15-L'Attaque Du Mutant

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    - Hé ! Lais se ça !Je saisis la bande dessinée que Wilson tenait à lama in et lis sa i soigneuse ment la pe llicule de plastiquequi la recouvrait.

    - Du ca lme ! Je regardais seulement, grogna -t- il.- Ou i , ma is s 'i l y a une trace de doigts , elle va perdrela moitié de sa valeur !J'examinai attentivement la couverture, tout en pour-suivant mes explications.— C' e s t un Vaisseau d'Argent numéro zéro. Tout

    neuf, en plus.Wilson secoua la tête. Il avait des cheveux blondsbouclés, des yeux ronds et bleus, et semblait toujoursembarrassé.- Comment est-ce que ça peut être un numéro zéro ?demanda-t-il. Ça n'a pas de sens, Jim !

    W i l s o n est vraim ent un très bon a mi, mai s parfois ondirait qu'il vient de tomber de la planète Mars. C'ests imp le : il ne comprend jama is ri en.

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    Je lui désignai le numéro zéro inscrit à côté du prix.- Ça en fait un numé ro de collecti on , expliquai -je .Cette BD vaut dix fois son prix normal.

    - Sans blague ?Wilson se gratta la tête, puis i l s 'accroupit etcommença à fouiller dans le carton qui contenait mesautres revues.- Mais pourquoi sont-elles toutes dans des pochettesen plas tique ? Co mm ent peux-tu les lire ?

    Décidément, il ne comprenait rien à rien.- L e s lire ? Tu es fou ! Je ne les lis pas . Si on les lisa it,elles perdraient de leur valeur. Elles ne seraient plusà l'état neuf.- Oh ! Ce lle -là est chouette ! s 'exclama -t il en sor-tant un exemplaire des Croisés du Cosmos . Regarde !

    La couverture est comme en métal.- Ça ne vaut rie n, murmura i-je , c'e st une secondeédition.Wilson étudiait la couverture argentée, la tournantdans tous les sens afin qu'elle brille dans la lumière.- Génial !

    C'était son mot favori.Nous étions dans ma chambre, peu après l'heure dudîner. Par la fenêtre, on voyait le ciel déjà biensombre. La nuit tombe vite l 'hiver, pas comme surOrcos 3, la planète du Cygne d'Argent . Là-bas, lesoleil ne se couche jamais, et tous les super-hérosdoivent porter des costumes à air conditionné.W i ls o n était venu cherche r le problème de maths quenous devions résoudre pour le lendemain. Comme il

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    habite à côté, il laisse toujours son livre à l'écolepour avoir une bonne raison de venir chez moi.- T o i auss i , tu devrais faire collection de B D , luiconseillai-je. Dans quelques années, ça vaudra desmill ions.- M o i , je fais collection de tampons de caoutchouc,dit-il en se saisissant d'un exemplaire de La Brigade Z .- Des tampons de caoutchouc ?- O u i , j ' e n a i déjà presque une centaine.

    Étonné, je lui demandai :- E t qu'es t-ce que tu fais avec ?Wilson remit la BD dans le carton et se leva.- B e n , on peut toujours tamponne r des chose s !répondit-il, brossant de sa main les genoux de son

    jean. On peut aussi s implement les regarder.

    Il est vraiment bizarre ce Wilson.- Ils ont de la va leur au moins ?- N o n , je ne pense pas ! B o n , alle z Ji m , je feraismieux de partir maintenant. Je te verrai demain.Il se dirigea vers la porte et je le suivis. Nos sil-houettes se reflétèrent dans la grande glace de mon

    armoire. À côté de Wilson qui est grand et maigre, j ' a i toujours l ' impres s ion de ressembler à une petitetaupe grassouillette. Si nous étions dans une B D ,Wilson serait le super-héros, et moi, simplementl'associé, le type rondouillard qui met la pagaillepartout.

    Dès qu'il fut parti, je retournai dans ma chambre.Mon regard accrocha la banderole au-dessus de laglace : « J i m Matteurs, le Vengeur Ma gn ifi que ».

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    C'était mon père qui l 'avait fait imprimer récemment pour me l 'offrir à l 'occasion de mon onzièmeanniversaire.De chaque côté de l'a rmoi re , il y a aus si deux grandsposters. L'un, de Jack Kirby, le créateur de Capitaine

    America , est très ancien et vaut dans les mille dol-lars. L 'a utre , représentant Todd M a c Ferla ine , l ' i l lus -trateur célèbre de L Araignée , est plus récent. Maisils sont tous les deux super.Mes yeux se tournèrent ensuite vers la commode oùm'attendait une grande enveloppe plate et marron.Maman et Papa m'avaient autorisé à l 'ouvrir, maisseulement après avoir terminé mes devoirs. Cepen-dant, je ne pouvais plus attendre. Je sentais moncœur battre d'excitation. Je savais ce qu'elle conte-nait et, rien que d'y penser, les battements redou-blaient de violence.Je pris soigneusement l 'enveloppe.Il fallait que je l 'ouvre.J'étais obligé de l'ouvrir.

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    Doucement, précautionneusement, je décollai lerabat de l'enve loppe , et j ' e n retirai le trésor. C'éta itl 'édition hebdomadaire du Mutant Masqu é. Je tenais

    la BD des deux mains, comme s'il s 'était agi d'untrésor. Sur la couverture, on pouvait l ire le titre, Mort

    dans les profondeurs , se découpant en grosses lettresrouges. Le dessin était vraiment extra. Il montrait unscaphandrier é tranglé par les tentacules d 'unepieuvre géante.

    Fantastique. Totalement fantastique.Le Mutant Masqué est de loin ma revue préférée. Jela li s auss itôt que je la reçois , du pre mier mot au der-nier. Je lis même les pages de pub lici té ! C 'e s t la BDla mieux écrite et la mieux dessinée du monde entier,et le Mutant Masqué est certainement le plus puis-

    sant et le plus diabolique des méchants jamais créés.Il est terriblement dangereux, car il peut faire bougerses molécules comme il le veut, c'est-à-dire qu'il

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    peut prendre l 'apparence de n ' importe quoi desolide.Sur la couverture , la pie uvre géante, c'éta it certaine-

    ment lui, car il peut se changer en n'importe quelanimal, ou même n'importe quel objet. Ce qui luipermet de toujours échapper à la Ligue des Vengeursqui le poursuit sans relâche.Dans cette Ligue, il y a six super-héros, tous desmutants eux aussi. Ils ont d'énormes pouvoirs et sont

    les meilleurs au monde pour faire respecter la loi,ma is ils n'arrivent jama is à capturer le Muta nt M a s -qué. Même leur chef, l 'Homme Éclair, n'est pasassez rapide pour l'attraper.J'examinai attentivement la couverture pendant delongues minutes. Les tentacules qui étranglaient

    l'homme en scaphandre étaient vraiment très biendessinées. À travers le hublot de son casque, on pou-vait voir qu'il souffrait terriblement.Inouï !Je m'affalai sur mon lit pour entamer ma lecture.Le scaphandrier était en fait un explorateur à la

    recherche de trésors engloutis. Il avait découvert,sans le savoir, une des bases secrètes sous-marinesdu Mutant Masqué, entièrement recouverte d'uneparoi métallique.Je tournai la page.Le Mutan t Masqué s ' approcha i t l en temen t e t

    commençait à mélanger ses molécules. Il se chan-geait ainsi en une gigantesque et effrayante pieuvre,se préparant à l'attaque. Il y avait huit dessins décri-

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    vant les différentes étapes de sa transformation, puisvenait une double page où la pieuvre enroulait sestentacules visqueuses autour du pauvre hommedésarmé. Celui-ci se débat tai t comme un beaudiable, mais les tentacules commençaient à le broyer,inexorablement.J'allais tourner la page lorsque, soudain, quelquechose de froid et de fin s'enroula autour de mon couet commença à m'étrangler.

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    Poussant un cri de surprise, je tentai de me libérer,mais les tentacules glacées resserrèrent leur étreinte.Je ne pouva is plus crier, plus respirer. C' e s t alors que

    j 'entendis un rire familie r. Ave c un grand effort, jeparvins à tourner la tête et découvris Coline, mapetite sœur de neuf ans.E l le enleva ses ma ins de mon cou et recula , le sourireaux lèvres.- Espèce de fol le ! gronda i- je . Tu as les m a in sgelées !Elle m'adressa alors son sourire le plus innocent.— Je les ai mises au frigo.- Tu quoi ? Qu 'e s t- ce qui t ' a pris ?- P o u r qu'e lles soient aussi froides que la mort !ajouta-t-elle en tentant de prendre l'air maléfique.Ma sœur a vraiment un sens de l'humour particulier.

    E l le me ressemble. Petite, potelée, elle a des cheveuxfoncés et raides. Je me massai le cou en maugréant :- Tu m'as fichu une de ces trouilles !

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    - Je sais !El le frotta ses mains encore glacées sur mes joue s . Jela repoussai brutalement.- Oh ! Fi ch e le camp, Coli ne ! Tu es venue juste pourm'embêter ?Elle secoua la tête.- N o n ! Pa pa m 'a dit de monter te dire que s i tu esencore en train de lire tes BD au lieu de faire tesdevoirs, tu vas avoir des ennuis !Elle baissa les yeux sur ma revue.- Et je crois b ie n que tu vas en avoir, ajouta -t-e lle.- Non ! Attends !Je lui saisis le bras.- C'est le nouveau Mutant Masqué . Je dois le lire !Dis à Papa que je fais mes maths et...Je n'eus pas le temps de finir car mon père entraitdéjà dans ma chambre . Se s ye ux se portèrent aussitôtsur ma revue ouverte.- J imm y ! gronda -t-i l d'une vo ix ple ine de colère.Col in e se fa ufila hors de la chambre ; elle n'a ime pasassister aux disputes lorsque les choses se gâtentréellement, ce qui allait être le cas.- D i s donc, fils , sa is-tu pourquoi tes notes sont s imauvaise s ? me lança m on père.- Pa rce que je ne suis pas un super-élève ? di s-je .FAUTE !Papa déteste que je lui réponde.Il me fait pens er à un gros ours, non seulement parcequ'il grogne tout le temps, mais aussi parce qu'il estgrand et fort. Il n'a presque pas de front, étant donné

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    que sa chevelure comm ence presque tout de suite au-dessus de ses lunettes. Quant à sa voix, elle res-semble au rugissement du grizzli.Bref, suite à ma réponse, il poussa un cri de colère,puis traversa la pièce pour saisir le carton qui conte-nait ma colle ction entière de B D .- Je suis désolé, fils, ma is cette fois ça suffit ! Toutça, à la poubelle !

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    Vous pensez peut-être que j 'ai paniqué, que j 'aicommencé à le supplier pour qu'il ne se débarrassepas de ma chère co lle ct io n, que je me suis traîné à ses

    pieds.M a i s non ! Je n'a i pas dit un mot. Je suis resté à côtéde mon lit, les bras le long du corps. J'attendais.Vous savez, Papa avait déjà proféré plusieurs fois lamême menace, mais jamais il n 'était allé jusqu'aubout.

    Il a mauvais caractère mais, dans le fond, il n'est pasméchant. Pour l'instant, je le place plutôt dans laLigue des Vengeurs.Son plus gros problème, c'est qu'il n'aime pas lesB D . Pour lu i , ce sont des bêtises, même lorsque je lu iexplique que ma collection vaudra des mill ions

    quand j 'atteindrai son âge.Bre f, je res tais debout et j 'a tte nda is , prenant juste unair effrayé pour qu'il soit touché.

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    Papa s'arrêta, se retourna et me fixa de ses yeuxsombres, en fronçant les sourcils.- T u vas te remettre au travail ? me demanda -t-ilsévèrement.J'acquiesçai, la tête baissée.- Oui, Papa.- Et tu ne perdras plus ton temps, ce s oir, avec tesrevue s ?Je lui montrai l 'exemplaire du Mutant Masqué , quigisait sur mon lit.- Je peux au moins termine r celle -là ?D O U B L E FA U T E !Il pouss a un grognement et se tourna pour sortir avecmon carton dans ses bras.- O K , OK ! criai- je. Je te demande pardon. Je va isfaire mes devoirs, Papa. Je m'y mets tout de suite !Il grogna encore un peu, mais remit le carton à saplace.- V r a i m e n t , tu ne penses qu'à ça. Nui t et jour. De sB D , des B D , des BD ! Ce n'est pas bon !Je ne répondis pas . Je savais qu ' i l a llait partir, ma is ilme lança encore :- Je ne veux plus entendre parler de ces illustrés !- OK, Papa ! Je te demande pardon.J'attendis que ses pas lourds s'éloignent dans l'esca-lier, puis, je retournai à la nouvelle aventure duMutant Masqué. Je mourais d'envie de savoir com-ment l'explorateur allait s'en sortir... s'il s'en sortait.M a i s je me ravis ai . Co li ne n'éta it sans doute pas loin .Si elle me voyait lire, elle risquait de prévenir mon

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    père, mademoiselle la rapporteuse ! Aussi, j 'ouvrismon cartable et en tirai mes livres de maths, desciences et de littérature.Les solutions aux problèmes furent expédiées àgrande vitesse, à la rapidité de l'Homme Éclair. Laplupart des réponses était sans doute fausses, maisqu 'i mpo rt e : de toute façon , je su is ma uva is e nmaths . Je sautai également quelques questions en lit-térature : il n'y a que les Grands Cerveaux de Plutonqui savent répondre à tout. Quant aux sciences, laleçon sur les atomes et les molécules me faisait sanscesse penser au Mutant Masqué et je retins peu dechoses du résumé.Enfin, la conscience tranquille, je me jetai sur monlit, pour finir ma passionnante lecture.

    Revenons donc à l 'océan...L'homme au scaphandre n'avait eu la vie sauve quegrâce à l 'intervention de la Ligue des Vengeurs. Labataille qui s'en suivit fut terrible et, après avoirin fli gé de douloureus es pertes aux jus tic ie rs , leMutant Masqué parvint encore à s'enfuir. De retour

    en ville, il regagna son quartier général.Son quartier général !J'e us un choc en le voyant, car ja ma is auparavant lesecret n'en avait été dévoilé. Il y avait bien quelquesindications, par-ci par-là, mais c'était la premièrefois que l'on voyait l 'immeuble, en entier, de l'exté-

    rieur.- Quel endroit étrange ! m'exclamai-je en examinantattentivement le dessin.

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    Il ne ressemblait pas à ce que l'on aurait pu attendredu quartier général de la pire canaille de la planète.L'édifice avait la forme d'une gigantesque bouched'incendie, une bouche d'incendie si haute qu'ellesemblait toucher le ciel. Toute en ciment rouge etsurmontée d'un toit sphérique noir.- V r a i m e n t étrange ! répétai-je.Mais naturellement, c'était le meilleur endroit pourse cacher. Qui aurait pu penser que le plus grand desbrigands de tous les temps se dissimulait dans unbu ildi ng a uss i peu discret ?Je tourna i la page : le Mutant se glis sa it dans l'édi ficeet emprunta it un as cense ur qu i le menait tout en haut,dans ses appartements privés. Là, une grande sur-prise l'attendait...On pouvait voir qu'il était épié par une sombre sil-houette, dissimulée derrière les rideaux. Moi, jel 'avais reconnue immé diate ment : c 'éta it l ' H o m m eÉclair, le grand chef de la Ligue des Vengeurs.Com me nt ava it-i l pu entrer ? Et pour quoi faire ? Lasuite au prochain numéro...Je refermai la BD. La tête remplie d'images écla-tantes, je me couchai et m'endormis aussitôt.

    Quelques jours plus tard, par une froide et claireaprès-midi, Wilson, me rejoignit en courant après laclasse. Sa respiration faisait de la buée devant sonvisage.— Hé ! J i m m y ! Tu vie ns che z m o i ? Je va is te fai revoir ma collection de tampons.

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    - Désolé , mon vi e ux , je do is a lle r che z le dentistepour faire régler mon appareil dentaire. Je prends lebus, là-bas.Il fit une grimace compatissante.- Je n'aimerais pas être à ta place !- B o f ! lança i-je , dés involte. Il y a un ma ga s in de BDprès de chez lui . C om m e ça, j ' e n profite pour voi r lesdernières nouveautés. Mon bus arrive ! ajoutai-je envites se . Sa lut !Je courus vers l'arrêt et le conducteur, brave type,attendit un peu. Je montai donc en le remerciant.Je ne l'aurais certainement pas fait si j 'avais su où ilm'emmenait .Mais je ne pouvais pas deviner que je me dirigeaisvers la plus terrifiante aventure de toute ma vie !

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    Le bus était bondé. Je restai debout un moment, puisde ux pe rso nne s de sc en di re n t e t j e pus en f i nm'asseoir. A i n s i , je voyais bien les maisons et les ja r-dins que nous longions.De lourds nuages s'accumulaient au-dessus des toits,la première chute de ne ige de l'h ive r ne tarderait pas .Le magasin de BD n'était pas loin. Je regardai mamontre pour voir si je pouvais m'y arrêter avant monrendez-vous , mais non : pas le temps pour les BDaujourd'hui.U n vo ix clai re interrompi t mes pensées :- Eh ! Tu vas rue F ra nkli n ?Je vis alors, à mes côtés, une fille, la chevelurerousse resserrée en une simple tresse. Ses yeuxétaient verts et son nez ponctué de petites taches derousseur. Elle portait un gros pull jaune, sur un jeandélavé, et tenait son cartable sur ses genoux.- Oui, j 'y vais, répondis-je.- C o m m e n t tu t 'appelles ?

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    - J i m !- Ça te va bien, je suis sûre que tu es le premier... engym !Je voyais bien qu'elle se moquait de moi. Mais sablague me fit rire.- E t toi , comment tu t 'appe l les ?- L u c y Za ck s . Où est-ce que tu vas e xactement ?Je ne voulais pas lui parler de mon appareil dentaire,aussi je lui répondis :- Je vais chez K om i cs , le magas in de B D .- Tu es ama teur de BD ? M o i auss i !J'éta is s urpris ; en général ce sont les garçons quicollectionnent les B D .- Q u e l genre tu préfères ? demandai-je.- J'adore Harry et les grosses têtes !- Beurk ! C'est pour les bébés, ce truc ! Ce n'est pasde la vraie B D , dis-je en faisant la grimace .- Eh bien moi, je trouve que cette série est très amu-sante. Peut-être que tu ne la comprends pas ?Je haussai les épaules tout en regardant par lafenêtre. Le ciel était devenu encore plus sombre.- E t toi , tu collectionnes lesquelles ? m'interrogea-t-e lle à son tour. De s his toire s de super-héros ?- Oui, et ma collection vaut au moins mille dollars,répondis-je avec fierté.- Tu rêves ! ricana-t-elle.- M a i s no n ! To i , tes h is to i res n 'auront ja ma isaucune valeur. Mê me le numé ro un n' e n a pas . Tu nepourras jamais en tirer plus de dix dollars.- P o u r q u o i veux-tu que je les vende ? Je me fiche

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    éperdument de leur prix, je les ai juste pour les lire.- Alors, tu n'es pas une vraie collectionneuse !— Et alors ? Ça change quoi ? Tu me désintègres ?On se mit à rire. Je ne pouvais encore dire si cettefille me plaisait, mais elle était mignonne et elle avaitde l'humour.Tout à coup, je réa lisa i que le ca r dépassait des maga -sins que je ne reconna iss ais pas : j ' a va i s raté ma sta-tion. Je me levai vivement et appuyai sur le bouton«Stop». Le bus ne tarda pas à s'arrêter et, aprèsavoir salué la jolie rousse, je me ruai dehors.- Où es t-ce que je peux b ie n être ? murmura i- je enregardant autour de moi.- Tu es perdu ?Je me retournai et, à ma grande surprise, je m'aper-çus que Lucy m'avait suivi hors du bus.— M a i s , qu'es t-ce que tu fais ic i ?— C'e s t là que je de scends . J 'habite deux rues plusloin, expliqua-t-elle en me montrant une directiondevant elle.- Eh bien mo i , i l faut que je re tourne e n arriè re, jesuppose ! grommelai-je en tournant la tête.Mais, à ce moment-là, mon cœur s'arrêta de battrequelques secondes ; je n' en croyais pas mes ye ux.- Ce n'es t pas poss ib le ! lâchai -je dans un souff le .Je venais de découvri r l ' imm eub le situé au co in de larue. Un très grand immeuble de ciment rouge, avec

    un toit sphérique noir.J'étais face au quartier général du Mutant Masqué.

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    - Eh ! Jimmy ! Qu'est-ce que tu as ? s'écria Lucy enme secouant par l'épaule.Je ne pouva is lui répondre. J'ava is les ye ux fixés surcet édifice, la bouche grande ouverte comme un

    poisson mort. J 'élevai mon regard jusqu'à l 'énormetoit sombre, puis le baissai pour détailler les mursbrillants et rouges. De ma vie, je n'avais encore

    ja ma is vu de te lles couleurs ! Ça n'exis ta it pas !C'était des couleurs de BD ! C'était un immeuble deB D !

    Pourtant, il était là, bien en face de moi.- Tu vas bi e n ?La voix de Lucy résonna dans le lointain.- E s t - c e réel ? me répétai-je. Es t- il possible que lequartie r géné ral du Muta nt Masqué soit rée l ?- H é , Jim my , qu'est-ce qui se passe ? Tu as l 'a ir sieffrayé !- C'est... c'est cet immeuble, là-bas, bégayai-je.- Ouais, c'est vraiment la chose la plus moche qu'on

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    ait construite, remarqua L uc y. M a i s ça ne vaut pas lecoup de faire une crise cardiaque !- M a i s . . . Ma is . . . c'es t... c 'es t...

    Je ne pouvais plus parler.- Mon père dit que l'architecte qui l 'a conçu n'avaitaucune notion des couleurs, continua-t-elle. Ça neres se mble pas à un im me uble , on dirait un dirigeablequi se serait mis debout.- Ça fait longtemps qu'il est là ? demandai-je en exa-

    minant les portes vitrées qui étaient les seules entréesvisibles.- Je ne sais pas. Ma famille a emménagé ici au prin-temps dernier. Il y était déjà.L e s nuages devenaient de plus en plus noi rs . Un petitvent glacial se leva.

    - J e me dema nde qui peut trava il ler là-dedans ?demanda Lucy. Aucun nom n'est indiqué.Naturellement qu'il n'y avait aucun nom ! C'était lerepaire du plus grand démon de la planète. LeMutant Masqué n'allait pas mettre son nom sur laporte !

    - M a i s c 'es t fou ! m'e xcla ma i-je .L u c y m'e xa mina it, l 'a ir inquiète :- T u e s s ûr que tout va bie n ? Ce n'e st qu 'u nim meub le , il ne faut pas en faire tout un plat !Je me sentis rougir : L u c y devait me prendre pour unimbécile.

    - C 'e s t que j ' a i vu le mêm e, aille urs : étonnant, non ?Je réussis à donner cette explication d'un air dégagé.- Bon, alors, à une autre fois peut-être !

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    Je restai se ul et honte ux, songeant à ce qu'e lle devaitpenser de moi. Je me sentais vraiment malheureux.mais je n'y pouvais rien : ça avait été un tel choc devoir cette construction ! Je traversai la rue pour m'enapprocher. Les alentours étaient déserts et personnen'entrait ni ne sortait de cet édifice.«Ce doit être un immeuble de bureaux, il n'y a pasd e q u o i s ' é n e r v e r , m e r é p é t a i - j e p o u r m econva incre . »

    Cependant, mon cœur battait à tout rompre lorsque j 'a tte ignis les grandes portes vitrées.C'était fou, mais pourtant, je m'attendais à voir desgens portant des costumes de super-héros aller etvenir à l 'intérieur.Mon front touchait presque la vitre. Ça avait l'air

    bien sombre là-dedans. Je réussis néanmoins à dis-tinguer un grand hall, des murs rouges et jaunes, etplusieurs ascenseurs. M a i s il n'y avait personne ! Pasâme qui vive ! L 'e ndroi t se mblait inhabité.Je pris la poignée de la porte e t resp ira i un bon coup.«Es t-ce que j 'e ntre ? Es t-ce que j ' o s e entrer ?»

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    D'une main tremblante, je commençai à pousser laporte. M a i s au même mome nt, du co in de l 'œ il , je visun autobus qui arrivait. Ma montre m'indiqua que je

    n'avais que cinq minutes de retard pour mon rendez-vous. Si je sautais dans celui-ci, j 'arriverais chez ledentiste en quelques minutes.Je lâchai la poignée et courus vers l'arrêt, mon car-table brinquebalant sur mon dos.J'étais à la fois déçu et soulagé. Entrer dans le

    repaire du plus dangereux des mutants de l'univers,ça fichait quand même la trouille.Le bus s'arrêta. Je monta i et je me dirigea i vers lefond afin de jeter un dernier coup d'œil au mysté-rieux imme uble rouge e t noir. Je n'a rriva is pas àdétacher mon regard de cette construction dont les

    couleurs restaient toujours aussi vives malgré lesnuages qui s'amoncelaient. Il n'y avait toujours per-sonne aux alentours. Quelques secondes plus tard,

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    comme le bus tournait, l ' immeuble disparut de mavue. «Incroyable ! pensai-je. Vraiment incroyable ! »

    - Et c'était vraiment le même immeuble que celui dela BD ? me demandait W i l s on , ses ye ux bleus mefixant par-dessus la table.J'acquiesçai :- J ' a i vé rifié dans ma revue dès mon retour: c'es texactement le même !Wilson sortit son sandwich de son sac et enleva lepapier qui l 'entourait. Je fis de même avec le mien.Chacun mangea en silence. Je mâchai sans appétit,songeant toujours à cette apparition. Elle n'avait pasquitté mon esprit depuis la veille.Soudain, Wi ls on s 'e xclam a :- J ' a i trouvé !- Trouvé qu oi ?- C ' e s t simple : qui a dessiné le Mutant Masqué ?- J i m Sterenko ! répondis-je instantanément. C'e s tlui qui a créé le personnage !Comment Wi lson pouvai t - i l ignorer une chosepa re ille ?- B o n ! reprit-il . Supposons que ce type soit ve nuda ns ce qua rti e r un jo ur . I l pa s s e de vant to nimmeuble, il le trouve bizarre et intéressant, et hop !il fait un croquis pour pouvoir l 'utiliser dans sa BD.- O u i , je vois. . . , murmurai-je, visualisa nt la scèneque Wilson venait de décrire. Alors, ce serait doncça ? Il a ima giné son his toire à parti r d 'u n immeublequ i exista it dé jà ?

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    Cette explication tenait la route ; elle la tenait mêmetrès bien.Ça a l 'ai r bête, ma is j 'é ta is souda in déçu : j 'a ur a isvraiment aimé qu'il s 'agisse du véritable repaire duMutant Masqué. Wilson avait gâché le mystère. Pourune fois qu'il disait quelque chose d'intelligent !Il se le va , content de ses déductions, et ajouta :- J e vais a l ler acheter quelques tampons . Si tuveux, je pourrais venir te les montrer chez toi, aprèsl 'école.- N o n , me rc i ! Sans fa çon ! Ce se rait vra ime nt tropexcitant !..., me moquai-je en guise de vengeance.J 'espérais malgré tout revoir l ' immeuble en find'a prè s -m id i, ma is le prof de maths, - un SuperV i l a i n ce lui -là ! - nous donna une tonne de devoirs et

    je dus rentrer directement à la ma ison.

    Le jour suivant, la neige s'était mise à tomber. J'allaifaire du patin à glace avec Wilson et d 'autrescopains , mais mon envie de re tourner devantl'étrange édifice ne me quittait pas.

    Le surlendemain, enfin, j 'étais prêt. Cette fois-ci,rien ne m'empêcherait d'y aller. Et cette fois-ci,

    j 'entre ra is . Il y avait peut-être un gardien ou unréceptionniste à qui je pourrais demander des ren-se ignements sur cet imme uble : le nom du proprié -taire ? que lles pe rsonnes y trava illaient ?

    Après l 'école , je me sentais p le in de déte rminationen montant dans le bus. Je voula is vraiment en avoirle cœur net, être certain qu'il ne s'agissait que d'un

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    immeuble de bureaux et qu'il n'y avait pas de quoien faire toute une histoire.Je m'installai sur un siège espérant vaguement revoirL u c y : ma is aucune trace d'e lle .Je me concentra i alors sur le parcours car je n'étaispas sûr de l'arrêt auquel je devais descendre. Le busdépassa mon magasin de BD, puis la rue de mondentiste . Que lque s minute s après, je reconnus le petit

    ja rdin devant lequel j 'é ta is descendu par erreur.Je me levai précipitamment et bousculai les voya-geurs debout pour pouvoir sortir avant que les portesne se referment. Ou i , c'étai t bie n là !Je tournai les yeux vers ma gauche et faillis crier destupéfaction en découvrant un grand terrain vide.L 'i mme ub le avait disparu !

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    Je me frottai les yeux, et regardai encore plus at-tentivement. Comment était-il possible qu'une sigrande construction disparaisse ainsi en quelques jours ?Je n'eus pas plus de temps pour réfléchir. Un autrebus venait de s'arrêter et Lucy en descendit, toutesouriante. E ll e portait le même je an troué , et ses che-veux étaient tirés en arrière, en une queue de chevalretenue par une barrette bleue.- Hé ! Jimmy ! Qu'est-ce que tu fais dans mon quar-tier ?- L ' i m . . . l' imme uble a disparu ! bégayai-je. I l estparti !- T u pourrais au moins dire « Bo nj ou r» ou quelquechose d'approchant !

    - O u i , oui , bonjour ! Qu 'e s t -ce qui es t ar r ivé àl 'imm euble rouge ?E l le tourna la tête e t répondi t :

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    - On a dû le détruire, je suppose. Faut dire, il étaittellement moche !- Mais.. . mais.. .Je n'en finissais pas de bégayer.- M a i s , tu as vu qua nd on l'a dé moli ? Tu habites àcôté, tu dois l'avoir vu !Pensive, Lucy fronça les sourcils.- B e n . . . non ! Je suis passée par là plusieurs fois.mais...- Tu n'a s vu aucune ma chine ? Auc un e grue ? Au cu nouvrie r ?Lucy secoua la tête.- N o n , c'es t vrai , je n 'a i rien remarqué. Ma i s je neregardais pas spécialement. Je ne sais pas pourquoitu t'intéresses tant à ce building. Il était si affreuxque je suis bien contente qu'il ne soit plus là.- M a i s cet imme uble était dans une de me s BD !explosai-je.- Q u ' e s t - c e que tu racontes ?Je soupirai, sachant bien qu'elle ne comprendraitpas.- Oh ! Rien ! Rien !- Eh ! D i s - m o i , justeme nt : s i tu vena is chez m oi vo irma col le cti on ?J'étais tellement embarrassé que j 'acceptai.Une heure plus tard, je repartis chez moi complète-ment déprimé. Les BD de Lucy était toutes plus bar-bantes les unes que les autres. Qua nt aux dessins :beurk ! Et pui s je n 'a rriva is pas à chasse r de ma têtecette énigme : comment un si gros immeuble po u-

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    vait-il disparaître complètement en quelques jours ?Je retournai au pas de course à l'arrêt de mon bus enespérant trouver l 'édifice à sa place mais naturelle-ment, il n'y était pas.Je ne savais plus que penser. Des idées toutes plusfolles les unes que les autres traversèrent mon esprit.Je suppose qu'e lle s venaient de mes lectures. J'atten-dis le bus pendant dix minutes, durant lesquelles jene cessai de fixer le grand terrain vide, échafaudantmille hypothèses sur cet étonnant mystère.De retour à la ma is on , je trouvai une enve loppe ma r-ron. Elle m'attendait sur la petite table de l'entrée oùMaman pose le courrier.- Chouette ! m'exclamai-je.C'était l 'édition spéciale du Mutant Masqué numéro2. La suite de celui que j'avais déjà.J'embrassai ma mère en vitesse et montai l 'escalier,la BD bien serrée sur ma poitrine. Je ne pouvais pasattendre pour savoir ce qui s'était passé après l'irrup-tion du che f de la L igue dans le quartier général duMutant Masqué.Soigneusement, je retirai l 'enveloppe et examinai lacouverture.L'étrange immeuble rouge et noir y occupait presquetoute la place.Mes mains tremblaient lorsque je tournai la premièrepage.

    Le Mutant Masqué était devant une grande consolede visualisation et regardait un mur truffé d'aumoins une vingtaine d'écrans de télévision. Chaque

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    écran montrait un membre différent de la Ligue desVengeurs.- J e les éliminera i tous, un par un , déclarait leMutant Masqué dans la première bulle. Ils ne metrouveront jamais ! Je vais jeter un rideau d ' inv is ibi -lité sur tout mon quartier général !Ma bouche s'ouvrit d'étonnement, lorsque je par-courus ces mots. Je les lus encore et encore, avant delaisser tomber la BD de mes mains.Un rideau d'invisibilité !Personne ne pouvait voir l'immeuble du MutantMasqué à cause du rideau d'invisibilité !Je m'assis tout excité sur mon lit, mon pouls battantde plus en plus vite.Était-ce ce qui s'était réellement passé ? La BDne me donnait-elle pas la réponse au mystère de ladisparition ?Y avait-il vraiment un rideau d'invisibilité qui dissi-mulait le building ?Cela avait l 'a ir fou, complètement fou, maisn'était-ce pas une explication ?Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir : c'était d 'yretourner.Le plus vite possible.

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    Le lendemain après-midi, je devais aller acheter desbaskets avec ma mère. D'habitude j'en essaie aumoins dix ou douze paires avant de me décider. Cettefois-ci, je choisis la première venue. Des Reeboks

    blanc et noir.Qui peut penser à des baskets quand un immeubleinvis ib le attend d'être découvert ?Sur le chemin de retour, je commençai à parler unpeu de cela à ma mère, mais elle m'arrêta tout desuite :

    - Je sera is heureuse que tu t'intéresses autant à tesétudes qu'à tes stupides BD.Je connaissais d'avance la suite de son discours.J'enchaînai :- Au jo urd 'h ui en scie nces , on a disséqué un ver deterre.

    Ma mère fit la grimace.- Vos professeurs n'ont-ils rien de mieux à faire quede torturer de pauvres petits vers innocents ?

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    va- t-on passer à travers ton ride au d 'inv is ib il it é ?Sa voix était sérieuse, mais je voyais à ses yeuxqu'elle se fichait de moi.Patiemment, j 'e xp li qu a i :- Da ns les B D , les gens le traversent simple ment, onne le sent pas. C'est comme un rideau de fumée.Mais une fois qu'on l'a franchi, on peut voir tout cequi se dissimule derrière.- OK ! OK ! A l l e z , on y va e t on en finit avec cettehistoire !Côte à côte, nous avancions lentement vers le terrainvide. Un pas, puis encore un autre.L u c y ne cessa it de répéter :- N ' i m p o r t e quoi ! C 'e st vraiment n ' im. . .Soudain, elle s'arrêta net de parler.

    Devant nous, le building venait d'apparaître.- Ooooh !Nous avions crié ensemble. Lucy me saisit le poi-gnet ; ses mains é taient glacées.La porte vitrée était devant nous, ainsi que les mursbrillants et rouges.

    - Jimmy ! Tu... tu avais raison !J 'avalai ma salive. J 'essayai de parler, mais mabouche était toute sèche.L u c y demanda d'une vo ix é tranglée :- E t maintenant, qu'est-ce qu 'on fait ?Je ne pouvais toujours pas prononcer un mot.

    La BD était donc réelle, complètement réelle. Est-ceque cela voulait dire que l'immeuble appartenait auMuta nt Ma squé ? M o n cœur battait à tout rompre .

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    Lucy s'impatientait. En plus, elle avait l'air vraimenteffrayée.— Alors ? Quoi maintenant ? On s 'en va ?Je secouai la tête.- Ah ! Non ! Pas question ! On entre !- Entrer là-dedans ? Tu es fou ?- On doit y aller ! Allez, viens !Je pris une profonde respiration et poussai la porte.Nous étions à l'intérieur.

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    Le grand hall s'étendait devant nous. Mon cœur bat-tait si fort que ma poitrine me faisait mal. Mesgenoux tremblaient. Je n'avais jamais eu aussi peurde ma vie !Le hall était gigantesque. Le plafond, d'un blancétincelant, paraissait à des kilomètres au-dessus denos têtes.Je ne voyais a ucun bure au de réception. Pas de table ,ni de cha ise : i l n 'y avait aucun meuble .

    - Il y a que lqu'un ?Lucy s 'accrochai t à mon bras . El le é ta i t auss ieffrayée que moi et lançait de fréquents coups d'œilderrière elle.Je fis un autre pas : personne en vue.Soudain, un rayon de lumière dorée jaillit d'un des

    murs et s'arrêta sur moi. Je ressentis de très légèrespiqûres, du genre de celle s que l' on ressent lo rs qu 'ona un pi e d ou un bras e ndormi . La lumière me bala ya

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    de la tête aux pieds, puis elle disparut aussi rapide-ment qu'elle était venue.Je murmura i à L u c y :- Q u ' e s t - c e que c 'é ta i t ?- Quoi donc ?- Tu n'a s ri en vu ?- Je n'ai rien vu du tout ! Arrête ! Est-ce que tu veuxme faire peur ? De toute façon, on s 'e n va ! Ce tendroit est vraiment lugubre, il me donne la chair depoule.Je tournai les yeux vers les ascenseurs.«Es t-ce que j ' a ur a i le cran d'e n prendre un ? Es t-ceque je suis assez courageux pour poursuivre cetteexplora tion ? »- A l l e z ! i n s i s t a L u c y . Vi e n s . C ' e s t j us t e u nimmeuble de bureaux.- A lo r s où sont les employés ?- L e s bureaux sont peut-être fermés, aujou rd'hui ?- Un jeudi ? Non ! Je suis sûr que tout est complète-ment vide et que personne n'y travaille jamais.Je fis quelques pas vers les ascense urs. M e s basketsfaisaient un drôle de bruit sur le sol en marbre.Lucy commençait à se fâcher.- Oh ! Je sais ce que tu penses. Tu crois toujours quec'est le quartier général de ton mutant à la noix.J 'avalai diffici lement ma salive. Mes genoux conti-nuaient à trembler. Je ne parvenais pas à retrouvermon calme.- E t comment tu expliques le r idea u d ' invis ibi l i té ,alors ? C 'éta it bie n dans ma B D , no n ?

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    - Je n'explique rien du tout : j'ai peur. Je veux partird ' ic i !- Et moi, je veux connaître la vérité. Pour cela, il n'ya qu'un moyen...J'essayais de paraître brave, mais ma voix me trahis-sait. Lucy suivit mon regard toujours fixé sur lesascenseurs.- A h ! N o n ! Pas ça !Elle recula en me tirant par la main.- M a i s on monte jus te un pe u et on jette un petit coupd'œil dans les étages.- P a s question ! J 'a i . . . j ' a i trop peur !- Écoute, puisqu'on est là, autant découvrir de quoiil s 'agit . Tu ne veux tout de même pas rentrer che z to isans avoi r la réponse à cette énigme ?— Fais ce que tu veux, moi, je rentre à la maison !Lucy se tourna vers la porte d'entrée. Au-dehors,

    j 'a pe rçus mon autobus ble u e t blanc à l'a rrêt. Encourant, je pouvais encore l 'attraper. Je pouvaisretourner chez moi, sain et sauf. Mais, une fois à lama is on , que se pass erai t-il ? Je me sentirais honteux,une véritable mauviette, et je continuerais à medema nder sans cesse si ou i ou non , j ' a va i s découvertle repa ire secret de la plus grande cana ille qui puis seexister. Si je prenais le bus, tout cela resterait unmystère qui f ini ra it par me rendre fou !- O K , L uc y, s i tu ve ux, tu rentres chez toi ! M a i s m o i ,

    je monte !Elle me regarda pensivement puis, roulant des yeuxeffrayés, elle murmura :

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    - Bon... je viens avec toi !J'étais drôlement content. Je préférais, de loin, nepas y aller seul.- Si je t 'a ccompagne , c'e st uniquement parce que

    j ' a i de la peine pour toi ! continua-t-e lle .- De la pe ine ? Pourquoi ça ?- Parce que si tu penses qu'une BD peut entrer dansla vie réelle, c'est triste, très triste !- Ah, oui ? Et le rideau d'invisibilité ? Tu l 'oublies ?C'é ta it pourtant ré e l, non ?L u c y ne répondit pas ma is se mi t à rire . S on rire cla iret léger se répe rcutait dans le grand ha ll vide . Je sen-tis mes forces revenir et me mis à rire à mon tour.- Et puis, tu parles d'une histoire ! ajoutai-je. On vaprendre un asce nseur, c 'e s t tout ! Ce n'es t pascomme si le Mutant Masqué le prenait avec nous !On va juste admirer des bureaux sans intérêt, et puisbye-bye.Je pressai le bouton d'appel. Immédiatement, laporte de l'as cense ur s 'ouvr it. J'avançai un pe u la têtepour examiner l ' intérieur recouvert de bois. Rienn'était affiché dans la cabine, pas une indication. Jeréalisai soudain que je n'avais vu aucune inscriptiondans le ha ll non plus . Au cu n no m de société ou pan-neau de renseignements pour les visiteurs.«Étra nge ... ! »- On y va !Comme Lucy restait en arrière, je la pris par le braset la tirai à l ' intérieur. La porte coulissante sereferma aussitôt derrière nous. Je me tournai vers la

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    rangée de boutons et appuyai sur celui qui indiquaitl 'étage le plus élevé. L'ascenseur commença à bour-donner, puis il se mit en marche.Je me retournai vers Lucy qui, le dos collé contre lemur du fond, gardait ses mains dans les poches deson jean.- On bouge ! murmurai-je.L 'a sce ns eur prit de la vitesse et, aussitôt, le même cr isortit de nos gorges :- Oh ! On descend !J'avais pourtant bien appuyé sur le bouton d'en haut,mai s impos sible de se tromper : l 'appa rei l s 'enfon-çait de plus en plus profondément.Et de plus en plus vite.Où nous emmenai t-il ? Al la it - il jama is s'arrêter ?

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    Enfin, au bout d'une course qui nous parut inter-minable, l 'ascenseur s ' immobilisa. Violemment.Déséquilibré, je bousculai Lucy et lui demandai :- Ç a va ?- O u i , ou i, ça va ! M a i s pourquoi la porte ne s'ouvre -t-elle pas ? dema nda-t-e lle d'une vo ix tremblante.Impuissants, nous la fixions puis, sous le coup d'uneimpulsion, je criai :- Porte ! Ouvre - toi !La porte ne bougea pas.- Nous sommes pris au piège ! murmura Lucy d'unevoix si faible que je l'entendis à peine.- Attends un peu ! C'est long, mais elle va bien finirpar s'ouvrir !J'essayai de me montrer courageux. Les secondess'écoulèrent, oppressantes. Il n'y avait pas un bruit àl'extérieur de la cabine. Un silence de mort nousentourait.- L'ascenseur a dû se casser et nous sommes piégés

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    i c i pour toujours ! se m it à geindre L ucy . L ' a i rcommence déjà à me manquer !- M a i s non, ne panique pas ! Respire douceme nt : il ya de l 'air en pagaille, ici !Tout en parlant, je remarquai que, près des boutonsindiquant les étages, il y avait un bouton sans lemoindre chiffre. Je le pressai... et la porte s'ouvritautomatiquement !- T u voi s ! criai-je triomphalement. Il suffisait deréflé chir !- O u i , ma is où somme s-nous ?Je me glissai à l 'extérieur de la cabine. Il faisait trèssombre. I l me sembla néanmoins dist inguer degrandes machines disséminées çà et là.- On ne peut être qu'au sous-sol.Peu à peu, mes yeux s'habituèrent à l 'obscurité. Jepus mieux voir ce qui nous entourait.Entre toutes ces énormes machines circulaient un tasde tuyaux qui aboutissaient à une sorte de gigan-tesque chaudière.- A l l e z , Ji m ! I l faut remonter ! m'ordonna L ucy .Je me recula i à l ' inté rie ur de l 'as cens eur et pous sa i lebouton indiquant « H A L L ».L 'as cens eur ne bougea pas.J' a ppuya i à nouve au plus ieurs fois de suite : toujoursrien !Ma gorge se serra. Je n'avais aucune envie dem'éterniser ici.Je tapai frénétiquement sur tous les boutons, etmême sur celui marqué «URGENCE».

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    Échec total !- S o r t o n s d' ic i et changeons d'ascenseur ! proposaLucy.«Bonne idée», pensai-je.Il y avait toute une rangée d'ascenseurs en haut, dansle ha ll. Il n'y avait qu 'à sortir de ce lui- là et en appe lerun autre qui descendrait nous chercher.Tenant L u c y par le bras , je m'e ngouffra i dans le co u-loir sombre. Aussitôt, la porte de notre ascenseur sereferma derrière nous ! Comme s'il avait attendu quenous l'ayons quitté tous les deux.De nouveau, mes yeux s'habituèrent à l'obscurité. Jevis que Lucy fixait le mur.- O ù sont les autres ? lâcha - t -e l le d 'u ne vo i xplaintive.

    Effe ctive me nt, sur les côtés, le mur était lisse et vide .L'unique ascenseur existant était celui que nousavions pris.- Ils ne doivent pas descendre jusqu'ici ! grognai-jetout en tâtant le mur afin de trouver le bouton néces-saire au rappel.

    M o n cœur ma nqua un battement : pas le moindrebouton ! Ni à droite, ni à gauche ! Rien !- Cette fois, on est cuits ! m'écriai-je, affolé. Il n'y aaucun moyen de sortir d'ici !

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    - I l y a peut-être d'autres ascenseurs le long d 'u nautre mur ?-Peut-être, répondis-je, sans trop y croire.Soudain, un bruit sourd nous fit sursauter.- Du calme, Lucy ! Ce n'est que la chaudière qui semet en marche.Elle agrippa mon bras.- A l l e z ! On cherche un moyen de sortir de là !J'avançai dans l'obscurité, sentant sa main sur monépaule. Une autre machine se mit en marche avec un

    drôle de bruit.- Il y a que lqu'un ? cria i- je en mettant mes ma ins enporte-voix.Silence.- I l n'y a personne ic i ? Pe rsonne ne m'entend ?La seule réponse à mes appels était le bruit de la

    chaudière.- Il doit y avoir un escalier qui permet de remonter,murmura Lucy derrière moi.

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    Je fis rapidement demi-tour et appelai :- L u c y ! L u c y ! Où es -tu ? A u c u n e réponse e t aucune trace d 'e l le dans lecouloir.— Lucy, si c'est une plaisanterie, elle est idiote !Mais toujours rien. Je revins sur mes pas en cher-chant dans toutes les pièces que j'avais visitées et enl'appelant de plus en plus fort.- L u c y ! L u c y !Comment avait-elle pu se perdre? Je sentais lapanique me gagner. J'avais du mal à respirer.Com me nt avait-e lle pu disparaître aus si vite ?Je dépassai la salle de la chaudière et poursuivis lecouloir qui s'incurvait pour aboutir à une énormepièce brillamment illuminée. Des flots de lumière sedéversaient du plafond et éclairaient une gigantesquemachine. Celle-ci était très longue avec un panneaucouvert de boutons, de cadrans et de manettes. À sonextrémité se trouvait une énorme roue blanche,

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    ou plutôt un cylindre que je reconnus comme étantun rouleau de papie r blanc ! Ca r j ' a va i s devant mo i.. .une presse !Intrigué, je m'approchai. Le sol était couvert defeuilles tachées d'encre, froissées ou déchirées.Je continuai à appeler Lucy, mais en vain.Je me faufi la i vers une longue table devant laque lle ily avait une chaise et m'y assis pour mieux réfléchir àla situation.Où éta it L u c y ? C om me nt avait-elle pu disparaîtrea ins i ? All a it - e l l e s uivre le même c ou loi r et merejoindre ? Et pourquoi n' y ava it-il personne dans cetimme uble ? Était-ce i ci que l 'on impr ima it les BD ?Des quest ions , toujours des quest ions! J 'avaisl'impression que ma tête allait éclater.Machinalement, je fis un tour sur mon siège etm'immobilisai , le souffle coupé.Le Muta nt Masqué s e tenait dans un co in de la pièce,à quelques mètres devant moi !

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    Je manquai de dégringoler de ma chaise mais, trèsvite, je retrouvai mon calme.Il ne s'agissait, en fait, que d'un grand dessin en cou-leurs représentant le Mutant Masqué, affiché sur unmur. Je m'approchai et l'examinai attentivement. Ilavait été peint sur un carton très épais, ce qui lu i don-nait du relief. Sa longue cape s'enroulait autour delui et, à travers son masque, ses yeux de démon sem-blaient vouloir me foudroyer.

    À sa gauche, une table croulait sous un tas depapiers. Je plongeai la main dans ce fouillis et entirai des croquis faits au crayon. Plusieurs représen-taient le Mutant Masqué dans différentes attitudes.Certains le montraient alors qu'il se transformait enanimal sauvage, d'autres en horrible créature extra-terrestre.Mon cœur fit un bond dans ma poitrine. Ce devaitêtre ici que les bandes dessinées étaient réalisées.

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    J'étais tellement excité que j'en avais presque oubliéLucy. A i n s i , cet immeuble était l 'endroit où l 'on créait maBD préférée !Je me calmai et réfléchis, soulagé. Il n'y avait doncaucune raison d'avoir peur. Je n'étais pas dans lerepaire de la plus grande canaille de la planète.J'étais simplement dans le sous-sol de l ' imprimerie.C'était là que les dessinateurs et les scénaristes tra-vai llaie nt et c'était là qu 'o n imprima it leurs histoires. A lo r s , pourquoi s 'e ffrayer ?Je continuai à fouiller et trouvai dans un tiroir desmaquettes de BD que j'avais achetées récemment.Puis, dans un autre, je dénichai des croquis que je neconnaissais pas. Tiroir après tiroir, je découvrais cestrésors inattendus et m'amusais comme un fou,lorsque, soudain, mes trouvailles ne me firent plusrire du tout. Je venais d'ouvrir une chemise et d'ensortir les illustrations qu'elle contenait.Je les sais is e t mes ma ins commencèrent à trembler :— Ma is .. . ce n'est pas poss ible ! cria i-je , stupéfait.Je venais de reconnaître le garçon qui était dessinésur ces feuilles.C'était moi.

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    Je passai en revue tout le tas de dessins en essayantde me convaincre :« A ll on s , tu es en train de t ' imagine r des choses, mo nvieux ! Ce garçon te res semble , c'es t vra i, ma is cen'est pas toi. »Cependant, j 'étais sûr du contraire. Le garçon avait,comme moi, le visage bien rond, des cheveuxsombres coupés court sur le côté et un peu plus longsau-dessus. Il était petit et avait un sourire de travers,comme le mien. Il portait également mes vêtements :un jean bien ample et un T-shirt à manches longuesavec des poches.De plus, il avait, comme moi, la dent de devantabîmée.C'é ta it impos s ible ! Q u i avait donc pu me des sinera ins i ? Et comme nt pouva it- il me conna ître auss i

    bi en ?Un frisson froid descendit le long de mon dos, moncœur battait très fort.

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    Sur l'un des dessins, je courais, effrayé, les bras au-dessus de ma tête, comme pour me protéger.Un autre croquis représentait seulement mon visage.On pouva it y lire une expres s ion de colère. Non . Pasde simple colère. J 'avais l 'air furieux.Sur un autre, je faisais des mouvements de gymnas-tique. Pas mal, d'ailleurs, le dessin ! On m'avait faitdes mus cle s de super-héros ! De formida ble s biceps !Un autre, enfin, me représentait les yeux fermés.Est-ce que je dormais ou bien est-ce que j 'étais...mort ?J'étudiais attentivement tous ces croquis lorsque,tout à coup, j 'e nte ndi s un bruit de pas . Je m' im mob i -lisai. Je n'étais plus seul.Doucement, je me retournai.

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    - Où étais-tu ?Lucy se précipitait vers moi et m'interrogeait aveccolère.- J e t 'a i cherché partout, espèce d'i diot !- Et to i ? Où est-ce que tu étais ? Je croyais que tu mesuivais ! me défe ndis -je , soulagé ma lgré tout de larevoir.- Exa ct ! Tu étais toujours devant moi et puis tu astourné et je ne t'ai plus vu. Comment as-tu pu melai ss er toute seule dans un endroit pa re il ?- M a i s c'e st toi qui m 'a s laissé !- B o n ! coupa -t-elle. De toute faç on, on sort d ' i c i .J'ai trouvé des ascenseurs et ils ont l 'air de marcher.- Attends , tu dois d' abo rd regarder ça !Je lu i tendis le tas de croquis . E ll e les reposa d'un a irexcédé.- Tu rigoles ! Je t'ai dit que je voulais sortir. Je n'enai rien à faire de tous ces dess ins. A lo r s , tu vie ns ?- M a i s ce sont des dessins de mo i ! Regarde !

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    - B e n voyons ! Comme si que lqu 'un avait intérêt à teprendre comme modèle. Tu as vraiment trop d'ima-gination, Jim. Pourtant, tu avais l 'air d'être normal,ma is en fait, tu es complèteme nt ma boul ! Tchao ! Jem'en vais !- Mais non ! Attends !Je remis les dessins à leur place et la suivis . M o i nonplus, je n'avais guère envie de rester seul ici ! Après avoir longé plus ieurs couloirs , nous arrivâmesdevant une rangée d'as cens eurs . L u c y appuya sur unbouton et la porte de l 'un d'e ux s'ouvri t, le plus natu-rellement du monde.Je je ta i un coup d'oeil à l 'int é rie ur : il était vide . Nouspouvions y aller.L u c y pressa le bouton marque « O » et l 'as censeur semit en marche. Lorsque la porte s'ouvrit, nous pous-sâmes ensemble un cri de joie. Nous étions de retourdans le hall principal avec ses murs rouge et jaune.Quel soulagement ! Vite, la sortie !Une fois dehors, nous nous éloignâmes du bâtimentsans perdre une seconde. Déjà, la sensation de dan-ger commençai t à s 'es tomper. Lucy m'annonçaqu'elle devait vite rentrer chez elle, car sa mère ris-quait de s'inquiéter. Je lui demandai tout de mêmeavant qu'elle ne me quitte :- M a i s tu me crois au moins , pour les dess ins ?- Qui pourrait croire une bêtise pareille ? se moqua-t-elle e n haussant les épaules. L e Z oz o Mas qué ?Elle me fit un petit signe amical de la main et courutvers sa ma is on.

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    Mon bus s'approchait, mais, avant d'y monter, jeme retournai encore une dernière fois pour meconvaincre de l ' impos s ible : l ' imme ub le était tou-

    jours invis ible !J'aurais préféré avoir du temps pour réfléchir à toutcela, malheureusement Wilson m'attendait devantchez moi. Il m'accompagna dans ma chambre.- J e t 'ai apporté quelques tampons, dit- il tout endéversant un sac de ces trucs sur mon lit.- W i l s o n , je t 'e n prie , ce n'est pas le moment ! Ilm'est arrivé une histoire incroyable aujourd'hui. Jevoudrais bien pouvoir y penser tout seul.W i ls on fronça les sourcils :- A h bon ? Qu'e st-ce que c 'est ?- C 'e s t un peu long à raconter. En résumé, je suis

    entré dans un immeuble et je crois que c'est là queles BD du Mutant Masqué sont imprimées.- Sans blague ? Et ils t'ont laissé v is iter ?- O u i , puisque curieuseme nt, il n' y avait personne.Et de plus, l ' imm eub le était invis ible , enfin sa uf pourmoi, et c'est là que j'ai trouvé des croquis qui me

    représentaient.- E h ! Attends ! Q u'es t-ce que tu m'inventes là ? Jen'y comprends rien !Je me rendis compte que je m'y prenais mal. L'his-toire, telle que je la racontais, n'avait aucun sens. Jepromis à W i l s on de lui téléphoner plus tard et de tout

    lui expliquer. Je le raccompagnai jusqu'à la porte.C'est alors que j 'aperçus, parmi le courrier, uneenveloppe marron sur la petite table.

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    Gé nia l ! C'é ta it la trois ième édi tio n spéciale duMutant Masqué ! Je saisis l 'enveloppe et me précipi-tai dans ma chambre. Je voulais être tout à fait tran-quille pour l 'examiner. Les yeux brillants d'excita-tion, je défis le paquet. Sur la couverture, le visagecoléreux du Mutant Masqué était dessiné en grosplan. Ses yeux fixaient méchamment le lecteur. Letitre s'étalait en dessous de sa tête :L E N O U V E L E N N E M I D U M U T A N T M AS QU ÉQ uoi ? U n nouve l enne mi ? Je res pirai profondément.« Ce n'est qu'une B D , voyons ! Du ca lme ! »Je tournai la première page fébrilement.L'immeuble était dessiné d'abord vu d'en haut, puisdu niveau de la rue, et dans l 'ombre de celui-ci, onvoyait quelqu'un s'approcher des portes.Je tournai la page.- Oh ! Non ! C'est impossible !

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    Hé, oui ! B ien sûr, vous avez deviné : ce lui qui tentaitd'entrer dans le repaire du Mutant Masqué, c'étaitmoi !Je fixai la page si fort que les yeux m'en sortaient dela tête. J'étais si troublé que je n'arrivais pas à lire letexte. Cette fois , j' ét ai s D A N S la BD !Je me faufilais à travers l'entrée, avec le même jeanet le même T-shirt que je portais encore maintenant.Le dessin suivant montrait mon visage de plus près.Des gouttes de sueur dégoulinaient sur mes joues,

    sans doute pour montrer que j'avais peur. Quandmême, ils m'avaient dessiné un peu trop gros !Je passai à la page suivante, si excité que je faillisl'arracher en la tournant. La séquence était diffé-rente. Elle représentait l'Homme Éclair, prisonnierdans une chambre toute en métal.

    Le Mutant Masqué l'avait capturé et voulait le brûler,la chambre étant en fait un gigantesque four. La tem-pérature montait, il faisait de plus en plus chaud.

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    Bien tô t , l 'Homme Éc la i r dev iendra i t l 'HommeCarbonisé !Puis la page suivante reprenait mon entrée dans lebâtiment.Pas de doute, c'était bien moi ! MOI !Je refermai la BD et m'élançai hors de ma chambre.- M a m a n ! Pa pa ! Vous devez voi r ça !Je déboulai dans la cuisine où mes parents étaient entrain de préparer le dîner. Papa hachait des oignonsprès de l'évier, ses yeux pleins de larmes. Maman, àquatre pattes, pestait contre le four qu'elle n'arrivaitpas à allumer.- Je suis dans la BD ! Je suis dans la BD ! répétai-je,pris d'une véritable frénésie.- Pas maintenant ! me répondire nt-ils ense mble .- Si ! Vous devez vo ir ça ! ins is ta i-je e n mettant larevue devant le visage de mon père.- En lève -m oi ça ! Tu ne voi s pas que je suis occupé ?grogna-t-il en s'essuyant les yeux.Je me tournai vers ma mère.- M a m a n ! Il F A U T que tu regardes ! Je t'e n prie ! Jesuis dedans, c'est vraiment MOI !Comme elle ne réagissait pas elle non plus, je perdistout contrôle et hurlai :- Es t-ce que vous a lle z regarder, à la fin ?Maman lança un coup d'oeil sur la page que je bran-dissais devant elle.- O u i , c 'est vra i, ça te resse mble un peu. B o n , laiss e-moi maintenant, je dois m'occuper de ce four.Dépité, je retournai vers mon père, mais il était

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    occupé à s'e ssuyer les yeux avec une serviette. Ma n i -festement, il ne pouvait rien voir du tout. D'ailleurs,il ne me répondit même pas.J'étais exaspéré.Je n'avais jamais vécu quelque chose d'aussi extra-ordinaire dans ma vie, et eux ne voulaient même paschanger leur petite routine pour partager ce momentavec moi !Furieux, je me précipitai sur le divan du salon pourfinir ma lecture.L'Homme Éclair était toujours en aussi mauvaiseposture, tandis que le Mutant Masqué, qui surveillaitla scène grâce à ses écrans vidéo, criait victoire.Je lus en vitesse les bulles au-dessus de la tête dupauvre héros.« Seul, le garçon peut me sauver maintenant ! Maisoù es t- il ? »Je relus plus ieurs fois le texte. Était-ce pos sible ?Étais- je vra ime nt ce lu i qui pouvait le sauver ?Fa lla it - il que je retourne là-bas?

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    Le lendemain, je me dépêchai de prendre le bus. Ilfaisait très froid. Tout semblait de glace : le sol et leciel. Je me demandai si je rencontrerais à nouveauLucy. J'avais hâte de lui raconter ce que j 'avaisdécouvert dans ma BD de la veille, et de lui dire que

    je c o m p t a i s b i e n r e tou rn e r da ns ce t é t ra ngeimmeuble.Vie ndra it- e lle avec mo i ?Sans doute pas. Elle avait eu trop peur la premièrefois, et ne voudrait certainement pas recommencer.Lucy n'était pas dans le bus. J'effectuai le trajetperdu dans mes pensées. La BD n'avait pas mentipour le rideau d'invisibilité, pourquoi mentirait-ellepour le reste ?Je descendis du bus à l 'arrêt que je connaissais bienmaintenant. Le terrain semblait toujours aussi vide,mais je savais qu'il n'en était rien. J'étais sûr quel'immeuble rouge et noir s'élevait là, à l 'abri de tousles regards.

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    Ma bouche s'asséchait, la peur commençait à faireson effet. J'essayai de me calmer. Je pris mon cou-rage à deux ma ins et avançai. U n pas , puis un autre...Soudain, l ' immeuble m'apparut, impressionnant depar le mystère qui l'entourait... Je poussai la ported'entrée et pénétrai dans le hall rouge et jaune.L'endroit était toujours aussi désert. Je toussai unpeu bruyamment, mais personne ne se manifesta. Jem'avanç ai a lors vers l 'as cense ur sans rencontrer âmequi vive. Où pouvaient-ils tous être ? C'était pourtantle milieu de l 'après-midi. Comment était-il possibleque cet immeuble soit toujours vide ? J'hésitai avantd'appuyer sur le bouton d'appel. Je regrettai de plusen plus de ne pas avoir Lucy près de moi. Au moins,on aurai t été de ux à a voir peur !« B o n ! J ' y vais ! »Je tendis le doigt en avant lorsque, soudain, un rireterrifiant éclata dans le hall : un rire froid et mauvais.Juste à mes côtés.

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    Je fis un tour sur moi-même, mais ne vis personne.Pourtant, le rire persistait, doucereux et cruel.— Qui est là ? criai-je d'une vo ix aussi ferme quepossible.Le rire s'arrêta net.Je continuai à chercher l'endroit d'où il pouvait pro-venir, lorsque mes yeux se posèrent sur un haut-parleur. C'était de là que le rire avait dû jaillir.Je l'examinai quelques secondes, pendant qu'unepetite voix intérieure me soufflait :«Va-t'en d'ici ! Cours et quitte cet immeuble. Il estencore temps... »Je l'ignorai et appelai l'ascenseur. La porte coulis-sante s 'ouvrit sur-le-champ, j 'entrai et elle sereferma aussitôt.Je détaillai le panneau de commandes. Devais-jepousser le bouton du haut ou celui du bas ? La der-nière fois, il s'était produit le contraire de l'effetdésiré. Ne fallait-il pas, maintenant, choisir le sous-

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    sol pour me retrouver au sommet de l'immeuble ?Je n'eus pas le temps de me décider : l 'as censeur semit en marche tout seul !Vers le haut !Lenteme nt, il entama sa montée . Jus qu'où ? Et quil 'avait appelé ? L 'hom m e au rire s inis tre?

    La course n'en finissait pas. Je commençais à trouverle temps long. Au-dessus du panneau, les numérosdes étages défilaient régulièrement.40, 41, 42...L 'a pp a re il ne s'arrêta qu 'a u 46. Sans doute l 'étage leplus élevé.La porte s'ouvrit, et je me dépêchai de sortir.Devant moi, un couloir s'étirait sur une dizaine demètres. Chose curieuse, les murs, le plafond, le sol,les portes : tout était gris . C e la donnai t la désagréableimpression de se trouver dans un vieux film en noiret blanc. Et comme d'habitude, pas âme qui vive auxalentours.J'aurais tellement voulu entendre des voix, des riresou même des bruits de machines, mais il n'y avaitqu'un lourd silence, et les battements de mon cœur.Je m'engageai dans le couloir puis, après un tour-nant, dans un autre qui semblait sans fin.Une é t range impress ion s ' empara de moi : uneimpression de «déjà vu». Oui, je reconnaissais cecouloir, il était dessiné dans mon dernier numéro duMutant Masqué ! Da ns l 'his toire , il menait directe-ment au quartier général du bandit. Seule différence

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    notable : l'absence totale de couleurs, alors que mabande dessinée en regorgeait.Une pensée bizarre me vint. Tout ce que j'avaisdevant les yeux, si gris, si délavé, ressemblait à uncroquis fait au crayon, et qui n'aurait pas encore étécolorié. Mais cela n'avait pas de sens !Tout à coup, j 'entendis un bruit : Bump ! Bump !Le cœur dans les talons, je m'arrêtai.B u m p ! B um p !C e la semblait venir de loi n, devant moi . Je me forç aià avancer. Arrivé à l 'extrémité du couloir, je tournai.Là : surprise ! L e s murs de ce couloi r étaient d 'u nvert brillant, et le plafond bien jaune. Mes basketss 'enfonçaient dans une épaisse moquette rougefoncé qui menait à une porte métallique fermée parun énorme verrou.B u m p ! B u m p !Les bruits venaient de derrière cette porte.- Il y a quelqu'un ? appelai-je d'une voix que la peurrendait presque inaudible.Seul le mystérieux bruit me répondait.B u m p ! B u m p !Je repris courage et, avec plus d 'a plom b, insi sta i :- I l y a que lqu 'un là-dedans ?Sou da in , les bruits sourds s 'arrêtèrent. Et je sentismes cheveux se dresser sur ma tête lorsqu'une voixappe la :- E s t - c e que vous pouvez m'aide r ?Je restai pé tri fié , ma is la vo ix répéta :- Ho ! Pouvez-vou s m 'a ide r à sortir de là ?

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    Je ne savais plus quoi faire. Devai s- je essayer de dé li-vrer cet homme ? Q u i é tai t-il ? Que fai sai t-il i ci ?Tant pis, je me décidai. Je saisis le verrou des deuxmains et le tirai. À ma grande surprise, il glissa trèsfacilement.Je poussai la porte et, une fois entré, je ne pusm'e mpêche r de crie r, s tupéfa it :- Vous ? Vous ? Vous êtes réel ?

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    Sa cape s'enroulait autour de lui et son masque avaitglissé sur l 'un de ses yeux. Mais comment ne pasreconnaître l 'H omme Éclai r ? Je bre douilla i :- Vous êtes vra iment vivant ?- Na turelle ment ! me ré pondi t-i l avec impa tience . A l l e z , détache-moi, mon garçon ! Vi te !Je réa lisa i alors que ses bras et ses jambes étaient liésà une cha is e . L e « B u m p ! B um p ! » que j ' a va i sentendu, c 'étai t cette chaise qu' i l balançait enessayant de s'échapper.- Je ne peux pas croire que vous êtes ici, devant moi !bafouillai-je, planté comme un piquet.- Je te donne ra i un autographe plus tard. Dépêche-toi, il ne nous reste que peu de temps !- Du temps ?- M a i s oui , il va revenir. Il faut que j'e s s a ie de l'a voi r

    avant qu'il ne nous attrape.- Nous ?- Écoute , déta che-moi en vites se . Il me faut contac-

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    ter mes amis de la Ligue des Vengeurs. Ils doiventme rechercher à travers toute la galaxie.Toujours aussi stupéfait, j 'entrepris de le libérer deses liens. J'avais beaucoup de mal car les nœudsétaient très serrés.- P l u s vi te , mo n garçon ! M a i s dis -m oi, commentas- tu découvert le secret de ce qua rtie r géné ral ?- J e . . . je . . . l 'ai juste découvert .- A l l e z , ne fais pas le modes te ! Tu as dû te se rvir detes pouvoi rs de radar cybernétique , he in ? Ou alors tuas compris par transmission de pensée que j 'avaisdes ennuis et qu ' i l falla it me sauver ?— N o n , j ' a i juste pris l 'autobus.. .Je ne savais pas quoi lui répondre. Peut-être me prena it-i l pour que lqu 'un d'autre ?Mais pourquoi étais-je ici ? Qu'est-ce qui allait nousarrive r ? Et à m oi pa rticu lière me nt ?Enfin, l'un des nœuds se défit. Le reste vint facilement.- Merci , mon garçon !L'Homme Éclair sauta sur ses pieds, ajusta sonmasque et déploya sa cape.- OK. Allez, viens, on va lui faire une drôle de sur-pris e à ce scélérat ! di t- il en se dirigeant vers la porte .Je restais prudemment derrière la chaise.- H e u . . . Vous voulez que je vous accompagne ?- Ah ! Je comprends, fit-il avec un sourire. Tu crainsde ne pouvoir me suivre à cause de mes jambesdynamo. Tu sais que je suis l 'être le plus rapide dumonde !-Heu . . . Ben . . .

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    - Ne t 'en fais pas, j ' irai lentement. Allez ! bouge-toi,on y va !Résigné, je sautai par-dessus le tas de cordes et lesuivis. Mais, au bout d'un instant, sa silhouettedevint floue et il disparut complètement. Quelquessecondes plus tard, il était revenu vers moi.- Oh ! Excuse-moi ! Je suis allé trop vite !J'acquiesçai. Il posa alors sa lourde main gantée surmon épaule, ses yeux me fixant à travers son masque .- As-tu des pouvoirs pour grimper le long des murs ?- Non, je regrette.- B o n ! A lo r s nous prendrons l 'e sca lie r !Il saisit mon bras et se précipita en avant. Mes

    jambes semblaient flotter dans les airs . L e s mursdéfilèrent à toute allure, les couleurs s'embrouil-lèrent. Ça devait être impossible d'aller plus vite !J'avais l ' impression de voler. Je n'arrivais plus àrespirer. Après plusieurs tournants, l 'H om m e Écla ir s 'arrêtasur le se uil d'un es calie r si sombre que j ' a va is du ma là distinguer ju s qu 'o ù il montait.— Stop ! Il y a un rayon désintégrant, là ! déclara-t-ilen pointant un doigt devant lui.- Un quoi ?- U n rayon désintégrant ! Si tu passes par là, il te pu l-vérise en un quart de seconde.J ' a v a l a i p é n i b l e m e n t m a s a l i v e . M o n c o r p srecommença à trembler.- Penses-tu pouvoir sauter par-dessus les deux pre-mières ma rches ? me dema nda -t-i l.

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    -Vous voulez dire que.. .- O u i , tu dois sauter directement sur la trois ième.Prends bien ton élan !« Ça, j'ai drôlement intérêt ! » pensai-je en regrettantamèrement toutes ces céréales et ces gâteaux que

    j 'a va is l 'habitude de manger. Sûr que ça aurait étéplus facile avec quelques kilos en moins !- Allez, vas-y ! Et fais bien attention, c'est un rayonqui ne pardonne pas !«Tu parles d'un encouragement ! »Je voula is bie n être brave, mai s mon corps ne répon-dait pas. J'étais tout mou, on aurait dit de la gelée.L'Homme Éclair me poussa doucement de côté.- Attends ! Je vais passer en premier. Tu vas voir.Il prit son élan, sauta par-dessus le rayon maudit etatterrit aisément sur la cinquième marche !- Tu vois, c'est facile !- Facile, facile ! murmurai-je. Tout le monde n'a pasdes jambes dynamo ! Et je ne suis pas un athlète,moi !Je ne me faisais pas d'illusions. À l'école, chaquefois qu'on cherchait des partenaires pour n'importequel sport, on me choisissait toujours en dernier. Cen'était pas pour rien !Cette troisième marche me paraissait être à deskilomètres.Tant pis, il fallait se décider. Je pris mon élan, melançai. . . et atterris lourdement sur la deuxièmemarche !

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    Je hurlai en fermant les yeux. Je m'attendais à partiren miettes, mais je ne sentis rien. J'ouvris les yeux :

    j 'é ta is toujours sur la deuxième marche et toujoursen une seule pièce.

    - Il ne devait pas être branché , dit l 'H om m e Écla ircalmement. Tu as de la chance mon garçon ! Conti-nuons ! Allons au-devant de notre destinée !M o i , je n'e n pouvais plus. L a sueur me dégoulinait lelong du visage. Je n'avais aucune envie de le suivredans cet esca lie r si sombre , ma is que fai re d'autre ?

    Arr ivé en haut, il poussa une lourde porte en boismassif et me fit entrer dans une pièce extraordinaire.C'é tai t le burea u le plus luxue ux que j 'a i e jama is vu .La moquette aux longs poils était si épaisse que jem'y enfonçai presque jusqu 'aux chevi l les . Desrideaux de soie bleue pendaient devant d'immenses

    fenêtres par lesquelles on avait une vue superbe surtoute la ville. Un lustre de cristal étincelait de tousses feux. Des chaises et des fauteuils recouverts de

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    velours étaient rangés autour de tables en bois pré-c ieux. Un mur é ta i t parsemé d 'une mul t i tuded'écrans vidéo, tandis que les autres s'ornaient demagnifiques tableaux. Un petit bureau plaqué oroccupa it le centre de la pièce , et la grande cha ise der-rière lui ressemblait à un trône.- O h ! là ! là !Je ne pouvais retenir mon admiration.- O u i , il ne se refuse rien, ce bandit ! M a i s son tempsest compté à présent ! comme nta l 'H om m e Éclair.- M a i s comment.. . ?- Eh bien, je vais courir de plus en plus vite autour delu i, ju s qu 'à provoquer un cyclone qu i le balaye ra. L apremière fois, il n'a pu me capturer que parce qu'ilm'avait assommé par-derrière. Mais je ne me laisse-rai plus surprendre !Tout à coup, le même rire effrayant que j'avais déjàentendu éclata près de nous.Je vis le petit bureau com me nce r à bouger, à change rd'appa rence . S on éclat doré sembla s'élever, tourbil-lonner et une silhouette humaine prit forme à saplace.Le Mutant Masqué se tenait là, debout devant nous.Ses yeux coléreux paraissaient vouloir nous trans-percer. Il était plus grand que dans ma bande dessi-née et avait l'air encore plus puissant, plus effrayant.Il s 'adressa en premier à l 'Homme Éclair.- Com me nt oses -tu entrer dans mon bure au privé ?L'Homme Éclair ne semblait pas impressionné.- Tu peux dire au revoir à toutes ces splendeurs !

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    - J e vais plutôt TE dire A D I E U , grinça le MutantMasqué, mais auparavant, regarde comment je vaisdétruire ce garçon !Lentement, il se tourna vers moi.

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    L'Homme Éclair tournait, tournait, et un vent puis-sant se mit à souffler dans la pièce. Les rideauxcommencèrent à s'envoler. Un vase se brisa. Lestableaux se décrochaient des murs.M'a grippa nt à un lourd fauteuil, j 'e xul ta is :- Oui, oui, vas-y ! Ça marche !Ma jo ie fut de courte durée.Le Mutant Mas qué leva une jam be . U n croche-pi ed !Il faisait un croche-pied ! Et l 'Homme Éclair tombalourde me nt, face contre terre ! Il tre ss a illit une oudeux fois, puis resta immobile, assommé par sonincroyable vitesse.Le vent se ca lma . L e s rideaux reprirent leur place . LeMutant Masqué, mains à la ceinture, dominait lesuper-héros tombé de toute sa stature.— Et maintenant, c'e s t l 'heure de dîner ! ricana -t- il.Toujours accroché au fauteuil, je vis avec terreur leMutant Masqué se t ransformer à nouveau. Sonvisage sembla flotter. Son corps rapetissa et i ls'avança, posant ses mains sur le sol. Il avait prisl'apparence d 'u n léopard ! Et ce léopa rd, avec unrugiss ement fé roce, s'apprêtait à m'a ttaque r !-R é ve i l le z-v ous , H om me Éclair ! Révei llez-vous !m ' époumona i- j e.Ce lu i - c i , à mon g rand sou l agemen t , s emb la i treprendre connaissance. Il secouait sa tête commepour mieux se réveiller, lorsque l 'horrible animalbondit sur lu i et, d'un coup de griffes , lu i arra cha sonmasque. L'Homme Éclair, dans un dernier effort,se dégagea du léopard et se rua vers la porte,

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    le visage rayé de quatre balafres.- J e ne p eux plus rie n faire pour l' instant ! mecria-t-il. Maintenant, tu dois te défendre seul, mongarçon !- N o n ! Attende z ! cria i-je à mon tour.Mais l 'Homme Éclair n'entendait plus rien. Il avaitdisparu et la porte claqua derrière lui.Ra pide me nt, le lé opard change a d'appa rence : leMutant Masqué apparut à nouveau.- Oui, c'est vrai, maintenant tu es seul..., me dit-ilavec un sourire froid et plein de cruauté.

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    Le Mutant Masqué s'avançait lentement vers moi...Impossible de lui échapper. Je n'étais pas assezrapide pour m'esquiver par la porte comme l'avaitfait l 'Homme Éclair.

    L 'Homme Éclair. . .Ce n'était pas l 'Homme Éclair qu'il aurait dû s'appe-ler, ma is le Trou illa rd Écla ir ! Co mm e nt ava it-il pume planter là et ne pense r qu'à sauver sa pea u ? Ilsavait bien que je ne pouvais ni m'enfuir ni mebattre. Que pouva is -je faire ?

    Le Mutant Masqué, debout au milieu de la pièce, jouissa it de ma frayeur. Il était s i sûr de sa victoire !- Quels sont tes pouvoirs ? me demanda-t-il dans unricanement.La question me surprit.- Quels sont tes pouvoirs ? répéta-t-il impatiemment.

    Tu peux te rétrécir à volonté ? Ou bien tu te changesen flamm es ? À moins que tu ne sois ma gné tique ?— Je n'a i aucun pouvoi r, murmura i-je dépité. Au cun .

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    Le Mutant Masqué se mit à rire.- O h ! Tu ne veux rien me dire ? À ta guise !Son sourire disparut, son regard devint sombre etcruel.- J e voulais simplement te faciliter les choses. Tedétruire de la façon la plus simple.Pendant qu ' i l me parlait, j' obse rvai s sur une étagère,à mes côtés, une sorte de grosse pierre lisse, décora-tive sans doute. Je me demandais si elle ne ferait pasune arme acceptable.- Alors c'est là qu'on se dit adios , menaça le Mutanten s'avançant vers moi.D'un geste vif, je saisis alors la grosse pierre. Elleétait très lourde. Je la lançai de toutes mes forces à latête du Mutant... et le manquai !- B e l essai ! s'exc lama-t -i l moqueur.Je me plaquai contre le mur. Plus rien ne pouvait mesauver !

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    - Comm ent oses-tu veni r i ci ?Il m'a ba is sa un tout petit pe u et je pus voir qui setenait sur le seuil de la porte. À mon tour, je poussaiun cri de surprise :- L u c y ? M a i s qu'est-ce que tu fais là ?

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    Le Mutant Masqué me reposa sur le sol et se tournavers Lucy, tout en m'agrippant par le collet.Mes jambes tremblaient, elles pouvaient à peine mesoutenir. M ais je trouvai la force de la prévenir :— Lucy , va- t'en ! Va -t 'en vite !Malgré tout, elle s'avança dans la pièce. Elle meregardait, ignorant complètement le Mutant Masqué.Ne savait-elle pas qu ' i l était le plus grand cr iminel detout l' univers ?- Jim ! Tu ne m'as pas entendue ? J'étais dans la rue

    en face et je t'ai appelé lorsque je t'ai vu entrer dansl'immeuble !— Je t'en prie, va-t'en ! la suppliai-je. Tu es en dan-ger !Mais manifestement, elle ne réalisait pas ce qui sepassait.

    - Lucy ! implorai-je tout en essayant de me libérer.D'un geste brutal, le Mutant Masqué m'envoya rou-ler dans un coin de la pièce.

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    - Je devra i donc vous dé truire tous les deux ! di t- ilcalmement.Lucy sursauta. On aurait dit qu'elle ne venait de leremarquer qu'à ce moment. Mais elle n'eut pas l 'aireffrayée pour autant.- Jim et moi, nous allons partir tout de suite ! ricana-t-elle.La pauvre ! Elle ne se rendait pas compte à qui elleparlait. Elle ne réalisait pas dans quel pétrin nousnous trouvions.Le Mutant Masqué ricana à son tour.- J e regrette, personne ne s ortira d 'i c i ! Personne !Pa r qui va is-je comme nce r ? À ce moment, je vi s L u c y qui tirait de son cartableun revolver en plastique jaune. Je soupirai :- Mais Lucy, ce n'est qu'un jouet !- J e sais, ma is on est dans une B D , n 'est-ce pa s ?Rien n'est réel, alors on peut imaginer n'importequoi !Et de son revolver, elle visa le Mutant Masqué.C e lu i - ci éclata de rire :- Pa uvre idiote , qu'e s t-ce que tu pense s faire avecça ?- Ça ? Ça a s eulement l' a i r d'être un joue t. En réa-li té , c'es t un dés intégrateur de molécules . Si vous nepartez pas, je vous réduis en bouillie !- B i e n trouvé ! apprécia le Mutant. M a i s inuti le !C'est donc toi qui y passeras la première.Lucy, les mâchoires serrées, continuait à le mettre en

    joue et s 'apprêtait à tirer.

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    Le Mutant Masqué tendit la main vers elle.- Pose donc ce jouet minable ! Il ne peut t'aider !- Je ne plaisante pas ! C'est un véritable désintégra-teur !Le mutant continuait à avancer, toujours souriant. Unpas, puis un autre...Lucy visa alors la poitrine du bandit et appuya surla gâchette. On entendit juste un ridicule petit« Pschitt ! », puis plus rien.Et le Mutant Masqué avançait toujours.

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    Lucy baissa son revolver. La situation m'apparutdans toute son horreur. Le Mutant s'approchait deplus en plus.Soudain, une lumière aveuglante entoura son corps.Un violent courant électrique le parcourut des piedsà la tête, lui extirpant de longs gémissements de dou-leur : ses molécules commençaient à se désintégrer !Sa tête s'évapora jusqu'à disparaître complètement.Le masque vide tomba sur les épaules du costume,puis tout le corps sembla fondre. Il ne restait plus surle tapis qu 'u n tas de chi ffons fripés !- L u c y ! m'é trangla i- je . Ça a marché ! To n joue t amarché !- Mais naturellement ! me répondit-elle calmement.Elle avança jusqu'au costume et le piétina de toutesses forces.- Je l'avais pourtant prévenu que c'étai t un véritabledésintégrateur, mais cet idiot n'a pas voulu me croire.Mon cerveau était en ébullition. Je n'arrivais pas à

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    Tout d'abord, je me mis à rire ; je pensais que Lucyplaisantait.- Tu as vraiment un drôle de sens de l'humour, toi !Mais mon rire s'arrêta net. Lucy continuait a viserma poitrine et son visage était on ne peut plussérieux. Je balbutiai :- M a i s L uc y, qu'est-ce qui s e passe ?- Je ne suis pas L u c y ! Je suis navrée , ma is je doi st 'apprendre qu 'i l n'y a aucune L u c y i ci !Comme elle disait ces mots, son corps commença àchanger. Ses cheveux roux rentrèrent dans sa tête.Son visage s'agrandit et ses yeux verts devinrentnoirs. Sa silhouette s'allongea. Des muscles puis-sants apparurent sur ses bras fins. Ses habits chan-geaient également. Son pull et son jean commen-cèrent à ressembler à un costume qui m'étai tfa mi lie r : le costume du Mutant Masqué !— M a i s , Luc y, comment tu fais ça ?- Tu ne comprends décidément pas très vite, dit-elle

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    d'une voix caverneuse, une voix d'homme.Elle fit tourbillonner sa cape tandis que le pistolet sefondait dans sa main pour se transformer en bague.- Je suis le Mutant Masqué ! J'ai changé mes molé-cules pour ressembler à ton amie, mais je suis leMutant Masqué !- Mais... mais... mais tu viens de le désintégrer ! Onl'a vu tous les deux !- Faux ! Je me suis débarrassé de l'H omme Caméléon !- L ' H o m m e Caméléon ?- O u i , il trava illait pour m oi . Je lui avais donné unpeu de mes pouvoirs, et lui ordonnais parfois derevêtir mon apparence afin de tromper mes ennemis.- Il trava illa it pour vous et vous l'a ve z dé truit ?- Il commençait à devenir gourmand et trop gênant.U n jo ur ou l'autre , il aura it tenté de prendre maplace . Et puis , il m'a rrive de faire d'horrib le s choses,tu sais bien.... comme celle que je vais te faire àprésent...Je reculai tout en le suppliant :— M a i s pourquoi ? La is s e z- mo i rentrer chez mo i ! Jevous jure que je ne dirai jamais rien à personne. Jevous le jure !- R e n t r e r chez toi ? C'e s t absolument imposs ible ! A d i e u , J i m !- N o n ! Vous ne pouve z pas fa ire ça ! Vous êtes justeun personnage de BD et moi je suis réel, je suisV I V A N T !- N o n , Ji m , tu n 'es plus réel . Tu e s comme m oi , unpersonnage de BD !

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    heureusement, j 'ai le regret de te dire que tu n'yapparaîtras plus, ni dans aucune autre d'ailleurs.- Atte nde z ! Atte nde z ! cria i-je en réfléchissant àtoute vitesse.- Je ne pe ux plus a ttendre. J ' a i dé jà pe rdu trop detemps avec toi, Jim.- Mais je ne suis pas Jim ! m'exclamai-je. Jim Mat-teurs n'existe pas !- Ah ! Bon ? Qui es-tu alors ?- Je suis le Colosse Élastique !

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    Le Mutant Masqué me dévisagea, perplexe.— Le Co los s e Élastique ? Tiens donc ! A i n s i , c 'étaitcela, ton secret !Je prenais de l 'aplomb.- O u i , et je retourne sur la planète Xa rg os . Je ne suispas autorisé à pa rticiper à une autre B D , répliqua i- je .- B e l ess ai ! M a i s tu as envahi mo n repaire et je doiste faire taire à jamais ! À ces mots , je me mis à rire :- J 'a i une m eille ure idée : je va is vous entourer demes bras élastiques et serrer, serrer, jusqu'à l 'étouf-fement final.- C ' e s t tout ? répondit le Mutan t Masqué d 'u n airméprisant. Fa ib le , faib le. Que dirais -tu plutôt si je tedéchirais en petits morceaux jusqu'à en faire des

    confe ttis ?- Imposs ible ! Je suis en caoutchouc ! Je plie ma is neromps pas ! M o n se ul point fa ible est la fumé e qui

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    peut m'a sphyxie r et me détruire ! Oh ! Je n'aura is pasdû dire ça ! Ça m'a échappé !Je fis semblant de vouloir me sauver. Mais, du coinde l' œ il , je voyais le Muta nt Masqué qu i se dépêchaitde se changer en une nappe de brouillard épais pourplaner vers moi.

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    Je ne perdis pas de temps. Je courus à la fenêtre etl'ouvris d'une main, tandis que de l'autre je saisis leventilateur qui se trouvait à côté. Je le branchai à lapuissance maximum et le dirigeai vers le Mutant quifonçait sur moi.- N o o o o n ! l'entendis-je hurler tandis le souffle del'appareil le disloquait et l'entraînait vers l'extérieur.- Oui, oui ! criai-je joyeusement.Jamais je ne m'étais senti aussi heureux, aussi fort,aussi triomphant. Le ventilateur finissait de disperserle reste de la fumée et de l'envoyer au-dehors où unvent violent l'éparpilla aux quatre coins de la ville.J'avais vaincu le Mutant Masqué !Moi, un garçon de douze ans, j'avais détruit la pirecanail le de la planète. D'après les lectures que j 'avaisfaites, je savais que le Mutant pouvait changer sesmolécules en n'importe quoi de solide et revenirensuite à son état habi tuel. M a is moi , je l'avais fait sechanger en gaz. Et pour récupérer toutes ses molé-

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    cule s ma intenant, il a lla it avoir un sacré boulot !Jamais il n'arriverait à se reformer.« J im , tu es vra iment génia l ! » me dis -je en sautant eten dansant de joie.C'était incroyable que cette fripouille ait pu croireque j ' é ta is le Co los s e Élastique ! J 'ava is tout inventéde A à Z. Et maintenant, j ' é ta i s libre . L ibr e e t viva nt !J'avais tellement hâte de revenir à la maison que letrajet en bus me sembla durer des heures. Enfin,

    j ' a r r i va i . En entrant, j 'ape rçus aussitôt l 'enve loppebrune sur la petite table du couloir : la nouvelle édi-t ion du Mutant Masqué. Mais je m'en fichais pasma l ! J'éta is si heureux d'être de retour ! Je proposa imême à Coline de faire une partie de Frisbee. Ellen'en revenait pas. Jamais auparavant, je ne jouaisavec elle ! M a i s , aujou rd'hu i, je voulais seulementêtre heureux et célébrer le fait d'être en vie. Au boutd'une demi-heure de jeu, je proposai :- Et s i on mangeait que lque chose ?- O h , oui ! Je meurs de fa im ! M a m a n a laissé uncake au chocolat sur l'étagère.J 'entrai dans la cuisine et pris le cake. Puis, j 'allaichercher un couteau.- Ne te coupe pas un morceau plus gros que le mien,hein ! me prévint Coline, surveillant mes gestes.- M a i s n on , n'a ie pas peur !J'étais de s i bonne hume ur que même s a rema rque nem'énerva pas.- Ç a a l ' a i r d rôl emen t b o n ! m ' e xc l am a i - j e encommençant à entamer le cake.

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    Le couteau glissa malencontreusement sur mondoigt.- Ouille !Je levai la main et examinai ma blessure.Mais... Qu'est-ce qui apparaissait à l 'endroit de lacoupure ?Ce n'était pas du sang !Le liquide était noir comme la nuit.C 'é ta i t de l ' E N C R E !- E h ! Douce me nt ! protesta Co lin e lorsque je labousculai en criant :- Où est le dernie r numé ro du Mutant Masqué ?J'ava is soudain l 'impre s s ion que ma carrière dans lesbandes dessinées était loin d'être terminée !

    FIN

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