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2 0 0 0 L’ACTION FRANÇAISE 2686 58 e année du 6 au 19 octobre 2005 Prix : 3 s (20 F) 3:HIKLKJ=XUXUUU:?c@q@i@g@k; M 01093 - 2686 - F: 3,00 E Droit du sol : il y a urgence A h, quel tintamarre parmi les tartuffes et les belles âmes après les déclarations de François Baroin au Figaro Magazine (17/9/2005) ! Le ministre de l'Outre-mer osait sou- tenir que le droit du sol pour l'ac- quisition de la nationalité françai- se dans nos territoires ultra-marins n'était pas un tabou. Le M.R.A.P., S.O.S. Racisme, France Terre d'Asile et tutti quanti, les grandes consciences et les gardiens du "pacte républicain" condamnaient en chœur l'éventualité de restric- tions à la possibilité pour des étrangers de devenir français. À leurs yeux, la France doit accueillir généreusement toute la misère du monde. l'enfant né sur un territoire français sera automatiquement français. Protégeons nos nationaux Il est vrai qu'un grand nombre d'Anjouanais regrettent la France qui les a colonisés. En 1997, ils ont même rompu avec la Grande Comore et demandé à rentrer dans le giron de ce qu'ils appelaient la "mère-patrie". Celle-ci, mal- heureusement, les a méprisés au lieu de prendre leurs souhaits en considération. Sans leur conférer la nationalité, nos dirigeants auraient pu établir avec cette population demeurée très françai- se de cœur des liens particuliers et aider au financement de son déve- loppement. Cela aurait évité la pression démographique qui s'exerce depuis de nombreuses années sur Mayotte. Cependant la France ne peut tolérer que cette immigration venue principalement d'Anjouan, remette en cause l'équilibre social de l'île de Mayotte et, un jour, y suscite des troubles graves. Elle se doit de protéger ses nationaux. C'est pourquoi les projets de M. Baroin de restreindre l'application du droit du sol et de combattre plus sévèrement l'immigration clan- destine sont parfaitement justifiés. Les pseudo "autorités morales" qui les contestent montrent seulement leur ignorance des réalités dans les territoires évoqués par le ministre. La question est de savoir si celui- ci osera passer outre à leurs criailleries pour prendre les mesures de salut public néces- saires. En Guyane et à Mayotte l'invasion des clandestins a com- mencé il y a de nombreuses années. Il serait grand temps d'agir ! Contrairement à ce que sou- tient M. Devedjian – homme-lige de M. Sarkozy – qui, par sectaris- me, a cru bon de critiquer M. L’éditorial de Pierre PUJO (page 3) (suite page 2) Pierre PUJO L'ESSENTIEL Pages 2 et 4 POLITIQUE FRANÇAISE – Outre-mer : une question de survie par Adrien GIRAUD – Les pièges de la globalisation par Henri LETIGRE – Frais de bouche, emplois fictifs : un point final ? par Aristide LEUCATE – La famille menée en bateau par Michel FROMENTOUX Pages 5 et 6 POLITIQUE ÉTRANGÈRE – Incertitudes allemandes par Pascal NARI – La Suisse et l'Union européenne par Guy C. MENUSIER – Algérie : Assez craché sur la France ! par Pierre PUJO – Bouteflika et son référendum par Pascal NARI Pages 11, 12 et 13 ARTS–LETTRES– SPECTACLES – Journée de lecture : Générations par Pierre LAFARGE – Hommages à Vladimir Volkoff (voir ci-contre) Page 14 CHRONIQUE – Un faux concours pour un faux Goncourt ? par Jean-Baptiste MORVAN LE TRÉSOR DE L’A.F. – Réflexions sur la Révolution de Charles Maurras par Pierre PUJO Page 16 HISTOIRE – L'ordonnance de Villers-Cotterêts par René PILLORGET Notre dossier IL Y A 25 ANS SOLIDARNOSC par Romaric d'AMICO Michel FROMENTOUX Pierre LAFARGE Yves LENORMAND Pascal NARI (pages 7 à 10) DE LA CORSE À LA JOURNÉE DU 4 OCTOBRE Villepin à l’épreuve des syndicats Tout ce qui est national est nôtre HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF Les articles d’Anne BERNET, Michel FROMENTOUX, Pierre PUJO, Joseph SANTA-CROCE (Pages 12 et 13) François Baroin citait les cas de la Guyenne assaillie par les clan- destins qui arrivent du Brésil et du Surinam voisins, de la Guadeloupe où s'accroissent le nombre des immigrés venus de Haïti, et surtout de l'île de Mayotte, dont la popu- lation de 180.000 habitants est composée pour un tiers d'étrangers venus clandestinement soit d'Anjouan (70 km) par des barques de pêche, soit de Madagascar (200 kilomètres). Avec 7.500 accouchements par an, dont 80 % de Comoriennes entrées clandes- tinement dans l'île, la maternité de Mamoudzou, le chef-lieu, est la première de France ! Moyennant la déclaration par un père fictif possédant la nationalité française, paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Téléphone : 01-40-39-92-06 – Fax : 01-40-26-31-63 – Site Internet : www.actionfrancaise.net Photo Arnaud Danloux

10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – …...HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF Les articles d’Anne BERNET, Michel FROMENTOUX, Pierre PUJO, Joseph SANTA-CROCE (Pages 12 et 13)

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Page 1: 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – …...HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF Les articles d’Anne BERNET, Michel FROMENTOUX, Pierre PUJO, Joseph SANTA-CROCE (Pages 12 et 13)

2000

L’ACTIONFRANÇAISE

N° 268658e année

du 6 au 19

octobre 2005

Prix : 3s (20 F)

3:HIKLKJ=XUXUUU:?c@q@i@g@k;M 01093 - 2686 - F: 3,00 E

Droit du sol : il y a urgenceAh, quel tintamarre parmi les

tartuffes et les belles âmesaprès les déclarations de

François Baroin au FigaroMagazine (17/9/2005) ! Leministre de l'Outre-mer osait sou-tenir que le droit du sol pour l'ac-quisition de la nationalité françai-se dans nos territoires ultra-marinsn'était pas un tabou. Le M.R.A.P.,S.O.S. Racisme, France Terred'Asile et tutti quanti, les grandesconsciences et les gardiens du"pacte républicain" condamnaienten chœur l'éventualité de restric-tions à la possibilité pour desétrangers de devenir français. Àleurs yeux, la France doit accueillirgénéreusement toute la misère dumonde.

l'enfant né sur un territoire françaissera automatiquement français.

Protégeons nos nationaux

Il est vrai qu'un grand nombred'Anjouanais regrettent la Francequi les a colonisés. En 1997, ils ontmême rompu avec la GrandeComore et demandé à rentrerdans le giron de ce qu'ils appelaientla "mère-patrie". Celle-ci, mal-heureusement, les a méprisés aulieu de prendre leurs souhaits enconsidération. Sans leur conférerla nationalité, nos dirigeantsauraient pu établir avec cettepopulation demeurée très françai-

se de cœur des liens particuliers etaider au financement de son déve-loppement. Cela aurait évité lapression démographique quis'exerce depuis de nombreusesannées sur Mayotte.

Cependant la France ne peuttolérer que cette immigrationvenue principalement d'Anjouan,remette en cause l'équilibre socialde l'île de Mayotte et, un jour, ysuscite des troubles graves. Elle sedoit de protéger ses nationaux.C'est pourquoi les projets de M.Baroin de restreindre l'applicationdu droit du sol et de combattre plussévèrement l'immigration clan-destine sont parfaitement justifiés.Les pseudo "autorités morales" quiles contestent montrent seulementleur ignorance des réalités dans lesterritoires évoqués par le ministre.La question est de savoir si celui-ci osera passer outre à leurscriailleries pour prendre lesmesures de salut public néces-saires. En Guyane et à Mayottel'invasion des clandestins a com-mencé il y a de nombreusesannées. Il serait grand tempsd'agir !

Contrairement à ce que sou-tient M. Devedjian – homme-ligede M. Sarkozy – qui, par sectaris-me, a cru bon de critiquer M.

L’éditorial de Pierre PUJO (page 3)

(suite page 2)Pierre PUJO

L'ESSENTIELPages 2 et 4POLITIQUE FRANÇAISE– Outre-mer :une question de survie

par Adrien GIRAUD– Les piègesde la globalisation

par Henri LETIGRE– Frais de bouche, emploisfictifs : un point final ?

par Aristide LEUCATE– La famille menée en bateau

par Michel FROMENTOUX

Pages 5 et 6POLITIQUE ÉTRANGÈRE– Incertitudes allemandes

par Pascal NARI– La Suisseet l'Union européenne

par Guy C. MENUSIER– Algérie : Assez crachésur la France !

par Pierre PUJO– Bouteflikaet son référendum

par Pascal NARI

Pages 11, 12 et 13ARTS–LETTRES–SPECTACLES– Journée de lecture :Générations

par Pierre LAFARGE– Hommagesà Vladimir Volkoff

(voir ci-contre)

Page 14CHRONIQUE– Un faux concourspour un faux Goncourt ?

par Jean-Baptiste MORVAN

LE TRÉSOR DE L’A.F.– Réflexionssur la Révolutionde Charles Maurras

par Pierre PUJO

Page 16HISTOIRE – L'ordonnancede Villers-Cotterêts

par René PILLORGET

Notre dossier

IL Y A 25 ANSSOLIDARNOSC

parRomaric d'AMICO

Michel FROMENTOUXPierre LAFARGE

Yves LENORMANDPascal NARI

(pages 7 à 10)

DE LA CORSE À LA JOURNÉE DU 4 OCTOBRE

Villepin à l’épreuve des syndicats

Tout ce qui est national est nôtre

HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF

Les articles

d’Anne BERNET,

Michel FROMENTOUX,

Pierre PUJO,

Joseph SANTA-CROCE

(Pages 12 et 13)

François Baroin citait les cas dela Guyenne assaillie par les clan-destins qui arrivent du Brésil et duSurinam voisins, de la Guadeloupeoù s'accroissent le nombre desimmigrés venus de Haïti, et surtoutde l'île de Mayotte, dont la popu-lation de 180.000 habitants estcomposée pour un tiers d'étrangersvenus clandestinement soitd'Anjouan (70 km) par des barquesde pêche, soit de Madagascar(200 kilomètres). Avec 7.500accouchements par an, dont 80 %de Comoriennes entrées clandes-tinement dans l'île, la maternité deMamoudzou, le chef-lieu, est lapremière de France ! Moyennantla déclaration par un père fictifpossédant la nationalité française,

paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Téléphone : 01-40-39-92-06 – Fax : 01-40-26-31-63 – Site Internet : www.actionfrancaise.net

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POLITIQUE FRANÇAISE

2 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

10, rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris

Tél. : 01-40-39-92-06 • Fax : 01-40-26-31-63I.S.S.N. 1166-3286

• Directeur : Pierre Pujo• Secrétaire de rédaction :

Michel Fromentoux• Politique : Georges Ferrière,

Yves Lenormand• Politique étrangère : Pascal Nari• Chronique militaire : Bernard Guillerez• Économie : Henri Letigre,

Serge Marceau.• Enseignement, famille :

Michel Fromentoux, chef de rubrique• Sciences et société : Guillaume

Chatizel, • Outre-mer : Pierre Pujo• Médecine : Jean-Pierre Dickès• Livres : René Pillorget, Anne Bernet,

Pierre Lafarge, Philippe Aleyrac,Romaric d’Amico

• Arts-lettres-spectacles : Léon Camus,Renaud Dourges, Monique Beaumont

• Cinéma : Alain Waelkens• Combat des idées : Pierre Carvin,

Jean-Philippe Chauvin• Art de vivre : Pierre Chaumeil• Chroniques : Jean-Baptiste Morvan,

François Leger• Maquettiste : Grégoire Dubost• Photos : François Tabary

Abonnements, publicité, promotion :Monique Lainé

De l'importance des "lobbies" dans le choix

des politiquesengagées

par les eurocrates.

Baroin, il est parfaitement possiblede prendre des dispositions légis-latives pour certains territoiresfrançais. Le droit du sol n'est pasun principe constitutionnel et sonapplication pourrait être soumiseà des conditions plus sévères oumême disparaître là où il est invo-qué de façon tout à fait abusive. Onne peut comparer en effet la situa-tion d'étrangers établis depuislongtemps sur le territoire françaisavec le cas de femmes enceintesvenant spécialement y accoucherpour que leur enfant soit français.Il y a manifestement un détourne-ment du droit.

Ne pastergiverser

On attend maintenant que M.Baroin passe des paroles aux actes.Son ministère assurait ces derniersjours qu'aucun projet de loi n'étaiten préparation. Le ministre n'aurait-il voulu en fin de compte que lan-cer un débat et craindrait-il d'allerjusqu'au bout ? Mais les faits sontassez clairs pour ne pas tergiver-ser.

Une loi sur le droit du solconcernant certains territoires del'outre-mer ne suffira pas. Il faudrades mesures de police réprimantplus sévèrement l'immigrationclandestine. Il faudrait surtout quela France (et pas seulement sonOutre-mer) cessent d'offrir toutessortes d'aides aux étrangers à par-tir du moment où ils pénètrent –même clandestinement – sur notreterritoire. S'il était proclamé que lesaides sociales et médicales et lascolarité des enfants ne sont accor-dées qu'aux Français et aux étran-gers en situation régulière et quel'accès à la nationalité est renduplus difficile, les clandestinsseraient moins tentés de venirprofiter de l'Eldorado que la Francereprésente à leurs yeux, malgré le"racisme" bien connu des Françaissi l'on en croit une gauche antina-tionale.

Tout un courant de laxisme enmatière d'immigration et de natio-nalité doit être remonté. M. Barointrouvera-t-il au gouvernement lessoutiens nécessaires pour allerplus loin ?

Pierre PUJO

Droit du sol : il y a urgence

(suite de la page 1)

Les pièges de la globalisation

L’été 2005, comme l’a plu-sieurs fois dénoncé L’AF2000, fut marqué par le

« drame du textile européen ».« La mondialisation (est déci-dément très) heureuse » pourreprendre le titre d’un article pu-blié par son chantre Alain Minc.Cet événement, relativement ba-nal, dans ce paysage dominé parles seuls flux financiers devraitnéanmoins favoriser une prisede conscience des enjeux qui at-tendent les travailleurs et les en-treprises françaises dans les pro-chaines années.

marché intérieur, certains Étatseuropéens (la France, l’Italie, laGrèce, l’Espagne et le Portugal)encore producteur de vêtements,demandent à la Commission deBruxelles de faire jouer la clausede sauvegarde, la progressiondes importations dépassant lespourcentages d’augmentationenvisagés pour entraîner la miseen œuvre de ladite clause. Grâceà la pression politique exercéepar les risques de rejet du pro-jet de constitution européenneen France, la Commision décidede réagir et envoie son Com-missaire britannique négocier àPékin un accord de taxation decertaines exportations chinoisesainsi qu’une limitation des quan-tités exportables.

Acte 4 : la tragédie tourne audrame, les Suédoises n’ont plusde soutiens-gorges, les Alle-mands n’ont plus de pulls ! Lesdistributeurs sont en ruptured’approvisionnement. L’Europeà la veille de la saison hivernale2005 risque de se retrouver sansvêtements ! Mais à la différencedes autorités thaïlandaises avantle tsunami ou des pouvoirs amé-ricains avant Katrina, l’Union Eu-ropéenne va réagir. Le commis-saire chargé du commerce ex-térieur repart pour Pékin pourtrouver une nouvelle solution etdébloquer les soutiens-gorgesbloqués dans les containers

Épilogue hollywoodien : leseuropéens sont sauvés, les ma-gasins seront correctement acha-landés pour les soldes de 2006même si l’entreprise textile deGuillaume Sarkozy fait faillite.

Marchépassoire

La première leçon de cedrame se trouve dans l’orches-tration de la réaction des institu-tions aux évolutions de la “glo-balization”. Les importateurs ontmultiplié les commandes jusqu’au10 juin, date du premier accordsigné à Pékin. Les quotas conte-nus dans cet accord ont donc été

Revenons sur le “drame dutextile” avant d’en tirer quelquesleçons qui attendent d’autres sec-teurs économiques. Une véritablepièce de théâtre économiques’est déroulée devant les médiasen mal de chronique estivale.Prologue : les États européensse dessaisissent de leurs com-pétences en matière de négo-ciations commerciales, au profitd’un commissaire européenchargé de les représenter au seinde l’O.M.C.

Dramehollywoodien

Acte 1 : la Chine entre dansl’O.M.C. en 2001 et obtient le 1er

janvier 2005 la levée des contin-gents de produits textiles qui pro-tégeaient le marché de l’UnionEuropéene.

Acte 2 : les professionnels dela filière textile constatent pen-dant l’hiver 2005 que les impor-tations de produits textiles ex-plosent et atteignent des taux deprogression phénoménaux parrapport aux chiffres de 2004 :plus de 100 % pour les soutiens-gorges, les pulls, les pantalons,etc. À ce rythme il ne s’agit plusd’importations mais d’une inva-sion.

Acte 3 : conformément auxaccords d’ouverture de notre

parHenri LETIGRE

� À la suite des déclarations de Fran-çois Baroin, ministre de l'Outre-mer,au Figaro-Magazine, Adrien Giraud,sénateur de Mayotte, se félicite quele ministre ait enfin levé un tabou,celui de l'acquisition de la nationa-lité française par le droit du sol enOutre-mer. Sous le titre Droit du sol :l'appel au bon sens, il précise dansun communiqué :

« Deux réalités s'affrontent :celle du droit et celle de la démo-graphie.

Au plan juridique, même s'il re-lève d'une certaine tradition, ledroit du sol n'est pas un principeconstitutionnel. C'est un principeà valeur législative. Le "pacte ré-publicain" dont parlent les tenantsdu statu quo est, quant à lui, unenotion qui se rattache simplementau discours politique

Il convient de rappeler que ledroit du sol est un acquis répu-blicain tardif. Il a été mis en œuvredans les années 1880, sur un fon-dement militaire et réaliste : com-bler les rangs de classes creuséespar une démographie atone. En-fin, le droit du sol est un droit en-cadré et conditionné : il n'entraînepas l'acquisition automatique dela nationalité à la naissance d'unenfant de parents étrangers et sup-pose d'autres conditions (décla-ration à l'âge de treize ans, etc.)

Au plan démographique, il doitêtre dit clairement que l'Outre-merest aujourd'hui menacé dans sasurvie par l'immigration clandes-tine.

À Mayotte :– un habitant sur trois est un clan-destin ;– deux-tiers des mères qui y ac-couchent viennent des Comores,80 % d'entre elles sont en situa-tion irrégulière ;– la reconnaissance par un pèrefrançais n'est plus un garde-fou,mais un droit qui s'achète ;– 8.599 arrêts de reconduites à lafrontière ont été pris en 2004, soitla moitié de tous ceux prononcéssur le territoire national ;– 3 à 5 embarcations clandestinespartent chaque jour à destinationde Mayotte. »

Adrien Giraud souligne que « lesMahorais ne veulent pas sacrifierla stabilité des structures sani-taires, économiques et socialesde l'Outre-mer au nom d'un "prin-cipe" juridique ou d'une pratiqueincantatoire du "pacte républicain"[...] Le droit a vocation à s'adap-ter à la réalité. »

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Aux Antilles françaises� Les beaux esprits se sont scandalisés des propos de François Ba-roin sur le droit du sol dans les DOM-TOM. Savent-ils seulement quela partie française de l’île de Saint-Martin, dépendance de la Guade-loupe, compte 42 % d’immigrés ? En Guadeloupe "continentale", lapopulation haïtienne croît dans des proportions inquiétantes, ce qui estinsupportable dans un département durement touché par le chômage.Et encore, les Haïtiens sont, dans une large proportion, pacifiques maisil n’en est pas de même des clandestins venant de l’île anglophone dela Dominique organisant le trafic de drogue.

La Martinique voisine connaît le même problème avec les ressor-tissants de l’île de Sainte-Lucie. Les deux îles françaises des Antillessubissent l’une et l’autre une prostitution grandissante composéepresque exclusivement de femmes venant de Saint- Domingue.

Alors pitié, messieurs les donneurs de leçon, ne parlez pas de ceque vous ne connaissez pas !

Renaud DOURGES (Guadeloupe)

immédiatemnt dépassés. Lesdouanes ont alors bloqué lescontainers dans les ports euro-péens. Les distributeurs, quiavaient “forcé” ces commandespour créer un fait accompli, sontainsi contraints de payer destaxes pour entreposage de leurmarchandise dans les ports dedébarquement. Un comble, letextile chinois finit par devenircher !

Mais leurs réactions trans-forment le piège qu’ils se sonttendu en drame du manque devêtement ! Ce drame permetalors de retourner les médias etl’opinion publique. L’Union Eu-ropéenne négocie donc un nou-vel accord pour libérer ces pro-duits textiles emprisonnés par lesméchants douaniers, alors queles gentilles "fashon victims" at-tendent leurs nippes frigorifiéesà l’idée de porter les mêmes te-nues deux années de suite. LaCommission européenne, unefois les référendum passés enFrance et au Pays-Bas, retourneà Pékin négocier la réouverturedes frontières, sans craindre leridicule face aux autorités chi-noises, en profitant de la dispa-rition de toute pression politiquefavorable à la protection de notremarché passoire.

La deuxième leçon porte surl’importance des “lobbies” dansle choix des politiques engagéespar les eurocrates : désormaisles travailleurs européens du tex-tile et des autres secteurs pas-sent après la défense desconsommateurs... et les intérêtsdes gros importateurs !

Outre-mer :une question

de survie

Les négociations ont commencé le 3 octobre

Page 3: 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – …...HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF Les articles d’Anne BERNET, Michel FROMENTOUX, Pierre PUJO, Joseph SANTA-CROCE (Pages 12 et 13)

L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 3

VILLEPIN À L'ÉPREUVE DES SYNDICATS

É D I T O R I A L

PARPIERRE PUJO

Internet�� Après le téléphone, la radio, latélévision, Internet a apporté unnouveau – et considérable –moyen de communication qui"mord" sur le terrain du papier im-primé. Les difficultés actuelles dela presse quotidienne s'expliquenten partie ainsi, et plusieurs jour-naux modifient leur maquette dansl'espoir de conserver, ou d'ac-crocher, de nouveaux lecteurs.

L'Action Française 2000, bienque ne paraissant que deux foispar mois, subit la loi générale dela presse – surtout de la pressed'idées – et connaît, elle aussi,

Les marins qui s’étaient emparés du cargoPascal Paoli le 27 septembre au largede Bastia, s’en sont tirés à bon compte.

Trois jours après, les meneurs, dont seule l’ar-restation avait été maintenue, ont été relâchésaprès avoir été maîtrisés par les hommes duG.I.G.N. dans une opération parfaitement réus-sie. Pourtant, les mutins s’étaient rendus cou-pables de ce que le code pénal considère commeun crime. Une indulgence dont pourraient unjour se réclamer des terroristes après avoir dé-tourné à leur tour un bateau.

Ce recul du gouvernement s’est doubléd’un autre. Il annonçait d’abord la privatisa-tion totale de la Société nationale Corse Mé-diterranée (S.N.C.M.), ce qui déclenchait unegrève générale du personnel. Puis, devant l’am-pleur du mouvement, il présentait un nouveauplan de restructuration financière où l’Étatconservait 25 % du capital. Il prétend aujour-d’hui que c’est son dernier mot. Doit-on lecroire ? Il aurait été avisé d’annoncer ce plandès le début. Il pouvait alors le défendre de-vant le personnel sans être en position de fai-blesse.

Un vaste mouvement de protestation atouché tant Marseille que la Corse : grèves,manifestations, blocage des ports et des aéro-ports corses se sont succédé, entretenus par larivalité entre le Syndicat des travailleurs corses(S.T.C.) et la C.G.T., majoritaire à la S.N.C.M..Les séparatistes (dits "nationalistes") se sontemparés de l’affaire pour relancer leur agita-tion en laissant croire qu’ils représentaient lesaspirations des Corses. On ne rappellera jamaistrop qu’ils ont été désavoués par le référendumdu 6 juillet 2003 qui a démontré le loyalismefrançais de la très grande majorité de la popu-lation.

Défensedu service public ?

Grévistes et manifestants prétendent "dé-fendre" le service public, mais ne cherchent-ils pas, en réalité, à perpétuer des abus qui ontcontribué à mettre la société en péril, aprèsavoir accumulé les pertes ? Personnel en sur-nombre, grèves à répétition (deux mois au to-tal en un an) ont déséquilibré la situation fi-nancière de la société. Pour la rétablir, l’État,c’est-à-dire les contribuables, devraient injec-ter de nouveaux fonds dans la société sans es-poir d’un redressement. La compagnie concur-rente Corsica Ferries est prospère. Pourquoi laS.N.C.M. ne le serait-elle pas elle aussi ?

La privatisation d’une société n’est pas in-compatible avec le maintien d’obligations deservice public. Voir le cas d’Air France. On nepourrait parler de défense du service public quesi les relations maritimes entre la Corse et lecontinent devaient être affectées par le projetdu gouvernement. Apparemment, ce n’est pasle cas. Rien de comparable avec la suppressiond’une gare ou d’un bureau de poste dans lescampagnes, qui peut entraîner la désertificationde certaines de nos provinces. Le maintien d’uneligne de chemin de fer, de la desserte d’unegare ou d’un bureau de poste peut être justifiémême si leur exploitation n'est pas "rentable".Ce fut une des raisons du rejet de la Constitu-tion européenne que le flou avec lequel elleparlait des services publics – dont le nom,d’ailleurs, n’était pas prononcé. Pour ce qui estde la Corse, il nous paraît suffisant qu’un ca-hier des charges précise les obligations de lasociété.

Autant le critère de rentabilité ne sauraits’appliquer à toutes les activités humaines in-distinctement, autant on ne voit pas pourquoiune société ayant à assurer des missions de ser-vice public serait dispensée d’obéir aux impé-ratifs de bonne gestion.

Courtiersde la Commission

Il n’en est pas moins humiliant que la Francene puisse régler les problèmes financiers d’unétablissement public sans en référer à la Com-mission de Bruxelles. Au nom de la libre-concur-rence européenne, celle-ci interdit à un Étatd’apporter un soutien financier permanent à uneentreprise. Or l’État français a déjà investi dansla S.N.C.M. 22 millions d’euros en 2002 et 69millions en 2003. Cela n’a pas empêché une

perte de 29,7 millions en 2004 et la société estaujourd'hui au bord du dépôt de bilan.

La Commission européenne accepterait quel’État participe au capital de la société à la hau-teur de 25 %, et cela à titre provisoire. Les deuxministres Thierry Breton et Dominique Perbenqui se sont rendus à Marseille le 3 octobre pournégocier avec les salariés, c’est-à-dire la C.G.T.et le S.T.C., n’étaient que les courtiers deBruxelles. Les syndicalistes affectent de dis-culper la Commission dans cette affaire. Ils doi-vent se convaincre que, du fait du Marchéunique, l’État français a perdu la liberté de sub-ventionner à sa guise les entreprises. Les poli-ticiens apprécient d’ailleurs de pouvoir ainsiesquiver leurs responsabilités ! Le seul com-missaire français à Bruxelles est celui chargédes Transports. Il s’appelle Jacques Barrot, maisil ne faut attendre de lui aucun assouplissementdes règles communautaires en faveur de laFrance...

Au début de la semaine, l’épreuve de forceentre le gouvernement et les salariés de laS.N.C.M. se poursuivait, ces derniers conti-nuant à réclamer une participation majoritairede l’État dans le capital de la société, ce qui,de la part des "nationalistes" du Syndicat desTravailleurs corses ne manquait pas de sel :cette demande d’assistance à "l’État colonial"les met en contradiction avec leurs propres prin-cipes !

LiturgiePour Dominique de Villepin l’issue du

conflit sera décisive. S’il fait de nouvellesconcessions majeures, son autorité sera forte-ment entamée pour affronter d’autres conflits.La journée de grèves du 4 octobre a obéi à uneliturgie traditionnelle de la part des syndicatset ne débouchera peut-être pas sur une agita-tion sociale prolongée. Elle n’en aura pas moinsété une nouvelle manifestation de défiance àl’égard de la classe politique après celle du 29mai... Les difficultés économiques (ralentisse-ment de la croissance, hausse du prix du pé-trole, concurrence internationale accrue) et lesréformes nécessaires pour épurer l’État-provi-dence (« La France vit au-dessus de ses

moyens », déclarait en juin le ministre des Fi-nances), exigeraient de la part des Français desefforts et des sacrifices. On ne peut prétendreles leur faire accepter sans invoquer l’intérêtnational. Cela est bien difficile à des gouver-nants qui, depuis trop longtemps, s’emploientà dévualuer la nation ! �

des difficultés financières. Pour yfaire face elle ne compte que surses amis.

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P.P.N.B. – Prière d'adresser les ver-sements à Mme Geneviève Castelluccio, L'Action Française2000, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris.

Gal Jacques le Groignec, 15,24 ; Ro-bert Thomas (3 mois), 45,72.

André Jean, 20 ; Mme Marie-Magd-leine Godefroy, 22,87 ; Mle LucienneBoussot (4e trimestre), 50 ; Mme Marie-Christiane Leclercq-Bourin, 30 ; Mme

Tatiana de Prittwitz, 45,73 ; JacquesBentégeat, 53,36.

"En souvenir de mon père RobertBourin", Marie-Christiane Leclercq, 50.

Robert Legrand, 16 ; GeorgesChauvet, 100 ; Dr André Charles, 50 ;Jean-Louis Pichery 12 ; Mme Capet-Sel-lenet, 100.

Total de cette liste : 657,42 eListes précédentes : 22.246,77 e

Total : 22.904,19 eTotal en francs : 150.241,64 F

NOTRE SOUSCRIPTION POUR L’ACTION FRANÇAISE

PATRIOTISMEÉCONOMIQUELa décision de la société in-

formatique Hewlett-Packard de li-cencier six mille salariés en Eu-rope dont 1.240 en France a jetél’émoi dans le monde syndicalmais aussi politique. Jacques Chi-rac a voulu montrer qu’il défen-dait l’emploi des Français face auxmultinationales et demandé à laCommission de Bruxelles d’in-tervenir. Celle-ci lui a répondupromptement que l’application dudroit du travail continuait à rele-ver du droit national. C’était à pré-voir.

Alors Dominique de Villepin asoutenu que Hewlett-Packard de-vrait rembourser les aides pu-bliques qu’elle avait reçues pours'implanter en France et créer desemplois. Pas de chance. Le pré-sident de la filiale française deH.P., Patrick Starck, a déclaré quela société ne pouvait pas rem-bourser des aides qu’elle n’avaitpas reçues.

Après Chirac, Villepin : nosgouvernants sont vraiment bienlégers de s’exposer à des dé-mentis aussi catégoriques. Àmoins que constatant leur im-puissance, ils se soient livrés àdes effets d’annonce destinés àflatter l’opinion.

La vérité est que les pouvoirspublics n’ont pas de prise sur unefirme étrangère qui veut licencierdu personnel et délocaliser le tra-vail. Le capitalisme internationalest implacable. C’est pourquoi ilfaut tout faire pour empêcher lesentreprises françaises de passersous contrôle étranger. Il y a plusde chances qu’elles se soucientdu sort de leur personnel. Le "pa-triotisme économique" a du bon.

LA GAZETTE DE LA

MAISON ROYALE DE FRANCE

Éditée par l’Institut de la MaisonRoyale de France, la Gazette vientde publier son numéro de septembre2005. Sous une nouvelle présenta-tion élégante, elle s’ouvre par un édi-torial de Mgr le Comte de Paris, ducde France.

Le Prince commente le rejet dela Constitution européenne par lesFrançais : « Par dessus tout, l’Eu-rope en se construisant a besoinde créer sa propre identité issuedu terreau de chacun des paysqui s’y inscrivent tout en respec-tant l’identité spécifique de cesmêmes pays. Ne détournons pastous ces réseaux de solidaritésqui se sont forgés depuis presquedeux mille ans. »

Le numéro comporte, outre di-vers articles sur l’actualité politique,un rappel des prises de position duPrince sur la Constitution euro-péenne depuis octobre 2004 et l’an-nonce de plusieurs festivals musi-caux en province.

D’une façon générale, La Ga-zette se propose de faire connaîtreles activités et les engagements duchef de la Maison de France. Elleannonce la mise en service du nou-veau site Internet et de l’Institut dela Maison royale de France :www.maisonroyale.org

* Abonnements à La Gazette del’I.M.R.F. (trimestrielle) ! 40 euros.Étudiants et jeunes entrant dans lavie active : 20 euros. 74 rue des Cé-vennes, 75015 Paris.

LISTE N° 15Virements réguliers : Marius

Guigues (3 mois), 16,02 ; Mle Hélène

Revol, 15,24 ; Gilles Bourgeois, 15,24 ;

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4 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

POLITIQUE FRANÇAISE

parAristide LEUCATE

Il est d'usage sous notreRépublique

que le personnelpolitique reconnu

coupable de malversations

pense revenir aux commandes

du pays.

Frais de bouche, emplois fictifs : un point final ?

L’arrêt rendu par la Cour decassation jeudi 22 sep-tembre 2005 sur saisine de

Louise-Yvonne Cassetta n’aurapas fait grand bruit. La Haute ju-ridiction a rejeté le pourvoi formépar l’ancienne trésorière du Ras-semblement pour la République

puantissent le régime, n’est passans conséquences sur la vie po-litique du pays.

Le possibleretour de Juppé

On se souvient du tollé sou-levé par le jugement du tribunalde Nanterre qui avait condamnél’ancien maire de Bordeaux au

Pas impossible, comme il l’alaissé entendre dans le cours del’été. Il est regrettable, cepen-dant, que le personnel politiquereconnu expressément coupablede malversations, attestant ainsileur défaut évident de probitéface à la res publica (la patri-cienne romaine et non l’actuelle),puisse un jour revenir aux com-mandes du pays. Que l’on penseaux précédents Emmanuelli, Fa-bius, Strauss-Kahn, Donnedieude Vabre et bien d’autres…

Le blanchimentpartiel

de ChiracBien que gravement épinglé

par la municipalité en place, letrain de vie du ci-devant mairede Paris a été judiciairement ba-layé d’un revers de manche. Chi-rac peut donc éprouver un cer-tain soulagement. Toutefois, res-tent en suspens, jusqu’àl’échéance de son mandat pré-sidentiel, les poursuites qui pour-raient être éventuellement dili-gentées contre lui dans l’impor-tant volet des emplois fictifs dela mairie de Paris. Car même siNicolas Sarkozy, président enexercice de l’U.M.P., a proposéà la mairie de Paris de lui rem-bourser les 889.618,64 euros en-gagés à l’époque pour la rému-nération de six employés fictifs(frais judiciaires compris), il de-meure que la responsabilité pé-nale de M. Chirac n’a pas dis-paru pour autant.

Rappelons, en effet, que leprésident de la République, grâceà une décision particulièrementprotectrice rendue en 1999 parle Conseil constitutionnel (alorsprésidée par Roland Dumas),bénéficie d’une immunité pénalequi l’exempte de toute poursuitejudiciaire pendant toute la duréede ses fonctions élyséennes.Bien sûr, le chef de l’Etat peutégalement compter sur la pres-cription de certains faits qui luisont reprochés. Affaire à suivre…

� M. de Villepin, présidant cejeudi 22 septembre la Conférenceannuelle de la famille, a montréson habileté à faire passer unmal pour un bien, un moins pourun plus, en somme une vessiepour une lanterne...

Bien sûr il est plus agréableà un ménage accueillant un troi-sième enfant de recevoir une al-location de congé parental de750 euros par mois plutôt que de512 ! La "générosité" du gou-vernement a été exaltée par lesmédias expliquant que tout étaitdésormais entrepris pour facili-ter l'arrivée de ce troisième nou-veau-né dont tant de parents vou-draient égayer leur foyer et dontles courbes démographiquesmontrent la dramatique néces-sité.

Seulement voilà : les 512 eu-ros portent sur un congé paren-tal (maternel, parfois paternel) detrois années, le temps jugé jus-qu'ici nécessaire pour une mèrede famille nombreuse pour sub-venir aux besoins nouveaux deson foyer, alors que les 750 eu-ros annoncés ne seront versésqu'aux mères se contentant d'uncongé d'un an ! On voit tout desuite d'une part que la mesure"généreuse" réussira une fois deplus à faire économiser à l'Étatdes sommes colossales sur ledos des familles, d'autre part quel'effet principal sera d'inciter lesmères à repartir le plus tôt pos-sible sur le "marché du travail",confiant leur enfant aux struc-tures collectives à un âge où,comme l'écrit Jeanne Smits quiest elle-même mère de famille,dans Présent du 23 septembre,« l'enfant n'a pas besoin de se"socialiser" mais de seconstruire grâce à l'amour ma-ternel ».

En somme, soumis à l'idéo-logie politiquement correcte net-tement hostile à la vie au foyer,le gouvernement, tout en pro-clamant que la mère pourra li-brement choisir entre la situationactuelle et le "cadeau" offert, in-cite fortement celle-ci à renon-cer à rester chez elle pour éle-ver elle-même ses enfants enbas âge. On reste à l'opposé dela vraie solution de justice : lesalaire maternel versé à la mèrechoisissant d'assurer l'éducationde ses enfants. Le pire est quebon nombre d'associations fa-miliales, imprégnées du fémi-nisme ambiant, se sont cruesobligées d'applaudir cette me-sure en tout point socialiste...

Michel FROMENTOUX

�� Le dîner-débat de rentrée du cercle Alexisde Tocqueville s'est tenu mercredi 14 sep-tembre au Grenadier d'Austerlitz sous laprésidence de Didier Béoutis. Le thème enétait : Jean-Jacques Servan-Schreiber,l'homme qui voulait tout changer.

Qui se souvient encore de JJSS ? Plusgrand monde, croyions-nous. Une assis-tance pourtant nombreuse a écouté avecun vif intérêt l'exposé de Jean Bothorel, au-teur d'une biographie du personnage (ed.Robert Laffont), évoquant le parcours brillantdu jeune polytechnicien, créateur de L'Ex-press, lancé dans une carrière politique ausein du parti radical, ministre durantquelques jours, mais ne parvenant jamaisà jouer un rôle de premier plan, laissant sur-

tout le souvenir de ses combats contre leConcorde et pour le développement de l'in-formatique. En somme un incompris, pastoujours pris au sérieux, qui aurait eu rai-son trop tôt...

Le débat, comme toujours très courtois,en présence de Mme Sabine de Fouquières-Servan-Schreiber et de trois de ses fils, aun peu longtemps porté sur des questionsanciennes de cuisine politicienne et sur lesrapports parfois orageux de JJSS et de DeGaulle.

Mais l'A.F. était là pour en venir aux vraiesquestions ! Michel Fromentoux, tout en re-connaissant la prodigieuse rapidité avec la-quelle la famille Servan-Schreiber s'est in-tégrée à la France, a demandé, parmi toutes

les grandes intuitions de ce "visionnaire"qui, en campagne en Lorraine, faisait reti-rer le drapeau français des tribunes, de quelpoids pesait tout simplement... la France.Quant à Pierre Pujo, rappelant les cam-pagnes de JJSS contre la présence fran-çaise outre-mer, notamment en Algérie,contre aussi la force de frappe française, amontré qu'il était bien difficile de trouver unsens national à son action...

La République a peut-être besoin de cegenre d'électron libre qui de temps à autrel'empêche de s'ennuyer, mais elle ne peutchanger. Le vrai changement, ce sera lechangement de régime.

M.F.

� Le gouvernement a annoncéà la Commission européennele 3 septembre qu’il prévoyaitun déficit public global de 3 %du produit intérieur brut pour2005. Ce déficit correspondraitainsi à la norme européenne.Il était encore de 3,6 % en2004.

En revanche, la dette pu-blique atteindrait 66,2 % du PIBen fin d’année contre 64,7 %fin 2004. C’est très supérieur àla norme européenne qui estde 60 %.

� Le déficit de la Sécurité so-ciale sera de 11,9 milliards d’eu-ros en 2005 comme en 2004.Le gouvernement prévoit de leramener à 8,9 milliards en 2005moyennant des cotisations sup-plémentaires imposées aux en-treprises et des économies auxusagers.

� M. Malartre, secrétaire gé-néral de l’enseignement ca-tholique, a déclaré le 20 sep-tembre que celui-ci a refusél’inscription de 23.000 élèves.Il a déploré la suppression dansle même temps de 532 postesd’enseignants pour les établis-sements privés sous contrat.Depuis 2002, l’enseignementcatholique a accueilli 20.000élèves supplémentaires. Au to-tal, il accueille deux millionsd’élèves.

� Colin Powell, ancien secré-taire d’État américain, a re-connu le 8 septembre 2005 qu’iln’avait pas la preuve de la pos-session par l’Irak d’armes dedestruction massives lorsqu’ilest intervenu en février 2003devant l’O.N.U. pour justifierainsi l’invasion de ce pays. Au-cune de ces armes n’a d’ailleursété depuis retrouvée. Il a éga-lement déclaré « ne pas avoirvu de preuve » d’uneconnexion entre les attentatsdu 11 septembre 2001 et le ré-gime de Bagdad. Il éprouve au-jourd’hui des remords. Il pré-tend avoir été mal informé...

� Les cendres du général De-nikine qui fut le chef de l’Arméevolontaire anti-communiste en1920 et celles du philosopheIvan Ilyine ont été transféréesen grande pompe au monas-tère de Donskoï, près de Mos-cou, le 3 octobre. Les autori-tés officielles y voient une ma-nifestation de « réconcilationnationale ».

(R.P.R.) à l’encontre de l’arrêt du1er décembre 2004 de la Courd’appel de Versailles qui avaitconfirmé sa condamnation à dixmois d’emprisonnement avecsursis pour recel et complicitéd’abus de biens sociaux.

On rappellera que cettemême Cour d’appel avait dimi-nué à quatorze mois d’empri-sonnement et un an d’inéligibi-lité la peine infligée le 30 janvier2004 par le tribunal correction-nel de Nanterre à l’ancien Pre-mier ministre Alain Juppé.

Estimant que les juges d’ap-pel avaient suffisamment motivéleur arrêt, la Cour de cassationa également jugé irrecevable lepourvoi d’un contribuable pari-sien contre le non-lieu prononcépour motifs de prescription rendudans le dossier, qui visait les 2,13millions d'euros (14 millions defrancs) dépensés entre 1987 et1995 par Jacques et BernadetteChirac relatifs à des frais per-sonnels liés au logement de fonc-tion occupé à la mairie de Paris.La Cour européenne des droitsde l’homme de Strasbourg de-vrait être saisie de ce dossierpour violation du droit à un pro-cès équitable. Mais cet arrêt, s’ilsemble définitivement solder undes volets des "affaires" qui em-

maximum de la peine prévue parune loi du 19 janvier 1995 adop-tée… sous le gouvernement Bal-ladur. Cette loi prévoit, en effet,que toute personne condamnéepour délit d’ingérence (un desprincipaux griefs retenus contreAlain Juppé) ne peut être inscritsur les listes électorales pendantcinq ans, l’article LO 130 du Codeélectoral majorant, pour sa part,la période de cinq années sup-plémentaires, soit dix ans au to-tal. La Cour de Versailles fut as-sez magnanime en faisant uneapplication moins infamante dela loi et, pour ce qui concerne laCour de cassation, l’affaire estdésormais close. Il ne reste plusà M. Juppé qu’à purger paisi-blement sa peine aux frais ducontribuable québécois qui lui ré-tribue grassement ses cours demorale publique dispensés àl’Ecole nationale d’administrationpublique (E.N.A. québécoise).Avant son retour en politique ?

À RETENIR

LA FAMILLE MENÉE

EN BATEAU

Jacques ChiracProtégé par son mandat...

QUI SE SOUVIENT DE SERVAN-SCHREIBER ?

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L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 5

POLITIQUE ÉTRANGÈRE

Incertitudesallemandes

Après des semainesde tractations,

les partis allemandspeinent

à s’entendre sur un nouveaugouvernement.

Le 18 septembre dernier, lesAllemands ont infligé un vé-ritable camouflet aux deux

grands partis politiques qui ont gou-verné ce pays en alternance, etune fois en coalition, depuis lesannées cinquante. Les sociaux-démocrates du chancelier Schrö-der ont obtenu 222 sièges (-29).L’ensemble "démocrate-chrétien"

(C.D.U.-C.S.U.) en a obtenu 225(-23). Les verts, alliés de la gauchesociale-démocrate, auront 51sièges (-4). Les libéraux sur qui ladémocratie-chrétienne comptaitpour former une majorité de gou-vernement remportent 61 sièges(+14). Un fait plus intéressant estle succès de la "gauche", cette al-liance des néo-communistes del’est et de l’aile radicale dissidentedu S.P.D. qui aura 54 sièges (+52)au Bundestag. Que n’aurait-on pasdit si les néo-nazis, heureusementéliminés, avaient obtenu un telscore ?

La significationde l’impasse

L’impasse politique est incon-testable. Sur 613 sièges du Par-lement, aucun parti ni coalition dedroite ou de gauche n’a la majo-rité suffisante pour gouverner.

Les réformes néo-libérales duchancelier sortant n’avaient pasréussi à sortir l’Allemagne de lacrise. Son gouvernement de coa-lition rouge-vert a été sanctionné.

Les projets de réformes, ellesaussi néo-libérales mais plus ac-centuées, de son rival, AngelaMerkel, n’ont pas séduit non plusles électeurs. Les sondages la don-naient gagnante. On l’a même cré-ditée pendant quelques jours jus-qu’à 45 % des intentions de vote.Elle a eu presque dix points demoins.

En fait, les Allemands se mé-fient de ces deux grandes forma-tions aux programmes d’inspira-tion mondialiste et néo-libérale as-sez voisins. Mais ils n’ont pas lechoix. Les libéraux sont trop àdroite sur le plan économique. Lesverts sont considérés comme desgens sympathiques, certes, par lamajorité de l’opinion, mais non pascomme un vrai parti de gouver-nement. Les néo-communistessont, pour le moment, exclus dela vie politique officielle.

Quelle différence existe doncentre la "gauche" et la "droite" ?D’abord, deux électorats différents.À dominante catholique et concen-tré à l’Ouest pour la démocratiechrétienne, bien que Mme Merkelsoit protestante et de l’ancienneR.D.A., mais n’est-ce pas là une

autre raison de son non-succès ?À dominante syndicale, laïque etpartisan d’une fiscalité redistribu-tive pour les sociaux-démocrates.Quant au patronat, il soutient tra-ditionnellement les libéraux quiconstituent son levier d’influence.

Ensuite, les deux grands par-tis ont une vision différente de ladiplomatie allemande. La C.D.U.-C.S.U. est plus atlantiste, penchevers une alliance privilégiée avecles États-Unis. En revanche,Schröder et surtout ses alliés vertspourraient être considérés commefavorables à un renforcement decoopération européenne, une dé-marche plus indépendante àl’égard de Washington et des liensplus solides avec l’Est et surtoutla Russie de Poutine. Desnuances, certes, mais non sansimportance vues de Paris.

Quelle issueà la crise ?

L'arithmétique parlementairerend impossible une coalition degauche ou de droite. Après deuxsemaines de négociations, ons’oriente sérieusement vers ungouvernement "rouge et noir", au-

LA SUISSE ET L'UNION EUROPÉENNE

Limites de la témérité

Non-membre de l'Union

européenne,la Suisse aura été

le seul pays à se prononcer par référendum

sur l'élargissement.La votation

du 25 septembre ne met toutefois

pas un terme à cette histoire.

Après le re-jet par lepeuple

suisse, en décembre 1992, d¹unprojet d'Espace économique eu-ropéen, censé préparer le terrain

à une adhésion ultérieure àl'Union européenne, le Conseilfédéral a négocié avec l'U.E. unesérie d'accords dits bilatéraux.Les discussions ont abouti en1999, Berne ayant auparavantdécidé de geler sa demanded'adhésion.

De nature technique et com-merciale, mais non sans inci-dence politique, ces accords aunombre de sept forment un tout :l'U.E. a obtenu qu'ils soient juri-diquement liés entre eux. Ils por-tent sur la libre circulation despersonnes (volet le plus contro-versé en Suisse), les échangescommerciaux, les marchés pu-

blics, l'agricul-ture, la re-cherche, les

transports terrestres et aériens.Acceptés par référendum en2000, ces textes sont depuis lorsentrés progressivement en vi-gueur. Mais ils s'appliquaient jus-qu'à présent à la Suisse et auxquinze États composant en 1999l'Union européenne. L'entréedans l'U.E., l'an dernier, de dixnouveaux États, pour la plupartd'Europe centrale, a bouleverséla donne.

Extension de la librecirculation

Du coup, le syndrome duplombier polonais s'est répandude Genève à Romanshorn. Et uncomité interpartis, au sein duqueldominaient les représentants del'U.D.C., a lancé un référendumcontre l'extension de la libre cir-culation des personnes aux nou-veaux États membres. Appelésà se prononcer le 25 septembre,les citoyens suisses ont finale-ment accepté, à près de 56 %,que les ressortissants de cespays bénéficient du même droitque ceux de "l'ancienne Europe",à savoir qu'ils puissent s'établir,travailler, circuler librement surle territoire de la Confédération,la réciproque étant évidemmentadmise.

Seuls sept cantons (sur27 cantons et demi-cantons)

les hommes et femmes qui ferontpartie du cabinet que sur son pro-gramme commenceront le mer-credi 5. Avec deux points essen-tiels à régler en premier lieu :

– Qui dirigera le gouverne-ment ? Angela Merkel avec Gerhard Schröder comme numéro2 ? Hypothèse difficile à envisa-ger pour ce dernier tant il était ha-bitué à être au devant de la scène.Si Mme Merkel va à la Chancelle-rie, Schröder, comme tous ses pré-décesseurs, quittera au moins mo-mentanément la politique active etse consolera peut-être dans l’es-poir d’accéder à la présidence dela république fédérale. On le dit in-téressé par cette éventuelle fin decarrière, honorifique mais presti-gieuse.

– Quelle sera la durée de lacoalition ? Si elle est fixée à deuxans, les deux partis vont s’entendresur un programme minimum detransition pour repasser devant lesélecteurs à l’issue de cette période.Si elle est fixée à quatre ans, unesolution "à l’israélienne" pourraitêtre envisagée. Deux années à lachancellerie pour le représentantde chacune des deux formations.

Dans les milieux politiques al-lemands, on n’exclut pas l’appari-tion de nouvelles têtes d’un côtécomme de l’autre.

On le voit, avec ou sans Schrö-der et/ou Merkel, les tractationsseront longues. L’Allemagne n’ensortira pas renforcée. C’est la dé-mocratie...

parGuy C. MENUSIER

parPascal NARI

trement dit vers la "grande coali-tion". L’Allemagne en a connu unede 1966 à 1969 dirigée par GeorgKiessinger. Son gouvernement aeu un bilan médiocre mais a per-mis de sortir de l’impasse politiqued’alors. Qu’en sera-t-il cette fois-ci ? Les deux partis, condamnésà s’entendre, semblent y être ré-signés. L’Allemagne aura donc ungouvernement "rouge et noir". Quile dirigera ? Le chancelier sortant,contrairement aux usages, récla-mait ce poste jusqu’à hier soir. An-gela Merkel, forte de ses troissièges, en faisait autant.

Dimanche soir, en gagnantl’élection partielle de Dresde, ladémocratie-chrétienne a augmentéson avance de trois à quatre siègesmais remporté psychologiquementune victoire. Ses chances pour di-riger la "grande coalition" se pré-cisent. Les négociations tant sur

Angela MerkelUn programme néo-libéral

et atlantiste

Impressions de l'été 2005

Pendant qu'à travers les jour-naux et les périodiques tous lesmoyens sont utilisés pour détour-ner l'attention de la population desvrais problèmes (dénonciations ca-lomnieuses, indiscrétions sur la vieprivée, compétitions sportives), lesvraies réalités sont occultées. Laconstitution de la Serbie, qui an-nulerait les constitutions de 1945et 1974 de Tito et les réformesconstitutionnelles de Milocevic en1991, ne voit toujours pas le jour.Par voie de conséquence les loisne peuvent être modifiées et cetétat de chose permet aux crimi-nels, aux profiteurs et à tous lespetits trafiquants de prospérer "lé-galement".

L'Europe avance avec lenteurmais sans résultat probant pouréviter que la Serbie-Montenegrone s'installe dans un état de non-droit. Personne, dans l'Union eu-ropéenne n'ose ou ne veut éleverle ton. Cependant l'ère de la mé-connaissance de cette réalité etdes chantages et promesses ré-itérées et non tenues, est derrièrenous. S'en prendre au président

Lettres de Serbiede la Communauté Serbie-Mon-tenegro et à son ministre de la Dé-fense est le dernier subterfuge pourretarder les réformes promises etmaintenir le statu quo. Il faut s'at-tendre à de nouveaux rebondis-sements sur les sujets les plus in-attendus, dans les mois prochainsde façon à créer des prétextes pourmaintenir la situation actuelle quiest funeste pour la population maistrès bénéfique pour la classe po-litico-économique en charge.

Gérald BEIGDEBER (Belgrade)

L'Égliseorthodoxe serbe

L'Église orthodoxe serbe a àsa tête le patriarche Paul, nona-génaire, ancien moine, peu au faitdes problèmes du monde. Sesprêtres sont nombreux et les vo-cations ne manquent pas tant chezles intellectuels que dans les autresclasses de la société. Une petiteet restreinte tendance s'intéresseaux problèmes œcuméniques.D'autres sont farouchement op-

posés à tout ce qui vient de l'Oc-cident.

La très grande majorité desmoines, des prêtres et des laïcspieux vivent la liturgie et dans laliturgie et l'attachement aux déci-sions des conciles du premier mil-lénaire. Ils s'inclinent devant lespouvoirs politiques éphémères àleurs yeux et sans porter des ju-gements moraux sur ces derniers.Cependant cette grande majorité,infiltrée à l'époque de Tito, pen-cherait davantage, le cas échéant,vers l'opposition à l'Occident, àl'Europe, qu'ils perçoivent commedes véhicules de l'athéisme, dumatérialisme, de la pornographieet de toutes les non-valeurs anti-chrétiennes.

Il ne faut jamais oublier quedevant le danger turc-ottoman quise précisait, de retour du Concilede Florence, l'Empereur et le Pa-triarche de Constantinople furentdésavoués par les clergés régu-liers et séculiers ainsi que la ma-jorité du peuple romain orthodoxe.« Plutôt le turban que la tiare ».Le même phénomène perceptibleen Russie pourrait se produire enSerbie-Montenegro.

G.B.

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6 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

POLITIQUE ÉTRANGÈRE

BOUTEFLIKA ET SON

RÉFÉRENDUM� Avec plus de 80 % de partici-pants, sauf en Kabylie où la parti-cipation a été faible et les cas decontestation nombreux, et 97 %de "oui", le président algérien Bou-teflika a de quoi être satisfait deson référendum sur la "réconcilia-tion nationale".

Son bilan à la tête de l’État estloin d’être négatif. L’Algérie com-mence à respirer. De l’aveu mêmede ses opposants, les Algériensvivent mieux, les services publicsfonctionnent plus convenablement,l’économie sort de sa stagnation,en grande partie grâce à la haussedu pétrole sur les marchés.

Son discours sur le passé co-lonial est aberrant, injuste maissurtout destiné à une petite mino-rité, ses amis du F.L.N. Néanmoins,il ne faudrait pas oublier que grâceà lui, le français, véritable languede culture et de communicationpour les Algériens, a fait son re-tour officiel dans le pays qui tientà jouer désormais un rôle dansl’ensemble francophone.

La page tournée ?

Bouteflika réussira-t-il, commeil le souhaiterait, à "tourner la page"des années d’affrontement avecle terrorisme islamiste, rétablir lapaix civile, faire oublier les 150.000victimes des tueurs et les excèset bavures de la répression ? Oncomprend les familles des victimesqui ne peuvent pardonner, encoremoins oublier, les crimes atroceset innombrables commis par lesislamistes et voient mal leur retoursur la scène politique. La douleurdes familles de ceux qui auraientdisparu par suite de la répression– l’armée algérienne exprime desréserves sur ce fait – n’est pas nonplus à dédaigner. Elles souhaite-raient que la lumière soit faite surces excès et bavures et leurs res-ponsables châtiés.

Le référendum entend fermerce chapitre douloureux et sanglantde l’histoire. Tout au moins sur leplan officiel. L’oubli et le pardonviendront plus tard. Le temps fi-nira par panser les plaies bien quecelles des guerres civiles soientparticulièrement longues à cicatri-ser.

Un grand point d’interrogationdemeure dans cette affaire. Lestrois ou quatre cent islamistes tou-jours dans le maquis vont-ils pro-fiter de ce pardon, de cette "ré-conciliation", pour retourner à lavie normale et arrêter de tuer desinnocents au nom d’Allah ?

Cela est moins sûr que ne vou-drait l’accréditer la propagandegouvernementale algérienne. Sidemain d’autres attentats sontcommis, l’armée sera obligée deréagir et de continuer à éradiquerle terrorisme. Dès lors, il ne res-tera qu’un seul vrai bénéficiaire decette opération : le président Bou-teflika qui en aura profité pourconsolider son pouvoir. C’est ceque lui reprochent ses adversaires.

Pascal NARI

ALGÉRIE

Assez craché sur la France !

Un "traité d'amitié"entre la France

et l'Algérie ne saurait reposer

sur des mensongeshistoriques.

Les Algériens, appelés auxurnes le 29 septembre2005, ont approuvé par ré-

férendum la charte sur « la ré-conciliation nationale » élabo-rée par M. Bouteflika. En vue defaire oublier la brutalité de la ré-pression du terrorisme islamistedepuis 1990, et ce terrorisme lui-même, le président algérien, tout

En crachantsur la France etceux qui l’ont

servie, M. Bouteflika flatte le sen-timent d’hostilité à l’égard denotre pays de ses amis politiques.Il escompte ainsi faire monter lesenchères dans la négociation du"traité d’amitié" avec la France.À gauche et dans les allées dupouvoir à Paris, il y a encore des

Il s’inspirerait notamment de sapropre déclaration, en juillet 1995,sur l’aide que l’État français au-rait apportée à l’occupant poureffectuer la rafle des juifs au Veld’Hiv en 1942. Mensonge histo-rique, car si des policiers fran-çais participèrent à l’opération,c’est qu’ils avaient été requis parles Allemands et ne pouvaientrefuser. M. Chirac va-t-il recon-naître les prétendus crimes dela France en Algérie ? Ce seraitindigne.

Bouteflikademandeur

Il faut garder à l’esprit quedans ce projet de traité d’amitié,M. Bouteflika est demandeur. LaFrance peut donc lui imposer dene pas travestir l’histoire. Si celadevait advenir, le texte signé, re-posant sur des mensonges, se-rait aussitôt contesté par tous lesFrançais qui ont conservé le sensde l’honneur.

Au fait, pourquoi revenir surle passé ? Laissons les histo-riens s’en occuper et faire pré-valoir la vérité. La géopolitiquecommande à la France et à l’Al-gérie de se rapprocher. Tirons-en les conséquences et voyonssur quels terrains une actioncommune peut être entreprise.Pour ce qui est de "l’amitié", onverra plus tard !

ont exprimé un vote néga-tif, avec un record de 64 %

de "non" au Tessin italophone.Un débat animé et un brin

confus, dépassant les clivagestraditionnels, a précédé le réfé-rendum. Avec, à l'arrière-plan, laquestion récurrente du degréd'imbrication de la Suisse dansl'Europe. C'est pourquoi plusieursresponsables politiques, dont leconseiller fédéral Christoph Blo-cher, ont proposé que la de-mande d'adhésion à l'U.E., ensuspens depuis des années, soitpurement et simplement retiréeaprès le "oui" du 25 septembre.Selon le président du Parti radi-cal (centre droit), Fulvio Pelli,cette demande « n'amène pasgrand-chose et ne sert qu'à po-lémiquer ». De fait, la Suisse sesatisfait pleinement de la voie bi-latérale, d'autant que le secretbancaire n'en souffre pas trop.

Comme il est de coutume enSuisse, les partisans du "non"ont pris acte sans barguigner durésultat de la votation. Leur tâcheétait assurément délicate. D'unepart, ils ne bénéficiaient pas dusoutien unanime de l'U.D.C. blo-cherienne, dont l'euroscepticismes'est en l'occurrence mâtiné depragmatisme économique ;d'autre part, ils devaient s'effor-cer de dissiper les craintes sus-citées par la création induite de

deux catégories de ressortissantsde l'Union européenne. Mais àla peur de représailles commu-nautaires (la remise en cause parBruxelles des accords bilatérauxdéjà conclus) répondait le spectredu chômage en cas d'afflux d'unemain-d'œuvre à bon marché : se-lon un sondage d'opinion, les

vent des Algé-riens que desFrançais desouche européenne.

Un bilan positif

Quant au bilan de la présencefrançaise en Algérie, il est lar-gement positif, comme l’a dé-montré M. Michel Klein au col-loque organisé par Jeune Pied-Noir le 23 septembre au Sénat.Faits et chiffres à l’appui, il a rap-pelé avec la précision d’un his-torien tout ce que la France avaitapporté à l’Algérie dans cinq do-maines : l’agriculture, les hydro-carbures, découverts par des in-génieurs français au Sahara, lescommunications, l’habitat, lasanté. La France a abandonnéen 1962 au FLN un pays floris-sant avec de grandes promessesd’avenir.

M. Bouteflika a affecté d’avoirun geste en invitant les fils et lesfamilles des harkis à prendre leurplace dans la communauté na-tionale, mais ç’a été pour les op-poser à leurs pères en désignantceux-ci comme des « traîtres »et des « collaborateurs » desforces coloniales. Le présidentalgérien espère « récupérer » lesquelques centaines de descen-dants de harkis qui ont rejoint leFront islamique du salut pour sevenger de l’humiliation, et sur-tout des tortures, subies par leurspères du fait du FLN.

au long de la campagne électo-rale, s’est déchaîné contre les« crimes » commis par les Fran-çais au cours de la période co-loniale. Il déclarait ainsi à Be-char à la fin août qu’ils « n’ontpas d’autre choix que de re-connaître qu’ils ont torturé, tué,exterminé ». À Batna, le 12 sep-tembre, il conditionnait la conclu-sion d’un traité d’amitié prévu d’icià la fin de l’année entre les deuxpays à la reconnaissance so-lennelle par la France des atro-cités commises de 1830 à 1962...

On ne peut davantage tra-vestir la vérité de ce qu’a été laprésence française. Bien plutôtpourrait-on demander au F.L.N.algérien de faire repentance pourses innombrables crimes, dontles victimes ont été le plus sou-

menace et de l'apaisement. Pourrassurer et attirer les hésitants,ils ont fait valoir l'existence de« mesures d'accompa- gne-ment », qui permettront à Bernede contingenter l'accès au mar-ché du travail jusqu'en 2011.

Activismelibéral

L'ennui est qu'au même mo-ment le commissaire européenen charge de l'emploi et des af-faires sociales, Vladimir Spidla,appelait les « vieux » Étatsmembres de l'U.E. à « envisa-ger la suppression des pé-riodes transitoires » entrées envigueur dès l'élargissement. C'estdire si ce type de garantie pèsepeu en regard de la dynamiquelibérale activée à Bruxelles. Et laFrance est ici concernée. Un nou-veau groupe d'experts européensa été chargé d'évaluer les effetsde l'élargissement, et des res-trictions qui l'accompagnent, surles mouvements de travailleurs.Sur la base des données ainsirecueillies, les États devront direen avril prochain s'ils décidentou non de renoncer aux mesurestransitoires. A n'en pas douter, lapression sera forte sur les gou-vernements réticents et préoc-cupés par la fragilité de leur

propre marché de l'emploi.Le cas de l'Allemagne est à

cet égard éclairant. Si elle n'apas connu un déferlement de tra-vailleurs provenant des nouveauxpays membres, certains secteursde son économie sont fortementpénalisés par l'élargissement, enparticulier l'artisanat où plus de50 % des créations d'entreprisessont le fait de ressortissants del'Est européen. Avec pour consé-quence une explosion du nombrede faux indépendants, qui tra-vaillent en réalité comme des sa-lariés à des tarifs cassés ; à quois'ajoute l'apparition de sociétéssous-traitantes qui fournissentpar centaines des travailleurs ve-nant de Pologne ou de Répu-blique tchèque.

Non-membre de l'Union eu-ropéenne, la Suisse aura été cu-rieusement le seul pays à se pro-noncer par référendum sur l'élar-gissement. La votation du 25septembre ne met toutefois pasun terme à cette histoire. Le Par-lement helvétique doit en effetdécider en 2009, au vu des ré-sultats enregistrés, de prolongerou non le traité sur la libre cir-culation. C'est là, bien sûr, unedisposition toute formelle. LaSuisse vient de tester les limitesde sa témérité.

parPierre PUJO

"porteurs de valise" du F.L.N. quigardent mauvaise consciencepour la présence française en Al-gérie et prennent le parti de ceuxqui accusent notre pays. Alors,M. Bouteflika aurait tort de se gê-ner !

Si l’on en croit le Figaro(28/9/2005), Jacques Chirac se-rait prêt à faire des concessionsà M. Bouteflika pour parvenir àla conclusion du "traité d’amitié".

Abdelaziz Bouteflika

jeunes actifs, de 18 à 35 ans, sesont majoritairement prononcéscontre l'extension de la libre cir-culation.

Quant aux tenants du « oui »,ils ont usé alternativement de la

En Suisse romande, le conseiller national valaisien

Oscar Freysinger a été le principalanimateur de la campagne

en faveur du “non”.

La Suisse et l’Union européenne

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L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 7

IL Y A 25 ANS, SOLIDARNOSC

LA FOI QUI SOULEVE

LES MONTAGNES

parMichel FROMENTOUX

Ce qui se passa en Pologne

de 1979 à 1989 eut des résonances

profondes dans les pays

soumis au joug soviétique.

�� Qui aurait dit en août1980 que Lech Walesa, cetélectricien de trente-septans, pieux père de famille,renvoyé de son travail surles chantiers navals deGdansk pour ses activitéssyndicales, réduit à effec-tuer des emplois tempo-raires, changerait la facenon seulement de la Po-logne, mais du monde ?La colonne du temple so-viétique qu'il ébranlait al-lait en dix ans emportertout l'édifice concentra-tionnaire que l'on croyaitinvincible.Nul doute que le soutiende l'Église polonaise in-carnant la résistance aucommunisme et le passéchrétien de la nation, de

même que l'arrivée deuxans plus tôt d'un enfantdu pays sur le trône desaint Pierre, n'aient incul-qué à Walesa et aux17 000 ouvriers qu'il lan-çait dans une dangereusegrève, la force de la foiqui renverse les montagnes.Prix Nobel de la Paix troisans plus tard après desmois de prison, puis pré-sident de la Républiquede 1990 à 1995, Lech Wa-lesa n'a pas toujours alliéà sa foi inébranlable unegrande clairvoyance poli-tique, notamment àl'égard des communistesreconvertis, comme le luireprochent des anciensdes dix millions demembres qu'a comptésSolidarnosk.Il importe toutefois de rap-peler l'événement extraor-dinaire de 1980, alors queles intellectuels mondia-listes et matérialistes vou-draient imposer l'idée queseule la "Perestroïka"d'un Gorbatchev auxabois a déchiré le rideaude fer...L'autre raison d'évoquerce grand mouvement dejeunesse d'une nation se-couant son joug nous estfournie par les Polonaiseux-mêmes qui viennentde manifester par lesurnes leur volonté deprendre leurs distancesavec la corruption moraleet religieuse de l'Occidentqui fut chrétien. Se libérerdu communisme est bien,ne pas se laisser contami-ner par d'autres formes"douces" de matérialismeest mieux. Puisse la Po-logne rester un exemple !

D O S S I E R

FACE AU COMMUNISME

L'exemple polonaisParmi la vingtaine de chefs

d'État et de gouvernementvenus à Varsovie à la fin du

mois d'août pour célébrer les vingt-cinq ans de la création du syndicatSolidarité, ne figurait aucun Fran-çais. Comme pour donner raisonau journaliste américain Ted Stan-

En 1956, lesouvriers de l'usineZispo s'étaient misen grève ; les communistes réagi-rent : bilan officiel, 48 morts. En dé-cembre 1970, les ports de la Bal-tique s'étaient enflammés, le siègedu parti avait été mis à sac, crimesuprême ; on tira sur la foule, bi-lan officiel : 45 morts. En été 1976des grèves avaient éclaté à Usses

ger qui soutient dans un ouvragerécent (1) que la France, avec sessyndicats politisés, son Éducation"nationale" gangrénée, ses élitesmarxisées, est le dernier pays so-viétique...

Solidarnosc, en entraînant lachute du communisme dans toutel'Europe de l'Est, a balayé le fa-meux "sens de l'Histoire" – crimeimpardonnable pour nos trissotinspolitiques et intellectuels. Le com-munisme avec ses dizaines de mil-lions de morts, ses goulags, sonrégime permanent de terreur, était,au fond, si rassurant pour nos dé-fenseurs patentés des Droits del'Homme, que toute remise encause du système leur paraissaitscandaleuse. Or, c'est à cela, pré-cisément, qu'aboutit la création deSolidarnosc : un crime pour nospenseurs dévoyés !

Un petit grainde sable...

Le 14 août 1980, les ouvriersdes chantiers navals de Gdansk semettaient en grève à cause de l'aug-mentation du prix de la viande etdu licenciement d'un délégué syn-dical. Le pouvoir ne s'émut guère.Il avait l'habitude de ces révoltesqu'il matait dans le sang.

emprisonne-ments... Seule-ment, voilà : entre

1976 et 1980 s'était glissé un petitgrain de sable : l'élection d'un Po-lonais comme pape dont la pre-mière parole avait été : « N'ayezpas peur. » Pour les Polonais celasignifiait : n'ayez pas peur en facede ce régime abject qui vous op-prime.

parYves LENORMAND

Walesa obtint la création d'un syn-dicat libre et indépendant et le droitde grève. C'eut été inimaginablequelques jours auparavant. Le len-demain, à 17 heures, les accordsde Gdansk étaient signés.

C'était là, évidemment, unexemple déplorable pour les paysdu bloc soviétique. Aussi leurs di-rigeants exigèrent-ils du généralJaruzelski que les choses s'arrê-tent. Le 13 décembre 1981, desmilliers de militants et de sympa-thisants de Solidarité étaient em-prisonnés, le syndicat dissous etl'état de guerre proclamé. Faut-ilcondamner pour autant le chef del'État polonais ? C'est bien difficileà dire, car celui-ci devait avoir enmémoire ce qui s'était passé à Bu-dapest en 1956 et à Prague en1968. En faisant lui-même le tra-vail, il a limité, sans doute, les dé-gâts...

Résurrection

En octobre 1983, Lech Walesareçut le prix Nobel de la paix. C'étaitlà un geste fort mais purement sym-bolique.

Plus important, en revanche, futen mars 1985 l'arrivée au pouvoirà Moscou de Gorbatchev car, avecla perestroïka, il allait déstabilisertous les vieux dirigeants des payscommunistes, vieux staliniens blan-chis sous le harnois, incapablesd'appliquer une autre politique quecelle qu'ils avaient toujours connue :les tortures, les emprisonnements,les fusillades...

C'est dans ce climat que Jean-Paul II effectua en juin 1987 sontroisième voyage en Pologne. Ils'agenouilla devant le monumentaux victimes de la répression desgrèves de 1970. C'était là un signefort en direction de l'opposition quien avait bien besoin et de la hié-rarchie catholique qui avait pris sesdistances vis-à-vis d'elle.

Cette visite eut des suitesimportantes puisqu'elle re-

�� Depuis des années le "dissi-dent" Soljenitsyne criait à notreOccident ramolli qu'une parole devérité aurait plus de poids que50 000 chars du pacte de Varso-vie. Cette parole, un Polonais, l'ar-chevêque de Cracovie Karol Wo-jtyla devenu contre toute attentele pape Jean-Paul II le 17 octobre1978 et se faisant dès lors la voixde l'Église du silence, vint, deRome, la dire à la face de Gierek,Premier secrétaire de Parti com-muniste polonais, qui n'en menaitpas large, dès le 2 juin 1979 :« Il n'est pas possible de comprendresans le Christ l'histoire de la nationpolonaise – de cette grande com-munauté millénaire – qui décide siprofondément de moi et de chacunde nous [...] Il ne peut y avoir d'Eu-rope juste sans l'indépendance dela nation. »

Le soutien de Jean-Paul IIDe telles paroles ont réveillé

l'âme polonaise, la préparant à su-bir tous les affronts sans perdrel'espérance. L'heure de Walesaavait sonné : l'appui de Jean-Paul II lui était assuré. Face auxmenaces d'intervention des forcessoviétiques, le pape écrivit à Leo-nid Brejnev pour défendre la sou-veraineté de la Pologne. En 1981,il recevait solennellement Walesaau Vatican.

On peut dire que la "normali-sation" d'un pays communisteéchoua pour la première fois grâceà la conjugaison d'une économieen train de s'effondrer, d'une fermerésistance nationale et du soutiende l'Église. L'espérance chrétiennea soutenu les volontés. Une leçonà méditer, en Pologne et ailleurs...

M.F.

Et de répéter durant une se-maine aux Polonais : « Ne vousdétachez jamais du Christ. Ne per-dez jamais la liberté d'esprit, par la-

quelle Il rend l'homme libre ! » Et deprier : « Que descende ton Esprit !Et qu'il renouvelle la face de la terre,de cette terre ! »

Jean-Paul II en visite en Pologne en 1979

Cela entraîna une conséquenceimportante : l'Église constituait avecle parti communiste la seule forceorganisée de ce malheureux pays.En vertu d'un accord tacite passéavec le régime, il avait été décidéde livrer au gouvernement les corpstout en laissant au pouvoir spirituelles âmes. De ce fait, l'Église quiétait restée jusqu'alors sur une pru-dente réserve, allait entrer, discrè-tement, dans la bataille.

Répression

Le 30 août 1980, après quatrejours de négociations épuisantes,

et à Radom : même traitement dechoc. Alors des intellectuels polo-nais avaient décidé de réagir encréant la K.O.R. (comité de défensedes ouvriers) qui obtint que les ou-vriers arrêtés fussent relâchés. Ils'était lancé dans la presse clan-destine. Au total, rien de bien dan-gereux pour un régime où tous lesconflits, comme en U.R.S.S., se ré-glaient par la force.

Aussi, lorsque les grèves écla-tèrent à la mi-août 1980 à Gdansk,le régime communiste n'avait paslieu d'être inquiet, puisqu'avec lacomplicité de l'Occident, il pensaitpouvoir appliquer les mêmes re-mèdes qu'auparavant : fusillades,

Lech Walesa en août 1980

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8 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

En mille ansd'histoire,

la volonté héroïquedu peuple polonais

enracinée dans son

catholicismefervent

n'a pas été étayéepar des institutions

fortes s'inscrivant

dans la durée.

IL Y A 25 ANS, SOLIDARNOSC

D O S S I E R

La volonté de survivre

Évoquant en 1911 la Pologneet son renouveau littéraire etartistique au XIXe siècle,

Charles Maurras n'en écrivait pasmoins : « Le domaine du Tempsappartient, comme celui del'Espace, aux peuples qui savent

s'y fonder puissamment, s'yfortifier savamment. Il échappeaux prises trop faibles, auxefforts menés sans sagesse etsans esprit de suite. Le titre his-torico-juridique ne vaut qu'au-tant qu'on le soutient. »

ensuite le bon-heur de laPologne : Louisd'Anjou, de l'illustre et fécondeMaison d'Anjou fondée par le plusjeune frère de saint Louis, était déjàdepuis 1342 roi de Hongrie et deCroatie. Neveu par sa mère deCasimir III, il fut couronné en 1370roi de Pologne. Étranger il dutaccorder à la noblesse des privi-lèges qui allaient plus tard paraly-ser l'État, mais son prestige luipermit d'en imposer aux Teutons etde repousser les agresseurs litua-niens païens.

À sa mort en 1382, sa fillecadette Hedwige d'Anjou futcontrainte, devant une nouvellemenace d'invasion germanique, dese rapprocher des Lituaniens enoffrant sa main à leur grand ducJagellon ; celui-ci (dont les terress'étendaient jusqu'en Ukraine et quiredoutait aussi les Teutons) s'em-pressa en 1386 de se convertir aucatholicisme et d'épouser la reineHedwige trois jours plus tard,devenant ainsi le roi de PologneLadislas II, tout en restant duc sou-verain de Lituanie.

Cette union allait profondémentmarquer la Pologne : Hedwige, jus-qu'à sa mort en 1399, incarna lapuissance spirituelle de son pays,s'appliquant à convertir lesLituaniens, introduisant la théolo-gie à l'université de Cracovie...amples mérites que n'oubliait pasle pape Jean-Paul II qui canonisala reine en 1997 lors d'un voyagesur sa terre natale.

crer en 1569 parl'Union de Lublinla fusion des

royaumes de Pologne et deLituanie.

Le territoire s'étendait alors dela Baltique à la Mer Noire et jus-qu'aux portes de Moscou, etconnaissait un grand essor intel-lectuel (Nicolas Copernic naquit àTorun en 1473) et économique. Dequoi attiser la jalousie desHabsbourg, puissance montanteen Allemagne, et des grandsprinces de Moscou, futurs tsars,s'apprêtant à rassembler les terresrusses ! La Pologne risquait àchaque instant d'être prise entenaille et la tâche des Jagellonétait d'autant plus périlleuse que lanoblesse marchandait son soutienà leurs entreprises prestigieuses...

Systèmeaberrant

En 1403, la diète de Piatrkowforça le roi à reconnaître un régi-me de république nobiliaire quiallait plus tard permettre à un seulmembre de la diète de faire échecà une décision royale ! Pire : à lamort du dernier Jagellon (1572) lamonarchie devint élective ! Le pre-mier élu fut Henri de Valois, frèredu roi de France Charles IX qu'illui fallut remplacer en France cinqmois plus tard sous le nomd'Henri III. Le trône devenu vacantétait convoité de l'étranger : si letransylvanien Étienne Bathory

vrant en 1683 la Vienne desHabsbourg.

Déchirée entre l'électeur deSaxe (Auguste II) que soute-naient les Habsbourg et le tsar, etStanislas Leszczynski que sou-tenaient la Suède et la France, lacouronne polonaise demeura incer-taine jusqu'au jour où Stanislas,beau-père de Louis XV, préféra lecalme de son duché de Lorraine.

donna confiance à tous lespatriotes polonais ainsi qu'aux

forces revendicatives. En 1988, denouvelles grèves éclatèrent dansles ports de la Baltique. Walesaécrivit alors à Jaruzelski pour luiproposer des négociations. Le pou-voir accepta. Walesa exigea qu'unreprésentant de l'Église participâtà ces négociations afin d'éviterd'être piégé. Le pouvoir l'admit.

En septembre 1988 commen-cèrent des négociations secrètes.Celles-ci eurent une importance ca-pitale, car elles permirent de faireévoluer le climat de méfiance quiexistait des deux côtés. L'Église nedonna qu'un mot d'ordre à son re-présentant : éviter à tout prix la rup-ture. C'est ce qui se passa.

Le 6 février 1989 s'ouvrit la tableronde officielle. D'un côté les com-munistes cherchaient à sortir la Po-logne de l'impasse où elle se trou-vait, de l'autre les dirigeants de So-lidarnosc voulaient abolir la fonctiondirigeante du parti. Ils exigèrent,entre autres choses :

– l'indépendance de la justice,– la liberté d'association,– la représentation parlemen-

taire de l'opposition.Les négociations durèrent jus-

qu'au 5 avril. Elles aboutirent à lareconnaissance de Solidarité et àl'organisation d'élections semi-libres.

En juin, Solidarnosc remportatous les sièges au Sénat sauf unet 35 % des sièges à la Chambrebasse, les communistes s'étant ré-servés, par avance, 65 % dessièges à pourvoir. En sep-tembre,Tadeuz Mayowieski deve-nait le premier chef de gouverne-ment non communiste de l'Europede l'Est.

Ce qui se passait en Pologneeut des résonances profondes dansles pays soumis au joug soviétique.L'exemple polonais se révéla vitecontagieux. Il conduisit à la libéra-tion de tous ces pays, honteuse-ment abandonnés par Churchill etpar Roosevelt à Yalta, et à la chutedu mur de Berlin.

Les communistesreconvertis

Tout n'était pas rose pour au-tant. Non seulement le pays étaitruiné, mais surtout, pour permettreune sortie de crise rapide, les diri-geants de Solidarité acceptèrentde passer l'éponge sur les crimescommis par les communistes de-puis 1939, en sorte que, non seu-lement ceux-ci furent blanchis, maisles dirigeants du parti, qui avaientprofité du système au détriment dupeuple pendant toute cette période,se reconvertirent dans les affairesen s'emparant des sociétés d'Étatlors des privatisations. Ainsi plusça changeait en apparence, pluscela restait pareil en réalité.

Walesa l'apprit à ses dépens.Élu président de la République en1990, il fut battu par un ex-com-muniste en 1995 et la majorité dela Chambre repassait cette année-là aux marxistes.

(1) Ted Stanger : Sacrés Français,le roman ! Éd. Michalon.

Quant à Ladislas II, ayant infli-gé une cuisante défaite auxTeutoniques à Tannenberg en1410, il implanta fortement ladynastie des Jagellon laquelledeux siècles durant allait ériger laPologne en grande puissanceeuropéenne, entreprendre la croi-sade contre les Turcs, s'emparerde la Poméranie et de la région deGdansk vidée des Teutons, vas-saliser ainsi la Prusse, puis prendrela Livonie et la Courlande (Estonieet Lettonie actuelles), enfin consa-

(1576-1586) s'efforça de restaurerl'État, ses successeurs suédois, lesVasa, ne surent faire face auxassauts des protestants, desMoscovites, des Cosaquesd'Ukraine, des Tatars et des Turcs.En 1654, ce fut la curée et laPologne eût sans doute disparusans la résistance incarnée par lesmoines de Czestochova. Vingtans plus tard, nouveau sursaut : ungrand lettré à l'âme de croisé, JeanSobieski, conduisit contre lesTurcs la charge restée célèbre déli-

parMichel FROMENTOUX

Tel est le drame de ce paysfondé au Xe siècle sur le territoiredes Polanes (habitants de la plai-ne) entre la Vistule et l'Oder,poste avancé de l'Occident chré-tien depuis la conversion en 966du duc Mieszko Ier au catholicis-me. Sa descendance – la dynas-tie des Piast parvenue bientôt à laroyauté – eut longtemps du mal àmaintenir l'unité face à la pousséegermanique (les chevaliersTeutoniques) à l'Ouest et auxincursions des Mongols à l'Est.Déjà se manifestait la fragilité dece royaume au carrefour de civili-sations diverses et sans frontièresnaturelles. La volonté héroïqued'une population solidement enra-cinée dans son catholicisme étaitde bon augure mais serait-elle unjour étayée par des institutionsfortes s'inscrivant dans la durée ?

Puissancechrétienne

Les derniers Piast consolidè-rent l'État, fondèrent l'université deCracovie (1364), reprirent desterres aux Teutoniques, soumirentla Mazovie et la Galicie. C'est unprince de sang français qui fit

Les intrigues continuèrentquand même, puis Catherine IIimposa en 1764 son neveuStanislas-Auguste Poniatowski,lequel eut le tort de vouloir être unvrai roi et relever son pays, ce quimit en colère à la fois Frédéric IIde Prusse, l'impératrice Marie-Thérèse et même la tanteCatherine ! Les trois s'entendirenten 1772 pour un partage de laPologne, lequel, dans une Europeébranlée par les armées de laRévolution française, allait êtresuivi d'un autre en 1793 et d'un troi-sième en 1794, véritable dépeça-ge qui contraignit Poniatowski àl'abdication. On voit que le sort deleur cousin Louis XVI n'était pas lesouci principal des souverainseuropéens !

Vibrantpatriotisme

La Pologne était rayée de lacarte, mais un courant patriotiques'était constitué et allait animer lesexilés polonais nombreux dans lesarmées napoléoniennes. LeCongrès de Vienne (1815) redis-tribua les cartes : la Prusse prit laPosnanie, l'Autriche la Galicie et lereste, autour de Varsovie, devint unroyaume uni à l'empire russe parune alliance personnelle avec letsar.

Au long du XIXe siècle, si laGalicie jouissait d'une certaineautonomie dans l'empire austro-hongrois, les autres régions étaientlivrées à des tentatives de plus enplus brutales ici de germanisation,là de russification. Mais le senti-ment national, retrempé dans leromantisme à la mode et soutenupar les artistes ou intellectuels émi-grés (le poète Adam Mickiewicz, lemusicien Frédéric Chopin) s'illus-tra bientôt jusqu'au cœur deVarsovie, suscitant les insurrectionsde 1830, 1848, 1863, et surtoutcelle de 1905 dont l'âme fut le gen-tilhomme lituanien JosefPilsudski (1867-1935).

Hedwige d’Anjou(1372-1399)

reine de Pologne en 1382,épouse de Ladislas II

Stanislas-Auguste Poniatowski(1732-1798)

roi de Pologne en 1764

La Pologne actuelle

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L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 9

IL Y A 25 ANS, SOLIDARNOSC

Historiquement prise en tenaille

par Berlin et Moscou,la Pologne

n'a de cessed'échapper à cet étau.

Les États-Unis ontmalheureusement

pris la place de la Francecomme allié

principal des Polonais.

D O S S I E R

GÉOPOLITIQUE DE LA POLOGNEpar

Pierre LAFARGEPour aborder la géopolitiquepolonaise, il faut, commetoujours dans cette disci-

pline, plonger dans l’histoire decette nation afin de mieux saisir

donc vital pour cette vieille nationde rechercher une alliance avecune puissance plus lointaine afinde desserrer cet étau.

Ce fut longtemps la France.Paris accueillit au XIXe sièclenombre de réfugiés politiques po-lonais. A l’issue de la PremièreGuerre mondiale, les Français ai-dèrent la jeune république à sau-vegarder son indépendance faceà la menace soviétique (missionWeygand), et en 1939 entrèrenten guerre suite à son invasiondans les conditions que l’on sait.

Atlantisme

Cette alliance française a au-jourd’hui fait place à une allianceaméricaine et à un atlantisme cer-tain. Depuis l’effondrement del’empire soviétique, les Américainsn’ont eu en effet de cesse de pla-cer leurs pions aux marches dela Russie que ce soit en Asie Cen-trale, dans le Caucase et surtoutdans les pays slaves d’Europe del’Est. Ils ont favorisé, voire initié,l’an dernier la fameuse « révolu-tion orange » en Ukraine.

Ils lorgnent désormais vers laBiélorussie, allié très sûr de Mos-cou. La minorité polonaise de cette

les lignes de forces qui l’animent.La Pologne s’est trouvée au coursde la période moderne successi-vement menacée et occupée parla Prusse, la Russie et l’Autriche(partage de 1795) puis par l’Alle-magne et l’Union soviétique (pactegermano-soviétique de 1939) etenfin placée à partir de 1945 sousl’influence de cette dernière. Il est

Celui-ci, surmontant lesmalheurs de la Première

Guerre mondiale, devint en 1918chef de gouvernement d'unePologne rétablie dans ses droitsmais dont les frontières issues desutopies wilsoniennes du traité deVersailles seraient longuementrediscutées. En 1920, avec l'aidedu général français MaximeWeygand, il repoussa l'Arméerouge venue s'installer là où lesAllemands avaient été délogés.

république autoritaire, dirigée parAlexandre Loukachenko, a ré-cemment fait les frais de cettestratégie américaine qui passeégalement, et c’est là l’essentielde notre propos, par Varsovie. LaPologne a intégré l’O.T.A.N. enmars 1999 à la grande fureur deMoscou. Elle fait aujourd’hui fi-gure de bastion avancé de Wa-shington dans la région.

Dans l'U.E.sans

enthousiasmeLes Américains jouent sur l’ap-

préhension, historiquement lo-gique et compréhensible, de laPologne envers l’hégémonierusse. Cette peur explique éga-lement, plus que des raisons stric-tement économiques, l’adhésionà l’Union européenne. La Pologneconnaît en effet, et à la différenced’autres États issus de l'ancienbloc de l’Est, un fort courant sou-verainiste, notamment d’inspira-tion catholique, extrêmement mé-fiant à l’égard du matérialisme etdu libéralisme de Bruxelles.

Charybde et Scylla

En 1984, la Pologne avaitréussi l’impossible. Grâceà une "table ronde" qui ré-

unissait dirigeants communisteset opposants du syndicat Soli-darnosc, on avait assisté à ce quepersonne n'eût cru possible : unpacifique changement de régime,bénéficiant de l’accord des ap-paratchiks communistes. Lalongue lutte du peuple polonaiscontre le régime théomaque qu’onlui avait imposé aboutissait à laplus éclatante victoire.

Le but avoué de Bruxelles est de faire de la terrepolonaise

un nouveau marché,et de calquer

sa société sur celle

de l'Europe de l'Ouest.

Les Polonais ne semblent pas

résignés à se laisser faire.

population de Varsovie en 1944) etla terreur communiste (4500 offi-ciers morts dans le charnier deKatyn), celle-ci s'ajoutant à celle-là beaucoup plus que la combat-tant...

L'espéranceest chrétienne

Les accords de Yalta laissèrentaux Soviétiques la partie orienta-le du pays (l'est d'une ligne allantde Suwalhi à la rivière Bug) maisle sud de la Prusse orientale, laPoméranie et la Silésie, devinrentpolonais (l'est de la ligne Oder-Neisse). Quelques idiots utiles(Wladyslaw Gomulka, BoleslasBierut) affichèrent jusqu'en 1948l'illusion d'une indépendance de l'É-tat polonais, mais en 1952 lepays devint une république popu-laire inféodée à Moscou, adhérantau Pacte de Varsovie, se lançantaussitôt dans la persécution reli-gieuse sans se montrer capable derésoudre les énormes difficultéséconomiques.

En 1970, des grèves noyéesdans le sang montrèrent que legouvernement populaire ne faisaitpas le bonheur du peuple. Quandl'inflation eut atteint le taux de 60 %(1976) les émeutes se multipliè-rent. De son côté l'Église catholiquetenait tête à ses bourreaux, sousla conduite des cardinauxWyszynski, archevêque deVarsovie, et Karol Wojtyla, arche-vêque de Cracovie : au moment oùl'on s'y attendait le moins, une nou-velle page de l'histoire de laPologne allait s'ouvrir.

logne, Roumanie, Serbie…). En-voyé il y a quelques années parun grand quotidien français à unpetit-déjeuner de presse à l’am-bassade de Pologne avec le mi-nistre des Affaires étrangères po-lonais, j’eus la surprise de m’ytrouver seul journaliste présent.Comment s’étonner ensuite qu’en2002 la Pologne ait préféré ac-

jeu dans la région. Un chantierrendu plus ardu chaque annéepar le temps qui inexorablementdistend les antiques relations(Henri III fut roi de Pologne) tis-sées entre nos deux pays, que lacourte mémoire de la républiquene semble guère appréhender àsa juste valeur.

Et pourtant… Si le combat desPolonais était tout imprégné d’unefoi héroïque, qui eût pu les me-ner à reconstituer une société tra-ditionnelle et chrétienne, les pré-jugés modernes et démocratiques

contre-révolution polonaise futétouffée.

Lorsque l’on parcourt la Po-logne d’aujourd’hui, ayant connucelle d’autrefois, on ne peut s’em-pêcher de se demander quel estle pire des deux régimes que l’his-toire récente a vu se succéder.Bien sûr, le christianisme n’y est

parRomaric d’AMICO

étaient trop ancrés, déjà, dans lesesprits. Une fois victorieux, lesPolonais ont cru qu’ils n’avaientque le choix entre deux régimespossibles : la dictature commu-niste et la démocratie parlemen-taire, et entre deux systèmes éco-nomiques possibles, le socialisteet le libéral. C’est pourquoi la

plus persécuté, et l’absurde ca-téchisme marxiste n’est plus dé-bité à longueur de colonnes dansles journaux, et à longueur dejournée dans les écoles. Cela re-présente déjà une délivrance etun triomphe, nul ne saurait le nier.Pourtant, on peut aussiconstater que le fossé s’est

Cette situation ne s’expliquepas uniquement par la puissanceactuelle des États-Unis. Nous enportons également la responsa-bilité. La France n’a plus actuel-lement de véritable politique ex-térieure dirigée vers les pays d’Eu-rope de l’Est, même ceuxparticulièrement francophiles (Po-

quérir 48 F16 (avions de chasseaméricains) plutôt que nos Mi-rages 2000 ?

Atlantisme, grande méfianceenvers la Russie de Poutine, ad-hésion peu enthousiaste à l’U.E.,voilà les données polonaises quedoit prendre en compte la Francesi elle veut tirer son épingle du

Le maréchal Pilsudski établit unpouvoir fort, mais Maurras en cesannées-là déplorait que la Polognene fût pas assez sage pour se don-ner une monarchie héréditairecapable de fédérer plusieursnations et d'être « entrel'Allemagne unie et la Russietumultueuse » l'État solide dontseule elle eût pu réaliser le « chef-d'œuvre ». Hélas, principale vic-time du pacte germano-soviétique(1939) la Pologne connut avec laSeconde Guerre mondiale à la foisla terreur nazie (déportations mas-sives, camps d'Auschwitz etTréblinka, extermination de la

La place du Vieux-Marché à VarsovieLa France néglige les pays de l’Europe de l’Est

« La Contre-révolution nesera pas une Révolutioncontraire, mais le contraired’une Révolution » écrivait Jo-seph de Maistre. Si cette phrasepeut s’appliquer à une situationhistorique, c’est bien à celle-là.

Le Palais Royal de Varsovie

Joseph Pilsudski(1862-1935)

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D O S S I E R

APRES LES ELECTIONS DU 25 SEPTEMBRE

Le tournant ?

La politiqueéconomique

et sociale polonaisesera désormais plus nationale.Varsovie sera,

sans nul doute,bien moinsmalléable

face à Bruxelles.

Bien que la grande presse aittenté d’accréditer la thèsecontraire, les résultats des

élections législatives qui viennentde se dérouler en Pologne pour-raient constituer un véritable tour-nant pour ce pays tant sur le planpolitique qu’économique, mais éga-lement dans ses relations avecl’Europe de Bruxelles. N’oublionspas que la Pologne est le plus im-portant des "nouveaux" pays eu-ropéens et qu'elle est même consi-dérée comme un des "grands" del’Europe.

moment seule-ment que l’onsaura de manièreassez claire l’orientation future dela Pologne.

Voilà, en gros, ce que la grandepresse a dit sur les résultats desélections. Or, il faut aller plus loin.

La voiedu redressement

D’abord, sur les résultats. Deuxgrandes formations de droite quel’on appellerait d’extrême enFrance, Samoobrona (Autodé-fense) et surtout la Ligue des Fa-milles (L.P.R.) ont obtenu respec-tivement 11,6 % et 7,89 % des suf-frages et 57 et 53 sièges. Un poidsimportant dans la balance. Les so-ciaux-démocrates (ex-commu-nistes) pratiquement au pouvoirces dernières années, surtout avecle président sortant Kwaniewski,n’obtiennent que 11,38 % des voixet 56 sièges. Arithmétiquement, ilsne compteront plus.

Une majorité de droite de re-change, au moins un appui sup-plémentaire aux mesures de re-dressement social et surtout mo-ral est donc imaginable avec lesdeux "petites" formations restéesà l’écart de la coalition qui sera aupouvoir.

Le dimanche 25 septembre, 30millions d’électeurs polonais de-vaient voter pour élire les 460 dé-putés de la diète et 100 sénateurs.

Le taux de participation a étéfaible, autour de 40 %. Les résul-tats se traduisent par une défaitehistorique – le mot est faible – dela gauche et une victoire de la

peut-être un mo-dèle.

De la chute ducommunisme jusqu’à présent,quelle que soit l’équipe en place,la Pologne a suivi, à des nuancesprès, une politique d’inspirationmondialiste. Son dernier Premierministre, le néo-communiste Les-zek Miller, récemment écarté pourcorruption, bénéficiait d’un soutienostentatoire des milieux trilatéra-listes.

parPascal NARI

ficacement contre la corruption quigangrène les organes gouverne-mentaux. Les néo-communistes etles mondialistes craignent, on lescomprend, cette volonté d’instau-rer un État propre. Tant sur le planpolitique et moral qu’économique.

Il s’est dit au cours de la cam-pagne électorale que 240.000 Po-lonais travaillaient naguère pourles services spéciaux soviéto-po-lonais. Chiffre exagéré aux yeuxdes spécialistes et qu’il faudrait entout cas relativiser. Mais les Polo-nais souhaitent faire la lumière,rendre hommage aux victimes desrépressions successives (il y avait200 camps et 49 prisons politiquessous le régime communiste). C’estla condition préalable à une so-ciété apaisée et plus stable.

Il s’est également dit que W.Cimosziewicz, Premier ministre en1996-1997, aujourd’hui candidat àla présidence avec le soutien desnéo-communistes et des milieuxtrilatéralistes occidentaux (accré-dité de 18 % de voix aux dernierssondages) était un agent des ser-vices spéciaux soviétiques sous lepseudonyme de "Carex". Vrai,faux ? Une grande majorité dupeuple polonais voudrait que cepassé soit enfin purgé, que la vé-rité soit établie avant la nécessairepaix civile.

Politiquesouveraine

Quelques spécialistes avertisde la situation polonaise nous di-sent qu’il faudrait souhaiter la vic-toire de Lech Kaczynski, juriste deformation, aujourd’hui maire de lacapitale, aux élections présiden-tielles du 9 octobre. Ainsi la voieserait ouverte et la continuité ga-rantie à une politique indépendanteet souveraine, à une lutte efficacecontre la corruption au sommet del’État, à une prise en compte dupassé historique et catholique dela Pologne et à des réformes éco-nomiques adaptées aux structuresde ce pays.

Espérons que l'avenir leur don-nera raison. La lumière pourraitvenir de l’Est. Situation à suivreavec attention.

�droite. La gauche a été balayéedu Parlement. Le Parti Droit Jus-tice (P.I.S.), de forte inspiration ca-tholique et traditionaliste, mené parles frères jumeaux Lech et Jaros-law Kackzinski arrive en tête avec26,86 % de voix. Ses alliés libé-raux de la Plate-forme Civique(P.O.) obtiennent 24,23 % des voix.Ces deux formations disposerontde 285 sièges donc de la majoritéabsolue et pourront gouverner en-semble. Un économiste réputé duP.I.S., Kazimierz Marcinkiewicz aété désigné pour diriger le cabi-net. Dans quelques jours, LechKazczynski va briguer la prési-dence de la République. Il seraopposé à Donald Trisk (P.O.), chefde ses alliés libéraux. C’est à ce

Exitle mondialisme

La lecture, sur le plan écono-mique, des résultats va bien au-delà du souhait exprimé par la ma-jorité d’un « équilibre entre so-cial et marché » comme vient del’écrire un des gourous de la pen-sée unique en France. Certes, lesdeux partis coalisés vont opérerdes réformes économiques, créerdes emplois (un jeune Polonaissur trois est au chômage, l’exodedes cerveaux est en train de dé-cimer l’élite polonaise) mais le partiDroit et Justice va imposer une po-litique familiale, que la gauche etles mondialistes ont toujours écar-tée, qui sera unique en Europe,

C’est une rupture avec le mon-dialisme idéologique et la sou-mission aux directives des grandesmultinationales que l’opinion ré-clame. En cela, la Pologne pour-rait se trouver à un tournant, exi-ger également plus d’autonomie àl’égard de l’européisme ambiant.Et cela pourrait faire tâche d’huile.

La politique économique et so-ciale polonaise sera désormaisplus nationale. Varsovie sera, sansnul doute, bien moins malléableface à Bruxelles. Voilà une bonnechose.

L’originalité la plus frappantede la nouvelle coalition au pouvoiren Pologne, et celle qui a été oc-cultée autant que faire se peut, parla "grande" presse, est la volontéferme et affichée de "décommuni-ser" le sommet du pouvoir, de fairele devoir de mémoire indispen-sable sur le passé et de nettoyerles "écuries d’Augias", de lutter ef-

élargi, considérablement,entre pauvres et riches, fai-

sant de la classe moyenne unsouvenir, ou, au mieux, un fan-tôme. La criminalité est en hausseconstante, et on ne peut nulle partà Varsovie garer sa voiture avecl’assurance qu’on la retrouvera.

Libéralismesauvage

Le libéralisme sauvage quel’on a voulu faire passer pour laliberté, est pain béni pour les ma-fieux de toutes sortes, qui sontd’ailleurs souvent d’anciensmembres du parti.

De plus, la Pologne est la terred’élection de tous les investis-seurs étrangers peu scrupuleux,ravis de faire avaler leurs pizzaset leurs hamburgers, leurs jeanset leurs casquettes, leurs panta-lons "taille basse" et autresfrusques "dénudantes", à dejeunes Polonais fascinés par l’Oc-cident.

En effet, la majorité des jeunesPolonais gobe tout ce que lui en-voie l’Occident décadent, des gi-gantesques publicités défigurantles campagnes au mirage euro-péiste, en passant par les stringset les piercings. Car le but avouéde Bruxelles est non seulementde faire de la terre polonaise unnouveau marché, mais aussi decalquer sa sociologie sur celle del’Europe de l’Ouest, en y expor-tant tout l’attirail des mesures anti-paysannes, et donc l’exode rural.C’est pourquoi l’œil délicat pos-sède en Pologne encore moinsde répit qu’en France : les villagesles plus reculés subissent les as-sauts des "réclamiers" déchaînés.Quittez vos campagnes, annoncele message subliminal qui sous-tend l’idée même de l’affichagepublicitaire sauvage en milieu ru-ral : venez vivre en ville, commetout mondialiste qui se respecte...

La rupturenécessaire

Grâce à Dieu, le patriotismeet la piété subsistent en Pologne,bien plus qu'en France. Mais cessentiments tendent à être bienplus répandus parmi les anciensque parmi les jeunes. Et il est àcraindre que, bien que les églisessoient pleines à craquer commeles séminaires, le catholicismepolonais, naguère si fervent, nedevienne semblable à celui desbourgeois du "Second Tant-Pire",pour lesquels la religion n’étaitqu’une habitude sociale n’empê-chant pas Mammon de régnerdans les cœurs.

Puissent les Polonais com-prendre l'urgence d'une ruptureréelle avec ce gâchis libéral quia fait passer la Pologne de Syllaen Charybde ou même de Cha-rybde en Sylla. Tout n'est peut-être pas perdu : les élections quiviennent d'avoir lieu laissent es-pérer une réaction.

Le Parlement polonaisLa droite traditionnaliste au pouvoir

Lech Kaczynskiné en 1949, maire de Varsovie,

candidat à la présidence de la République

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L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 11

LES FILMSD'OCTOBRE

�� LE PARFUM DE LA DAME ENNOIR – Après Le mystère de lachambre jaune, adapté de l'œuvrede Gaston Leroux, qui fut plutôt uneagréable surprise, Bruno Podalydèssigne aujourd'hui la suite des aven-tures du célèbre reporter du genre"Tintin" avant l'heure, Rouletabille(Denis Podalydès) et son fidèle as-sistant Sainclair (Jean-Noël Brouté),intitulées Le parfum de la dame ennoir. Reprenant les mêmes inter-prètes que pour Le mystère de lachambre jaune, notamment SabineAzéma dans le rôle de Mathilde Stan-gerson, Olivier Gourmet dans celuide Robert Darzac et Pierre Arditi danscelui de l'inquiétant Larsan, sansoublier quelques nouvelles têtescomme Zabou Breitman dans le rôlede Édith Rance, Bruno Podalydèsnous entraîne donc au châteaud'Hercule où Mathilde Stangersonfraîchement mariée à Robert Dan-zac, est en villégiature chez leursamis Édith et Arthur Rance. Et c'estlà que le maléfique Larsan réappa-raît et terrorise une fois de plus labelle Mathilde. Heureusement Rou-letabille est lui aussi de la partiepour protéger Mathilde Stangerson...Las, si on ne s'ennuie pas vraimentà ces aventures "fantastiques", onest loin du roman avec lequel BrunoPodalydès prend de sacrées liber-tés et donne dans le "comique". Ducoup, la dame en noir y perd sonparfum de "feuilleton populaire" pal-pitant.

�� QUATRE FRÈRES – Un bon po-lar "western" d'action, ça voustente ? Alors, avec Quatre frères deJohn Singleton, vous êtes à la bonneplace. Un polar qui n'est pas sansrappeler Les quatre fils de Katie El-der d'Henry Hataway avec notam-ment John Wayne et Dean Martin, etqui aurait pu s'intituler "Les quatrefils d'Evelyn Mercer". Et pour cause :l'histoire en est proche. À savoircelle de quatre fils adoptifs, dontMark Wahlberg, qui, après la mortde leur mère adoptive abattue dansune superette, mènent eux-mêmesl'enquête pour retrouver les tueurs.Leur vengeance sera d'autant plussaignante que leur mère n'a pas ététuée au hasard. Derrière ce crime ily a une crapulerie immobilière mon-tée par des notables véreux aco-quinés avec des truands à la gâ-chette facile.

�� Parmi les autres films du moissont à signaler :– le somptueux et fantastique Lesfrères Grimm de Terry Gilliam, avecnotamment Matt Damon, Peter Sto-mare, Heath Ledger et Monica Bel-lucci, dans lequel les frères Grimm,chasseurs escrocs de prétendussortilèges et autres créatures fan-tastiques, vont se retrouver à vivreen réel leurs contes et confrontésà une terrible malédiction jetée parune reine maléfique interprétée parle bellissima Monica Bellucci. – Wallace et Gromit : le mystère dulapin garou, film d'animation (enpâte à modeler) à l'humour so Bri-tish de Nick Park et Steve Box, pa-rodie irrésistible de film de loup-ga-rou dans lequel nos deux héros sontconfrontés à un lapin géant qui ra-vage les potagers à la veille de lagrande fête annuelle des plus groslégumes. – Enfin, pour les amateursdu genre, Serenity, film de science-fiction de Joss Whedon qui nous en-traîne dans une bataille galactiqueentre une équipe d'aventuriers del'espace et une peuplade d'humainsinhumains du genre "termites" vo-races.

Alain WAELKENS

CINÉMAJOURNÉEDE LECTURE

Jacques Aboucaya

DERNIÈRES NOUVELLES DU JAZZ

La plupart des éditeurs répugnent de nos jours à publier des re-cueils de nouvelles, le genre étant, à tort d'ailleurs, réputé peu rentableet n'intéressant qu'un petit cercle d'initiés. C'est oublier que ces coursrécits ont rendu célèbres Guy de Maupassant ou Marcel Aymé.

Heureusement certaines maisons courageuses, parmi lesquellesl'Âge d'Homme, n'hésitent pas à faire paraître des nouvelles et c'esttant mieux !

Jacques Aboucaya est un musicologue averti et collabore à diffé-rentes revues de jazz. Aussi ce style musical est-il présent dans cha-cun des douze contes parfois tendres, souvent drôles et de temps àautres fantastiques de cet ouvrage. Nous rencontrons entre autres unmainate mélomane, des extra-terrestres et un ordinateur critique mu-sical.

Après les premières lignes abordées, on ne repose ce recueil qu'aprèsavoir dévoré ses 106 pages.

À lire en écoutant un disque de Miles Davis ou de Count Basie, sui-vant le moment et ses goûts.

Renaud DOURGES

* Jacques Aboucaya : Dernières nouvelles du jazz. Éditions L'Âged'Homme. 112 pages, prix non communiqué.

SARKOZY,L’HOMME DE L’AMÉRIQUE

�� On a dû se lamenter outre-Atlantique de l’échec relatif d’AngelaMerkel, chef de la C.D.U. aux élections allemandes du 18 sep-tembre. Deux jours auparavant, Gary Schmitt, présenté commeun « éminent représentant du courant conservateur américain »,publiait une longue tribune dans le FIGARO (16/9/2005) où il pré-voyait les effets heureux – selon lui – d’une alliance Merkel-Sarkozy. Il écrivait notamment : « L’élection d’Angela Merkel pour-rait sonner le glas d’une politique étrangère diplomatique surdéter-minée par une défiance principielle – et stérilisante – à l’égard desÉtats-Unis. Une telle "réforme de l’entendement" diplomatique pour-rait trouver un juste écho outre-Rhin dans l’élection de Nicolas Sarkozyà l’Élysée. Il est certain que l’actuel ministre de l’Intérieur français –tout en conservant des relations privilégiées avec Berlin – ne limi-terait pas sa politique étrangère à un bilatéralisme franco-allemandréducteur et finalement facteur d’isolement. [...] Que des personnalitéscomme Angela Merkel et Nicolas Sarkozy accèdent au pouvoir indui-rait un changement rapide et significatif au plan tant des relationstransatlantiques qu’intraeuropéenne. »

L’auteur de l’article souligne que « L’Allemagne et, plus glo-balement, l’Union européenne doivent repenser leur rapport àl’O.T.A.N., inférer à cette organisation un rôle clef et en faire le lieude négociations des décisions portant sur des enjeux planétaires cru-ciaux, etc. » Quant on sait que l’O.T.A.N. est entre les mains desAméricains, on voit où veut en venir Gary Schmitt.

SÉCURITÉ ÉCONOMIQUE :UNE AFFAIRE NATIONALE

�� Bernard Carayon, député U.M.P. du Tarn, évoque dans unetribune de LIBÉRATION (22:9/05) comment les États-Unis assu-rent leur sécurité économique : « ...depuis vingt ans, le C.F.I.U.S.(Committee on Foreign Investments in the United States) a pour mis-sion d’analyser et éventuellement d’interdire les prises de participa-tion étrangères dans des entreprises américaines, sur la base du seulcritère de la "sécurité nationale" qu’aucun texte ne définit On pour-rait également mettre à l’actif de ce grand pays la création d’unAdvocacy Center appuyant les entreprises américaines dans laconquête de marchés, la proximité des milieux gouvernementaux avecles grands fonds d’investissement ou encore les financements publicsgénéreux apportés à la promotion des autoroutes de l’information,des nanotechnologies, de programme d’armement... »

De tels organismes n’existent pas dans l’Union européen-ne parce qu’il n’existe pas de nation ni d’État européen. c’estpourquoi Nelly Kroes, commissaire européenne à la concurrence,n’est pas fondée à protester quand, dans de rares occasions,la France prend des mesures protectionnistes. Notre pays doitassurer lui-même sa sécurité économique face à la concurren-ce sauvage qui caractérise la "mondialisation".

Jacques CEPOY

LE CRÉNEAU

Générations

Àla fin desannées 90,F ranço i s

Taillandier nous avait enchantéavec des romans comme Deshommes qui s’éloignent ou Anielka(Grand prix du roman del’Académie française). Une langueclassique et sobre, une pertinen-te approche des réalités de lasociété postmoderne, un tableau

Rubien et LouiseHerduin qui s’in-terrogent sur le

sens de leur passé familial. Issusd’un mélange de bourgeoisie rura-le, de petite noblesse et juifsvenus d’Europe de l’Est, ils explo-rent depuis la maison familialeVernery-sur-Arre, les arcanes d’unehistoire familiale semblable à cellede tant d’autres familles fran-çaises.

Pertinentmais décevant

Autant François Taillandier pro-cède à une analyse intéressante dela droite française (« C’est tout leproblème de la droite : d’un côtéelle est traditionaliste, de l’autreelle est pour le libéralisme. »), del’urbanisation pavillonnaire, ou del’esprit de 1968, autant il entraîneparfois ses lecteurs dans des cha-pitres obscurs comme celui traitantd’une certaine "Immola", ancienamour de Rubien.

Option Paradis procède d’uneidée intéressante, d’une démarcheréaliste plus que naturaliste, maismanque parfois d’épaisseur et dedynamisme. Il est dommage queles grandes qualités de son auteurressortent moins que dans sesouvrages précédents. Il reste àFrançois Taillandier quatreouvrages pour hisser cette anti-saga à la juste valeur de sa plumeet de sa pensée.

* François Taillandier : Option para-dis, Éd. Stock, 270 pages, 18 euros.

parPierre LAFARGE

des doutes qui assaillent noscontemporains, nous renforçaitdans notre propre analyse des évé-nements. Là où Houellebecq bas-culerait vite dans la littératurespectacle, François Taillandier necédait pas aux sirènes du règne dela marchandise.

Nous ne pouvions donc qu’êtreenthousiasmé par l’idée de leretrouver dans le premier d’unesérie annoncée de cinq volumes,intitulée La Grande intrigue etretraçant l’histoire de cinq géné-rations françaises au XXe siècle.Cet Option paradis nous a fait uneimpression mitigée. Ce roman meten scène, à l’aube des années2000 deux cousins âgés d’unequarantaine d’année, Nicolas

Maurrassien aujourd’hui ?�� Soirée de haute qualité ce jeudi 22 septembre au Club de l'Hor-loge dans une salle archicomble. Le président Henry de Lesquenrecevait Jean Madiran, écrivain et directeur-fondateur de Présent,venu répondre à la question Peut-on être maurrassien aujourd'hui ?Question de grande importance quelques mois après le 29 mai oùles Français ont montré leur attachement à la nation, a précisé M.de Lesquen.

Jean Madiran, plein de reconnaissance pour Maurras à qui ildoit d'avoir été mis dès ses jeunes années « sur la voie de la pen-sée vraie », a répondu à la question du jour en quatre temps, cor-respondant à quatre "impossibilités" parfois avancées .

D'abord la pression médiatique, qui confine à la persécutioncontre tout ce qui rappelle Maurras. Face à cette imposture, onpeut, on doit être maurrassien, c'est un honneur.

Ensuite la question du royalisme. Maurras a donné « une dé-monstration irréfragable » de la nécessité de la monarchie. Si, poursa part, Jean Madiran ne fait pas de la restauration monarchiquel'objet de son combat actuel, il reconnaît la force de cette dé-monstration.

Face à la pensée contemporaine qui ne parle que de "droits",Madiran loue Maurras d'avoir restauré la piété naturelle, d'avoirposé, « à la jointure de la théologie catholique et de l'empirisme orga-nisateur » l'homme comme « débiteur », dont l'honneur est essen-tiellement de « servir ».

Enfin, le fait que le nationalisme ait mauvaise presse aujour-d'hui, ne saurait effacer le devoir de le rehabiliter qu'impose lapiété filiale : Maurras, à la suite de Barrès, en a fait, bien plus qu'unsentiment, une pensée claire et exigeante, fondée sur la nationconçue en dehors de toute idéologie comme une communauté dedestin.

Le débat qui suivit a montré combien l'exposé de Jean Madi-ran avait excité la curiosité de l'assistance, et notamment le désirde se débarrasser des fausses images du maître du nationalismefrançais.

M.F.

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12 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

VLADIMIR VOLKOFF N'EST PLUS�� Notre ami Vladimir Volkoff s'est éteint dans lanuit du mercredi 14 septembre dans sa maison deBourdeilles en Périgord, à l'âge de soixante-douzeans.

Né à Paris le 7 novembre 1932, fils d'émigré"russe blanc", arrière-petit-neveu du compositeurPiotr Ilitch Tchaïkovski, il excella dans tous les do-maines littéraires : romancier, dramaturge, poète,essayiste, biographe, chroniqueur, conférencier.

La disparition de cette grande et courageuse fi-gure, de ce chrétien de feu, de ce combattant detoutes les causes nobles, est un deuil pour l'Actionfrançaise, qu'il a maintes fois honorée de son ami-tié et de sa collaboration, mais aussi pour la Francequ'il a vaillamment servie comme officier en Algé-

rie, méritant le grade de chevalier de la Légiond'Honneur et la décoration de la Valeur militaire.

Hélas, la France officielle engoncée dans ses"valeurs" mercantiles et hédonistes a très furtive-ment signalé sur les ondes cette douloureuse nou-velle ; il appartient à l'Action française de rendretoute sa place à ce grand disparu.

A.F.

* Les obsèques de Vladimir Volkoff ont été célébrées selon lerite orthodoxe en l'église de Bourdeilles (Dordogne) le samedi17 septembre.

L'Action française prie Mme Vladimir Volkoff, ses enfants etson petit-fils de trouver ici l'expression de sa vive sympathie avecl'assurance des prières de tous ses amis.

Volkoff immortel�� On a élevé, à titre posthume, des généraux à la dignité militairesuprême. L'Académie française devrait pouvoir admettre dans sesrangs des écrivains qu'elle avait négligés au cours de leur vie ter-restre. Livrons-nous donc au jeu de l'uchronie.

Volkoff, russe et grand écrivain français, offre à notre langueplusieurs chefs-d'œuvre. Le grand cardinal l'eût admis dansl'Académie sans candidature. Il convient ainsi de se souvenir quele 14 juin 1717, Pierre le Grand se rendit à la Sorbonne où il embras-sa la statue de Richelieu (1).

En esprit et en vérité on nous permettra de classer ce cheva-lier de la culture française aux côtés de Balzac, de Flaubert et deProust qui ne furent pas "académiciens". Vladimir Volkoff est immor-tel, parmi eux.

Joseph SANTA-CROCEancien des troupes de marine

(1) Georges Oudard : La vie de Pierre le Grand. 1929.

� Quelques semaines avant laFête nationale de Jeanne d’Arc,cette année, j’avais demandé àVladimir Volkoff de participer auCortège traditionnel et d’y prendrela parole. Je lui rappelais que cethommage à la Sainte de la Pa-trie aurait une signification parti-culière au moment où l’indépen-dance nationale était remise encause par le projet de Constitu-tion européenne. Il me donna aus-sitôt son accord et, le 8 mai, ilprononçait devant la statue de laplace des Pyramides une ma-gnifique allocution sous formed’une Prière à Jeanne de sa com-position.

Avec force, mais non sans hu-mour, il sollicitait la bonne Lor-raine de venir une nouvelle foisau secours du pays. Ne citonsque le premier des souhaits for-mulés : « Premièrement, sainteJeanne, je vais vous demanderde faire que tous les Françaisredeviennent amoureux de laFrance. Pas de l’Amérique in-sidieuse, pas de l’Orient fasci-nant, pas de l’islam séducteur.De la France, de la doulceFrance. »

Lui-même, ancien officier enAlgérie, il était un amoureux decette France. Ce fils d’émigrérusse ayant fui le communismeavait rencontré l’Action françaisedans sa jeunesse au Quartier La-tin. La lecture de Maurras lui avaitdonné des raisons d’aimer et deservir la France où il était né en1932. Il n’en demeurait pas moinsrusse par tous les gènes de sonêtre. Son patriotisme russe, sa fi-

�� Quelques journalistes mondains, figures de prouedu Tout-Paris culturel, qui ne faisaient plus guèresemblant de se souvenir de Vladimir Volkoff, et d’uneœuvre fondamentalement dérangeante selon les cri-tères actuels, ont lâché, en apprenant sa mort, descommentaires désabusés, s’étonnant que l’écrivaintant encensé en 1979, lors de la publication du Re-tournement, n’eût pas connu, par la suite, la carrièremédiatique qui lui était promise.

Nous ne nous en étonnerons pas, quant à nous,puisque ce sont les mêmes qui s’ébaudissent qui fi-rent aussi en sorte, lorsque ils comprirent combienVladimir Nicolaievich leur ressemblait peu et com-bien ses préoccupations leur étaient étrangères, del’écarter du devant de la scène.

Volkoff dérangeait, et c’est pourquoi nous l’ai-mions. Volkoff était fidèle. Il n’était pas de ceux quise renient ou qui se vendent. Il n’allait pas, pour unquart d’heure sur un plateau de télévision, fût-ce àune heure de grande écoute, se rendre coupabled’une petite saleté profitable dont on reste durable-ment souillé.

Dans l’un de ses tout derniers livres, qu’il avaitinsolemment intitulé Pourquoi je serais plutôt aris-tocrate (Le Rocher) et qui venait après un Pourquoije suis moyennement démocrate, aussitôt jugé scan-daleux, il définissait sans fard sa conception de lavie et de la mort, et les valeurs ancestrales sur les-quelles il la fondait. Ce n’était pas celles de notretemps.

Volkoff aimait Charette, la Vendée, les chouanset La Varende. Il leur ressemblait. Il y a une interna-tionale des manants du Roi, ou du Tsar, qui se moquedes frontières, parce qu’elle puise à des sourcescommunes qui s’appellent la foi et la fidélité. Il ne luivenait pas à l’idée de cacher qu’il était, par goût etpar hérédité, monarchiste, ni qu’il croyait en Dieu.Son dévouement à ses souverains légitimes, son at-tachement d’homme-lige, de vassal, à son Tsar étaitdemeuré entier. Il me confia un jour qu’il regrettait

que son roman, Alexandra, co-écrit avec JacquelineDauxois, se terminât bien. Au vrai, nous avions tousbesoin, sevrés d’espoir comme nous le sommes, quela petite Tsarine vive et garde son trône ; les adultesaussi, parfois, ont besoin de contes de fées.

La flamme tenaceJe savais, cependant, ce qu’il entendait par là. Et

c’était que le ministre Barsoff, l’un de ces person-nages auxquels le romancier s’identifiait sans le direplus qu’à d’autres, ne trouvait pas l’occasion de mou-rir pour sa Cause.

Comme les héros de La Varende, ceux de Volkoffrêvaient « d’une fin vaillante ». « Je ne savais pas com-bien j’étais chouan » m’écrivit-il un jour. Les annéesne lui avaient pas retiré le goût de se dévouer, de sesacrifier, de combattre.

Peu lui challait que ceux d’en face, Rouges ouBleus, lui en voulussent de ce choix assumé. Et plusencore que cette nouvelle catégorie de couards etde conformistes dont il avait décelé l’apparition, « lesGris », « Les Dieutoutlemondistes » qui n’ont pas departi ni d’idéaux d’aucune sorte, le tinssent pour in-fréquentable. C’était face à ceux-là, à leur panur-gisme, qu’il s’insurgeait d’abord, soutenant qu’àcause d’eux, « nous ne pouvions plus faire autrement »que nous démarquer et revendiquer nos différences.Voilà ce qui le conduisait encore, en mai dernier, aupied de la statue de Jeanne d’Arc.

Ce n’était pas nostalgie, ni même obstination dela fidélité. Toute sa vie, jusqu’au cœur des ténèbres,Vladimir Volkoff avait gardé foi en des résurrectionstout aussi impossibles, voire beaucoup plus, quecelle de notre France éternelle.

Puisse-t-il, de Là-Haut, nous aider à conservervivante à notre tour cette flamme tenace qui se riedu désespoir et du doute.

Anne BERNET

� Vladimir Volkoff devait prononcer une conférencesur l'avenir de la Russie à l'Institut d'Action françaisele mercredi 16 novembre prochain : cinq jours avantsa mort, j'avais eu avec lui, en arrêtant cette date,une délicieuse conversation téléphonique que je n'ou-blierai jamais. Il était heureux de manifester une foisde plus son attachement à l'Action française qui ja-mais ne se démentit depuis ses jeunes années où ilcollaborait au journal des étudiants d'A.F. Amitiés Fran-çaises Universitaires.

Au rythme de son œuvre colossale, Vladimir Vol-koff est toujours resté jeune parce qu'il cultivait lesvertus qui élèvent l'âme, chose rare dans un mondeoù la jeunesse si souvent gavée de stupre et de vul-garité vieillit avant l'âge. Il nous appartient aujourd'huide transmettre aux jeunes Français le message decet homme d'honneur tel qu'il est exprimé, outre sesgrands livres, dans deux petits opuscules récents :Pourquoi je suis moyennement démocrate et Pour-quoi je serais plutôt aristocrate.

S'il pouvait admettre que la démocratie – l'Histoirel'a montré – puisse convenir à certains peuples encertaines occasions, et si la désignation par les inté-ressés de leurs gouvernants lui semblait un systèmecomme un autre, avec d'ailleurs plus d'inconvénientsque d'avantages, Volkoff était ulcéré par l'obligationréellement religieuse faite aujourd'hui à nos contem-porains d'adhérer à la démocratie comme à l'unique

moyen de salut. Le bulldozer et l'idole devant laquelledoit s'effacer toute religion reçue d'En-Haut...

Devant un tel pourrissement des intelligences, de-vant cet avachissement général sous le poids duNombre, de la matière, de la jouissance, « où la rai-son de vivre devient la multiplication de l'avoirplutôt que celle de l'être », Volkoff, heureusementdoué d'un sain esprit de contradiction, rappelait « lanotion de devoir » qui, pour le gentilhomme, est « detout premier plan », tandis qu'« en revanche lesnotions de "droit à" et de "droit de" lui paraissentdes coassements assez dérisoires, en tout cas in-dignes de lui ».

L'aristocrate selon Volkoff n'a nul besoin d'êtred'ascendance noble, ni d'être riche. Il lui suffit d'êtreexigeant avec soi-même, de mettre en chaque tâche,même la plus humble, – comme dans sa façon d'ai-mer, de parler, de s'habiller... – la recherche de laqualité, le goût de l'effort, le sens du service et del'humilité, et refuser à tout prix de se laisser englou-tir dans l'utopie égalitariste qui, supprimant les diver-sités, amène à mourir d'ennui.

Voilà un langage digne de la jeunesse, et qu'elledoit sans tarder découvrir.

Michel FROMENTOUX

* Deux ouvrages parus aux éditions du Rocher.

Le Saint-Esprit et les Cosaques

délité au Tsar, son obédience re-ligieuse à l’orthodoxie s’alliaientparfaitement en lui à son natio-nalisme et à son royalisme fran-çais.

Il était un homme de convic-tions, mais qui n’avait pas peurde les exprimer et de s’engager.Ainsi prit-il la défense de la Ser-bie injustement agressée parl’O.T.A.N. en 1999. Il défendaitVladimir Poutine contre les droits-de-l’hommards. Il montrait ainsiqu’il possédait un vrai sens poli-tique car la Russie a besoin d’unepoigne pour se relever des dé-combres du communisme.

Sur tous les grands problèmespolitiques, Vladimir Volkoff se re-trouvait d’accord avec l’Actionfrançaise.

Il était aussi un immense écri-vain doué d’une imagination fé-conde et d’une grande force detravail. Dans ses romans ou sesétudes sur la désinformation, ilmontrait une extraordinaire puis-sance d’analyse, il décortiquaitchaque situation dans des dia-logues palpitants. Sa pièce dethéâtre Yalta dépeignait sansconcession le cynisme desmaîtres du monde en 1945.

Il aurait mérité d’entrer à l’Aca-démie française qui avait cou-ronné son livre Le Montage en1982. Mais les hommes en vertauraient trop craint de voir dé-barquer avec lui, sous la Cou-pole, selon l’expression de LéonBloy, « le Saint-Esprit et les Co-saques » !

Pierre PUJO

L’homme du Tsar

Un vrai aristocrate

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L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 13

parAnne BERNETVladimir Volkoff s’en va en

laissant une œuvre puis-sante et vaste, riche de très

nombreux titres qui tous, oupresque, plongeaient au cœur dece drame initial, et initiatique, duXXe siècle que fut la chute de laRussie tsariste. Variations à l’in-fini autour d’une tragédie aux di-mensions eschatologiques dontle monde entier aurait à connaîtreles retombées, ses livres parve-naient à s’enraciner dans le dé-racinement, à maintenir vivantecette âme russe d’avant les té-nèbres qui en appelait à Dieu desa résurrection.

La flammede l'espérance

Depuis 1989, et cette dislo-cation du bloc soviétique qui sui-vit, si étrangement, les célébra-tions en exil du millénaire du bap-tême de la Russie l’annéeprécédente, Vladimir Volkoff lisaitdans les événements les pré-mices de ce miracle ; il croyait,et il l’écrivait, que son pays – car

toutes les caractéristiques d’unevraie prophétie. Il est même sur-prenant qu’à l’époque, ce romanmarqué du sceau de Dieu eûtconnu un pareil succès, car iln’était déjà en rien politiquementcorrect.

Les temps ont changé, et pasen bien, en dépit de la résurrec-tion russe, où Vladimir Nicolaie-vitch voyait la seule raison de nepas désespérer de notre acca-blante époque. Et si Le Retour-nement était paru l’an dernier, l’onpouvait craindre qu’il n’eût pastrouvé d’écho, ni le vaste publicqu’il rencontra voilà un quart desiècle. Car de quoi s’agit-il, sinond’une foudroyante histoire de Sa-lut ?

La destinéede la planète

Beaucoup n’ont vu dans cespages que le récit d’une manipu-lation des plus classiques dou-blée d’une réflexion sur la créa-tion littéraire. Ils n’avaient pas tort,mais, en se cantonnant à ce pointde vue, ils demeuraient, une foispour toutes, à la surface du livre,se condamnant à ses seules ap-parences. Les véritables maîtresdu jeu, ceux qui manipulent tousles personnages de cette histoirecomplexe, ne sont autres, en ef-fet, que le Roi des Cieux et lePrince de ce monde, lancés dansune partie d’échecs implacable,où se joue la destinée de la pla-nète, mais aussi, mais d’abord,le salut ou la damnation des deuxprotagonistes, Popov, l’agent so-viétique, et Volsky, le Russe blancofficier du Renseignement fran-çais, pareillement lancés sur lapente glissante.

En prétendant "retourner" leredoutable Popov récemmentnommé à Paris, avec l’aide de labelle Marina, Kiril Volsky, un quasi-amateur lâché parmi les profes-sionnels, ne pensait qu’à faire va-loir des talents jusque-là jugés unpeu légers par ses supérieurs.Toutefois, comme il arrive à uncertain moment de l’écriture ro-manesque, où les personnageséchappent aux prévisions de l’au-teur, ce n’était pas un simple chan-gement de camp qu’il allait dé-clencher, mais le seul qui comptedans une vie : une conversionaussi spectaculaire que celle desaint Paul… Un résultat qui dé-passait tout ce que l’on pouvaitattendre, mais si incontrôlable qu’ilen devenait dangereux.

Dire que Le Retournement estun chef-d’œuvre n’est pas tropfort. Et, même s’il s’est trouvé, aucœur du système soviétique, deshommes pour connaître l’évolu-tion spirituelle d’Igor Popov, et nepas en mourir, rendant caduc l’as-pect prophétique du roman, la gé-nération qui ne l’avait pas lu lors

Ultima verba

VLADIMIR VOLKOFF N'EST PLUS

LES SECRETS DE LA DÉSINFORMATION

Face aux diversesmenaces

qui pèsent sur nos intelligences,

nos libertés et notre patrie,

les connaissanceset la clairvoyance

de Volkoffnous demeuraient

indispensables.

Si le concept de désinforma-tion est aujourd’hui claire-ment connu et analysé,

même si nos sociétés n’en tirentpas toujours les enseignements né-cessaires, nous le devons pour unelarge part au travail de Vladimir Vol-koff qui fut le premier à révéler lemot, et ce qu’il recouvrait, au pu-blic français.

Rien d’étonnant à cela, puisquela désinformation, si l’idée n’est pasneuve, a connu à l’époque contem-poraine un développement im-mense, dû à l’explosion desmoyens de communication et d’in-formation de masse.

Inversion des valeurs

Inventé par le stratège chinoisSun Tzu, voilà plus de deux millecinq cents ans, ce procédé, quiconsiste à saper les forces vives,morales et intellectuelles d’une na-tion ennemie, dite "nation-cible", aumoyen d’agents formés à attaquerses valeurs, ses idéaux, et ses fa-çons de penser, en son sein même,a quitté le stade artisanal lorsquela presse est devenue accessibleau plus grand nombre, permettantde gangrener le peuple, et non passeulement ses dirigeants, civils oumilitaires. Au vrai, la désinforma-tion, et Volkoff, dans sa lecture es-chatologique de l’histoire et de l’ac-tualité, n’avait pas manqué de lenoter, ressemble trait pour trait àce vieux procédé diabolique de l’in-version des valeurs, qui prétendfaire passer le bien pour le mal etle noir pour le blanc.

Dans la même perspective, ilne faut pas s’étonner que le pro-cédé ait fait florès dans la Russiesoviétique, longtemps principale,sinon unique, source de désinfor-mation mondiale.

Voilà ce que Volkoff entrepritde découvrir et de faire admettre,pour leur enseigner à mieux s’endéfendre, à ses lecteurs dès 1986,date à laquelle il publia La désin-formation, arme de guerre, (L’âged’homme) rééditée l’an passé, etqui, textes et commentaires à l’ap-pui, proposait un historique et undécryptage du procédé.

Quoique situé dans le contextede la Guerre froide, l’ouvrage restefondamental. Parce qu’il éclaire d’unjour cru ce que nous avons connu,sans parfois le comprendre, àl’époque de l’U.R.S.S. triomphante

et menaçante, et parce que la ma-chine infernale alors déclenchéepar le K.G.B. a fini par fonctionnersur sa lancée, en dehors de soncadre originel, pour n’être plus qu’uninstrument de destruction, de sub-version, de pourrissement et de dé-moralisation organisée au niveaumondial dont nous continuons à su-bir les conséquences.

Les émulesdu K.G.B.

Cependant, observateur atten-tif du phénomène, Volkoff constata,dès après la chute du rideau de fer,que le K.G.B. avait fait des émules,et que la désinformation pouvaitdésormais être mise en branle,dans des proportions plus vastesencore à l’heure de la télévision etd’Internet, par d’anciennes "nations-cibles", à commencer par l’Amé-rique érigée en gendarme interna-tional.

Testé avec la première guerredu Golfe, en 1990, le procédé futparticulièrement efficace pendantle conflit en Serbie, et, de perfec-tionnement en perfectionnement,n’a pas cessé d’être utilisé depuislors.

de sa parution se doit aujourd’huide le découvrir.

Dès 1979, Marina ou Kiril, ré-vulsés, s’apercevaient qu’Igor, re-présentant du Mal absolu, n’enétait pas moins de leur sang etqu’il leur ressemblait, plus mêmequ’ils le désiraient. Il ne fallait pasgrand chose pour les mettre àégalité. Que l’un vînt à Dieu, oules autres au diable …

L'achèvementselon

le plan divinDans Les orphelins du Tsar,

paru au printemps dernier, la pre-mière hypothèse s’était finalementvérifiée et l’U.R.S.S. s’écroulaitpour laisser resurgir la Sainte Rus-sie. Il n’en fallait pas plus pourque les frères ennemis se dé-couvrissent enfin et réapprissentà s’aimer et à se pardonner. Rienne laissait présager que ce ro-man, relativement bref, serait ledernier et pourtant, en le relisant,un achèvement, un apaisementse révèlent : ceux, peut-être, del’œuvre accomplie selon le plandivin, sinon selon le nôtre.

Quelle scène préliminaireétonnante, en effet, que l’entréetriomphale, en 1989, de ce vieilofficier français, héros de la Ré-sistance, à l’ambassade, russe,et non plus soviétique, venu ré-véler son identité d’agent du ren-seignement tsariste et faire à unhomme du K.G.B. le rapport d’unemission donnée en 1917 par Ni-colas II ?…

Le plus surprenant étant quel’espion ex-soviétique, Sergo Psar,n’est autre que son lointain cou-sin, et celui de la belle Ouirka, laBlanche, que Sergo, incrédule,découvre au cimetière orthodoxede Sainte-Geneviève-des-Bois,en train d’expliquer à la tombe deson grand-père Volodia que lediable a perdu la partie. À traversles destins contradictoires, et com-plémentaires, des quatre fils Psaret de leurs descendances, enFrance et en Russie, Volkoff abou-tissait à la confrontation inimagi-nable de deux conceptions de lavie d’où allait jaillir la réconcilia-tion. Dans cette grande fresqueaux accents lavarendiens, surfond de révolution d’octobre, ilmariait avec un rare brio tous lesthèmes essentiels de son œuvre.Son livre sonnait comme un abou-tissement, riche de promesses etd’espoirs.

Comme nous eussions sou-haité, cher Vladimir Nicolaievitch,que ce ne fût pas votre testa-ment…

* Vladimir Volkoff :– Le Retournement. L’âged’homme. 360 p., prix non com-muniqué ; ou le Livre de poche.572 p., 8 euros (52,48 F).– Les orphelins du Tsar. Éd. du Ro-cher. 290 p. 19,90 euros (130,54 F).

cette terre perdue à laquelle il te-nait par toutes ses fibres n’avaitjamais cessé d’être sa patrie, quelque fussent l’amour et le dé-vouement qu’il portait à laFrance – allait se relever desgouffres de la mort. La grâce luiavait été donnée de voir l’aubepoindre à l’Est et il attendait leplein jour comme un guetteur at-tend l’aurore. Aux heures les plusnoires de la nuit, il avait gardévive cette flamme d’espérance,alors même qu’humainement, toutparaissait perdu. Et c’est ce quiexplique les accents prophétiquesde tant de ses ouvrages.

À l’automne 2004, pour levingt-cinquième anniversaire desa parution, en 1979, Le Retour-nement, qui lui valut, en Franceet à l’étranger, une consécrationattendue, revenait à la devanturedes librairies, avec une préfaceoù l’auteur s’étonnait lui-mêmed’une clairvoyance qu’il avait lamodestie de ne pas s’attribuer.Comme il le savait, et le disait, ilarrive parfois que les mots et lesidées vous soient soufflésd’Ailleurs. Or, Le Retournement,faux roman d’espionnage, avait

Ce n’est pas moins de trois ou-vrages, Petite histoire de la désin-formation, Désinformation, flagrantdélit, Désinformations par l’image,et dans une moindre mesure Ma-nuel du politiquement correct, quin’était pas sans rapport avec le su-jet, que Volkoff devait consacrer àla mise en évidence des manipu-lations de ce type au cours des dixdernières années. Des thèmes quirevenaient encore, mis au goût dujour, des nouveaux enjeux et desnouvelles cibles, dans ses dernièresfictions L’enlèvement, L’Hôte dupape, Le Complot, car l’intrigue ro-manesque permet des explicationset des affinements de la pensée in-terdites à l’essayiste.

Face aux diverses menaces quipèsent sur nos intelligences, noslibertés et notre patrie, les connais-sances et la clairvoyance de Vol-koff nous demeuraient indispen-sables. Dieu en a jugé autrement.

Puissions-nous au moins, dansnos façons d’appréhender l’actua-lité, nous souvenir de cet ensei-gnement : aujourd’hui comme hierou demain, la vérité n’est pas d’obli-gation, tant s’en faut, ce que l’onnous montre, et dont on veut nouspersuader.

A.B

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14 L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005

CHRONIQUE

parPierre PUJO

La présentationcanularesque

de nos vieux paysest un charme

supplémentaire à apporter

à notre louange de la France.

Est-ce un in-tersigne,ou quelque

don mystérieux et imprévu de laDivine Providence ? Au momentoù l'attente des prix littéraires del'an 2005 devient de plus en plusfébrile, je retrouve dans le fatrasde mes notes journalières le thèmed'une éventuelle chronique : Lelivre inconnu. J'avais dû négligerl'idée en supposant que le sujetavait sans doute été traité par unconfrère des temps anciens ou ré-

cents. Mes élucubrations pre-mières ne m'offraient d'ailleurs riend'enthousiasmant, ni même d'en-courageant ; les personnages metournaient le dos et disparaissaientsoudain dans les toilettes d'un quaide gare ou dans l'abîme d'un es-calier dérobé. J'oubliais leursnoms, comme ils prétendaient ou-blier le mien.

Mais voici que l'on nous pro-pose des sujets de romans nonmoins déroutants, et mon vaillantprojet mérite apparemment d'êtreinscrit sur la liste d'un concours lit-téraire. Il concernerait tous noschers lecteurs, et justifierait unautre prix Goncourt. Je reconnaisque cette idée non plus ne paraîtpas absolument nouvelle mais ellegarde une certaine séduction : ensomme, un faux concours pour unfaux Goncourt... Bien mijotée, l'en-treprise pourrait s'inscrire dansl'histoire de nos canulars d'Actionfrançaise, après l'invention desPoldèves et quelques autres.

Une résurgence d'un passédéjà lointain me fait revivre l'ex-

périence d'unfeuilleton collectifrédigé par

quelques copains du cours d'ins-truction religieuse au lycée deRennes, en 1939. Peut-être, encet établissement fréquenté dansle passé par Alfred Jarry, et là pré-cisément où naquit le personnagedu Père Ubu, subsistait-il encorequelque fantôme mystifiant... J'aioublié le titre de l'œuvre inache-vée, il me souvient seulement decelui d'un chapitre : Où l'on voit uncavalier sans cheval. Nos présentscandidats au Goncourt semblentmanquer de coursier et, en cetteannée célébrant Cervantès, on seprend à regretter Rossinante...

Turlupinades

Un psychologue humoriste di-sait que les enfants ont l'excellentehabitude de considérer les jouetsqu'on leur donne comme une ma-tière première qu'ils retravaillent àleur guise. Pourquoi ne faisons-nous pas de même avec nos au-teurs, leurs vies et œuvres, le toutmêlé avec des turlupinades télé-visées ou radiophoniques ?

Il me plaît d'imaginer MichelHouellebecq et Amélie Nothomblancés dans une course effrénéeinspirée des "chasses aux trésors"dispensées ces temps derniers parla télé. Suivez-les dans un affolantparcours, poussé jusqu'au degrécritique de l'essoufflement, dansles recoins énigmatiques du paysfrancilien, avec des zigzags im-prévus, de la Ferté-sous-Jouarreà Bussy-sans-Avoir et à La Queue-en-Brie ! Il faut bien que nos créa-teurs de fictions plus ou moins ap-pétissantes deviennent person-nages de romans : c'est bien leurtour... Et la présentation canula-resque de nos vieux pays n'est-elle pas un charme supplémen-taire à apporter à notre louangede la France ?

Un faux concourspour un fauxGoncourt ?...

LE TRÉSOR DE L’ACTION FRANÇAISE

Réflexions sur la Révolutionde Charles Maurras

�� Nous rappelons dans chacun de nos numéros les ouvrages desmaîtres de l'Action française pour en faire ressortir toute l'actualité.Nous entendons ainsi inciter nos lecteurs à lire ou à relire ces ou-vrages pour approfondir leur formation politique.

Ouvrages déjà présentés

dans le Trésor de l’Action française� Jacques Bainville : Les conséquences politiques de la paix (6/1/05),Histoire de France (21/10/04), Napoléon (7/4/05).� Augustin Cochin : Les sociétés de pensée et la démocratie moderne(3/2/05).� Léon Daudet : Bréviaire du journalisme (16/6/05), Le stupide XIXème siècle(21/4/05)), Les Universaux (18/11/04), Vers le Roi (20/1/05).� Pierre Gaxotte : La Révolution française (21/7/05)� Pierre Lasserre : Le romantisme français (25/8/05).� Charles Maurras : Anthinéa (3/3/05), Au signe de Flore (16/9/04), L’avenirde l’intelligence (7/10/04), La Contre-Révolution spontanée (17/2/05), LaDémocratie religieuse (5/5/05), De Démos à César (17/3/04), Le dilemmede Marc Sangnier (19/5/05), Kiel et Tanger (16/12/04), L’ordre et le désordre(28/7/05), Pour un jeune Français (15/9/05), Mes idées politiques (4/11/04),Trois idées politiques (2/12/04).� Léon de Montesquiou : Le système politique d’Auguste Comte (2/6/05).� Maurice Pujo : Comment Rome est trompée (1/9/05).

Si vous désirez vous procurer tel ou tel de ces ouvrages, vous pouvezinterrroger la librairie Le Pélican Noir, 94220 Charenton (Tél : 08 70 69 9082 - [email protected]).

Lorsque Charles Maurras selance dans la vie publique etcommence à mûrir sa pensée

politique, cela fait juste cent ans quela Révolution a éclaté. En 1889, ilatteint vingt et un ans, il vote pourla première fois, et c'est pour uncandidat boulangiste, le juif AlfredNaquet !

Au cours du siècle écoulé, la cri-tique de la Révolution a été faite parles penseurs les plus divers. Lesuns, Joseph de Maistre, Louis deBonald, se placent d'un point de vueprincipalement religieux, et oppo-sent les vérités de la Foi à la "Rai-son" déifiée par les révolutionnaires.D'autres adoptent un point de vuepositiviste, tels Auguste Comte etErnest Renan. D'autres encore,comme le sociologue Frédéric LePlay et l'historien Hippolyte Taine,s'attachent empiriquement à analy-ser les faits, leurs causes et lesconséquences

La synthèse

Charles Maurras réalise la syn-thèse de ces divers courants. Ilécarte les préoccupations méta-physiques. Son souci est de trou-ver une base d'accord entre tousles Français sur un événement – laRévolution – qui a engendré de pro-fondes divisions dans le pays. Maur-ras adopte la méthode de Taine qui,le premier, a étudié la Révolutiond'une façon scientifique.

La pensée de Maurras sur laRévolution est particulièrement dé-veloppée dans ses Réflexions surla Révolution de 1789 parues en1948 aux Éditions des Îles d'Or.Chez le même éditeur Maurras apublié un autre ouvrage très dense,L'Ordre et le Désordre, les idées po-sitives et la Révolution, dont cetterubrique a déjà traité (cf. A.F. 2000du 28 juillet 2005).

Recherchant les causes de laRévolution, Maurras dénonce lemouvement des "Lumières" qui s'estdéveloppé au cours du XVIIIe siècleet qui a gagné progressivementtoutes les élites de la société d'An-cien Régime. Il dénonce les « idéessuisses » développées par « le mi-sérable Rousseau ». Il observe auXVIIIe siècle une défaillance de l'in-telligence française qui rejette alorsles traditions, les valeurs qui font laforce des sociétés et qui vont êtrebalayées par un individualisme sansfrein, ferment d'anarchie.

La défaillance de l'autorité

Les hommes du XVIIIe siècle ontété grisés par les progrès desconnaissances et se sont laissésemporter par leur orgueil en en-voyant promener les cadres intel-lectuels qui avaient jusqu'alors gou-verné la pensée.

Maurras souligne le rôle de lafranc-maçonnerie et celui des so-ciétés de pensée, ce dernier mis enlumière par Augustin Cochin (cf.

L'A.F. 2000 du 3 février 2005). Il nesous-estime pas non plus le rôle del'Angleterre et des agitateurs à sasolde.

Cependant, il s'attache surtoutà analyser le comportement de l'au-torité face à cette entreprise sub-versive. Cette autorité a été dé-faillante. Louis XVI était lucide etplein de bonne volonté, mais il n'apas fait son métier de Roi. Il étaiten effet contaminé par les idées nou-velles. Face à la subversion, il nefaut pas hésiter à user de la force,même si l'on doit faire quelques vic-times. En saisissant les occasionsfavorables pour faire preuve d'éner-gie – elles se sont présentées –Louis XVI aurait sauvé et la Franceet son trône.

passant par la Terreur. « De l'indi-vidualisme absolu à l'État absolu,la chaîne est logique », écrit-il. Aunom d'une liberté abstraite et de lasouveraineté de l'individu, l'État ré-volutionnaire va combattre les li-bertés concrètes. Il veut en effetcréer un homme nouveau, une nou-velle société à base d'individualisme.Il en viendra ainsi à vouloir exter-miner tous ceux qui restent mar-qués par l'ordre ancien, et mêmeceux qui n'en sont que suspects.

Des "patriotes"cosmopolites

Maurras passe en revue les prin-cipaux événements de la période1789-1791 et leur donne leur signi-fication profonde : le vote du 23 juininstituant le vote par tête au lieu dela tradition du vote par groupes : lareprésentation populaire changealors de nature. Le 14 juillet, en abat-tant la Bastille on a abattu les dé-fenses de l'État, sans pour autantsupprimer l'arbitraire. La folle nuitdu 4 août s’est déroulée aux dé-pens du tiers-état, plus encore quede la noblesse et du haut-clergé parsuite de la disparition des libertéscollectives. La perte des libertés pro-fessionnelles a entraîné le règne del'or et l'oppression des ouvriers. Le26 août, la Déclaration des Droitsde l'Homme fut l'affirmation d'un« droit divin de l'individu ».

Maurras critique aussi la concep-tion que les jacobins ont du patrio-tisme. Pour eux, l'appartenance àla patrie repose sur la seule volontédes citoyens ; elle tend ainsi à seconfondre avec l'adhésion à uneidéologie. La Révolution était aufond cosmopolite.

Maurras tire en fin de compteun bilan largement négatif de la Ré-volution. Elle a conduit à la guerrecivile et à vingt-trois ans de guerreétrangère qui ont saigné le pays.Dans l'ordre politique et moral, ellea été désastreuse. Les idées révo-lutionnaires imprègnent encore l'en-seignement, les grands médias etla législation. Elles ont pénétré chezbeaucoup de gens de "droite" quin'osent les combattre. Mais pourMaurras « toutes les espérancesflottent sur le navire d'une contre-révolution » (Pour un jeune Fran-çais).

* Éd. des Îles d'or, 1948

Ainsi, si la Révolution l'a em-porté, « la cause fut intellectuelleet morale. L'anarchie triomphaparce qu'elle était convaincuequ'elle était le vrai, le juste, lebeau ; l'autorité tomba parcequ'elle professait sur l'anarchieles opinions de l'anarchie... »

À la décharge de Louis XVI, onpeut avancer que le malheureux roi– dont Maurras célèbre les émi-nentes qualités morales – n'a guèretrouvé de soutien autour de lui. Il aété trahi de toutes parts. Les idéesnouvelles avaient pénétré l'esprit dela plupart des élites et il n'existaitpas – en dehors de quelques écri-vains – de courant intellectuel surlequel le Roi eût pu s'appuyer.

Maurras montre, après Taine,qu'il y a un enchaînement logiquedans les différentes phases de laRévolution et il revient souvent surcette idée. Un engrenage a entraînéla France, en l'espace de dix ans,de 1789 à 1799, de l'anarchie libé-rale au despotisme napoléonien, en

parJean-Baptiste MORVAN

"LES MISÉRABLES LIBÉRAUX DE 89"Pour Maurras, l'essentiel de la Révolution s'est opéré entre mai

1789 et juin 1791 : « La Constituants de 1789 fut la plus criminelle detoutes nos assemblées, elle se composa des plus grands bandits de l'his-toire de France. Au moins les monstres de la Convention plaisent-ils à l'es-prit par le pittoresque sanglant ou par l'énergie patriote. Ils surent défier,vaincre, repousser l'ennemi. Mais les misérables libéraux de 89 ! Ces ef-frontés bavards, ces pitres ignobles, ces faiseurs de sales Nuées, ces dé-clarateurs de Droits, ces inventeurs de départements, sont condamnés aumépris croissant de toutes les intelligences un peu pures. Ils ont été lespremiers assassins de notre France. »

Pas question d'exalter les Droits de l'Homme de 89 et l'avènementde la démocratie en les opposant aux violences de 93. Ceci est sortide cela. ��

Charles Maurras(1868-1952)

Page 15: 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – …...HOMMAGE À VLADIMIR VOLKOFF Les articles d’Anne BERNET, Michel FROMENTOUX, Pierre PUJO, Joseph SANTA-CROCE (Pages 12 et 13)

L’Action Française 2000 n° 2686 – du 6 au 19 octobre 2005 15

L’ACTION FRANÇAISE EN MOUVEMENT

CCEENNTTRREE RROOYYAALLIISSTTEE DD’’AACCTTIIOONN FFRRAANNÇÇAAIISSEE

1100,, rruuee CCrrooiixx --ddeess--PPeettiittss--CChhaammppss,,

7755000011 PPaarriiss

TTÉÉLL : 01-40-13-14-10 – FFAAXX : 01-40-13-14-11

Dans la ligne du mouvement fondé

par PPiieerrrree JJUUHHEELL

DDIIRREECCTTOOIIRREE

PRÉSIDENT : PPiieerrrree PPUUJJOO

VICE-PRÉSIDENT :

SSttéépphhaannee BBLLAANNCCHHOONNNNEETT

CCHHAARRGGÉÉSS DDEE MMIISSSSIIOONN

FORMATION : PPiieerrrree LLAAFFAARRGGEE

SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES ÉTUDIANTS :

TThhiibbaauudd PPIIEERRRREE

ADMINISTRATION :

MMllllee ddee BBEENNQQUUEE dd’’AAGGUUTT

CCOOTTIISSAATTIIOONN AANNNNUUEELLLLEE ::

MMEEMMBBRREESS AACCTTIIFFSS ((3322 LL)),,

ÉÉTTUUDDIIAANNTTSS,, LLYYCCÉÉEENNSS,, CCHHÔÔMMEEUURRSS ((1166 LL)),,

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15e MARCHE POUR LA VIEorganisée par Renaissance catholique

Samedi 15 octobre 2005 à 17 h 30Rendez-vous devant la basilique Notre-Dame des Victoires, 75002 Paris

(Métro Bourse)En direction du Sacré-Cœur de Montmartre

� La 42e édition de la fête de laSaint-Michel fut un succès. Elle aréuni à Jambles (Saône-et-Loire)120 personnes pour la messe so-lennelle célébrée à l'intention de laFrance et des fondateurs de l'AFpar l'abbé Franck Quöex, suivi d’undépôt de gerbes au monument auxmorts et sur la tombe de LaurentPeyrerol, dont on célébrait le cen-tenaire de la naissance.

Les participants ont ensuite ral-lié le cellier de Mme Pereyrol pourdéguster le bourgogne aligoté. Puisune cinquantaine de royalistes sesont retrouvés au restaurant deSaint-Jean-de- Vaux pour un dé-jeuner bourguignon présidé parPierre Pujo et Mme Peyrerol, enprésence, notamment, d'AlexandreBoritch (organisateur de la jour-née), de Stéphane Blanchonnet,de Denis About, du professeurFoyard, de Monique Lainé et dePierre Lafarge.

Dans son discours Pierre Pujoa souligné la nécessité de rester

LE RÔLE DE LA FRANCEDANS LE MONDE D'AUJOURD'HUI

Charles SAINT-PROTHistorien, essayiste

vice-président de l’Académie internationale de géopolitique

à 20 h 30 précises

Brasserie Le François-Coppée, premier étage

1, boulevard du Montparnasse, 75006 Paris (métro Duroc)

Participation aux frais : 5 ss. Étudiants et chômeurs : 2 ss.

ÉTUDIANTS :Rendez-vous

le 7 octobre 2005�� Vendredi 7 octobre à 19 heures dans les locaux de l’Actionfrançaise (10, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris 1er, métroPalais-Royal), les étudiants d’A.F. et sympathisants se retrou-veront pour une réunion de rentrée, suivie du pot de l’ami-tié, avec Pierre Pujo, Thibaud Pierre, nouveau secrétaire géné-ral des étudiants d’AF, Pierre Lafarge, François Bel-Ker.

ConférencesLes conférences étudiantes reprendront chaque vendredi à

19 h 15 (sauf vacances et jours fériés), à partir du 14 octobredans les locaux de l’Action française :

– Vendredi 14 octobre : Le royalisme d’Action française,par Pierre PUJO

– Vendredi 21 octobre : La légitimité royale,par Pierre LAFARGE

– Vendredi 4 novembre : Islam, les enjeux actuels,par Sébastien de KERERRO

Candidature royaliste : 255 voixLa candidature de Jean-Philippe Chauvin à la législative partielle

de la 13e circonscription des Hauts-de-Seine s’est soldée le dimanche25 septembre par un score honorable de 255 voix, soit 0,94 % dessuffrages exprimés. Dans deux des quatre communes de la circons-cription, le candidat royaliste dépasse les 1,2 %. Cette opération, dontla réussite est largement le fait des militants du C.R.A.F., ne visait pasà faire des voix mais bien à faire entendre la voix des royalistes en po-sant notamment la question des institutions. �

Résultats détaillés par commune : Antony, 106 voix, 0,82 % ; Bourg-la-Reine, 51 voix, 1,21 % ; Châtenay-Malabry, 43 voix, 0,78 % ; Sceaux, 55 voix,1,24 %.

MARIAGES� Nous avons été heureux d’apprendrele mariage de notre amie Mlle AmélieGAUSSET, fille de nos amis M. et Mme

Michel Gausset, avec M. ChristopheGEORGY, fils de M. et Mme AndréGeorgy.

La messe de mariage a été célé-brée le 10 septembre en l’église deSaint-Mard-de-Vaux (Saône-et-Loire).

Nous adressons tous nos vœuxde bonheur et de prospérité pour leurfoyer aux jeunes mariés avec nos fé-licitations à leurs parents.� Nous sommes heureux d’apprendrele mariage de Mle Marie-LaurenceBAUX, fille de nos amis dévoués M. etMme Édouard Baux, avec M. Jean-Gabriel CANET, fils de M. et Mme Ga-briel Canet.

La messe de mariage sera célé-

brée le samedi 22 octobre 2005 à15 heures par M. l’abbé Brunet en lachapelle du Christ-Roi, 113 avenueMaréchal Joffre, à Perpignan.

Nous adressons tous nos vœuxde bonheur et de prospérité pour leurfoyer aux futurs mariés et nos félicita-tions à leurs parents et grands-parents.� Nous apprenons avec plaisir le ma-riage de notre ami M. Louis-PascalBRABANT, fils de M. et Mme ArnaudBrabant, avec Mle Sophie PIAGGI, fillede M. et Mme Philippe Piaggi.

La messe de mariage sera célé-brée le samedi 19 novembre 2005 à15 h 30 en l’église Saint-Côme et Saint-Damien à Luzarches (Val- d’Oise).

Le consentement des époux serareçu par M. l’abbé Antoine Delessalle,oncle du marié.

Nous adressons tous nos vœuxde bonheur et de prospérité pour leur

foyer aux futurs mariés, avec nos fé-licitations aux parents et grands- pa-rents.

EXPOSITION� Du 3 au 14 octobre 2005, de 14 à19 heures, Denis PRUVOST deBIOGE expose à la Galerie ARTE-CONTE, 15 rue de Savoie, Paris 6e.Métro Saint-Michel ou Odéon.

DÎNER-DÉBAT� Le prochain dîner-débat de RADIO-SILENCE aura lieu le mercredi 19octobre 2005 à 19 h 30 précises aurestaurant "Le Grenadier", gare d’Aus-terlitz, Paris 13e . Prix 25 euros. Ins-cription (avec chèque) à La Voix duSilence, 5 rue Dufrénoy, 75116 Paris.Thème : les jardins versaillais par Vin-cent Beurtheret.

LE SOUVENIR DE MARIE-ANTOINETTE

� La messe traditionnelle de Requiem pour la reine Marie-Antoinettesera célébrée place de la Concorde à Paris dimanche 16 octobreà 15 h 15 par l’abbé Néri, assisté de l’abbé Michel.

� Une messe pour le repos de l’âme de la reine Marie-Antoinette seracélébrée le lundi 17 octobre à 11 h 15 en l’église Saint-Michel desLions à Limoges (Haute-Vienne).

Dimanche 13 novembre 2005à 12 h 30

GRAND BANQUET ANNUELDE L’ACTION FRANÇAISE

Restaurant de la Mutualité,24, rue Saint-Victor, 75005 Paris

Prix : 39 euros – Étudiants : 20 euros

InscriptIon impérative accompagnée du chèquecorrespondant auprès de Mme Monique Lainé

L’Action Française 2000, 10, rue Croix-des-Petits-Champs75001 Paris. – Tél. : 01-40-39-92-06

INSTITUT D’ACTION FRANÇAISE

Mercredi 12 octobre 2005Séance inaugurale du cycle 2005-2006

NÎMESLes permanences repren-

nent le deuxième samedi dechaque mois au Palace à 14heures. Réunion de rentréesamedi 8 octobre.

LE MONDEET LA VILLE

Jambles 2005 : un beau succèsmobilisés pour la sauvegarde dela souveraineté nationale. Décri-vant la querelle des ambitions pourl'élection présidentielle de 2007 ila aussi montré que la France avaitplus que jamais besoin d'un roi.

La veille, toujours à Saint- Jean-de-Vaux une journée de travail avaitréuni les étudiants parisiens, lyon-

nais et chambériens afin de fairele point sur leurs rentrées militantesrespectives et d'entendre les in-terventions de Pierre Lafarge, Sté-phane Blanchonnet et Pierre Pujo.

La couverture médiatique étaitassurée par France 3 Macon et leJournal de Saône-et-Loire.

A.F.

Après la messe, les jeunes d’A.F. en tête du cortège vers le monument aux morts

Directeur Michel FROMENTOUX10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris.

Tel : 01 40 39 92 14[[email protected]]

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Édité par PRIEP S.A. au capital de 192.085 euros – 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Imprimerie RPN – 93150 Le Blanc-MesnilNuméro de commission paritaire 1204 K 61 341 – Directeur de la publication : Pierre Pujo

HISTOIRE

L'ORDONNANCE DE VILLERS-COTTERÊTS (AOÛT 1539)

Quand le français devint un instrument de communication

parRené PILLORGET

L'ordonnance promulguée parFrançois Ier à Villers-Cotterêtsen août 1539, et enregistrée

par les parlements du royaume, necomporte pas moins de 192 articles(1). Elle traite de sujets très divers :réduction des justices particulières,procédures civiles et pénales,formes des contrats, tenues desmercuriales, profession notariale,réglementation des métiers. Ellerend obligatoire la tenue, sur les re-gistres paroissiaux, des naissanceset des décès, des bénéfices ecclé-siastiques (articles 50-54) préparantainsi la tenue d'un état-civil englo-bant toute la population. Mais elleest surtout célèbre pour avoir im-posé la langue française dans la ré-daction de tous les actes publics,notamment des arrêts des tribunaux.

L'article 110 en donne la raison :« Afin qu'il n'y ait cause de dou-ter sur l'intelligence desdits ar-rêts, nous voulons et ordonnonsqu'ils soient faits et écrits si clai-rement qu'il n'y ait, ni puisse yavoir aucune ambiguïté ou in-certitude ni lieu à en demanderinterprétation. » Et l'article 111 or-donne : « Et pour ce que telleschoses sont souventes fois ad-venues sur l'intelligence des motslatins contenus esdits arrêts,nous voulons que dorénavanttous arrêts, ensemble toutesautres procédures, soit de nosCours souveraines (2) et autressubalternes et inférieures, soit deregistres, enquêtes, contrats,commissions, sentences, testa-ments et autres quelconquesactes et exploits de justice ou qui

�� À l'initiative du ForumFrancophone Internationalune "marche citoyenne" estorganisée le dimanche 9 oc-tobre dont Villers-Cotterêts(Aisne) sera le point d'arri-vée. Cette manifestation – àlaquelle participera l'Actionfrançaise – a pour objectifde défendre la diversité lin-guistique et culturelle faceà l'invasion de l'anglais enEurope. Au premier chef ils'agira de défendre la langueet la culture françaises.

Pourquoi à Villers-Cot-terêts ? Parce qu'en 1539,le roi François 1er publia uneordonnance célèbre dont leprofesseur René Pillorgetrappelle ci-dessous lecontexte et le contenu. Lefrançais y était reconnucomme la langue de tous lesactes publics, en particulierdes jugements des tribu-naux.

A.F.

en dépendent, soient prononcés,enregistrés et délivrés aux par-ties en langage maternel françoiset non autrement ».

La portée de cet article 111 de-mande à être cernée avec exacti-tude. Or, deux érudits, FerdinandBrunot, auteur d'une Histoire de lalangue française (1906) et AugusteBrun, qui publia des Rechercheshistoriques sur l'introduction du fran-çais dans les provinces du Midi(1923) ont cru y voir un ensemblede dispositions hostiles aux languesrégionales, notamment à l'occitane.Ces thèses, sous des formes sim-plistes, ont été vulgarisées depuisquelques décennies. Or, elles sesont révélées erronées.

Une mesureréaliste

L'ancienne France n'a nullementconnu une politique de "francisa-tion" comparable à celles de "ger-manisation" ou de "russification" pra-tiquées en d'autres pays. Le partiadopté par François Ier et par lechancelier Poyet, loin d'être la ma-nifestation première d'un noir des-sein d'une portée redoutable pourles parlers régionaux, était réalisteet limité dans son objet – évincer lelatin de la langue judiciaire et ad-ministrative. Pour tous les Françaisqui n'étaient point clercs, le latin étaitdevenu incompréhensible. Les gensde robe l'avaient réduit à une sortede jargon. Le chancelier Poyet avaitpu constater, en revanche, que dansles régions périphériques ou méri-dionales elles-mêmes, en des lieuxtrès dispersés, la langue françaiseétait devenue un instrument decommunication plus largement in-telligible que le latin des juristes pro-fessionnels. Le dépouillement desminutes notariales, opéré par denombreux chercheurs au cours dela seconde moitié du XXe siècle,confirme cette appréciation.

Il en est ainsi en Bretagne. Ona pu constater une large pénétra-tion des mots français dans la languebretonne dès le XIe siècle, signe d'unbilinguisme précoce, si restreint qu'ilait pu être. Et peu après 1260, lefrançais a commencé à remplacerle latin dans les chartes. Lorsquenaît le notariat breton, la langue duroi de France (et du duc) est en trainde supplanter, voire de remplacercelle des clercs dans les écritures.On ne connaît, même indirectement,aucun acte public ou privé qui aitjamais été rédigé en breton (3).

Le latin battu en brèche

Dans aucune province deFrance on ne trouve trace d'une

"rupture linguistique" après 1539.Dans l'ensemble du royaume, l'ar-ticle 111 de l'ordonnance n'a fait quetirer les conséquences d'un état defait. Lorsqu'elle a été promulguée,le latin juridique se trouvait déjà battuen brèche en Languedoc, non parla langue occitane, mais par le fran-çais, que ce soit à Nîmes ou à Mont-

ment de langue : mutatio latini ingallicum, ut omnes intelligant, jepasse du latin au français, afin quetous comprennent. Un autre hommedu XVIe siècle, l'avocat Antoine Fon-tanon, affirme dans son commen-taire de l'ordonnance que « le lan-gage françois est connu et en-tendu par tout le royaume et,partout, se peuvent lesdits actescommodément faire et concevoiren françois ». Dans la frange nord-ouest des pays de langue d'oc (Bor-delais, Périgord, Haut-Limousin) lefrançais était devenu la langueusuelle de très nombreux notairesplusieurs années avant l'ordonnancede 1539 – et sans aucune inter-vention législative.

Pas de coercition

L'article 111 – on ne l'a pas as-sez remarqué – n'est assorti, à ladifférence de bien d'autres, d'au-cune disposition punitive à l'encontredes infracteurs. L'objectif premierde cet article – à savoir l'exclusiondu latin de la rédaction de tout ju-gement et de toute pièce de pro-cédure laïque – ne consistait qu'àcompléter un état de choses encours de réalisation. Selon les lieuxet selon les moments (et dans lamesure où il n'avait pas devancél'ordonnance) le processus fut lentou rapide. Le législateur s'étaitcontenté de prendre date et de for-muler la doctrine, conscient qu'ilconvenait de laisser le fruit mûrir. Àaucun moment il n'usera de coerci-tion.

Il recevait d'ailleurs un puissantappui : celui de l'imprimerie, qui mul-tipliait le nombre des lecteurs d'ou-

vrages en langue française. Le rêveérasmien de faire du latin la vraielangue universelle d'usage courants'effondre en France à l'époque del'ordonnance. En 1530, Lefèvre d'É-taples a publié sa Bible en français.Marot commence à traduire lespsaumes. Rabelais publie ses pre-mières œuvres : Pantagruel (1532)et prépare Gargantua (1504) et ob-tient un prodigieux succès de vente.De pareils faits ne peuvent que ren-forcer le législateur d'exclure le la-tin de tous les actes notariés et ju-diciaires.

��

(1) Texte intégral de l'ordonnance gé-nérale en matière de justice et de po-lice in Ordonnances des rois deFrance. Règne de François Ier. TomeIX, 3e partie, mai-août 1539. (Paris,éditions du C.N.R.S., 1983, pages 550-628). Comporte d'abondantes et ex-cellentes notes.

Situé près de la forêt giboyeusede Retz, ce petit château avait été bâtipour Charles de Valois, frère de Phi-lippe le Bel. François Ier manifesta l'in-tention de le reconstruire pour en faireun rendez-vous de chasse. Cf. Jean-Pierre Babelon : Châteaux de Franceau siècle de la Renaissance (éditionsFlammarion/Picard, Paris 1989),pp. 213-218.(2) Les parlements de Bretagne, d'Aix,de Toulouse, de Grenoble et de Rouenl'enregistrèrent après avoir formuléquelques réserves. On ignore lesdates de l'enregistrement par les par-lements de Bordeaux et Dijon.(3) H. Waquet et R. de Saint-Jouan :Histoire de Bretagne (1980), p. 26. Onavait imprimé à Tréguier, dès 1499,un dictionnaire breton-français-latin,le Catholicon.

À Villers-Cotterêts, dimanche 9 octobre

GRANDE MARCHE CITOYENNE�� Une marche "citoyenne" est organisée le di-manche 9 octobre entre Largny-sur-Automneet Villers-Cotterêts par le Forum FrancophoneInternational (F.F.I.) dont le président pour laFrance est l'ambassadeur Albert Salon.

Il s'agit de démontrer avec force que les sociétésciviles :– de France, de pays francophones et de divers payseuropéens, représentées par des élus nationaux, dehautes personnalités ainsi que par des présidents, ad-ministrateurs et membres de plusieurs dizaines d'as-sociations en France et hors de France, en Europe,au Québec au Canada...... appuient les positions communes de l'U.N.E.S.C.O.,du Québec, de la France, de la Francophonie, et main-tenant de l'Union européenne, dans le projet de conven-tion internationale qui devrait, contre la très puissanteopposition des États-Unis et de leurs alliés, aboutir àce que, dans le monde entier, les biens, services, créa-tions, prestations, culturels et artistiques échappent àla compétence de l'O.M.C. (Organisation mondiale du

Commerce) et, ainsi, ne soient plus traités en "mar-chandises comme les autres" pour le plus grand pro-fit des plus forts, la disparition des plus faibles et deleurs langues, l'appauvrissement de la culture.

Rappelons que c'est à Villlers-Cotterets, en 1539,que la roi François Ier a publié son ordonnance pres-crivant l'usage de la langue française pour tous lesactes publics

– Rendez-vous à 10 heures – 10 h 30 sur leparc à voitures du Grand Bosquet au centre-ville de Villers-Cotterêts (transport en autocarà Largny-sur-Automne,

– Départ de la marche à 11 heures, de Lar-gny vers Villers-Cotterêts,

– À 12 h 15, discours des personnalités dubalcon du château. Puis déjeuner-débat (20 eu-ros).

Au départ de Paris (gare du Nord) train à 8 h 06,arrivée 9 h 59.

S'inscrire auprès de F.F.I. France, B.P. 70 114,02602 Villers-Cotterêts cedex.

pellier, dans des villages de mon-tagne comme Genolhac ou de laplaine comme Lunel, et dans biend'autres agglomérations – ainsi quel'attestent les dépouillements denombreux volumes d'études nota-riales.

Dès 1533, un chanoine de Li-moges, Foucher, auteur d'une chro-nique latine, la continue en françaiset énonce le motif de ce change-

François 1erL’ordonnance de 1539

n’était pas dirigée contre les langues régionales