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« Quand les RH s’en mêlent… ». Du sociétaire au salarié- entrepreneur : une redéfinition de la citoyenneté coopérative. Auteur(s) : Kevin PASTIER 1,2 & François SILVA 1,2 Affiliation(s) : 1 ICD Business School – LaRA 2 Conservatoire National des Arts et Métiers – DICEN-IDF Coordonnées : [email protected] [email protected]

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« Quand les RH s’en mêlent… ». Du sociétaire au salarié-entrepreneur : une redéfinition de la citoyenneté coopérative.

Auteur(s) : Kevin PASTIER1,2 & François SILVA1,2 Affiliation(s) : 1 ICD Business School – LaRA 2 Conservatoire National des Arts et Métiers – DICEN-IDF Coordonnées : [email protected] [email protected]

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« QUAND LES RH S’EN MELENT… ». DU SOCIETAIRE AU SALARIE-ENTREPRENEUR : UNE REDEFINITION DE LA CITOYENNETE COOPERATIVE.

Résumé

Cette communication propose d’interroger une transformation managériale au sein d’une SCOP en s’intéressant tout particulièrement à la figure de la citoyenneté coopérative et à sa transformation vers celle du salarié-entrepreneur. Suite à une intégration de 14 mois au sein d’une grande SCOP française, nous mettons en évidence quatre identités citoyennes idéales-typiques : l’identité d’indifférence, l’identité de désillusion, l’identité tourmentée et l’identité de ralliement. Nous soulignons ici, en utilisant la théorie de la reconnaissance, le rôle et la place du changement de sémantique dans la fragilisation de l’identité citoyenne et donc, in fine, dans un processus de dégénérescence.

Mots-clefs

SCOP – démocratie – management – reconnaissance – citoyenneté

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« QUAND LES RH S’EN MELENT… ». DU SOCIETAIRE AU SALARIE-ENTREPRENEUR : UNE REDEFINITION DE LA CITOYENNETE COOPERATIVE.

« Quand les RH s’en mêlent voilà ce que ça donne. On nous parle d’entrepreneur-salarié… La coopérative, le sociétariat … Tout ça, on l’oublie petit à petit. Ça devient un jouet pour la RH. »

Les entreprises de l’économie sociale et solidaire (EESS) font leur retour sur la scène économique et politique depuis maintenant plus d’une décennie. Réponses sociale, politique et environnementale, elles participent à un mouvement plus général de politisation des entreprises, certaines revendiquant des « comportements de citoyenneté organisationnelle » (Paillé, 2008; Gomez & Korine, 2009; Ben Lahouel et al., 2015). Une récente critique du capitalisme se forme avec une nouvelle préoccupation pour la démocratie économique ; de nouvelles réflexions sont développées tant au niveau pratique que théorique (Ferreras, 2012; Cukier, 2018; Supiot, 2018a; Brière & Le Texier, 2018). Or, la majorité des formes de politisation contemporaines des entreprises relèvent d’avantage d’une prise en compte des enjeux sociaux et sociétaux sous forme de responsabilité sociale d’entreprise (RSE) que d’une démocratisation de leur fonctionnement interne et d’une politisation de leur organisation du travail et/ou de leur gouvernance. A contrario, les EESS, en particulier les coopératives de travail (SCOP), offrent un existant, une « utopie réelle » (Wright, 2017), pour penser une politisation de l’entreprise et une citoyenneté économique inscrite dans un social-historique ouvrier et démocratique (voir Castoriadis, 2012) :

« Au plein sens du terme – celui d’une assemblée de citoyens placés sur un pied d’égalité pour délibérer de leur bien commun – la démocratie économique n’est guère envisageable que dans le cadre d’entreprises coopératives, dont les travailleurs sont aussi les associés. À cette exception près, on ne peut sans abus de langage voir dans le personnel de l’entreprise l’équivalent du demos, le peuple souverain. » (Supiot, 2018b, p. 60)

Au sein de ces entreprises, les salariés-sociétaires se reconnaissent mutuellement et sont reconnus institutionnellement comme membres à part entière de la communauté productive : ils sont citoyens de la coopérative. Les coopératives de travail (SCOP) prennent la « forme de dynamiques associatives inédites œuvrant pour la conquête des droits comme pour l’émergence d’institutions fondées sur l’égalité » (Laville, 2001, p. 43). Le mouvement coopératif s’inscrit ainsi dans une lutte pour la reconnaissance (Honneth, 2015a) d’une citoyenneté économique :

« L’application du principe de démocratie incarne donc la société à venir pour laquelle se bat le mouvement ouvrier. Il constitue également l’occasion d’effectuer un travail d’éducation réellement populaire par la pratique, puisque l’ensemble des décisions relatives à une entreprise coopérative sont prises par les membres eux-mêmes (les coopérateurs), dans un processus d’émancipation collective des travailleurs. L’utilisation du terme « citoyen » dans les correspondances et les documents internes des coopératives, et non « camarade », souligne aussi cet aspect (en plus de faire référence à la Révolution française). » (Dohet, 2018, pp. 34–35)

Or, certaines nouvelles « modes managériales » (Midler, 1986) ne peuvent-elle pas s’approprier cette sémantique démocratique ? La question reste ouverte alors même que des pratiques participatives, collaboratives, libérées, etc. sont aujourd’hui au centre du projet de gestion des ressources humaines (GRH) pour continuer à mobiliser et à utiliser « des individus en vue d’atteindre les objectifs de l’organisation » (Mondy, 2010, p. 4), dont le paradigme majoritaire de la GRH reste restreint à une simple rationalité instrumentale (Brabet, 1993). La fonction des ressources humaines (FRH) devient en effet le lieu d’une expertise managériale, considérée

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comme la fonction la mieux à même de comprendre, de concevoir et de mettre en place les actions sociales et humaines qui déterminent le sort de l’entreprise. Elle semble cependant « avoir renoncé à toute réflexion quant aux conditions d’utilisation acceptable de la ressource humaine qui ne soit pas guidée par un risque pour la performance organisationnelle » (Dany, 2009, pp. 314–315).

Dans le cadre de notre réflexion sur une citoyenneté économique, le paradigme dominant de la GRH semble ainsi aller en opposition aux principes et aux pratiques coopératifs. Comment peut-elle dès lors reconnaitre pleinement une citoyenneté économique ? Cette communication cherche en outre à étudier cette tension. Quelle inclusion et quelle appropriation existe-t-il de la démocratie au sein de la pratique GRH en SCOP ? Que devient la citoyenneté coopérative ? Il s’agit ici, dans une approche critique (Golsorkhi & Huault, 2006; Golsorkhi et al., 2009) et dans la continuité des travaux effectués sur les SCOP et plus largement sur l’économie sociale et solidaire (ESS) (Partie 1), d’analyser les ressorts et les conséquences d’une appropriation managériale des principes et du fonctionnement démocratiques au sein d’une SCOP, en analysant tout particulièrement le rôle et la place d’une citoyenneté coopérative. Nous soulignons ensuite dans quelle mesure et dans quelle optique la reconnaissance est aujourd’hui devenue un instrument de GRH pour mobiliser et diriger les salariés (Partie 2). A la suite, en utilisant les travaux sur les identités professionnelles (Sainseaulieu, 1977; Dubar, 1991; Durand, 2017) , notamment ceux de Jean-Pierre Durand, nous mettons en évidence les conséquences et les réactions identitaires de la citoyenneté coopérative à une reconnaissance managériale (Partie 3). Ces éléments seront enfin lus à la lumière de la théorie de la reconnaissance, développée initialement par Axel Honneth (2006, 2015a, 2015b), approfondie par d’autres (Fraser, 2004; Renault, 2004; Voirol, 2006; Voswinkel et al., 2007). Nous mettons en évidence le passage de la figure traditionnelle du salarié-sociétaire à celle de salarié-entrepreneur comme nouvelle forme managériale de reconnaissance institutionnelle et mutuelle de la citoyenneté coopérative et comme cause d’une fragilisation de la citoyenneté coopérative (Partie 4).

1. Les SCOP : utopie organisationnelle ou « nouvelle hypocrisie managériale » ?

La dynamique historique du mouvement coopératif a toujours résulté d’une articulation entre théorie et praxis (Draperi, 2003). Si par cette association l’économie sociale, et spécifiquement le mouvement coopératif, a souligné son caractère alternatif, les relations dialectiques entre théorie et pratique créent un fossé entre le discours et le réel. De fait la notion même d’entreprise démocratique, et donc in extenso, de celle de citoyenneté, ne renvoie pas en un modèle établit et institué mais en un projet de concrétisation qu’il reste encore à inventer (Gand & Segrestin, 2009). Le mouvement coopératif est ainsi non pas un institué figé dans le temps mais un mouvement instituant alternatif : « L’économie sociale s’est d’abord pensée comme un mouvement alternatif. Des associations ouvrières de production jusqu’à la grande utopie de la république coopérative de Charles Gide, l’économie sociale ambitionne de résister à l’essor du capitalisme, de le dépasser et de le faire disparaître » (Draperi, 2003, p. 18). Comment peut-on alors faire des principes démocratiques une réalité organisationnelle ? La littérature met en exergue la difficulté de transposer l’utopie à la pratique organisationnelle. Ainsi, Paranque et Willmott (2014) mettent en évidence que les coopératives, en l’occurrence John Lewis Partnership, ne sont pas catégoriquement des formes émancipatoires et alternatives mais constituent une forme atténuée du projet capitaliste. L’entreprise tend à infantiliser ses coopérateurs pour en faire des participants passifs envers la structure managériale. Le même

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phénomène se retrouve dans le cas de Mondragon dont le modèle fait partie intégrante du discours capitaliste (Kasmir, 1996) qui cherche à légitimer des pratiques managériales postfordistes (Gibson-Graham, 2003). Ainsi, si la SCOP propose un modèle qui peut paraitre idéal, une « belle vitrine », elle peut aussi devenir un outil de manipulation, une « hypocrisie managériale » (Pasquet & Liarte, 2012). La coopérative n’est alors plus un outil de gouvernance démocratique au service de son sociétariat mais un moyen d’encadrement et de contrôle (Richez-Battesti & Gianfaldoni, 2006) au risque de ne pas respecter le contrat psychologique propre à ce type d’entreprise (Duport, 2009). Comment prendre en compte cette singularité démocratique ?

La GRH semble être un moyen privilégié : « Alors que le secteur capitaliste privilégie la rémunération du capital financier (rétribution des investisseurs principalement) et le développement du capital technique (nouveaux équipements), les organisations d’économie sociale privilégient le développement du capital humain. Par conséquent, elles sont amenées à développer des pratiques de GRH qui traduisent concrètement cette valeur de primauté du travail » (Davister, 2006, p. 13). Certains ont souligné les capacités d’appropriation de la GRH des valeurs coopératives (Everaere, 2011; Juban, 2015; Juban et al., 2015; Jaumier et al., 2018). Inversement, d’autres ont mis en évidence le risque de détournement de la démocratie coopérative par les principes et les dispositifs de la GRH (Bretos et al., 2018; Valéau, 2013). Comment dès lors reconnait-elle et valorise-t-elle le coopérateur en tant que salarié et sociétaire ?

2. GRH : identité instrumentalisée, identité réifiée ?

2.1. La reconnaissance stratégique : levier de la GRH La théorie de la reconnaissance, nous offre ici un outil adapté pour comprendre l’évolution de la pensée et des pratiques gestionnaires car les entreprises, en tant qu’institution, non seulement expriment des rapports de reconnaissance (ou de non-reconnaissance) mais les produisent (Renault, 2004). Stephan Voswinkel (2007) montre ainsi comment le « nouvel esprit du capitalisme » (Boltanski & Chiapello, 1999) s’est construit sur une modification de la reconnaissance institutionnelle des travailleurs : là où l’organisation du travail fordiste n’octroyait qu’une rare reconnaissance verticale, l’organisation post-fordiste, suivant le modèle du capital humain de la GRH naissante, tend à valoriser l'engagement, la mobilisation des « collaborateurs » au service d'un projet commun : l’entreprise. Le travailleur se voit offrir par cette dernière une opportunité pour trouver le sens de sa vie et devient le centre d’une nouvelle configuration humaniste de l’organisation du travail (Linhart, 2015).

En exprimant positivement leur valeur de travailleur, la « critique artiste » (Chiapello, 1998), intégrée dans l’organisation managériale du travail, a « pour propriété d’exprimer positivement la valeur d’un sujet ou d’un groupe social ; [qui offre] la possibilité aux individus de se rapporter à eux-mêmes de manière affirmative, et d’être ainsi encouragés à assumer certaines tâches de leur plein gré » (Honneth, 2006, p. 262). Or, cette rationalité managériale peut être pensée comme mépris car allant à l’encontre de toute parité de participation (Fraser, 2004). Le gouvernement des hommes (sur lequel doit logiquement se construire le régime coopératif) est progressivement substitué par une « gouvernance par les nombres » (Supiot, 2015) qui « valorise une conception gestionnaire de la politique » (Gaulejac, 2009, p. 11). Le salarié reste un homo managerialis « un instrument de travail qu’il convient d’arranger, de contrôler et d’optimiser rationnellement […]. » (Le Texier, 2016, p. 14). Elle crée une « idéologie de la reconnaissance » (Honneth, 2006).

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Les principes néomanagériaux peuvent dès lors constituer un processus de réification et de négation de la capacité des travailleurs à être citoyen de leur entreprise car « c’est du côté des directions que se trouvent les véritables compétences, la capacité à décider ; ce sont eux les véritables acteurs du système » (Linhart, 2015, pp. 44–45). La direction, par la GRH, feint de reconnaitre l’autonomie, la responsabilité et la liberté des travailleurs pour mieux les contrôler et les faire adhérer au projet d’entreprise : « les conditions réelles et institutionnelles ne comblent pas les promesses faites par les énoncés valorisants à l’adresse des destinataires » (Voirol, 2006, p. 29) : la GRH n’est ainsi pas sans conséquence sur les individus.

2.2. Une (dé-)construction identitaire ?

Les processus de reconnaissance et la construction identitaire sont inséparables : « la formation de l’identité individuelle s’accomplit au rythme de l’intériorisation des réactions adéquates, socialement standardisées, à l’exigence de reconnaissance auxquelles le sujet est exposé » (Honneth, 2004, p. 134). La sociologie du travail (Dubar, 1991; Sainseaulieu, 1977) a depuis longtemps identifié cette construction relationnelle de l’identité de travail par la reconnaissance mutuelle et institutionnelle.

Parallèlement à l’émergence de l’actuelle idéologie managériale, Jean Pierre Durand a actualisé les typologies de R. Sainseaulieu et de C. Dubar. En effet, « les voies d’obtention des ressources escomptées ne sont plus les mêmes : les solutions collectives ont été largement battue en brèche par les issues individuelles » (Durand, 2017, p. 78), la construction identitaire s’est donc largement transformée. En y ajoutant une dimension dynamique, il propose une nouvelle typologie idéale-typique d’« identités fracturées ». Les travailleurs se construisent comme des sujets clivés et perdus entre leurs aspirations personnelles et professionnelles et un environnement de contraintes managériales. Ils doivent ainsi « s’ajuster à cette disjonction du social entre attentes-promesses et désillusions » (Durand, 2017, p. 54). Leur réussite et leur santé mentale dépendent alors de leurs capacités à intégrer, à accepter et à vivre avec ce clivage interne. Et si certains réussissent, un temps, à s’adapter à cet environnement de travail, tous risquent un jour d’être « déstabilisés jusqu’à perdre pied dans le monde professionnel » (Durand, 2017, p. 51). Qu’en est-il au sein d’une entreprise démocratique ?

3. Étudier la coopérative SCOPX

3.1. Présentation et enjeux de SCOPX Cet article s’appuie sur un travail empirique de quatorze mois, effectué dans une coopérative de travail française, que nous nommerons SCOPX, au sein de sa Direction des ressources humaines. En tant que stagiaire, et par la suite intérimaire, nous avons participé à l’accompagnement et à la création de dispositifs managériaux au sein de la coopérative pour participer, sur le pan GRH, à la « transformation managériale, numérique et démocratique » de la coopérative.

Contrairement à la grande majorité des coopératives de travail, SCOPX fait partie des « grandes SCOP françaises » avec plusieurs centaines de salariés-sociétaires.1 Elle fait ainsi face à des enjeux démocratiques et organisationnels singuliers et rares dans le monde des coopératives de travail : « comment faire à plusieurs centaines ce que l’on faisait à cinquante ? ». A ce développement interne de son activité et de sa masse salariale, SCOPX a également vécu une expansion externe par l’achat de filiales non-coopératives sur le territoire français et à

1 Rappelons ici que le nombre moyen de salariés d’une SCOP est d’un peu plus de 22 (d’après https://www.les-scop.coop/sites/fr/les-chiffres-cles/).

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l’international : elle devient alors la maison-mère d’un groupe international, dans lequel cohabitent salariés-sociétaires et salariés-non-sociétaires. Cette cohabitation n’est pas aisée et tend à séparer le corps social en deux camps.

Pour répondre à ces défis organisationnels, la direction a entrepris une transformation culturelle : l’entreprise, pour répondre aux enjeux contemporains, doit se transformer en une « coopérative entrepreneuriale », les sociétaires en salariés-entrepreneurs. Dans ce cadre, elle est accompagnée par un cabinet de consultants extérieur qui a analysé et dirigé, avec la direction, la transformation. Dans ce contexte, la DRH a décidé de créer en son sein une équipe dédiée spécifiquement à cette « transformation managériale » pour réfléchir et mettre en place des dispositifs adaptés aux principes coopératifs et traduisant, au niveau RH, les politiques de la transformation culturelle : la FRH, et a fortiori « l’équipe transfo », se retrouve ainsi dépendante d’une politique décidée conjointement par les consultants et la direction. C’est cette dernière équipe que nous avons pu intégrer.

3.2. Une triple méthodologie de recherche A la suite de quatre mois d’observation de type exploratoire qui ont mis « en lumière les aspects du phénomène auxquels le chercheur ne peut penser spontanément » (Blanchet & Gotman, 1992, p. 46), nous avons entrepris une triple méthodologie (cf. Figure 1) de recherche :

- Une participation-observante (PO) (Soule, 2007) durant laquelle nous avons participé activement à la conception, à la réalisation et/ou à la mise en place de dispositif RH « de transformation managériale ». Cette participation nous a permis de comprendre le fonctionnement de la coopérative et tout particulièrement de sa FRH et de son management par la conception et l’organisation de dispositifs, mais aussi de participer à différents temps collectifs de SCOPX (convivialité, réunions managériales, réunions ou événements de la vie coopérative, temps d’informalité durant les repas ou dans la salle de sport, etc.). Nous avons pu finalement comprendre comment fonctionne SCOPX.

- Une observation-dialogante (OD) (Dujarier, 2014) : en parallèle de la PO, nous avons questionné directement et pendant leurs actions les acteurs de la coopérative. Cette méthode a été très propice à des discussions informelles qui ont pris rapidement et très souvent des formes de « récit de vie de couloir », durant lesquelles les coopérateurs nous ont racontés leur histoire et leur expérience subjective de SCOPX ainsi que celles de leurs collègues et/ou de d’autres membres.2

- Une lecture des documents internes : il s’agit ici principalement des document écrits par les consultants sur la transformation culturelle (DTC), de documents préparatoires des dispositifs RH (DPRH), d’un référentiel comportemental (RC), d’un référentiel de pratiques managériales (RPM) ou encore de documents concernant la vie coopérative (VC).

2 Ce dernier point s’est particulièrement déroulé avec des managers qui nous ont raconté l’expérience et la vie de leurs managés. De même, les partenaires RH, dont la mission est d’accompagner leur population salariée dans leurs interrogations RH (évaluation, recrutement, formation, carrière, etc.), nous ont particulièrement aidé à comprendre le vécu et l’expérience des salariés que nous n’avons pas pu rencontrer.

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Figure 1 : Une triple méthodologie de recherche

Avec cette triple méthodologie, une triangulation de nos données empiriques (Jonsen & Jehn, 2009) a ensuite été effectuée (cf. Figure 2) :

- La complémentarité entre PO et OD (lien X), nous a permis de concevoir une typologie idéale-typique des identités citoyennes présentes chez SCOPX (Partie 4).

- Nous avons ensuite pu les confronter aux discours officiels (liens Y et Z), notamment créés par la DRH et la direction, pour souligner le fossé entre discours officiels, à but performatif, et réalité pratique et matérielle dans la création d’identités citoyennes fragilisées (Partie 5).

Figure 2 : Triangulation des données empiriques chez SCOPX

De surcroit, notre position de stagiaire et de chercheur nous a été favorable -nous avons en effet fait le choix de mener une enquête à découvert. En tant que « collaborateur non-permanent », nous ne participions pas directement aux discutions et aux stratégies politiques ce qui nous a permis de nous positionner comme acteur neutre dans le champ de l’entreprise. Nous avons ainsi eu de nombreuses confidences informelles de la part des salariés-sociétaires, rassurés de la démarche scientifique opérée et profitant parfois de ce biais pour partager abruptement leurs

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pensées, leurs opinions et leurs vécus sur le fonctionnement de la coopérative et de la politique RH.

4. La fragilisation de l’identité citoyenne : vers une typologie

Pendant l’étude exploratoire, nous avons rapidement identifié une diversité de vécus de la citoyenneté coopérative ; si certains était déçus de la réalité pratique des principes coopératifs, d’autres la vivaient d’une manière plus ambiguë. En s’inspirant des identités au travail développées par Jean-Pierre Durand (2017), nous avons alors construit des figures identitaires idéales-typiques (cf. Figure 3), en plaçant en abscisse l’ancienneté au sein de la coopérative et en ordonné la positivité ressentie de l’identité citoyenne en tant que sociétaire.

Suite à l’étude exploratoire et à nos lectures de la littérature, en croisant et en multipliant les différents éléments empiriques (cf. Tableau 1), nous avons ainsi identifiées quatre identités idéales-typiques qui, si elle ne correspondent pas systématiquement et parfaitement aux différents vécus des salariés de SCOPX et peuvent sembler simplificatrices, offrent des vertus heuristiques et exploratoires (Coenen-Huther, 2003).

Figure 3 : Typologie de l’identité citoyenne face au management

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Tableau 1 : Modalités d’accès des données empiriques par identité citoyenne

4.1. L’identité d’indifférence Cette première identité idéale-typique correspond aux nouveaux emplois de service peu qualifiés (conseiller clientèle, gestionnaire-administration des ventes, etc.) largement effectués par des jeunes ou des personnes en recherche d’emploi. Sauf exception, ces derniers ne s’engagent pas dans une carrière au sein de la coopérative, mais cherchent à acquérir les compétences nécessaires pour espérer, par la suite, intégrer un meilleur emploi à l’externe. Isolés du reste de la coopérative tant par leur activité nécessitant peu de collaboration transverse que par leur manque de capital social (Bourdieu, 1980), ils sont avant tout entrés dans la coopérative pour y percevoir un salaire.

Si la coopérative peut, un temps, les engager à continuer au sein de l’organisation, la moindre déception les engage vers une nouvelle recherche d’emploi. En ceci, cette identité se rapproche du modèle du retrait de R. Sainsaulieu en ne cherchant pas à tout prix à s’engager dans la vie communautaire de l’organisation, nécessaire à une reconnaissance par les pairs pour une citoyenneté réelle.

De surcroit, au fil du temps, ces derniers considèrent la coopérative comme une perte de temps, un artifice managérial qui « de toute façon ne sert à rien ! ». Les débats, les enjeux des sociétaires sont alors moqués par ses salariés qui, enchaînant des contrats à durée déterminée (CDD), ne peuvent espérer accéder au sociétariat. « Ces histoires de sociétaires » sont très rapidement tournées en dérision comme de la « réunionite », de la perte de temps, de la réflexion intellectuelle sans grands débouchés concrets et opérationnels. Les principes démocratiques ne se traduisent pas dans leur réalité de travail. Sociétaire ou salarié-entrepreneur ? Un non-débat pour ces salariés voués à quitter la coopérative.

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Au mieux donc, ils trouvent en la démocratie coopérative le moyen d’un meilleur accès à l’information et quelques avantages financiers non négligeables.3 Or, de plus en plus, ils peuvent retrouver ces bénéfices dans les politiques RSE et participatives des entreprises traditionnelles capitalistes. Dans une conception utilitariste de la coopérative, cette dernière n’a donc que peu de plus-value pour eux, ils finissent ainsi rapidement par quitter l’entreprise. De même, la DRH et la direction ne font rien pour retenir et intégrer ces employés dans la coopérative, point largement critiqué tant par les managers que par les partenaires RH.

4.2. L’identité de désillusion Parce que le salarié est entré dans la coopérative avant tout pour son projet alternatif, la chute identitaire n’est que plus dure face à la réalité de la citoyenneté coopérative. Intégrant l’entreprise avec un idéal coopératif intense, issu en partie d’expériences militantes ou associatives antérieures, il surestime longtemps les capacités d’agir des sociétaires et se mobilise, de fait, volontiers dans l’ensemble des dispositifs démocratiques et de transformation. On retrouve dans cette catégorie de nombreux « jeunes actifs » entre 25 et 40 ans qui souhaitent s’engager dans « une entreprise qui a du sens, dans laquelle on peut changer les choses tant à l’intérieur qu’à l’extérieur ». Ils sont en outre les premiers à participer activement aux cercles de participation pour concevoir et construire les référentiels RH.

Alors qu’ils se sont construits, bien avant leur entrée dans la coopérative, une identité citoyenne amplement positive, l’intégration dans un parcours-sociétaire les pousse dès leur arrivée à s’engager directement dans la vie de la coopérative :

« Franchement, c’est vrai que ça donne envie. J’étais déjà entré dans la coopérative, en partie, pour le sociétariat – ça fait une différence par rapport aux autres entreprises. Mais après l’intégration c’est vrai que l’on a vraiment envie de participer, de s’engager ! »

Une salariée pendant une séance du parcours sociétaire

Par ce parcours d’intégration et de formation, tous les futurs sociétaires connaissent le fonctionnement, l’histoire de la coopérative et leur rôle de sociétaire. Ils entrent par ce biais rapidement au cœur de la communauté coopérative par un fonctionnement de parrainage. Ces (futurs) sociétaires vont alors être les « très engagés » dans la coopérative en participant à tous les événements de convivialité, de sociétariat, aux différents cercles de participations, etc. Ils vont y croire jusqu’à se donner pour l’entreprise au risque d’une usure psychologique :

« C’est une entreprise qui vampirise ton énergie… Elle est fatigante, elle fatigue… Parce que tu veux donner aussi, ce n’est pas une entreprise comme les autres. Sauf qu’à un moment tu te rends compte de la réalité et là tu tombes. »

Une salarié-sociétaire

A l’instar de l’identité d’abandon de J-P Durand, une fois avoir pris conscience du « système paradoxant » (Gaulejac & Hanique, 2015) porté par la politique GRH de la coopérative, l’idéal coopératif est lésé. Rapidement, tant pendant leur participation aux cercles de participation qu’aux temps de la vie coopérative, il prend conscience de son non-pouvoir d’agir réel. Se sentant trahit et pris entre deux injonctions paradoxales, ses valeurs personnelles et la réalité à laquelle il doit adhérer, son identité citoyenne s’effrite : son engagement dans son travail et la coopérative décline. Des moyens de résistance se créent face au risque de souffrance

3 Dans le cas de cette SCOP, la participation a depuis deux décennies été constituée par un montant significatif pour les salariés permettant pour beaucoup d’augmenter sensiblement leur rémunération. Cette dernière est par ailleurs un argument de recrutement de la part de la FRH.

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psychologique (représenté dans le schéma par une forme ovale) d’abord par l’ironisation de la situation, réservée à un cercle restreint, pour ensuite devenir un dénigrement quasi-public de la coopérative avant que s’engage un processus de sortie de l’entreprise (souvent souhaité et demandé par le salarié lui-même).

4.3. L’identité tourmentée Entrés dans la coopérative sans en connaitre les principes ni le fonctionnement démocratique, ces salariés, souvent recrutés en CDI, ont positivement répondu aux parcours d’intégration et ont su au fil des années s’intégrer et faire leur place au sein de la communauté coopérative, reconnus parmi leurs pairs comme salariés-sociétaires actifs et influents. On retrouve dans cette catégorie les « anciens », ceux qui ont généralement plus de huit années d’ancienneté et qui ont, pour certains, fait toute leur carrière professionnelle dans la coopérative. Ayant constitué, au fur et mesure, un capital social important : ils « pèsent dans la coopérative ». Tantôt respectés et admirés au sein de la communauté sociétariale, ils sont aussi, depuis le passage à la figure du salarié-entrepreneur, devenus la cible privilégiée de railleries et de dérisions :

« Les anciens sont bloqués dans le passé. Ils pensent que l’on peut continuer à faire comme avant : à discuter de tout, tout le temps, à prendre les décisions collectivement, à ne pas avoir de management en fait ! Mais on le voit bien aujourd’hui : ça ne fonctionne pas ! Ils sont trop ancrés dans le passé. »

Un salarié-sociétaire sur les « anciens de la coopérative »

Aussi, si le sociétariat a, dès le début, été considéré positivement par ces salariés, ils connaissent à l’instar de l’identité précédente un point de rupture mais réussissent, en acceptant implicitement l’état de fait, de stabiliser leur identité citoyenne. Convaincus de la force et de l’importance de la démocratie au sein de la coopérative, mais déçus de la tournure entrepreneuriale de celle-ci, ils sont ballotés entre des temps « de combat », durant lesquels ils vont faire entendre leur voix et revendiquer leur sociétariat, et des temps de déception et de désenchantement. Leur identité oscille, selon les événements, entre une identité positive et une identité négative, entre espoir et désolation. Ils font partie cependant des contestataires, ceux qui, croyant encore à leur mission de sociétaire, vont participer aux dispositifs démocratiques et contester les choix faits par la direction parfois frontalement lors des assemblées générales ou des diverses réunions de sociétaires : ils utiliseront et s’approprieront la figure du salarié-entrepreneur pour mieux la critiquer et en montrer l’illégitimité et l’inefficacité.

Cette situation ne les empêche cependant pas d’être sous injonctions paradoxales. Mais contrairement à l’identité de désillusion, ils réussissent à supporter le différentiel entre discours et pratiques notamment par le capital social dont ils sont détenteurs et la constitution de réseaux ou de collectifs informels. De fait ils peuvent selon les circonstances (élection au conseil d’administration, vote favorable, etc.) reconstruire une identité réellement positive et se réengager pleinement dans la vie coopérative.

Les gestionnaires RH (hors managers), population que nous avons pu longuement côtoyer, sont caractéristiques de cette identité. Dans le cadre de la transformation culturelle, ils ont par exemple constamment cherché à re-diriger la politique de conduite de changement vers les principes coopératifs en vain. A la fois porteurs et critiques de la démarche, leur identité citoyenne est ainsi constamment ballotée entre espoir dans leur pouvoir d’agir de sociétaire et dépit de leur hétéronomie managériale, entre leur volonté de voice et leur exigence de loyalty (Hirschman, 1970) envers la direction.

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4.4. L’identité de ralliement Notre dernière identité idéal-typique présente comme ceux qui réagissent le mieux à la transformation de la figure sociétariale en celle du salarié-entrepreneur. En effet, cette catégorie se compose principalement de managers ou de gestionnaires experts de leur domaine. Passés par plusieurs grandes entreprises, souvent multinationales et parfois concurrentes, ils y ont acquis des savoir-faire et des savoir-être managériaux. Spécialisés ou sensibilisés à la conduite organisationnelle du changement, ces derniers ont été principalement recrutés par de la FRH. Loin de voir la coopérative comme une entreprise démocratique et singulière, elle est considérée comme une entreprise traditionnelle dont l’aspect coopératif est une extravagance plaisante ou une entreprise en concordance avec un management participatif.

De fait, leur entrée dans la coopérative est souvent mal vécue. Peu habitués à voir leur pouvoir managérial ou gestionnaire discuté, les nouveaux managers sont ainsi rapidement mis sous pression -le sociétariat, et l’égalité formelle qu’il apporte au sein de la communauté productive, remet en question les formes d’autorité traditionnelles :

« C’est vraiment pas facile pour les nouveaux managers. Dès qu’ils arrivent, on leur fait comprendre qu’ici c’est pas une boite comme les autres, qu’on ne peut pas prendre des décisions comme ça, de son côté. Mais qu’il faut discuter, parler, prendre parfois sont temps. Puis parfois on leur fait aussi très rapidement comprendre qu’ils ne sont pas encore sociétaires !4 Qu’ils n’ont pas toutes les infos, qu’ils peuvent ne pas passer lors du vote de l’AG, etc. C’est très particulier. Et certains ne le vivent pas très bien car c’est dans leur ADN. »

Une salariée-salariée de la DRH Cependant, une partie de ces nouveaux entrants quittent d’eux-mêmes l’entreprise ou sont rapidement dirigés vers la sortie faute d’une adaptation et intégration suffisante à la « culture coopérative ». Ces salariés connaissent ainsi un début fluctuant et difficile dans la construction de leur identité citoyenne. La figure du salarié-entrepreneur, et la managérialisation du sociétariat qu’elle implique, participe à les légitimer au sein de la coopérative : ceux sont les « grands gagnants » de cette transformation démocratique, car s’il est difficile de remettre à sa place un sociétaire, la figure entrepreneuriale permet de rappeler facilement le lien de subordination du rapport salarial et la responsabilité individuelle des salariés. Ils sont ainsi les premiers à soutenir et à porter la politique de transformation managériale, qui n’est pas sans leur rappeler des conduites du changement qu’ils ont déjà pu expérimenter et déployer dans leurs précédents postes. Par exemple, l’entrée d’un nouveau CODIR de la coopérative, largement issu de recrutements extérieurs, a permis de légitimer la démarche de transformation au sein de la coopérative, qui avait pu être remis en question par les anciens membres, issus de promotions internes. Ainsi, au fur et à mesure, reconnus et soutenus de plus en plus par leurs pairs, majoritairement membre du management, ils vont se construire une identité citoyenne positive. Elle repose principalement sur les conditions matérielles, sociales et symboliques dont ils disposent et qui leur permettent d’avoir une liberté d’action non-négligeable. Celle-ci, résultat de leur fonction et de leur position dans la hiérarchie sociale managériale, leur permet d’être convaincu de la réalité de la capacité d’agir du salarié-entrepreneur et de généraliser leur vécu à l’ensemble des coopérateurs. De surcroit, le RPM a pour objectif de légitimer ces managers :

4 Chaque année, l’assemblée générale valide l’entrée de l’ensemble des candidats aux sociétariat -la candidature est obligatoire pour les salariés en CDI sous deux ans. Si aucune candidature dans l’histoire de la coopérative, n’a été refusée, elle constitue toujours un moyen de pression pour les futurs sociétaires, notamment managers, pour se conformer au fonctionnement de la coopérative. Elle constitue en ce sens un rite de passage (van Gennep, 1909).

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« Il faut aussi remettre en avant la décision. En tant que manager, je décide. C’est ma mission et on en a besoin de gens qui décide […] Et pour ça il faut les bonnes personnes qui puissent décider, en écoutant bien sûr, mais à la fin c’est lui qui doit décider. C’est son job ! ».

Une directrice de la DRH

Producteurs et adhérents principaux de la notion d’« entrepreneur », ils poussent le reste des sociétaires à adopter leur comportement sans pour autant leur donner les conditions matérielles suffisantes.

5. Une redéfinition managériale d’une citoyenneté : vers la figure du « salarié-entrepreneur »

Historiquement la figure du salarié-sociétaire s’est construit par l’unification du travail et du capital : le sociétaire est travailleur et dirigeant de son entreprise (Hiez, 2006). Il représente la figure ultime d’une « association autonome de personnes unies » (Alliance Coopérative Internationale) à travers une citoyenneté attribut de droits. Or, dans le cadre de la transformation managériale de la coopérative, la conception de la citoyenneté économique au sein de la coopérative est modifiée dans un processus de gestionnarisation (Robert, 2014) : « Nous salariés-entrepreneurs… » (DTC) remplace la posture originelle du sociétaire en adaptant le champ du sociétariat sous la notion, aujourd’hui à la mode dans la littérature managériale, d’entrepreneur (Dardot & Laval, 2009). Ce changement sémantique n’est pas neutre : « La gestionnarisation est précédée, accompagnée ou suivie d’un discours qui vise à en légitimer le déploiement. (…) ce discours participe pleinement à la gestionnarisation en tant que telle. » (Robert, 2014, p. 211). Il participe à une redéfinition radicale de la pratique de la citoyenneté économique au sein de la coopérative et à une distinction entre les missions de salariés et les missions de sociétaires : « En dehors des temps dédiés au sociétariat, j'agis en tant que collaborateur au sein de l'organisation » (RC).

La figure du « salarié-entrepreneur » permet d’instituer une nouvelle place et une nouvelle reconnaissance au coopérateur (cf. une synthèse de cette transformation dans le tableau 2) : il n’est plus un « patron collectif » maitre de son entreprise, mais un acteur individuel qui doit « assumer ses responsabilités sur son périmètre et les conséquences de ces actes » ou encore « véhiculer les valeurs du groupe en interne comme à l’externe » (RC). Du point de vue de la direction, le choix s’explique aisément : la double qualité conférée aux travailleurs peut être un risque de remise en cause et de contre-pouvoir pour la direction, qui constituer un projet essentiels des membres fondateurs de la coopérative. Cette redéfinition redécoupe alors le rôle de la citoyenneté coopérative en séparant le salarié du sociétaire. La citoyenneté se voit dès lors séparée de l’activité quotidienne de travail : le salarié-entrepreneur recentre la place de ce dernier vers la sphère du travail, vers un quotidien où il doit obéir au management. Comme nous le partageait un manager, sociétaire de la coopérative : « Il faut être dichotomique. A un moment, 99% de mon temps je suis salarié […]. J’obéis c’est tout. » La figure du salarié-entrepreneur permet ainsi de « mettre le sociétaire à sa juste place » (DTC), c’est-à-dire à une place où il sera contrôlable par la direction et le management. 5

A. Honneth identifiait déjà dans La société du mépris (2006) cette nouvelle manière performative de s’adresser aux salariés à travers l’allégorie du « travailleur-entrepreneur » (Arbeitskraftunternehmer) : elle permet d’exiger des salariés les « capacités d’être autonomes,

5 Un des piliers stratégiques mis en avant par la direction des ressources humaines et présenté au sein du département et à l’ensemble des managers de la coopérative.

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créatifs et flexibles […] et entend signifier que toute main d’œuvre qualifiée est en mesure de planifier son propre parcours professionnel comme une entreprise risquée de mobilisation autonome de ses compétences » (Honneth, 2006, p. 270). Le déplacement de la reconnaissance du sociétaire à l’entrepreneur permet d’instituer un accès et une reconnaissance inégalitaire au statut social de direction selon le principe de performance (Leistung) économique : la citoyenneté sera alors réservée aux meilleurs, du moins ceux considérés comme tels selon les principes managériaux (Aubert et al., 2007). Ce changement sémantique exige du salarié qu’il se transforme et devienne « entrepreneur de lui-même ». De fait, le dispositif pousse à construire un rapport à soi fonctionnellement conforme à la rationalité managériale et à faire émerger un processus d’auto-réification (Selbstverdinglichung) lié à une « autoprésentation du sujet ». Les salariés « [doivent] organiser [leur] biographie professionnelle sur le nouveau modèle de réalisation de soi, bien qu’elle ne réponde pour une grande part qu’à un désir de sécurité économique et social » (Honneth, 2010, p. 320).

Tableau 2 : Du salarié-sociétaire au salarié-entrepreneur, une question de reconnaissance.

La reconnaissance juridique du sociétariat se transforme en devoir de chacun de répondre aux exigences managériales : les sociétaires-entrepreneurs ne sont plus porteurs de droits mais porteurs de devoirs : « dans notre contexte, je ne parlerais pas de droit, car je crains que ce ne soit interprété au sens revendication » (DPRH). Ce discours performatif présenté comme positif et nécessaire au changement modifie ainsi les conditions matérielles et symboliques de la pratique du sociétariat et de la citoyenneté qui vient en contradiction avec l’imaginaire coopératif et démocratique original, mais va l’encontre de son propre discours de pouvoir d’agir et de responsabilité individuels : les identités citoyennes se fragilisent.

Conclusion Cette modification terminologique et pratique tend à produire une déconstruction des identités citoyennes des sociétaires, incapables de réellement pratiquer et matérialiser leur pouvoir d’agir formel. Sans véritable accroche dans la communauté sociétariale, l’identité d’indifférence ne peut s’engager véritablement dans son rôle de sociétaire : il abandonne car abandonné. L’identité de désillusion est l’exemple type de la conséquence néfaste d’une séparation du salarié et du sociétaire, pensant retrouver dans la coopérative un pouvoir d’agir collectif, l’individu fini par n’être qu’un entrepreneur soumis à un discours performatif sans réalité matérielle et pratique. Seule l’identité tourmentée, par son ancienneté et l’importance de son capital social, arrive à garder un comportement de type voice et à contester la politique de

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transformation entrepreneuriale car réunis autour d’une reconnaissance mutuelle originale. L’identité de ralliement est quant à elle la grande gagnante de ce renversement du sociétariat, construit sur un principe politique, vers l’entrepreneuriat, structurée par un principe technique, qui « soustrait l’activité sur laquelle elle s’applique à la logique politique de l’argumentation (elle n’est plus un discutable) et la réduit aux options techniques de l’outil de gestion dont elle dépend pour exister socialement » (Robert, 2014, p. 210). Cette population est légitimée dans sa fonction de management et de direction. On retrouve ici le processus de dégénérescence, thématique classique et largement étudiée par la littérature (Michels, 1914; Meister, 1974; Desroche, 1976; Cornforth, 2004; Cathcart, 2013; Maroudas & Rizopoulos, 2014).

Pourquoi les sociétaires ne refusent-ils alors pas ce discours et ce processus entrepreneurial ? Tout d’abord, ces derniers n’en ont plus les moyens. Comme nous le rappellent Bargues-Bourlier et al. (2018), la dégénérescence se produit, avant tout, en dehors des organes de direction. Or, en séparant le salarié du sociétaire, les lieux de contestation se réduisent aux assemblées générales électives – seuls moyens de sanctionner la politique managériale. Enfin, les sociétaires, et en premier lieu la FRH, souffre d’un déficit théorique, pratique et de légitimité pour penser une GRH comme « gestion citoyenne » (Taskin & Nanteuil-Miribel, 2011), en rupture avec les conceptions dominantes instrumentales. En effet, malgré les bonnes volontés de la DRH de SCOPX de se réapproprier la transformation culturelle portée par la direction, celle-ci n’a pas pu proposer et porter, malgré quelques essais, une conception alternative : la FRH reste une fonction hétéronome au sein de l’entreprise.6

Cette recherche comporte bien évidemment des limites. Comme le précise Coenen-Huther (2003) : « La conceptualisation idéal-typique est la construction logique sous l’angle de laquelle sera examinée la réalité empirique. Il s’agit donc d’une opération intermédiaire entre l’interrogation initiale du chercheur et les conclusions auxquelles ses travaux le conduisent » (p. 543). De même, SCOPX est un cas singulier dans le monde coopératif français, dont les enjeux organisationnels l’ont poussé à développer un tel processus de gestionnarisation. Aussi, notre typologie est vouée à être discutée, complétée et contredite par de nouveaux travaux empiriques dans de nouvelles entreprises coopératives françaises ou étrangères.

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6 Au cours de notre recherche, nous avions proposé, avec des membres de la DRH, un projet de recherche-action autour de ces réflexions pour penser et pratiquer le politique au sein de SCOPX. Cette proposition a été au fur et à mesure écartée face à la légitimité du paradigme dominant et au risque d’instabilité organisationnelle que pouvait offrir une telle démarche. Une recherche-action est cependant aujourd’hui en cours dans une autre coopérative qui fera l’objet de communications ultérieures.

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