16325790 La Prevention Des Risques Professionnels Du Document Unique Au Plan Dactions

Embed Size (px)

Citation preview

  • Agir sur...

    La prventiondes risques professionnels

    La prvention des risques professionnelsDu Document Unique au plan dactionsBien sr, il y a le Document Unique ; bien sr, il y a lesobligations lgales ; bien sr, lentreprise peut faire appel de nombreux organismes, institutions, partenaires et conseilsMais concrtement, comment mieux prserver la santphysique et mentale des salaris alors que les maladiesprofessionnelles TMS, pathologies lies au stress, cancers ont vu leur nombre multipli par 5 en dix ans ? Commentmettre en uvre une dmarche dvaluation et de prventiondes risques pour concilier la sant avec la performancede lentreprise ?Les auteurs affichent un parti pris fort : mettre le travailau cur de la prvention est un gage de russite. Analyserle travail permet, en effet, de dpasser le simple constatdu risque pour valuer qui peut tre expos, comment, o,combien de temps Les auteurs sont aussi convaincus dela ncessit de croiser les expertises mdicales, technique etorganisationnelle, et de sengager pour une prvention durable.Passant des ides laction, les auteurs sappuient sur les5 phases de la dmarche de prvention valide par le Ministredu Travail et les acteurs de la prvention. Ils proposentdes outils et des mthodes pour faciliter la rdactiondu Document Unique et mettre en uvre des plans dactionsde prvention.Ambitieux mais pragmatique, ce guide sappuie surune exprience prouve par le Rseau ANACT-ARACTdans de nombreuses entreprises dont il dvoile les actionset les rsultats

    Pascale Mercieca et Catherine Pinatel rfusus tergebatur, nonlinteis, sed palliis ex lana mollissima factis. Tres interimiatraliptae in conspectu eius Falernum potabant, et cumplurimum rixantes effunderent, Trimalchio hoc suum prop

    Prix : ?? euros TTCISBN : 978-2-913488-xx-xx

    Du Document Unique au plan dactions

    Pascale MerciecaCatherine Pinatelen collaboration avec

    Jack Bernon et Serge Deltor

    rse

    au

    EDITIONS

    rse

    au

    EDITIONS

    Agi

    r su

    r...

    La

    pr

    vent

    ion

    des

    risq

    ues

    prof

    essi

    onne

    ls/D

    u D

    ocum

    ent

    Uni

    que

    au p

    lan

    dac

    tion

    s

    Agir sur...

    Agir sur... une collection dirige par lANACT et lAPRAT.

  • Organiser le travail... Comment faire ? Prvenir les maladies professionnelles...Par o commencer ? Dvelopper le dialogue social et la participation...Comment sy prendre ? Dvelopper les comptences, faire voluerles organisations... Avec quelles dmarches ?

    L'ambition des ouvrages de cette collection agir sur... est, en peu de mots,de donner leurs lecteurs les moyens de se poser eux-mmes les bonnesquestions face un projet de changement ayant des consquencessur les conditions de travail.

    Sur des thmes d'actualit : la sant au travail (troubles musculo-squelettiques,stress, risques psychosociaux, etc.), les comptences, la conduite du changementorganisationnel ou technologique, la gestion des ges ils proposent de balayeren six ou sept questions les tapes du comment faire... : tablir un diagnostic,valuer les marges de manuvre, explorer les scnarios alternatifs,choisir une solution.

    Cette collection bnficie de l'exprience approfondie de praticiens nourriede trs nombreuses interventions en entreprise. Elle est co-dirige par l'ANACT*,tablissement public charg de diffuser des amliorations innovantesdes conditions de travail et par l'APRAT*, association de cabinets conseilspartageant lobjectif d'un changement s'appuyant sur les hommes pouramliorer la performance de lentreprise.

    Destins donner des cls d'entre ceux qui abordent un projetde changement du travail dans lentreprise, ces guides permettront tousde se sensibiliser un domaine - le travail et l'emploi - en plein bouleversement.

    * voir en p. 3 de couverture la prsentation de ces organismes

    Agir sur...Des guides pour laction au plus prs du terrain

    L'ANACT

    tablissement public national install Lyon, I'Agence nationale pour l'amliorationdes conditions de travail, relve du ministre charg du Travail. Cre par une loi de1973, elle est gre par un Conseil d'administration tripartite (organisations patronaleset syndicales, tat, personnalits qualifies).

    Sa mission est d'exprimenter et de promouvoir des mthodes amliorantles conditions de travail des salaris et lefficacit des organisations.

    Avec 25 associations ou antennes rgionales, structures autonomes quelle cofinanceavec ltat et les Rgions, lANACT forme un Rseau comprenant environ 200 salariset dimportants moyens dinformation quelle met au service dun programme organisen priorits.

    Accueil :4, Quai des Etroits 69321 Lyon CEDEX 05Tlphone : 04 72 56 13 13 - Tlcopie : 04 78 37 96 90Site : www.anact.fr

    L'APRAT

    Cre en 1989 par une dizaine de cabinets de consultants franais, I'APRAT unitune vingtaine dquipes de professionnels de tailles diffrentes et de spcialitscomplmentaires, constitues en rseau pour dvelopper leur capacit grerdes projets de changement en entreprise partir d'une conviction commune :le changement doit s'effectuer pour et avec les hommes.

    Partageant l'ide que l'organisation du travail est une variable d'action essentiellepour l'entreprise et que la concertation et la ngociation sociale contribuent la russite durable dun projet de changement, les consultants de l'APRATs'engagent en matire de dontologie de lintervention ; ils dveloppent en commundes investissements mthodologiques ; ils cooprent dans des interventionso ils associent des expertises complmentaires ; ils s'efforcent de promouvoirles ides qu'ils partagent.

    Secrtariat :75, avenue Parmentier 75011 ParisTlphone : 01 45 28 31 53 - Site : www.aprat.com

    rse

    au

    Agir sur...Une collection dirige par l'ANACT et lAPRAT

  • Agir sur...

    La prventiondes risquesprofessionnels

    Du Document Unique au plan dactions

    Pascale Merciecaet Catherine PinatelEn collaboration avec

    Jack Bernon etSerge Deltor

  • La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes

    des alinas 2 et 3 de l'article 41, d'une part,

    que les copies ou reproductions strictement

    rserves l'usage priv du copiste et non destines

    une utilisation collective , et, d'autre part, que les

    analyses et les courtes citations dans un but d'exemple

    d'illustrations, toute reprsentation ou reproduction

    intgrale, ou partielle, faite sans le consentement

    de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause,

    est illicite (alina 1er de l'article 40).

    Cette reprsentation ou reproduction par quelque

    procd que ce soit constituerait donc une

    contrefaon sanctionne par les articles 425

    et suivants du Code pnal.

    Par ailleurs, le code de la proprit intellectuelle

    du 1er juillet 1992 interdit expressment la photocopie

    usage collectif sans autorisation des ayants droit.

    Or, cette pratique sest gnralise notamment dans

    les tablissements denseignement, provoquant une

    baisse brutale des achats de livres, au point que la

    possibilit mme pour les auteurs de crer des uvres

    nouvelles et de les faire diter correctement est

    aujourdhui menace.

    ISBN : 978-2-913488-58-8

    ANACT, 2009

    Si vous souhaitez tre tenu au courant de nos publications, envoyez simplement votre carte de visite :

    ANACTPle marketing et service clients4, quai des Etroits69321 Lyon cedex 05

    Vous pouvez par ailleurs consulter le cataloguede nos publications sur notre site anact.fr

    Dj parus dans la mme collection

    Agir sur...

    1 Lintgration dans lentreprise : travailler en coopration sous la dir. dOdile Maurice-Desbat, 2008, 208 p.

    1 La professionnalisation : acqurir et transmettredes comptences sous la dir. de Patrick Conjard et Bernard Devin, 2007, 160 p.

    1 La gestion des ges : pouvoir vieillir en travaillant sous la dir. de Marion Gilles et Florence Loisil, 2e dition,revue et augmente, 2006, 234 p.

    1 Les dmarches comptence sous la dir. dAntoine Masson et Michel Parlier, oct. 2004, 176 p.

    1 Les situations de handicap : le maintien dans lemploi sous la dir. dEvelyne Escriva, oct. 2004, 112 p.

    1 La charge de travail : de lvaluation la ngociationcoord. Par Thierry Rousseau et Bernard Poete, nov. 2003, 84 p.

    1 Les e-projets sous la dir. de Romain Chevallet et Odile Rocher, nov. 2003, 120 p.

    1 La polyvalence et le contenu du travailsous la dir. de Michel Anger et Sylvie Cukierman, dc. 2001, 84 p.

    1 Les difficults de recrutement et lattractivit des entreprisessous la dir. de Ren Sage, nov. 2001, 72 p.

    1 La relation client : pour une meilleure performancede lentreprisesous la dir. de Caroline David, juin 2001, 104 p.

    1 Lexposition aux risques professionnels : intgrer organisation du travail et prventionsous la dir. de Michel Berthet et Anne-Marie Gautier, juin 2000, 72 p.

    1 Lorganisation du temps de travailsous la dir. de Michel Ppin, 3e dition, fv. 2000, 98 p.

    1 Les maladies professionnelles : lexemple des troublesmusculosquelettiques (TMS)sous la dir. de Pierre Franchi, mars 1997, 64 p.

  • remerciementsCet ouvrage a t rdig par des chargs de mission et des res-ponsables dquipe du Rseau ANACT. Le Rseau accompagne denombreuses entreprises dans leur dmarche dvaluation et deprvention des risques professionnels, dans diffrents secteursdactivit, individuellement ou dans le cadre dactions collectives.

    Le groupe de rdacteurs principaux tait compos de CatherinePinatel, charge de mission de lARACT Languedoc-Roussillon,Pascale Mercieca, charge de mission, dpartement Sant et Travailde lANACT, en collaboration avec Jack Bernon, responsable dudpartement Sant et Travail de lANACT et Serge Deltor, directeurde lARACT Languedoc-Roussillon.

    Nous tenons remercier plus particulirement les contributeurs :1 Emmanuel Albert, charg de mission de lARACT Languedoc-

    Roussillon ; Ccile Boisson, charge de mission lARACT Centre ;Bertrand Canepa, charg de mission, dpartement Sant et Travailde lANACT ; Philippe Douillet, charg de mission, dpartementSant et Travail de lANACT ; Benot Grandjacques, charg de mis-sion, dpartement Sant et Travail de lANACT ; Gilles Heude, res-ponsable du dpartement Transfert et Communication delANACT ; Philippe Negroni, directeur de lARACT Corse ; MichelWeill, ancien directeur adjoint de lANACT.

    1 Sylvie Setier, responsable des ditions, pour le conseil ditorial etla rcriture de louvrage, Christian Mahoukou pour la relecture etle suivi de fabrication, Christine Veinhard pour la bibliographie.

  • 4avant proposLe cycle de confrences sur les Conditions de travail, entam le4 octobre 2007 avec les partenaires sociaux linvitation duministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de laSolidarit, a rappel la priorit que reprsente dans notre payslamlioration des conditions de travail pour prserver la sant dessalaris. Lobjectif de progrs dans la prvention des principauxrisques professionnels a t unanimement rappel cette occa-sion.

    Cette proccupation est toutefois ancienne, depuis la loi du31 dcembre 1991 chaque entreprise a obligation de pratiquerlvaluation a priori des risques et depuis le dcret du 5 novembre2001, les rsultats de cette valuation doivent tre consigns dansun dossier appel Document Unique. Concevoir ce Document estune occasion de mettre plat lensemble des risques de lentre-prise, de cerner les populations au travail qui y sont confrontespar la dtermination des units de travail, de garder une trace delvolution des expositions des salaris Il doit aussi et surtouttre la base de llaboration dun plan dactions visant amliorerla sant des salaris.

    Lenjeu est vraiment de prendre appui sur cette obligation rgle-mentaire pour insrer la prvention des risques et au-del la pr-servation de la sant dans lensemble des projets de lentreprise. Eneffet, les dfis de demain sont bien de mettre en uvre desdmarches capables de prvenir autant les risques mergents :nanoparticules, risques psychosociaux que les risques effets dif-frs : troubles musculosquelettiques, exposition aux agents can-crognes, mutagnes et toxiques pour la reproduction ou encoreen intgrant lallongement prvu de la dure active, mettre enplace des actions visant combattre lusure professionnelle pr-mature.

    Face un enjeu aussi partag dans les entreprises, la nature desdmarches mises en place est tout fait dterminante. De nom-breuses innovations dans la conduite des diverses tapes des pro-

  • 5jets de prvention se dveloppent, elles ont comme point com-mun ltroite implication de tous les acteurs concerns par le par-tage du diagnostic et la mise en uvre de solutions pluridiscipli-naires.

    Elles favorisent une approche globale de la sant au travail, vitantainsi lcueil de dcouper le travail en tranches de risques et lesalari en tranches de pathologies.

  • 6Agir sur... (..) C Sommaire

    sommaire

    (1)Cpage 8Pourquoi faire voluerla prvention des risques ?

    1 Les maladies professionnelles : 5 fois plus en 10 ans

    1 Risques effets diffrs et nouveaux risques

    1 volutions rglementaire et sociale1 Mutations des entreprises

    et des conditions de travail1 Des populations au travail

    et des parcours dexposition1 Des entreprises en difficult face

    la prvention

    (2)Cpage 30Cinq grands principespour guider laction

    1 Choisir une dmarche globale pour valuer et prvenir

    1 Prendre en compte les conditionsdexposition aux risques

    1 Sappuyer sur une dmarcheparticipative

    1 Favoriser une conduite de projetpluridisciplinaire

    1 valuer avec les units de travail

  • Agir sur... (..) C Sommaire

    Cpage 106 Bibliographie

    Cpage 109 Sur le Web

    7

    (3)Cpage 46Les grandes tapes de la dmarche de prvention

    1 Prparer la dmarche1 valuer les risques et rdiger

    le Document Unique1 Construire le plan dactions

    de prvention1 Mettre en uvre le plan dactions

    de prvention1 Suivre le plan dactions et mettre

    jour le Document Unique

    (4)Cpage 90Pour aller plus loin

    1 Mobiliser les ressources externes1 Faire appel au Rseau ANACT

  • (1)CPourquoi faire voluerla prventiondes risques ?

    Alors que les progrs de la prvention des risquesprofessionnels sont patents du ct des accidents du travail moins 40 % en 20 ans , ses effets se font plusdifficilement sentir du ct des maladies professionnelles.Ces dernires sont en augmentation constante. La prventiondoit faire face aux maladies reconnues, mais aussi prendreen compte lmergence de risques lis lutilisation denouveaux produits et des risques induits par les nouvellesorganisations du travail. On pense aux risques psychosociauxdont les effets sont manifestes sur la sant des salaris, maisdont les causes ne sont pas toujours clairement identifiables.

    Les maladies professionnelles sont ainsi devenues laproccupation majeure de tous les acteurs de prventiondans un contexte o lvaluation a priori des risques estun principe directeur depuis 1991, avec, partir de 2001,lobligation pour toutes les entreprises de rdigerle Document Unique.

    8

  • Au-del de lobligation lgale de rdiger le Document Unique, lesentreprises cherchent rduire le nombre daccidents du travail etde maladies professionnelles, et ainsi damliorer la performanceglobale de lentreprise. En effet, chaque anne, les accidents dutravail, de trajet et les maladies professionnelles se traduisent parla perte de 42 millions de journes de travail (soit environ 115 000salaris absents ou arrts par jour). ce cot conomique directsajoutent des cots indirects, lis au temps de production perdu,aux dgts causs aux matriels et produits, laugmentation desprimes dassurance, aux frais de justice, aux difficults de rempla-cement, etc.

    Une tude ralise en 2005 par lANACT, a dmontr que les cotsindirects des troubles musculosquelettiques taient, selon lesentreprises, de 10 30 fois suprieurs celui des cots directs. Cescots indirects correspondent au remplacement du salari parlencadrement, au temps de recherche dun remplaant, au tempsde sa formation, ou encore celui ncessaire lappropriation dela qualit, du procd, etc.

    Enfin, les accidents comme les maladies professionnelles repr-sentent une preuve, un traumatisme tant pour la personneconcerne que pour le dirigeant, lencadrement, les membres duCHSCT et lensemble des salaris Tous sont touchs par un acci-dent du travail grave ou par le dcs dun collgue. La remobilisa-tion de chacun a aussi un cot.

    Les maladies professionnelles : 5 fois plus en 10 ans

    En France, le nombre de maladies professionnelles dclares etreconnues a quintupl entre 1998 (environ 8 000) et 2007 (43 832)1.Ce nombre traduit une meilleure reconnaissance juridique desdroits des salaris et une plus grande sensibilisation du corps mdi-cal quant aux origines ventuellement professionnelles de telle outelle pathologie, mais il ne permet pas une lecture directe de ltat

    9

    1 - On retrouvera lensemble des statistiques publies par la CNAMTS ou lINRS etla CCMSA sur leur site internet. Voir Sur le web en fin douvrage.

  • 10

    de sant des salaris. En effet, il ny a pas de corrlation directeentre le nombre de malades, le nombre de salaris et le nombre desmaladies. Les cas de figure sont varis : tel salari peut tre dclaren bonne sant tel moment et dvelopper telle pathologie jus-qu 40 ans plus tard (risque effets diffrs), tel autre peut souffrir la fois de surdit et de TMS (cumul de pathologies), etc.

    Parmi les affections les plus nombreuses, viennent en tte :1 les Troubles MusculoSquelettiques (TMS) ou affections pri-arti-

    culaires reprsentent prs des 70 % des maladies professionnellesreconnues et sont en augmentation rgulire ;

    1 les pathologies induites par lexposition lamiante : plus de10 % des maladies professionnelles ;

    1 les lombalgies et dorsalgies : un peu moins de 10 %, sachant queleur reconnaissance est rcente.

    ces chiffres en forte augmentation, sajoute le fait que la duremoyenne des arrts de travail lis une maladie professionnellereconnue ne cesse de crotre. De plus, entre 2000 et 2007, lenombre de jours darrt rapport au nombre de maladies recon-nues a doubl tant pour les salaris du rgime gnral que pourceux du rgime agricole (sources CNAMTS 2007 et CCMSA 2006).

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    405060708090

    100110120130140150160170180190

    2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

    Dure moyenne accidents du travail

    Dure moyenne arrts maladies professionnelles

    Dur

    e m

    oynn

    e

    volution en jour des dures moyennes darrt de travail

  • 11

    Risques effets diffrs et nouveaux risques

    La plupart des pathologies professionnelles reconnues est lie des risques effets diffrs. Par exemple, un cancer peut sedclencher aprs un temps de latence trs long, plusieurs dizainesdannes ; sa relation avec lactivit professionnelle est alors diffi-cile mettre en vidence. Du fait de cette difficult de corrla-tion, le nombre total de cancers reconnus dorigine profession-nelle2 ne reflte donc quune partie de la ralit. Cependant,les chiffres marquent une croissance rgulire depuis 1994, lieprincipalement des expositions lamiante et aux poussiresde bois.

    Certains risques sont connus et reconnus depuis longtemps, telsque les affections professionnelles dues au plomb (1919), la silice(1945), linhalation de poussires damiante (1950), au bruit (1963).Pour tant, les mesures de prvention ne sont pas forcment aurendez-vous. Ainsi, la dernire enqute SUMER 20033 montre, parexem ple, que le nombre dquipements de Protection Collective(EPC) utiliss pour rduire lexposition aux poussires de bois argress au cours de ces dix dernires annes. Ainsi, 36 % des sala-ris interrogs dclaraient en disposer en 1994, ils sont 35 % en2003.

    Du ct des quipements de Protection Individuelle (EPI), lvolu-tion est plus probante : 31 % des salaris sen dclarent quipscontre 18 % dix ans plus tt. Cette diffrence entre EPC et EPI sexplique en grande partie car les EPI ne ncessitent ni travaux, niinvestissements lourds et coteux.

    Dautres risques ont t reconnus plus rcemment. Il en est ainsides affections pri-articulaires (TMS) (tableau rvis en 1991), deslombalgies et dorsalgies dues aux manutentions de chargeslourdes (1999), ou encore des affections chroniques du rachis lom-baire provoques par des vibrations (1999).

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    2 - Voir les travaux de lInVS sur les cancers attribuables des facteurs professionnels.

    3 - Voir Sur le Web (page 109), le site de la DARES qui publie lensemble des rsul-tats de lenqute SUMER 2003.

  • 12

    Une forte mergence des risques psychosociaux

    Depuis la fin des annes 1980, on observe une forte mergence desrisques psychosociaux. Cette appellation recouvre les risques pro-fessionnels qui portent atteinte la sant mentale des salaris et,dans certains cas, leur intgrit physique : le stress, le harcle-ment moral, la violence au travail

    Conscients de lampleur du phnomne, les pouvoirs publics ontdcid de complter la lgislation du travail pour renforcer la pro-tection des salaris, dans le cadre de la loi de modernisationsociale (loi n 2002-73 du 17 janvier 2002) sur le harclementmoral. Au niveau europen, lAgence de Bilbao a retenu la pr-vention du stress sur le lieu de travail comme thme de sasemaine europenne pour la sant et scurit des salaris en 2002.Les partenaires sociaux europens ont, en octobre 2004, sign unaccord sur le stress. Les partenaires sociaux franais ont ngoci latransposition de cet accord en juillet 2008, allant mme au-delde ce que prvoyait laccord europen.

    Les risques psychosociaux sont considrer comme les autresrisques professionnels, ils doivent aussi faire lobjet dune valua-tion a priori, tre recenss dans le Document Unique. Pour cette

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    Danger et risque : une question de dfinition

    Le danger est caractris par un tat. Proprit intrinsque dunquipement (ex : presse, trononneuse, lectricit), ou dune substance(ex : chlore), dune mthode de travail (ex : travaux en hauteur, activitssous forte cadence), dune situation particulire (ex : sol glissant,carrefour mal signal), susceptible de provoquer une atteinte la santdes travailleurs.

    Le risque est caractris par une dynamique. Il est la oules consquences potentielles du danger sur la personne.

    Dans certaines situations, il peut y avoir risque sans danger au sens de larglementation. Par exemple, un rythme de travail trs soutenu nest pas,a priori, un danger, mais il peut porter atteinte la sant. Dans le cas desTMS, le manque dautonomie, la pression temporelle, labsence dentraidedans lquipe favorisent la survenue des troubles. Ces facteursappartiennent lorganisation du travail et obligent son analyse.

  • problmatique, plus sensible et moins codifie que dautres(risques lis llectricit, incendie), il est important que lesphases de diagnostic et dlaboration dactions de prventionsoient largement partages par les acteurs sociaux de lentreprise.

    Comme pour les TMS o le risque nest pas directement li undanger, lvaluation et la prvention des risques psychosociauxdoivent ncessairement passer par lanalyse des conditions dex-positions aux risques. Les facteurs de risques sont rechercher duct des tensions induites par lorganisation du travail, par leschangements, le fonctionnement des collectifs de travail, lesmarges de manuvre dont disposent les salaris.

    Conditions dexposition aux risques

    Substances chimiquesMachine-outil

    Amiante...

    Brlure

    lectrocution

    Coupure

    crasement...

    RISQUES SANS DANGERRISQUES LIS UN DANGER

    Combinaisons de facteurs lisau travail, par exemple :Dangers, par exemple :

    Cadence

    Mthodes de travail

    Relations de travail

    TMS

    Risques psychosociaux

    ....

    La relation entre risque, danger et conditions dexposition aux risques

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    13

  • 14

    Lidentification passe aussi par le reprage des dficits des rgula-tions prvues par lorganisation pour une bonne ralisation du tra-vail : temps dchanges, prise en compte des remarques des opra-teurs sur les conditions de ralisation de leur travail

    Une pluralit de risques

    Sur le terrain, les salaris sont exposs une pluralit de risques :des risques lis lenvironnement (amiante, bruit, temprature),au travail (couper du bois, saisie informatique), aux produits utili-ss (benzne, encre, huile), lorganisation du travail (rythmes,chance, travail isol, contrle), etc.

    Quelques rsultats de lenqute SUMER 2003 montrent bien cecumul de risques. Ainsi, plus de 30 % des salaris interrogs, quelleque soit leur catgorie socioprofessionnelle, sont exposs aumoins trois produits chimiques en simultan, alors quils taient23 % le signaler en 1994. En 2003, trois salaris sur 10 dclarenttre exposs au bruit, et ceux les plus exposs aux bruits nocifssont galement les plus exposs au port de charge, lutilisationdoutils vibrants, et aux ambiances thermiques.

    volutions rglementaire et sociale

    Limpulsion, dj ancienne, est venue de lUnion Europenne avecla directive de 1989 rendant obligatoire lvaluation a priori desrisques.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    Le Document Unique selon le code du travail

    Lemployeur transcrit et met jour, dans un Document Unique,les rsultats de lvaluation des risques pour la sant et la scuritdes travailleurs laquelle il procde en application de larticle L 4121-3.

    Cette valuation comporte un inventaire des risques identifisdans chaque unit de travail de lentreprise ou de ltablissement.

    La mise jour du Document Unique dvaluation des risques est ralise :1 au moins chaque anne ;

  • Transpose en droit franais grce la loi du 31 dcembre 1991, ladirective europenne a marqu de relles avances pour la scu-rit et la sant des salaris. Le lgislateur a, en effet, prcis lanotion de prvention des risques en dfinissant le primtre de lapopulation dont le chef dentreprise a la responsabilit : lem-ployeur doit assurer la scurit et protger la sant physique etmentale des travailleurs de ltablissement, y compris les tra-vailleurs temporaires . Il existe dornavant une obligation demoyens et de rsultats, obligation sur laquelle sappuient les tribu-naux en cas de contentieux.

    Lvaluation des risques : une obligation a priori

    Avec lobligation dune valuation a priori des risques faite toutesles entreprises depuis 1991, lidentification des risques ne doit plus secantonner aux risques avrs et qui ont occasionn des accidents dutravail ou des pathologies professionnelles reconnues. Les entreprisesdoivent aussi sattaquer la partie invisible, aux premiers signes dedysfonctionnement, dusure des quipements, aux plaintes des salaris.Cela impose de comprendre comment, dans leur activit quotidienneet ncessairement variable, les salaris sont exposs et sexposent des risques.

    La notion d a priori recouvre, dune part, les risques qui auront deseffets dltres quel que soit lindividu expos. Un niveau sonore de110 dB(A) induira des consquences sur laudition pour toute personneexpose, que ce bruit ait du sens ou pas pour le salari, quil soit jeune,ancien, expriment, novice, etc. Ce type de risque est intrinsquement

    1 lors de toute dcision damnagement important modifiantles conditions de sant et de scurit ou les conditions de travail,au sens de l'article L 4612-8 ;

    1 lorsquune information supplmentaire intressant lvaluationdun risque dans une unit de travail est recueillie.

    Lemployeur doit informer les travailleurs sur les risques pour leursant et leur scurit dune manire comprhensible pour chacun.Il doit aussi les former la scurit.

    Le Document Unique doit tre tenu la disposition des travailleurset des reprsentants du personnel (dcret dc. 2008).

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    15

  • 16

    Plusieurs pas importants franchis avec la loi de 1991

    1 Dsormais de la responsabilit de lemployeur, lobligation de pr-vention concerne tous les salaris, quel que soit leur statut.

    1 La notion de diffrences individuelles entre les salaris estreconnue.

    1 La seule application des textes rglementaires et normatifs ne suf-fit plus, lemployeur se doit dengager une dmarche dvaluationdes risques, qui lui permettra de dcider des mesures (et actions)de prvention les plus adaptes. Cette dmarche dvaluationdoit tre globale.

    1 La prvention doit tre planifie et intgre, dans un ensemblecohrent, la technique, lorganisation du travail, les conditions detravail, les relations sociales et linfluence des facteurs ambiants,notamment en ce qui concerne les risques lis au harclementmoral.

    1 Lorganisation du travail doit faire objet danalyse, pour choisir des quipements de travail et des mthodes de travail et de pro-duction, en vue notamment de limiter le travail monotone et letravail cadenc et de rduire les effets de ceux-ci sur la sant .

    li un danger (comme pour lamiante, les vibrations, le chlore...) lui-mme norm, rglement. Dautre part, cette notion renvoie lventualit dune atteinte la sant. Ds lors, lexpression des salarisest essentielle : elle permet didentifier des risques et de lescomprendre partir de symptmes comme par exemple des nausesapparues avec lusage dune nouvelle peinture, des picotements dansune main depuis laugmentation de la cadence...

    Bien que difficilement mesurables, ces risques sont objectivables.On peut, en effet, analyser les plaintes, les ressentis, les rcits desincidents par lanalyse de traces : suivi dans le temps, recherchedu nombre de salaris concerns, analyse des activits de travail...Cette dmarche est prcieuse notamment pour le mdecin du travail,qui peut, par exemple, contacter le fabricant de peinture pourconnatre la composition du produit, mais aussi pour le dirigeant et leresponsable de production qui cherchent des solutions.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 17

    La loi de 1991 affirme que lvaluation est ltape pralable auxactions de prvention, mais quelle nest pas une fin en soi.Lemployeur se doit de dresser le bilan des questions de sant etde scurit au travail pour lensemble des salaris, afin de dfinirun plan dactions de prvention, adapt aux besoins et ses projets.

    Pour beaucoup dentreprises, cette obligation rglementaire a tperue comme une contrainte exigeant du temps, ncessitant descomptences et des mthodes adaptes. Pourtant, cettedmarche dvaluation constitue une occasion unique de rflchirglobalement aux risques professionnels, den garder une trace etde mettre en place les actions de prvention idoines.

    Les 9 principes de prvention (loi de 1991)

    Le chef dtablissement prend les mesures ncessaires pour assurerla scurit et protger la sant physique et mentale des travailleursde ltablissement, y compris les travailleurs temporaires. Ces mesurescomprennent les actions de prvention des risques professionnels,dinformation et de formation ainsi que la mise en placedune organisation et de moyens adapts. Les mesures de prventionprises doivent respecter lordre suivant :

    1 viter les risques ;1 valuer les risques qui ne peuvent tre vits ;1 combattre les risques la source ;1 adapter le travail lhomme en particulier lors de la conception

    des postes de travail, du choix des quipements de travail, desmthodes de travail et de production afin de limiter le travailmonotone et cadenc au regard de leurs effets sur la sant ;

    1 tenir compte de ltat dvolution de la technique ;1 remplacer ce qui est dangereux par ce qui nest pas dangereux

    ou par ce qui est moins dangereux ;1 planifier la prvention en y intgrant, dans un ensemble cohrent,

    la technique, lorganisation du travail, les conditions de travail,les relations sociales et linfluence des facteurs ambiants ;

    1 prendre les mesures de protection collective en leur donnantla priorit sur les mesures de protection individuelle ;

    1 donner les instructions appropries aux travailleurs.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 18

    Face cette obligation, la fois contrainte et opportunit,toutes les entreprises ne sont pas dans la mme situation,notamment en raison de leur taille et des instances reprsenta-tives qui y sont attaches. Pour les plus petites, tout est souvent inventer dans ce domaine, et notamment les modalits de par-ticipation des salaris ou de leurs reprsentants. Dans les entre-prises de plus de 50 salaris dotes dun CHSCT, lhabitude dvo-quer les risques professionnels avec les salaris et leurs repr-sentants existe, fusse des degrs divers. Pour autant, laconduite dun projet de prvention reste souvent une notionnouvelle, comme le fait de considrer quil sagit dun investisse-ment. Pour des entreprises plus importantes, lenjeu sera pluttde renforcer leurs analyses et lvaluation de leur DocumentUnique dj ralis, voire de mettre en place un vritable projetde management de la prvention.

    Le rle des partenaires sociaux

    La prvention des risques professionnels est fortement influencepar les accords passs entre les partenaires sociaux. Ainsi, laccordsur la sant au travail sign le 18 dcembre 2000 entre diffrentesorganisations de partenaires sociaux souligne de nombreux pointsqui ont t traduits dans la lgislation et la rglementation. Danscet accord, les partenaires sociaux montrent, par exemple, lim-portance quils accordent une approche pluridisciplinaire delvaluation a priori des risques professionnels. Ils insistent gale-ment sur le rle fondamental que peuvent jouer les branches pro-fessionnelles dans llaboration du dispositif de prvention desrisques professionnels. Cet accord prvoit la mise en place desObservatoires Rgionaux en Sant Travail (ORST).

    Laccord de mars 2007 sur la prvention, la tarification et la rpa-ration des risques professionnels fixe entre autres de nouvellesorientations pour la prvention des risques, notamment au niveaudes branches professionnelles et de laction des partenairessociaux au sein des ORST. La premire confrence tripartite sur lesconditions de travail du 4 octobre 2007 renforce cette approchede la prvention via les branches professionnelles.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 19

    Mutations des entreprises et des conditions de travail

    Les risques effets diffrs et les nouveaux risques, en gnral, sinscrivent dans un contexte impact par les nombreuses mutations conomiques, technologiques et dmographiques et restructu-rations du monde du travail.

    Comprendre en quoi ces volutions ont des consquences sur lasant impose de reprer les plus dterminantes et, en mmetemps, davoir une approche dialectique car les nouvelles situa-tions de travail prsentent de nombreux aspects contradictoires.Parfois, une volution sera perue comme porteuse de progrs,dautres fois comme facteur de dgradation de la sant. Ce carac-tre, non dtermin a priori, donne aux diverses approches de laprvention une importance stratgique dans les entreprises. Onremarquera, enfin, quil ny a quasiment plus dexclusive de certainssecteurs ou mtiers, ni pour les formes dorganisation, ni pour lesrisques auxquels les salaris peuvent tre exposs.

    Nous reprenons ci-dessous quelques-unes des tendances quicaractrisent ces mutations et ont un impact important sur lecontenu et les conditions de travail.

    Varit de loffre et logique de service

    Lconomie de la varit et la recherche de qualit de service ontchang lorganisation et la gestion des entreprises. Il faut en per-manence sadapter aux demandes exigeantes et changeantes dunediversit de clients. Cette ncessaire adaptation entrane des inno-vations concernant les produits et les services, mais aussi des nou-velles formes dorganisation du travail et cest souvent la naturemme du travail et de ses conditions qui sont transformes. Cettecomptition par la varit saccompagne aussi dune comptitionsur les prix, de la volont doptimiser les moyens et dobjectifs deretour sur investissement court terme. Autant dlments qui nesont pas forcment compatibles avec des investissements sur laprvention des risques dont le retour sera souvent diffr.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 20

    Augmentation de contraintes productives et temporelles dans divers secteurs

    Lindustrie tait depuis longtemps coutumire de la rationalisationde la production, elle est maintenant confronte de nouvellescontraintes lies des formes de gestion limitant les espaces dergulation (flux tendus, juste--temps, rduction des stocks pri-maires et tampons). Mais lindustrie nest plus seule, la grande dis-tribution est confronte la rationalisation logistique et laug-mentation de divers facteurs contraignants comme la multiplica-tion des rfrences, la gestion des flux clients Les centres dappelvoient se dvelopper de nombreuses approches procdurales, desoutils de mesure de lefficacit du travail ; les salaris du secteurde la sant, avec ses enjeux de productivit et dconomies demoyens, sont eux aussi confronts au paradoxe de lconomieconcurrentielle et de la qualit daccueil et de soins.

    Dans tous les secteurs, dans les entreprises de toutes tailles, cesvolutions ont t permises par une pntration de linformatiqueet une nouvelle dimension de gestion de linformation.

    Exigences physiques et cumul des contraintes

    Une premire approche de lvolution des techniques pourraitlaisser penser que le travail sest dbarrass de ses contraintesanciennes telles que la pnibilit physique, les ports de chargelourde ou lexposition aux produits toxiques. Cest vrai dans denombreuses situations o la machine a remplac lhomme enlloignant des situations pnibles ou dangereuses. Ces contraintessont pourtant toujours prsentes ou se sont dplaces dansdautres secteurs (btiment, travaux publics, sant, distribution).Les facteurs de pnibilit lis aux horaires atypiques se rpandentdans divers mtiers, posent des questions dusure long terme etdharmonisation avec les rythmes sociaux.

    Plus que lanalyse des transformations du travail et de leur impactanalytique, le plus important est didentifier le cumul descontraintes lies lorganisation du travail : le travail en horairedcal, la prcarit du statut social, lisolement du salari dans sontravail qui, cumuls dans le temps, vont agir sur la pnibilit dutravail du salari.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 21

    Intensification du travail

    Lintensification est aujourdhui prsente dans de nombreux secteurs ; on peut la prsenter comme la ncessit de faire plusde choses en mme temps et souvent des choses diffrentesqui relvent dune forme de complexification du travail. Plusgnralement lintensification se prsente comme une accumu-lation nouvelle de contraintes de type industriel (rgles pro-ductives formelles, cadences, travail asservi au process) et decontraintes de type marchand (ractivit la commande, exigences du client, exigences du public, ractions lvne-ment).

    Lenqute Conditions de travail (Dares 2005) a montr que ce cou-plage de contrainte industrielle et marchande est facteur daug-mentation significative de la perception des pnibilits autantphysique que psychique.

    Cette intensification du travail est souvent associe une aug-mentation de la tension entre les membres de lentreprise (col-lgues, hirarchie, gestionnaires, commerciaux) et aussi avec lesusagers ou clients. Cette contrainte amplifie souvent le dilemmequantit/qualit en le rendant difficile arbitrer en temps rel parles salaris.

    La distinction entre charge de travail mentale et psychique ne peutplus tre simplement opre partir des mtiers ou secteurs dac-tivit. Les tudes sur les conditions de travail et la sant dmon-trent la gnralisation des risques psychosociaux et des TMS, etc.Ils sont bien sr lis des lments que nous avons dveloppsprcdemment, mais aussi des mutations en cours qui sollicitenttoujours plus les salaris dans des organisations o les matresmots sont autonomie et responsabilit.

    Lindividualisation du travail, des performances et de la GRH

    Les manires de travailler ensemble ont elles aussi fortementchang. La demande de responsabilisation et dengagement indivi-duel est toujours plus prsente, elle va de pair avec une plusgrande autonomie et llargissement du domaine de responsabilitpour lobtention des objectifs productifs. Ceci va dans le sens

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 22

    dune approche plus individualise du travail, mais aussi de sonvaluation par les managers.

    Dans le mme temps, la variabilit des quipes, la prcarisation decertains emplois, la peur du chmage, le recentrage dentreprisessur leur cur de mtier, mais aussi lindividualisation culturelleobserve dans la socit ont favoris laffaiblissement des collec-tifs de travail. Et, de fait, on peut en mesurer les consquenceslorsque les salaris, confronts de nouvelles exigences, ne trou-vent plus spontanment appui au sein de leur collectif de travail,ou voient leurs marges de manuvre fortement diminuer.

    Des populations au travail et des parcoursdexposition

    Les mutations des entreprises et du travail sont inscrites dans uncontexte dmographique jamais rencontr : la population au travailva vieillir rgulirement dans les prochaines annes. Lvolution descontraintes du travail est dores et dj vcue diffremment selonlge. Selon une enqute de la CFDT, alors que 27 % des salaris de20 24 ans trouvent que les volutions du travail ont t troprapides ces dernires annes, ils sont 52 % au-del de 50 ans. Il fau-dra galement faire face de nouveaux problmes lis la nces-saire prise en compte des conditions de compatibilit entre lesavantages et les inconvnients associs chaque tranche dge.Lampleur de ce phnomne impose de sinterroger sur les relationsentre lge, le travail et lemploi dans les entreprises.

    Parcours professionnels et parcours dexposition aux risques

    Pour nombre de salaris, le parcours professionnel passe par diff-rents emplois, avec des contrats de forme et de dure variables.Depuis trente ans, la prcarit de lemploi a entran une aug-mentation des mobilits contraintes des salaris4 . Mobilits qui

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    4 - Le Corre (Sophie), La scurisation des parcours professionnels - ANACT -fvrier 2008

  • peuvent passer par le changement de rgion, demployeur, demtier, de poste de travail dans lentreprise et du mme coup pardes changements de travail, dexpositions des risques, de mde-cin du travail, voire de rgime assurantiel. Autant de fragmentsdexposition aux risques qui sont parfois difficiles rassembler,pour reconstituer les origines de telle ou telle pathologie profes-sionnelle dclare 15 20 ans plus tard.

    Autre lment, lorsque la scurit de lemploi est faible (emploimenac ou fragilis), les salaris ont souvent tendance considrerleur prise de risque comme ncessaire dans leur mtier, la scuritpassant parfois au second plan. Ces stratgies, pas forcment expli-cites, contribuent rendre certaines expositions invisibles et ren-forcent lexigence dune prvention pour tous les salaris, com-mencer par ceux dont les contrats sont de courte dure.

    La prvention de lusure professionnelle

    Les entreprises prennent en compte lusure professionnellelorsque celle-ci est avre, (taux important des restrictions dapti-tude) ou lorsquelles doivent maintenir en emploi une populationvieillissante. Pour autant, des signes dusure professionnelle appa-raissent plus prcocement chez les salaris. Absentisme decourte dure, demande de mutation, difficult de recrutementdans certains secteurs sont autant dindicateurs dexigences fortessur le travail et sur sa pnibilit. Dans tous les cas, la prvention delusure professionnelle est lie celle des risques professionnels,elle renforce la ncessit de prvenir les risques au plus prs dutravail ralis par une population aux caractristiques diffrentes :des personnels jeunes, anciens, des hommes, des femmes, des CDI,des CDD, des stagiaires

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    De meilleures conditions de travail pour tous

    La question de lemploi des seniors est aujourdhui un enjeu important la fois pour les pouvoirs publics et pour les entreprises. Le tauxdemploi des 55 64 ans est de 37,4 % (source INSEE 2005) alors queles objectifs fixs par lEurope sont de 50 %. cela sajoutent de fortesdisparits territoriales et sectorielles. Lamlioration des conditions detravail des salaris les plus gs, mais galement pour toutes les autres

    23

  • 24

    Si de nombreux salaris sont acteurs de leurs parcours profession-nels, pour dautres, les parcours ne sont que le rsultat des possi-bilits professionnelles sous contraintes, dont certaines sont aussilaccident du travail, la maladie professionnelle ou la restrictiondaptitude.

    catgories dge, est donc un enjeu fort. Lobjectif est de rduirela pnibilit du travail et de prvenir lusure professionnelle.

    Les ralits des entreprises montrent que la situation estproccupante, dnormes efforts restent faire. En effet, dansun contexte de diminution des dispositifs de prretraite qui a souventpermis aux entreprises de faire partir plus tt des salaris uss,les situations dinaptitude dclares par les mdecins du travailsont de plus en plus nombreuses pour cette tranche de la population.Les postes doux favorisant un retrait des contraintes physiqueset organisationnelles (exemple : poste de prparation hors chanede production) sont en trs nette diminution dans les organisations ;il existe peu de rflexions globales sur lamnagement des situationsde travail des seniors en dehors de cas individuels.

    Selon lenqute SVP 50 (Sant et Vie Professionnelle aprs 50 ans)mene en 2003 par le CISME et le CREAPT, pour 10,5 % des salarisde lchantillon, le mdecin du travail considre quils devraient cesserde travailler. Une restriction daptitude ou une inaptitude temporairea t prononce pour un salari sur dix (18 % pour les ouvriers).Les conditions de travail le plus souvent incrimines : les contraintesphysiques et les horaires dcals.

    Enfin, on peut mettre lhypothse que lusure professionnelle, si onla met en lien avec des parcours professionnels de plus en plus hachs,se dveloppe sur des expositions complexes et souvent cumules. Do les difficults, dune part, suivre les expositions rellesaux risques professionnels des populations, et dautre part, mettreen uvre des actions de prvention pertinentes et amliorer lesconditions de travail de tous les salaris, quel que soit leur ge.

    On comprend lenjeu dlaborer des outils qui permettentde suivre les itinraires, les histoires dexposition des salaris toutau long de leur vie professionnelle, pour mieux apprhenderle phnomne de cumul dexpositions, mais galement celuides risques effets diffrs.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 02468

    10121416182022242628303234363840424446485052

    Cadres Ouvriers Ouvriers Ouvriers

    Difficultsdans les activitsde soin personnel

    (incapacit de type III)

    Difficultsdans les activits

    en gnral(incapacit de type II)

    Problmessensoriels

    et physiques(incapacit de type I)

    Cadres Cadres

    45

    2

    38

    340

    7

    32

    9

    34

    13

    24

    17

    Annesdesprance de vie

    Hommes 35 ans

    02468

    10121416182022242628303234363840424446485052

    Cadres Ouvrires Ouvrires Ouvrires

    Difficultsdans les activitsde soin personnel

    (incapacit de type III)

    Difficultsdans les activits

    en gnral(incapacit de type II)

    Problmessensoriels

    et physiques(incapacit de type I)

    Cadres Cadres

    47

    4

    43

    6

    41

    10

    36

    13

    35

    16

    27

    22

    Annesdesprance de vie

    Femmes 35 ans

    Esprance de vie avec incapacit Esprance de vie sans incapacit

    Esprance de vie 35 ans avec et sans incapacit chez les cadres suprieurs et les ouvriers, pour les trois types dincapacit. Hommes et femmes, France, 2003

    Source : E. Cambols, C. Laborde, J.-M. Robine, Population & Socits, n 441, Ined, janvier 2008Outre le fait que globalement 35 ans, les ouvriers ont une esprance de vie sans incapacit, qui est infrieure celle des cadres, on note que cette ingalit est plus ou moins forte selon le type dincapacit. En effet, les ouvrires connatront, 8 ans avant les cadres femmes, des problmes sensoriels et physiquescorrespondant une incapacit de type I ; cet cart sera de 10 ans pour les hommes.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    25

  • 26

    Ainsi, des parcours professionnels aujourdhui discontinus, voireplus incertains, rinterrogent la prvention, qui se doit dintgrertrois nouvelles dimensions :

    1 une dimension tout au long de la vie pour consigner le suivi deces expositions. Cette traabilit des expositions aux risques estdautant plus ncessaire que nombre dexpositions nont deffetqu long terme ;

    1 une dimension cumulative des expositions aux risques pour dessalaris engags dans des emplois, mme ceux de courte dure ;

    1 et enfin, la dimension singulire de chaque individu, qui nousoblige raisonner non pas dans labsolu, mais en fonction de leurge, genre, exprience, formation, tat de sant

    Ainsi, les nouvelles formes demploi amplifient la complexit de laprvention des risques, elles nous projettent aussi sur de nouvellesvoies explorer : celles des parcours dexposition tout au long dela vie et celle des expositions cumules qui passent toutes deuxpar une approche globale de la sant au travail.

    Des entreprises en difficult face la prvention

    Plusieurs annes aprs le dcret de novembre 2001 concernantlvaluation a priori des risques, on peut tirer quelques enseigne-ments sur la faon dont les entreprises se sont appropries cettedmarche et sur les difficults quelles rencontrent.

    En 2004, 76 % des chefs dentreprises de plus de 20 salarisdclarent avoir tabli le Document Unique (source DARES).Diverses tudes menes en rgion par les acteurs institutionnelsou les organisations syndicales montrent que les DocumentsUniques sont moins prsents dans les plus petites entreprises etque les dlgus du personnel ne sont pratiquement jamais asso-cis leur laboration.

    Des enqutes qualitatives menes sur les effets des dmarches deprvention sur lorganisation du travail apportent dautres clai-rages. Ainsi cette tude de 2007 du Rseau ANACT-ARACT qui faitmerger trois grandes catgories dentreprises :

    1 celles o la contrainte rglementaire est le moteur de la dmarche.Il sagit plutt de petites entreprises dclinant une dmarche trs

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 27

    formaliste, sans vision stratgique, et o gnralement il nexistepas de comptences spcifiques en hygine et scurit ;

    1 celles bases sur une approche technique et scuritaire. Ellesappartiennent souvent un groupe, dveloppant une culture de lascurit fonde sur la prescription technique (objectif du zroaccident ). Lanalyse des accidents du travail est au centre delanalyse des risques et peu de liens sont raliss avec lorganisationdu travail et les conditions relles dexposition aux risques dessalaris. En matire de prvention, les solutions techniques prva-lent : protections individuelles, carter de scurit, etc. ;

    1 celles qui, de toutes tailles, ont la volont de dpasser la scuriten conjuguant plusieurs registres (rglementation, conditions detravail). Les dmarches engages sont participatives et itratives etsollicitent souvent des comptences externes (consultants,experts, formateurs, etc.). Si elles ont une approche pragmatiquedes situations de travail, elles abordent peu les liens entre ge, tra-vail et effets sur la sant.

    Plus prcisment, sur la faon dont est mise en uvre ladmarche, on constate souvent que :

    1 la phase de prparation de la dmarche est gnralement rduite.Pourtant, cette phase permet de partir dune analyse de lexistant,dun diagnostic pralable et de sappuyer sur les expriences ant-rieures, sur les indicateurs utiliss ou formaliser ;

    1 lvaluation et la prvention sont deux dmarches cloisonnes. Onobserve, dans une majorit dentreprises, le peu dintgration entrela phase didentification, dvaluation des risques, dune part, et laphase de prvention, de mise en uvre dactions, dautre part. Uneminorit dentreprises dveloppe une dmarche globale dvalua-tion et de prvention ;

    1 le manque dintgration fait perdre de vue lintrt de lvaluationdes risques, sa finalit, cest--dire la prvention et lamliorationdes conditions de travail. Il en rsulte que lentreprise sarrte lardaction du Document Unique sans mettre en uvre un plandactions de prvention. Ou encore, elle value les risques ind-pendamment des actions quelle engage au quotidien ou des pro-jets quelle conduit ;

    1 la mise en uvre de ltape dvaluation, de priorisation des risquesfavorise la poursuite de la dmarche. Concernant ce point, on saper-oit que les systmes de cotation les plus complexes ne sont pastoujours bien appropris par les acteurs de lentreprise ;

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 28

    1 la formalisation du Document Unique est en corrlation avec salogique de production :- minimaliste pour remplir une simple obligation ;- intgre lexistant si lie un autre projet (ex : qualit) ;- dcale par rapport lentreprise et ses propres outils lorsquelle

    est compltement sous-traite un acteur externe, etc. ;1 le Document Unique fait rarement figure de tableau de bord et de

    suivi. Les reprsentants du personnel disent en avoir un usage trslimit, les salaris connaissent peu son existence ;

    1 le Document Unique et aussi un unique document . De ce fait, ilne peut pas y avoir deux documents identiques car chaque entre-prise est spcifique, singulire. Mais aussi, le Document Uniquedoit correspondre au seul lieu o sont rassembls tous les docu-ments et rapports relatifs aux salaris exposs, aux expositions auxrisques et leur valuation. Par exemple : les audits de conformitdes quipements et installations, la fiche dentreprise

    La prvention : un projet trop souvent dure dtermine

    Lvaluation des risques reste un projet dure dtermine pluttquun vritable processus conduisant une stratgie de prventiondurable. Cela pose la question dune confrontation entre diff-rentes temporalits :

    1 celle de la sant des salaris et des expositions aux risques profes-sionnels ;

    1 celle de la dmarche dvaluation et de prvention, qui exige dutemps de rflexion, de comprhension, de construction ;

    1 celle de la logique de gestion et de la conduite des projets desentreprises, logique situe dans des temps courts, voire en accl-ration constante.

    cela sajoute la temporalit propre aux instances de reprsenta-tion du personnel, ncessitant maturit, dveloppement progres-sif des comptences travers la formation, enjeu fort pour leCHSCT et les DP, mais galement travers leurs actions sur les pro-blmatiques traites.Nanmoins, des entreprises construisent de faon itrative, loc-casion de changements (production, organisation, techniques, etc.)une dmarche de prvention davantage en lien avec ses proccu-pations quotidiennes. Dans ce cas, il sagit dun processus continu,

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

  • 29

    combinant expriences, apprentissages collectifs, valorisation delaction Autrement dit, il sagit dun projet de prvention durable5.

    Ainsi, trs globalement, les enjeux sont diffrents selon la situationde lentreprise dans son implication sur la prvention des risques.Certaines doivent mettre en uvre une dmarche de prvention,les autres doivent lamliorer. Mais on comprend galement queselon l o se trouve chaque entreprise, le cheminement sera dif-frent ; do lintrt de partir de lexistant et de voir commentprogresser.

    Agir sur... (1) C Pourquoi faire voluer la prvention des risques ?

    5 - Daniellou (Franois) (coord.) et coll., La prvention durable des TMS. Quelsfreins ? Quels leviers daction ? Recherche-action 2004-2007. Direction gnrale duTravail, Paris, fvrier 2008.