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RELIGION PÂQUES CAHIER THÉMATIQUE H LE DEVOIR, LES SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 AVRIL 2017 La Faculté de théologie devient l’ Institut d’études religieuses Page H 7 Pâques Un appel à la rencontre de l’autre Page H 2 STRINGER AGENCE FRANCE-PRESSE Le 9 avril, la communauté copte de la ville de Tanta, en Égypte, a été visée par le groupe État islamique durant la célébration de la fête des Rameaux. ÉTIENNE PLAMONDON EMOND Collaboration spéciale D es dizaines de personnes ont péri, le 9 avril dernier, après que des attentats eurent frappé deux églises coptes, en Égypte, durant les célébrations du dimanche des Rameaux. Revendiquées par le groupe armé État islamique, ces attaques constituent une nouvelle manifestation d’une tendance désormais lourde en matière de violation du droit à la liberté de religion et de conscience : les responsables de ce type d’exactions se révè- lent plus en plus des groupes non étatiques. Dans son dernier rapport annuel sur les tendances en matière de restrictions à la re- ligion, publié en juin 2016, le Pew Research Center mettait en exergue que les répres- sions gouvernementales et l’hostilité sociale envers des religions tendaient à légère- ment diminuer, tandis que le terrorisme lié à la religion, de son côté, augmentait. Le constat est relativement simi- laire dans le rapport bisan- nuel sur la liberté religieuse dans le monde publié en no- vembre 2016 par Aide à l’Église en détresse (AED), une fondation pontificale qui relève de la Congrégation pour le clergé du Vatican. Celui-ci souligne que les groupes non étatiques, comme des groupes fonda- mentalistes ou des organisa- tions militantes, sont respon- sables des atteintes à la li- berté religieuse dans 12 pays parmi les 23 les plus incrimi- nés. « C’est relativement ré- cent [comme phénomène], af- firme Mario Bard, responsa- ble de l’information pour la section canadienne d’Aide à l’Église en détresse. On ne l’avait pas observé autant dans le précédent rapport. » « Les acteurs non étatiques, comme les organisations transnationales ou locales, sont parmi les plus impor- tants violateurs de la liberté de religion dans le monde d’aujourd’hui », peut-on aussi lire dans le rapport 2016 de la United States Commission on international Religious Freedom (USCIRF). Les exactions du groupe armé État islamique en Irak et en Syrie figurent parmi les plus connus. En 2016, plu- sieurs rapports et gouverne- ments ont qualifié de géno- cides les actions du groupe en- vers les minorités religieuses de la région, notamment les yézidis, les chrétiens et les musulmans chiites. Des acteurs incontrôlables « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion », indique la Dé- claration universelle des droits de l’homme. Celle-ci précise que « ce droit implique la li- berté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la li- berté de manifester sa religion ou sa conviction, seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accom- plissement des rites ». Mais ce document adopté par les États membres des Na- tions unies n’a aucune impor- tance aux yeux des groupes non étatiques et s’avère inutile pour faire pression sur eux. « Ils sont en opposition contre toutes ces conventions interna- tionales et ils ne croient pas en la liberté de religion, souligne Kyle Matthews, directeur exé- cutif de l’Institut montréalais d’études sur le génocide et les droits humains de l’Université Concordia. Ils voient ça comme quelque chose contre leur iden- tité ou contre la loi de Dieu. On voit que même les travailleurs humanitaires sont ciblés par ces groupes. » L’USCIRF a recommandé au président et au secrétaire d’État des États-Unis d’inclure dans son classement des pays particulièrement préoccupants ( countries of particular concern) des pays où les viola- tions du droit à la liberté de re- ligion se déroulent sans qu’un gouvernement soit suffisam- ment bien organisé pour les empêcher. «À certains en- droits, comme en République centrafricaine et dans des ré- gions de l’Irak et de la Syrie, les gouvernements sont inexistants ou incapables de s’attaquer aux violations commises par des ac- teurs non étatiques », souligne son rapport 2016. « C’est un phénomène qu’on observe beaucoup en Afrique », soulève Mario Bard. C’est ainsi que le groupe Boko Haram a sévi au Nigeria, au Tchad et au Cameroun, notamment en en- levant de jeunes femmes pour ensuite les forcer à adopter leurs pratiques religieuses. Le groupe Al-Shabaab, quant à lui, a pris pour cible meurtrière des non-musulmans en Soma- lie et au Kenya. Persécution d’État et loi sur le blasphème La répression étatique en- vers des groupes religieux ou des croyances n’a pas cessé pour autant dans certains pays. Le rapport d’AED rap- pelle ainsi la situation toujours problématique en Corée du Nord, en Azerbaïdjan, en Iran, au Laos, au Vietnam et au Turkménistan. La Birmanie constitue l’une des nations parmi les plus condamnés à ce sujet, en raison de persécu- tions menées de manière répé- tée par des moines boud- dhistes et les autorités contre les musulmans rohingyas. Dans certains cas, comme au Pakistan, en Arabie saou- dite et en Indonésie, l’imposi- tion de sanctions sévères par les gouvernements contre le blasphème engendre des conséquences dramatiques. La USCIRF a sonné l’alarme à ce sujet en 2014. « Les lois sur le blasphème positionnent de manière inappropriée les gou- vernements comme des arbitres de la vérité ou de la justesse re- ligieuses, car elles habilitent les LIBERTÉ DE RELIGION Les violations changent de visage CHAIDEER MAHYUDDIN AGENCE FRANCE-PRESSE Un Rohingya de Birmanie transporte ses biens vers un nouveau camp temporaire à Blang Adoe, en Indonésie. VOIR PAGE H 2 : VIOLENCES

RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

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RELIGIONPÂQUES

C A H I E R T H É M A T I Q U E H › L E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7

La Faculté de théologie devientl’Institut d’étudesreligieusesPage H 7

PâquesUn appel à la rencontre de l’autre Page H 2

STRINGER AGENCE FRANCE-PRESSE

Le 9 avril, la communauté copte de la ville de Tanta, en Égypte, a été visée par le groupe État islamique durant la célébration de la fête des Rameaux.

É T I E N N E P L A M O N D O N E M O N D

Collaboration spéciale

D es dizaines depersonnes ontpéri , le 9 avri lder nier, aprèsque des attentats

eurent frappé deux églisescoptes, en Égypte, durant lescélébrations du dimanche desRameaux. Revendiquées par legroupe armé État islamique,ces attaques constituent unenouvelle manifestation d’unetendance désormais lourde enmatière de violation du droit àla liber té de religion et deconscience : les responsablesde ce type d’exactions se révè-lent plus en plus des groupesnon étatiques.

Dans son dernier rappor tannuel sur les tendances enmatière de restrictions à la re-ligion, publié en juin 2016, lePew Research Center mettaiten exergue que les répres-sions gouvernementales etl’hostilité sociale envers desreligions tendaient à légère-ment diminuer, tandis que leterrorisme lié à la religion, deson côté , augmenta i t . Leconstat est relativement simi-laire dans le rappor t bisan-nuel sur la liberté religieusedans le monde publié en no-v e m b r e 2 0 1 6 p a r A i d e à

l’Église en détresse (AED),une fondation pontificale quirelève de la Congrégationpour le clergé du Vatican.

Celui-ci souligne que lesg r o u p e s n o n é t a t i q u e s ,comme des groupes fonda-mentalistes ou des organisa-tions militantes, sont respon-sables des atteintes à la li -berté religieuse dans 12 paysparmi les 23 les plus incrimi-nés. « C’est relativement ré-cent [comme phénomène], af-firme Mario Bard, responsa-ble de l’information pour lasection canadienne d’Aide àl’Église en détresse. On nel ’avait pas observé autantdans le précédent rapport. »

« Les acteurs non étatiques,c o m m e l e s o r g a n i s a t i o n stransnationales ou locales,sont parmi les plus impor-tants violateurs de la liber téde religion dans le monded’aujourd’hui », peut-on aussilire dans le rappor t 2016 dela United States Commissionon inter national ReligiousFreedom (USCIRF).

Les exactions du groupearmé État islamique en Irak eten Syrie figurent parmi lesplus connus. En 2016, plu-sieurs rapports et gouverne-ments ont qualifié de géno-cides les actions du groupe en-vers les minorités religieusesde la région, notamment les

yézidis, les chrétiens et lesmusulmans chiites.

Des acteursincontrôlables

«Toute personne a droit à laliberté de pensée, de conscienceet de religion », indique la Dé-claration universelle des droitsde l’homme. Celle-ci préciseque « ce droit implique la li-berté de changer de religion oude conviction, ainsi que la li-berté de manifester sa religion

ou sa conviction, seule ou encommun, tant en public qu’enprivé, par l’enseignement, lespratiques, le culte et l’accom-plissement des rites ».

Mais ce document adoptépar les États membres des Na-tions unies n’a aucune impor-tance aux yeux des groupesnon étatiques et s’avère inutilepour faire pression sur eux.« Ils sont en opposition contretoutes ces conventions interna-tionales et ils ne croient pas en

la liberté de religion, souligneKyle Matthews, directeur exé-cutif de l’Institut montréalaisd’études sur le génocide et lesdroits humains de l’UniversitéConcordia. Ils voient ça commequelque chose contre leur iden-tité ou contre la loi de Dieu. Onvoit que même les travailleurshumanitaires sont ciblés parces groupes. »

L’USCIRF a recommandé auprésident et au secrétaired’État des États-Unis d’incluredans son classement des paysparticulièrement préoccupants( c o u n t r i e s o f p a r t i c u l a rconcern) des pays où les viola-tions du droit à la liberté de re-ligion se déroulent sans qu’ungouvernement soit suf fisam-ment bien organisé pour lesempêcher. « À cer tains en-droits, comme en Républiquecentrafricaine et dans des ré-gions de l’Irak et de la Syrie, lesgouvernements sont inexistantsou incapables de s’attaquer auxviolations commises par des ac-teurs non étatiques », souligneson rapport 2016.

« C’est un phénomène qu’onobserve beaucoup en Afrique »,soulève Mario Bard. C’est ainsique le groupe Boko Haram asévi au Nigeria, au Tchad et auCameroun, notamment en en-levant de jeunes femmes pourensuite les forcer à adopterleurs pratiques religieuses. Le

groupe Al-Shabaab, quant à lui,a pris pour cible meur trièredes non-musulmans en Soma-lie et au Kenya.

Persécution d’État et loi sur le blasphème

La répression étatique en-vers des groupes religieux oudes croyances n’a pas cessépour autant dans cer tainspays. Le rappor t d’AED rap-pelle ainsi la situation toujoursproblématique en Corée duNord, en Azerbaïdjan, en Iran,au Laos, au Vietnam et auTurkménistan. La Birmanieconstitue l’une des nationsparmi les plus condamnés à cesujet, en raison de persécu-tions menées de manière répé-tée par des moines boud-dhistes et les autorités contreles musulmans rohingyas.

Dans certains cas, commeau Pakistan, en Arabie saou-dite et en Indonésie, l’imposi-tion de sanctions sévères parles gouvernements contre leblasphème engendre desconséquences dramatiques.La USCIRF a sonné l’alarme àce sujet en 2014. « Les lois surle blasphème positionnent demanière inappropriée les gou-vernements comme des arbitresde la vérité ou de la justesse re-ligieuses, car elles habilitent les

LIBER TÉ DE RELIGION

Les violations changent de visage

CHAIDEER MAHYUDDIN AGENCE FRANCE-PRESSE

Un Rohingya de Birmanie transporte ses biens vers un nouveaucamp temporaire à Blang Adoe, en Indonésie.

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Page 2: RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7H 2

P I E R R E V A L L É E

Collaboration spéciale

Q ue signifie la fête dePâques dans la foi catho-

lique ? Si certains peuvent ré-pondre à cette question en yapportant des nuances — celaest possible si l’on tient comptede l’ensemble de la fête pas-cale, soit du jeudi saint aulundi de Pâques — Mgr Chris-tian Lépine, archevêque deMontréal, choisit de s’en tenirà l’essentiel. Ce sera d’ailleursle message de son homélielors de la messe de Pâques.

« Pâques, c’est l’espérance,avance-t-il simplement. Pâques,c’est croire en Jésus-Christ etc’est surtout croire en sa résur-rection. La résurrection de Jé-sus-Christ nous fait comprendreque la mort, ici, n’a pas le der-nier mot. Que la mort ne peutpas avoir le dernier mot.»

En ce sens, Pâques est unpassage. « La résurrection deJésus-Christ est un passage de lavie mortelle à la vie éternelle.Et la mort ne peut pas avoir ledernier mot devant la vie éter-nelle. Et il est là le messaged’espérance. »

Un message d’espérance quivient nimber même l’expé-rience de la vie de tous les

jours. « L’espérance que nousdonne la foi dans la vie éternellenous permet de transformer nosdif ficultés, nos échecs, nos mal-heurs, nos morts, au fond, unpassage à autre chose de meil-leur.» Et cela s’applique aussi àautrui. «Pâques nous enseigneque nous devons tous avoir unregard d’espérance dans la vie.Comment voit-on l’autre ? Nosproches, nos voisins, les mem-bres de notre communauté ?Comment voit-on ceuxqui ne sont pas commenous, ceux dont l’iden-tité est dif férente de lanôtre? Pâques est l’occa-sion de renouveler notreregard sur autrui et,surtout, de s’assurer quece regard sur autrui estun regard d’espérance.La foi en Jésus-Christ,en sa résurrection et enla vie éternelle nous enseigneque la résurrection est pourtoute l’humanité.»

S’ouvrir aux autresL’horrible tuerie qui s’est

déroulée récemment à lagrande mosquée de Québecrappelle brutalement que l’in-tolérance et l’incompréhen-sion de ceux qui sont dif fé-rents peuvent amener certains

êtres humains à commettredes gestes qui sont propre-ment inhumains. À cet égard,la fête de Pâques peut-elle êtreun moment de réconciliation,de paix et de bonne volonté?

«Lors de la veillée pascale, lesamedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend que Dieu a créé l’homme,et qu’il l’a créé à son image et

que tous les êtres hu-mains sont par consé-quent des créatures deDieu. Au fond, peu im-porte qui nous sommes,nous partageons tous lamême humanité. »

Et cette humanitédépasse le cadre de lafoi et de la religion,rappelle Mgr Lépine,qui donne en exemple

la Déclaration universelle desdroits de l’homme des Nationsunies de 1948. «Dans la Décla-ration universelle des droits del’homme, il n’y a pas de men-tion de Dieu. Mais on y consa-cre la dignité de tout être hu-main qui repose sur le respectde la vie humaine et sur le res-pect de la liberté des êtres hu-mains. Ce sont des valeurs dejustice et d’humanité que l’on

dit universelles. Des valeurs quiparfois peuvent s’exprimer diffé-remment, selon les cultures etles religions, mais qui, dans lecœur de l’homme, sont pareillespour tous.»

Et que la foi catholique etchrétienne fait siennes. «La foichrétienne, qui repose sur leprincipe que tous les hommessont créés à l’image de Dieu,amène une parole qui invite lecroyant à s’ouvrir à toute l’hu-m a n i t é , p e u i m p o r t e l acroyance. » Agir contrairementserait un manquement à la foichrétienne et catholique. « Ilne faut jamais se servir de no-tre croyance pour nuire au res-pect de l’humain. Les cultureset les religions peuvent être dif-férentes, les valeurs aussi, on le

voit bien dans une ville plu-riethnique comme l’est devenueMontréal, mais il s’agit tou-jours de la même humanité. »

Et aller vers les autresSi la foi catholique et chré-

tienne est une ouver ture àl’autre, c’est aussi une invita-tion à aller à sa rencontre. « Iln’y a aucune raison pour la-quelle un catholique ou unchrétien ne peut pas aller à larencontre d’un non-chrétien etmême d’un non-croyant. La foichrétienne nous amène à poserun regard sur l’autre qui estd’abord un regard humain. Ladiversité de croyance est doncpossible. Cela est vrai d’unpoint de vue chrétien puisquetous les hommes sont des créa-

tures de Dieu et faits à sonimage. Mais c’est aussi vraid’un point de vue philoso-p h i q u e , p u i s q u e t o u s l e shommes par tagent la mêmehumanité et que les hommesont droit à la même dignité. »

La fête de Pâques et ses en-seignements peuvent ser virdonc de point de rencontre.« C’est aussi un appel à la ren-contre, poursuit Mgr Lépine.Et cet appel est impor tantparce que c’est lorsqu’il n’y apas de rencontre que se créentles préjugés. Si l’on veut briserces derniers, il faut aller à larencontre de l’autre, car seulela rencontre permet de connaî-tre et d’apprécier l’autre, et ce,quelles que soient les cultureset les croyances. »

CÉLÉBRATION DE PÂQUES

Un appel à la rencontre de l’autre

L’Université de Montréal et du monde. L’Université de Montréal, c’est toute une communauté qui contribue à rendre le monde meilleur et à faire de Montréal une métropole de l’enseignement supérieur, à la fois capitale canadienne de la recherche et meilleure ville étudiante du monde.

umontreal.ca/monde

autorités à faire respecter desopinions religieuses par ticu-lières contre des individus, desminorités et des dissidents, a-t-elle signalé dans une note. Enpratique, elles ont ouver t laporte à des abus et à des mani-pulations à l’aide de fausses ac-cusations. Souvent justifiéescomme nécessaires pour pro-mouvoir l’harmonie religieuse,ces lois ont en fait l ’ef fetcontraire. Elles encouragent lesextrémistes à imposer leur vi-sion de la vérité aux autres,souvent par la force, ce qui am-plifie l’intolérance religieuse, ladiscrimination et la violence. »

Au Pakistan, par exemple,commettre un blasphème estpassible de peine de mort oude prison à vie. «Il y a des chré-tiens qui sont mis en prisonpour avoir prétendument in-sulté certaines lois religieuses.C’est utilisé de plus en plus pourfaire peur aux gens et mettreune pression sur les minorités,indique Kyle Matthews. Par-fois, les organismes non gouver-nementaux [ONG] ne veulentpas en parler : ils ont peur d’êtreattaqués. Je crois que ça devientde plus en plus un problème. »M. Bard considère que « la loianti-blasphème crée, la plupartdu temps, une utilisation abu-sive de la religion pour réglerdes comptes».

«La liberté religieuse n’est pasaccessoire», insiste-t-il, alors que,selon lui, on oublie souvent l’im-portance de cet enjeu au Ca-nada, un pays où l’on tendrait àtenir ce droit pour acquis. L’at-taque perpétrée dans une mos-quée de Québec, en janvier der-nier, a d’ailleurs été qualifiée de«violation sans équivoque de laliberté religieuse» par le rédac-teur en chef du rapport d’AED,signale M. Bard.

Le document d’AED sou-ligne qu’entre 2014 et 2016, lasituation en matière de libertéreligieuse s’est détériorée dans14 pays parmi les 38 où il y ad’importantes violations, soit laLibye, la Mauritanie, le Niger,le Kenya, le Soudan, le Tadji-kistan, le Yémen, l’Érythrée, laTanzanie, le Pakistan, le Ban-gladesh, le Brunei, l’Indonésieet la Chine. Selon les plus ré-cents chiffres du Pew ResearchCenter, des chrétiens ont étéspécifiquement harcelés et inti-midés dans 108 pays en 2014,tandis que des musulmans ontsubi le même sor t dans 100pays. Les juifs, qui représen-tent pourtant seulement 0,2 %de la population mondiale, ontété victimes d’un tel traitementdans 80 pays. Durant la mêmeannée, des musulmans ont étéharcelés par des gouverne-ments dans 80 pays, alors queles chrétiens ont subi un telpréjudice de la part d’acteursétatiques dans 79 pays.

SUITE DE LA PAGE H 1

VIOLENCES

SOURCE SHAUNL GETTY IMAGES

«Les cultures et les religions peuvent être dif férentes, les valeurs aussi, on le voit bien dans une villepluriethnique comme l’est devenue Montréal, mais il s’agit toujours de la même humanité», soulignel’archevêque de Montréal, Mgr Christian Lépine.

Mgr ChristianLépine

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RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7 H 3

Ce cahier thématique a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir grâce au soutien des annonceurs qui y figurent. Ces derniers n’ont cependant pas de droit de regard sur les textes. Pour toute demande d’information quant au contenu de ce cahier, vous pouvez contacter par courriel Loïc Hamon, directeur des publications spéciales, à [email protected].

Pour vos projets de cahiers ou toute autre information au sujet de la publicité, vous pouvez contacter Mark Drouin, vice-président des ventes publicitaires, à l’adresse courriel [email protected].

Montréal, ville aux cent clochers… oubliés.«Pour les nouvelles générations, ces clochersn’ont aucune signification », se désole GillesProulx, ancien animateur de radio reconnupour son grand amour de l’histoire. Pourtant,comme il le raconte dans le livre De Ville-Ma-rie à Montréal paru cette semaine, « c’est unprojet d’évangélisation qui a amené des reli-gieux et de fervents laïcs à fonder la ville dontnous célébrons le 375e anniversaire».

C A T H E R I N E G I R O U A R D

Collaboration spéciale

I l faut presque faire un effort pour se rappelerle sujet de départ de l’entrevue lorsqu’on dis-

cute avec Gilles Proulx. Avec cet érudit qui apassé 50 ans derrière un micro, on peut parlerdans un même souffle de la fondation de Mont-réal, de la Grande Noirceur, de l’actualité en Sy-rie et des enjeux entourant l’éducation. C’estque pour lui, tout est lié. «Si on ne sait pas quinous sommes, on ne peut pas savoir où on va »,dit l’ancien animateur de radio toujours très ac-tif dans les médias à 77 ans, « l’âge limite de lalecture des Tintin », rigole-t-il, avouant avoir lenez dans L’affaire Tournesol.

Celui qui précise ne pas être un historien, maisplutôt un amant de l’histoire n’a pas hésité un ins-tant quand la maison d’édition Médiapaul lui aproposé la rédaction de son dernier livre. À tra-vers ses quelque 80 pages, Gilles Proulx raconte« les oubliés de l’histoire» que sont les gens del’Église à travers un récit plein d’anecdotes, enpuisant dans l’histoire officielle et populaire ainsique dans ses propres recherches et visites.

«On parle souvent de la fondation de Montréalen partant de Maisonneuve. Mais avant lui, il ya eu des hommes et des femmes fous et folles deDieu venus pour évangéliser et fonder le Jérusa-lem nord-américain», illustre-t-il.

S’il raconte cette histoire, Gilles Proulx cri-tique au passage qu’on l ’ait jetée aux ou-bliettes, ainsi que l’enseignement de l’Histoireen général. «Les nouvelles générations sont sou-vent des “ignorants instruits” bardés de diplômesqui n’attestent d’aucune formation historique »,critique-t-il autant dans son livre qu’en entre-vue téléphonique.

De Ville-Marie à Montréal fait aussi la partbelle aux femmes dans la fondation de la métro-pole, « seule ville fondée conjointement par unhomme et une femme». Jeanne Mance a officiel-lement été reconnue comme cofondatrice deMontréal avec Maisonneuve en 2012. « Cesfemmes instruites […] n’auraient sans doute paspu jouer un tel rôle en dehors de l’Église ni dansla mère patrie à l’époque», écrit Gilles Proulx.

À partir d’extraits glanés ici et là dans De VilleMarie à Montréal agrémentés de commentairesde Gilles Proulx, voici l’histoire en bref dequelques religieuses et religieux sans qui Mont-réal ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui :

Jeanne-Mance. Jeune idéaliste qui rêvait d’éri-ger un hôpital en Nouvelle-France, JeanneMance fait par tie de la soixantaine de per-sonnes qui quittent le port de La Rochelle enmai 1641 pour fonder Ville-Marie. Elle reçoitl’appui financier d’une riche bourgeoise, ma-dame de Bullion, qui tient à garder l’anonymat.

« J’aime dire que Jeanne Mance est comme la

première ministre de la Santé qu’a eue leQuébec», illustre Gilles Proulx. Elle fonde l’Hô-tel-Dieu, l’ancêtre de l’hôpital universitaire ac-tuel. Un peu plus de dix ans après sa fondation,elle fait venir de France les premières Reli-gieuses hospitalières de Saint-Joseph pour laseconder. Ces religieuses prendront les rênesde l’hôpital à sa mort et administreront sesbiens jusqu’en 1973.

Marguerite Bourgeois. Marguerite Bourgeoisest à l’éducation ce que Jeanne-Mance est à lasanté. Cette mystique arrive en Nouvelle-France en 1753 avec les 95 nouveaux aspirantsqui viennent prêter main-forte à la cinquantainede Montréalais qui s’occupent difficilement detout. Amie de la sœur de Maisonneuve, elle

souhaite se consacrer à l’éducation des enfantsfrançais et amérindiens. Une mission à laquelleelle ne peut se consacrer dès son arrivée, carpresque tous les enfants de la petite bourgadesont mor ts… Elle se consacre alors toutd’abord à la construction de la chapelle Notre-Dame-de-Bonsecours, première église deMontréal qui existe encore aujourd’hui.

En 1759, Marguerite fonde enfin la congréga-tion Notre-Dame avec une poignée d’institu-trices qu’elle sera allée chercher en France.Elle donne ensuite le premier réseau d’écoles àVille-Marie. Les collèges Dawson, Marianopo-lis, Villa-Maria ne sont que quelques exemples

de son legs. Pionnière de l’accès à l’éducation,Marguerite refuse de tenir compte des classessociales ou de la couleur de la peau, ouvrant lesportes de ses écoles à tous.

Enfin, elle prend en charge les Filles du Roy,envoyées en 1663 pour équilibrer la proportiond’hommes et de femmes en Nouvelle-France,alors qu’on peut compter 19 hommes pour unefemme. Marguerite accueille ces orphelines àla Maison Gabriel et les initie à l’agriculture etaux arts ménagers tels qu’ils se pratiquent aupays en attendant qu’elles se marient.

Marguerite D’Youville. Fondatrice des Sœursgrises, Marguerite D’Youville est quant à elle« la ministre des Affaires sociales de la Nouvelle-France», s’amuse à dire Gilles Proulx. Elle est

aussi une des premièresgrandes figures à naître enNouvelle-France, plus précisé-ment à Varennes, en 1701.« C’est peut-être la plus intéres-sante de toutes, commenteM. Proulx. Elle sera notre pre-

mière sainte québécoise », le pape Jean-Paul IIl’ayant canonisé en 1990.

Veuve d’un mari joueur et ivrogne, elle dé-cide de s’engager en aidant les pauvres et encombattant la misère humaine. «Elle fait rayon-ner socialement des idées nouvelles de partage etd’entraide », souligne l’auteur. Mais à cetteépoque, on ne jugeait pas convenable que desreligieuses côtoient des clochards. On traitealors Marguerite D’Youville et ses consœurs de« sœurs grises », une allusion peu flatteuse aupassé du mari de Marguerite. Elle décide alorsde tourner les moqueries en dérision et d’adop-ter comme costume une robe grise qui devient

le signe distinctif de sa congrégation.En 1747, elle sauve des ruines l’Hôpital géné-

ral de Montréal, où elle et ses acolytes accueil-lent des soldats blessés, des enfants malades,des orphelins, des incurables, des vieillards etdes fous. Entre autres œuvres marquantes, lesSœurs grises ont aussi dirigé L’Accueil Bon-neau jusqu’à tout récemment, un important re-fuge montréalais pour sans-abri.

Les jésuites. En 1625, une petite troupe depères jésuites débarque à Québec. Ils ouvrirontses premières paroisses. Ils obtiennent un cer-tain succès auprès des Amérindiens, mais à unprix bien élevé puisqu’une vingtaine d’entreeux meurent dans d’atroces supplices en 1637,ce qui leur vaudra le nom de « saints martyrscanadiens ». Parmi eux se trouvent notammentJean de Brébeuf, Isaac Jogues, Gabriel Lale-mant, Charles Garnier et René Goupil. Leur sa-crifice n’aura par ailleurs pas été vain puisqueles Hurons, persécutés par les Iroquois, se ran-gent par la suite du côté des Français.

Avec la conquête britannique officialisée en1763, la donne religieuse change. Alors quel’élite repart en grand nombre vers la France,les jésuites, eux, repartent contre leur gré. LesAnglais protestants confisquent leurs biens,chassent cet ordre « papiste », intellectuel,champion de l’objection de conscience. « Jecrois que l’arrachement à la culture jésuite nousa durablement appauvris sur le plan intellectuel,et que leur départ explique en partie l’anti-intel-lectualisme des Québécois », commente GillesProulx au bout du fil. Il faudra attendre près de100 ans avant de voir les jésuites revenir auQuébec, où ils ouvriront de grandes écoles, fré-quentées par l’élite, comme le collège Brébeuf.

Gilles Proulx raconte les clochers de Montréal

SOURCE ÉDITIONS MÉDIASPAUL

Plan du premier Hôtel-Dieu, ancêtre de l’hôpital universitaire actuel, créé par Jeanne mance

De Ville-Marie à Montréal fait aussi la part belle auxfemmes dans la fondation de la métropole, «seule villefondée conjointement par un homme et une femme»

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RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7H 4

38 PAYS MONTRENT DES PREUVES DE

VIOLATIONS IMPORTANTESDE LA LIBERTÉ RELIGIEUSE

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Aussi en version numérique

Le pape François met en garde contre la « maladie du visage sinistre », qui nous frappe lorsque l’on arbore un air sombre et que l’on traite les autres avec dureté.

A L I C E M A R I E T T E

Collaboration spéciale

L e Centre Présence reli-gieuse intercommunau-

taire (PRI) tiendra la troisièmeédition de son événement« A u - d e l à d e s m u r s » , l e30 avril prochain. À cette occa-sion, une vingtaine de commu-nautés religieuses québé-coises ouvriront leurs portesau grand public.

Proposer un échange entreles communautés religieusesde la province et le public, peuimporte ses croyances, c’est cequ’of fre depuis trois ans leCentre PRI avec sa journéepor tes ouver tes, organiséedeux semaines après la fin desemaine de Pâques. «L’objectifest d’inviter les gens à venir ren-contrer les communautés, pourdécouvrir ceux qui y vivent, po-ser des questions et visiter leslieux », explique Chantal Jo-doin, directrice du Centre PRI,à l’origine de l’événement.

Lancé en 2015 dans le cadrede l’Année de la vie consacréedécrétée par le pape François,« Au-delà des murs » est avanttout un moment de par tage.Cette année, il sera possiblede visiter une vingtaine decommunautés à Montréal et àQuébec, mais aussi Sher-brooke, Ottawa, Gatineau, La-val et Lac-au-Saumon. «La pre-mière année, nous pensionssimplement proposer un petitpèlerinage entre deux ou troiscommunautés. Finalement,une douzaine étaient désireusesde participer, alors nous avonsdécidé d’inviter le grand publicà venir nous voir », raconteMme Jodoin. Elle avoue s’êtreinspirée du principe des Jour-nées de la culture.

Ouvrir ses portes« Chaque communauté a sa

couleur, précise-t-elle. Chacuneest libre d’organiser cette jour-née comme elle le souhaite. » Leseul dénominateur communest le rendez-vous fixé à13 h 30 pour une visite guidée,quel que soit le lieu choisi. Lereste dépend des membres del’institution. Découverte de lachapelle du Grand Séminairede Montréal, visite de l’appar-tement d’un membre de laCompagnie de Sainte-Ursuleou encore exploration du fa-meux Musée des Sœursgrises… Les possibilités sontmultiples. Chaque commu-nauté prévoit aussi un momentpour présenter son histoire,

parler de sa fondatrice ou deson fondateur, expliquer lenom donné à son édifice, ainsiqu’une période d’échange.« Pour les questions, cela serasans aucune restriction, ajouteMme Jodoin. À ma connais-sance, toutes les questions po-sées ont eu leur réponse ! »

« Au-delà des murs » inviteles petits et grands, seuls ouen famille, à venir découvrirun pan de l’histoire, souventen lien direct avec celle duQuébec et du Canada. « Onvient visiter, parfois découvrirun lieu patrimonial, poser desquestions, par curiosité ou inté-rêt pour la vie consacrée», croitMme Jodoin. Elle indique juste-ment que, dans certains cas,cette journée a permis d’éta-blir un premier contact pourles personnes souhaitant che-miner vers la vie consacrée.

Par ailleurs, certaines com-munautés ont besoin de béné-voles pour leurs dif férentesmissions. Mme Jodoin prendl’exemple des sœurs mission-n a i r e s d e N o t r e - D a m ed’Afrique. L’année passée,elles ont présenté leurs œu-vres et cer tains par ticipantsont ensuite décidé de donnerde leur temps pour les aider.

« Ce qui est intéressant, c’estqu’il ne s’agissait pas unique-ment de personnes de religioncathol ique, mais auss i deconfession musulmane, des per-sonnes qui habitent près de larésidence, af firme la direc-trice. Alors, cela permet un re-gard intercommunautaire, unrapprochement entre les cul-tures et les religions. »

Démystifier la vie consacrée

« Venez nous voir, on n’estpas sor teux ! » dit en riantMme Jodoin, en expliquant queles dif férentes communautésreligieuses du Québec ne sontpas toujours très visibles. Elleraconte qu’une autre des rai-sons l’ayant poussée à mettreen place cet événement est laméconnaissance et les nom-breuses idées préconçues surla vie consacrée. « Je constateque, malheureusement, on neconnaît plus; on ne sait plus.Souvent, on pense qu’une sœurne fait que prier et un prêtre of-ficier la messe du dimanche. »

Elle espère que visiter leslieux et rencontrer les prota-gonistes permettra de donnerune vraie idée de ce qu’est lavie d’une sœur ou d’un prêtre,

tout en montrant la façon donts’impliquent les religieux etreligieuses. «C’est en suscitantet provoquant des rencontresque l’on peut, un peu, changerles mentalités et montrer que cen’est pas tout à fait juste cequ’on nous a dit », estime la di-rectrice. Elle donne en exem-ple le Centre lasallien de Saint-Michel, où deux communau-tés religieuses aident les habi-tants de Montréal-Nord et deSaint-Michel, en proposant no-tamment de l’aide au devoirpour les jeunes.

L’idée est aussi de mettreen avant d’autres formes devie consacrée et les commu-nautés nouvelles, mises surpied après le concile VaticanII. Parmi elles, les Fraternitésmonastiques de Jérusalem àMontréal, la Famille Marie-Jeunesse à Québec et à Sher-brooke, la Famille MyriamBeth’léhem à Québec et à Lac-au-Saumon ouvriront leursportes cette année. De même,alors qu’il en existe plus d’unedouzaine au Québec, les insti-tuts séculiers ne sont que trèspeu connus du grand public.Pour l’occasion, l’Institut No-tre-Dame de Vie à Montréal etla Compagnie de Sainte-Ur-sule à Québec accueillerontdes visiteurs.

Mme Jodoin mentionne aussiles communautés contempla-tives, qui n’ouvrent habituelle-ment pas leurs portes au grandpublic, ou très peu. « Pour lapremière fois, une communautéentièrement contemplative par-ticipe à notre journée, alors c’estl’occasion pour les habitants deSherbrooke d’aller visiter les Ser-vantes du Très-Saint-Sacre-ment», ajoute-t-elle. Encore unefois, aller rencontrer les reli-gieuses de cette communautépermettra sans doute de battreen brèche un certain nombred’idées reçues et mieux com-prendre leur mode de vie.

Puisque l’heure de la visiteguidée est la même pour tousles lieux, il ne sera pas possi-ble d’en découvrir deux cettejournée-là. Toutefois, Mme Jo-doin affirme être prête à orga-niser un autre événementdans une communauté en par-ticulier, si plusieurs per-sonnes en faisaient la de-mande. « Le réseautage est no-tre mission au centre Présencereligieuse intercommunau-taire, afin de permettre auxgens de rencontrer des commu-nautés et de mieux les connaî-tre », conclut la directrice.

JOURNÉE PORTES OUVERTES

Au-delà du mur des églisesDE LA LECTURE POUR L’ÂME

L’OUBLI DE LA LETTREDavid BanonAlbin MichelParis, 2017, 280 pages

Spécialiste de la pensée juive en France, directeur du Départe-ment des études hébraïques et juives de l’Université de Stras-bourg, David Banon, nous introduit à une lecture vivante des«Textes sacrés», aujourd’hui accusés de nourrir les fondamen-talismes, et nous confronte aux questions les plus fondamen-tales : la création du monde, les rapports hommes-femmes, lafiliation, le statut de l’étranger, la souffrance animale.

LE MYSTÈRE DU MAL BENOÎT XVI ET LA FIN DES TEMPSGiorgio AgambenNovalisMontréal, 2017, 96 pages

Le philosophe Giorgio Agamben signe avec Le mystère dumal un essai sur le « grand refus » du pape Benoît XVI dansun monde qui remet en question non seulement la légalité deses institutions, mais aussi leur légitimité, apportant un nou-vel éclairage au « mystère du mal » dont parle l’apôtre Paul.

TURBULENCES DANS L’UNIVERSDIEU, LES EXTRATERRESTRES ET NOUSJacques ArnouldAlbin MichelParis, 2017, 230 pages

Comment la découverte d’une vie extraterrestre bouleverse-rait-elle notre rapport à la religion? Jacques Arnould, théolo-gien et chargé de mission à l’agence française de l’espace, leCentre national d’études spatiales, où il accompagne lesscientifiques comme expert en matière d’éthique, s’attaque àcette problématique en réalité très ancienne. Un exercice quiappelle à s’interroger sur le destin de notre humanité, quel’on soit croyant ou pas.

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SOURCE CENTRE PRÉSENCE RELIGIEUSE INTERCOMMUNAUTAIRE

Journée «Au-delà des murs» chez les Dominicaines MissionnairesAdoratrices

PAR LAURIE VANHOORNE

Page 5: RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7 H 5

DE LA LECTURE POUR L’ÂME

DE LA VIOLENCE ET DES JEUNESNagy Charles BedwaniMédiaspaulMontréal, 2016, 188 pages

Qu’est-ce qui pousse les adolescents sur la voie de la violenceet de la radicalisation et que peut-on faire pour les en éloi-gner? Pédopsychiatre, directeur de l’hôpital de jour du Cen-tre des adolescents de l’hôpital Sacré-Cœur et professeuragrégé à l’Université de Montréal, le docteur Nagy CharlesBedwani s’efforce de répondre à ces questions à travers uneréflexion globale sur ce phénomène, dont les fondementssont à la fois biologiques, psychologiques et sociaux.

LA FEMME AU PARFUMGuy BonneauFidesAnjou, 2016, 352 pages

Guy Bonneau est professeur titulaire à la Faculté de théolo-gie et de sciences religieuses de l’Université Laval. Dans Lafemme au parfum, il s’attarde à une femme dont les Évangilesn’ont retenu qu’un geste d’affection à l’égard d’un dénomméJésus : Suzanne, une jeune juive ayant appris très jeune l’artdu parfumeur.

MISSION SUR TERRE L’ÉGLISE CATHOLIQUEET LE DÉVELOPPEMENT MONDIALRobert CalderisiFidesAnjou, 2015, 320 pages

Économiste et auteur, Robert Calderisi cumule plus de trenteans d’expérience en développement international. Il signe iciune vaste enquête sur la contribution de l’Église catholiqueaux soins de santé, à l’éducation et à la justice sociale à tra-vers le monde, éclairée par de nombreux entretiens avec descardinaux, des prêtres, des religieuses, mais aussi des cri-tiques de cette organisation aux multiples controverses.

M A R T I N E L E T A R T E

Collaboration spéciale

J usqu’à tout récemment,l’oratoire Saint-Joseph-du-

Mont-Royal n’avait pas d’œu-vre du grand maître verriermontréalais d’origine ita-lienne Guido Nincheri qui apourtant créé 5000 vitraux no-tamment pour 200 églises auCanada et en Nouvelle-Angle-terre. Un appel d’un membrede la communauté des Reli-gieux de Saint-V incent dePaul, à Québec, est venu toutchanger en janvier.

« Ils nous of fraient troisgrands vitraux réalisés en 1964pour une église dont la destruc-tion en 1971 les avait forcés àrelocaliser les œuvres dans lachapelle de leur scolasticat duchemin Sainte-Foy qui fermaitmaintenant ses portes», raconteChantal Turbide, conser va-trice du musée et du patri-moine artistique de l’oratoireSaint-Joseph-du-Mont-Royal.

Au départ, elle se demandaitpourquoi ces religieux of-fraient leurs œuvres à une ins-titution montréalaise plutôtqu’à une de la région de Qué-b e c . E l l e a t o u t c o m p r i slorsqu’elle a vu les œuvres :chacune présente un jalon his-torique de la dévotion à cesaint au pays. L’une d’entreelles, titrée Centre mondial dedévotion à saint Joseph, repré-sente même l’oratoire Saint-Jo-seph-du-Mont-Royal, le plusgrand sanctuaire qui lui est dé-dié dans le monde.

« De plus, la représentationde saint Joseph dans les vitrauxa été vraisemblablement inspi-rée de la statue de la crypte del’Oratoire », explique ChantalTurbide qui s’est empresséed’accepter le don.

Une équipe de l’Oratoires’est donc rendue à Québecpour récupérer les œuvres encamionnette : elles font cha-cune 2 mètres de haut et 85centimètres de large.

Exposition sur saint Joseph

L’appel des Religieux deSaint-Vincent de Paul tombaitpar ticulièrement bien pourl’Oratoire. La conser vatricedu musée et du patrimoine ar-tistique venait tout juste deconstater qu’il lui manquaitune œuvre phare pour com-pléter l’exposition qu’elle pré-pare pour cet été sur saint Jo-seph. Ce don venait régler leproblème !

L’exposition doit ouvrir ses

portes le 28 mai et on pourradonc y découvrir, entre autresœuvres, ces trois vitraux po-sés sur des socles.

Pourrait-on voir un jour cesvitraux dans les fenêtres del’Oratoire?

«Nous avons un projet de ré-novation et, pour la prochainephase, je compte bien proposerqu’on intègre ces vitraux », in-dique Chantal Turbide, unespécialiste de l’art ancien qui aétudié à l’Université de Pro-vence, en France.

Des offres fréquentesLe musée de l’Oratoire reçoit

fréquemment des appels degens qui souhaitent faire desdons de patrimoine religieux.

« C’est vraiment une cou-tume d’ailleurs au Québec de-puis très longtemps de récupé-rer le patrimoine, comme l’au-tel, les bancs et les œuvres d’an-ciennes églises pour les remet-t r e e n v a l e u r l o r s q u ’ o nconstruit une nouvelle église ouqu’on réalise des rénovations »,explique Chantal Turbide.

L’Oratoire lui-même a ins-tallé des bancs en bois de dif-férents modèles parce qu’ils

prov iennent de quelqueséglises.

Quant à lui, le mobilier de lachapelle du frère André dansla basilique est un don desSœurs grises qui ont fermédans le centre-ville leur cha-pelle maintenant transforméeen salle de lecture par l’Uni-versité Concordia.

Mais, l’Oratoire, qui a déjàde nombreuses salles rem-plies à craquer d’œuvres et depièces du patrimoine, dontdes milliers de crèches prove-nant des quatre coins dumonde, ne peut pas accueillirtous les dons.

D’abord, parce que l’équipede l’Oratoire doit aller cher-cher l’œuvre, ce qui peut oc-casionner des coûts impor-tants selon ses dimensions etsa localisation.

En outre, accepter une œu-vre entraîne de grandes res-ponsabilités. Il faut souventcommencer par la restaureret, ensuite, pouvoir la mettreen valeur. Les trois vitrauxsont en très bon état déjà et ilsseront au cœur de la pro-chaine exposition, mais d’au-tres pièces comportent plus

de défis.Par exemple, l’Oratoire a ac-

cepté les fresques de Napo-léon Bourassa qui avaient étépeintes sur les murs de la cha-pelle de l’Institut Nazareth dé-truite pour la construction dela Place des Arts au début desannées 1960. Si deux piècesont été restaurées et sontmises en valeur dans la basi-lique, d’autres gigantesquesportions d’un mur arrondi quiavaient été découpées dans lachapelle attendent toujoursd’être restaurées et valorisées.

« Les dons acceptés engagentl’institution pour très long-temps, af firme Chantal Tur-bide, arrivée en poste en 2010.Nous devenons des gardiens dupatrimoine. »

Un enjeu de sociétéSi l’Oratoire Saint-Joseph-

du-Mont-Royal, avec ses deuxmillions de visiteurs par an-née, en fait beaucoup pourtenter de protéger et de met-tre en valeur le patrimoine re-ligieux québécois, il ne peutpas tout faire.

« Le Québec est à la croiséedes chemins actuellement parceque beaucoup d’éléments du pa-trimoine risquent d’être détruitsprochainement», affirme Chan-tal Turbide qui siège à dif fé-rents comités dans le domaineafin de trouver des solutions.

Comme conservatrice, elleconsidère que la préservationdu patrimoine religieux est unenjeu majeur au Québec.

« Il faut regarder au-delà dela question du rejet de la reli-gion dans les années 1960, af-firme-t-elle. Les communautésreligieuses ont pratiquementtout bâti au Québec, des écolesjusqu’au système de santé et desservices sociaux. Elles ont em-bauché les plus grands archi-tectes et artistes. D’ailleurs, en-core aujourd’hui, l’église estsouvent encore le plus beau bâ-timent dans les villages. C’estcomme une signature dans lepaysage. On a vu d’ailleurs cer-tains villages détruire leuréglise et ensuite, avoir l’impres-sion d’avoir perdu leur âme.»

Mais préser ver ces bâti-ments nécessite des investisse-ments. « Il faut que les dif fé-rentes parties prenantes, commeles communautés religieuses, lesdif férents ordres gouvernemen-taux, les citoyens et les associa-tions touristiques notamments’assoient ensemble pour trouverdes solutions, affirme la conser-vatrice. C’est de notre histoirequ’il est question.»

PATRIMOINE RELIGIEUX

L’oratoire Saint-Joseph récupère trois vitraux de Nincheri

DANIEL ABEL-PHOTOGRAPHE

Verrière Centre mondial de dévotion à saint Joseph

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PAR LAURIE VANHOORNE

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Les Sœurs de l’Assomption de la Sainte Vierge

«Joyeuses Pâques !Que notre foi soit lumineuse

et contagieuse.»

Bienvenue à notre Centre de Prièrewww.sasv.ca

Que le printemps de Dieuapporte un renouveau de vie

à toute personneen recherche de sens et de bonheur !

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Joyeuses Pâques !

Les Soeurs de Saint-Joseph de Saint-Hyacinthe

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DE LA LECTURE POUR L’ÂME

JÉSUS AVANT LES ÉVANGILESBart D. EhrmanNovalisMontréal, 2017, 350 pages

Par quel moyen les rédacteurs des Évangiles ont-ils pu ac-complir leur travail près d’un siècle après la mort de Jésus?Historien spécialiste du christianisme primitif et du NouveauTestament, Bart D. Ehrman s’inspire des études scientifiquescontemporaines sur la mémoire et les traditions orales pourmieux comprendre la construction — voire l’invention — deJésus comme sauveur dans cet ouvrage fascinant conçucomme une enquête policière.

ÊTRE ET DEVENIR FEMMERENCONTRES SUR QUATRE CONTINENTSMaroussia KlepNouvelle CitéParis, 2017, 171 pages

C’est l’histoire de trente femmes qui, du Brésil au Bénin enpassant par la France et le Cambodge, ont en commun d’avoirsurmonté les difficultés et, soutenues par l’association fran-çaise Claire Amitié, ont repris les rênes de leur vie, échappantau mariage forcé, à l’asservissement ou encore à la précarité.Des témoignages bouleversants recueillis par Maroussia Klepet immortalisés par l’objectif de Stefanne Prijot.

RUMEURS À L’AUBEBenoît LacroixFidesAnjou, 2015, 260 pages

Au fil des dialogues avec les penseurs de l’espérance, de sesréflexions et coups de cœur disséminés, Benoît Lacroix, dé-cédé en 2016 à l’âge de 100 ans, s’était livré et avait réaffirmésa confiance en la lumière, offrant une fenêtre sur le mondetel qu’il le percevait.

Développement et Paix célèbre ses 50 ans

R É G I N A L D H A R V E Y

Collaboration spéciale

S on directeur général depuisfévrier dernier, Serge Lan-

glois, se montre particulière-ment satisfait de constater que«Développement et Paix accom-plit un travail remarquable : ons’assure de livrer le fruit de no-tre travail à bon port pour qu’ilse retrouve dans les bonnesmains ; de la sorte, les popula-tions visées bénéficient pleine-ment de cette aide.»

Il pose ce regard sur les50 ans d’existence du mouve-ment et il en attribue les va-leurs à celles de l’Église : « Jepense que tout être humain esthabité par le mot charité, ce quisignifie faire preuve d’ouvertureenvers ceux qui en ont besoin,envers les plus pauvres. » Il rap-pelle de plus que Paul VI avaitdéclaré devant les Nationsunies que « la paix viendraitavec le développement des na-tions ». « Ces paroles résonnentencore avec justesse 50 ansaprès notre fondation en 1967.»

Il se souvient que, durantcette même année, se dérou-lait à Montréal l’Expositionu n i v e r s e l l e « T e r r e d e shommes ». « Ce fut pour nousaussi le début d’une aventureabsolument phénoménale parceque, au fil du temps, on a in-vesti 600 millions de dollarsdans une centaine de pays poursoutenir leurs populations.»

La façon de faireEn remontant le cours du

temps, il dégage une deslignes de force de Développe-ment et Paix dans ses inter-vent ions par tout dans lemonde : «On effectue notre tra-vail de cette manière : on nes’en va pas dans ces pays-làpour pêcher, mais pour aiderles gens à apprendre à pêcher. »Il en résulte que l’organismeoeuvre avec les organisationsqui sont sur le terrain. Ellesconnaissent les besoins descommunautés locales et lesréalités incontournables desmilieux de vie, fait valoir M.Langlois, ce qui leur ser t àtrouver les façons appropriéesd’agir pour concevoir et réali-ser des projets durables.

Serge Langlois appuie surl’importance de ce caractèrede durabilité tout en signalantque le volet de l’aide humani-taire internationale a véritable-ment pris de l’expansion du-rant les dernières années : «Cefut le cas lors de l’ouragan de2016 en Haïti et on le voit defaçon très actuelle avec les fa-mines en Somalie, au Nigeria,au Soudan du Sud et au Yé-men ; 20 millions de personnesrisquent de mourir de faim.»

Des besoins criants et im-menses se manifestent dans denombreux autres endroits sur

la planète, comme en Syrie, enJordanie et au Liban, là où Dé-veloppement et Paix entendporter secours : «On aurait cruqu’on serait mieux équipés pourfaire face à ce genre de situa-tions, mais on s’aperçoit que cesbesoins ont sans doute pris en-core davantage d’ampleur quepar le passé.»

Le recentrage nécessaireL’Agence canadienne de dé-

veloppement inter national(ACDI), dispar ue en 2013,coupait les vivres à Dévelop-pement et Paix, en 2012, dansla foulée d’une révision enprofondeur par le gouverne-ment Harper de la politiquecanadienne de développe-ment international.

Giglio Brunelli, directeurdu ser vice des programmesinternationaux, Développe-ment et Paix/Caritas Canada,rapporte que son organisations’est livrée à un repositionne-ment à la suite de la dispari-tion de millions de dollars :« Est-ce que le fait de recevoirmoins d’argent que prévu nousa amenés à réorganiser notretravail ? La réponse est oui. Ona dû réduire de façon impor-tante notre programmationdans plusieurs pays du mondeet aussi ef fectuer des coupeschez notre personnel. »

Cela étant clarifié, que s’est-il passé exactement ? «On a ef-fectué un repli stratégique pourm i e u x s e p r o j e t e r v e r sl’avenir. » Trois orientationsont été privilégiées pour en ar-river à atteindre cet objectif dedépar t et pour revenir enforce un jour vers des parte-naires canadiens ou internatio-

naux dans le but d’obtenir dufinancement : « Primo, on s’estconcentrés là où on était lesplus forts. Deuxièmement, nousavons établi une base de pro-grammation thématique plutôtque géographique. Troisième-ment, nous avons gardé [...]certains partenaires clés aveclesquels la relation avait étéétablie depuis longtemps ; ilssont capables de monter rapide-ment avec nous des projets im-por tants susceptibles de nousprocurer du financement addi-tionnel. » C’est en procédantde la sorte que l’organisationa réussi à obtenir de l’aide fi-nancière en s’adressant à d’au-tres guichets.

Les priorités actuellesDéveloppement et Paix s’ac-

tive à la fois à l’étranger et auCanada. Ici même, l’organisa-tion remplit un mandat d’édu-cation et de formation auprèsdu grand public par l’entre-mise d’une campagne de sensi-bilisation por tant sur « lesfemmes au cœur du développe-ment » ; celle-ci se livre aussi àdes plaidoyers auprès des au-torités pour faire valoir cer-

taines thématiques de justicesociale et de paix, qui cadrentavec sa mission.

À l’international, Développe-ment et Paix privilégie deuxdémarches majeures, commel’explique Giglio Brunelli : « Ily a le développement à longterme, qui porte sur la périodede 2016 à 2021 et qui est situéautour de quatre axes : dévelop-pement démocratique et partici-pation citoyenne, égalité entreles femmes et les hommes, jus-tice écologique, de même queconflit, paix et réconciliation. »

L’aide humanitaire en situa-tion d’urgence fait égalementpartie de la programmation etnécessite des inter ventions :« Il y a dans ce cas les guerres etles conflits qui, malheureuse-ment, se déroulent dans plu-sieurs pays du Moyen-Orient.Et il faut aussi parler de la fa-mine qui frappe plusieurs paysactuellement. » Il mentionne deplus le glissement de terrainqui a frappé la Colombie et lespluies torrentielles qui se sontabattues sur le Pérou.

Bref, encore beaucoup depain sur la planche pour Déve-loppement et Paix.

En 1967, le Concile Vatican II prenait fin ; à la suite de quoi, le pape Paul VI signait l’encyclique «Populorum Progressio». Cetexte inscrivait « le développement des peuples» dans une perspective de paix, ce qui allait inciter les évêques du Canada àmettre sur pied l’organisme Développement et Paix, il y a 50 ans. Les dirigeants de cet organisme remontent le cours dutemps pour en dégager les traits fondateurs.

CARITAS INTERNATIONALIS

Le volet de l’aide humanitaire internationale a véritablement pris de l’expansion durant les dernièresannées, entre autres au Soudan du Sud où des miliers de personnes risquent de mourir de faim.

On effectue notre travail de cette manière : on ne s’en va pasdans ces pays-là pour pêcher, mais pour aider les gens à apprendre à pêcherSerge Langlois, directeur général de Développement et Paix

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PAR LAURIE VANHOORNE

Page 7: RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7 H 7

30 avril 2017

Au-delà des murs Un regard sur la vie consacrée

Que sont devenues les communautés religieuses? Que retrouve-t-on dans un presbytère?

Qu’est-ce qu’un institut séculier? Qui est à l’origine de ces institutions?

Comment vivent ces femmes et ces hommes aujourd'hui? Où et comment vivent les hommes qui désirent devenir prêtres?

Saisissez cette chance d’aller à la rencontre

de ces personnes qui répondent «oui» à une vie consacrée à Dieu et de comprendre ce qui les motive.

Visite guidée à 13h30

Gratuit et ouvert à tous

Pour connaître les communautés participantes et leurs adresses

www.centrepri.qc.ca

Enracinées en Jésus Christ, dans l’amour et la compassion, nous osons...

Vivre l’interculturalitéAller aux périphéries

Honorer et respecter notre maison commune

CongregationDeNotreDame SoeursCND www.cnd-m.org

UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

La Faculté de théologie devient l’Institut d’études religieuses

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

«O n a pensé pendant long-temps que le fait reli-

gieux allait disparaître du pay-sage. Or, on sait très bien,lorsque l’on suit l’actualité, quela réalité religieuse est de plus enplus présente, et de plus en plusprésente dans sa complexité etdans sa diversité, note Jean-Marc Char ron, professeurexerçant les fonct ions dedoyen. On ne peut plus aborderle fait religieux uniquement dansune perspective théologique.L’Institut d’études religieuses, in-tégré à la Faculté des arts et dessciences, va permettre des colla-borations interdisciplinaires.»

La Faculté de théologie etde sciences des religions estdonc mor te, vive l ’Institutd’études religieuses ! Le dé-but d’un nouveau chapitredans la déjà longue histoirede l’établissement.

Celle-ci fait en ef fet partiedes trois facultés fondatricesde l’Université de Montréal.Elle voit le jour en 1878. Àl’époque, il s’agit d’une facultéde théologie catholique et ca-nonique avec un rattachementinstitutionnel à l’Église catho-lique et aux normes romaines,ce qui correspond à la réalitéde la société québécoise. Lesques t ions r e l ig ieuses del’époque sont en ef fet essen-tiellement liées au christia-

nisme, dans ses versions ca-tholiques et protestantes.

C’est ensuite dans les années1990 qu’elle change de nompour devenir la Faculté de théo-logie et de sciences des reli-gions encore pour quelquesjours, donc. À ce moment-là,l’étude des diverses traditionsreligieuses fait son entrée. Desspécialistes de l’islam, de l’hin-douisme et du bouddhisme ouencore du judaïsmes’ajoutent au corpsprofessoral jusque-làcomposé presque ex-clusivement d’expertsdu christianisme.

« La création del ’ I n s t i t u t , c ’ e s t l efruit naturel de l’évo-lution du travail dela Faculté, souligneM. Charron. Une fa-c u l t é , ç a n e f o n c -t ionne pas en vaseclos sans regarder cequi se passe à l’exté-rieur. La réalité religieuseq u é b é c o i s e a b e a u c o u pchangé. L’Université en prendacte en quelque sorte. »

Le professeur revient no-tamment sur l’attentat dansune mosquée de Québec, quia tué six musulmans en jan-vier dernier.

« Cet événement illustre l’ur-gence qu’il y a à développer ledialogue dans une meilleureconnaissance réciproque de nostraditions religieuses et spiri-tuelles, indique-t-il. On ne peut

pas construire le vivre-ensem-ble, assurer un vivre-ensembleharmonieux dans un contextemarqué par la diversité et lepluralisme des croyances, sansune connaissance de ces réali-tés. C’est un des aspects de lamission et de la vocation d’uninstitut comme le nôtre. »

De son point de vue, avoirune connaissance minime detoutes les religions est fonda-mental aujourd’hui pour quitravaille au sein des pouvoirspublics, mais au-delà, mêmeen entreprise.

«Nous vivons dans un mondemarqué par la mondialisation etla globalisation, analyse-t-il. Pre-nons l’exemple de gens qui vou-draient développer leur com-merce en Chine. Il faudraitqu’ils connaissent minimale-

ment les traditions spi-rituelles de l’Asie pourpouvoir se débrouiller.En Occident, on estmarqué par une tradi-tion de séparation en-tre le politique et le reli-gieux, entre la culture,la société et le religieux.On a tendance à vou-loir privatiser la ques-tion religieuse. Il fautsavoir qu’autour de laplanète, il y a beau-coup de sociétés où lereligieux n’est pas un

aspect de la culture, mais l’as-pect central, le pivot de celle-ci.Avoir une connaissance mini-male des dif férentes traditionspermet de ne pas faire d’impairet de mieux se comprendre.»

Vrai dans le milieu des af-faires donc. Vrai également surle terrain social. Ainsi, la Fa-culté de théologie, tout commele futur Institut, contribue à laformation des enseignants dusecondaire et du primaire quidonnent le cours d’éthique etde culture religieuse. Autre

exemple, depuis la fin des an-nées 2000, il n’y a plus d’aumô-niers dans les milieux de santéet ce sont donc des inter ve-nants en soins spirituels quiopèrent. Ils offrent des servicesnon confessionnels ouverts à ladiversité des parcours religieuxet spirituels des gens qui sonthospitalisés. L’Institut partici-pera à leur formation.

Au début des années 2000,Jean-Marie Charron a présidéle Comité sur les affaires reli-gieuses créé à la suite de la dé-confessionnalisation du sys-tème scolaire. Un comité ayantpour mission de conseiller leministre de l’Éducation surtoute question relative à laplace de la religion à l’école. Se-lon lui, tous les ministères de-vraient avoir un comité de cetype en leur sein afin d’êtreconseillés sur les questions dediversité religieuse, de traditionreligieuse et de vivre-ensemble.Et ce, afin que cette dimensionsoit prise en compte danstoutes les grandes décisions.

Dès la session de rentrée,l’Institut d’études religieusesproposera une offre de courstrès diversifiée. Des diplômesde premier et de second cycle,mais aussi des formationscomplémentaires susceptiblesd’intéresser des étudiants enhistoire, en sciences poli-tiques ou autres, qui souhaite-raient avoir une compréhen-sion de la réalité religieusepour mieux cerner leur sujet.L’établissement propose égale-ment un cours en ligne d’intro-duction aux traditions reli-gieuses du monde.

En ligne parce qu’il souhaitepouvoir atteindre le plus grandnombre avec cette formation.Parce que, répète son doyen,l’étude de la réalité religieuseest plus que jamais pertinenteà l’heure actuelle.

Il ne s’agit pas seulement d’un changement de nom, maisbien de statut et même de vocation. Ce nouvel Institut, quiverra le jour dès le 1er mai prochain, sera placé sous l’égidede la Faculté des ar ts et des sciences. L’occasion deconstruire des ponts avec les autres disciplines que sont l’an-thropologie, l’histoire, la philosophie ou encore les sciencespolitiques et d’appréhender ainsi le fait religieux dans toutesa complexité actuelle.

Mais où«

»se cache-t-il ?Dieu

Albin Michel Albin Michel

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SOURCE UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

La Faculté de théologie a vu le jour en 1878. Elle fait partie destrois facultés fondatrice de l’Université de Montréal avec lesfacultés de droit et de médecine.

«On ne peutplus aborderle faitreligieuxuniquementdans uneperspectivethéologique»

SOURCE FACULTÉ DE THÉOLOGIE ET DE SCIENCES DES RELIGIONS

Vue du pavillon Marguerite-d’Youville qui loge notamment la Faculté de théologie et de sciences des religions actuellement

Page 8: RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7H 8

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DE LA LECTURE POUR L’ÂME

FRANÇOIS DANS LA TEMPÊTEJean-Louis de la VaissièreSalvatorParis, 2017, 224 pages

Journaliste et vaticaniste avisé et réputé, Jean-Louis de laVaissière dresse un bilan des premières années du pontificatde François et s’intéresse aux défis de l’Église catholiqued’aujourd’hui, décryptant le message d’un pape qui, engagédans des réformes pour rapprocher l’Église de ses fidèles etfreiner sa marginalisation au sein de la société, est parfoisplus célébré hors de l’Église que dedans.

LA PAROLE AU CŒUR DU CORPS ENTRETIENS AVEC JEAN MOUTTAPAAnnick de SouzenelleAlbin Michel, collection « Espaces libres »Paris, 2017, 260 pages

Réédition d’un dialogue éclairant entre Jean Moutappa etAnnick de Souzenelle qui, à travers les mathématiques su-périeures, l’étude approfondie de l’hébreu biblique et dessciences humaines, la profession d’infirmière et l’exercicede la psychothérapie et de l’enseignement, éclaire nos in-terrogations les plus cruciales autour du sens de l’huma-nité : l’amour, le « mal », le corps et la souffrance, la mort etl’espérance.

PLUS TARD, JE SERAI UN ENFANT ENTRETIENS AVEC CATHERINE LALANNEÉric-Emmanuel SchmittNovalis, collection « L’atelier de l’enfance »Montréal, 2017, 176 pages

Auteur de nombreux romans à succès, Éric-EmmanuelSchmitt ouvre une fenêtre exceptionnelle sur son intimité. Enentretien avec la journaliste Catherine Lalanne, à laquelle ilconfie ses souvenirs d’enfance, l’homme aux multiples talentsretourne aux sources de ses différentes vocations — écri-vain, musicien, homme de théâtre — et se révèle sous unjour inédit. Un ouvrage qui ravira ses plus fidèles lecteurs.

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Collaboration spéciale

D epuis l’abandon progres-sif de la pratique reli-

gieuse à par tir des années1960, le rapport au religieuxdes Québécois a beaucoupévolué. La pratique religieusedes Québécois s’est transfor-mée en diverses formes despiritualité (ex. : yoga, médita-tion) et la présence accrue descommunautés culturelles, quiont adopté le Québec avec leurbagage de croyances, a enri-chi notre dimension multicon-f e s s i o n n e l l e . L e C e n t r ed’études du religieux contem-porain (CERC) de l’Universitéde Sherbrooke a voulu reflétercette réalité en créant une maî-trise sur le religieux contem-porain, il y a plusieurs annéeset en inaugurant, à compter del ’hiver 2018, le micropro-gramme de 1er cycle en étudesreligieuses.

Ces formations visent à four-nir un bagage aux profession-nels qui travaillent avec despersonnes issues de diversesconfessions. Puisque chaquereligion a ses pratiques, sescroyances, ses valeurs, sesrestrictions alimentaires oua u t r e s , l e s p r o g r a m m e sd ’é tudes pr oposés par leCERC permettent d’outiller lesintervenants sur ces diversesformes de spiritualité.

Le microgramme en études religieuses

Parmi les deux programmesd’études, il y a le micropro-gramme. « Il comporte quatrecours, il est conçu pour être faità distance, car il vise à of frirdes formations au plus grandnombre de professionnels occu-pés le jour, explique DavidKoussens, professeur agrégé àl’Université de Sherbrooke ettitulaire du CERC. Les pre-miers ciblés par ce cours sontles enseignants en éthique etculture religieuse puis les tra-vailleurs sociaux et les travail-leuses sociales, les profession-nels du secteur de la santé [ex. :infirmières, préposés aux bé-néficiaires] qui côtoient quoti-diennement des gens de diversesconfessions. »

L e p r o g r a m m e e s t n o ncontingenté et of fert en touttemps aux Québécois detoutes les régions. L’étudiantpourra suivre les cours à sonrythme, le soir après le travailou les fins de semaine. «Les in-teractions avec le professeursont encore à définir, mais ellespourront se faire soit par vidéo-conférence, par téléphone ou au-tres moyens, souligne M. Kous-sens. Ce sera à chaque profes-seur de voir comment il livrerases contenus.»

Au terme du programme,l’étudiant aura un bon aperçude tous les systèmes decroyances présents sur la pla-nète. Par exemple, le coursappelé Introduction à l’étudecomparée des religions per-mettra, comme son nom l’in-dique, à l’étudiant de s’initieraux religions dans une pers-pective comparatiste. Dans unpremier temps, on y fera unrelevé des principales reli-gions existantes avec leur dis-tribution géographique, leurpoids démographique, écono-mique et politique et leur in-fluence sur les autres confes-sions. L’étape suivante consis-

tera à faire une analyse com-parative en fonction de plu-s i e u r s p a r a m è t r e s ( e x . :organisation, systèmes decroyances, doctrine).

Un autre cours, intitulé Ré-ception et interprétation destextes sacrés, fera un tourd’horizon des textes sacrésdes grandes traditions reli-gieuses (ex. : le TaNaKh juif,la Bible chrétienne, le Coran).«On examinera aussi commentces textes sont interprétés no-tamment par les fondamenta-listes et les autres courants reli-gieux», ajoute M. Koussens.

Un cours, appelé Présenceet absence de Dieu, traiterap l u s s p é c i f i q u e m e n t d el’athéisme. On y traitera, entreautres choses, des réflexionsthéologiques sur la tension en-

tre la présence et l’absence deDieu aujourd’hui.

La maîtrise sur lereligieux contemporain

L’autre programme d’étudesproposé par le CERC est plusmajeur. Il s’agit de la maîtrisesur le religieux contemporain,qui compte 45 crédits et estdispensée dans les campus del’Université de Sherbrooke, àSherbrooke et à Longueuil.Elle peut aussi être suivie àdistance. Selon David Kous-sens, la maîtrise vise deuxprincipaux objectifs. «D’abord,initier les étudiants à la re-cherche fondamentale sur les

enjeux du reli-gieux contem-porain afin def o r m e r d e schercheurs etdonner des ou-tils à des pro-f e s s i o n n e l sp o u r q u ’ i l s

puissent mieux composer avecle religieux contemporain. »

La maîtrise permet troischeminements : un chemine-ment de type recherche, unavec un projet de fin d’étudeset un dernier avec stage ens o i n s s p i r i t u e l s . S e l o nM. Koussens, ce dernier che-minement est le plus popu-laire. Il consiste à accompa-gner les patients dans les der-niers jours de leur vie. Cet ac-compagnement peut se fairedans les hôpitaux, les centresde soins palliatifs, les CHSLDet les centres carcéraux. Lestage que l’étudiant sera ap-pelé à faire pour obtenir sondiplôme aura aussi lieu dansl’un de ces milieux.

Le processus d’admissionaux stages en soins spirituels

est très rigoureux. L’étudiantdevra avoir réussi une entrevuede sélection ainsi que deuxcours préalables. La popularitéde ce cheminement est-elle dueà la récente loi concernant lessoins de fin de vie ? M. Kous-sens ne le croit pas, car l’appli-cation de la loi est trop récente,selon lui, ce cheminement étaitdéjà populaire avant l’adoptionde cette législation.

Pour adhérer à cette maî-trise, l’étudiant doit toutefoisavoir fait des études de pre-mier cycle en études reli-gieuses ou en théologie ou ensciences humaines avec unemineure en études religieuses.Il peut aussi avoir une forma-tion de 1er cycle autre que desétudes religieuses ou être unprofessionnel qui a un grandintérêt pour les questions reli-gieuses. «Dans ce cas, il devrafaire une propédeutique, qui esten fait le microprogramme de1er cycle en études religieuses »,précise M. Koussens.

Dans le cadre de ce pro-gramme, différents sujets liésau religieux sont abordés. Il ysera question, par exemple, dela naissance du christianisme,de la philosophie du religieuxcontemporain, des fondamenta-lismes contemporains, des spi-ritualités féministes et de sesenjeux modernes, des religionset de l’environnement, du plu-ralisme religieux et des nou-veaux mouvements religieux.

Armés d’un tel bagage deconnaissances, les diplômésde ce programme d’études(et dans une moindre me-sure, les diplômés du micro-programme) seront bien ou-tillés et en mesure de bien in-tervenir auprès de gens de di-verses confessions.

UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

Des programmes adaptés à la spiritualité d’aujourd’hui

SOURCE UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

David Koussens, professeur agrégé à l’Université de Sherbrooke et titulaire du Centre d’études dureligieux contemporain (CERC) de l’Université de Sherbrooke, lors d’un cours

Ces formations visent à fournir un bagage aux professionnels qui travaillent avec des personnes issuesde diverses confessions

PAR LAURIE VANHOORNE

Page 9: RELIGION...«Lors de la veillée pascale, le samedi saint, poursuit Mgr Lé-pine, nous revenons sur la Ge-nèse qui est le récit de la Créa-tion. Et dans la Genèse, l’on ap-prend

RELIGIONL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 5 E T D I M A N C H E 1 6 A V R I L 2 0 1 7 H 9

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« À l ’époque où j ’ai étéformé comme prêtre,

entre 1978 et 1984, on insis-tait beaucoup pour dire que leprêtre était le ministre des sa-crements, qu’il était là surtoutpour administrer l’eucharistieet le sacrement du pardon.Mais aujourd’hui, ce que lesgens recherchent, ce ne sontpas des “faiseux de messes”,mais des maîtres spirituels. Ondoit donc former des disciplesmissionnaires. »

Voilà le constat que dresseGuy Guindon, prêtre de Saint-Sulpice et directeur du Dépar-tement de pastorale à l’Institutde formation théologique deMontréal. L’équipe qu’il dirigeforme actuellement 18 sémina-ristes au Grand Séminaire deMontréal, r ue Sherbrooke(entre Guy et Atwater).

« Depuis que je suis prêtre,nous en sommes rendus à lacinquième transformation pas-torale, mais les gens ne réali-sent pas que l’Église se trans-forme continuellement, ajoute-t-il avec un brin d’exaspérationdans la voix. L’Église est entrain de développer un nouveaumodèle de dialogue avec une so-ciété qui est souvent anticléri-cale et anticatholique ! »

Pour avoir été curé durantvingt ans, notamment dans lediocèse de Saint-Jérôme et àTerrebonne, Guy Guindon aconstaté que les fidèles sontdésormais engagés dans unerecherche spirituelle qui n’estpas nécessairement centréesur l’Église. « Comme prêtre,on a donc à entrer en dialogueavec ces gens-là et aussi à dé-faire tous les préjugés véhiculéscontre l’Église», précise-t-il.

De surcroît, les assisesmêmes de l’Église changentvite, rappor te-t-il. Ainsi, àl’époque où il était jeune vi-caire, M. Guindon a participéà la fondation d’une paroisse.« Mais quelques années plustard, j’ai dû la fusionner », dit-il. Il a depuis dû procéder àdes regroupements de pa-

roisses dans la région deSaint-Jérôme (Saint-Antoinedes Laur ent ides) , pu is àSainte-Thérèse de Blainville.Et depuis 2007, il s’occupe dela formation des prêtres auGrand Séminaire de Montréal.

Sept années de formationIl faut sept années d’études

pour former un prêtre, relatele directeur du Départementde pastorale. Les séminaristesaccumulent ainsi l’équivalentde trois formations universi-taires : d’abord, ils font une ma-jeure en philosophie de deuxans à étudier les dif férentscourants philosophiques quianiment notre société, puis, un

baccalauréat en théologie detrois années et enfin, une maî-trise en pastorale profession-nelle de deux ans.

« Durant la formation spiri-tuelle, nous leur apprenons àprier et à méditer, expliqueGuy Guindon. On appelle celal’initiation à la méditation parla technique de l’oraison. »

On lit un passage de l’Évan-gile, explique le prêtre, on in-vite la personne à s’imaginer lascène, puis à entrer dans lascène, comme si elle y étaitafin, au bout du compte, deréaliser les qualités de Jésusdans la vie quotidienne.

«Nous formons nos candidatsà entrer en contact avec Jésus-

Christ et à développer un dia-logue avec Dieu afin d’être en-suite capable de le montrer auxautres », résume M. Guindon.

La formation à la prêtrisecomporte également un volet« dimension humaine », oùles séminaristes discutent dethèmes comme développer laconfiance en soi ainsi quecomment entrer en relationavec les autres et établir desrelations égalitaires « autantavec les hommes qu’avec lesf e m m e s , d ’ i n d i q u e r G u yGuindon. On insis te beau-coup sur la dimension de re-l a t i o n é g a l i t a i r e d i t - i l ,puisque le prêtre doit être unleader qui travaille en équipe

avec tout le monde ».Un autre volet de la forma-

tion des prêtres est la dimen-s ion pastora le . « Nos é tu -diants ne font pas que suivreune formation intellectuelle,ils ont aussi une formationsur le terrain. On les envoieainsi dans dif férentes commu-nautés et dans dif férentes pa-roisses où ils ont des objectifsprécis à atteindre », expliquele responsable de la forma-tion des futurs prêtres.

Dans une Église en évolution

La moitié des prêtres qui en-seignent au Grand Séminairede Montréal sont toujours très

actifs sur le terrain, relate leresponsable de la formation.Ainsi, l’un d’eux travaille auxsoins palliatifs alors que d’au-tres sont des curés de pa-roisse. « On se retrouve doncavec des enseignants qui sontau fait de la vie actuelle », in-dique M. Guindon.

«Par conséquent, nous prépa-rons nos futurs prêtres aux défisqui les attendent, poursuit-il.Ainsi, on les prépare à évangé-l i s e r dans l e monde d ’au -jourd’hui. Notre défi : annoncerJésus-Christ dans la sociétécontemporaine ! »

Quant aux 18 séminaristesactuellement en formation,Guy Guindon précise qu’ilssont d’origine très variée. Lamoyenne d’âge des sémina-ristes avoisine les 35 ans, dit-il.«On peut avoir autant un gar-çon de 20 ans qu’un homme de55 ans, dit-il. Ce sont des céliba-taires, bien que certains aientdéjà eu des enfants. Et 40% denos séminaristes sont nés à l’ex-térieur du pays. »

« On se retrouve donc avecune pluralité de chemine-ments, poursuit le prêtre for-mateur. On peut aussi bienavoir un jeune qui vient d’unefamille catholique et impliquédans la vie paroissiale quequelqu’un qui a mené une car-rière professionnelle. On ad’ailleurs deux séminaristesqui possèdent des doctorats,l’un en mathématiques et l’au-tre en pharmacie… »

« Vous voyez bien que nos sé-minaristes constituent bien unmicrocosme du Montréal d’au-jourd’hui ! » lance joyeusementGuy Guindon.

Ces futurs prêtres n’aurontpas pour mission d’adminis-trer des sacrements ni de me-n e r à b i e n l e s r i t u e l s d el’Église, ajoute M. Guidon,mais bien davantage d’« an-noncer le message de Jésus-Christ. Nos prêtres doivent de-venir des formateurs de per-sonnes. Ils doivent former lesleaders et ça, c’est vraiment legrand changement d’orienta-tion pour l’Église, une Églisesans cesse en évolution».

Formation des prêtres dans une Église en évolution

YAN DOUBLET LE DEVOIR

Il faut sept années d’études pour former un prêtre. Les séminaristes accumulent ainsi l’équivalent de trois formations universitaires :d’abord, ils font une majeure en philosophie de deux ans à étudier les dif férents courants philosophiques qui animent notre société,puis, un baccalauréat en théologie de trois années et enfin, une maîtrise en pastorale professionnelle de deux ans.

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AU CŒUR DES ENJEUX SPIRITUELS DE NOTRE TEMPS

CONGRÈS MISSIONNAIRE DE L’AMÉRIQUE

En route vers le Congrès 2018

É M I L I E C O R R I V E A U

Collaboration spéciale

T enu environ tous les quatre ans, le CAMest un congrès organisé par les OPM

d’Amérique. Son objectif est triple : réunir descroyants — qu’ils soient laïques ou religieux —engagés dans la Mission, discuter des enjeux etdes défis relatifs à cette dernière et mettre enlumière les valeurs missionnaires.

«C’est d’abord un rassemblement pour toutes lespersonnes qui souhaitent célébrer la mission, in-dique M. Sierra. Mais c’est aussi un lieu de for-mation, parce qu’on y tient des conférences, des fo-rums et des ateliers. C’est un peu comme les Jour-nées mondiales de la jeunesse, sauf que le contexteest missionnaire. Il y a des gens de tous âges qui yparticipent. En Amérique du Sud, les jeunes sontsensibilisés très tôt à la mission, donc il y en abeaucoup qui prennent part au Congrès.»

À chaque édition du CAM, un thème et unslogan sont choisis par les directeurs nationauxdes OPM d’Amérique en collaboration avecl’épiscopat du pays où est tenu l’événement.Pour ce cinquième congrès, ils ont opté pourun thème inspiré de l’exhortation apostoliquedu pape François Evangelii Gaudium, soit Lajoie de l’Évangile : cœur de la mission prophé-tique, source de réconciliation et de commu-nion. Dans le même esprit, ils ont adopté le slo-gan Amérique en mission, l’Évangile est joie !

Un symbole a aussi été défini pour représen-ter l’édition 2018 du CAM: la Croix de l’Évangé-lisation. Contenant les reliques de la bienheu-reuse Nazaria Ignacia March Mesa, laquelle futla première personne à fonder une commu-nauté missionnaire en Bolivie, cette dernièreest faite de bois et n’est pas surmontée d’un cor-pus. Elle reproduit la croix originelle que les Jé-suites ont plantée au XVIIe siècle à San Javier, unpetit village situé dans la région de Chiquitos,dans le département de Santa Cruz.

Une quarantaine de répliques ont été confec-tionnées par des artisans locaux afin de permet-tre aux 18 diocèses boliviens et aux 22 paysd’Amérique qui participeront au prochain CAM

d’en obtenir une. Ces dernières ont toutes étébénies par le pape François le 9 juillet 2015 lorsde son passage en Bolivie. Le tout a eu lieu de-vant plus d’un million de personnes lors d’unemesse présidée par le Saint-Père.

«C’est ce qui a marqué of ficiellement le débutdu parcours vers le CAM», résume M. Sierra.

En voyage au CanadaDepuis, les 40 Croix de l’Évangélisation ont

parcour u beaucoup de chemin ; elles sonttoutes parties en pèlerinage dans les diocèsesdes différents pays d’Amérique.

Celle qui était destinée au Canada a été offi-ciellement accueillie au pays le 27 octobre2015 lors du Conseil national des OPM au Ca-nada francophone. Elle a ensuite passéquelques mois au bureau montréalais de l’orga-nisation. Puis, en septembre 2016, elle a en-tamé sa tournée des diocèses francophones ca-nadiens. C’est la Mission catholique latino-amé-ricaine (Notre-Dame-de-Guadaloupe) de l’ar-chidiocèse de Montréal qui a eu la joie d’amor-cer ce grand pèlerinage.

« Les gens de la communauté latino-améri-caine étaient vraiment très émus d’être les pre-miers à accueillir cette croix bénie par le pape»,souligne M. Sierra.

La croix a ensuite poursuivi sa tournée dansl’archidiocèse de Montréal, faisant son passagedans divers milieux, notamment à l’oratoireSaint-Joseph, où elle a été exposée pendanttrois jours.

Puis, elle a entamé sa route vers d’autres dio-cèses québécois. Elle s’est arrêtée à Saint-Jean-Longueuil, Saint-Hyacinthe, Sherbrooke, Nico-let, Québec et Sainte-Anne-de-la-Pocatière.

«Partout où la croix est passée, les gens se sontmontrés très émus, commente M. Sierra. Lesréactions étaient variées. Certaines personnesn’ont fait que s’approcher de la croix, d’autressont allées la baiser ou la toucher du bout desdoigts. Certains se sont inclinés, ont pleuré, prié.Il y en a aussi beaucoup qui ont utilisé leur télé-phone pour prendre un selfie avec elle ! Ilsétaient fiers que cette croix bénie par le pape se

retrouve chez eux. »Loin d’être terminé, le pèlerinage canadien

de la Croix de l’Évangélisation prendra fin enseptembre 2019, soit plus d’un an après la te-nue du CAM en Bolivie. Au cours de l’été 2017,elle s’arrêtera notamment dans les Maritimes,puis elle reprendra son parcours en sol québé-cois. Elle y restera plusieurs mois avant deprendre la route de l’Ontario.

Un parcours documentéDésirant documenter le parcours de la

Croix de l’Évangélisation en sol canadien ainsique les préparatifs du CAM, les OPM du Ca-nada se sont associées à l’équipe de TélévisionSel + Lumière pour concocter un documen-taire sur le sujet. Ce dernier illustrera tout cequi a précédé la tenue du Congrès, ainsi quel’événement lui-même. On pourra non seule-

ment y suivre les membres de la délégation ca-nadienne qui prendront par t au CAM, maiségalement de nombreux protagonistes ayantparticipé de près ou de loin à la préparation dece dernier.

« Depuis la bénédiction des croix par le pape,nous avons recueilli de nombreux témoignages,relate M. Sierra. Par exemple, en Bolivie, on aobtenu le témoignage du maître ébéniste quitravaillait dans l’atelier où on a construit lescroix. Il était très ému ; il avait presque leslarmes aux yeux. Il était aussi très fier d’avoirtravaillé sur ces croix qui iraient jusqu’au Ca-nada ! À Québec, nous avons discuté avec unefemme qui était chargée de transporter la croixdans sa voiture. Ce qu’elle avait à dire étaitvraiment touchant. »

La dif fusion du documentaire est prévuepour octobre 2018, soit le mois de la Mission.

Du 10 au 14 juillet 2018, la ville de Santa Cruz de la Sierra, qui est située au sud-est de la Bo-livie, accueillera la cinquième édition du Congrès missionnaire de l’Amérique (CAM). De trèsgrande envergure, celui-ci réunira près de 10 000 croyants. Pour discuter de cet événementmajeur, Le Devoir s’est entretenu avec M. José Sierra, chargé des communications pour lesŒuvres pontificales missionnaires (OPM) du Canada et rédacteur en chef de la revue Univers.

OPM CANADA JOSÉ I. SIERRA

Les premiers à avoir accueilli la Croix de l’Évangélisation au Canada sont les paroissiens de Notre-Dame-de-Guadalupe (Mission latino-américaine), dans l’archidiocèse de Montréal, en septembre 2016.