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N° 48 4e trimestre 1960 PRISONS Rédaction et Administration : 120, Rue du Cherche-Midi, PARIS (6*) PARAIT TOUS LES TROIS MOIS ET PRISONNIERS Sommaire du N° 48 Abbé DUBEN : Vocation. Pierre VILLEM IN : Plaidoyer posthume. Roger VIENNE : L’admission des vagabonds au bénéfice de l’aide sociale. Céline LHOTTE : Vie et mort d’une Assistante Sociale : Stéphanie Pecqueur. Dr Marion CAHOUR : Les croquis de la doctoresse (fin). Georges DIVISIA : La libération conditionnelle et le patronage Post- pénal des relégués. Suzanne LE BEGUE : Prisons d’hier et d’aujourd’hui : Le Mont Saint- Michel sous l’ancien régime. Nous avons lu pour vous. Nouvelles diverses. VOTRE ABONNEMENT FINIT AVEC CE NUMÉRO DANS LE PROCHAIN NUMERO Liste des Centres d’accueils recevant des sortants de prison, j. NEPOTE : La drogue à travers le monde. Un inédit de Pierre VILLEMIN, etc.

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N° 48 4e trimestre 1960

PRISONS Rédaction et Administration :120, Rue du Cherche-Midi, PARIS (6*)

PARAIT TOUS LES TROIS MOIS ET PRISONNIERS

Sommaire du N° 48

Abbé DUBEN : Vocation.

Pierre VILLEM IN : Plaidoyer posthume.

Roger VIENNE : L ’admission des vagabonds au bénéfice de l’aide sociale.

Céline LHOTTE : Vie et mort d’une Assistante Sociale :Stéphanie Pecqueur.

Dr Marion CAHOUR : Les croquis de la doctoresse (fin).

Georges DIVISIA : La libération conditionnelle et le patronage Post­pénal des relégués.

Suzanne LE BEGUE : Prisons d’hier et d’aujourd’hui : Le Mont Saint- Michel sous l’ancien régime.

Nous avons lu pour vous.

Nouvelles diverses.

VOTRE ABONNEMENT FINIT AVEC CE NUMÉRODANS LE PROCHAIN NUMERO

Liste des Centres d’accueils recevant des sortants de prison, j . NEPOTE : La drogue à travers le monde.Un inédit de Pierre VILLEM IN, etc.

VocationL’abeille va, s ’affairant. De la ruche

au buisson, et du buisson à la ruche, elle vole dans le va-et-vient hallucinant de ses milliers de sœurs, légère au départ, alourdie au retour, alerte et besogneuse.

Dans sa petite tête d’abeille, elle sait être la pourvoyeuse grâce à laquelle cire et miel seront emmagasinés. Et avec quelle application elle fait son travail !

Mais il est une autre réalité qu’elle ignore : c ’est qu’au-delà de sa tâche, elle a une vocation immense. Elle qui, peut-être, confusément, regrette de ne pas être celle par qui l ’essaim s ’accroît de bourdonnements nouveaux, voici qu’en fait elle participe aussi à la grande transmission de vie. Voici que, grâce à elle, naissent bien des fruits, et bien des plantes. Et elle n ’en sait rien. Et elle continue à transporter du pollen et à féconder des fleurs, occasion incons­ciente de naissances à l ’infini.

** *

Pour nous, c ’est un peu pareil. Nous aussi, nous avons une fonction dont nous sommes conscients. Nous en sommes même, parfois, très conscients, et aime­rions que les autres le soient autant que nous, et nous faisons tout ce qu’il faut pour que notre importance n ’échappe à personne...

Mais, au-delà de notre fonction, nous avons nous aussi une vocation secrète. Plus heureux que l ’abeille, nous en avons, parfois, un peu conscience... mais si peu !

Or cette vocation, cette mission se­crète à nous confiée par le Seigneur Dieu, et collée à nous pour toujours, est, en fait, plus grande que notre travail le plus important, comme pour l ’abeille.

Nous allons nous affairant à notre plan humain, à notre plan chrétien aussi. Nous faisons notre métier, le mieux, ou le moins mal, possible. Nous essayons d’incarner dans notre vie notre foi, et l ’espérance qui est en nous, et l ’amour qui brûle en nos cœurs. Et voici que mille événements se passent dans le monde des âmes, à cause de nos gestes et de nos paroles, mais sans que nous nous doutions même qu’il s ’est passé quelque chose. Et voici que s ’éveillent des êtres, et ils entrent dans la Vie. Par nous, un peu. Et nous n ’en savons rien.

*♦ *

Chacun d’entre nous est préparé, sans le savoir, depuis toujours, à cette mis­sion personnelle. Tout y concourt : notre caractère, nos qualités et même nos dé­fauts (Dieu est capable de se servir de tout), les circonstances concrètes de notre vie aussi. Car ces événements sont, pour une part, voulus par nous, mais pour une plus grande part, ils nous sont imposés et nous ne pouvons les éviter, ni éviter d’en être profondément mar­qués et orientés.

Or, dans ces événements qui font une existence, il y a un tel esprit de suite, différent pour chacun, mais si constant en chacun, que l ’on est obligé d’y voir une volonté précise et merveilleusement lucide.

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Il est difficile parfois d’y voir une volonté d’amour. Et pourtant, si nous voyions clair, quelle allégresse serait la nôtre !

** *

Notre mission secrète, elle nous échappe comme échappe à l ’abeille la mission, qu’elle partage avec le vent, de porter la vie partout.

Si nous étions mis au courant des enchaînements, cela nous paraîtrait tout simple et évident, comme paraîtrait évi­dente à l ’abeille sa mission si l ’on pou­vait lui en expliquer le mécanisme.

Mais nous ne sommes pas dans le secret, et il nous est, par moments, dif­ficile de croire en la possibilité de tels « au-delà ». Nous pensons que c ’est folie pure, ou prétention insoutenable.

Or, si nous savions voir, nous nous apercevrions que, déjà sur le plan hu­main, ce qui se passe est hors de pro­portion avec ce que nous avons eu l’im­pression d’apporter. Et cela nous encou­ragerait à penser qu’il peut en être ainsi sur le plan de l ’âme.

Regardez de près. Sur le plan humain. Pourquoi cette personne est-elle sortie apaisée de votre bureau ou de la cellule où vous recevez ? Pourquoi, ce brusque désir d’effort, en celui-ci, cette force nouvelle pour redémarrer, en celle-là ? Pourquoi cet élan, ou cette patience, ou cette volonté de compréhension ? Les rebondissements sont si nombreux que nous ne pouvons pas ne pas les voir. Us sont si humbles aussi, qu’il nous faut regarder avec attention pour ne pas les manquer. ** *

Mais revenons à notre abeille. Nous avons encore besoin d’elle. Oh ! nous savons qu’elle n ’est qu’une image, et

que comparaison n’est pas raison. Mais nous avons joie à la regarder et, à tra­vers elle, à chercher à comprendre ce que notre esprit ne peut éclairer.

Car, bourdonnant et butinant, elle va nous donner encore un aperçu précieux.

C’est par ce fait évident : si elle man­quait à sa tâche de butineuse, elle man­querait du même coup à sa mission se­crète.

Elle doit très fort nous retenir, cette liaison entre le travail quotidien tout simple et la fécondité immense. Et pas seulement dans le cas de l ’abeille !

Nous ne savons pas grand chose de notre rayonnement spirituel. Mais si nous en savons ceci, qu’il est en liaison avec notre régularité dans nos tâches les plus matérielles, nous en avons un riche aspect. ** *

L’abeille ne nous apprendra rien d’au­tre, parce qu’elle n ’est qu’un insecte, limité au monde des corps. Mais nous pouvons aller plus loin.

Car, nous, nous sommes conscients, un peu, des réalités divines. De toute notre volonté, nous y adhérons. De toute notre espérance, nous en vivons. De tout notre amour, nous sommes prêts à payer le prix qu’il faut pour elles.

La splendeur limpide du monde spiri­tuel se bâtit en pleine matière opaque.

Il est essentiel que nous ne l ’oubliions pas.

Et que nous n ’oubliions pas qu’elle se bâtit avec nous, fils de l ’Esprit et fils de la chair, appelés à étendre le règne de l ’Esprit à travers notre chair.

C’est là notre vocation. Elle est réelle. Nous devons y croire, toujours.

Abbé P. Duben.

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PLAIDOYER POSTHUMEpar Pierre VILLEM IN

Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs (Mt IX, 13; Luc V, 32).

Il y a plus de joie au Ciel pour un pécheur qui se conver­tit que pour dix justes qui persévèrent.

Georges Rapin a donc payé les crimes de M. Bill. Ceci me donne les coudées plus franches pour répondre à la ques­tion qui m’a été posée : « Que pensez-vous de Bill? Comment vous, rééducateur, le voyez-vous ? ».

Que l’on veuille bien d ’abord libérer le problème de la gangue dont, involon­tairement sans doute, par déformation professionnelle, la presse, la radio, et par sentimentalité, le public l’ont recouvert : l’aisance de la famille Rapin, le luxe même dont Georges Rapin a joui depuis sa naissance, ont tellement été mis en lumière que le décor a compté davantage que l’acteur, et que les proportions du drame s’en sont trouvées modifiées, voire faussées dans l’esprit de chacun, de sorte que l’on ne peut qu’admirer — ou plain­dre — les juges et les jurés, pour l’effort qu’ils ont dû faire pour statuer en toute impartialité.

Du fait que j ’ai accepté de répondre à la question posée, chacun pense donc que ma façon de voir Bill sera différente de celle du tribunal. Mais ce n’est pas neuf et nul n’ignore que ceux qui, à un titre ou à

un autre, s’intéressent à la peine, sont par­tagés en deux camps : les tenants de la peine-peine et ceux de la peine-amende­ment.

Que les victimes indirectes de Georges Rapin — j’entends ceux qui restent, pri­vés des êtres chers que ses crimes ont ravis à leur affection — n’en infèrent pas pour autant que je veuille minimiser un tant soit peu ses actes, ou mettre en doute l’impartialité du tribunal! Non! la dis­cussion n’est pas là. Mais le cas de Geor­ges Rapin n ’est ni unique ni le premier ; mes collègues et moi avons eu en mains ou connu plusieurs dévoyés, jeunes et moins jeunes, de situation sociale iden­tique à celle de G. Rapin et dont le dos­sier comportait des faits tout aussi révoltants. Or bien fort qui s’en doute­rait à les voir aujourd’hui tenir leur place dans la communauté humaine. C’est donc à la lumière de ces expériences anté­rieures que j ’entends exposer ma réponse. Et que la famille de Georges Rapin n’in­terprète pas ces lignes comme un trans­fert de condamnation. Elle n’a certaine­ment personne qui lui soit plus proche

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dans son malheur que moi. Sinon je fail­lirais à ma vocation de rééducateur et de rééducateur chrétien.

Voyons donc le problème point par point.

I

A. — TUEUR A FROID.

Ce qu’on relève en premier lieu contre Georges Rapin, c’est son absence d’en­trailles, c’est la froideur délibérée avec laquelle il tue. Je ne rappelle pas les faits : le temps ne les a pas encore effa­cés de la mémoire du grand public, à plus forte raison de celle des lecteurs de « Prisons et Prisonniers ».

C’est donc un fait. Mais que nous ap­prennent, en contrepartie, les enquêtes des uns et des autres ?

— Que son père est une intelligence exceptionnelle, mais qu’il a tellement conscience d’être quelqu’un, ou plutôt conscience des responsabilités qu’il assu­me, que son masque professionnel est devenu pour lui une seconde nature qui ne le quitte jamais, qu’il n’abandonne jamais. Aucun laisser aller, même de bon aloi, chez lui. Sa maîtrise de lui-même est telle qu’il est impossible de la pren­dre en défaut, comme si c’eût été dé­choir que de ne pas être en toutes circons­tances égal à lui-même.

— Que M. Rapin, encore, toujours de par ses responsabilités professionnelles, est fréquemment absent de son foyer et ce parfois pour longtemps.

— Que la cellule familiale à laquelle incombe alors la mission d’éduquer Geor­ges Rapin, avec tout ce que cela com­porte, se compose de sa mère et de sa grand-mère.

Or il n’est pas exagéré de dire que sa mère, si elle n’a pas moins d’amour qu’une autre pour son fils, l’a aimé d’un amour égoïste, l’a couvé en mère poule

et n’extériorise pas davantage que son mari ses sentiments. Oh! je sais : elle a l’excuse d’avoir perdu un enfant précé­dent et de savoir celui-ci fragile. Mais ne s’est-elle pas exagéré sa fragilité au point d’éviter justement tout ce qui aurait pu l’aguerrir ?

Quant à la grand-mère, tous les com­mentateurs sont unanimes à la décrire comme une aveugle qui, si elle a su créer un lien affectif plus fort, moins conven­tionnel entre son petit-fils et elle, n ’a jamais vu en lui que son pauvre Pinpin.

On imagine mal, alors, que Georges Rapin, dans cette atmosphère de couveuse, de discipline médicale, dans ce milieu sans élan vrai du cœur, ait pu appren­dre autre chose qu’à être dur, à réagir contre toute émotion avant même qu’elle ne naisse. C’est son milieu qui, incon­sciemment, certes, mais à longueur d’an­nées, a refoulé, étouffé en lui tout senti­ment, toute envie d’épanchement. Fils unique, sa famille a fait de lui un objet de vitrine, de collection. Or si cela peut être une source d’épanouissement, d’en­thousiasme pour le collectionneur, je doute fort que l’objet de ses soins, quand c’est un adolescent qui souffre déjà de se sentir, physiquement au moins, infério­risé, puisse ressentir autre chose que har­gne, besoin de se venger, soif de se libé­rer, de respirer.

B. — FAIBLE, SANS VOLONTE

Que note-t-on ensuite? Que Georges Rapin est un paresseux, un être sans volonté, sans endurance ni force de carac­tère, qui refuse l’effort.

Mais que relève-t-on dans les enquê­tes?

— Que pour le moindre mal de tête, ses parents se mouraient d’inquiétude et ont tout fait comme s’ils voulaient l’ha­bituer à ne pas réagir.

— Que plus tard ce sont encore eux qui lui ont offert des solutions de faci­

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lité Parce qu’ils sentaient déjà que leur fils serait capable de faire les pires... bêtises pour arriver à ses fins (lesquel­les ?) s’ils ne cédaient pas à ses caprices, qu’ils n ’avaient pas su discipliner.

— Que son père, pris par ses occupa­tions et ses soucis professionnels, n’était pas assez souvent là pour mettre une présence mâle dans son éducation et tem­pérer l’influence émoliente de la mère et de la grand-mère.

— Qu’au lieu d’employer leur argent à faire appel aux possibilités qu’offre de nos jours l’éducation spécialisée, ses pa­rents ont assuré à Georges Rapin un train de vie exagéré et ont non seulement ôté de sa route toutes les difficultés et occa­sions de lutter et de se faire enfin volonté et persévérance, mais lui ont appris ainsi indirectement qu’étant Georges Rapin, il avait le droit de tout voir plier devant sa volonté du moment.

Que ses parents, de leur propre aveu, ignoraient tout de ses fréquentations et de l’emploi de son temps et de son argent ; donc qu’ils ne s’en étaient pas préoc­cupés.

Alors, quelle volonté autre que tyran­nique, quelle persévérance dans l’effort, pourrait-on exiger d’un être, si bon pût- ii être foncièrement, chez qui, non seu­lement nul n’a jamais essayé de construire une «personnalité» à même de compren­dre le sérieux de la vie et le rôle qu’at­tend de lui la communauté humaine, mais à qui, bien mieux, chacun a montré que la vie ne pose pas de problèmes, que nul caprice ne peut rester insatisfait? Ses éducateurs semblent si peu «adultes», de cette «adultesse» fruit d’un équilibre de tous les secteurs de la personnalité, qu’on se demande où, à quelle école Georges Rapin aurait pu acquérir cette adultesse ? A Montmartre, ce Montmartre si dissol­vant pour des caractères plus trempés, où ses parents l’aident à s’intégrer? Ils savent la fragilité morale, caractérielle de la plante qu’ils ont cultivée et vont la

repiquer, non en ados mais en pleine tempête, loin de toute possibilité de sur­veillance ! Or c’est cela leur Pinpin : un être sans caractère, incapable de rien et capable de tout.

C. — Que reproche-t-on encore à Geor­ges Rapin ? — Son orgueil, sa mégalo­manie, sa volonté d’épate : il veut paraî­tre, il veut être considéré, il veut s’imposer.

Comment cela peut-il s’expliquer?— Son monde est un monde d’appa­

rences : tout y repose sur l’impression que l’on donne de soi et sur l’orgueil de la position sociale : profession, relations, domicile, etc. On désespère de lui faire apprendre aucune discipline qui puisse lui assurer un poste honorable dans aucune profession, on désespère de l’intégrer à ce monde, mais c’est pour ce monde qu’on l’éduque.

— Son père est, à n’en pas douter, l’exemple qu’il admire ou plutôt envie, jalouse, puisque c’est lui qui est «quel­qu’un» dans la famille.

— Il est le fils Rapin ; il a sa voiture ; en vacances, chez grand-mère, il est le «petit du château» : tout le monde ne peut en dire autant. Il se sent donc tenu à être, lui aussi, « quelqu’un ».

II

Arrêtons là l’analyse. De toute façon, nous avons relevé le principal.

— « Mais alors, me dira-t-on, vous vous contentez de chercher une explication, de trouver des excuses à la conduite de Bill ! Vous n’apportez rien de positif, de constructif ! ».

— C’est exact ! Mais ce sont ces « ex­plications» qui contiennent déjà les élé­ments de ma réponse.

A. — Sans cœur, Georges Rapin ? Oui, mais uniquement dans son cadre «pro­

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fessionnel», dans le milieu social qu’il s’est choisi, où il a choisi de s’imposer, de paraître, d’être « quelqu’un ». Mais de même qu’il n ’y a pas d’être complètement mauvais — la perfection n ’est pas de ce monde, ni dans un sens ni dans l’au­tre — l’homme totalement sans cœur n’existe pas. Demandez aux assistantes sociales, visiteurs ou aumôniers de pri­sons : le plus abject trafiquant de chair humaine a toujours un petit coin de son moi qui reste étrangement vulnérable sur ce point. Peut-être dans la proportion même où il s’affiche sans entrailles dans le restant de son comportement, dans ses activités asociales ou antisociales. Si Monsieur Bill n ’a pas de cœur, Georges Rapin n ’échappe pas à cette constante : un frais minois traverse sa route, entre dans sa vie et le vrai Georges Rapin se révèle : assoiffé d’affection simple, d’une présence pour qui les conventions ne soient pas le seul critère de comportement humain, devant qui il ait enfin le droit d’« être », de s’extérioriser. Il est en confiance, il sait pouvoir avoir enfin confiance, et confie tout, même ce qu’il sait être une déchéance pour cet être moralement sain. Et je ne sais si Nadine — et, qui sait, peut-être quelques mois après, un autre petit Rapin — sur qui il eût pu épancher sa tendresse natu­relle trop longtemps étouffée et inexploi­tée et qui eussent pu rassasier sa soif d’affection simple, n’auraient pas été capables de transformer le « dur » en un époux e t un père attentif et conscient de ses responsabilités.

B. — Sans volonté, Georges Rapin? — Ah ! non, pardon ! Au contraire, Georges Rapin me semble étrangement capable de volonté, et par suite même de son édu­cation, dans le temps même où elle n’édu­quait pas sa volonté. Sa volonté est inédu- quée, mais son milieu l’a durci indirec­tement. Mais l’exemple que, volontaire­ment ou involontairement peu importe, on lui a présenté, est trop haut pour lui :

Georges Rapin ne voit pas que son père n’est quelqu’un qu’à certains aspects : professionnels par exemple. Il veut être quelqu’un lui aussi, mais, incapable d’at­teindre les mêmes sommets dans une car­rière qui nécessitent une application et des études constantes, et conscient qu’un emploi ordinaire ne mène à rien, ne met pas en vue, ne fait pas devenir quelqu’un — dans notre civilisation d’histrions, il n’y a que celui qui fait parler de lui qui est quelqu’un : le père de famille, l’ou­vrier consciencieux ne sont que des nu­méros matricules partout, tandis que l’actrice à scandale, les Giudicelli de tous poils, eux sont quelqu’un — Georges Rapin ne sera pas ce qu’on était en droit d’attendre du fils Rapin, mais il sera «quelqu’un». Et sa volonté, son besoin légitime d’indépendance, étouffés jusque- là pour des raisons semi-sentimentales, semi-médicales, n ’exploseront que plus violemment : on l’a toujours traité en bébé, en chétif Pinpin? Et bien, il sera un homme, un vrai, un mâle qui ne devra rien qu’à lui seul. (Notons bien : il n’a même pas conscience que c’est encore à l’excès de sécurité du lendemain que lui assure l’argent paternel qu’il le devra), et par un processus bien connu de reje t du monde de son éducation, constant chez tous les jeunes, c’est sur le monde diamé­tralement opposé, celui des bas-fonds, qu’il prendra modèle ; sur ceux qu’ils considèrent tous comme les seuls mâles de leur époque, en tant qu’ils ont choisi de vivre la vie avec leur chair e t non avec la froideur de la raison sans mys­tique, et de la vivre durement, «mâle- ment», en courant le risque de la voir finir aussi durement et rapidement. Exac­tement comme d’autres s’engagent dans les parachutistes ou se lancent dans le renseignement sans aucune hypertrophie du sens patriotique, ou partent jouer les Maufray par goût de l’aventure et du risque. Simple différence d’aiguillage !

C’est dans le mal que Georges Rapin

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mettra sa volonté mais il la mettra dans quelque chose. Au lieu de se laisser por­ter par son milieu dans l’indolence où celui-ci l’a élevé, et de devenir ce que le hasard de sa naissance le destinait à être, donc de démissionner, croit-il sans en avoir pleinement conscience, devant un déterminisme social, comme tant de jeunes en accusent trop d’entre nous, qui se targuent d’honnêteté alors qu’ils meu­rent secrètement d’envie, il se prouvera à lui-même d’abord pour le prouver aux autres subsidiairement, qu’il n’est pas le chétif Pinpin qu’on lui a sans cesse fait sentir et peut-être dit et redit qu’il était, et par complexe d’infériorité envers son père qui est le grand Monsieur de son monde, il reniera SON milieu, SA famille, son NOM, sa fortune et sera Bill, Monsieur Bill, un être exempt de complexe d’infériorité, respirant enfin à pleins poumons dans un monde à lui, même si c’est un air pestilentiel ; il vivra volontairement SA vie et non celle qu’on aurait pu lui imposer.

Cette logique est bien primaire, dira- t-on. Oh ! c’est certain ; mais c’est la ré­flexion constante que l’on rencontre chez tous nos teddy-boys, à quelque milieu qu’ils appartiennent, quand ils sont inca­pables, pour une raison ou une autre, de s’y intégrer, d’y tenir leur place fière­ment : le fils d’un adjudant, héros de 40, malgré les efforts de ses parents pour lui donner une instruction secondaire, n ’ar­rive pas à répondre à leurs espoirs de le voir réussir au collège pour réussir en­suite dans la vie. Son opposition s’adresse alors à l’armée, à l’Eglise au nom de la morale de laquelle on l’a sermonné, et devient peu à peu chef d’une bande où il trouve la considération, le respect, la possibilité de commander à son tour et de prendre des initiatives, que son milieu ne lui a jamais accordés. On trouve éga­lement cette réaction chez des adultes mentalement, affectivement ou psycholo­giquement adolescents, et je l’ai déjà

signalée (cf., par exemple, «Prisons et Prisonniers» n° 40, III, notamment pages 193 et 194, et n° 46, page 406, § 3).

Oui, Georges Rapin a pris conscience de son manque de personnalité et il en a souffert profondément; il n’avait per­sonne à qui se confier et il a réagi. Sa réaction fut déplorable mais elle fu t acte de volonté, et je ne désespère jamais d’un jeune qui a, un seul jour, su vouloir. On arrive toujours à en tirer quelque chose de constructif. Il faut du temps et du cœur, mais on y arrive. C’est avec le passif, sans réaction, celui qui se laisse entraîner dans tous les mauvais coups mais par veulerie et en tremblant devant leurs conséquences, qu’il y aurait lieu de désespérer, si l’on ne comptait que sur soi, non sur la Grâce pour éduquer un Racheté du Seigneur.

Or quelle autre réaction volitionnelle aurait pu avoir Georges Rapin? Au lieu de l’amener à se forger une personna­lité digne de ce nom, c’est-à-dire cette synthèse harmonieuse et équilibrée de toutes les acquisitions qui font l’« adul­te» : physiques, intellectuelles, morales et spirituelles, artistiques, affectives, caractérielles, toutes les forces que l’on dit éducatives ont concouru à lui donner une contre-éducation. Je dis bien : contre-éducation et non inéducation, car dans ce domaine comme dans tous, on ne saurait rester au point zéro : qui n’avance pas dans un sens, avance dans l’autre. Et je ne nie pas la puissance de la Grâce mais je dis qu’il eût fallu une interven­tion extraordinaire de Dieu dans la vie et l’âme de Georges Rapin pour l’amener à faire un retour sur lui-même et à adopter une conception saine du monde, de la vie et de son rôle dans la création. Mais qui a préparé cette âme à être per­méable, ouverte à l’action de la Grâce? Et qui peut affirmer que sa cellule de pré­venu puis de condamné n’était pas ce pre­mier pas de Dieu? Serait-ce le premier cas de conversion magnifique ? La grande

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presse en a relaté de célèbres, récem­ment encore, mais nous en connaissons d’autres qui pour avoir fait moins de bruit, n’en sont pas moins éclatantes : des proxénètes, des anarchistes, etc.

III

Alors! Conclusion ?J ’ai toujours pensé qu’il faut toujours

faire confiance à la Grâce et à l’Homme, sans quoi je n’aurais jamais pris au sé­rieux les tâches qui m’ont été confiées auprès de nos teddy-boys. Je ne pense pas différemment en ce qui concerne Georges Rapin.

Georges Rapin était capable d’avoir du cœur et avait de la volonté. Ce qui lui manquait c’est ce qui manque à tous nos jeunes : la synthèse humaine et spi­rituelle de toutes les connaissances, de tous les secteurs de la personnalité. On pense instruction, on ne pense pas édu­cation. Il y a des cloisons étanches entre les différentes disciplines. Est-ce cela qui m ettra nos jeunes à même d’acquérir cette maturité qui leur fera opérer en adultes les choix qu’exigent les problèmes de leur milieu et de leur époque? Or je suis persuadé que Georges Rapin, après un temps plus ou moins long d’observa­tion — accidentelle à longueur de jour­née, et voulue, au cours de réactions pro­voquées — aurait offert les bases pour une rééducation totale, donc d’une con­version, car entrer dans le jeu de la rééducation c’est déjà se convertir. Nos échecs ont toujours été dus au manque de débouchés, de possibilités d’avenir in­téressant auquel se heurtent les jeunes. Or ce problème ne se posait pas pour Georges Rapin. L’appui de sa famille, ses relations lui auraient ouvert bien des

portes qu’un jeune sans antécédent judi­ciaire trouve généralement closes.

Ce n’est pas le crime qu’il faut regarder, c’est l’homme et ce que son crime nous en apprend. Ayant acquis les connaissan­ces qui lui manquaient et une conception nouvelle du sens de la vie et du plan auquel obéit l’univers, Georges Rapin eût été le premier à regretter amèrement ses crimes... et à les réparer — sans pour autant accuser ses parents, qui ont cru bien faire, j ’en suis sûr —, mais au contraire en les entraînant avec lui dans la conversion et la réparation. Or de cela, je crois que Georges Rapin était capable, qu’il en avait en lui les bases : volonté, intelligence, cœur. Il n ’eût fallu que du temps puisque la Grâce ne nous est jamais refusée.

Au lieu de cela, qu’apporte son élimi­nation ? Rien, pas même la réparation ou l’intimidation de ses jeunes émules. Au contraire, elle ne fait qu’ajouter de nou­veaux deuils aux premiers et jeter en pâture à tout l’univers l’honneur e t la réputation d’une famille. Mais ce n ’est pas la famille Rapin qui en est abaissée, c’est NOUS TOUS, la famille humaine, qui sommes moins bons ou plus mau­vais, car nous sommes un dans le mal comme dans le bien ; plus grands d’avoir un Saint Vincent ou un docteur Schweit- zer, plus petits d’avoir des Giudicelli et des Rapin.

J ’ai commencé en citant Jésus, notre maître à tous en pédagogie. C’est encore à lui que je laisserai le soin de clore ce plaidoyer : «Si ton frère vient à pécher, VA, reprends-le... t u . auras gagné ton frère. C’est ainsi que vous traitera mon Père céleste». (Mt. XVEH. 35.)

Pierre VTLLEMIN, en la fête de N. D. de la M erci

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L’ADMISSION DES VAGABONDS AU BÉNÉFICE DE L’AIDE SOCIALE

(Décret du 7 janvier 1959)

Il arrive que certaines dispositions nou­velles, aussi importantes par le fondement théorique qu’elles impliquent, que par les conséquences pratiques qu’elles; entraî­nent, passent néanmoins inaperçues.

Tel a été le sort de l’article 55 du décret n° 53-1186 du 29 novembre 1953 portant réforme des lois d’assistance (devenu par la suite en vertu du décret du 24 janvier 1956, l’article 185 du Code de la famille et de l’aide sociale) qui, peut-être parce qu’il s’agissait d’un texte promulgué sous un titre apparemment étranger à leur discipline, n’a guère, sem­ble-t-il, attiré jusqu’ici l’attention des pénalistes.

Ce texte était ainsi rédigé, dans ses alinéas 2, 3, 4 et 5 : « Les personnes libérées de prison ou en danger de pros­titution peuvent être hébergées en vue de leur réadaptation sociale dans des établis­sements publics ou privés agréés à cet effet. U admission à l’une de ces formes d’aide est prononcée par le président du bureau d’aide sociale sous réserve de la ratification par les commissions d’admis­sion. Elle ne peut, en principe, excéder six mois. Les dépenses résultant du fonc­tionnement de ces établissements figurent parmi les dépenses obligatoires prévues à l’article 60 (act. art. 189 du Code de la famille et de l’aide sociale). Les prix de journée de ces établissements sont fixés

dans des conditions déterminées par un règlement d’administration publique ».

Le règlement prévu au dernier alinéa a été pris le 2 septembre 1954 sous le n* 54-883. Il dispose notamment dans son article 46 : « ...Les personnes hébergées dans ces centres peuvent être admises au bénéfice de l’aide sociale par décision du maire, président du bureau d’aide sociale, lorsqu’est apportée la preuve, par tous moyens, que la personne sort d ’un établissement de soins ou de cure, de prison, ou qu’elle est en danger de pros­titution. Le dossier de l’intéressé, précisant ses résidences pendant les six mois qui ont précédé sa demande, doit être soumis dans le mois à la commission d’admission. Les réadmissions n’ont pas à être rati­fiées par la commission lorsque la durée totale des séjours dans le centre ne dépasse pas six mois. Le séjour au cen­tre a pour objet essentiel de faciliter la réadaptation sociale des intéressés et de leur procurer un emploi. Ils sont soumis à cette fin à des examens médicaux et psychotechniques. S a u f impossibilité constatée, les personnes hébergées sont astreintes à travailler soit à l’intérieur du centre, soit à l’extérieur. Elles participent obligatoirement, soit par leur travail, soit par le versement d’une pension, aux frais de fonctionnement du centre. Les prix de journée sont fixés selon la règlementation

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en vigueur dans les établissements hos­pitaliers, qu’il s’agisse d’internat, de foyer, d’atelier avec ou sans logement des intéressés ; viennent en atténuation du prix de journée les dons de toute nature reçus par le centre ».

Il est superflu d’insister longuement sur l’importance pratique de ces textes régle­mentaires. Depuis la libération, on avait en effet assisté à une heureuse prolifé­ration des centres d’accueil pour anciens détenus. Mais l’équilibre financier de ces centres demeurait précaire, conditionné qu’il était par la générosité privée ou les subventions bénévoles des collectivités publiques. Il serait désormais assuré par des prix de journées fixées de façon identiques à ceux des établissements hos­pitaliers et constituant, comme toutes les dépenses exposées au titre de l’aide sociale, des dépenses obligatoirement ins­crites au budget (art. 60, D. 29 nov. 1952 devenu art. 189 du Code de la famille et de l’aide sociale).

II n’est peut-être pas inutile de souli­gner au contraire la portée théorique de ces dispositions, que pourrait masquer leur apparence purement financière. Par elles, la collectivité se reconnaît, non plus seulement moralement, mais aussi maté­riellement, responsable de la réadaptation de certains éléments dissociaux. Elles donnent ainsi à l’action réadaptatrice de3 Comités d’assistance aux libérés l’assise financière qui leur manquait jusque-là et, à ce titre, on doit les considérer au pre­mier chef comme des textes mettant en œuvre, consciemment ou non, les princi-, pes de politique criminelle de la défense sociale nouvelle.

Cependant, si bien inspirés que fussent les décrets des 29 novembre 1953 et 2 septembre 1954, leurs prévisions n’en restaient pas moins incomplètes. Ils visaient, on le sait, les sortants de prison et les personnes en danger de prostitu­tion. Par contre, rien n’était prévu pour

les individus en état de vagabondage. Or, de plus en plus fréquemment, les Parquets des villes où existent des Centres d’accueil, consciente de l’inutilité, et même de la nocivité, de la peine, dans une telle hypo­thèse, renonçaient aux poursuites à l’en­contre de ces individus et les confiaient aux Centres d’accueil en vue d’un essai de reclassement. Lorsqu’il s’agissait d’une femme, surtout d’une femme jeune, la compréhension des présidents des bureaux d’aide sociale et des commissions d’admission permettait de les considérer comme en danger de prostitution et, à ce titre, de faire obtenir au Centre d’accueil les prix de journée prévus par la régle­mentation en vigueur. Au contraire, pour les hommes auxquels on voulait éviter la prison, leur entretien restait à la charge de l’œuvre qui acceptait de les recevoir.

Il était évidemment ridicule, dans une telle hypothèse, de faire de la production du billet de levée d’écrou la condition de l’admission à l’aide sociale. Les résul­tats pratiques de cette exigence sans fondement étaient d’ailleurs d’autant plus désastreux que les centres d’accueil reçoi­vent actuellement beaucoup moins de libérés et beaucoup plus d’éléments à reclasser sans condamnation préalable. Le phénomène n’a d’ailleurs rien d’éton- nant si l’on considère d’une part les efforts faits en faveur des détenus par le service social et les visiteurs des prisons pour préserver ou rétablir, au cours même de la peine, les liens du détenu avec sa pro­fession et sa famille, d’autre part, la situation favorable de l’emploi dont nous bénéficions actuellement. Quoi qu’il en soit, par suite de cette situation, le but pratique poursuivi par les décrets, à savoir assurer la sécurité et l’équilibre finan­cier des œuvres d ’accueil, risquait d’être manqué.

C’est pour parer à ce danger et remé­dier à ces inconvénients que le décret n° 59-143 du 7 janvier 1959 est venu compléter l’article 185 du Code de la

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famille et de l’aide sociale dont l’alinéa 2 se trouve désormais rédigé : « Les per­sonnes libérées de prison ou en danger de prostitution, les vagabonds estimés aptes à un reclassement peuvent être hébergés en vue de leur réadaptation dans des établissements publics ou privés agréés à cet effet. L’aptitude des vaga­bonds à ce reclassement est apprécié dans les conditions fixées par un arrêté ».

Ainsi donc, désormais, l’hébergement des vagabonds pourra être financé, com­me celui des libérés ou des personnes en danger de prostitution, sur les fonds de l’aide sociale. Il restait à déterminer les conditions à remplir pour que les intéressés puissent être admis au béné­fice de celle-ci, et la procédure de cette admission. C’est là l’oeuvre de l’arrêté du 14 septembre 1959 qui, en outre, institue une commission d’assistance aux vaga­bonds. Il convient de s’arrêter quelques instants sur l’économie de ce texte en distinguant les différents points qu’il a été amené à traiter.

1° Définition des vagabonds pouvantbénéficier de l’aide sociale.

L’article P r de l’arrêté dispose que ne peuvent bénéficier des dispositions pré­citées de l’article 10 du décret du 7 jan­vier 1959 que les personnes qui réunis­sent les trois conditions suivantes :

1) être sans logement ;2) être sans ressources et ne pouvoir

attendre de secours immédiats d’aucune autre personne ;

3) être sans travail, à condition toute­fois de justifier de recherches d’un emploi, notamment par l’inscription au bureau de la main-d’œuvre.

En outre, suivant l’article 2, pour que l’aide sociale soit accordée, il est néces­saire que l’intéressé :

1) soit présumé apte à une expérience de reclassement « compte tenu notamment

de ses facultés mentales, de son âge, de ses aptitudes ainsi que des mesures d’hé­bergement dont il a pu bénéficier précé­demment au titre de l’aide sociale » ;

2) accepte d’une part les mesures qui lui seront proposées en vue de son reclas­sement social et notamment l’obligation au travail et la participation aux frais de fonctionnement du Centre d ’hébergement prévus par l’alinéa 4 de l’article 46 du décret du 2 septembre 1954 (cf. supra), d’autre part l’assistance éventuelle d’un délégué qui lui sera désigné par le juge de l’application des peines, agissant com­me président de la commission d’assis­tance aux vagabonds.

Ainsi donc l’admission à cette forme de l’aide sociale est soumise à des condi­tions objectives tenant à la situation de l’intéressé et à des conditions subjectives tenant à la situation de l’intéressé et à des conditions subjectives relatives à ses pos­sibilités de réadaptation. De plus, elle est conditionnée par l’acceptation par celui-ci des mesures nécessaires pour assurer cette réadaptation.

2° Institution d’une commission chargée de l’assistance aux vagabonds.

Au siège de chaque comité de proba­tion et d’assistance aux libérés est insti­tuée, par l’article 3 de l’arrêté, une com­mission d’assistance aux vagabonds pré­sidée par le juge de l’application des peines. Cette commission est composée, en outre, d’un magistrat du ministère public désigné par le procureur général, du directeur départemental de la popula­tion ou son délégué, du directeur dépar­temental de la main-d’œuvre ou son délégué, du président du bureau d’aide sociale du siège de la commission ou son délégué, de deux représentants des œuvres d’hébergement, ou, à défaut, de deux per­sonnes s’occupant d’œuvres ou d’activité sociales en faveur des vagabonds, ces per­sonnes étant désignées par le préfet.

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Quel est le rôle de ce nouvel organis­me ? H est chargé, suivant l’article 4 « de provoquer et de coordonner les initia­tives en faveur du reclassement social des vagabonds ». En outre, par l’inter­médiaire de ses représentants permanents qu’il désigne « partout où le besoin s’en fait sentir », et qu’il choisit librement en dehors des responsables des établisse­ments hébergeant les vagabonds, il inter­vient dans la sélection des vagabonds pouvant bénéficier de l’aide sociale.

3° Procédure de l’admission à l’aidesociale.Les articles 5 et 6 prévoient, selon le

cas, deux procédés de désignation des individus aptes à bénéficier de l’aide sociale.

S’il s’agit d’un vagabond présenté au Parquet contre lequel celui-ci décide de ne pas exercer de poursuites, le Procu­reur de la République consulte, en pre­mier lieu, le juge de l’application des peines auquel il revient de s’assurer d’une possibilité de placement. Il examine en­suite si les conditions prévues aux arti­cles 1er et 2 de l’arrêté sont remplies et dans l’affirmative, place l’intéressé dans un établissement d’hébergement en déli­vrant à cette fin un certificat attestant que les conditions susvisées se trouvent réunies.

S’il s’agit, au contraire, d’un vagabond qui sollicite spontanément son placement sans arrestation préalable, c’est le repré­sentant permanent de la commission qui apprécie l’existence des conditions d’ad­mission et délivre le certificat nécessaire.

Dans les deux cas, le certificat est joint au dossier de demande d’aide sociale sur laquelle il est statué dans les conditions prévues à l’article 46 du décret du 2 sep­tembre 1954 (cf. supra), c’est-à-dire que cette demande doit être soumise dans le mois à la commission d’admission à l’aide sociale qui décide dans les formes du

droit commun de la matière (cf. art. 125 et s., Code de la famille et aide sociale).

Quelle appréciation convient-il de por­ter sur les nouveaux textes qui viennent ainsi d’être analysés ?

Si l’on considère uniquement les prin­cipes sur lesquels ils reposent, elle ne peut évidemment qu’être favorable. Il est ainsi reconnu et consacré d’une part que le vagabondage n’est pas, au moins uni­quement, une situation qui doit entraîner des mesures répressives, mais qu’elle peut et doit donner lieu dans certains cas, à l’application de mesures d’assistance appropriées ; d’autre part, que la charge financière de ces mesures incombe, non plus à la bienfaisance privée, mais aux collectivités publiques. Alors que, nous l’avons dit, la reconnaissance des mêmes principes à l’égard des libérés avait été un premier pas dans la voie de l’appli­cation des principes de la défense sociale nouvelle, le décret du 7 janvier 1959 et son arrêté d’application constituent en ce sens un très net progrès.

Mais que dire de la mise en œuvre pratique des principes ainsi posés ?

La définition des conditions exigées pour l’admission à l’aide sociale apparaît judicieuse, étant donné le but actuelle­ment poursuivi. Certes les textes ne recou­vrent ainsi qu’une partie assez restreinte du large domaine du vagabondage. Il faut, d’une part, que le sujet soit « pré­sumé apte à une expérience de reclasse­ment », et cela écarte évidemment de leur application une grande partie des vaga­bonds, mais l’on remarquera que s’il en est ainsi à raison de l’état mental du sujet, de son âge ou de son inaptitude, il est susceptible de bénéficier d’autres formes d’aide sociale appropriées à sa situation. D’autre part, il est nécessaire que le vagabond accepte les mesures de reclassement qui lui sont proposées. Ainsi échapperont à ces mesures les vaga­bonds confirmés qui ne désirent nulle­

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ment sortir de leur état social actuel. Il est certain que, sur ce point, les textes appellent un complément qui permettrait d’imposer à cette catégorie de sujets un essai de réadaptation. On remarquera cependant que le nouveau régime, s’il reçoit une la'rge aplication, permettra de prendre en quelque sorte, le mal à la racine et d’éviter que les individus que leur faiblesse, jointe aux circonstances, a amené au vagabondage ne s’installent dans celui-ci et finissent par le considérer comme leur mode normal d’existence.

De même, il est heureux que les mesu­res prévues ne poursuivent pas simple­ment un but de bienfaisance, mais soient entièrement ordonnées à la réadaptation sociale du vagabond. On retrouve ici encore une concordance heureuse entre l’esprit des textes et celui de la défense sociale nouvelle.

On ne peut enfin que se féliciter de l’intervention prévue en la matière du juge de l’application des peines. Il y a là, nous semble-t-il, une disposition conforme au dynamisme interne de l’ins­titution qui doit amener ce magistrat à intervenir toutes les fois qu’il s’agit d’as­surer la réadaptation d’éléments disso­ciaux. Peut-être faut-il regretter toute­fois, comme nous l’exposerons plus loin, que l’arrêté ne lui ait pas conféré un rôle plus étendu dans la procédure d’ad­mission des vagabonds à l’aide sociale.

Moins heureuse nous semble, par contre, l’institution de la commission d’as­sistance aux vagabonds. On pouvait déjà s’étonner de la distinction consacrée par le Code de Procédure pénale entre le Comité d’assistance aux libérés et le Comité de probation. Voici qu’à ces deux institutions vient aujourd’hui s’en ajouter une troisième. Il faudrait, à notre avis, songer, dès à présent, à une réforme qui fondrait ces divers organismes en un seul auquel, pour en souligner le caractère officiel, on pourrait affecter une dénomi­

nation telle que « service judiciaire d ’exé­cution » ou mieux peut-être « service social judiciaire ». Les personnalités énu­mérées à l’article 3 de l’arrêté du 14 sep­tembre 1959, s’intégreraient tout natu­rellement dans ce qu’on pourrait appeler le « conseil consultatif » de ce service, puisqu’aussi bien il est nécessaire de s’assurer de leur concours tout autant pour le reclassement des libérés, des pro­bationnaires ou des interdits de séjour, que pour celui des vagabonds.

Un autre point de l’organisation qui, quant à nous, ne nous satisfait guère, est la procédure de l’admission à l’aide sociale. On voit mal, en effet, pourquoi le Procureur de la République délivrera un simple certificat constatant que le vagabond remplit les conditions prévues pour que soit autorisé son hébergement, son appréciation devant être par la suite contrôlé par la Commission d’admission à l’aide sociale. Sur le plan théorique, ce mode de contrôle des actes d’un magistrat apparaît au moins curieux. Sur le plan pratique, de deux choses l’une : ou bien la commission entérine aveuglément les décisions du procureur et son interven­tion constitue une formalité inutile ; ou bien elle exerce effectivement son pou­voir d’appréciation et le système risque d’être la source de divergences regret­tables dont les Centres d’accueil feront finalement les frais, puisqu’ayant reçu un vagabond sur la foi du certificat du Par­quet, ils ne seront pas remboursés des dépenses par eux exposées pour son hébergement.

On objectera peut-être qu’il serait contraire aux principes du droit de l’aide sociale d’habiliter un magistrat à engager des dépenses de cet ordre. Mais il existe au moins un précédent puisque, suivant l’article 6, alinéa 3 du 21 septembre 1959, les frais de mesures d’assistance éducative prises par le juge des enfants en vertu des articles 375 et suivants duCode Civil modifiés par l’ordonnance du 23 décem­

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bre 1958, sont pris en charge, sans autre formalité, au .titre de la législation d’aide sociale.

En réalité, il semble que, compte tenu de tous les intérêts d’ordre social, finan­cier, juridique et pratique qu’implique la matière, la procédure d’admission pour­rait être ainsi organisée :

1° Lorsque le vagabond est arrêté, le Procureur de la République qui décide de ne pas exercer de poursuites, le défère au juge de l’application des peines (ou tribunaux auprès desquels le service d’ap­plication des peines n’est pas organisé), au magistrat par lui délégué dans les Le juge, s’il estime remplies les condi­tions prévues, et après s’être assuré des possibilités de placement, autorise l’hé­bergement, cette autorisation valant admission à l’aide sociale.

2° En cas de demande spontanée de placement, le juge de l’application des peines, ou le magistrat délégué, procède de même, mais cette fois, sans interven­tion du Parquet et sa décision emporte les mêmes effets.

Nous savons que, pour la deuxième hypothèse, on objectera que les vaga­bonds répugneront à recourir à un orga­nisme judiciaire, fut-il d’esprit largement social comme doit l’être le service d’appli­cation des peines. Mais il faut voir les choses dans leur réalité pratique. En fait, le vagabond qui désire un hébergement ne s’adressera pas directement à la per­sonne compétente pour autoriser celle-ci, qu’elle soit le représentant permanent de la Commission d’assistance aux vaga­bonds ou le juge de l’application des peines. Le plus souvent il recourra au l’un des membres du Comité d’assistance directeur du Centre d’accueil, parfois à aux libérés (délégués, agent spécialisé ou assistante sociale). Qui ne voit dans ces conditions que le juge de l’application

des peines qui, par ses fonctions, est appelé à un contact constant avec ses personnes, sera le mieux placé pour être saisi par elles de la demande d’héber­gement, pour recueillir leur avis et, au vu de celui-ci, pour statuer définitivement sur cette demande ?

Telles sont les quelques réserves, d’or­dre purement pratique, que nous croyons pouvoir émettre à l’égard du nouveau régime d’admission des vagabonds au bénéfice de l’aide sociale.

Mais les imperfections de détail que nous avons choisi ainsi signalées ne doi­vent pas faire perdre de vue l’importance de la réforme réalisée.

Pour la première fois, en effet, depuis de nombreuses années, les pouvoirs publics s’intéressent au problème du vaga­bondage. Et ils le font, non pas comme on le leur a parfois conseillé, dans un sens aveuglément répressif, mais dans le but de réduire, par des mesures sociales appropriées, cette forme d’inadaptation sociale.

L’œuvre est encore incomplète et, en particulier, il faudra songer aux sujets installés dans le vagabondage auxquels il sera nécessaire d’imposer les mesures de reclassement auxquelles ils refuse­raient de se soumettre volontairement.

Mais le premier pas est fait et il sera, on peut l’espérer, le gage d’une rénova­tion complète, dans un esprit de défense sociale, de notre système désuet de répression du vagabondage.

Roger VIENNE Président du Tribunal

de Grande instance de Béthune.

(Extrait de la Revue de Science Crimi­nelle et de droit pénal comparé).

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A notre Congrès des Prisons de l'an dernier — ou récent’ congrès de IUC.S.S. également — un certain nombre d'assistantes des prisons ont exprimé le désir de mieux connaître celles de leurs collègues qui nous ont quittées mortes à la tâche. Voici une courte biographie de Stéphanie Pecqueur qui fut la première assistante sociale de la Prison d'Arras.

VIE ET MORTD’UNE ASSISTANTE SOCIALE DES PRISONS

Stéphanie PECQUEURI898-I9S7

Stéphanie Pecqueur, née le 9 décembre 1898, à Izel-les-Equerchins (Pas-de-Calais), est morte subitement à Arras le 15 septem­bre 1957, au soir d’une journée de travail ; sa vie est d’autant plus un exemple qu’elle fut modeste, sans relief apparent, toute donnée aux autres, heure par heure, dans le silence et l’amour de Dieu.

Evacuée dans l’Oise, avec ses parents, en 1914 la vue des blessés de guerre amenés dans un hôpital voisin de sa demeure lui révèle une vocation d’infirmière que l’ave­nir devait confirmer. Malgré son jeune âge — elle a seize ans — elle est admise comme aide-infirmière et se dépense sans compter jusqu’en 1920. Exténuée par le travail et les privations de la période de guerre, elle tombe malade, séjourne longuement en Suisse et n’est en état de reprendre son apos­tolat de charité qu’en 1927. Elle vient alors à Paris, se met à la disposition du Clergé paroissial de Saint-François d’Assise (19* arrondissement), successivement catéchiste, aide au fourneau des chômeurs, infirmière bénévole. Où que ce soit, elle ne refuse jamais son concours.

Un essai de vie religieuse est interrompu après deux ans à la suite d’une nouvelle défi­cience de santé. En 1936 nous la retrouvons garde-malade dans un Centre hospitalier de Berck.

Et c’est la guerre. Stéphanie Pecqueur la passera en qualité d’Assistante Sociale du Secours National, puis de l’Entr’Aide Fran­çaise d’Arras.

A la Libération, elle devient Assistante d’usine. Elle le demeurera huit ans, sachant toujours placer, en regard de ses fonctions administratives, l’entr’aide et la charité la plus pure, n’hésitant jamais à intervenir lors­qu’elle jugeait le personnel lésé en quoi que ce soit, s’efforçant tout particulièrement d’exercer une action morale sur les jeunes filles, si menacées dans ces milieux de tra­vail.

Dès la création d’un poste d’Assistante Sociale à la Maison d’Arrêt d’Arras, en 1953, elle pose sa candidature, et c’est là, au contact de ces hommes, de ces femmes si semblables à ceux qu’elle a connus vingt- cinq ans auparavant à Paris, dans la zone

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rouge du XIXe, qu’elle va s’épanouir plei­nement- Plus que jamais elle sera toute à tous, à tous ces pauvres gens — frères mal­heureux — qui bientôt feront appel à elle dans n’importe quelles circonstances : do­maine moral, social, matériel. De l’intérieur de la prison elle continuera à les servir leur peine terminée, les aidant à redevenir des hommes libres, conscients de leurs respon­sabilités, des hommes « comme tous les au­tres ».

Rentrée chez elle, pas plus qu’ailleurs elle ne connaissait le repos : « bonne voisine » sollicitée par tous, soins urgents à des mala­des, ensevelissements de morts, conseils à celui-ci, à celle-là, dépannages pécuniaires qu’elle ne refusait jamais quel que soit l’état de ses finances.

« En un mot », nous écrit un Visiteur de la Prison d’Arras, à qui nous devons ces élé­ments de biographie, « elle donnait tout. »

Le 15 septembre 1957, ayant peiné toute la journée pour établir des enquêtes et rele­ver des renseignements relatifs aux déte­nus, elle fut enlevée en quelques heures par une congestion cérébrale.

Aux funérailles de Stéphanie Pecqueur, M. l’Abbé Poix, aumônier de la Maison d’Arrêt d’Arras, après avoir souligné la cons­ternation qui s’est répandue parmi les déte­nus à l’annonce de cette fin brutale rendit ce témoignage :

«A tous elle prodiguait encouragements et conseils. Ne comptant ni sa fatigue ni sa peine, ne prenant même pas le temps de manger, elle se déplaçait ici pour raffer­mir un ménage, là pour consoler une mère (...) obstinée, mais toujours souriante et pa­tiente, elle obtenait ce qu’elle voulait.

« Sa sollicitude s’étendait surtout aux sor­tants de prison. Sans doute n’a-t-elle pas vu se réaliser le rêve de sa vie : l’établissement d’un centre de rééducation et de reclasse­ment des post-pénaux, mais nous sommes cer­tains, et nous le souhaitons de tout notre cœur, que ce centre sera un jour une réa­lité.

« Mademoiselle Pecqueur n’est plus, mais son souvenir demeurera vivant.

« Quand je serai sorti, me disait un pri­sonnier, j’irai prier sur sa tombe. Depuis l’âge de 13 ans, je n’avais pas pleuré... main­tenant, je pleure. »

Et cet autre prisonnier musulman :« Mlle Pecqueur, je la considérais comme

ma mère. »Rien ne peut montrer davantage l’attache­

ment des prisonniers à leur Assistante que la prière à la Sainte Vierge composée pour eux et dont l’extrait ci-dessous fut lu, lors des funérailles, par M. l’abbé Lotte :

« Nous venons tous en chœur, très Sainte » Vierge Marie, Vous qui êtes le symbole » même de la bonté, vous prier d’intercé- » der auprès de votre divin Fils pour que » le repos de l’âme de Mlle Pecqueur soit » éternel.

» Que la récompense de la lumière qu’elle » a su répandre dans notre monde de misè- » re, d’obscurité et de vilenie, lui soit grande » et forte.

» Que l’apaisement qu’elle a su mettre » dans nos cœurs durcis et rebelles lui soit » rendu au centuple, jusqu’à la fin de tous les » siècles.

» Que le sourire qu’elle a su faire fleurir » sur nos lèvres, ayant encore le goût du sel » des larmes, soit désormais le sien à » jamais.

» Nous lui demandons pardon, par Votre » intermédiaire, pour tous ceux qui lui ont » menti.

» Nous lui demandons pardon pour nos » accès de mauvaise humeur, pour notre im- » patience et pour nos actions intéressées.

» Mais nous lui disons : pour nous vous » êtes toujours là, Mlle Pecqueur, au fond » de notre cœur.

» Nous ne saurons jamais trop vous re- » mercier ; mais nous savons, grâce à vous, » que l’on peut être bon sans tapage et dévoué » sans éclat. »

Et voici, pour terminer, la « Prière du souvenir ».

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PRIERE DU SOUVENIR A DIEU NOTRE PERE

Mon Dieu accueillez celle qui n’est plus Et réservez à vos côtés une place qui lui est due C’est une sainte qui nous a quittés Et nous n’en éprouvons que des regrets.

Elle fut pour nous plus qu’une mère Et soulagea bien des misères Par la foi ardente qui la soutenait Doucement mais sûrement elle nous relevait.

Connaissant son abnégation Nous, détenus, nous en abusions !Oui ! Mademoiselle Pecqueur Vous êtes toujours en nos cœurs.

De vous, nous étions fiersEt nos lèvres murmurent une prièreAdressée à la Vierge MarieAfin qu’elle vous reçoive en son paradis.

Seul, son souvenir nous reste Sachons en faire notre profit Afin de renouveler ses gestes Qui nous rendront meilleurs aussi.

O Dieu tout Puissant Exaucez la prière des vivants Qui monte aux deux comme un appel Pour que le repos de son âme soit éternel.

Le 23-11-57.

Nous ne donnons certes pas cela pour de la grande poésie, mais si beau que soit

un beau vers on peut trouver plus émouvant, et il me semble que c’est le cas.

Céline LHOTTE.

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LES CROQUIS DE LA DOCTORESSE(suite) (1.)

par le Dr M. CAHOUR

Je souffle un peu avec celui qui suit. C'est un charbonnier. Ses yeux de breton nostalgique trouent son visage de suie. Sa fille aînée, qui en a hérité, a été élue Reine de la Mi-Carême cette année. Mais c'est sa famille justement qui lui donne de la peine. Malgré une abstinence héroïque de dix mois sa femme veut le quitter parce qu'ils sont trop entassés, à douze, dans la même pièce !...

Deux grosses larmes tracent des sillons roses sur ses joues. Pour un peu, je pleurerais aussi ! La colère et le chagrin me montent à la tête. Je fulmine contre l'abominable carence des pou­voirs publics en matière de logement. Je lui promets d'aller voir sa femme, il s'en va...

Un authentique marquis lui succède. Quel curieux personnage !... Nippé en clochard, la démarche oblique, il a ce regard spécial des vieux chevaux de retour dont les prisons sont l'écurie. Il joue du petit doigt où brille une chevalière. Devant moi, il se casse, juste à l'an­gle qu'il faut, et, si j 'y tenais, il me baiserait la main avec une grâce parfaite. Contre tout espoir, il s'est converti à l'abstinence depuis plusieurs mois déjà. Les cachets sont bons pour la roture. Lui, se contente d'honorer la parole qu'il m'a donnée. Comment le réintégrer dans son milieu ?

Et voilà qu'en le voyant surgir ce soir mon esprit rapide bâtit une chimère : Pourquoi ne pas créer un cercle très chic, très fermé, à faire pâlir les rotariens dont les membres pratique­raient 1 l'abstinence comme une excentricité de suprême élégance ?... Mon marquis m'offre une « Chesterfield » (comment l'a - t- il eue?) et dis­paraît...

(1) «Prisons e t Prisonniers», n<> 46.

Mon infirmière passe la tête. Elle me transmet des nouvelles alarmantes : la concierge est des­cendue pour faire taire Joséphine qui empêche son mari de dormir ; le facteur n'a pas voulu attendre plus longtemps, tandis que notre Maro­cain, qui a de la suite dans les idées, refuse de démarrer avant d'avoir pris sa leçon de lecture, et deux autres nouveaux arrivent !...

Je presse le rythme... Au vingt-cinquième, je fléchis nettement. Je flotte dans un aquarium trouble où je vois défiler : une femme au ventre martelé de coups de pied (pour son malheur, son mari, luj, ne boit pas), un m ilitant communiste, un fils de confrère, un musicien du Théâtre, une petite bonne de dix-huit ans, e.t aussi une petite vieille qui s'est trompée et qui a attendu tout ce temps-là pour... son cor au pied.

Cependant, ma technique m'étonne. Mon mé­canisme intérieur est si bien huilé que je con­tinue à sourire et à dire les mots qu'il faut. Je suis la ballerine qui danse parfaitement sur la boîte à musique tant que dure le refrain J

Mais voilà que ma tâche s'allège considéra­blement. Pour m'aider, mon limpide Stéphane a eu une idée de génie. Il a pris dans une salle à part les trois derniers nouveaux et leur a fa it une leçon collective pour les initier au B.A. BA de l'affaire. I l ne me reste presque plus rien à leur dire. Mais oui ! ils sont au courant : il s'agit d'un contrat d'un an. Entendu ! ils revien­dront avec la régularité d'un chronomètre à,tous les rendez-vous que je leur fixerai au long de cette année. Certainement ils ne seront pas assez fous pour boire la moindre goutte de boisson alcoolisée dans la journée, quand ils auront pris leur comprimé : Stéphane leur a raconté qu'il avait fa illi en mourir ; avec quelle conviction chaleureuse cet ancien leur a parlé !

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Piqué d'émulation, l'homme à la petite cas­quette s'est réservé les dames, mais il me pré­vient en douce que l'une d'elles est une bour­rique et que les deux autres préfèrent revenir mardi.

Malgré tout, je suis « groggy » au trente- cinquième ; et voilà mon dernier, celui qu'on m'a réservé pour la bonne bouche ï

C'est un petit homme replet qui s'avance ; de grosses poches sous des yeux pleins d'eau le font ressembler à une grenouille. Il ne se presse pas ; il s'assoit devant moi, croise tranquillement les mains sur son ventre et me souffle à voix de confesse : « Je suis un ancien frère capu­cin ».

C'est fini, la grille est tirée. Le dernier auto­bus est parti et je retourne chez moi dans la douce nuit étoilée. Quel beau métier !...

Tout a commencé par une crise d'exaspé­ration. Il y a neuf ans, j'étais (et je suis encore) médecin d'école... Il y a neuf ans, j'en ai eu assez de ce malheureux écolier qui se trouve toujours en queue de classe, à une table isolée, le pouilleux, le paria !... Celui qui baisse le nez lorsqu'il entend le maître ou l'infirmière m'ex­pliquer à voix, par hasard toujours trop haute : « Les parents boivent ». Une belle fois, j'a i compris que cela ne pouvait plus durer : je ne pouvais plus le supporter... Je me mis en quête...

Or, il se trouvait que, dans la ville, un prêtre s'émouvait des mêmes peines. Lui qui avait entendu tant de confidences, il savait que, si on avait soulevé dix toits pris au hasard dans cette grande cité, on aurait mis à nu un foyer ou deux (parfois dix si on les avait pris à la file) détruit par l'alcoolisme, ce fléau qui s'étale dans les milieux ouvriers et qui ronge en secret la bourgeoisie.

Ma bonne étoile me conduisit chez lui. Un prêtre et un médecin : du premier coup d'œil, nous comprîmes l'intérêt de cette association. Et c'est de cette intuition première que naquit la Croix d'Or actuelle. Cette Croix d'Or dont j'entendais parler pour la première fois, elle était vieille puisqu'elle avait été fondée en 1913 par Monseigneur Pinson, évêque de S.t-Flour.

Il faut avouer que, depuis lors, elle avait passablement dormi, mais quoi ? L'un avec l'autre, nous étions de nature à la réveiller !

Quel saisissant visage il avait, ce vieux prêtre qui me regardait : il trouvait le moyen de res­

sembler extraordinairement aussi bien à St V in­cent de Paul qu'au curé d'Ars !

Toute en feu de cette première rencontre, je ne voulus pas rentrer chez moi pour déjeuner avant d'être passée aux bureaux des trois jour­naux de la ville. L'annonce qui parut le lende­main était à peu près celle-ci : « Vous qui buvez, ne vous découragez pas ! Venez à la Croix d'Or dimanche matin à partir de neuf heures. » Et je donnais l'adresse de l'abbé. Cela suffisait comme référence. Quel malheureux (de l'âme ou du porte-monnaie) n'avait, un jour, dans cette grande ville, trouvé le chemin de son étonnante petite chambre ?

Ils vinrent trois le premier dimanche que je draguai sur mon dispensaire et puis, se recrutant en chaîne, l'un m'amenant l'autre, depuis plu­sieurs années déjà, ils déferlaient, me submer­geaient, me forçant à appeler à l'aide plusieurs autres confrères. La formule était bonne !

En France, voici où en est cette nouvelle Croix d'Or. Rien que pour le seul département de la Loire-Atlantique, trente sections se sont solidement enracinées dans les quartiers des grandes villes ou dans les villages et dans ce seul département trois mille cinq cents buveurs ont été pris en charge. L'incendie allumé en Loire Océane a gagné toute la Bretagne, la Vendée, l'Anjou, la Normandie, descend sur les Charentes...

Nous avons des positions fortes en Alsace, avec le plus ancien noyau Croix d'Or, en Lor­raine, dans le Lyonnais (le secrétariat général étant à Lyon), dans le Creusot, le Dijonnais, le Berry, à Paris où fonctionnent un secrétariat, plusieurs permanences, consultations, foyers, etc.

Il y a des « kommandos » dans tout le restant de la France.

La Croix d'Or est. un Mouvement familial. Presque toujours, la famille entière s'inscrit. Guérir ceux qui sont atteints et préserver les jeunes sont les deux buts du Mouvement.

Mais au fa it, pourquoi boire de l'eau dans cette douce France où la vigne pousse si bien ?... Tout simplement parce que cette abstinence totale de boissons alcoolisées est une stricte nécessité pour l'ancien buveur qui, sans elle, retombe automatiquement dans ses excès passés. Et pour d'autres qui n'en ont pas besoin pour eux-mêmes, il s'agit d'aider leurs frères en se faisant semblables à eux. Ils sont rapidement

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récompensés, ces abstinents volontaires, car ils découvrent bientôt que cette abstinence est une source d'enrichissement physique, intellectuel et moral qu'ils étaient loin de soupçonner !...

Le but de la Croix d'Or serait-il de faire de la France un peuple de buveurs d'eau ? Non, bien sûr ! mais l'expérience montre que là où se trouve un seul abstinent, .il se forme autour de lui, spontanément, frappée par son exemple, une zone de tempérants qui s'en tiennent à une moyenne raisonnable. L'exemple frappe d'autant

plus qu'il part de plus haut. Et c'est sûrement l'un des meilleurs moyens pour ramener la France à une plus saine sobriété.

Actuellement, la Croix d'Or est le plus fort Mouvement d'Abstinents en France. Il est aussi le seul qui soit reconnu par la Hiérarchie.

Docteur Marion CAHOUR.

Croix d'or, 89, rue Tronchet, Lyon - 2 bis, rue des Bons-Français, Nantes - 11, rue Péronnet, Paris, VII*.

VERS LE CONSEIL ŒCUMENIQUE

Sa Sainteté jean XXI II a désigné Monseigneur jean RODHAIN, secrétaire général du Secours Catholique, comme membre de la Commission Pontificale de l’Apostolat des Laïcs pour la Préparation du Concile Œcuménique Vatican 11.

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LA LIBÉRATION CONDITIONNELLE ET LE PATRO N AG E PO STPEN AL

DES RELÉGUÉS

SITUATION DU RELEGUE A L’EGARD DES AUTORITES ADMINISTRATIVES.

ROLE DE L’EDUCATEUR.

La progressivité du régime, avec ses transitions judicieusement aménagées, di­minue les multiples difficultés qui se dressent dès la libération au moment cru­cial où le libéré affronte le milieu libre. Le libéré travaille depuis son placement en semi-liberté, il a un domicile. Néan­moins il a paru prudent de le placer sous le patronage du comité d’assistance aux libérés (art. D 538 et suivants) que préside le juge de l’application des peines, assisté de deux éducateurs auxquels vient s’ad­joindre l’assistante sociale.

C’est, en définitive, de l’action de ce comité que dépend le succès de l’entre­prise, tant il est vrai que le véritable reclas­sement social, dont le placement profes­sionnel doit être l’un des facteurs, est fonction du milieu dans lequel l’homme vivra et de l’influence qu’il subira. Les membres du comité et le centre forment une seule et même équipe. Ainsi, dès la libération, les éducateurs connaissent déjà les relégués qu’ils auront à surveiller. Ces derniers ont déjà été présentés à leur éducateur et dûment informés par le magistrat, lors de leur comparution devant la commission, des mesures de contrôle qui peuvent leur être imposées, c’est-à-dire l’obligation :

1° de résider et de travailler au lieu fixé par l’arrêté de libération ;

2° de répondre aux convocations du juge de l’application des peines ou de l’agent visé à l’article D 532 ;

3° de recevoir les visites de cet agent (art. D 533).

Le libéré conditionnel doit demander en outre au juge l’autorisation de changer de résidence ou de se déplacer (art. D 534). Dans certains cas, le libéré peut se voir imposer, par son arrêté de libération con­ditionnelle, une ou plusieurs des conditions prescrites par les articles D 535 à D 537.

La prise de contact est donc générale­ment aisée et la connaissance du dossier d’observation facilite la tâche.

L’éducateur postpénal a, essentiellement, un rôle de surveillance, d’assistance et d’observation.

Sur le premier point, il s’assure que les intéressés se soumettent aux obligations qui leur sont imposées, qu’ils s’acquittent régulièrement du règlement de leurs coti­sations de sécurité sociale, qu’ils se tien­nent convenablement et observent une existence honnête. Ce contrôle de l’activité du relégué s’effectue par des visites à domicile ou à l’aide d’enquêtes discrètes.

Sur le plan matériel, l’éducateur s’occupe des problèmes soulevés par les questions de sécurité sociale, les allocations fami­liales, etc.

Mais, ce cadre de travail étant posé, il lui appartient essentiellement de doser, de modeler son action en fonction du type de relégué qui lui est confié. Selon qu’il a

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affaire à un antisocial ou à un asocial, son rôle de surveillance étroite prend le pas sur celui d’assistance, encore que le com­portement de l’asocial exige une action continuelle. Là encore, il n’est point de méthode définie. Ses visites et ses contrô­les, dont il dose la fréquence et la sévérité, sa façon de stimuler les uns, de guider les autres sans étouffer les initiatives, de les préserver de l’ostracisme des gens du dehors, créent rapidement cette confiance réciproque qui n’exclut pas la sévérité, ce respect qu’il impose par la loyauté des rapports. Car il serait vain, là encore, d’espérer une efficacité quelconque sans point d’insertion dans ce que l’être a de vraiment propre, efficacité qui résulte tou­jours, en dernière analyse, d’un acquiesce­ment, d’un don spontané, d’un libre vouloir du collaborateur.

Les relégués apprécient à leur juste valeur les hommes qui ont pour mission de les guider, et il n’est pas facile de les duper. Une bonhommie de commande ne les abuse pas. Une saine psychologie, dans ce domaine, du doigté et de la fermeté, sans parti pris, sont la condition de la réussite.

D’une manière générale, le relégué libéré accepte volontiers de conserver le contact avec l’éducateur. Les uns — les anti­sociaux — y voient un moyen d’être consi­dérés et d’éviter des ennuis, d’autres essaient d’en tirer des avantages matériels ; d’autres encore — les abouliques — ont besoin d’un soutien, d’un encouragement ; d’autres enfin, pour qui ces rencontres constituent des exutoires, y voient une occasion de libérer le besoin impérieux de manifester leurs plaintes et leurs récri­minations.

Enfin, dans le domaine de l’observation, l’éducateur qui a suivi le relégué depuis sa libération conditionnelle jusqu’à la rechute ou jusqu’à l’expiration du délai du patronage postpénal (art. 732 et C. 902 du Code de procédure pénale) est parti­culièrement qualifié pour apprécier les causes de la récidive ou de la stabilisation. C’est donc lui qui rédige un rapport sur le comportement, rapport qui vient très utilement confirmer ou infirmer, dans la phase de cure libre, l’observation faite au centre et la classification établie par la commission de classement.

Les sanctions à ces règles vont de l’admo­nestation — soit de la part de l’éducateur dans les cas bénins, soit du magistrat pour les plus sérieux — à l’arrestation provi­soire, pour aboutir, dans les cas graves et nettement caractérisés, à la révocation de la libération conditionnelle, décidée par le ministre dans les conditions prévues par les articles 733, paragraphe 2, C. 940,C. 941, C. 951, C. 952 et C. 953 du Code de procédure pénale.

Le comportement des antisociaux, en libération conditionnelle, est plus satis­faisant, dans l’ensemble, que celui des asociaux.

Certes, les antisociaux manifestent une nocivité indéniable et leurs délits présen­tent toujours une certaine gravité : le cambriolage, le vol qualifié, l’escroquerie ou le proxénétisme. Mais leur comporte­ment est cohérent et, à ce titre, ce sont les seuls dont l’avenir est prévisible. Avec eux, il n’y a guère de surprise.

Les asociaux sont de nocivité moyenne, leurs délits sont souvent le vol simple, le vagabondage et la mendicité, l’abus de confiance, l’escroquerie, l’outrage public à la pudeur, mais leur conduite est incohé­rente, comme celle des enfants. Pour eux, plusieurs mois de stabilité au travail ne permettent pas d’établir un pronostic valable quant à leur réadaptation. Au moment où leur comportement est satis­faisant, ils compromettent en quelques instants, sur un coup de tête, dans un moment de dépression où ils sont inca­pables de se contrôler, plusieurs mois d’efforts et de bonne conduite.

Ces deux comportements diamétralement opposés tiennent à ce que les premiers choisissent délibérément leur règle de conduite, en calculant froidement les consé­quences, alors que les seconds sont vic­times des tentations et de leurs instincts qu’ils ne peuvent réprimer.

Ainsi, des espoirs sont permis aux jeunes antisociaux venus à la délinquance après la guerre et certains sont d’ores et déjà parvenus à des reclassements satisfaisants dans des professions qu’ils n’avaient jamais exercées.

Chez les asociaux et les relégués d’âge

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mûr dont le dynamisme a été altéré, le choix d’une compagne rencontrée à l’usine, sur le lieu du travail, contribue à leur stabilisation dans la mesure où elle est plus âgée qu’eux et qu’elle possède une forte personnalité. Il est assez fréquent de les voir solliciter l’intervention de l’édu­cateur à la moindre incartade de l’ami ou du mari. Les jeunes antisociaux qui se marient forment des unions durables en général.

Enfin l’observation quotidienne nous amène à constater que le succès ou l’échec de la libération conditionnelle, s’il dépend du relégué lui-même, dépend aussi — et

dans une large mesure — du jeu des circonstances et des conditions d’existence que le sujet rencontre. Et telles stabilisa­tions ou telles rechutes qui surprennent le personnel du centre d’observation éton­nent beaucoup moins l’éducateur qui, lui, plongé dans la réalité de tous les jours, observe, connaît et apprécie les circons­tances et leur enchaînement.

Georges DIVISIA.Extrait de « Les caractères, les diversités

psychologiques et la réadaptation sociale des Relégués », par Georges Divisia, Direc­teur de la Maison Centrale de Loos.

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P H S «'HIER ET D’AUJOURD'HUI

LE MONT SAINT'MICHEL SOUS L’ANCIEN RÉGIME

L e M o n t S a i n t - M i c h e l n e f a t p a s t o u j o u r s c o n s a c r é a u g l o r i e u x a r c h a n g e p a t r o n d e l a F r a n c e . A u t e m p s d e s G a u l o i s l e r o c h e r , a l o r s r a t t a c h é à l a t e r r e f e r m e , e s t o c c u p é p a r u n C o l l è g e d e d r u i d e s s e s a u s s i t e r r i b l e s q u e p u i s ­s a n t e s .

D e u x o r a t o i r e s c o n s a c r é s l ’u n à S a i n t E t i e n n e , l ’a u t r e à S a i n t S y m p h o r i e n s u c c è d e n t à l ’a u t e l d ’E s u s . U n e p e t i t e c o m m u n a u t é d ’e r m i t e s v i t d i f f i c i l e m e n t s u r l ’a r i d e r o c h e r ; a u v il® 1 s i è c l e , c e s o r a t o i r e s s o n t d é t r u i t s .

A u d é b u t d u v iii® s i è c l e , s u r l e m o n t d é s o r ­m a i s i s o l é , A u b e r t , é v ê q u e d ’A v r a n c h e s , f a i t é l e v e r e n 7 0 9 u n e é g l i s e d é d i c a c é e à S a i n t M i c h e l e t y i n s t a l l e d o u z e c h a n o i n e s .

L e M o n t S a i n t - M i c h e l d e v i e n t a u s s i t ô t u n b u t d e p è l e r i n a g e s p r i n c i e r s . E n 9 6 3 , R i c h a r d - s a n s - P e u r r e m p l a c e l a m o d e s t e é g l i s e p a r u n e b a s i ­l i q u e p l u s v a s t e e n t o u r é e d ’i m p o r t a n t s b â t i m e n t s e t c o n f i e a u x B é n é d i c t i n s l a n o u v e l l e c o n g r é ­g a t i o n .

E n 9 9 1 u n e i n c e n d i e r a v a g e l e m o n a s t è r e , l e f i l s d u f o n d a t e u r R i c h a r d l e B o n f a i t j e t e r l e s f o n d e m e n t s d ’u n t e m p l e m a g n i f i q u e , f o n d e ­m e n t s q u ’ o n p e u t v o i r e n c o r e à l ’h e u r e a c t u e l l e , c e s o n t l e s « G r o s P i l i e r s » .

C ’e s t G u i l l a u m e l e C o n q u é r a n t q u i f o u r n i t l e s s o m m e s n é c e s s a i r e s à l a c o n s t r u c t i o n d e l a a M e r v e i l l e » e n r é c o m p e n s e d e l ’a i d e q u ’i l a v a i t r e ç u e p o u r l a c o n q u ê t e d e l ’A n g l e t e r r e -

U n s e c o n d i n c e n d i e d é t r u i t u n e p a r t i e d e s b â t i m e n t s r e s p e c t a n t t o u t e f o i s , l ’é g l i s e e t l a a M e r v e i l l e » .

N o u v e l i n c e n d i e e n 1 2 0 3 ( l e M o n t d e v a i t e n s u b i r u n e d o u z a i n e ) q u i n e l a i s s e d e b o u t q u e

l e s m u r s e t l e s v o û t e s . C ’e s t q u e l e M o n a s t è r e , d e p a r s a s i t u a t i o n , e s t a u s s i u n e f o r t e r e s s e r e d o u t a b l e e t s e t r o u v e m ê l é a u x l u t t e s d a n s l e s q u e l l e s N o r m a n d i e e t A n g l e t e r r e s o n t i m b r i ­q u é e s .

P h i l i p p e - A u g u s t e e n t r e p r e n d d e r é p a r e r l e d é s a s t r e e t c ’e s t à l ’o c c a s i o n d e c e t t e r e c o n s ­t r u c t i o n q u e n o u s e n t e n d o n s p a r l e r p o u r l a p r e ­m i è r e f o i s d e s c a c h o t s s o u t e r r a i n s , l e s in-pace d a n s l e s q u e l s o n j e t a i t l e s r e l i g i e u x c o u p a b l e s d e g r a n d e s f a u t e s : « c e s h o r r i b l e s p r i s o n s , d o n t l ’e n t r é e é t a i t s i n u e u s e , n e r e c e v a i e n t l e j o u r q u ’o b l i q u e m e n t . L e s m a l h e u r e u x d e s c e n d u s a u f o n d d e c e s t o m b e s h u m i d e s n ’a v a i e n t q u e d u p a i n e t d e l ’ e a u , e t s o u v e n t l e u r c a p t i v i t é n e f i n i s s a i t q u ’a v e c l a m o r t » .

C ’e s t a u c o u r s d u x in ® s i è c l e q u e l e M o n t S a i n t - M i c h e l p r e n d l e c a r a c t è r e d ’e n s e m b l e g o ­t h i q u e q u e n o u s l u i c o n n a i s s o n s , c ’e s t n o t a m ­m e n t v e r s 1 2 3 0 q u e l ’A b b é R a o u l d e V i l l e d i e u f a i t c o n s t r u i r e l e c l o î t r e .

L o u i s X I v i s i t a n t l e s in -pace j u g e b o n d e l e s c o m p l é t e r e n f a i s a n t c o n s t r u i r e u n e c a g e d e b o i s a n a l o g u e à c e l l e d e L o c h e s , e l l e é t a i t c o m p o s é e d e m a d r i e r s c o u v e r t s d e p a t t e s d e f e r à l ’ i n t é r i e u r e t à l ’e x t é r i e u r , l a p o r t e e t l e g u i c h e t , d e m é t a l é p a i s , a v a i e n t d e t e r r i b l e s f e r m e t u r e s . E l l e f u t s u s p e n d u e à l a v o û t e d u c a c h o t . C e t t e c a g e , e n f a i t , n e f u t g u è r e u t i l i ­s é e , q u e p o u r d e s p r i s o n n i e r s o b s c u r s d o n t l e n o m n ’e s t p a s p a r v e n u j u s q u ’à n o u s .

F r a n ç o i s 1e r y f a i t p o u r t a n t e n f e r m e r N o ë l B é d a , s y n d i c d e l a S o r b o n n e q u i l ’a v a i t s é v è ­r e m e n t c r i t i q u é e t q u i y m e u r t e n 1 5 3 7 . L a d e s ­t r u c t i o n d e l a c a g e d e v a i t ê t r e d é f i n i t i v e s e u ­l e m e n t s u r l ’o r d r e d e C h a r l e s X .

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A l a m ê m e é p o q u e u n d e s p r i s o n n i e r s , G a u ­t h i e r , e n s o r t a n t d e l ’é g l i s e s e j e t a d a n s l e v i d e d e l a p l a t e f o r m e q u i a p r i s e t g a r d é l e n o m d e S a u t - G a u t h i e r .

E n 1 5 7 7 , H e n r i I I I f a i t e n f e r m e r a u M o n t t r o i s g e n t i l h o m m e s é c o s s a i s q u i , d a n s l e u r p a y s , a v a i e n t f r a p p é l e u r é v ê q u e , i l s r é u s s i s s e n t , D i e u s a i t c o m m e n t , à s ’é v a d e r .

S o u s l e r è g n e d e L o u i s X I V l e s p r i s o n n i e r s e n v o y é s a u M o n t s o n t s i n o m b r e u x q u e l e s s a l l e s d e t h é o l o g i e e t d e p h i l o s o p h i e d e s B é n é d i c ­t i n s s o n t t r a n s f o r m é s e n c e l l u l e s . L e s n o m s n o u s s o n t i n c o n n u s , l e s r e g i s t r e s d ’é c r o u a y a n t é t é b r û l é s , s e u l s c e u x d e M M . d e J o u g u è r e e t J a u - c h e r i e s , s p é c i a l e m e n t r e c o m m a n d é s à l a s é v é ­r i t é d e s g e ô l i e r s n o u s o n t é t é g a r d é s a i n s i q u e c e l u i d e D u b o u r g q u i é t r e n n a l a n o u v e l l e c a g e , r e c o n s t r u i t e p a r L o u i s X I V , l ’a n c i e n n e a y a n t é t é d é t é r i o r é e p a r l ’h u m i d i t é . D u l o n g y m i t v i n g t a n s à m o u r i r .

L e s d e u x f r è r e s M a r i o t t e r e s t e n t d i x a n s a u M o n t , l ’a î n é p o u r u n e c h a n s o n n a r q u o i s e s u r M o n s i e u r d e B e a u m o n t , a r c h e v ê q u e d e P a r i s , l e s e c o n d c o m m e j a n s é n i s t e . L e p o è t e D e s r o c h e s y e x p i e p a r t r o i s a n s d e s é j o u r d a n s l e s t r a p p e s e t c i n q a n n é e s d a n s l e r e s t e d u M o n a s t è r e , d e s v e r s s a t i r i q u e s c o n t r e L o u i s X V e t M m e d e P o m - p a d o u r , e t l e p e i n t r e F r e n e a u y m e u r t p o u r a v o i r v e n d u u n p o r t r a i t c o m p r o m e t t a n t d e l a m ê m e f a v o r i t e .

C ’e s t à l ’i n s t i g a t i o n d e M m e d u B a r r y q u e l ’A b b é d e C h a u v e l i n e t M - d e V a v i n c o u r t s o n t d é t e n u s a u M o n t .

A l ’a v è n e m e n t d e L o u i s X V I i l n e r e s t e d a n s F a b b a y e f o r t e r e s s e q u ’u n e v i n g t a i n e d e d é t e ­n u s d o n t l e C o m t e d ’E s p a r t e s , M . d e V i l l e n e u v e e t l ’ o f f i c i e r D u v o y a n t . L a R é v o l u t i o n l e s r e m e t e n l i b e r t é a v e c u n e q u i n z a i n e d ’a u t r e s .

A s o n t o u r , l a C o n v e n t i o n y f a i t e n f e r m e r 3 0 0 p r ê t r e s r é f r a c t a i r e s d e s d i o c è s e s d ’A v r a n c h e s , C o u t a n c e s e t R e n n e s , l 'A b b é C o u s i n , h i s t o r i e n e t d o c t e u r e n S o r b o n n e , d o m D u f a u e t d o m C a r t o n , l ’u n p r o f e s s e u r , l ’a u t r e c e l l e r i e r d e l ’A b b a y e e t l ’A b b é B r é a r d , c u r é d ’A v r a n c h e s .

N a p o l é o n y e n v o i e q u e l q u e s s u s p e c t s ; l e f i ls d u G é n é r a l C a r t a u x , d e s c h e f s r o y a l i s t e s : C h a s t e n a y , L e m o i n e , L a b o u l l i e e t t r o i s g é n é ­r a u x r u s s e s p r i s o n n i e r s .

U n d é c r e t d u 6 j u i n 1 8 1 1 c o n v e r t i t l ’A b b a y e d é s a f f e c t é e e n m a i s o n c e n t r a l e d e d é t e n t i o n e t d e c o r r e c t i o n , m a i s e l l e c o n t i n u e à s e r v i r d e p r i s o n d ’E t a t . L e s p a r t i e s i n f é r i e u r e s e t v o û t é e s d e l ’a n c i e n l o g i s a b b a t i a l s o u s l e n o m d e G r a n d e t P e t i t E x i l s o n t r é s e r v é e s à c e t u s a g e .

L e M o n t S a i n t - M i c h e l s e r t a l o r s d e m a i s o n d e c o r r e c t i o n p o u r l e s m a l f a i t e u r s d u d é p a r t e m e n t d e l a M a n c h e , d e M a i s o n c e n t r a l e p o u r l e s c o n d a m n é s a u x t r a v a u x f o r c é s à p e r p é t u i t é q u ’e n r a i s o n d e l e u r g r a n d â g e o n n e p e u t e x p é d i e r a u b a g n e . E n 1 8 1 6 , l a R e s t a u r a t i o n y e n v o i e u n g r a n d n o m b r e d e c o n d a m n é s p a r l e s c o u r s p r é - v ô t a l e s .

P a r m i l e s d é t e n u s n o t o i r e s , c i t o n s : L e C a r ­p e n t i e r , d é p u t é , q u i a v a i t v o t é l a m o r t d e L o u i s X V I , a v a i t é t é p r o s c r i t p a r L o u i s X V I I I e t q u i , r e n t r é e n F r a n c e , e s t p r i s e n 1 8 1 9 . I l m e u r t a u M o n t e n 1 8 2 9 .

M a t h u r i n B r u n e a u , q u i s e p r é t e n d a i t d a u ­p h i n y e s t é c r o u é e n 1 8 1 9 e t y m e u r t e n 1 8 2 1 , s a n s d o u t e f o u .

U n h o m m e , c o n v a i n c u d ’a v o i r v o l é d a n s l e s f o u r g o n s d u « D u c d e F e r » W e l l i n g t o n , c o n d a m ­n é à 1 0 a n s d e r é c l u s i o n y e s t e n v o y é , i l r é u s s i t à s ’é v a d e r m a i s e s t r e p r i s p a r l e s d o u a ­n i e r s à l a p o r t e d e l a v i l l e .

M a i s l e p l u s c é l è b r e d e t o u s e s t E m i l e B a b e u f , f i l s d e G r a c c h u s , q u i , à l ’â g e d e d i x a n s , a v a i t t e n d u à c e d e r n i e r l e c o u t e a u a v e c l e q u e l i l s ’é t a i t t u é ; c r é a t e u r d u s o c i a l i s m e r é p u b l i c a i n , p e r s é c u t é p a r N a p o l é o n e t l a R e s t a u r a t i o n , i l e s t d é l i v r é p a r l a R é v o l u t i o n d e 1 8 3 0 .

L a g a r d e d e l ’a b b a y e - p r i s o n p e n d a n t c e t t e p é ­r i o d e e s t c o n f i é e à u n c o n c i e r g e q u i e s t c h a r g é s e u l d e l ’a d m i n i s t r a t i o n e t d e s f o u r n i t u r e s , l e s g u i c h e t i e r s s e m o n t r e n t b r u t a u x e t l e r é g i m e y e s t d u r .

M a i s c ’ e s t s u r t o u t à p a r t i r d e 1 8 3 2 q u e l e M o n t S a i n t - M i c h e l s ’a c q u i e r t u n r e n o m s i n i s t r e d o n t m a i n t s s o u v e n i r s à l ’A b b a y e e t a u M u s é e c o n s e r v e n t l e s o u v e n i r l é g è r e m e n t r o m a n c é .

D a n s u n p r o c h a i n a r t i c l e n o u s n o u s a r r ê t e r o n s à c e t t e p é r i o d e m o d e r n e d e l ’h i s t o i r e d e l a p r i ­s o n .

S u z a n n e L E B E G U E .

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NOUS AVONS LU POUR VOUS

Pau! Chaulot et Jean Susini : LE CRIME EN FRANCE (Hachette;. Un ouvrage complet. Rele­vons ces statistiques qui intéressent nos lecteurs :

Sur 2 .200 crimes, les auteurs estiment que 200 à 250 d'entre eux sont le fa it d'aliénés ; 500 viennent du désir de supprimer une per­sonne gênante ; 550 de celui de faciliter le vol ; 450 sont accidentels, intervenus au cours de rixe ; 350 ont des causes passionnelles ; les 70 derniers crimes çont des infanticides. L'arme em­ployée le plus souvent est le revolver, et l'on note que l'empoisonnement est en régression : 3 % aujourd'hui contre 5 % avant-guerre.

Une statistique des crimes passionnels est élo­quente. Plus de 30 % des criminels passionnels, en effet, présentent des anomalies caractérielles notoires ; 20 % révèlent une inadaptation de la vie instinctive ; 40 % enfin sont d'ascendance alcoolique.

65 % des criminels passionnels sont des hommes. Les plus nombreux ont entre trente et trente-cinq ans.

C'est encore l'homme qui est en tête des statistiques du vol : sur 100 voleurs, 95 sont des hommes.

De même pour l'escroquerie et l'abus de confiance. Les femmes, cependant, escroquent de plus en plus. Sur 100 escroqueries en 1932, 14 étaient l'œuvre de femmes; 20 en 1953... L'escroc de vingt à trente ans est rare. Le plus souvent, c'est un homme entre quarante et soixante ans.

Voleurs, escrocs et trafiquants, en France, pendant une année, s'approprient quelque 44 milliards d'anciens francs.

Henri Michard e t Pierre Voirin : LA CONNAIS­SANCE DES ENFANTS ET ADOLESCENTS

INADAPTES. Avec une préface de M. Pierre Ceccaldi, directeur de l'Education surveillée. Col­lection « Mésopé ». Edmond Privât, éditeur.

La Collection « Mésopé », Bibliothèque de l'Action sociale, sur laquelle nous aurons l'occa­sion de revenir, bien que destinée à un large public, n'est pas une simple vulgarisation. C'est un ouvrage de synthèse, pratique et maniable, qui répond au désir d'une pleine et authentique efficacité.

A retenir, dans la même collection :

Colette Hovasse : DIFFICULTES DE VIVRE (Pro­blèmes psychologiques de l'enfance, de l'âge adulte et du travail social).

Ann Dravez: AI-JE ETE CETTE FEMME? Lanef de Paris. Editions - 25, rue des Boulangers, Paris (5e). Un vol. : 8 NF.

« Prisons et Prisonniers » sait que, bien sou­vent, l'Alcoolisme jalonne la route qui mène à la prison. Mais savons-nous assez à quel point, l'envoûtement d'une telle passion crée un état pathologique susceptible de conduire graduel­lement à l'entier renoncement de toutes les valeurs qui font la dignité humaine ?

Le récit que nous vous proposons, captivant comme un « suspense » contient certaines maladresses qui en confirment la véracité. Nous sommes dans un « vrai » authentique, un vrai parfois un peu brutal.

De chute en chute jusqu'à l'asile d'aliénées comment Ann Dravez, par étapes successives, a-t-e lle pu, finalement, triompher de son vice ?

Nous avons, avec cette étude, un document inestimable pour tous ceux qui s'intéressent à la psycho-pathologie.

Céline LHOTTE.

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Avis important SOCIETE INTERNATIONALE DE CRIMINOLOGIE

Nous rappelons que, quelle que soit la date d'abonnement ou de réabonnement à a Prisons et Prisonniers », tous nos abonnements partent du numéro du mois de janvier de l'année en cours, et donnent droit aux quatre numéros annuels.

Le “ CAS " d e Frisons et PrisosnisrsCAS N° 19

Ce jeune, récemment libéré de prison, repart dans la vie avec une grande bonne volonté et beaucoup de courage. Il a re­trouvé du travail mais il n'a aucun métier et rêve mieux. Il nous a soumis un pro­gramme de cours par correspondance qui nous paraît, non seulement raisonnable, mais souhaitable. Il gagne très juste de quoi manger et se loger. Nous voudrions l'aider à se préparer un avenir meilleur. L'équivalent en cours gratuits n'existe pas.

ABONNEMENT A «PRISONS ET PRISON­NIERS» : 5 NF FAR AN.

l r CONGRES FRANÇAIS Lyon 20-24 octobre 1960

Environ 150 participants.L'ensemble du Congrès a porté sur l'étude du

dossier de personnalité de l'accusé, vu par l'assistante sociale, le psychologue, le psychiatre, le médecin légiste, te législateur, etc.

Exposés presque tous de grande valeur dans un domaine nouvellement acquis à la crimino­logie.

La Société Internationale a élu un bureau (M. le Pr Colin - R.P. Vemet S.J. - Mme Veil - Mlle Marx) chargé d'organiser en France un congrès annuel. Le prochain congrès se .tiendra à Rennes.

C L.

PRISONS et PRISONNIERSREDACTION, ADMINISTRATION :

120, rue du Cherche-Midi, PARIS (6e) Tél. : LITtré 41-71

C.CP. : PRISONS et PRISONNIERS, PARIS 6076-52

Directeur-gérant : Mgr Jean RODHAIN Rédactrice en Chef : Céline LHOTTE

VOTRE ABONNEMENT FINIT AVEC CE NUMÉRO

La Rédaction de “ Prisons et Prisonniers ”

vous offre ses meilleurs vœux pour 1961

CIB, 4, rue du Bouloi, Paris-ler. — Edité par S.O.S.