1907 177 MepPeutOnEtreChretien.indd 2 29/08/19 15:00€¦ · Mais comment bien discerner ? Où s’arrête la vraie recherche ... caprices, ils iront se chercher une foule de maîtres

1907_177_MepPeutOnEtreChretien.indd 2 29/08/19 15:00

Peut-on être chrétien

et embrasser les arbres ?

DOMINIQUE PÉROT-POUSSIELGUE

Préface du frère Thomas Joachim

LES CHRÉTIENS

FACE AUX NOUVELLES SPIRITUALITÉS



À cette génération nouvelle qui se lève pour préserver la planète : qu’elle reste debout pour creuser ses aspirations spirituelles !

À tous ces jeunes d’aujourd’hui et de demain, en quête de repères : qu’ils trouvent, chacun, leur cap intérieur. Qu’ils sachent discerner pour éviter les écueils malsains, les lieux où la vie est niée, les personnes sans espérance !



Préface

À l’âge de 20 ans, j’ai croisé, un jour, un jeune de mon âge, à genoux devant un arbre. Amusé, je lui ai demandé avec un brin d’ironie : « tout va comme tu veux ? ». Il m’a répondu d’un air grave : « God is Nature… » Avec du recul, je me dis que sa réponse était peut-être plus intéressante que je ne le pensais alors. Quel rapport, en effet, existe-t-il entre Dieu et la nature dans son ensemble ? La nature est-elle divine du fait qu’elle procède du Créateur ? Peut-on, par elle, se connecter au Seigneur ? Pourquoi pas, finalement, « embrasser les arbres » ou, au moins, prier devant eux ?

En nous introduisant au cœur de la forêt des « nouvelles spiritualités », le livre de Dominique Pérot-Poussielgue a pour but de nous aider à opérer un discernement. À travers un survol allant de la méditation de pleine conscience à l’occultisme, en passant par le reiki ou le druidisme, il nous permet d’être plus lucides sur les enjeux, les intérêts et les dangers de certaines pratiques en vogue.

Le discernement est capital pour l’évolution de la vie spirituelle de chacun. En effet, quand le démon voit qu’il ne peut pas étouffer l’aspiration profonde de quelqu’un, il cherche au moins à la faire dévier afin qu’elle ne porte pas de 

9


Peut-on être chrétien et embrasser les arbres ?

fruit ou qu’elle devienne toxique . Comme l’indique Jésus dans la parabole du semeur, quand la vie spirituelle se développe à côté du droit chemin, le diable arrive aussitôt et « s’empare de ce qui a été semé dans le cœur. » (Mt 13,18).

Mais comment bien discerner ? Où s’arrête la vraie recherche spirituelle et où commence l’ésotérisme ? À partir de quand passe-t-on de la vraie mystique au « bizarre » ? Comment savoir si telle pratique relève d’une simple gymnastique conduisant au bien-être, ou si elle n’est pas déjà une sorte de jeu dangereux avec les forces obscures du monde invisible ? Si l’on cherche à développer sa vie spirituelle, il faut être particulièrement vigilant, car il est très facile de passer « du mauvais côté de la Force ». C’est pourquoi les repères de bon sens que nous donne ici Dominique Pérot-Poussielgue sont précieux.

Deux types de discernement critique sont opérés dans ce livre. À l’égard de certaines pratiques, notamment de tout ce qui relève de l’occultisme, le jugement est légitimement tranchant : de telles pratiques sont incompatibles avec la vie chrétienne et dangereuses pour l’équilibre psychologique. Mais à l’égard d’autres pratiques, comme la méditation de pleine conscience, le discernement est plus nuancé. Deux excès sont évités : le rejet en bloc de tout ce qui nous est étranger, et l’accueil naïf de « n’importe quoi ». Tâchant d’entrer au cas par cas dans le champ sémantique de chaque pratique étudiée, l’auteure situe bien leurs niveaux respectifs et permet de répondre, à chaque fois, à la question de savoir dans quelle mesure un chrétien peut accueillir ou non ces propositions.

Une image revient sans cesse tout au long de l’ouvrage :

10


PRÉfacE

celle de l’arbre. L’arbre, par sa verticalité et son lien avec le sol, ressemble à l’homme. Ce n’est pas pour rien que l’aveugle guéri par Jésus commence par dire : « J’aperçois les gens : ils ressemblent à des arbres que je vois marcher. » (Mc 8,24). Mais l’aveugle doit apprendre à mieux regarder : l’homme est, en fait, l’inverse de l’arbre. En ce sens, comme l’écrit saint Thomas d’Aquin, dans la Somme de théologie : « L’homme, doué de la position verticale, reste extrêmement éloigné des plantes. En effet, l’homme tient sa partie supérieure, la tête, tournée vers le haut du monde, et sa partie inférieure vers le bas du monde ; et c’est pourquoi il est disposé au mieux, selon la disposition de l’univers. Au contraire, les plantes ont leur partie supérieure tournée vers la partie inférieure du monde, car les racines correspondent à la bouche, et elles ont la partie inférieure tournée vers le haut. Les bêtes, elles, se trouvent dans une situation intermédiaire, car la partie supérieure de l’animal est celle par laquelle il prend la nourriture, et la partie inférieure, celle par laquelle il élimine le surcroît de nourriture. » Notre rapport à la nature, aux plantes, aux animaux et aux anges, doit se maintenir dans l’ordre voulu par le Créateur. Lorsque l’on commence à confondre Dieu et la nature, le souci des animaux et celui des hommes, la connexion aux forces astrales et la vraie mystique, on sombre inévitablement dans une dangereuse confusion. Puisse ce livre contribuer à aider les hommes attirés par le Seigneur à s’orienter vers lui avec sagesse et discernement.

Frère Thomas JoachimCommunauté Saint-Jean



Introduction

« Un temps viendra où les gens ne supporteront plus l’enseignement de la saine doctrine ; mais, au gré de leurs caprices, ils iront se chercher une foule de maîtres pour calmer leurs démangeaisons d’entendre du nouveau. »

2 Timothée 4, 3

À raison de dix minutes par jour, voire une heure hebdomadaire, le yoga ou la méditation de pleine conscience, apanage des bouddhistes, sont entrés à part entière dans nos emplois du temps chargés. Le feng-shui, le reiki, les soins énergétiques, les cristaux et autres pendules imprègnent de plus en plus nos maisons, nos esprits et nos corps, pour les  nettoyer  ou  les  purifier.  Les  trentenaires,  notamment, peuvent parler chakras, mantras ou karma autour d’une bière, comme d’autres parlent météo ou actualité. Les druides, les guérisseurs, les marabouts ou les magnétiseurs sont davantage connus, davantage respectés, davantage accueillis. C’est un fait.

Dans la lignée des générations passées – dont certaines se targuaient de partager de façon mondaine des séances

13



de spiritisme pour faire parler le grand-oncle tandis que d’autres allaient très régulièrement consulter une voyante pour prendre des décisions ou quêtaient l’intervention d’un rebouteux –, certains jeunes, en fin de lycée ou au début de leurs années étudiantes, n’ont aujourd’hui d’autres référent que leur chaman… C’est un fait là aussi.

L’attirance pour l’au-delà, la recherche des esprits, les interrogations sur l’existence du diable, le besoin de réponses ont toujours existé, la plupart du temps recouverts d’un voile de mystère, de peur ou d’inconnu. Certaines pratiques qui étaient auparavant étiquetées comme « ésotériques » sont dorénavant communément admises comme du développement personnel, du développement spirituel ou du bien-être. Il existe une grande porosité entre ces disciplines, techniques ou approches du ressourcement. Ce qui était très cloisonné, école par école, pays par pays, a peu à peu glissé et les frontières se sont atténuées, voire dissoutes. Alors comment expliquer la démocratisation actuelle de ces tendances ?

Est-ce bon ou non ? Est-ce une avancée positive pour nos sociétés occidentales ? L’homme en est-il grandi ? Parvient-il à sortir de son anthropocentrisme grâce à l’exploration de traditions ancestrales, la plupart en lien avec la nature ? Comment appréhender ce glissement progressif vers de nouvelles pratiques ? Comment comprendre que des rituels auparavant secrets et lourds de symbolismes – parfois même proches d’une forme de satanisme, puissent devenir « grand public » et toquent aux portes de nos aspirations humaines ?

14


INTRODUcTION

Que recherchent donc toutes ces personnes qui se prêtent, pour sourire ou pour survivre, à de nouvelles expériences spirituelles ?

Beaucoup de ces orientations spirituelles sont en lien avec la nature et rejoignent, au fond, un vrai besoin d’enracinement. Renouer avec le végétal, revenir au cœur des forêts, aller à la rencontre des arbres, que ce soit en les entourant de ses bras ou en buvant des tisanes ou des élixirs divers et variés… De nos jours comme dans les années 1960-1970 par exemple, le retour à la nature n’est qu’une image d’Épinal de ce mouvement profond, de cette quête d’absolu à laquelle l’homme prête l’oreille de son cœur. De son âme ?

Que faire avec cela ? Comment avancer ?C’est toute la question du chrétien dans le monde. Comment

un chrétien peut-il s’y retrouver ? Cette quête de sens est-elle la sienne ? A-t-il un rôle à jouer ? Ou à ne surtout pas jouer ? La partition du bonheur vendue à travers la popularisation de toutes ces spiritualités concerne-t-elle le baptisé ? Être dans le monde mais pas du monde… Doit-on être chrétien sans embrasser les arbres ? Peut-on être chrétien et embrasser les arbres ?



cHaPITRE 1

Méditation zen, yoga, pleine conscience…

appelons un chakra un chakra !

« Fermez les yeux, inspirez tranquillement. Concentrez-vous sur votre souffle. Laissez-vous imprégner par l’instant. Derrière vos paupières, vous voyez la pièce où vous êtes, la façon dont vous vous tenez, si vous êtes assis ou debout, les parties de vos pieds ou de vos jambes qui sont appuyées contre le sol. Redressez votre dos, inspirez profondément, laissez l’air entrer en vous, tranquillement, et ressortir, tout simplement. Sentez votre poitrine ou votre ventre qui se soulève et qui s’abaisse. Restez quelques secondes en silence, et puis, doucement, ouvrez les yeux. »

Début d’un cours de yoga ou de gym ? Entrée en matière d’une séance de méditation ? Introduction à la prière d’un groupe de parents de la paroisse ou d’une aumônerie de jeunes ? Qui sait ?

17



MÉDITaTION zEN, yOGa, PLEINE cONScIENcE… aPPELONS UN cHakRa UN cHakRa !

MÉDITER OU RÉaPPRENDRE À RESPIRER

La mise en présencePrendre quelques instants pour respirer, se détendre,

évacuer le stress d’une journée ou les préoccupations matérielles… cela vous paraît-il aberrant de commencer votre prière de cette façon ? Certains le font déjà. Cela s’appelle une mise en présence. L’idée, toute simple au fond, est de créer un climat de paix et de douceur pour se mettre en disposition d’accueil. On ne peut pas, en un clignement de paupière, passer de notre vie rythmée et dense à une prière intérieure de qualité. L’être humain a besoin de moments de transition. Et l’apprentissage de petites méditations et respirations peut permettre cela. Quelle merveille ! Cette proposition est tout à fait adaptable et personnalisable. Il pourrait s’agir d’un premier niveau, simple et souple, pour toucher du doigt la similitude qui peut exister entre un moment de prière chrétienne et un moment de méditation de pleine conscience.

Quid de la « méditation de pleine conscience » ?Christophe André, psychiatre éminemment connu pour

ses recherches et ouvrages autour de la méditation de pleine conscience,  livre  sa  définition  :  « S’arrêter  et  observer,  les yeux fermés, ce qui se passe en soi (sa propre respiration, ses  sensations  corporelles,  le flot  incessant des pensées) et autour de soi (sons, odeurs). Seulement observer, sans juger, sans attendre quoi que ce soit, sans rien empêcher d’arriver à son esprit, mais aussi sans s’accrocher à ce qui y passe. C’est

19



tout. C’est simple. C’est la méditation de pleine conscience. Et c’est bien plus efficace que cela ne pourrait le paraître aux esprits pressés ou désireux de se contrôler. » 1

Le père de la méditation de pleine conscience, ou mindfullness meditation, est le docteur Jon Kabat-Zin, biologiste et médecin américain, qui a travaillé sur la réduction du stress et des troubles immunitaires à partir de la méditation. Cette pratique, qu’il met lui-même en œuvre en la rapprochant du bouddhisme, notamment à travers le yoga, s’est répandue, élargie, distordue parfois. Mais si l’on en revient à l’intention, elle peut être un apport riche.

Car il ne s’agit pas d’une technique de relaxation. C’est un exercice qui demande de l’attention, une forme d’exigence. En cela, la méditation de pleine conscience peut se rapprocher de la tradition bouddhiste. « [Elle] est la qualité de conscience qui émerge lorsqu’on tourne intentionnellement son esprit vers le moment présent. C’est l’attention portée à l’expérience vécue et éprouvée, sans filtre (on accepte ce qui vient), sans jugement (on ne décide pas si c’est bien ou mal, désirable ou non), sans attente (on ne cherche pas quelque chose de précis). » 2

Ici et maintenantLors d’un voyage en Inde en 2010, un groupe de jeunes

proches de la communauté Saint-Jean, partis à la découverte des philosophies bouddhistes, a partagé un moment assez

1. Christophe André, Cerveau et Psycho n°41, septembre-octobre 2010.2. Christophe André, dossier : la méditation de pleine conscience, Cerveau et psycho n°41, septembre-octobre 2010.

20



étonnant. Une rencontre avec un moine bouddhiste qui – grâce à un interprète – proposait une séance de méditation basée sur le souffle. Tout passait par là. Les jeunes devaient fermer les yeux et se concentrer sur leur respiration, sans bouger, sans parler, aussi longtemps que possible. Le moine leur avait alors dit : « Si un oiseau passe dans la pièce, intègre l’oiseau à ton souffle, à ta respiration. »

Cette consigne de sagesse, pour aider à garder sa concentration, se rapproche beaucoup de ce qui peut se présenter lors d’une prière contemplative, d’une oraison ou d’une adoration. Le père Antoine d’Augustin l’expliquait lors d’une cession d’école d’oraison. Si notre esprit dévie de notre prière, ne pas chercher à contrer cette distraction, mais l’intégrer à notre prière, en faire une prière. Quelle différence ? Pourquoi un chrétien n’y trouverait-il pas son compte ? Non pas en appliquant une technique inconnue et en la pratiquant de façon calquée sur sa propre oraison, mais en réfléchissant à ce qui peut être bon, à ce qui peut lui ouvrir l’esprit, lui offrir un moment de paix, lui proposer une approche plus originale, plus intérieure ou plus personnelle. La pleine conscience, pour schématiser, c’est le hinc et nunc, le « ici et maintenant » du chrétien. Savoir être pleinement en soi, en cohérence, en harmonie. Certains pourraient parler de carpe diem, pourquoi pas ?  Le  tout  est  de  savoir  qui  bénéficie  de  ce  moment d’ancrage. Quel est le but de cette pleine conscience ?

Le but ultime, c’est la paix de l’individu, sa sérénité, son mieux-être.

21



Testez votre pleine conscience 1

Vous pouvez avoir une idée de votre prédisposition à la pleine

conscience en répondant aux questions suivantes par : presque

toujours, très souvent, assez souvent, assez peu, rarement ou

presque jamais.

1. Je peux vivre une émotion et m’en rendre compte seulement

après un certain temps.

2. Je renverse ou brise des objets par négligence ou par

inattention, ou parce que j’ai l’esprit ailleurs.

3. Je trouve difficile de rester concentré sur ce qui se passe au

moment présent.

4. J’ai tendance à marcher rapidement pour atteindre un lieu, sans

prêter attention à ce qui se passe ou ce que je ressens en chemin.

5. Je remarque peu les signes de tension physique ou d’inconfort,

jusqu’au moment où ils deviennent criants.

6. J’oublie presque toujours le nom des gens la première fois

qu’on me les dit.

7. Je fonctionne souvent sur un mode automatique, sans vraiment

avoir conscience de ce que je fais.

8. Je m’acquitte de la plupart de mes activités sans vraiment y

faire attention.

9. Je suis tellement focalisé sur mes objectifs que je perds le

contact avec ce que je fais au moment présent pour y arriver.

1. Test issu du dossier : « La méditation de pleine conscience », Cerveau et psycho n°41 septembre-octobre 2010.

22



10. Je fais mon travail automatiquement, sans en avoir une

conscience approfondie.

11. Il m’arrive d’écouter quelqu’un d’une oreille, tout en faisant

autre chose dans le même temps.

12. Je me retrouve parfois à certains endroits, surpris et sans savoir

pourquoi j’y suis venu.

13. Je suis préoccupé par le futur ou le passé.

14. Je me retrouve parfois à faire des choses sans être totalement

présent à ce que je fais.

15. Je mange parfois machinalement, sans avoir véritablement

conscience que je suis en train de manger.

À chaque question si vous avez répondu par :

- Presque toujours, comptez 1 point

- Très souvent, comptez 2 points

- assez souvent, comptez 3 points

- assez peu, comptez 4 points

- Rarement, comptez 5 points

- Presque jamais, comptez 6 points.

faites la somme de vos points et divisez par 9. Vous

obtiendrez, sur dix, votre score de prédisposition à la pleine

conscience. celle-ci sera d’autant meilleure que ce score sera

élevé.

23



yOGa, zEN, JEÛNE : UN RESSOURcEMENT ?

Le fameux chakra…« Les chakras seraient des centres énergétiques du

corps humain. […] Il en existerait sept principaux […]. Ils présideraient sur le plan occulte aux échanges d’énergie entre […] le microcosme humain et le macrocosme considéré comme divin. » 3

En plus accessible, retenons que le terme « chakra » vient du yoga, du bouddhisme, et désigne les centres d’énergie du corps. Au nombre de 7, ces centres nous permettent de connaître les points d’ancrage de notre enveloppe corporelle. Ils peuvent remplir une fonction tant physique que psychique et leur équilibre entre eux est primordial pour nous.

De pratiques en philosophies, quel voyage nous est proposé ?Lorsque  l’on  parle  de  « zen »,  il  faut  savoir  que  l’on  file 

droit  sur  le  Japon  et  ses  influences  bouddhistes.  Pour  être synthétique, voire lapidaire, il s’agit d’une question de posture (le « zazen ») nécessaire à la pratique de la méditation.

Lorsque l’on parle de « yoga », le cap est mis sur l’Inde. Cette discipline est bien connue du grand public. Connue car pratiquée, bien souvent chez soi ou en cours collectifs, mais peu approfondie dans sa dimension philosophique, voire « religieuse ».

Il en va de même du jeûne. Le chrétien connaît le jeûne et le pratique un peu, beaucoup ou passionnément selon les

3. https://final-age.net/2006/04/chakra/

24



tempéraments, la saison ou les motivations ! Mais le jeûne est considéré par le grand public comme une pratique « détox » liée au bien-être, à la santé, à son régime alimentaire…

Ces trois écoles sont intéressantes à ce titre : elles sont pratiquées bien souvent à l’aveugle, ou, pourrait-on dire, de  façon  incomplète,  superficielle par  rapport  à  ce qu’elles recouvrent en réalité.

Alexandre Jollien, philosophe et écrivain suisse connu pour sa bienveillance, sa joie et la facilité avec laquelle il a su tirer, de son handicap, une richesse philosophique, propose sur son site une citation à propos du zen 4. Cela donne un commencement d’éclairage : « L’objectif de notre pratique est essentiellement de nous éveiller à notre vrai Soi. Ce vrai Soi ne peut être perçu. Il est vaste et sans limite. S’éveiller à son vrai Soi peut aussi se dire s’éveiller au “non-Soi” ou au “non-esprit”, ou à la “vacuité”, ou bien “oublier son ego”. Aucune chose, être humain inclus, n’est jamais figée dans le même état d’instant en instant. »

Ces philosophies préconisent, au-delà d’un simple régime, d’une posture ou d’une gymnastique, de faire le vide en soi, non pas pour se relier plus profondément à ce que l’on est ou à Celui avec lequel nous souhaitons communiquer (en tout cas pour le chrétien), mais pour cette vacuité même.

Se vider de soi, s’absenter à soi-même… cela va-t-il jusqu’à se nier ? se renier ? Tout est affaire de proportions, bien évidemment, et les spécialistes en parlent avec bien plus

4. www.alexandre-jollien.ch

25



Propos croisés et témoignages-rencontres éclairants :

LE MOINE ET LE LaMa 1

Organisé par le sociologue et historien des religions frédéric

Lenoir, cet ouvrage propose un dialogue entre dom Robert Le

Gall, moine bénédictin et ancien père abbé de l‘abbaye Sainte-

anne-de-kergonan (actuel archevêque de Toulouse), et Lama

Jigmé Rinpoche, un moine tibétain de l’école kagyupa qui a fui

son pays natal, le Tibet, en 1959 et a pris en 1974 la responsabilité

du centre de Dhagpo kagyu Ling, en Dordogne.

Deux maîtres spirituels, chrétien et bouddhiste, pleinement

enracinés dans leur tradition respective, répondent à des

questions aussi diverses et profondes que : Le bonheur est-il le

but ultime de la vie humaine ? comment expliquer le mal ? Que

peut-on dire de Dieu ou de l’absolu ? Qui sont Bouddha et Jésus

1. Dom Robert Le Gall, Lama Jigma Rinpoché, Le Moine et le Lama, Entre-tiens avec Frédéric Lenoir, Paris, Fayard 2001.

de finesse, mais  toujours est-il que  le  chrétien,  face à cette philosophie du vide intérieur, pourrait se sentir bien perplexe sans doute. Comment concilier ce désir du vide, avec tout ce que nous cherchons en Christ pour nous « remplir », faire sens en nous, nous apporter la plénitude ? Comment alors réconcilier notre enveloppe corporelle avec les chemins de notre esprit, les désirs de notre cœur, de notre âme ?

26



et quel est l’essentiel de leur message ? y a-t-il quelque chose

après la mort ? comment prier et comment méditer ? En quoi

consistent le salut chrétien et le salut bouddhiste ? Qu’est-ce

que l’homme et quel est le sens de sa vie ?

En des termes accessibles à des non-initiés, ce livre met

l’accent sur les points communs et les divergences essentielles

entre ces deux grandes voies spirituelles. L’idée n’est pas de

prendre parti mais de s’y retrouver, de faire le point, de façon

objective et fine.

TROIS aMIS EN QUÊTE DE SaGESSE 2

ce livre propose une rencontre entre un philosophe, un moine

bouddhiste, et un psychiatre, chacun d’eux ayant une aura assez

importante dans leurs univers respectifs. Trois personnalités,

trois « maîtres » à penser, un gros succès en librairie.

Le principe même de ce livre est tout à fait révélateur des

questionnements de notre temps. Réunir des penseurs de

renom pour proposer au grand public une réflexion profonde et,

si possible, non orientée d’un point de vue confessionnel, reflète

l’étendue des préoccupations d’aujourd’hui.

ces trois personnes ont pris le temps d’une retraite commune

pour se poser des questions et essayer, ensemble, d’y répondre.

Elles ont eu le souci de ne pas aborder de front des thématiques

purement religieuses : Quelles sont nos aspirations les plus

profondes ? comment développer notre capacité au bonheur

2. Christophe André, Alexandre Jollien, Matthieu Ricard, Trois amis en quête de sagesse, Paris, L’Iconoclaste / Allary Editions, janvier 2016.

27



La plupart du temps, dans les ouvrages pratiques proposés au grand public, l’idée est d’apporter au lecteur des repères utiles pour son quotidien, de lui proposer des petits exercices, des « rituels » courts qui puissent être intégrés à un rythme de vie dense. La tendance est donc de proposer des recettes, des solutions rapides et faciles à mettre en œuvre. Pour beaucoup, il s’agit de chercher surtout une pratique, un sport, un rythme, avant même de  réfléchir  à  une philosophie,  un état de  vie, etc. Mais cela peut changer, et radicalement. Certains en font l’expérience lorsqu’ils décident de passer des « 5 minutes par jour consacrées à la médiation » à « une semaine au vert ».

Parlons retraite spirituelle !Si, un jour, vous cherchez à vous retirer du monde pendant

un long week-end ou même une semaine, et que vous ne connaissez  pas  de  lieu  spécifique,  vous  irez  peut-être  vous renseigner sur internet.

Tapez sur votre moteur de recherche préféré les termes « retraite spirituelle ». Vous serez surpris – ou non, d’ailleurs – par le nombre de propositions qui s’offrent à vous.

Du château perdu dans la campagne, à la cabane en forêt en passant par une structure d’accueil au cœur des Alpes, tout est

et à l’altruisme ? comment diminuer notre mal-être ? comment

vivre avec les autres ?

Pour chaque sujet abordé, les trois « maîtres » racontent leur

expérience, les leçons apprises, et proposent des conseils.

28



possible, tout est faisable, pourvu que l’on sache un peu tout de même où l’on met les pieds, et que l’on en ait les moyens !L’offre pléthorique est un très bon reflet des tendances de 

notre société : séjour cocon, du temps pour soi, des conseils sur mesure ou un accompagnement personnalisé, du calme, une activité tournée vers la nature, une nourriture saine et sobre, un cadre porteur, des participants de tous horizons mais un groupe restreint.

Quelle différence avec une retraite spirituelle chrétienne ? Eh bien ! Sur le papier, peu de choses : l’esprit est très proche. Vous avez besoin de paix, de sérénité pour un temps d’introspection ou simplement de déconnexion. Ce besoin est finalement assez commun et bien des personnes autour de nous aspirent à un temps pour elles, un endroit où se laisser porter, où recevoir.

Reste à savoir quelle démarche spirituelle est proposée dans les divers lieux fourmillant sur internet. Parce que vous pouvez tout à fait vous inscrire pour un stage de méditation de pleine conscience qui vous fera davantage de bien que trois jours dans un monastère bénédictin ; cela dépend de votre besoin, de vos attentes. Certains vont aller marcher une semaine dans les Causses lors d’un goum (voir ci-dessous), d’autres préféreront le duo « jeûne et randonnée » 5 devenu une grande mode et dont la publicité est faite dans tous les salons consacrés aux spiritualités, à la nature, etc. Quelle différence, au fond ? Posons-nous la question !

5. Sur le site www.ffjr.com, site de la Fédération française de jeûne et randonnée, on trouve des propositions de tout type, avec des organisateurs aux compétences variées : naturopathie, yoga, relaxation, psychothérapie, danse, massages… Attention à bien discerner !

29



Témoignage de Xavier Hermesse, goumier depuis plus de vingt ans

En matière « d’évasion » et de démarche spirituelle, j’ai la

faiblesse de penser que les goums ont été précurseurs. Nos raids

sont nés il y a cinquante ans cette année, à une époque où le

tourisme de masse commençait à peine et où les trails, treks et

autres pèlerinages au désert n’existaient pour ainsi dire pas.

c’est l’intuition géniale de Michel Menu, catholique et ancien

scout, d’avoir su rassembler, pour les jeunes de 20 à 35 ans, dans

une seule semaine de marche au long cours, les ingrédients

d’une aventure authentique prenant en compte toutes les

dimensions de l’être humain.

car le raid goum concourt à un seul objectif : dans un monde

éclaté, aux rythmes infernaux, refaire l’unité de notre personne !

Je dirais que c’est là la marque de fabrique et la spécificité

des raids goums au regard des autres propositions. Il s’agit de

travailler à l’unité de la personne dans ses quatre dimensions :

- unité physique, par la marche au long cours, 6 à 8 heures par

jour ;

- unité psychique, par le silence et la beauté des grands

espaces, nos nuits à la belle étoile, le détachement de nos petites

servitudes quotidiennes telles que tabac, argent, téléphone…

- unité relationnelle, par la vie fraternelle et le service de son

prochain, en petites tribus nomades de 15 ou 20 goumiers ;

- unité spirituelle enfin, clé de voûte de l’expérience au

30



désert, par le dépouillement, la méditation et l’Eucharistie

quotidienne.

La richesse de l’aventure goum procède de cette

complémentarité : certains nous rejoindront pour un

« décrassage physique » au sortir d’une période d’examens

mouvementée et découvriront, en cours de route, nos relations

fraternelles authentiques. D’autres viendront chercher le silence

et le repos de l’esprit plus que la spiritualité et, au détour d’une

messe, se laisseront toucher par la grâce de la rencontre…

Quelques-uns encore s’inscriront pour un tranquille pèlerinage

et repartiront avec la fierté d’avoir tenu le coup physiquement

à l’issue de ces quelques cent cinquante kilomètres sac au dos…

Personne ne repartira indifférent. Beaucoup même reviendront !

J’ai personnellement fait cette découverte au fil des

raids : j’étais venu en « boy-scout » au sortir de mes années

d’encadrement, venant chercher une prolongation de ces

années-là. J’y ai découvert un accomplissement de toutes ces

années de service, une foi et un engagement plus adulte, une

spiritualité plus dépouillée, une vision du monde sereine et

remplie d’espérance, une envie de transmettre et d’entraîner le

plus grand nombre au désert ! Et une liberté adulte et totale.

Oui, les goums sont une expérience de liberté ! 1

1. Pour en savoir plus : http://www.goums.org.

31



ET DIEU DaNS TOUT Ça ?

Question de vocabulaire ou réelle différence ?À propos de méditation, prenons quelques instants pour

chercher des équivalences dans le vocabulaire ou les pratiques chrétiennes. Parlons, par exemple, de la prière de méditation, de la prière contemplative, de l’oraison, de l’oraison contemplative, de l’adoration… C’est fou tout ce qui existe !

L’idée n’est pas de trouver absolument une case pour chaque chose. Il ne s’agit pas, pour chaque religion, de pratiquer le même exercice en le nommant d’une façon spécifique afin d’y apposer sa marque. Cela n’aurait pas de sens ! Ce n’est pas une compétition et le but n’est pas de coller des étiquettes, bien entendu.

Alors tâchons de prendre un peu de hauteur et de ne pas nous astreindre à des comparaisons enfantines, quoique compréhensibles. Cela rassure, de confronter les points de vue ou les pratiques tout en se disant que nos méthodes sont certainement les meilleures.

La respiration spirituelle du chrétienSe mettre en présence. Se mettre en silence. « Le silence

ne s’importe pas. Il est là où nous sommes », disait Madeleine Delbrêl 6. Nous avons le silence en nous. Et c’est le cadeau que peut nous offrir la méditation : redécouvrir ce silence en nous. Se recentrer non pas sur notre petite personne, l’idée n’est pas là, mais sur ce qu’il y a de riche, de beau, de simple, de naturel en nous. Et quoi de plus naturel qu’une respiration ?

6. Madeleine Delbrêl, La joie de croire, éditions du Seuil, 1968.

32



Quoi de plus simple qu’un cœur qui égrène fidèlement son chapelet biologique ? Nous pouvons nous mettre à l’unisson du monde, dans un tempo universel, celui du corps, de notre enveloppe charnelle. C’est un des liens les plus forts que nous ayons avec nos frères. Notre finitude, notre corporéité sont les signes de notre appartenance au grand bal de l’humanité.

Exercice pratique : 3 minutes de respiration spirituelle 1

commencer par retrouver le sens de sa respiration.

En inspirant, j’accueille le don que Dieu me fait de la vie.

En expirant, je rends à Dieu ce qu’il m’a donné : le souffle de

la vie.

chaque matin au lever et chaque soir au coucher, faire un

exercice de respiration profonde, afin d’être au contact de soi,

des autres et de Dieu.

1. Test issu de l’article « Dix conseils pour progresser dans la prière », www.lacroix.com, novembre 2010.

33



Où désirons-nous aller ?Ne pas perdre de vue le sens. Au-delà de la forme, de la

technique, de la méthode, de l’exercice, c’est l’objectif qui compte. Et quel est l’objectif du chrétien ? Apprendre à bien prier ? Pourquoi pas. Cocher les bonnes cases des pratiques spirituelles ajustées ? Peut-être… Être heureux au cœur de sa relation avec Dieu ? Sûrement !

Le chrétien a soif de communiquer avec Dieu, d’établir une relation, de lui parler, d’être en lien avec sa Personne divine. Et pourquoi ne pas se mettre à l’unisson du souffle créateur, du souffle de l’Esprit ? « L’homme est fait de la matière du monde créé,  et  prend  vie  et  autonomie  grâce  au  souffle  de  Dieu. Ce souffle  traverse  toute  la Bible,  il  inspirera  les patriarches et les prophètes de l’Ancien Testament. Ce souffle saint sera donné en plénitude à la Pentecôte sur les disciples de Jésus-Christ. […] Ce souffle saint ou Saint-Esprit n’a rien à voir avec l’énergie ou les énergies de la nature ou du cosmos, car il vient de Dieu […]. » 7

Alors cherchons ce bonheur ! Et soyons aussi assurés d’une chose : les chrétiens ne sont pas les seuls à courir après le bonheur ! Chaque être humain porte en effet ce besoin au plus profond de son essence humaine. Alors en quoi la quête du chrétien peut-elle être différente ?

7. https://sosdiscernement.org/le-reiki-reflexions-pour-un-discernement/Bertran Chaudet, décembre 2018

34



Petit repère de bon sens

aVaNT TOUT : SE faIRE DU BIEN ?

Il n’y a aucun problème à vouloir se faire du bien… toutes

proportions gardées, toute œillère retirée et tout filtre activé,

certes !

Si vous avez envie de pratiquer la méditation, allez-y,

n’attendez pas le Jugement dernier ni la bénédiction de votre

grand-mère. abandonnez-vous au Seigneur, faites-lui confiance

et faites-vous plaisir !

certains se font du bien en pratiquant l’art-thérapie, par

exemple, comme expression de leur foi, outil pour travailler la

théologie ou moments de ressourcement spirituels. Sœur Sylvie

Mériaux le dit sur son site à propos des mandalas, ces cercles

symboliques à colorier qui nous viennent des rituels liés aux

divinités hindoues : « avant même de comprendre ce qu’est

un mandala, j’ai fait l’expérience du bien-être qu’il permet

de retrouver. Être dans l’instant présent, vivre l’intériorité, se

recentrer, se laisser habiter par un refrain en écho à un verset

biblique. Je crois que c’est un chemin de méditation, de prière

qui met en présence du Seigneur ! » 1 Jolie proposition, en effet !

Tout est une question de prisme, de point de vue, de posture

et de volonté. Dit ainsi, cela peut sembler simple, mais c’est un

travail d’ajustement permanent pour broder sa vie intérieure,

tout en finesse, sans trop glisser vers des écueils « spirituels »

parfois bien tentants.

1. https://mandalasbibliques.org

35



C’est une bonne chose de se retrouver, de s’écouter, de s’accueillir et d’aller mieux. Quel beau programme, déjà ! On pourrait dire, sans trop d’exagération, que c’est le travail de toute une vie. Cela représente un chemin de progression que tout un chacun – surtout chrétien – devrait avoir à cœur de parcourir. Certes, mais l’intérêt est d’aller un cran plus loin, de ne pas s’arrêter là. Ce serait tellement dommage d’avoir fait tout ce chemin, de s’être donné tant de peine et de rester finalement  au  seuil  de  la  maison  commune.  Vers  quel  but l’homme – d’autant plus s’il est chrétien – peut-il aller ?

La QUÊTE D’UN aUTRE RaPPORT aU MONDE ?

Quel besoin profond nous anime ?La question est posée dans le dossier « La méditation de

pleine conscience » 8 à propos de nos besoins fondamentaux : « Introspection, calme, lenteur, continuité… Alors que nos conditions de vie tendent à nous priver de ces opportunités, nous imposant toujours plus de sollicitations, d’interruptions, d’agitation, il est peut-être salutaire que les pratiques méditatives nous aident aujourd’hui à éprouver une présence au monde fondée sur le recul et le ressenti non verbal : une forme de conscience attentive et tranquille… »

Le chrétien n’aurait-il pas ces mêmes besoins ? N’aurait-il pas nécessité, lui aussi, à retrouver un monde ferme, présent,

8. Cerveau et psycho n°41, septembre-octobre 2010.

36



ancré ? Pourquoi ne serait-ce pas un socle bienvenu pour sa foi, pour son rapport à Dieu ? Pourquoi pas ? Se pourrait-il que le chrétien puisse, d’une façon juste, saine et mesurée, avoir besoin de la richesse et de l’appui de techniques qui ne sont pas d’emblée associées à sa religion pour grandir ? Serait-il inconvenant d’imaginer que l’homme-chrétien puise autour de lui ce qui est bon dans le monde, aille à la rencontre des cultures, des rites et des traditions pour comprendre son prochain, saisir les voyages intérieurs de chacun, respecter ces sensibilités et s’en abreuver ? N’est-ce pas ainsi que l’homme se construit ? N’est-ce pas ainsi que le chrétien évolue, de siècle en siècle, en interrogeant toujours plus profondément sa foi, ses rites et ses dogmes ?

Il ne s’agit pas, bien évidemment, de changer pour changer, ou de faire évoluer les choses à tout prix. Bien au contraire ! L’Église est sage et sait avancer en son temps, surtout de nos  jours,  pour  réfléchir  aux  problématiques  du  monde d’aujourd’hui, pour se reposer les questions de ses pratiques, de ses besoins, de ses objectifs.

Faire la part des choses entre sa foi et les spiritualitésSi au cours des stages, retraites, animations, ateliers, sorties

ou autres découvertes organisées par les paroisses, une séance de méditation zen vous est proposée, pourquoi ne pas essayer ? Vous savez de façon bien factuelle et objective que le zen n’est pas chrétien, soit. Mais l’ouverture d’esprit n’est pas mauvaise pour autant.

Si ce n’est pas votre tasse de thé, passez-la avec discernement à votre prochain, il pourra goûter un peu de

37



cette sagesse si cela lui correspond davantage. Certains s’y mettent volontiers et en toute connaissance de cause, comme ce frère dominicain qui, sur l’invitation d’une salariée du couvent de La Tourette, à Évreux, propose des « sessions de zen » depuis 1986 à des chrétiens ou non-chrétiens pour que chacun puisse creuser son besoin d’intériorité 9 ! Le frère Bernard Durel anime également des retraites, comme celle sur le thème « Surpris par la joie. Assise dans l’esprit du zen » où il propose aux participants de s’initier de façon posturale à la méditation zen mais dans une pratique chrétienne. Beau défi !

Savoir où l’on met les pieds…Essayons  de  réfléchir  en  tant  que  chrétien  ancré  et 

responsable.  Le  discernement  est  la  clé  de  cette  réflexion. Le  père  Verlinde  est  passé  par  cette  difficile  épreuve  de  la tentation, des mauvais choix comme il en a témoigné en 1996 déjà : « Lorsque j’ai rencontré la méditation transcendantale, j’avais abandonné toute pratique religieuse. J’étais alors chercheur en chimie nucléaire et j’ai décidé de suivre mon gourou en Inde où j’ai passé de longs séjours dans son ashram des Himalayas. À la suite d’une expérience spirituelle forte, j’ai redécouvert Jésus et suis revenu en Europe. » 10

Voilà l’écueil. Et certains sont singulièrement vicieux, comme l’explique à nouveau le père Verlinde, en prenant

9. www.couventdelatourette.fr10. Témoignage du Père Marie-Joseph Verlinde, Il est Vivant n°125, juin 1996.

38



comme exemple la « méditation chrétienne » de John Main dans les années 1970 :

« La soi-disant “méditation chrétienne” diffusée par le moine bénédictin John Main, puis par son disciple Laurence Freedman, n’est en fait qu’une tentative de “christianiser” une technique de méditation orientale. 11 » Le mot « Maranatha », perdant tout son sens hors de son contexte, est en effet utilisé comme « mantra chrétien » à la place d’un dieu hindou. Le père Verlinde indique la différence importante qui existe entre la rencontre spirituelle chrétienne avec Dieu, et l’expérience proposée à travers cette intériorisation inspirée de l’hindouisme avec un mot mantra qui ne sert que de prétexte : « Il ne s’agit pas de méditer sur son contenu, mais de s’en servir pour focaliser l’attention, puis progressivement de laisser s’apaiser l’activité mentale, pour finir par la suspendre totalement. Il s’agit donc d’une technique d’intériorisation, conduisant à une expérience de son propre psychisme ; mais en aucun cas une telle expérience ne peut être qualifiée de spirituelle. 12 »

Et encore : « Une tentative analogue avait été entreprise, il y a une dizaine d’années, par Daniel Maurin avec son Oraison du cœur, dans laquelle il transcrivait mot à mot l’initiation à la méditation transcendantale (Maharishi Mahesh Yogi), ne changeant que le mantra oriental en un mantra issu de la tradition judéo-chrétienne, gardant inchangée l’intégralité de la technique hindoue. 13 »

11. https://final-age.net/2006/08/la-meditation-chretienne-de-john/12. ibid13. ibid

39



Restons vigilants. « Veillons et prions… »

« Dans le cœur, il peut y avoir un feu mauvais et amer qui sépare de Dieu et conduit loin de lui pour toujours. Il peut y avoir aussi un bon feu qui sépare du mal et conduit à Dieu et à la vie avec lui pour toujours. Ce feu-là, les moines le feront donc passer dans leurs actes avec un très grand amour. Voici comment : […]. Personne ne cherchera son intérêt à lui, mais plutôt celui des autres. […] Ils ne préféreront absolument rien au Christ. Qu’il nous conduise tous ensemble à la vie avec lui pour toujours ! »

Règle de saint Benoît, extraits du chapitre 72.


Table des matières

Préface 9 Introduction 13

Chapitre 1 : Méditation zen, yoga, pleine conscience… appelons un chakra un chakra ! 17Méditer ou réapprendre à respirer ................................... 19

La mise en présence ...................................................... 19Quid de la « méditation de pleine conscience » ? ...... 19Ici et maintenant ............................................................ 20

Yoga, zen, jeûne : un ressourcement ?.............................. 24Le fameux chakra… ....................................................... 24De pratiques en philosophies, quel voyage nous est proposé ? ........................................................................ 24Parlons retraite spirituelle ! ........................................... 28

Et Dieu dans tout ça ? ........................................................ 32Question de vocabulaire ou réelle différence ? .......... 32La respiration spirituelle du chrétien ............................ 32Où désirons-nous aller ? ................................................ 34

La quête d’un autre rapport au monde ? ......................... 36Quel besoin profond nous anime ? .............................. 36

155



Faire la part des choses entre sa foi et les spiritualités ........................................................... 37Savoir où l’on met les pieds… ...................................... 38

Chapitre 2 : Magnétiseurs, druides, chamans, de nouveaux maîtres à penser ? 41Les influences populaires… influentes jusqu’où ? ........... 43La tradition populaire : les influences de la lune ......... 43Sourciers et baguettes .................................................. 45

Besoin de guérison extérieure… et intérieure ! .............. 46Des guérisseurs aux magnétiseurs ............................... 46Tout est une question d’énergies ! .............................. 48Chaman : le nouveau coach, ersatz du père spirituel ? ........................................................................ 52« Maître » : ascendant ou accompagnant ? ................. 54

Il y en aura pour tout le monde ! ...................................... 56Que dire des dons de guérison ? ................................. 57Peut-on parler de charisme ? ........................................ 58Un combat spirituel ? ..................................................... 59

Chapitre 3 : Culte de la nature et… Création ! 65Ces amis de la nature… ..................................................... 67

Les druides ..................................................................... 67Chuchoter aux arbres : l’art du tree whispering .......... 70Un « bain » de nature au cœur des arbres ................... 71

La recherche est simple : se faire du bien ! ...................... 73« Des illuminés ! » .......................................................... 74

156


REMERcIEMENTS

Rétablir la connexion : « néo paysans et permaculture » ........................................................... 75

Besoin de concret : entre exercice pratique et prière ..... 77Des pratiques contrastées ............................................ 77Des paroisses engagées ............................................... 78

Prier dans, pour, avec la nature ......................................... 82Dans la nature, s’installer en prière .............................. 82Pour la nature, se mettre en prière ............................... 85Avec la nature, décorer sa prière .................................. 86

La Création .......................................................................... 87Au commencement… la Genèse ................................. 87La permaculture, un chemin chrétien ? ........................ 90Le « jardin du monde » .................................................. 91

Chapitre 4 : Reiki, qi-gong, énergies et compagnie : exotismes ou déviances ? 95Inde, Japon, Chine, Mexique, Amérique… des influences venues d’ailleurs ? ..................................... 97

Les accords toltèques au Mexique ............................... 97Le reiki au Japon ............................................................ 99Le qi-gong en Chine ...................................................... 101Le feng-shui en Chine.................................................... 102L’ayurvéda en Inde ......................................................... 105Une ouverture d’esprit et de cœur ? ............................ 107

Creuser encore et encore ? ................................................ 108Plus cela vient de loin, plus c’est mystérieux ? ............ 108Le besoin de reconnexion à soi : le danger de l’ego . 109Le discernement essentiel ............................................ 110

Les dangers ......................................................................... 113

157


Peut-on être chrétien et embrasser les arbres ? REMERcIEMENTS

Et la relation à Dieu dans tout ça ? ................................... 116La réponse du chrétien : une prière holistique ................ 117

S’impliquer corps et âme .............................................. 117Harmonie bénie ! ........................................................... 120

Chapitre 5 : Pendules, cristaux et autres magies angéliques… des esprits charismatiques ? 125L’occultisme ......................................................................... 127

Une quête de spiritualité ............................................... 127Aucune transcendance .................................................. 128

Pendules et tarots ............................................................... 128Vouloir devenir maître de sa vie ................................... 128Osciller entre devenir maître de sa vie et se maîtriser face à la tentation .......................................................... 129

Lithothérapie ....................................................................... 131Un bonheur minéral ? .................................................... 131Une « éponge » qui se gorge de nos énergies négatives ........................................................................ 132Loin des techniques médicales .................................... 132Un horoscope ? .............................................................. 133

Le « chœur » des anges… .................................................. 134Angélique ? .................................................................... 134Une « piété » qui se popularise .................................... 135Ange gardien ................................................................. 135Bon ange et mauvais ange ? ......................................... 136

Se méfier des esprits ! ........................................................ 136Une dépendance malsaine ........................................... 136Il est bon d’avoir peur.................................................... 139

Un peu plus à l’ouest… les repères du chrétien .............. 140

158


REMERcIEMENTS

Loin de nous le chaos ! ................................................. 140Connaître ses racines et s’y référer .............................. 140

Le positionnement du Chrétien ........................................ 142Catéchisme de l’Église catholique (n° 2115-2118) ...... 142

Conclusion 145Bibliographie 147Petit glossaire 151Remerciements 153


Documents

1907 177 MepPeutOnEtreChretien.indd 2 29/08/19 15:00€¦ · Mais comment bien discerner ? Où s’arrête la vraie recherche ... caprices, ils iront se chercher une foule de maîtres