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Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications JP Marc-Vergnes Résumé. De toutes les méthodes d’imagerie cérébrale en trois dimensions, la tomoscintigraphie, la SPECT (Single photo emission computed tomography) des anglo-saxons, est celle dont la maturation technique a été la plus longue. Les tomographes qui réalisent le meilleur compromis entre performances et rentabilité du matériel sont actuellement les caméras « trois têtes ». Mais d’autres types d’appareils, aux performances extrêmement variables, sont encore en service. La confusion qui peut en découler au plan de la qualité des résultats devrait s’estomper avec une meilleure standardisation des équipements. Les radiotraceurs les plus utilisés sont les marqueurs de perfusion cérébrale. On commence cependant à pouvoir disposer de traceurs du métabolisme cérébral et de ligands de neurorécepteurs. Le choix entre ces traceurs dépend de la nature des problèmes cliniques abordés. Il en est de même des procédures de traitement des données et de visualisation d’images qui constituent aujourd’hui un élément essentiel de l’utilisation pratique de la SPECT. Presque toutes les affections cérébrales ont fait l’objet d’études SPECT au cours des dernières années. Les résultats les plus intéressants ont été obtenus dans les maladies cérébrovasculaires, dans les épilepsies, dans les affections neurodégénératives et dans les tumeurs. Toutefois, les données recueillies dans d’autres situations cliniques permettent de mieux situer la portée et les limites pratiques de cette méthode. Même sans évaluation stricte, des indications spécifiques ont pu être dégagées. Elles reposent surtout sur la possibilité que la SPECT est seule à offrir dans les situations d’urgence ou critique, d’injecter le radiotraceur au moment cliniquement le plus propice et d’enregistrer les images ultérieurement. Ainsi, à la phase initiale des accidents ischémiques focalisés, la SPECT permet une visualisation précoce des lésions, une évaluation de leur étendue et de leur réversibilité, ainsi que des indications sur les mécanismes physiopathologiques ; elle devrait permettre une optimisation des essais et une meilleure utilisation des moyens thérapeutiques. De même, dans les épilepsies focales, il est possible d’obtenir des SPECT critiques qui, comparées aux SPECT intercritiques et postcritiques, semblent être les images les plus utiles pour guider le traitement chirurgical. Dans les affections ayant une évolution moins aiguë, la SPECT est en train de prendre, dans les stratégies diagnostiques, une place limitée à la solution de cas difficiles, comme cela a été montré pour les démences et comme cela semble devoir être progressivement le cas dans le vasospasme des hémorragies méningées, dans les maladies de Huntington et de Parkinson, dans les tumeurs, ou même dans les maladies infectieuses ou auto-immunes. © 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Introduction Le sigle anglo-saxon SPECT, ou SPET, s’est imposé, même dans les pays francophones, pour désigner la tomoscintigraphie, c’est-à-dire la technique d’imagerie fonctionnelle en trois dimensions (3D) basée sur l’utilisation de radiotraceurs émetteurs de rayons gamma. Avec la tomographie par émission de positon (TEP), la SPECT constitue le groupe des techniques de médecine nucléaire qui permet d’explorer les aspects circulatoires et métaboliques du fonctionnement des organes et, par là même, se distinguent fondamentalement des techniques d’imagerie morphologique 3D, comme la tomodensitométrie (TDM) et l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Ces techniques de médecine nucléaire se distinguent aussi de l’IRM fonctionnelle (IRMf) dans la mesure où, reposant sur des phénomènes physiques différents, elles accèdent à des paramètres fonctionnels différents. En fait, ces diverses techniques 3D explorent chacune un aspect particulier d’une même réalité, la structure anatomofonctionnelle du cerveau, et doivent être Jean-Pierre Marc-Vergnes : Ancien chef de clinique neurologique et psychiatrique, directeur de recherche à l’Inserm U455, centre hospitalier universitaire, hôpital Purpan, place du docteur Baylac, 31059 Toulouse, France. considérées comme complémentaires les unes des autres. En raison des caractéristiques physiques des traceurs qu’elle utilise, la SPECT a des performances inférieures à celles de la TEP, en ce qui concerne aussi bien la sensibilité et la résolution spatiale des images que la diversité et l’intérêt des molécules traçantes qu’elle met à la disposition des investigateurs. La TEP a donc été préférée à la SPECT comme outil de recherche dans ce secteur de l’imagerie. De plus, lorsqu’on l’applique au cerveau, la SPECT pose des problèmes techniques particuliers qui appellent, au plan des appareils, des solutions spécifiques. Or, du fait de son coût, la mise au point de ces solutions dépendait de l’existence d’indications médicales assurant la rentabilité des recherches méthodologiques et de l’exploitation des appareils, alors que la mise en évidence de ces indications dépendait de l’existence de tomographes adéquats. Ce cercle vicieux, qui a longtemps pesé sur la reconnaissance de cette technique, a été résolu en grande partie par la solution de compromis qu’ont représenté, à partir du début des années 1990, les caméras « trois têtes ». Les premières perspectives d’applications pratiques de la SPECT s’étaient pourtant dessinées, quelques années plus tôt, avec l’apparition des marqueurs lipophiliques de débit sanguin cérébral, dont le chef de file a été l’hexaméthyl-propylène-amine-oxime (HMPAO) marqué au technétium ( 99m Tc). Cette molécule a été Encyclopédie Médico-Chirurgicale 17-035-A-40 17-035-A-40 Toute référence à cet article doit porter la mention : Marc-Vergnes JP. Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Neurologie, 17-035-A-40, 2000, 17 p.

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Principaux aspects techniques et pratiquesde la SPECT cérébrale.Résultats et indications

JP Marc-Vergnes

Résumé. – De toutes les méthodes d’imagerie cérébrale en trois dimensions, la tomoscintigraphie, la SPECT(Single photo emission computed tomography) des anglo-saxons, est celle dont la maturation technique a étéla plus longue. Les tomographes qui réalisent le meilleur compromis entre performances et rentabilité dumatériel sont actuellement les caméras « trois têtes ». Mais d’autres types d’appareils, aux performancesextrêmement variables, sont encore en service. La confusion qui peut en découler au plan de la qualité desrésultats devrait s’estomper avec une meilleure standardisation des équipements. Les radiotraceurs les plusutilisés sont les marqueurs de perfusion cérébrale. On commence cependant à pouvoir disposer de traceurs dumétabolisme cérébral et de ligands de neurorécepteurs. Le choix entre ces traceurs dépend de la nature desproblèmes cliniques abordés. Il en est de même des procédures de traitement des données et de visualisationd’images qui constituent aujourd’hui un élément essentiel de l’utilisation pratique de la SPECT.Presque toutes les affections cérébrales ont fait l’objet d’études SPECT au cours des dernières années. Lesrésultats les plus intéressants ont été obtenus dans les maladies cérébrovasculaires, dans les épilepsies, dansles affections neurodégénératives et dans les tumeurs. Toutefois, les données recueillies dans d’autressituations cliniques permettent de mieux situer la portée et les limites pratiques de cette méthode. Même sansévaluation stricte, des indications spécifiques ont pu être dégagées. Elles reposent surtout sur la possibilitéque la SPECT est seule à offrir dans les situations d’urgence ou critique, d’injecter le radiotraceur au momentcliniquement le plus propice et d’enregistrer les images ultérieurement. Ainsi, à la phase initiale des accidentsischémiques focalisés, la SPECT permet une visualisation précoce des lésions, une évaluation de leur étendueet de leur réversibilité, ainsi que des indications sur les mécanismes physiopathologiques ; elle devraitpermettre une optimisation des essais et une meilleure utilisation des moyens thérapeutiques. De même, dansles épilepsies focales, il est possible d’obtenir des SPECT critiques qui, comparées aux SPECT intercritiques etpostcritiques, semblent être les images les plus utiles pour guider le traitement chirurgical. Dans les affectionsayant une évolution moins aiguë, la SPECT est en train de prendre, dans les stratégies diagnostiques, uneplace limitée à la solution de cas difficiles, comme cela a été montré pour les démences et comme cela sembledevoir être progressivement le cas dans le vasospasme des hémorragies méningées, dans les maladies deHuntington et de Parkinson, dans les tumeurs, ou même dans les maladies infectieuses ou auto-immunes.© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Introduction

Le sigle anglo-saxon SPECT, ou SPET, s’est imposé, même dans lespays francophones, pour désigner la tomoscintigraphie, c’est-à-direla technique d’imagerie fonctionnelle en trois dimensions (3D) baséesur l’utilisation de radiotraceurs émetteurs de rayons gamma. Avecla tomographie par émission de positon (TEP), la SPECT constituele groupe des techniques de médecine nucléaire qui permetd’explorer les aspects circulatoires et métaboliques dufonctionnement des organes et, par là même, se distinguentfondamentalement des techniques d’imagerie morphologique 3D,comme la tomodensitométrie (TDM) et l’imagerie par résonancemagnétique (IRM). Ces techniques de médecine nucléaire sedistinguent aussi de l’IRM fonctionnelle (IRMf) dans la mesure où,reposant sur des phénomènes physiques différents, elles accèdent àdes paramètres fonctionnels différents. En fait, ces diversestechniques 3D explorent chacune un aspect particulier d’une mêmeréalité, la structure anatomofonctionnelle du cerveau, et doivent être

Jean-Pierre Marc-Vergnes : Ancien chef de clinique neurologique et psychiatrique, directeur de recherche àl’Inserm U455, centre hospitalier universitaire, hôpital Purpan, place du docteur Baylac, 31059 Toulouse,France.

considérées comme complémentaires les unes des autres. En raisondes caractéristiques physiques des traceurs qu’elle utilise, la SPECTa des performances inférieures à celles de la TEP, en ce qui concerneaussi bien la sensibilité et la résolution spatiale des images que ladiversité et l’intérêt des molécules traçantes qu’elle met à ladisposition des investigateurs. La TEP a donc été préférée à laSPECT comme outil de recherche dans ce secteur de l’imagerie.De plus, lorsqu’on l’applique au cerveau, la SPECT pose desproblèmes techniques particuliers qui appellent, au plan desappareils, des solutions spécifiques. Or, du fait de son coût, la miseau point de ces solutions dépendait de l’existence d’indicationsmédicales assurant la rentabilité des recherches méthodologiques etde l’exploitation des appareils, alors que la mise en évidence de cesindications dépendait de l’existence de tomographes adéquats. Cecercle vicieux, qui a longtemps pesé sur la reconnaissance de cettetechnique, a été résolu en grande partie par la solution decompromis qu’ont représenté, à partir du début des années 1990, lescaméras « trois têtes ».Les premières perspectives d’applications pratiques de la SPECTs’étaient pourtant dessinées, quelques années plus tôt, avecl’apparition des marqueurs lipophiliques de débit sanguin cérébral,dont le chef de file a été l’hexaméthyl-propylène-amine-oxime(HMPAO) marqué au technétium (99mTc). Cette molécule a été

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Marc-Vergnes JP. Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS,Paris, tous droits réservés), Neurologie, 17-035-A-40, 2000, 17 p.

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appliquée à l’étude de toutes les affections cérébrales, avec desrésultats le plus souvent superposables à ceux fournis par la TEP.D’un coût moins élevé que cette dernière, la SPECT est alorsdevenue plus accessible en pratique courante. En conséquence, sesindications, dont la plupart sont aussi celles de la TEP mais dontcertaines sont spécifiques, notamment en matière d’épilepsie, se sontpeu à peu élargies.Actuellement, une des caractéristiques de la SPECT est sa grandediversité technique, qu’il s’agisse des appareils et des radiotraceurs.Une présentation de ces aspects techniques est donc nécessaire àune bonne compréhension des indications de la méthode ; elle faitl’objet de la première partie de cet exposé. La deuxième partie estconsacrée aux résultats et indications cliniques. Ceux-ci se situent,pour l’essentiel, dans quatre secteurs de la pathologie cérébrale : lesmaladies cérébrovasculaires, les épilepsies partielles, les affectionsneurodégénératives et les tumeurs. Un chapitre est consacré àchacune de ces affections. Les résultats obtenus dans les autresaffections neurologiques sont résumés dans un dernier chapitre.

Aspects techniques de la SPECTcérébrale

La SPECT est la plus ancienne des techniques d’imagerie cérébrale3D, puisque la description de son principe et ses premièresréalisations pratiques, dues à David Kuhl, remontent aux années1960 [23, 24]. Elle a donc précédé d’environ 10 ans le développementde la TDM cérébrale et de la TEP. Mais ses applications pratiquesn’ont pris une véritable ampleur qu’à partir de 1985, avec le premiertraceur lipophilique de débit sanguin cérébral, HMPAO marqué au99mTc [13, 32].Cette maturation particulièrement lente est due aux difficultésméthodologiques et économiques rencontrées pour adapter l’une àl’autre les deux « composantes » fondamentales de la SPECT quesont les appareils de tomographie et les radiopharmaceutiquesmarquées par des isotopes émetteurs de photons gamma. Cesphotons ont, en effet, deux inconvénients importants par rapportaux photons émis par l’annihilation des positons dans la techniqueTEP. D’une part, ils ont une énergie d’émission relativement faibleet sont donc facilement absorbés par les tissus vivants (et même parl’air) avant d’atteindre les détecteurs. D’autre part, ils sont émis danstoutes les directions de l’espace et la localisation de leur originenécessite l’utilisation de collimateurs qui sont responsables d’uneabsorption supplémentaire de photons. La faiblesse des rendementsde comptage, eu égard aux doses administrées, est donc le principaldéfaut de la SPECT. Ceci est particulièrement vrai pour le traceur deréférence du débit sanguin cérébral, le xénon 133 (133Xe), qui ne peutêtre utilisé qu’avec des tomographes spécialement conçus à cet effet.Une autre difficulté provient de la complexité que les appareilsSPECT partagent avec les autres tomographes. Trèsschématiquement, on peut leur reconnaître deux parties relativementdistinctes : le tomographe proprement dit, c’est-à-dire la partievéritablement spécifique de l’appareil permettant la détection et lecomptage de radioactivité, puis la reconstruction d’images 3D, et lesystème de visualisation et de traitement des données, qui peut êtreidentique à ceux que l’on utilise avec d’autres techniques d’imagerie,et joue souvent un rôle décisif dans l’utilisation pratique de cesdifférentes méthodes.De nombreux progrès techniques ont été accomplis dans cesdifférents domaines au cours des vingt dernières années. Le plusnotable d’entre eux, pour une large utilisation de la technique, a été,après l’apparition déjà citée de l’HMPAO, la mise sur le marché, en1988, du premier tomographe « trois têtes », le Triad de Trionix.Si l’on excepte quelques aspects bien particuliers, comme celui desdétecteurs hybrides SPECT-TEP, les modalités techniques desappareils SPECT sont donc aujourd’hui bien stabilisées. Mais ellessont encore peu répandues et les performances actuelles de cettetechnique sont variables d’un centre à l’autre. On peut, en outre,prévoir un développement important des radiotraceurs dans un

avenir relativement proche. Pour bien comprendre l’intérêt cliniquede la SPECT, il est donc utile d’avoir une vision d’ensemble de cesdifférents aspects techniques. Nous décrirons donc succinctement lesprincipaux types de tomographes monophotoniques, en nousintéressant surtout à leurs avantages et à leurs inconvénientspratiques respectifs. Nous envisagerons ensuite les différentsradiotraceurs disponibles en insistant sur leurs propriétésparticulières. Nous terminerons cette partie méthodologique par lessystèmes de visualisation et de traitement des images.

TOMOGRAPHES

Pendant plusieurs années, les appareils de tomoscintigraphiecérébrale ont été diversifiés dans leur conception, leurscaractéristiques physiques et, finalement, dans leurs performancescliniques. En raison du faible rendement de comptage des photonsgamma évoqués ci-dessus, ces performances dépendent pourl’essentiel de la distance qui sépare le cerveau, rendu émetteur dephotons gamma par le marquage des radiotraceurs, et les détecteurs.Ces derniers conditionnent, en outre, l’architecture des appareilsSPECT. Bien que d’autres cristaux, de germanium notamment, aientété expérimentés, le choix des constructeurs s’est constamment portésur des cristaux d’iodure de sodium. Ces derniers peuvent avoir destailles et des formes variables, ce qui permet la réalisationd’appareils d’architectures différentes. On distingue schéma-tiquement deux types de tomographe monophotonique, les« appareils dédiés cerveau » et les « gammacaméras tournantes ».Mais la SPECT n’est devenue une technique de routine qu’avec lescaméras « trois têtes ».

¶ Tomographes dédiés cerveauBien que la plupart d’entre eux aient été des appareils de rechercheméthodologique et que leurs applications aient parfois été limitées,ce sont eux qui ont permis d’établir la « faisabilité » clinique de laSPECT. Leur caractéristique majeure est de rapprocher les détecteursde l’extrémité céphalique des sujets examinés. Pour cela, ils utilisentdes cristaux d’iodure de sodium, généralement multiples, agencésde manière à envelopper le plus complètement possible la tête dessujets et à tourner autour de celle-ci.Leur principal défaut est de ne pas permettre l’exploration du corpsentier, et de ce fait de n’être rentable ni pour les centres de médecinenucléaire, qui ont rarement un recrutement suffisant de patients« cérébraux », ni pour les industriels. Trois « familles » d’appareilsméritent cependant d’être citées.Les Tomomatics (Medimatic Inc, Copenhague) ont été les premierstomographes monophotoniques à permettre des applicationscliniques diversifiées en recherche et en pratique (fig 1). Conçus pourl’utilisation du 133Xe (cf infra), ils comportaient quatre plans dedétecteurs disposés en carré autour de la tête du patient [38]. Ils ontensuite pu être équipés de collimateurs adaptés à l’utilisation destraceurs technéciés et iodés, et ont comporté plusieurs versionsdifférant par le nombre de coupes (de une à cinq) qu’ils permettaientd’enregistrer simultanément. Leurs performances en matière derésolution spatiale, et surtout de sensibilité, restent parmi lesmeilleures à n’avoir jamais été atteintes.Leurs équivalents japonais, les Headtomes (Schimadzu), avaient desperformances à peu près équivalentes. Mais ils ont eu une diffusionmoins large et ont donné lieu à moins d’études cliniques.Le dernier type de tomographe monophotonique dédié cerveau àavoir été commercialisé a été celui des appareils dont le détecteurest un cristal de forme circulaire entourant la tête du patient [18].Cette disposition permet d’optimiser le rendement de comptage.Après leur commercialisation, ils ont donc eu tendance à remplacerles appareils de type Tomomatic. Mais, outre le fait qu’ils n’ontjamais fourni la preuve de leur aptitude à l’utilisation du 133Xe, ilsse sont heurtés à la même difficulté que les appareils précédents, àsavoir une absence de marchés rentables.Lorsque ces divers appareils continuent à être maintenus, et s’ilsbénéficient des progrès accomplis en matière de visualisation et detraitement des images, ils donnent d’excellents résultats.

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¶ Gammacaméras tournantes

La gammacaméra d’Anger a constitué une étape majeure dans ledéveloppement de l’imagerie nucléaire. Construite à partir d’uncristal d’iodure de sodium unique, de grande surface et pourvu d’unnombre élevé de photomultiplicateurs, elle a permis d’obtenir debonnes images planes de la fixation de radiotraceur au niveau detous les organes. Lorsqu’il a été possible de faire tourner cettecaméra autour d’un corps humain, elle a été utilisée pour obtenirdes images tridimensionnelles de cette fixation. Les premiersappareils ne comportaient qu’une caméra dont la rotation se faisaità une distance de l’axe du corps pour pouvoir obtenir des imagesdes reins, du foie et du cœur. Ils n’étaient donc pas adaptés àl’obtention de bonnes images de la tête. Ils étaient inutilisables avecle 133Xe. En revanche, en prolongeant les temps d’enregistrementjusqu’à 40 ou 50 minutes, ils ont fourni des images acceptables ducerveau avec les marqueurs de perfusion technéciés (cf infra).Quelques travaux cliniques ont pu être réalisés avec ces machines,mais, dans l’ensemble, elles ont plutôt contribué à donner uneopinion défavorable de la SPECT.Des améliorations progressives ont été apportées à ces appareils enaugmentant le nombre de caméras et en optimisant les collimateurs.Depuis le début des années 1990, la plupart des constructeurs ontmis sur le marché des systèmes réalisant un bon compromis entreles gammacaméras standards et les appareils dédiés cerveau. Il s’agitde systèmes équipés de trois têtes de caméra, mobiles les unes par

rapport aux autres et pouvant être disposées selon deuxconfigurations : l’une dans laquelle les caméras sont éloignées lesunes des autres et laissent entre elles un espace suffisant pour logerle corps entier, et l’autre dans laquelle les caméras sont rapprochéesle plus possible du cerveau (fig 2). Dans cette dernière configuration,ces machines ont un rendement de comptage presque aussi bon quecelui des systèmes dédiés cerveau. Comme avec ces derniers, il estpossible de faire des acquisitions qui sont, soit rapides (20 à30 minutes) et donc plus confortables pour les patients, mais dequalité moyenne, soit plus longues (lorsque la coopération dupatient le permet) pour détecter de très faibles activités ou pouravoir une meilleure résolution spatiale des images. Cette résolutionreste habituellement supérieure au centimètre, mais elle peutdescendre à 8 mm avec certains appareils et des traceurs spécifiques.

Aucun de ces systèmes ne permet cependant une utilisationroutinière du 133Xe.

RADIOTRACEURS

Les radiopharmaceutiques utilisables en SPECT cérébrale sontaujourd’hui relativement nombreuses et diversifiées. Cette diversitéest avant tout celle des molécules qui ont été adaptées à l’explorationd’un système biologique particulier. Mais elle inclut aussi, bien qu’àun moindre degré, celle des isotopes radioactifs qui marquent cesmolécules. Ces radio-isotopes sont essentiellement au nombre dedeux. Le plus utilisé, tout au moins pour l’étude de la perfusioncérébrale, est le 99mTc. Peu coûteux, disponible dans tout service demédecine nucléaire où il est obtenu par élution à partir d’ungénérateur au molybdène (99Mo), ayant une énergie d’émission de140 keV et une demi-vie de l’ordre de 6 heures, cet élément artificielest facile à utiliser et n’entraîne qu’une faible irradiation. Parexemple, l’équivalent de dose-corps entier résultant de l’injection de20 mCi d’HMPAO marqué au 99mTc est de 0,7 rem, ce quicorrespond à l’irradiation due à une scintigraphie osseuse et à1,5 fois celle reçue à l’occasion d’un examen tomodensitométriquede l’abdomen et du pelvis. Le principal inconvénient du 99mTcprovient de sa structure stéréochimique qui limite les possibilités dele fixer sur certaines molécules. Le 123I, qui a des caractéristiquesphysiques assez proches de celles du 99mTc (énergie d’émission à159 keV et demi-vie d’environ 13 heures), se prête mieux que cedernier à des marquages biologiques, mais il est plus coûteux etnécessite une protection particulière de la thyroïde. La différenceentre les énergies d’émission du 99mTc et du 123I offre la possibilité,peu exploitée jusqu’à présent, de techniques de doubles traceurssimultanés, qui n’existe pas avec la TEP.

Deux autres radio-isotopes, le 133Xe et le thallium (201Tl), ont jouéun rôle historique important dans le développement de certainestechniques spécifiques (cf infra). Ils ne permettent pas le marquage

1 Tomographe dédié cerveau, le Tomomatic 64. Noter le diamètre réduit du logementde la tête et le détecteur thoracique pour l’enregistrement de la courbe « artérielle » né-cessaire au calcul du débit sanguin cérébral (Inserm U230, docteur JP Marc-Vergneset docteur P Celsis, centre hospitalier universitaire Purpan, Toulouse).

2 Gammacaméra trois têtes, la Prism 3 000 de Picker. À gauche : en position « corps entier », les détecteurs sont écartés. À droite : en position « tête », les détecteurs sont rap-prochés (service de médecine nucléaire, professeur I Berry, centre hospitalier universitaire Rangueil, Toulouse).

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de molécules biologiques, mais le 201Tl peut se prêter à destechniques de double traceur. Leurs caractéristiques physiquesseront exposées plus loin.Du point de vue de l’utilisateur, on peut distinguer trois catégoriesde radiotraceurs : les marqueurs de perfusion cérébrale, auxquels ilfaut ajouter les traceurs de volume sanguin cérébral ; les marqueursdu métabolisme énergétique cérébral, auxquels peuvent se rattacherles marqueurs de tumeurs cérébrales ; et les radioligands permettantd’étudier divers récepteurs cérébraux. Les premiers sont aujourd’huientrés dans la pratique courante, ils feront l’objet d’une descriptionprécise de leurs possibilités respectives. Les seconds ont une placeplus limitée et n’ont pas encore fait l’objet d’une évaluation cliniquesystématique. Les troisièmes ne sont encore, pour la plupart d’entreeux, que des outils de recherche ; ils seront simplement cités avecune mention de leurs domaines d’application potentielle respectifs.

¶ Marqueurs de perfusion cérébrale

Actuellement, ils sont de loin les plus utilisés. Ils comprennent troisgroupes distincts de molécules, les traceurs diffusibles quipermettent la mesure du débit sanguin cérébral, les traceurs dits« lipophiliques » qui fournissent plutôt un index de perfusionrelative, et les traceurs permettant la mesure du volume sanguincérébral.

Traceurs diffusibles

Ils se résument en fait au 133Xe. Déjà bien connu pour avoir étélargement utilisé, pendant plus de 10 ans, pour la mesure du débitsanguin cérébral locorégional avec des techniques de cartographiesuperficielle, ce gaz inerte a été le premier radiotraceur à permettreune application clinique de la SPECT cérébrale. Le passage de sonexploitation bidimensionnelle à une exploitation tridimensionnellea nécessité la construction d’un tomographe spécialement adapté àcet objectif (cf supra). Les résultats obtenus avec ce nouvel appareilont été faciles à valider par rapport à ceux d’une technique déjàéprouvée. Administré par inhalation ou par injection intraveineuse,le 133Xe reste le seul traceur à permettre le calcul du débit sanguincérébral, sans prélèvement artériel et sans modèle mathématiquecompliqué. Ce calcul est habituellement effectué dans des voxels de3 à 4 cm3, ce qui permet de découper l’encéphale en 300 à 400 zonesqui peuvent ensuite être regroupées en régions d’intérêt plusgrandes et moins nombreuses. En raison de la rapidité de sonélimination par voie respiratoire, il reste également le seul àpermettre la répétition des mesures à intervalle rapprochés : le tempsd’acquisition des images nécessaires à un calcul de débit est de4 minutes et l’examen peut être répété au bout de 30 minutes. Lenombre d’examens par séance est cependant limité à trois ou quatre,pour éviter une irradiation excessive des voies respiratoires. Sonprincipal inconvénient, dû à la faiblesse de son énergie d’émission(81 keV) et à la rapidité de son élimination pulmonaire, réside dansles faibles taux de comptage qu’il permet d’obtenir : il ne peut pasêtre utilisé avec les gammacaméras tournantes.

Marqueurs de perfusion stables dits « lipophiliques »

Ce sont eux qui ont assuré le succès clinique de la SPECT cérébraleet c’est sur eux que reposent actuellement les principalesapplications pratiques de cette technique. Ces marqueurs sont desmolécules lipophiliques instables qui franchissent librement labarrière hématoencéphalique, se distribuent dans le tissu cérébralen fonction de la perfusion sanguine locale et se convertissentensuite en une forme hydrophilique qui reste fixée de façonrelativement prolongée à l’intérieur des cellules. Les plus répandussont marqués au 99mTc. Mais on a utilisé aussi et on utilise encoreparfois l’isopropyl-p-iodoamphétamine (IMP) marquée au 123I, quipermet d’obtenir des images contrastées mais variables dans letemps.L’incontestable chef de file de ces produits est l’HMPAO marqué au99mTc. Il s’agit d’une amine macrocyclique liposoluble.Commercialisé en France sous le nom de Céretect, son utilisationen routine clinique remonte à une dizaine d’années. Sa fixation

cérébrale atteint un maximum en 10 minutes et reste stable pendantdes heures, ce qui lui confère un intérêt particulier puisqu’il estpossible d’injecter le produit au lit du malade, à un momentprivilégié de son évolution, et d’enregistrer les images plus tard,lorsque les soins le permettent. Cette possibilité a été mise en œuvreà la phase aiguë des accidents vasculaires cérébraux (cf infra) et pourétudier les différentes phases de la crise d’épilepsie (cf infra).L’autre traceur technécié est l’éthyl-cystéinate-dimer (ECD), connusous le nom de bicisate et commercialisé sous le nom de Neurolitet.D’apparition plus récente, il semble présenter quelques avantages.Grâce à une fixation cérébrale et à une clairance sanguine plusrapides que celles de l’HMPAO, il permet d’obtenir des imagescérébrales plus précoces et plus contrastées. En outre, le produitmarqué reste stable plus longtemps avant l’injection, ce qui rendson utilisation au lit du malade plus facile que celle de l’HMPAO.L’inconvénient de ces marqueurs de perfusion est de ne donnerqu’une estimation relative de la perfusion cérébrale (cf infra).

Volume sanguin cérébral

On peut mesurer le volume sanguin cérébral en SPECT [36]. On utilisepour cela un traceur qui reste strictement intravasculaire. Leshématies marquées sont, à l’évidence, le meilleur de ces marqueurs.En SPECT, on marque les hématies avec du pertechnétate de 99mTc,alors qu’en TEP ce marquage est fait avec du monoxyde de carbone,lui-même marqué à l’oxygène O-15. Le marquage au technétium peutse faire in vitro ou in vivo. Cette dernière solution, qui consiste àinjecter directement le produit de l’élution, est la plus simple, maiselle ne permet pas de contrôler la qualité du marquage. En fait, lesdeux méthodes donnent des résultats équivalents et ces dernierssont du même ordre que ceux obtenus en TEP. La principalecontrainte de la mesure du volume sanguin cérébral est qu’ellenécessite un étalonnage très précis du comptage de la radioactivitécérébrale par rapport à celui de la radioactivité sanguine. De lavalidité de cet étalonnage dépend la validité de la mesure, puisquecelle-ci repose pour l’essentiel sur le rapport de ces deux taux deradioactivité. Il s’agit donc d’une technique dont la mise en œuvreest très délicate. Ses indications étant limitées à l’explorationhémodynamique des lésions obstructives sévères des artèrescarotides, elle n’est guère utilisée (cf infra).

¶ Traceurs du métabolisme cérébral

Pendant longtemps, la principale lacune de la SPECT a été de neproposer aucun traceur permettant d’étudier le métabolismeénergétique cérébral ou le métabolisme des acides aminés. Toutesles explorations de ces métabolismes devaient être réalisées avec laTEP.Tout récemment, de nouveaux collimateurs ont été développés pourpermettre l’utilisation du fluorodésoxyglucose (FDG) marqué au 18Favec des appareils SPECT du type caméra « trois têtes » [29]. Il estdonc aujourd’hui possible de mesurer la consommation cérébralede glucose en SPECT. Comme en TEP, cette mesure nécessite untemps d’acquisition des données particulièrement long. Mais elleexige, en plus, la mise en place d’une logistique d’appro-visionnement coûteuse à partir de centres équipés d’un cyclotron,car la production du fluor (18F) et le marquage du FDG ne peuventêtre effectués que dans de tels centres ou à proximité. Ces contraintesd’ordre technique expliquent que cette possibilité n’ait pas encoreété exploitée, mais il est très vraisemblable qu’elle le sera assezrapidement, en raison des perspectives intéressantes qu’elle offre,en pathologie cérébrovasculaire (cf infra) et en oncologie (cf infra)plus particulièrement.Les tumeurs cérébrales peuvent cependant être déjà visualisées defaçon quantitative en SPECT à l’aide de certains marqueurs de laperfusion myocardique, comme le 201Tl et, plus récemment, le sesta-MIBI (méthoxy-isobutyl-isonitrile), marqué au 99mTc, dont la fixationest fonction de certains processus métaboliques. Le 201Tl, parexemple, est un métal analogue du potassium qui est connu depuislongtemps pour avoir une fixation différentielle sur les tumeurscérébrales. Il est produit dans un cyclotron à partir d’une cible de

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thallium naturel. Sa demi-vie est relativement longue (73 heures) etles photons gamma ne représentent que 10 % de son énergie dedésintégration, avec deux pics à 135 et 167 KeV. Il existe doncquelques limitations à son utilisation, ce qui a rendu souhaitable larecherche de marqueurs technéciés ayant les mêmes propriétés. Lesesta-MIBI a été le premier de ces marqueurs à avoir été validé enpartie (cf infra). D’autres études sont actuellement en cours avecd’autres traceurs tumoraux technéciés comme le DMSA (acidedimercaptosuccinique) et le tétrofosmine (éthoxyéthyl-phosphino-éthane).

Le métabolisme des acides aminés est un autre aspect dumétabolisme cérébral explorable avec les techniques de médecinenucléaire. Le taux de fixation cérébrale de ces acides aminés estconsidéré comme représentant un index de synthèse protéique.Mesuré en TEP, avec la méthylméthionine ou la tyrosine marquéesau carbone (11C), ce taux serait plus sensible et plus spécifique quela consommation de FDG marqué au 18F dans l’évaluation destumeurs cérébrales. Avec la L-3-(123I) iodo-α-méthyltyrosine, ondispose d’un traceur SPECT dont les premières applications àl’étude des tumeurs cérébrales sont très encourageantes (cf infra). Ils’agit d’un analogue d’acide aminé qui franchit la barrièrehématoencéphalique normale, n’est pas incorporé dans les protéinescérébrales [21, 28], et dont la fixation peut être inhibée compétitivementpar les L-aminoacides naturels [28].

¶ Ligands de neurorécepteurs

Autres traceurs hautement spécifiques, généralement considéréscomme relevant du domaine de la TEP, les ligands deneurorécepteurs ouvrent une nouvelle voie prometteuse à la SPECT.Il est bien établi que la mise au point de ces molécules complexes etde leur mode d’utilisation pratique nécessite la réunion decompétences extrêmement diversifiées (en chimie, biochimie,mathématiques, imagerie et clinique) ce qui, joint à la diversité desmolécules et des procédures de marquage à tester, explique la lenteprogression de ce champ de recherches particulier.

La plupart des ligands SPECT actuels sont marqués au 123I, atomeplus gros et moins « physiologique » que les isotopes émetteurs depositons, comme le 18F, et surtout le 11C, qui sont incontestablementmieux adaptés au développement de ce type de produits. Certainsde ces ligands ont, néanmoins, été préparés dans des conditions destabilité et de sécurité satisfaisantes et ont pu, de ce fait, donner lieuà des essais chez l’homme sain et/ou chez des malades. Ils sontsimplement cités ci-dessous.

Les plus connus d’entre eux sont les ligands des récepteursdopaminergiques. Ils comprennent l’IBZM (ou iodo-hydroxy-méthoxy-N-[éthyl-pyrrolidinyl]-méthyl-benzamide), l’IBZP (ou iodo-hydroxy-iodophényl-méthyl-tétrahydro-H-benzazépine), le â-CIT(ou 2â-carbométhoxy-3â-[4-iodophényl]-tropane), et l’IPT (ou N-[3-iodopropène-2-yl]-2â-carbométhoxy-3â-[4-chlorophényl]-tropane).Ces produits ont donné lieu à plusieurs études préliminaires chezl’homme dans la maladie de Parkinson (cf infra) et dans laschizophrénie (pour comparer les effets de certains neuroleptiques).

Il existe aussi un antagoniste des récepteurs muscariniques, le QNB(quinuclidinyl-iodo-benzilate), qui pourrait être utile dans la maladied’Alzheimer, et un ligand des récepteurs aux benzodiazépines,l’iomazénil, qui a donné des résultats prometteurs dans la maladied’Alzheimer (cf infra) et dans la localisation préopératoire des foyersépileptiques (cf infra).

Enfin, il faut signaler l’existence de ligands des récepteurssérotoninergiques.

Ce rapide survol n’a pas d’autre ambition que de donner une idéede l’éventail des possibilités que la SPECT devrait offrir à l’avenir.Mais elle illustre aussi l’ampleur des recherches cliniques quidevront précéder, dans la plupart des cas, l’introduction de cesmolécules en pratique courante.

SYSTÈMES DE VISUALISATIONET DE TRAITEMENT DES IMAGES

De ce point de vue, la SPECT cérébrale utilise les mêmes matérielset les mêmes procédures que les autres techniques d’imageriefonctionnelle cérébrale. Comme la TEP et l’IRMf, elle est confrontéeà des problèmes de visualisation et de traitement d’images qui tirentleur spécificité de la diversité, de la petite taille et de la complexitédes structures anatomofonctionnelles du cerveau. Ces problèmesconcernent, d’une part, le repérage, l’identification et la localisationdes anomalies de fixation ou de cinétique des radiotraceurs et,d’autre part, la quantification de ces anomalies.

Les résultats de la SPECT, comme ceux de la TEP et de l’IRMf,peuvent être présentés sous forme d’images et sous forme dedonnées numériques. Mais il ne faut pas oublier que les imagesobtenues avec ces différentes méthodes ne sont que la représentationvisuelle de valeurs numériques. Bien que la représentation la pluscouramment utilisée soit celle qui associe les couleurs blanc et rougeaux valeurs les plus élevées et les couleurs bleu et noir aux valeursles plus basses, il n’y a pas encore de vrai consensus internationalsur ce point.

En outre, les valeurs représentées sont de nature très diverses. Lesplus simples sont les taux de comptage dans les voxels (imagesbrutes qui sont toujours utiles pour vérifier la qualité technique del’examen). Les plus couramment utilisées sont les rapports entre letaux de comptage du voxel ou de la région d’intérêt et un taux deréférence qui peut être soit le taux de comptage moyen de la coupe,de l’hémisphère ou du cerveau entier, soit le taux de comptage de larégion symétrique (index d’asymétrie fréquemment utilisé), soit letaux de comptage dans un hémisphère cérébelleux, homo- oucontrolatéral, ou dans le cervelet pris dans son ensemble, soit mêmele taux de comptage dans le scalp. Une troisième possibilité, lorsquela cinétique du traceur et les taux de comptage le permettent, estd’utiliser des modèles compartimentaux pour calculer, dans desvoxels ou dans des régions d’intérêt, des paramètres comme le débitet le volume sanguins, la consommation de glucose et, tout au moinsthéoriquement, le KD et le Vmax d’un ligand. Il existe notammentdes procédés, complexes et nécessitant des prélèvements artériels,pour calculer le débit sanguin cérébral à partir des images obtenuesavec les traceurs non diffusibles, HMPAO, ECD et IMP. Enfin, ladernière possibilité est celle des cartes présentant les résultats detests statistiques (statistical parametric maps [SPM]). Le choix entreces différentes possibilités dépend de la nature du marquage, dutaux de comptage et surtout des objectifs de l’examen. En pratiquecourante, il est quelquefois possible d’obtenir les informationssouhaitées de la simple inspection visuelle des taux de comptage.Mais, le plus souvent, des rapports simples peuvent apporter desréponses simples aux questions posées. Il n’existe actuellementaucune procédure standardisée sur ce thème, quelle que soit lapathologie considérée. Des études multicentriques comparativessont indispensables pour identifier les meilleures solutions. Lesprocédés les plus sophistiqués sont peu utilisés car ils sont rarementdisponibles sur les systèmes du commerce.

Nous l’avons déjà dit, de toutes ces méthodes d’imageriefonctionnelle, la SPECT est celle qui a la plus mauvaise résolutionspatiale. En conséquence, c’est elle qui a la valeur localisatrice laplus faible et le besoin d’une fusion d’images avec les techniquesmorphologiques le plus grand. Il faut aussi tenir compte de cettedifférence de sensibilité et de résolution spatiale lorsque l’on utilisedes logiciels développés pour d’autres méthodes.

Tous les dispositifs actuels fournissent en standard des images decoupes axiales, coronales et sagittales. La plupart d’entre euxpermettent de reconstruire le volume cérébral selon n’importe quelangle, y compris l’angle selon lequel des images TDM ou IRM ontété obtenues précédemment. Certains systèmes possèdent deslogiciels de fusion d’images qui permettent de superposer desimages planes obtenues en SPECT, en TDM et/ou en IRM, pour créerdes images uniques combinant les aspects anatomiques etfonctionnels. D’autres sont équipés de procédés de reconstructiontridimensionnelle des surfaces et/ou des volumes, de rotation et de

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présentation des images en perspective, ce qui pourrait faciliter lalocalisation et l’évaluation de la taille des lésions.Les systèmes de visualisation et de traitement d’images constituentaujourd’hui un élément essentiel de l’utilisation pratique de laSPECT. Mais les moyens sophistiqués dont on dispose aujourd’huisont encore trop récents pour que l’intérêt pratique des diversesprocédures qu’ils permettent de mettre en œuvre ait été clairementévalué. Ces procédures doivent avant tout permettre de répondre àdes questions simples. À partir de quel seuil peut-on considérer qu’ily a hypo- ou hyperfixation d’un traceur ? Quelle est l’étendue exactede la zone anormale ? Quel est l’index de fixation qui possède lesmeilleures sensibilité et spécificité par rapport à la référence, dans ledomaine considéré ?Enfin, il ne suffit pas de disposer d’un bon système de traitementd’images. Il faut que ces images répondent à des critères de qualitéqui doivent être vérifiés régulièrement. Au cours des cinq dernièresannées, des procédures de contrôle de qualité ont été élaborées auxÉtats-Unis et en Europe [17]. Leur application systématique a permisde mettre en évidence des différences importantes entre laboratoires.Tant que ces contrôles ne sont pas rendus obligatoires par lespouvoirs publics, il appartient aux utilisateurs de s’informer sur lesprocédures utilisées par le ou les laboratoires auxquels ilss’adressent.

Aspects cliniques de la SPECTcérébrale : résultats et indicationsÀ quelques rares exceptions près, toutes les affections cérébrales ontété explorées à l’aide d’au moins une technique SPECT au cours des15 dernières années. Plus de 500 articles ont relaté ces travaux. Il estimpossible d’en faire une présentation complète dans le cadre de laprésente synthèse. Plusieurs revues générales successives ont permisde dégager les principaux axes d’intérêt clinique de cette méthoded’imagerie. Celles de Holman et Devous, en 1992 [19], de Masdeu etal, en 1994 [30], et le rapport de l’Académie américaine de neurologie,en 1996 [35], ont été exclusivement consacrées à la SPECT, alors quecelles d’Alavi et Hirsch, en 1991 [1], et de Newberg et Alavi, en1996 [31], portaient sur toutes les méthodes d’imagerie cérébrale etpermettaient de les situer les unes par rapport aux autres. Au fil desétudes, quatre grandes indications de la SPECT cérébrale se sontdégagées. Elles concernent la pathologie cérébrovasculaire, et plusparticulièrement les indications thérapeutiques de la phase aiguë desaccidents ischémiques cérébraux, les épilepsies, pour la localisationpréopératoire des foyers épileptogènes rebelles aux traitementsmédicaux, les affections dégénératives et les tumeurs cérébrales. Leprésent exposé consacre un chapitre à chacune de ces quatrequestions et résume, dans un cinquième chapitre, les principauxrésultats obtenus dans les autres affections cérébrales.

SPECT ET MALADIES CÉRÉBROVASCULAIRES

Le développement de la SPECT ayant reposé, pour l’essentiel, surdes marqueurs de perfusion cérébrale, les maladiescérébrovasculaires ont logiquement constitué le principal domainepathologique étudié avec cette technique. Les résultats les plusnombreux et les plus intéressants concernent la phase aiguë desaccidents ischémiques cérébraux, le vasospasme des hémorragiessous-arachnoïdiennes et les conséquences hémodynamiques dessténoses sévères et occlusions des artères carotides [14]. Chacun deces trois aspects des maladies cérébrovasculaires fait l’objet d’unesection distincte. Quelques résultats plus ponctuels obtenus dansd’autres domaines de la pathologie cérébrovasculaire sont cités dansune quatrième section. En raison du contexte clinique dans lequelelles se situent, les données SPECT concernant les démencesvasculaires sont abordées et discutées dans le chapitre consacré auxdémences dégénératives (cf infra).

¶ Phase aiguë des accidents ischémiques cérébrauxTout le monde s’accorde aujourd’hui pour considérer que lespremiers moments qui suivent la constitution d’un foyer d’ischémie

cérébrale sont cruciaux pour la mise en œuvre de traitementsefficaces. Pour la fibrinolyse, la durée de cette période critique nesemble pas devoir dépasser les 6 premières heures de l’accident.Mais cette durée peut fluctuer, en plus ou en moins, en fonction dela cause et de la sévérité de l’ischémie et des réactionsphysiopathologiques secondaires qu’elle entraîne. Pour optimiser lesessais thérapeutiques et l’utilisation pratique des traitementsefficaces, il faudrait pouvoir déterminer le plus tôt et le plusexactement possible le mécanisme de ces accidents (embolique,hémodynamique ou lacunaire) ainsi que l’étendue des lésionsirréversibles et celle des zones récupérables. Les examens cliniques,les techniques d’imagerie anatomique, comme la TDM et l’IRM, etles techniques angiographiques ne permettent pas d’atteindre cesdeux objectifs de façon satisfaisante.Il est maintenant bien établi que la SPECT, comme la TEP, visualiseles foyers ischémiques cérébraux dès les premières heures de leurconstitution et ceci quel que soit le traceur utilisé [3, 5, 35]. En tout étatde cause, cette visualisation est nettement plus précoce que celles dela TDM et de l’IRM (fig 3). Plusieurs de ces études ont montré que ledegré et l’étendue de cette hypoperfusion quasi immédiate étaientbien corrélés à la gravité clinique initiale, évaluée à l’aide deséchelles habituellement utilisées dans les essais thérapeutiques.L’évolution des anomalies de perfusion au cours des premières48 heures pourrait avoir une valeur prédictive du pronostic finalégale ou supérieure à celle des échelles cliniques (fig 4). Un travailrécent [6] suggère qu’une SPECT cérébrale à l’ECD, réalisée avant lasixième heure, pourrait distinguer les accidents transitoires etrégressifs d’une part, et les accidents constitués d’autre part, avecune sensibilité et une spécificité de 100 %.

3 Accident vasculaire ischémique à la phase aiguë : tomodensitométrie (TDM) à laquatrième heure (en haut à gauche), SPECT à la cinquième heure (en bas), TDM auhuitième jour (en haut à droite). L’hémisphère gauche est à gauche de l’image.Le scanner initial est normal alors que la SPECT met en évidence une vaste zone d’hy-podébit sylvienne gauche retrouvée 8 jours plus tard à la TDM (unité d’imagerie fonc-tionnelle cérébrale, professeur M Steinling, centre hospitalier régional universitairede Lille).

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D’autres études ont été consacrées aux mécanismesphysiopathologiques de ces accidents et ont montré qu’une absencede perfusion focalisée correspondait généralement à l’occlusiond’une artère cérébrale majeure, que les lacunes n’entraînaient pasd’anomalies de la perfusion cérébrale et que les hyperfixations detraceurs étaient souvent compatibles avec le diagnostic d’embolied’origine cardiaque. Par ailleurs, certains ont mis en évidence dessignes précoces de risques hémorragiques, liés à la profondeur del’ischémie, qui pourraient être particulièrement utiles dans lesindications ou plutôt les contre-indications de la thrombolyse. Enfin,il vient d’être clairement établi que la SPECT permettait de vérifierla réalité de la reperfusion 24 heures après fibrinolyse [16].Toutefois, l’interprétation des images n’a pas encore été codifiéedéfinitivement. La plupart des études ont été effectuées avec desméthodes de quantification calculant des rapports entre régionsd’intérêt, le plus souvent des index d’asymétrie. Ces méthodes ontpermis de définir des seuils séparant les foyers d’ischémieirréversibles des zones de pénombre qui les entourent. Mais ellessont longues à mettre en œuvre et, de ce fait, mal adaptées auxbesoins de l’urgence. Récemment, une méthode d’interprétationvisuelle simple, reposant sur l’identification de cinq tableauxdistincts, s’est avérée très reproductible et a fourni des résultats degrande valeur prédictive [2]. Parallèlement, une échelle d’évaluationdétaillée portant sur la profondeur, l’étendue et la localisation deslésions ischémiques a été proposée pour la réalisation des essaismulticentriques qui restent nécessaires pour valider l’intérêt pratiquede la SPECT dans la prise en charge initiale des accidentsischémiques à la phase aiguë [3].Depuis peu, grâce à une adaptation de la méthode au FDG [29], il estpossible de mesurer la consommation cérébrale de glucose enSPECT (cf supra). Il n’est donc pas surprenant que, dans une revuerécente comparant les avantages et inconvénients respectifs desdifférentes méthodes d’imagerie cérébrale à la phase aiguë desaccidents ischémiques cérébraux [5], la SPECT ait été considérée, avecl’IRM de perfusion et de diffusion, comme l’une des deux techniquesappelées à renouveler l’approche de cette phase aiguë au cours desannées à venir.À la phase subaiguë, les données de la SPECT ont été beaucoupplus confuses et leurs corrélations avec les données cliniques ontdonné des résultats contradictoires. Tout d’abord, les différents

traceurs de perfusion ne donnent plus les mêmes images. Unevariabilité des images en fonction du temps avait déjà été mise enévidence avec l’IMP marqué au 123I. Plus récemment, des différencesont été observées, à distance de l’accident, entre les images HMPAOet ECD ; elles s’expliquent par des différences dans les mécanismesde fixation cérébrale de ces deux radiotraceurs. L’HMPAO, quiinteragit simplement avec le glutathion intracellulaire, donnefréquemment des images d’hyperfixation, alors que l’ECD, dont larétention dépend de l’activité estérasique du cerveau, ne visualisepratiquement jamais de reperfusion au-delà de la 24e heure. De plus,un découplage entre débit et métabolisme apparaît rapidement dansles zones lésées et il n’est pas possible de différencier, sans mesuredu métabolisme, la reperfusion d’un tissu viable, accompagnéed’une reprise métabolique, et le débit de « luxe » ou non nutritionneldans une zone nécrosée. À cet égard, la SPECT était, jusqu’à présent,nettement inférieure à la TEP. Les approches indirectes dumétabolisme hémisphérique, par l’intermédiaire du diaschisiscérébelleux croisé, ne semblaient pas devoir apporter une solution àcette difficulté. Ici aussi, la nouvelle possibilité de mesurer laconsommation cérébrale de glucose avec le FDG marqué au 18Fpourrait renouveler l’apport de la SPECT à une phase encore malconnue de l’ischémie cérébrale.

¶ Vasospasme de l’hémorragie méningéeLe vasospasme reste l’une des complications majeures de la phasesubaiguë des hémorragies méningées. Il est une cause importantede mortalité et de morbidité avec séquelles. Il peut être prévenuet/ou traité par hypertension et hémodilution hypervolumique. LaSPECT est, avec l’angiographie et le doppler transcrânien, une destechniques qui permet de visualiser précocement cette complication.Plus facile à réaliser que l’angiographie, elle est aussi plus sensibleet mieux corrélée à la présence et à la sévérité des signesneurologiques secondaires qui sont actuellement considérés commeles meilleurs critères de vasospasme. Mais, par définition, elle estmoins spécifique que l’angiographie, tout au moins pour lavisualisation du vasospasme des grosses artères cérébrales. Ledoppler transcrânien est la technique la plus facile à réaliser et àrépéter, mais elle n’explore elle aussi que les grosses artères. Lasupériorité de la SPECT sur ces deux techniques est d’être la seule àpermettre une estimation semi-quantitative de la perfusion tissulairedans l’ensemble du cerveau et dans ses différents territoiresvasculaires. Toutefois, le vasospasme n’est pas la seule caused’hypoperfusion distale dans les suites d’une hémorragie méningéeet l’interprétation de ces hypoperfusions doit être faite encomparaison avec les données TDM (fig 5). Une hypoperfusioncérébrale diffuse est généralement un signe de pronostic fatal, maisles signes cliniques ont une valeur prédictive supérieure sur cepoint. La meilleure stratégie de diagnostic et de prise en charge duvasospasme pourrait reposer sur une utilisation complémentaire dudoppler transcrânien et de la SPECT, selon des modalités qui restentà préciser et à évaluer.

¶ Conséquences hémodynamiques des sténoses sévèreset occlusions de l’axe carotidienLe traitement chirurgical des sténoses sévères et occlusions de l’axecarotidien a fait l’objet d’une des plus importantes controversesmédicales des années 1980. Première clarification importante duproblème, les résultats concordants de plusieurs grandes étudesmulticentriques ont permis de fonder les indications del’endartériectomie carotidienne sur deux critères principaux, le degréde la sténose et son caractère symptomatique ou asymptomatique,qui font l’objet d’un large consensus international [8]. Mais cescritères, pour aussi indiscutables qu’ils soient, ne sont peut-être pasles seuls à prendre en compte. Aucune de ces études multicentriquesne s’est, en effet, intéressée à la place que pourraient avoir, dans cesindications, les anomalies hémodynamiques dues aux lésionscarotidiennes. Celles-ci, en revanche, ont été abondammentdocumentées par des études aux effectifs plus limités, réaliséesparallèlement avec la SPECT, mais aussi avec la TEP et d’autrestechniques d’exploration circulatoire [46].

4 Accident vasculaire ischémique à la phase aiguë : évolution de l’hypoperfusion ini-tiale à j2. En haut : récupération partielle. En bas : aggravation (laboratoirede biophysique médicale et médecine nucléaire, professeur G Bouvard, centre hospita-lier universitaire de Caen).

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La contribution de la SPECT à ce problème repose sur deuxapproches complexes (la mesure couplée du débit et du volumesanguin cérébral et la réponse du débit sanguin cérébral à un stressvasodilatateur, comme l’inhalation de CO2 ou l’injectionintraveineuse d’acétazolamide) destinées à mettre en évidence lavasodilatation induite par la chute de pression résultant de la oudes lésion(s) obstructive(s). Les résultats de ces deux approches(augmentation du volume sanguin cérébral et diminution durapport « débit/volume » [36] d’une part, et diminution de la réponsedu débit à un stress vasodilatateur [11] d’autre part) ont étésignificativement corrélés les uns aux autres. Mais aucun de cesparamètres, pas même le rapport « débit/volume », n’a pu êtreétalonné par rapport à la pression sanguine d’aval et, plusparticulièrement, au seuil critique correspondant à la limiteinférieure de l’autorégulation. Enfin, ces anomalies sont relativementpeu fréquentes. Elles ne s’observent qu’en aval des sténoses trèsserrées, supérieures à 70 %, ce qui ne modifie pas les indications del’endartériectomie basées sur le degré de sténose et suggèrent que,souvent, la chute de pression induite par cette sténose est en grandepartie compensée par la circulation collatérale. Enfin, sur le planméthodologique, la lourdeur de la mesure du volume sanguincérébral (cf supra) et les contraintes liées à l’utilisation du 133Xe pourpouvoir quantifier le débit sanguin cérébral et répéter sa mesure(cf supra) limitent considérablement l’applicabilité de ces approches.Des résultats identiques ont été obtenus avec d’autres méthodes,dont certaines, comme le doppler transcrânien, sont à la fois moinsonéreuses et plus faciles à mettre en œuvre [46].

La SPECT ne sera probablement pas la méthode retenue dans lesessais multicentriques destinés à évaluer l’intérêt pratique desexplorations hémodynamiques dans la prise en charge des lésionscarotidiennes sévères.

¶ Autres affections cérébrovasculaires

Des études ponctuelles ont révélé la présence de zoneshypoperfusées à la périphérie des hématomes cérébraux ou chez desdiabétiques de type I, sans antécédent de maladie cérébrovasculaire.D’autres travaux ont suggéré que la SPECT pourrait être utile pourévaluer l’importance de l’hémodétournement dû aux malformationsartérioveineuses. Ces résultats doivent être confirmés et leursignification précisée avant de pouvoir être, éventuellement, utilisésen pratique.

Un dernier aspect des maladies cérébrovasculaires, celui desdémences vasculaires, a également été étudié. Il est plus cohérent,

du point de vue clinique, de situer les constatations faites dans cecadre par rapport à celles qui concernent les démencesdégénératives.

SPECT ET ÉPILEPSIE

Les crises d’épilepsie s’accompagnent d’une augmentation trèsimportante du débit sanguin et du métabolisme énergétique ducerveau. Ces anomalies sont focalisées dans les crises partielles etglobales, dans les crises généralisées. De plus, en périodeintercritique, les foyers épileptogènes sont souvent le siège d’unehypoperfusion et d’un hypométabolisme. Ces constatations, faitesen partie chez l’animal, ont surtout été établies et confirmées chezl’homme, dès qu’il a été possible d’appliquer la TEP et la SPECTchez ce dernier. Elles s’expliquent parfaitement par le conceptclassique de couplage entre fonctionnement cérébral, métabolismeénergétique et débit sanguin et, en même temps, constituent unexemple supplémentaire de ce couplage.

L’intérêt pratique de ces anomalies découle du fait que les résultatsdu traitement chirurgical des épilepsies partielles rebelles autraitement médical dépendent de la qualité de la localisation desfoyers épileptogènes à exciser. La technique de référence pour cettelocalisation est une technique invasive, la stéréoélectro-encéphalographie par électrodes profondément implantées. Lestechniques d’imagerie morphologique, comme la TDM et l’IRM,n’ont pas de valeur localisatrice supérieure à celle del’électroencéphalogramme (EEG) conventionnel de surface.

Les techniques d’imagerie isotopique, comme la TEP et la SPECT,ont été rapidement perçues comme pouvant apporter des solutionsà ce problème. La SPECT, notamment, a suscité de nombreusesétudes portant, non seulement sur la signification des imagesintercritiques, mais aussi, grâce aux traceurs de perfusion permettantde dissocier l’injection du traceur et l’acquisition des données(cf supra), sur l’apport des images critiques et postcritiques.

Ces anomalies de perfusion ont été observées dans les épilepsiestemporales (fig 6). Mais, elles ont également été mises en évidencedans de nombreuses autres localisations comme, par exemple, dansles épilepsies de l’aire motrice supplémentaire (fig 7) ou l’aireauditive primaire (fig 8).

Une méta-analyse récente [12] portant sur 30 articles exploitables (sur46 sélectionnés) a permis d’établir la valeur localisatrice de la SPECT,exprimée en termes de sensibilité et de faux positifs, en prenant pourréférence la localisation électroencéphalographique, par électrodes

5 Vasospasme au cours d’une hémorragie méningée avecpetit infarctus frontal droit et tableau clinique sévère. Àdroite, hypoperfusion étendue de l’hémisphère droit justi-fiant la mise en route d’un traitement triple H (hypervolé-mie, hémodilution, hypertension) et l’utilisation d’un vaso-constricteur périphérique. À gauche, évolution au dixièmejour de traitement. Les niveaux de coupe sont indiqués sousles images (unité d’imagerie fonctionnelle cérébrale, profes-seur M Steinling, centre hospitalier régional universitairede Lille).

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de surface, chez 303 patients, et l’efficacité du traitement chirurgical,chez 162 d’entre eux, tous présentant des crises d’épilepsietemporale. La sensibilité par rapport à l’EEG et à l’efficacitéchirurgicale a été de 0,44 et de 0,43 pour la SPECT intercritique, de0,75 et de 0,77 pour la SPECT postcritique, et 0,97 et 1,00 pour laSPECT critique. Les taux de faux positifs se sont élevés à 7,4 % et4,4 % pour la SPECT intercritique, et à 1,5 % et 0,0 % pour la SPECTpostcritique. Les auteurs ont cependant estimé, dans leursconclusions, que l’utilisation conjointe des SPECT critiques etintercritiques pourrait être la meilleure façon d’exploiter cetteméthode. Cette étude a, en outre, permis d’évaluer à 5 % lafréquence des hyperperfusions intercritiques. S’agissant d’épilepsieinfantile et d’épilepsie extratemporale chez l’adulte, les donnéesrassemblées n’ont pas été suffisamment nombreuses pour autoriserdes conclusions. Sur le plan technique, la plupart des SPECT avaientété obtenues avec l’HMPAO, sans qu’il y ait de différence entre lesrésultats observés avec ce marqueur et avec les autres. La plusgrande homogénéité des résultats obtenue, en phase intercritique,lorsque trois séries de mesures effectuées avec des tomographes de

basse résolution ont été retirées de l’étude, a mis en évidencel’importance des performances intrinsèques des appareils detomographie pour la qualité des examens.

Les derniers travaux sur l’intérêt de la SPECT dans la localisationdes foyers épileptogènes ont surtout été méthodologiques. Enmatière de traitement d’images, les méthodes de soustraction entreimages critique et intercritique semblent constituer un progrèsnotable (fig 6D) . Il est aujourd’hui possible de procédersuccessivement à une normalisation des images SPECT, à leursoustraction, au seuillage de l’image soustraite pour ne conserverqu’un foyer d’hyperactivité, puis à la localisation précise de ce foyerpar fusion tridimensionnelle de l’image SPECT avec une image IRM(fig 6E). L’intérêt pratique de cette procédure complexe de traitementd’images vient d’être validé récemment par une étude portant surune série de 51 patients consécutifs présentant des crises de toutetopographie [33]. Les résultats sont impressionnants : valeurlocalisatrice significativement supérieure (88,2 %) à celle de l’EEGcritique (64,7 %) et de l’IRM (49,0 %), et comparable à celle de l’EEG

6 Épilepsie temporale interne gauche. Images obtenues après injection de 99mTc-ECD(éthyl-cystéinate-dimer).A. En phase intercritique : hypoperfusion amygdalohippocampique gauche.B. En phase critique : hyperperfusion des structures internes gauches dont l’extension at-teint la pointe du lobe ; une encoche d’hypoperfusion sur le cortex latéral semble délimiterle volume activé (« isolement »).C. En phase critique après injection de 99mTc-ECD plus tardive : l’hyperperfusion se pro-page au cortex externe et les structures internes controlatérales sont hypoperfusées (le délaid’injection est un paramètre fondamental pour l’interprétation des images).D. La soustraction d’images permet de mieux caractériser les régions cérébrales dont la per-fusion varie. Cependant, il faut se garder d’identifier la zone épileptogène à la région danslaquelle la variation est la plus intense. Il s’agit ici d’une crise enregistrée à point de départhippocampique antérieur (diagnostic SEEG).E. De même, les procédés de fusion d’images anatomiques et fonctionnelles augmentent lafiabilité de l’interprétation et permettent une localisation plus précise des anomalies.F. Imagerie par résonance magnétique postopératoire (IRM) : dans l’épilepsie des structu-res internes, la résection chirurgicale est beaucoup plus localisée pour les anomalies détec-tées en SPECT (unité de chirurgie de l’épilepsie, professeur Ph Coubes et professeurM Zanca, centre hospitalier universitaire de Montpellier).

*A *B *C

*D

*E *F

Neurologie Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications 17-035-A-40

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par électrode intracérébrale (85,7 %), d’une part, et, d’autre part,évolution postopératoire favorable à 100 %, dans les 16 cas où le sitechirurgical concordait avec la localisation SPECT. Pour ces auteurs,cependant, la meilleure utilisation de la procédure devrait être deservir de guide pour l’implantation des électrodes intracrâniennesdans les cas difficiles. Par ailleurs, plusieurs auteurs se sontintéressés aux foyers d’hypoperfusion observés à distance des foyersépileptogènes, dans le thalamus ipsilatéral aux foyers temporaux parexemple, sans que la signification et l’intérêt pratique de cesanomalies aient été clairement précisés. En matière de traceurs, onconstate que l’HMPAO est de plus en plus fréquemment remplacépar l’ECD pour l’obtention des SPECT critiques et, par voie deconséquence, des SPECT intercritiques (fig 8). La plupart des auteursjustifient leur attitude par le fait que le marquage de l’ECD restestable plus longtemps que celui de l’HMPAO et que sa préparationpeut donc être faite à l’avance. Mais aucun d’eux n’apporte lapreuve d’une réelle supériorité d’un traceur sur l’autre.

Signalons, pour terminer, les perspectives intéressantes offertes parles images SPECT obtenues avec l’iomazénil marqué au 123I. Commele flumazénil marqué au 18F utilisable en TEP, ce ligand desrécepteurs centraux aux benzodiazépines se fixe peu au niveau desfoyers épileptogènes. Plusieurs travaux préliminaires tendent àmontrer qu’il permet d’obtenir des foyers d’hypofixation plusintenses et plus focalisés que les foyers hypométaboliquesintercritiques de la TEP et que les foyers d’hyperperfusion critiquesde la SPECT [40], ouvrant de nouvelles perspectives, non seulementdans la localisation préchirurgicale des foyers épileptogènes, maisaussi dans la connaissance des mécanismes physiopathologiquessous-tendant les crises observées chez un patient donné.

L’épilepsie constitue incontestablement un domaine d’applicationprivilégié de la SPECT. Pour l’instant, les indications de cettetechnique sont limitées au problème très spécialisé du bilanpréopératoire des épilepsies rebelles au traitement médical. Grâceaux propriétés très particulières des marqueurs de perfusion, quipeuvent être préparés à l’avance et injectés au lit du malade, laSPECT s’est avérée supérieure à la TEP pour l’obtention des imagescritiques. Celles-ci sont actuellement considérées comme les imagesayant la meilleure valeur localisatrice. Des améliorations dans leuracquisition et leur utilisation pratique peuvent être raisonnablementattendues d’une meilleure connaissance des traceurs et de leursconditions d’administration, d’une diffusion plus large des meilleurstomographes et des procédés de traitement et d’interprétationd’image les mieux adaptés, et d’études évaluant leur intérêt dansles conditions de la pratique. Mais les perspectives les plusintéressantes sont celles que les ligands de neurorécepteurs ouvrent,dès à présent, dans l’étude des mécanismes physiopathologiques descrises directement chez l’homme.

SPECT ET MALADIES NEURODÉGÉNÉRATIVES

Les études SPECT des maladies neurodégénératives ont surtout étéconsacrées aux démences. Celles-ci sont aussi variées, au plan de laclinique et de la neuropathologie, que les maladiescérébrovasculaires. Mais rares sont celles qui n’ont pas fait l’objetd’au moins une étude SPECT. Une excellente revue générale [44] a étérécemment consacrée à ces travaux. Le plus souvent, les étudesSPECT ont suivi ou accompagné des études TEP et, chaque fois qu’ilen a été ainsi, les deux méthodes ont donné des résultats à peu prèssuperposables. Cette similitude de résultats concerne surtout lesmodifications locales de perfusion mises en évidence en SPECT etles modifications locales de métabolisme mises en évidence en TEPavec le désoxyglucose marqué au fluor 18F. D’une manière générale,les zones hypoperfusées correspondent aux zones hypomé-taboliques. Toutefois, les études comparatives directes des deuxméthodes dans une même population sont très rares. Citons celle deKuwabara et al [25], qui a confirmé la bonne concordancetopographique des anomalies TEP et SPECT, avec cependant unesurestimation des basses valeurs et une sous-estimation des hautesvaleurs SPECT, que les auteurs rapportent à la plus faible résolutionspatiale de cette dernière méthode. Actuellement, tout le mondes’accorde pour considérer que le couplage débit-métabolisme estconservé dans ces affections.

La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente des démences. Sesaspects SPECT ont pu être étudiés par de nombreuses équipes etsont aujourd’hui bien connus. Ils font l’objet de la première section.D’autres tableaux SPECT, plus ou moins caractéristiques, ont étéindividualisés. Ils concernent les démences frontotemporales, leshydrocéphalies à pression normale, les dégénérescences cérébralesfocalisées, comme les aphasies lentement progressives, les démencesmulti-infarcts et les démences à corps de Lewy. Leurs formestypiques sont décrites succinctement dans une deuxième section.Ces descriptions sont suivies d’une discussion d’ensemble del’intérêt pratique de la SPECT dans les démences, les deux dernièressections étant consacrées aux cas particuliers de la maladie deHuntington et de la maladie de Parkinson.

7 Épilepsie de l’aire motrice supplémen-taire gauche.A. Image de fusion imagerie par résonancemagnétique (IRM) T2/SPECT par 99mTc-ECD critique : hyperperfusion de l’airemotrice supplémentaire gauche. Dans lescas de ce type, les anomalies de perfusionorientent la résection chirurgicale, maisles explorations par électrodes profondessont encore indispensables.B. IRM postopératoire (unité de chirurgiede l’épilepsie, professeur Ph Coubes et pro-fesseur M Zanca, centre hospitalier uni-versitaire de Montpellier).

*A

*B

8 Épilepsie de l’aire auditive primaire droite. Images obtenues après injection de99mTc-ECD.A. En phase intercritique (coupe coronale) : hypoperfusion focalisée de la première cir-convolution temporale droite dans sa partie postérieure (gyrus de Heschl), avec hypo-perfusion thalamique en regard.B. En phase critique (coupe transverse) : hyperperfusion du gyrus de Heschl obtenueau cours d’un enregistrement sous électrodes profondes (unité de chirurgiede l’épilepsie, professeur Ph Coubes et professeur M Zanca, centre hospitalier univer-sitaire de Montpellier).

*A*B

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¶ SPECT et maladie d’Alzheimer

La maladie d’Alzheimer est, de toute la pathologie, l’affection qui abénéficié des études SPECT les plus nombreuses et les plusdiversifiées. Les résultats fournis par ces différentes étudesconcordent, en outre, étroitement avec ceux de la TEP. Il est doncaujourd’hui bien établi que l’image caractéristique de la maladied’Alzheimer, en SPECT comme en TEP, est celle d’unehypoperfusion et/ou d’un hypométabolisme des régionstemporopariétales (fig 9a, b, c, d, e) [1, 19, 30, 31, 35]. Cette image a étéretrouvée avec tous les marqueurs de perfusion cérébrale, sansexception. Dans tous les cas, elle a été décrite comme étant plusprécoce, plus étendue et plus intense que les images d’atrophielocalisée mises en évidence par la TDM ou l’IRM classique. Uneétude récente [15] a montré que la fixation d’un ligand des récepteursdes benzodiazépines, l’iomazénil, marqué au 123I, donnait desimages plus étendues et plus contrastées que celles obtenues avecl’HMPAO. Le plus souvent, ces anomalies de la perfusion et dumétabolisme sont bilatérales et asymétriques et s’observent chez despatients présentant un syndrome aphaso-apraxo-agnosique typique.Elles ont un caractère évolutif. Peu intenses et peu étendues audébut ou dans les formes peu évolutives, elles deviennent de plusen plus marquées et de plus en plus étendues. Dans les formesgraves ou anciennes, on observe fréquemment une hypoperfusionet/ou un hypométabolisme des régions frontales. Mais les quelques

études longitudinales qui ont pu être réalisées ont montré que, chezun patient donné, la zone la moins perfusée avait une topographieremarquablement stable du début à la fin de la maladie. Seuls lescortex primaires sont relativement épargnés. L’atteintehippocampique n’est mise en évidence que sur des plans de coupeparticuliers, avec des appareils de haute résolution spatiale. Maiselle pourrait se manifester sur les examens standards par unehypoperfusion centrale (fig 9k, l, m) dont la signification n’a pas étéclairement élucidée.

La valeur pronostique des anomalies SPECT a été étudiéerécemment. Il semble que les patients ayant les plus fortesréductions de la perfusion relative des lobes temporaux soient ceuxdont le déclin cognitif est le plus rapide [45], et que ceux qui ont lesplus fortes réductions de la perfusion relative de la région pariétaledroite soient ceux dont la survie est la plus courte [20].

On admet généralement, bien que cela n’ait pas été démontrédirectement, que la topographie des zones hypoperfuséescorrespond à celles des lésions anatomopathologiques. En revanche,l’étroite correspondance entre les anomalies SPECT et les anomaliesneuropsychologiques a été abondamment argumentée [44], surtoutdepuis l’amélioration de la résolution spatiale des appareils. Lesimages SPECT ont même été prises comme données de référencepour évaluer la valeur localisatrice de l’EEG dans la maladied’Alzheimer.

9 Démences dégénératives. Panorama des différents aspects topographiques obtenus dans le plan orbitoméatal OM + 5 (schéma en haut et à droite), après injection de 133Xe, dansune population de déments. L’hémisphère gauche est à gauche de l’image. Les hypoperfusions postérieures sont celles qui sont le plus fréquemment observées ; elles peuvent êtrebilatérales (a), prédominer à gauche (b) ou à droite (c), ou être associées à une hypoperfusion antérieure gauche (d) ou droite (e). Les hypoperfusions antérieures peuvent être bila-térales (f), ou prédominer à gauche (g) ou à droite (h). Plus rarement, on observe des hypoperfusions latéralisées à gauche (i) ou à droite (j), ou des hypoperfusions centrales, isolées(l), ou associées à une hypoperfusion gauche (k) ou droite (m) (Inserm U230, docteur JP Marc-Vergnes et docteur P Celsis, centre hospitalier universitaire de Toulouse).

Neurologie Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications 17-035-A-40

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¶ SPECT et autres syndromes démentiels

Au cours des dernières années, la diversité neuropathologique desaffections regroupées dans ce cadre a suscité de nombreuses étudesvisant à identifier des tableaux cliniques caractéristiques. Ces étudesont souvent été complétées par des études SPECT.

L’individualisation du groupe des démences frontales est celle qui ale plus bénéficié de l’apport de la SPECT. Dès le début des troubles,ces affections s’accompagnent d’une hypoperfusion et/ou d’unhypométabolisme des deux régions préfrontales (fig 9f, g, h) (fig 10).Par la suite, cette hypoperfusion s’accentue et s’étend aux pôlestemporaux. La SPECT a été utilisée pour essayer de distinguer lesdifférentes lésions histopathologiques responsables de ces tableauxcliniques. Ces tentatives ont donné des résultats contradictoires et,le plus souvent, peu convaincants.

Les aphasies isolées lentement progressives s’accompagnent d’unpetit foyer d’hypoperfusion de l’hémisphère gauche dont lalocalisation correspond assez étroitement à la symptomatologieclinique [10].

Dans les hydrocéphalies à pression normale, le débit sanguincérébral est diminué de façon globale, mais plutôt modérée [44]. Cettediminution est surtout marquée dans une vaste zone sous-corticalecentrale. Il existe aussi des anomalies de la perfusion corticale, detopographie variable d’un sujet à l’autre. Ces deux typesd’anomalies peuvent être associés chez un même patient ou, aucontraire, être observés de manière isolée. Ces troubles de laperfusion semblent correspondre aux troubles métaboliquesobservés en TEP. Les hypoperfusions et/ou hypométabolismescorticaux pourraient être le reflet de lésions vasculaires oudégénératives sous-jacentes, facteurs d’une évolution démentielleindépendante de l’hydrocéphalie, et la relative préservation de laperfusion corticale serait prédictive d’une bonne réponse à ladérivation ou à la soustraction du liquide céphalorachidien [44].Toutefois, après traitement, les améliorations de la perfusionconcernent aussi bien la zone sous-corticale que les régions corticaleset ces améliorations sont généralement corrélées à l’améliorationclinique [44]. Les mécanismes et la signification de ces constatationsn’ont pas encore été clairement élucidés.

Les démences multi-infarcts, considérées comme les démencesvasculaires les plus fréquentes, sont caractérisées par une évolutionpar poussées régressives, par la présence de signes cliniques et parla constatation de plusieurs infarctus corticaux distribuésaléatoirement sur les images TDM ou IRM. La SPECT donne desimages d’hypoperfusion ayant une topographie superposable à celledes lésions ischémiques et, généralement, une étendue plus grandeque ces dernières [1, 19, 30, 31, 35]. Ces images n’apportent pas unecontribution significative au diagnostic. Néanmoins, de nombreusesétudes SPECT ont été consacrées au diagnostic différentiel entre cetteaffection et la maladie d’Alzheimer. Les premières de ces études ontdonné des résultats contradictoires [1]. Le principal intérêt de laSPECT dans ce contexte pourrait être la mise en évidence d’unemaladie d’Alzheimer sous-jacente à une démence multi-infarct [41].Plus récemment, il a été montré que la démence à corps de Lewys’accompagnait d’une hypoperfusion postérieure bilatérale,comparable à celle observée dans la maladie d’Alzheimer, maissouvent plus étendue [43].

¶ Intérêt pratique des données SPECTdans le diagnostic des démences

Ces descriptions ont été faites, pour la plupart, à partir de groupesde patients sélectionnés en fonction de critères cliniquescaractéristiques. Ces groupes de patients n’ont pas toujours étécomparés à des groupes témoins et, lorsqu’ils l’ont été, ces témoinsétaient souvent des sujets normaux appariés en âge et sexe. Leshautes valeurs de sensibilité et de spécificité observées dans cesconditions ont une portée pratique limitée [44]. Elles n’ont pas étéretrouvées lorsque les comparaisons ont été faites entre groupes depatients [44].Peu de travaux neuropathologiques ont permis de valider cesconstatations cliniques. Des études de cas ont cependant montré quele pattern d’hypoperfusion temporopariétale uni- ou bilatéralepouvait être observé dans des cas de démence vasculaire, de maladiede Parkinson, d’intoxication oxycarbonée et d’encéphalomyopathiemitochondriale [44] et que le pattern d’hypoperfusion frontale isolée,tout en étant caractéristique de démence de type frontotemporal,pouvait traduire d’authentiques maladies d’Alzheimer, uneparalysie supranucléaire progressive, une maladie du motoneuroneou une démence vasculaire [44]. L’étude la plus importante [9] acomparé, chez 54 patients, le diagnostic SPECT au diagnostichistopathologique obtenu, 47,9 mois plus tard, soit par autopsie(51 cas), soit par biopsie (trois cas). Cette population comprenait, dupoint de vue histopathologique, 43 cas de maladie d’Alzheimer(pure dans 28 cas, associée à des corps de Lewy dans dix cas ou àdes infarcts multiples dans cinq autres cas), huit cas de lésionsdiverses (démence frontale, dégénérescence multisystémique,paralysie supanucléaire progressive, démence dysphasique...) et troiscas d’absence de lésion. Le diagnostic SPECT de maladied’Alzheimer a été celui de vrai positif dans 37 cas, de vrai négatifdans huit, de faux positif dans trois et de faux négatif dans neuf, cequi représente une sensibilité de 86 % et une spécificité de 57 %.Une étude clinique récente a permis de préciser la valeur de laSPECT dans le diagnostic étiologique des démences. Elle a étéréalisée par le groupe de Manchester [39] avec une population de363 déments consécutifs, suivis tous les 6 mois pendant 3 ans etrépartis en fonction de critères cliniques classiques en cinq groupesprincipaux : maladie d’Alzheimer (132 cas), démence vasculaire(78 cas), maladie à corps de Lewy (24 cas), démence frontotemporale(58 cas) et aphasie progressive (22 cas). Les 49 cas restantscomprenaient un petit nombre de paralysie supranucléaireprogressive, d’atrophie multisystémique, de maladie de Parkinsonidiopathique, de maladie de Huntington, d’encéphalopathie auto-immune, de maladie de Creutzfeldt-Jakob et d’hydrocéphalie àpression normale. Ils n’ont pas été inclus dans l’étude. Les imagesSPECT initiales, obtenues avec une gammacaméra tournante à unetête, après injection d’HMPAO, c’est-à-dire dans les conditions de lamédecine nucléaire standard, ont été classées visuellement en neufpatterns anormaux et un pattern normal, ce dernier étant observé

10 Démence frontotemporale. Images obtenues après injection de 99mTc-ECD.La présence d’une hypofixation sur quatre coupes consécutives illustre l’étendue des lé-sions (laboratoire de biophysique médicale et médecine nucléaire, professeur G Bou-vard, centre hospitalier universitaire de Caen).

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dans 21 cas (6,7 %). La probabilité de chacun de ces patterns decorrespondre à une des cinq formes de démence a été comparée,sous la forme d’un rapport (likelihood ratio), à celle de correspondreà chacune des quatre autres formes. Il a été montré que plusieurspatterns augmentaient significativement la probabilité pour unpatient d’avoir une ou plusieurs formes de démence, par rapport àla probabilité d’en avoir une ou plusieurs autres. Ainsi, unehypoperfusion bilatérale postérieure augmentait la probabilitéd’avoir une maladie d’Alzheimer par rapport à celle d’avoir unedémence vasculaire ou une démence frontotemporale, mais pas parrapport aux deux autres formes de démence étudiées. Unehypoperfusion bilatérale postérieure associée à une hypoperfusionunilatérale antérieure augmentait également la probabilité d’avoirune maladie d’Alzheimer par rapport à celle d’avoir une démencevasculaire ou une démence temporopariétale. Mais elle augmentaitaussi la probabilité d’avoir une maladie à corps de Lewy par rapportà celle d’avoir une des quatre autres formes de démence. Unehypoperfusion postérieure unilatérale augmentait la probabilitéd’une aphasie progressive par rapport à celle des autres formes dedémence. Une hypoperfusion antérieure bilatérale augmentait laprobabilité d’une démence frontotemporale par rapport à celle d’unedémence vasculaire ou d’une maladie à corps de Lewy. Mais elleaugmentait aussi la probabilité d’avoir une démence vasculaire, unedémence frontotemporale ou une aphasie progressive par rapport àla probabilité d’avoir une maladie d’Alzheimer. Un patternd’hypoperfusions multifocales augmentait la probabilité d’unedémence vasculaire par rapport à celle d’une maladie d’Alzheimer.Les autres patterns (hypoperfusion antérieure unilatérale, isolée ouassociée à une hypoperfusion postérieure unilatérale, hypoperfusiongénéralisée et pattern normal) n’apportaient aucune contribution àla différenciation des cinq formes de démence étudiées. Enfin, cesauteurs ont évalué la valeur pratique de la SPECT dans le diagnosticétiologique des démences à l’aide du pourcentage de résultatssignificatifs dans la comparaison des cinq groupes, pris deux à deux.La SPECT a permis de distinguer une maladie d’Alzheimer d’unedémence vasculaire et d’une démence frontotemporale dans plus de50 % des cas. Mais la différenciation entre maladie d’Alzheimer etdémence à corps de Lewy, d’une part, et entre démence vasculaire,démence frontotemporale et aphasie progressive d’autre part, n’aété possible que dans moins de 25 % des cas.Les conclusions de cette étude peuvent être reprises au terme de cechapitre. Même si les progrès techniques des tomographespermettent d’envisager une amélioration de ces résultats,l’utilisation de l’imagerie SPECT de perfusion, dans le diagnosticétiologique des démences, ne devrait être que sélective, dans les casdifficiles, en complément de l’évaluation clinique ettomodensitométrique.

¶ Cas particulier de la maladie de HuntingtonLa mise au point d’un test de diagnostic génétique fiable a conféré àla maladie de Huntington une place particulière parmi les maladiesneurodégénératives. Si ce test a l’avantage de permettre de rassurerdéfinitivement les descendants de malades qui ne sont pas porteursde l’anomalie génétique, en revanche il informe, longtemps àl’avance, ceux qui seront atteints à leur tour, alors qu’on ne peutleur proposer que des traitements expérimentaux. Cette situationpose avant tout des problèmes éthiques nouveaux. Mais elle inciteaussi à intensifier les recherches et les essais thérapeutiques. Dèslors, il devient extrêmement important de disposer de moyensd’investigation permettant de porter un diagnostic précoce, sipossible préclinique, de la maladie. Il serait, de plus, intéressantd’avoir des critères d’évaluation de l’état neurobiologique despatients.La TDM et l’IRM classique répondent mal à ces objectifs. Elles nevisualisent parfois l’atrophie caractéristique des noyaux caudés qu’àun stade relativement tardif. Quelques études TEP ont montré laprécocité de l’hypométabolisme glucidique des striatums, mêmechez des porteurs de gènes asymptomatiques, et la survenue plustardive d’un hypométabolisme du cortex frontal. Des résultatssuperposables ont été obtenus par plusieurs études SPECT [44].

L’hypoperfusion striatale accompagne, ou précède parfois, lasurvenue des troubles moteurs. Elle est toujours plus précoce queles signes d’atrophie visibles à la TDM ou à l’IRM. Leshypoperfusions corticales, qui prédominent dans les régionsfrontales et pariétales, sont plus tardives et généralement associées àla présence de troubles du comportement et/ou de déficits cognitifsobjectivés par les tests neuropsychologiques. Il a été suggéré parplusieurs auteurs que la SPECT pourrait fournir des critèresd’inclusion et d’évaluation dans les essais thérapeutiques portantsur la maladie de Huntington [44].

¶ Cas particulier de la maladie de Parkinson

En ce qui concerne les images SPECT, la maladie de Parkinson adeux particularités. La première est de ne pas présenter d’anomalienotable de la perfusion et la seconde d’être un modèle privilégiépour l’utilisation des ligands des récepteurs dopaminergiques.Sauf lorsqu’il y a évolution démentielle, les anomalies de perfusionobservées dans la maladie de Parkinson, qu’elles soient diffuses oulocalisées, sont peu marquées et mal systématisables. Toutefois, ilexiste une diminution de la réactivité vasculaire de l’aire motricesupplémentaire, au cours des épreuves d’activation motrice, chezles parkinsoniens en période off [34] et cette anomalie peut êtrecorrigée, en même temps que le ralentissement moteur, parl’administration de L-dopa ou d’agonistes dopaminergiques [34]. Cesconstatations n’ont pas d’intérêt clinique, mais elles ont permis demontrer que l’aire motrice supplémentaire jouait un rôle importantdans l’akinésie parkinsonienne et que, comme des observationsfaites chez le sujet normal l’avaient suggéré, elle intervenaitessentiellement dans la programmation des mouvements, alors quel’aire motrice primaire était plus directement impliquée dans laréalisation de celle-ci.Plusieurs ligands des récepteurs dopaminergiques (cf supra) ontdéjà été utilisés chez l’homme, avec des résultats encourageants maisvariables en fonction de l’affinité du ligand pour les transporteursde dopamine et de la rapidité de sa cinétique. Dans la maladie deParkinson, il existe un déficit de fixation de ces ligands au niveaudes noyaux gris centraux (fig 11). L’IPT marqué au 123I semble êtrele traceur le mieux adapté à la visualisation de cette anomalie [22]. Ildonne, en 2 heures, des résultats très discriminants entre sujetsnormaux et parkinsoniens, qu’il s’agisse du simple rapport entrefixation spécifique et fixation non spécifique, facile à utiliser enclinique, ou de paramètres dynamiques dérivés des courbes deradioactivité en fonction du temps, mieux adaptés à des étudesphysiopathologiques [22]. L’intérêt de ces résultats dans le diagnosticprécoce de la maladie et dans le traitement de la maladie reste àpréciser.Ces deux exemples illustrent les potentialités de la SPECT en tantque technique d’imagerie fonctionnelle permettant la mise enévidence de mécanismes physiopathologiques en pratiqueneurologique.

SPECT ET TUMEURS CÉRÉBRALES

Bien que l’oncologie soit un des champs d’application les plusprivilégiés des techniques de médecine nucléaire [7, 42], l’intérêt de laSPECT dans la détection, la gradation et l’évaluation du pronosticdes tumeurs cérébrales n’a pas encore été clairement établi. Iln’existe sur ce sujet, ni méta-analyse, ni revue générale.Une des causes de cette incertitude est que ces tumeurs sontrelativement peu fréquentes et, en même temps, très diversifiéesdans leurs caractéristiques histopathologiques et leur pronostic. Dece fait, les populations réunies jusqu’à présent, même pour les plusfréquentes d’entre elles, comme les gliomes, n’ont pas étésuffisamment nombreuses pour se prêter à des études structuréescomparables à celles qui ont permis d’évaluer l’apport réel de laSPECT dans la prise en charge des démences (cf supra).Une autre difficulté est qu’on ne dispose, pour l’instant, d’aucunmarqueur véritablement spécifique de ces tumeurs et que lestraceurs de débit, qui ont été à la base des études SPECT de la

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plupart des affections cérébrales, ont donné, dans les tumeurs, desrésultats sans portée pratique réelle ou difficiles à interpréter. Ainsi,du point de vue hémodynamique, le seul apport de la SPECT a étéde confirmer que les méningiomes sont significativement plusperfusés que les gliomes et presque toutes les autres tumeurscérébrales. Dans les autres situations, la fixation tumorale del’HMPAO, de l’ECD ou de l’isopropyl-iodoamphétamine se faitselon un éventail de valeurs bien plus large que celui de la fixationnormale. Mais aucune relation n’a pu être mise en évidence entre ledegré de perfusion global d’une tumeur et un paramètre d’intérêtclinique, comme notamment le degré de malignité. Ceci estprobablement dû à la complexité des troubles circulatoires observésdans les tumeurs, celles-ci associant souvent, au sein d’une mêmelésion, des zones hyper- ou hypovascularisées, des zonesœdématiées et/ou des zones de nécrose. Toutefois, cette hypothèsen’a jamais été confirmée ni en SPECT, ni même en TEP.

Les seuls résultats offrant des perspectives pratiques ont été obtenusavec des marqueurs « métaboliques » comme le 201Tl [37], le sesta-MIBI marqué au 99mTc [4] et, plus récemment, l’α-méthyltyrosinemarquée au 123I [21]. Ces résultats sont assez concordants pour qu’ilsoit raisonnable de penser qu’au moins un de ces traceurs devraitprendre place dans la prise en charge de ces tumeurs. Mais leursindications respectives sont encore loin d’avoir été codifiées.

Pour être utile dans la prise en charge des tumeurs cérébrales, unetechnique d’imagerie doit pouvoir apporter des réponses pratiquesaux trois questions classiques et essentielles qui sont celles de leurdétection et de leur localisation, de leur gradation histologique et deleur pronostic, et de la détection de leur récidive.

¶ Détection et localisation des tumeurs cérébrales

Que ces tumeurs soient primitives ou secondaires, les techniques dechoix, pour les détecter et les localiser, restent bien évidemment lestechniques d’imagerie morphologiques classiques que sont la TDMet l’IRM. Avec les tomographes monophotoniques actuels cependant,ces différents traceurs permettent de visualiser les tumeurs ayantune taille supérieure à 5 mm. La valeur localisatrice de ces imagesest encore en discussion : bien que leur résolution spatiale soit moinsbonne que celle des images morphologiques classiques, ellespourraient être plus informatives que ces dernières sur l’extensiondes tumeurs infiltrantes. Nous avons déjà vu, à plusieurs reprisesau cours de cet exposé (cf supra), que les images SPECT étaientgénéralement plus étendues que les images TDM et IRM. Mais uneétude comparative récente [37] a montré que la fixation du 201Tl avaitune étendue comparable à celle de la prise de contraste en IRM,alors que la fixation de la méthionine marquée au 11C donnait lesimages les plus étendues, et le FDG 18F les images les moinsétendues. Ces différences de fixation, qui peuvent maintenant êtreétudiées en SPECT (cf supra), offrent des perspectives intéressantesdans la difficile évaluation de l’infiltration des tumeurs gliales.

¶ Gradation histologique et pronostic des tumeurs

Principal élément du pronostic, cette gradation histologique reposeaujourd’hui sur la biopsie stéréotaxique multiple, examen invasif(même si ses risques sont actuellement réduits) et ne couvrant pasavec certitude la totalité de la lésion malgré la multiplicité desprélèvements. Plusieurs études ont montré que le taux de fixationtumorale du 201Tl permettait de distinguer les gliomes de bas et dehaut grade avec une spécificité de l’ordre de 90 %. Une comparaisonrécente [37] des taux de fixation tumorale du 201Tl, en SPECT, de laméthionine marquée au 11C et du FDG marqué au 18F, en TEP, a misen évidence le pouvoir discriminant nettement supérieur duthallium, ce dernier étant le seul traceur permettant de séparer lestumeurs de grade III de celles de grade IV. D’autres étudessuggèrent qu’à lésions histologiques identiques, il pourrait y avoirune corrélation négative entre le taux de fixation du thallium et ladurée de survie, notamment dans les glioblastomes. Toutes cesdonnées font penser que la SPECT pourrait être utilisée, commel’IRM et la TEP, comme guide pour les biopsies cérébrales.

De plus, il semble que la SPECT puisse permettre une analyse desprocessus physiopathologiques impliqués dans le développementdes tumeurs. Ainsi, le sesta-MIBI marqué au 99mTc identifierait laprésence de la glycoprotéine P, expression du gène MDR-1 derésistance aux drogues [4], alors que la fixation de l’iodo-α-méthyltyrosine marquée au 123I serait corrélée, non à la densitécellulaire, mais à l’activité proliférative évaluée histochimiquementpar le nombre relatif de cellules exprimant l’antigène nucléaireKi-67 [26].

¶ Détection des récidives

La détection de ces récidives et leur diagnostic différentiel avec lafibrose postopératoire et/ou la radionécrose constituent un autrechamp d’application potentiel de la SPECT. Les techniquesd’imagerie morphologique ont des performances très limitées dansce domaine. Il a été abondamment montré que la TEP, au FDGmarqué au 18F ou à la méthionine marquée au 11C, permettait unedétection et une différenciation précoces de ces récidives.Parallèlement, plusieurs études SPECT ont montré que la fixationdu 201Tl ou de sesta-MIBI marqué au 99mTc (fig 12)étaitsignificativement augmentée dans les récidives tumorales, alorsqu’elle était le plus souvent absente dans les lésions de radionécrose.Des résultats encore plus encourageants ont été obtenus avec l’iodo-α-méthyltyrosine marqué au 123I [27], qui a donné une sensibilité de78 % et surtout une spécificité de 100 % dans le diagnostic derécurrence chez 27 patients (18 de haut grade et neuf de bas grade)atteints de gliome.

11 Maladie de Parkinson.A, B. Images de coupe transverse au niveau des noyaux gris centraux, obtenues aprèsinjection de â-CIT (2â-carbométhoxy-3â-[4-iodophényl]-tropane) marqué à l’ 123I.A. Sujet normal : fixation striatale symétrique.B. Patient atteint d’un hémiparkinson gauche débutant : fixation normale au niveaudu noyau caudé et du putamen gauches, hypofixation au niveau de la tête du noyaucaudé droit, absence de fixation au niveau du putamen droit (service de médecine nu-cléaire, professeur JP Esquerré, centre hospitalier universitaire Purpan, Toulouse).C. Image très comparable, obtenue après injection de 123I-PE2I chez une patiente pré-sentant un tremblement de l’hémicorps droit depuis 2 ans et une akinésie bilatérale pré-dominant à droite depuis 9 mois : fixation conservée sur la tête du noyau caudé droit,absence de fixation de la partie postéro-inférieure du putamen droit, diminution de lafixation sur la tête du noyau caudé gauche. À noter, la fixation non spécifique sur lescalp (service de médecine nucléaire, professeur JL Baulieu, centre hospitalier univer-sitaire de Tours et Inserm U316, professeur L Pourcelot, Tours).

*A *B

*C

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SPECT ET AFFECTIONS CÉRÉBRALES DIVERSES

Les travaux rapportés dans le présent chapitre sont moins biendocumentés que ceux qui ont fait l’objet des chapitres précédents.Pour chaque affection considérée, on ne dispose le plus souvent quede quelques articles dont les résultats ne sont pas toujoursparfaitement concordants, voire même d’un seul article. Toutefois,ces résultats nous ont paru devoir être rapportés succinctement carils constituent un ensemble assez cohérent et contribuent à situerl’intérêt et les limites de la SPECT cérébrale.Dans les traumatismes crâniens, les anomalies SPECT sont plusprécoces, plus étendues et plus nombreuses que les lésionsscanographiques, mais leur signification ne sont pas claires. Dansles traumatismes légers, des anomalies SPECT ont été observées enl’absence de toute lésion scanographique et IRM ; il s’agit toujoursde zones d’hypoperfusion et l’étendue de ces zones pourrait êtrecorrélée à la gravité clinique du syndrome postcommotionnel. Dansles traumatismes plus sévères, caractérisés par la présence de signesde contusion, d’hémorragie et/ou d’encéphalomalacie à la TDM ouà l’IRM, la littérature fait état de zones hyper- ou hypoperfusées.Jusqu’à présent, il n’a pas été possible de distinguer, parmi cesanomalies, celles qui correspondaient à des lésions irréversibles etcelles qui correspondaient à un simple dysfonctionnement cérébral.Toutefois, une diminution globale du débit sanguin cérébral seraitgénéralement associée à un mauvais état clinique et les patientsayant les anomalies SPECT les plus nombreuses et les plus étendues,ainsi que les anomalies affectant le tronc cérébral, sembleraient avoirun plus mauvais pronostic que ceux qui ont des lésions moinsnombreuses et moins étendues. Dans les états végétatifs persistants,une diminution globale du débit cortical serait un signe de mauvaispronostic, alors que la présence de déficits localisés ne serait pasforcément indicatrice d’un pronostic favorable.Le sida (syndrome de l’immunodéficience acquise) s’accompagnefréquemment d’une hypoperfusion corticale diffuse, accompagnéeou non de zones d’hypoperfusion plus marquée dans le cortex, lesous-cortex et la substance blanche. Dans certains cas,l’hypoperfusion périventriculaire simule l’existence d’une dilatationventriculaire nettement plus importante que celle que la TDM oul’IRM met en évidence. L’importance de ces hypoperfusions a étédécrite comme étant corrélée à la sévérité de la démence, ce qui n’aguère d’intérêt pratique. En revanche, la SPECT pourrait être utilepour affirmer l’existence d’une atteinte cérébrale organique chez dessujets ayant une sérologie VIH (virus de l’immunodéficience

humaine) positive et présentant des troubles légers de l’attention,des symptômes modérés de dépression ou de psychose, sans signeneurologique associé et sans anomalie visible à la TDM ou à l’IRM.Ces anomalies SPECT et les troubles neuropsychiques dont ellesseraient le substratum seraient réversibles sous traitement. Enfin,dans une série de patients sidéens présentant une masse prenant lecontraste à l’IRM, une technique SPECT de double traceur (201Tl etsesta-MIBI marqué au 99mTc) a permis de différencier, dans 91,7 %des cas, les lymphomes cérébraux des lésions bénignes d’origineinfectieuse. Dans tous les cas, les deux traceurs ont donné desrésultats concordants, les index d’asymétrie étant cependant pluscontrastés avec le sesta-MIBI qu’avec le thallium.

Des études plus ponctuelles ont été réalisées dans d’autres maladiesinfectieuses. Au cours de la phase initiale de l’encéphaliteherpétique, lorsque la TDM est encore normale, plusieurs auteursont rapporté une hyperfixation d’HMPAO contrastant, danscertaines études, avec une hypofixation d’ECD dans le lobe temporalaffecté. Dans la maladie de Lyme, des hypoperfusions focalisées ontété observées dans le cortex et le sous-cortex des régions frontalesde patients présentant des signes objectifs d’atteinte neurologique,mais pas d’anomalie visible à l’IRM. Ici aussi, une régressionpartielle mais significative des zones hypoperfusées et des signescliniques a été rapportée quelques mois après un traitementantibiotique. Toujours dans la maladie de Lyme, des troublesfocalisés de la perfusion ont également été rapportés chez despatients présentant des symptômes neuropsychiques sanssubstratum organique mais ayant déjà reçu, pour certains, untraitement antibiotique ; ces troubles seraient cependant plusmodérés que ceux qui caractérisent les patients ayant des signesneurologiques d’organicité.

Plusieurs études ont été consacrées aux anomalies de la perfusioncérébrale au cours des maladies auto-immunes. Qu’il s’agisse delupus érythémateux disséminé ou de syndrome de Sjögren, lesdéficits de perfusion sont généralement modérés, mais plusfréquents et plus étendus, une fois de plus, que les anomaliesobservées en TDM ou en IRM. La manière d’exprimer ces anomaliesfait encore l’objet de discussion, l’interprétation visuelle simple desimages ayant tendance à sous-estimer la fréquence deshypoperfusions focalisées et à méconnaître les hypoperfusionsdiffuses qui seraient systématiques dans le lupus érythémateuxdisséminé. Pour certains, les lésions frontales seraient les plusfréquentes ; pour d’autres, ce seraient les lésions pariétales. Mais

12 Astrocytome fibrillaire central et précentral gauche.Récidive (apparition de troubles du langage et modificationdes données neuromorphologiques) après radiothérapie ex-terne. En haut : coupes axiales. En bas : coupes coronales. Àgauche : distribution du sesta-MIBI (méthoxy-isobutyl-isonitrile). Au centre : imagerie par résonance magnétiquesans produit de contraste. À droite : fusion des deux images(unité d’imagerie fonctionnelle cérébrale, professeur MSteinling, centre hospitalier régional universitaire de Lille).

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tous s’accordent pour décrire l’existence de lésions des noyaux griscentraux, moins fréquentes toutefois que les lésions corticales. Unebonne concordance entre ces anomalies de perfusion et les troublescognitifs évalués par tests psychométriques a été systématiquementrapportée. Des améliorations de la perfusion cérébrale, parallèles àl’amélioration clinique, ont été décrites chez des patients souscorticothérapie. Il semblerait qu’il n’y ait pas d’anomalie SPECTdans la sclérodermie, mais le nombre de patients étudiés estactuellement trop faible pour permettre une conclusion.Plusieurs études portant sur les manifestations neurologiques de lamaladie de Behçet ont montré que la SPECT à l’HMPAO permettaitde mettre en évidence un plus grand nombre de lésions focaliséesque l’IRM, les lésions SPECT étant constituées de foyersd’hypoperfusion dans la substance grise, surtout dans le cortexcérébral, mais aussi dans les noyaux gris centraux et le cortexcérébelleux, alors que les lésions IRM étaient faites de signauxhyperintenses dans la substance blanche. Les deux méthodesd’imagerie seraient donc complémentaires dans l’évaluation deslésions cérébrales dues à la maladie de Behçet.Pour terminer, signalons les quelques rares cas de mutismeakinétique observés, après intoxication par le CO ou méthotrexate,et rapportés comme caractérisés par une hypoperfusion massive deslobes frontaux, des noyaux centraux et du thalamus, selon unetopographie évoquant une atteinte neurotoxique des voiesdopaminergiques.Il ressort de toutes ces données que les images de perfusioncérébrale fournies par la SPECT ont une grande sensibilité,supérieure à celles de la TDM et de l’IRM, mais qu’elles manquentde spécificité et de résolution spatiale. Actuellement, la grandesensibilité de la SPECT repose sur le fait que toute altération dufonctionnement cérébral, qu’elle soit réversible ou irréversible,semble s’acccompagner d’une modification circulatoire. Cetteadaptation très fine de la circulation à l’état du parenchyme qu’elleirrigue suggère que les images pathologiques observées dans laplupart des affections générales pourraient précéder lesmanifestations cliniques de ces affections et être utilisées pour ledépistage et la prévention de leurs complications cérébrales. Lafaible spécificité de la SPECT s’explique, elle aussi, par le fait quecette imagerie n’est bien souvent aujourd’hui qu’une imagerie deperfusion, ne pouvant prendre que deux formes, hypo- ouhyperperfusion. Mais elle s’explique aussi par la survenue, àdistance des lésions, d’anomalies circulatoires liées non à la naturede ces lésions mais à leur topographie. Ces phénomènes dedéafférentation et de diaschisis jouent un rôle non négligeable dansl’étendue des images SPECT et doivent être bien connus pour éviterdes erreurs d’interprétation. Le plus fréquent de ces phénomènes, lediaschisis cérébelleux croisé, décrit et bien étudié en TEP, estfréquemment retrouvé en SPECT.Quant au manque de résolution spatiale, même s’il est en grandepartie corrigé avec les nouveaux tomographes « trois têtes », il faitque, en raison de la primauté accordée aujourd’hui à la valeur

localisatrice des images, la SPECT n’est pas considérée comme uneméthode de visualisation de première intention.

ConclusionMalgré son antériorité technique, la SPECT cérébrale a été la dernièredes grandes techniques d’imagerie 3D à avoir acquis ses indicationscliniques spécifiques. Celles-ci sont liées à l’utilisation de marqueurs deperfusion dont la fixation cérébrale reste stable pendant suffisammentde temps pour permettre leur injection au lit du malade et l’acquisitiondes images correspondantes en temps différé. Ceci est particulièrementutile dans les situations comme la phase initiale des accidentsischémiques cérébraux et les crises d’épilepsie. Dans ces deux domaines,la SPECT cérébrale est supérieure à toutes les autres techniquesd’imagerie et pourrait s’avérer particulièrement intéressante pourporter certaines indications thérapeutiques. Même si ces indicationssont peu nombreuses (thrombolyse et autres traitements d’urgence de laphase initiale des accidents, chirurgie de l’épilepsie focalisée), ellesjustifient l’implantation d’un appareillage adéquat et d’une équipecompétente dans les centres procédant à ces traitements.Dès à présent, les neurologues devraient donc encourager les médecinsnucléaires à choisir, lors du renouvellement de leur équipement, destomographes « trois têtes » bien adaptés à l’utilisation cérébrale, et àmettre en place des procédures de contrôle de qualité rigoureuses. Maisils doivent aussi s’impliquer dans la mise en œuvre de chacune desapplications qu’ils souhaitent utiliser et, notamment, dans le choix desradiotraceurs, des méthodes de traitement et de visualisation desdonnées. Cette mise en œuvre ne peut être que multidisciplinaire carelle nécessite une grande rigueur méthodologique dans l’utilisation del’appareil et de chaque radiotraceur particulier et, en même temps, descompétences spéciales en mathématiques pour le traitement des donnéeset en physiopathologie pour l’interprétation des résultats.Cette spécificité de chaque application et la multidisciplinarité qu’ellenécessite se retrouvent dans les situations chroniques, comme lesaffections neurodégénératives et les tumeurs dans lesquelles la SPECTest actuellement en mesure de fournir des résultats tout à faitsuperposables à ceux de la TEP. Si les données extraites de l’étude de laperfusion cérébrale n’ont encore qu’une portée clinique limitée, lespossibilités récentes offertes par le désoxyglucose marqué au 18F et,surtout, par les molécules marquées au 123I, acides aminés et ligands deneurorécepteurs, qui sont de plus en plus nombreuses à pouvoir êtreutilisées chez l’homme, pourraient déboucher assez rapidement sur denouvelles indications pratiques, justifiant alors l’installation de sitespropres de SPECT cérébrale.

Remerciements. – À la mémoire de Niels A Lassen, sans qui la SPECT cérébrale ne serait pas

devenue ce qu’elle est aujourd’hui. Je tiens à remercier aussi le docteur P Celsis, directeur de

recherche à l’Inserm, pour les travaux effectués en commun sur ce thème et pour sa relecture

du texte. Je remercie enfin les professeurs JL Baulieu, I Berry, G Bouvard, P Coubes, JP

Esquerré, L Pourcelot, M Zanca, M Steinling et G Viallard, IE à l’Inserm, pour leur contribution

à l’iconographie de cet article.

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Neurologie Principaux aspects techniques et pratiques de la SPECT cérébrale. Résultats et indications 17-035-A-40

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