-sieurs étaient menacées», illustre Mme Guay. Au fildes décennies, l’ASTM a tissé des liens avec dif-férents mouvements syndicaux ailleurs dans lemonde en vue de renforcer des projets amorcéspar des communautés locales aux prises avecdes problèmes économiques et structurels endé-miques. Au programme, coopération au dévelop-pement, renforcement des capacités des organi-

sations syndicales, engagement en vue d’assurerla souveraineté alimentaire et la défense desdroits des travailleurs. «C’est un travail de cou-reur de fond pour bâtir la confiance, mais le poten-tiel stratégique est extrêmement intéressant, in-dique Nathalie Guay. Et on s’est rendu comptequ’en améliorant les conditions de vie des femmes,on améliorait le sort de toute la famille et qu’enœuvrant pour le droit des femmes, on favorisaitl’amélioration des droits de la personne.»

Des projets porteursEn Afrique, le sort de 80 ouvrières d’une tan-

nerie ar tisanale s’est grandement améliorégrâce à une solide collaboration entre l’ASTM,la Confédération française démocratique du tra-vail (CFDT) et l’Union nationale des syndicatsautonomes du Sénégal (UNSAS), qui chapeautele projet. Au départ, aucune infrastructure surplace. «Les femmes travaillaient en gougounes enplein soleil, dans des conditions ergonomiques dé-plorables, illustre la responsable des relations in-ternationales de la CSN. Il n’y avait même pasde collecte d’ordures. » Voilà la triste réalité dutravail informel au pays. Ce secteur occupejusqu’à 80% de l’économie sénégalaise.

En plus d’accompagner le syndical local,l’ASTM a dégagé un budget pour soutenir le tra-vail des ouvrières tout en of frant du soutientechnique et divers outils pour renforcer le tra-vail amorcé il y a trois ans. Du microcrédit estégalement mis en avant afin d’assurer l’autono-mie financière des femmes à l’origine de cetteinitiative. «On n’envoie pas de chèques, préciseNathalie Guay. On accompagne les syndicats dansleur travail. Ce sont eux les maîtres du projet.»

Des espoirs pour l’avenirEngagé dans une vingtaine de pays, l’orga-

nisme poursuit patiemment son œuvre même siles ressources ne sont pas toujours au rendez-vous. Depuis 2011, le financement de la part dufédéral a fondu comme neige au soleil, si bienque les projets d’envergure lancés de concertavec l’Agence canadienne de développement in-ternational (ACDI) se sont raréfiés, relateMme Guay. La responsable des relations interna-tionales de la CSN souhaite que l’arrivée d’unnouveau gouvernement à Ottawa permette derecréer un dialogue favorable en matière de so-lidarité internationale. «Ici, on a une capacité dese soulever. Ailleurs dans le monde, des gens sontprêts à mourir pour obtenir le droit de grève.»

CollaboratriceLe Devoir

La solidarité, un main à main qui se conjugue au féminin

PHOTOS SOURCE NATHALIE GUAY

« Je retourne voir le projet de tannerie ce mois-ci. On me dit que les femmes ont pris beaucoupd’assurance, qu’elles ont une autre perception de leur travail », confie Nathalie Guay.

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INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5H 6

La vie d’une coopérante en Ré-publique démocratique duCongo quand le quotidien estfait de kalachnikovs et de filsbarbelés, mais pas seulement…

M A R I E - H É L È N E A L A R I E

Pour Magali Videau, êtrecoopérante volontaire signi-

fie tout simplement accepter departager son temps et son expé-rience professionnelle avec lapopulation des pays du Sud.Cette économiste de formationspécialisée dans les questionsde développement économiqueau niveau des relations Nord-Sud rêvait de partir en mission.C’est avec Oxfam qu’elle s’estrendue en République démocra-tique du Congo (RDC), en s’im-pliquant dans le projet d’unemaison d’hébergement pourfemmes victimes d’agressionssexuelles. Mais la RDC n’étaitpas la première expérience decoopération de Magali.

« Au départ, je suis allée auSalvador dans un contexte post-conflit et dans un pays au haut

taux de criminalité. » Commepremier essai, c’est assez mar-quant, mais c’est son expé-rience en tant qu’intervenantepsychosociale à Montréal pourle Centre pour les victimesd’agression sexuelle qui a pro-pulsé Magali en RDC.

Triste bilanToutefois, la situation des

Congolaises peut difficilementêtre comparée avec ce quiexiste ailleurs dans le monde.Si leur bilan est parmi lespires, c’est en raison de l’insé-curité et de l’augmentation desviolences sexuelles basées surle genre. En 2012, 15 654 inci-dents ont été rapportés, contre10 322 l’année précédente ;98 % des victimes sont desfemmes âgées de moins de21 ans. La RDC est en outre unpays dévasté par les guerresinternes et régionales qui sé-vissent depuis près de 20 ans.La sécurité de la populationreste volatile, surtout dans l’estdu pays, où des groupes arméssont toujours actifs. On estimeà plus de 2,6 millions le nom-bre de personnes déplacées à

l’intérieur du pays en raison duconflit. Et c’est à Beni juste-ment, dans cette région est dupays, que Magali travaillaitdans une maison d’héberge-ment auprès de femmes vic-times d’agressions sexuelles.

« Heureusement et malheu-reusement, je n’habitais pasavec les femmes au centre d’hé-b e r g e m e n t . E n t a n t q u eBlanche, je devais m’astreindreà des procédures sécuritaires as-sez strictes et dans la ville, à18 heures, il y avait un couvre-feu total.» En fait, Magali habi-tait dans une autre ville et,quelques fois par mois, c’est enavion qu’elle se rendait au cen-tre d’hébergement. «Je passaisbeaucoup de temps avec cesfemmes et une par tie de monmandat était de faire du plai-doyer pour améliorer leur qua-lité de vie et surtout pour aug-menter le niveau de sécurité dela maison. » Pendant sa mis-sion, Magali a vu l’installationd’un mur d’enceinte, de pan-neaux d’énergie solaire et d’unaccès à l’eau : «Avant, pour al-ler chercher de l’eau, il fallaitqu’elles sortent, qu’elles passent

devant le camp militaire où ellesétaient exposées de nouveau àdes violences puisque la majo-rité avait été agressée par desmilitaires.» Effectivement, il setrouve que la plupar t de cesfemmes avaient été enlevéespar un groupe de miliciens ap-pelé ADF, qui est très actif dansla zone et qui enlève des popu-lations pour faire travailler leshommes dans les forêts et lescar r ièr es , tandis que lesfemmes sont transformées enesclaves sexuelles. Les femmesqui ont réussi à s’échapper ontété recueillies au centre. «Cesfemmes arrivaient ici très trau-matisées. C’était souvent desjeunes femmes dont les familles,les maris avaient été assassinés.Elles se retrouvaient seules avecde jeunes enfants. Comme ellesavaient passé du temps avec lesmiliciens, on les accusait d’avoirété les copines de ceux-ci et ellesétaient étiquetées.» Le travail deMagali consistait à prendre encharge ces femmes et à leur of-frir un soutien psychologique.«J’avais mis en place des atelierspour tenter de leur offrir des mo-ments où elles pouvaient pren-

dre soin d’elles-mêmes et pourutiliser ces moments-là afin deparler de ce qui s’était passé. »Magali continue avec l’exempledu miroir : « Elles ne se recon-naissaient même plus dans unmiroir. On faisait leurs cheveux,leurs ongles. C’est une expé-rience qui permettait de créerdes liens assez rapidement.»

Magali Videau a été forcéede quitter la maison en janvierdernier au moment où les com-bats se faisaient de plus en plusviolents et où la zone devenaitbeaucoup trop dangereusepour des étrangers. Dans ceprojet, Oxfam appuie une ONGlocale, ce qui fait qu’il a pucontinuer à exister. Actuelle-ment, il n’y a plus de coopé-rants du Nord dans la zone. «Ily avait encore tellement à faire.Mais je suis quand mêmecontente parce que j’ai assistéaux changements et j’ai vu desaméliorations.» Et malgré tout,notre coopérante affirme quele Congo reste un endroit oùelle aimerait retourner.

CollaboratriceLe Devoir

CONGO

Entre militaires et miliciens

Fruit de l’association de mou-vements sociaux et fémi-nistes, la collectiva femenistamilite à la base pour le déve-loppement local économiqueavec une perspective fémi-niste. Au fil des ans, le travails’est intensifié et s’est orientédans plusieurs directions, etInter Pares contribue plusparticulièrement au volet pré-vention de la violence faiteaux femmes.

M A R I E - H É L È N E A L A R I E

I nter Pares, qui s ignif ie« entre égaux », est un or-

ganisme qui, depuis 40 ans,travai l le en col laborat ionavec plus d ’une centained’organisations qu’il soutientfinancièrement. L’organisme,présent en Asie, en Afriqueet en Amérique latine, s’ap-plique à créer des échangeset ses actions sont axées surla souveraineté alimentaire,l’égalité des femmes, la paixet la démocratie, la justiceéconomique, la santé et lamigration.

« En 2011, la collectiva fe-menista, ou le collectif fémi-niste, qui existe depuis déjàune quinzaine d’années, enassociation avec d ’autresgroupes de femmes du pays, aréussi à faire approuver parle gouvernement du Salvadorune loi spéciale intégralepour une vie libre de violence.Cette loi vient créer un cadrejuridique et légal pour lacréation de plans pour la pré-vention de la violence contreles femmes », explique Guil-laume Charbonneau, princi-pal responsable du travailavec ses homologues d’Amé-rique centrale. Le rôle de lacollectiva a été d’aller voir lesdif férentes autorités : « Beau-coup de travail a été fait encollaboration avec les autori-tés municipales, mais aussiavec la police nationale duSalvador, qui reçoit mainte-nant beaucoup de formationet de sensibilisation à cettequestion pour créer des plansintégraux et faire en sorte queles femmes qui s’avancent etqui dénoncent leur agresseurn’aient pas à tomber dans lecercle de revictimisation, etque la victime soit au centredu processus », dit GuillaumeCharbonneau.

Cinq ans plus tard, qu’enest-il de cette loi et de sonapplication ? « Au Salvador,on vit l’ouverture de plusieursespaces au niveau politique.Le gouvernement, plutôt degauche, possède des bases so-ciales assez for tes, ce qui apermis l’adoption de cette loiet de plusieurs autres initia-tives. » Concrètement, on avu une augmentation des dé-nonciations d’actes de vio-lence contre les femmes. Onl’attribue au fait que de plusen plus de victimes en par-lent et qu’elles ont de plus enplus d’espaces où elles peu-vent aller de l’avant et les dé-noncer.

CollaboratriceLe Devoir

SALVADOR

Lacollectivafemenista

SOURCE INTERPARES

Veronica Zalazar et AngélicaRivas

SOURCE OXFAM

Magali Videau avec les résidentes de la maison Amani à Beni. L’enfant qu’elle tient dans ses bras s’appelle Noella et elle est née le 24 décembre 2014. C’est le fruit duviol de sa jeune mère de 16 ans (la jeune fille au chandail rose) durant sa captivité au sein du groupe de miliciens d’où elle s’est enfuie en juillet 2014. Elle a étéhébergée au centre de son septième mois de grossesse jusqu’à un mois après l’accouchement.

Les defensorias péruviennes

M A R I E - H É L È N E A L A R I E

D aniel Vanoverschelde estagent de projet au Carre-

four de solidarité internatio-

nale de Sherbrooke. Il nous ex-plique la situation que viventles femmes dans la provincede La Convención, près deCuzco, une région toute en

montagnes et en forêt amazo-nienne qui abrite plus de160 000 habitants. « Depuis2010, notre partenaire, l’orga-nisme ayni Desarrollo, a vouluagir devant le nombre grandis-sant de cas de violence conju-gale », dit Daniel Vanover-schelde. Il est impliqué dans laprovince depuis 2001 sur leplan de la santé, notammentavec des comités de femmes.Au contact de ces femmes,

l’élément de violence conju-gale est vite ressorti et, dansun premier temps, l’idée a étéde trouver une stratégie pourlutter contre la violence conju-gale à l’échelle provinciale. De-puis 2003, il existe une tablede concertation provinciale ensanté où siège une commis-sion femmes-enfants-adoles-cents qui regroupe une dou-zaine de groupes et institu-tions locales qui se sont donné

pour mandat de cerner la pro-blématique de la violenceconjugale. La stratégie miseen place en 2010 était de tra-vailler sur trois axes : la sensi-bilisation, les services aux vic-times et le plaidoyer politique.

Il était important de sensibi-liser la population en général àla réalité de la violence conju-gale et, tout d’abord, on devaitmontrer ce que c’était. « Dansles écoles secondaires, on a pro-duit des vidéos qui expliquaientles cycles de la violence », ditDaniel Vanoverschelde. Par lasuite, on a fait des représenta-tions à la radio, dans lesgroupes de base et dans lesinstitutions.

Le deuxième axe concerneles ser vices aux victimes deviolence conjugale. L’orga-nisme a pu mettre sur piedune maison d’hébergement àl’intérieur d’un centre commu-nautaire. Par la suite, « il étaitimpor tant de travailler avectous les intervenants institution-nels : que ce soit la police et lescentres de santé et les hôpitaux,qui reçoivent les victimes et quiconstatent les violences, ou lejuge de la famille qui reçoit lesplaintes. L’idée était de fairetravailler ensemble tous ces in-tervenants pour qu’ils puissentrecommander les femmes à la

Au Pérou, des femmes s’organisent pour lutter contre la vio-lence conjugale au sein de defensorias, des groupes d’en-traide qui viennent en aide aux femmes victimes de ce fléauqui, selon une étude de l’OMS, toucherait 67% de la popula-tion du département de Cuzco.

VOIR PAGE H 7 : PÉROU

Page 7: INTERNATIONAL...INTERNATIONAL H 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 7 ET DIMANCHE 8 NOVEMBRE 2015 Activités dans 12 régions du Québec Lettre au Premier ministre du Canada …

INTERNATIONALL E D E V O I R , L E S S A M E D I 7 E T D I M A N C H E 8 N O V E M B R E 2 0 1 5 H 7

Le fonds Alliance syndicats et tiers-monde de la CSN

En appui aux femmes des pays en développement

BIENTÔT

30 ANS

csn.qc.ca

maison d’hébergement. » Sur ceplan, le projet avance lente-ment et différents services semettent en place. Aujourd’hui,dans le centre communau-taire, on trouve les ser vicesd’un psychologue, d’un avocatet d’un travailleur social.

« Parce que, la plupar t dutemps, les femmes ne vont pasdénoncer la violence conjugale,le plus important était de faireparticiper quelques organisa-tions de première ligne, d’oùl’idée de créer les defensorias.Ce sont des groupes d’une quin-zaine de femmes qui agissentdans leur communauté commeune première ligne. Le pariétait que les femmes iraientplus facilement consulter d’au-tres femmes comme elles, desvoisines », explique Daniel Va-noverschelde. Cer taines deces femmes, déjà perçuescomme des promotrices desanté dans leur communauté,ont reçu une formation surl’intervention dans les cas de

violence conjugale. Elles fontbeaucoup de sensibilisationdans leur milieu et of frentconseils et accompagnement.«C’est encore fragile, parce quece sont des femmes qui elles-mêmes vivent des épisodes deviolence conjugale, et on a vudes femmes se désister de leuraction bénévole au sein des de-fensorias à cause de leurs si-tuations économiques souventtrès difficiles. »

Comme on peut le constater,le travail est énorme et il fautaussi compter sur le plaidoyerpolitique pour continuer àfaire avancer les choses : « Al-ler vers les municipalités et leurfaire prendre conscience de laproblématique et de l’impor-tance d’investir dans les ser-vices sociaux. »

CollaboratriceLe Devoir

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PÉROU

JOCELYN RIENDEAU

On trouve, dans le centre communautaire, les services d’unpsychologue, d’un avocat et d’un travailleur social.

Rue Sainte-Catherine Ouest, Montréal. Unejeune bénévole, grand sourire, dossard bleuvif paré d’un discret logo SUCO, vous pré-sente l’organisme Solidarité Union Coopéra-tion, et vous encourage à le soutenir en fai-sant un don. Trois mille kilomètres plus loin,un autre grand sourire. Téléphonique cettefois. Celui de Marie-Claudie, animatrice ennutrition pour le Projet de relance agricole etamélioration de la nutrition (PRAN) de SUCOen Haïti.

S O P H I E S U R A N I T I

D epuis février 2013, dans trois sectionscommunales (Macary, Fond Jean-Noël et

Savane Dubois) de la grande commune deMarigot, située dans le département du Sud-Est de l’île, 24 vulgarisatrices en nutrition pro-venant de 12 associations partenaires et for-mées par Marie-Claudie Joseph font de la sen-sibilisation à la saine alimentation auprès detrois cents autres femmes qui transmettent lemessage à d’autres membres de leurs commu-nautés… Et ainsi de suite. Une transmissionpar ricochet.

Comme dans beaucoup de pays insulaires,l’autonomie alimentaire s’est perdue avec l’arri-vée des produits importés qui concurrencent lesproduits locaux, sursubventionnés et non sou-mis aux barrières tarifaires. Comment convain-cre cette marchande de riz que la céréale localeaura d’appréciables retombées sur le développe-ment de son bout du pays autres que les retom-bées financières de celle provenant des États-Unis ? Que le premier lait maternel, appelé co-lostrum, est une excellente barrière antimicro-bienne pour le nouveau-né? Expliquer, démon-trer, donner l’envie.

Avec l’aide et le soutien en début de projet dela nutritionniste coopérante Jeanne Bédard, l’ani-matrice en nutrition Marie-Claudie a mis enplace différents supports visuels très parlantspour passer des messages simples et ciblésquant à l’importance d’avoir une alimentationnutritive, diversifiée et locale. «Nous avons choisides outils très imagés, comme des histoires ou desblagues d’ici, afin de transmettre des notions théo-riques. Nous avons également beaucoup travaillésur la valorisation des produits locaux, afin d’en-courager les femmes à manger ce qu’elles fontpousser dans leurs jardins.» Marie-Claudie a ainsiformé 24 Haïtiennes du coin qui aujourd’hui fontoffice de courroie de transmission. Marchés lo-

caux, cantines scolaires, jardins de proximité…un vaste maillage tissé serré qui se poursuit.

Des outils adaptés à la culturePour diffuser des messages clés et positifs,

sans que cela soit ennuyant, il faut savoir com-ment les gens pensent, ce qu’ils aiment. Le car-naval ? L’esprit de la fête? Les chansons? À par-tir de ce constat culturel, une série d’outils origi-naux ont été mis en place : Marie-Claudie a com-posé plusieurs chansons sur la nourriture et surl’allaitement, un concours de recettes a été or-ganisé, l’élaboration du guide alimentaire entiè-rement en créole s’est faite à partir des histoireset des connaissances locales, beaucoup de no-tions théoriques ont été abordées par le jeu, etc.

« SUCO ne fait pas des projets pour faire desprojets. Nous travaillons sur le terrain avec lespopulations pour les accompagner et non paspour leur imposer quoi que ce soit. Ce qui de-mande du temps au temps», précise Michel San-façon, chargé de programme, approche déve-loppement local, de retour depuis 2010 au siègesocial montréalais de l’organisme après plu-sieurs années passées au Pérou. La démarchede l’organisme créé en 1961, d’abord à l’initia-tive d’universités canadiennes (le Suco de «Ser-vice universitaire canadien outre-mer» s’est parla suite transformé en Solidarité Union Coopéra-tion), s’inscrit en effet dans le respect des cul-tures, des communautés. D’où la courte liste depays en dehors du Québec dans lesquels l’orga-

nisme s’active : Burkina Faso, Haïti, Honduras,Mali, Nicaragua, Pérou, Sénégal.

«Nous déterminons des actions en commun quideviennent le projet d’une population que nousaccompagnons. C’est ce qui fait la particularitéde SUCO. Les gens s’approprient le projet, quis’inscrit dans la durée. Nous cherchons à dévelop-per la capacité d’agir des individus d’une façon ef-fective et continue sur des problématiques qui lesrejoignent, sur des conditions de vie qu’ils souhai-tent changer», explique Michel.

Le renforcement du secteur associatifJustement, comment gérer le « faire ensem-

ble » ? En tant que coordonnateur en mobilisa-tion et communication au PRAN, Wilbens Jeudytravaille sur le renforcement du tissu associatif,une approche au cœur de la stratégie de l’orga-nisme de coopération internationale. Planifierles assemblées générales, produire des rap-ports, faire signer des engagements, offrir de laformation technique par divers intervenants…Autant d’actions que Wilbens coordonne. Unefois l’ensemble des associations impliquées etmises sur les rails du projet, ce sont elles quipoursuivent le travail.

Un projet de trois ans (2013, 2014 et 2015) dé-coupé en trois gros volets : le premier sur la pro-tection, la conservation et la réhabilitation dessols ; le deuxième sur la production agricole ac-crue et diversifiée (la relance agricole) ; et enfinle troisième volet sur l’éducation nutritionnelle

et l’alimentation évoqué précédemment. Leprincipe étant de travailler conjointement avecl’ensemble des associations locales.

Dans le cadre du PRAN à Marigot, elles sontdouze, à raison de quatre associations par sec-tion communale. «Nous faisons un vrai partena-riat avec ces associations. Par exemple, chaqueassociation reçoit une formation technique sur lamanière de consolider le sol. Nous avons aussibeaucoup investi dans le reboisement. Ce n’estpas un autobus rempli d’experts qui disent quoifaire et qui repartent aussitôt ! La coopérationvient du réseau local lui-même. Nous avonsacheté des outils agricoles et des semences locales,banni les engrais chimiques, privilégié le compos-tage naturel », relate Macdonald Michel, ancienchef de projet.

Déjà une suiteBien entendu, la coordination de tout ce beau

monde sur le terrain relève du tour de force !D’autant plus qu’en Haïti le maillage local est po-litisé (les associations jouent un rôle politique ;elles représentent donc des partis). Et comme lepays vient de connaître une importante périodeélectorale… Mais l’équipe du PRAN s’en est sor-tie grâce à différents mécanismes de verrouil-lage, comme la signature d’ententes qui permet-tent d’éviter tout débordement.

Par contre, les débordements du type « re-tombées positives » de ce projet qui a duré 36mois (financé par l’Union européenne, le minis-tère des Relations internationales et de la Fran-cophonie du Québec et le ministère des Af-faires étrangères, Commerce et Développe-ment Canada à travers le programme de coopé-ration) sont nombreux : plus de 10 km de ra-vines ont été protégés, une dizaine decompostières ont été installées et le guide ali-mentaire en créole, très simple et très visuel,devient un outil pédagogique de référence pourla population, mais aussi pour d’autres orga-nismes de coopération internationale comme laCroix Rouge.

SUCO prépare déjà la suite : un projet de 18mois axé sur la commercialisation des produitslocaux. Car, bonne nouvelle, il y a des surplusqui vont pouvoir être vendus dans les marchésde Jacmel, chef-lieu du département. La pro-chaine fois que vous croiserez cette jeune béné-vole au large sourire, vous saurez ce que faitSUCO. Et Marie-Claudie, Wilbens et tous lesautres à 3000km d’ici.

CollaboratriceLe Devoir

Vers le retour à une saine alimentation en Haïti

SOURCE SUCO PRAN

Des femmes de Marigot, en Haïti, montrent le fruit de leur travail.

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