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L’évaluation en counseling d’orientation l’orientation : évaluer ou tester ? en pratique Exercice professionnel de l’orientation Évaluer les causes de l’indécision Évaluation et employabilité Enjeux liés à l’utilisation des tests Historique et problématiques de l’évaluation 2 NUMÉRO décembre 2004

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L’évaluation en counselingd’orientation

l’orientation : évaluer ou tester ?

en pratiqueExercice professionnelde l’orientation

Évaluer les causesde l’indécision

Évaluation etemployabilité

Enjeux liés àl’utilisation des tests

Historique et problématiquesde l’évaluation

2NUMÉRO

décembre 2004

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en pratique2Exercice professionnel

de l’orientation

NUMÉROdécembre 2004

en pratiqueLe magazine en pratique est publié deux fois parannée, en mai et en décembre, par l’Ordre desconseillers et conseillères d’orientation et despsychoéducateurs et psychoéducatrices duQuébec (OCCOPPQ). Tiré à 6 500 exemplaires, ilse veut un véhicule unique de transmission despratiques professionnelles québécoises en orien-tation et en psychoéducation. De format tête-bêche, chaque côté étant consacré à une des deuxprofessions de l’Ordre, il est structuré autour dedeux grands dossiers thématiques d’une douzainede pages. Il est destiné aux membres de l’Ordre,aux étudiants, aux professeurs ainsi qu’à toutepersonne ou groupe intéressé.

Comité du magazineOrgane directeur de l’édition du magazine, ceComité détient un pouvoir décisionnel sur le con-tenu et l’aspect visuel. Il regroupe deux chargésd’affaires professionnelles, Richard Locas, c.o., etDominique Trudel, ps.éd., la coordonnatrice auxpublications, Diane Tremblay et la directricegénérale et secrétaire de l’Ordre, Renée Verville.

Comités du dossier Dirigés par des chargés d’affaires professionnellesde l’Ordre, ces Comités sont responsables de laréalisation des dossiers thématiques. Ils regrou-pent chacun quatre professionnels bénévoles,recrutés en fonction de leur expertise et demanière à représenter la diversité des pratiques.Leur mandat est d’une durée de 2 ans. Au secteurorientation, le comité regroupe les conseillersd’orientation Claudette Clément, Louis Cournoyer,Louise Delisle-Laberge, Martine Lacharité etRichard Locas.

Coordination de la productionDiane TremblayPublicité et mise en pagesSuzanne Plourde, technicienne en micro-édition

Collaboration régulière : universités offrant laformation en orientation.

ImpressionLes Impressions Au PointCorrecteur-réviseurMartin LessardIllustration de la page couvertureHaus Design Communications

Le masculin est utilisé sans aucune discrimina-tion et dans le but d’alléger le texte. Tous les textesne reflètent pas forcément l’opinion de l’Ordre etn’engagent que leur auteur. Les articles peuventêtre reproduits à condition d’en mentionner lasource.

Dépôt légalBibliothèque nationale du Québec

Bibliothèque nationale du Canada : ISSN 1713-6253

Postes CanadaEnvoi de la publication canadienne # 1451669

OCCOPPQ, 1600, boul. Henri-Bourassa O., bur.520, Montréal (Québec) Canada H3M 3E2Tél.: (514) 737-4717, 1 800 363-2643

www.occoppq.qc.cawww.orientation.qc.ca

Information :[email protected]

Vous aimeriez émettre votre opinion sur un de nos articles ? Envoyez-nous un court texte. Nous pourrions le publier en tout ou en partie dansune prochaine édition. Courriel : [email protected]

SOMMAIRE

Billet du président

2 L’évaluation : une responsabilité au cœur de notre pratique

DOSSIER

3 L’orientation : évaluer ou tester ?4 D’hier à demain

7 L’art de l’évaluation dans le secteur de l’employabilité

8 L’évaluation en counseling d’orientation : deux perspectives complémentaires

9 Évaluer les causes de l’indécision ou répondre techniquement à la demande ?

10 Quelques enjeux actuels liés à l’utilisation des tests

14 Livres et liens utiles

Vie professionnelle

15 Jean-Pierre Hick, passioné de l’évaluation – Un expert qui témoigne

Vie universitaire

17 Des recherches interculturelles à l’UQAM

18 Qui fait quoi au département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke

Opinion, commentaire ?

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

L’évaluation :

une responsabilité au cœur de notre pratiqueMichel Turcotte, c.o. Président – secteur orientation

Ce numéro du magazine en pratique porte sur l’évaluationdans le contexte de nos services d’orientation. Pourquoia-t-on choisi ce thème ? Avant tout parce qu’il est une carac-téristique centrale de la compétence des conseillers d’orien-tation. Il est également au cœur de la pratique de nombreuxprofessionnels assujettis au Code des professions, ce quidémontre bien le niveau élevé de compétences et de for-mation continue que cet acte exige. Pour réaliser toute l’im-portance accordée à cette activité par les professionnels, nousn’avons qu’à consulter les récents travaux du groupe de travailministériel sur les professions de la santé et des relationshumaines, plus communément appelé Groupe Bernier. Je rap-pelle que le rapport de ce groupe de travail englobait une ving-taine de professions du secteur de la santé et des relationshumaines, dont l’orientation et la psychoéducation. On retrou-ve, au début de chaque définition du champ de pratique desprofessions, l’énoncé suivant : « L’exercice de la profession con-siste à évaluer le […] dans le but de […] ».

Le projet de loi 90 concernant les professions en santé a étéadopté il y a plus d’un an et les changements ont été intégrés auCode des professions. Depuis l’hiver dernier, un comité d’ex-perts, mis sur pied par l’Office des professions, a le mandat dedonner suite au rapport du Groupe Bernier, de formuler, d’icijuin 2005, des recommandations à l’Office portant sur le renou-vellement de la définition du champ de pratique des professionsdes relations humaines et de proposer des activités réservées enlien avec leurs contextes de pratique. Pour leurs travaux, lesmembres de ce comité se sont inspirés de la proposition de défi-nition suivante de notre champ de pratique : l’exercice de l’orien-tation consiste à évaluer le fonctionnement intellectuel,psychologique et les ressources d’une personne, à mesurer sesintérêts, ses aptitudes, sa personnalité, ses fonctions intellectuelles,cognitives et affectives, à intervenir sur son identité, à détermi-ner les stratégies et les plans d’intervention et à en assurer le suivi,dans le but de développer ou de rétablir sa capacité de s’orienteret de réaliser ses projets de carrière. Toutefois, ce comité se baseégalement sur le modèle du projet de loi 90, c’est-à-dire destextes courts et très spécifiques quant aux champs de pratique.

Il tient compte aussi de la proposition suivante concernant uneactivité réservée : évaluer le fonctionnement psychologique d’unepersonne au regard de son potentiel personnel, scolaire et profes-sionnel.

Au centre de l’activité d’évaluation

On retrouve dans la récente publication Normes de pratique dutesting en psychologie et en éducation1 la définition suivante del’évaluation psychologique : « examen détaillé du fonction-nement psychologique qui comprend la collecte, l’évaluation etl’intégration des résultats de tests et d’information collatéraleet la production d’un rapport sur l’information concernant lapersonne ». On comprend bien à la lecture de cette définitionque ce qui est au centre de l’activité d’évaluation n’est pas en soil’utilisation d’un test psychométrique ou d’autres instrumentsde collecte de données, mais plutôt ce qu’un professionnel enfera dans le cadre d’un examen détaillé de la personne et ducontexte dans lequel elle évolue ou se trouve à un momentdonné de sa vie.

En effet, pour utiliser des instruments psychométriques, il fautnon seulement avoir choisi les instruments les plus adéquats,ce qui déjà demande des compétences professionnelles et tech-niques reconnues, mais il faut aussi savoir transmettre lesrésultats. Ces derniers, au mieux, seront bien reçus par le clientparce qu’ils confirmeront et compléteront l’image qu’il a de lui-même. Toutefois, dans certaines situations, il existera un écartsignificatif entre les résultats et la perception que le client a delui-même ou qu’il veut entretenir de lui-même. C’est à cemoment-là qu’entre en jeu tout l’art et l’expertise du counselingd’orientation : savoir créer le climat de confiance permettant auclient d’être disponible lors du processus d’évaluation, et savoirreconnaître l’impact de cette évaluation sur la personne et le gérerde façon constructive dans le processus. C’est cette expertiseen counseling qui permettra au client d’accéder à de l’informa-tion nouvelle sur lui-même.

Pour nourrir votre réflexion sur la fonction d’évaluation de lapersonne, nous avons voulu, dans cette édition de votre maga-zine professionnel, vous présenter des témoignages ou desperspectives de praticiens issus de différents secteurs de pratiqueainsi que de celle d’un professeur qui enseigne la psychométriedepuis plusieurs années.

Je vous souhaite une bonne lecture ! ❖

en pratiquebillet du président 2

1 American Educational Research Association, American PsychologicalAssociation et National Council on Measurement in Education. Normesde pratique du testing en psychologie et en éducation, traduit parl’OCCOPPQ sous la direction de Georges Sarrazin, Montréal, Institut derecherches psychologiques, 2003.

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

Pour marquer l’importance du processus d’évaluation dansnotre pratique, à un moment où nous n’avons jamais étéaussi près de la réserve légale d’une activité qui toucheraitl’évaluation du fonctionnement psychologique pour les con-seillers d’orientation, il semble primordial de nous pencherensemble sur les différents aspects ou enjeux reliés à cetacte professionnel qu’est l’évaluation.

La deuxième édition du magazine couvre donc ce dossier qui,loin d’être exhaustif, vise bien entendu à raffiner nos outils enprésentant certaines informations pertinentes tout en cherchantà susciter la réflexion sur la pratique de l’évaluation.

Un tel dossier, qui présente l’acte d’évaluation comme étant uneresponsabilité professionnelle, se doit de resituer cet acte dansson contexte historique. Un premier article de Louise Delisle-Laberge et de Richard Locas présente donc les grandes lignesde l’évolution et les différents courants qui ont secoué la pra-tique de l’orientation au Québec. Une seconde série de troistextes présente le point de vue de trois professionnels de l’orien-tation quant à l’acte d’évaluation dans leur pratique. Ces textessignés par Laurent Matte, Mireille Tesolin et Érik Beaulieusoulèvent des questions pertinentes et suggèrent des pistes deréflexion intéressantes pour le lecteur.

Finalement, comment aborder l’acte d’évaluation en orienta-tion sans comprendre les enjeux actuels liés à l’utilisation destests ? C’est ce que présente Marie-Chantal Guédon dans sonarticle de fond. Elle y aborde des notions aussi essentielles quele choix des instruments, l’utilisation judicieuse des tests etl’interprétation des résultats. Nous croyons donc que ces arti-cles vous permettront de poursuivre la réflexion sur l’acte d’éva-luation comme responsabilité professionnelle dans la pratiquede l’orientation. ❖

La responsable de ce dossier thématique, Mme LouiseDelisle-Laberge, a été conseillère d’orientation à laCommission scolaire Sainte-Croix pendant plus detrente ans. Elle est encore très engagée à titre de con-sultante autonome dans le domaine de l’orientation.Auteure notamment du livre La part des parents dansl’orientation au secondaire et de publications dans lasérie La tête de l’emploi, elle travaille également à la

correction et à la traduction de textes. Elle a participé au cours des annéesà plusieurs comités à l’Ordre. Les autres membres du Comité du dossier,coordonné par le chargé d’affaires professionnelles Richard Locas, sontles conseillers d’orientation Claudette Clément, Louis Cournoyer et MartineLacharité.

Louise Delisle-Laberge, c.o., travailleur autonomeResponsable du dossier

L’orientation

évaluer ou tester ?

en pratiquedossier 2

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

D’hier à demainHistorique et problématiques de l’évaluation en orientation

Louise Delisle Laberge, c.o., travailleur autonome etRichard Locas, c.o., chargé d’affaires professionnelles, OCCOPPQ

Dans un dossier portant sur l’évaluation en tant qu’acte,mais également en tant que responsabilité professionnelle,il apparaît important de rappeler quelques grands mouve-ments de l’histoire qui ont marqué la pratique des con-seillers d’orientation au Québec.

Certains d’entre nous ont vécu ces bouleversements ou cetteévolution, alors que près de 40 % de nos membres, âgés demoins de 35 ans, les ont sans doute survolés dans quelques coursuniversitaires. Loin de nous l’idée de tracer un historiqueexhaustif de l’utilisation des instruments psychométriques auQuébec et des personnes qui se sont consacrées au développe-ment de tests spécifiquement conçus pour la population québé-coise. Ce texte vise davantage la présentation des grandscourants qui ont influencé le travail des praticiens et l’identifi-cation des tendances qui se pointent à l’horizon, certainesd’entre elles étant déjà enclenchées.

Bref retour dans le passé

Afin d’illustrer les grands courants et l’évolution de la mesureen orientation, nous ferons une allégorie avec les grandes pério-des de l’histoire de l’humanité. Il s’agit d’un clin d’œil à l’his-toire : il ne faudrait pas chercher de liens sous-jacents entre lesparticularités des époques et les courants dans la pratique del’orientation. Par ailleurs, même si chaque époque est marquéepar des caractéristiques particulières, il faut être prudent dansl’établissement de généralités applicables à l’ensemble de la pra-tique professionnelle pour chaque période. En guise d’exem-ple, même durant l’époque de « l’anti-testing », plusieursconseillers d’orientation, notamment au sein d’établissementsd’enseignement, maintenaient des programmes de testingmassif en vue du classement de la population étudiante.Effectuons donc notre retour dans le passé…

1. L’Antiquitél’évolution de la psychologie jusqu’au début des années 1930

L’Antiquité est le début recensé des premières grandes civilisa-tions organisées. On assiste également à l’émergence des pre-mières sciences et des grands philosophes qui tentent de

comprendre l’humain. Notre histoire de la psychométrie débuteà la fin du XIXe siècle au cours duquel les sciences humaines secalquent de plus en plus sur les sciences dites pures. En effet, laméthode à l’étude de l’être humain s’utilise également dansl’étude de ses aspects psychologiques. L’application des notionsstatistiques aux sciences humaines va permettre à ces dernièresde s’établir comme « science ». La psychologie va donc sedévelopper en s’appuyant sur des méthodes quantitatives deplus en plus sophistiquées. La notion d’évaluation de la per-sonne et l’utilisation des instruments de mesure vont se trans-former parallèlement à l’évolution des sciences humaines, etplus particulièrement de la psychologie. On glisse doucementd’une compréhension philosophique de l’homme vers sa mesureobjective. La psychométrie qui est, entre autres, une applicationdes statistiques aux différences individuelles va donc se dévelop-per progressivement. Ses premières cibles de mesure se situerontdavantage sur le plan de la personnalité, de l’intelligence et descapacités personnelles. Elle sera notamment très utile lors desdeux grandes guerres mondiales afin d’identifier les « bons sol-dats ». Au Québec, c’est à la fin des années 1920 et au début desannées 1930 que l’on commencera à s’intéresser à l’orientation,avec Wilfrid Éthier comme pionnier et père de cette discipline.

2. Le Moyen-Âge jusqu’aux années 1950

Au Moyen-Âge, on constate que l’ensemble du système féodalest au service du pouvoir. Dans l’histoire de l’évaluation auQuébec, les premiers orienteurs, qui sont des enseignants,recevront une formation d’une année liée à la psychotechnique.Leur rôle consiste davantage à utiliser une batterie de tests pourmesurer les caractéristiques des individus en vue d’un classe-ment ou pour en arriver à des conseils directifs. Nos « preuxchevaliers » orienteurs sont des spécialistes de la mesure et ilsse définiront eux-mêmes, un peu plus tard, comme étant issusde « l’école des testeux ».

À cette époque et de façon plus généralisée, l’utilisation desinstruments de mesure psychométrique sert avant tout la sociétéet les institutions, ensuite l’individu. Selon l’article « Les dif-férences individuelles », du site Internet DOKIMOS (http://www.dokimos.ca/Ia208.htm), Binet disait que l’orientation pro-fessionnelle devait aider à la construction d’une société « oùchacun travaillerait selon ses aptitudes reconnues de manière àce qu’aucune parcelle de force physique fût perdue pour

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

la société ». Cet article fait également ressortir les abus en cequi concerne l’utilisation des tests dans l’évaluation et l’étique-tage des personnes.

3. La Renaissance des années 1960 à 1980

Tout comme cette période dans l’histoire de l’humanité, onassiste à une forme de retour vers l’Antiquité de la psychologieet on redécouvre la compréhension de l’être humain commesujet et non pas comme objet. À ce moment, au Québec, onassiste à une mutation progressive, et parfois pénible, de la pro-fession d’orienteur à celle de conseiller d’orientation. Dans sonéditorial de la revue Orientation Professionnelle de mai 1965,Roch Duval soulève les questions suivantes lorsqu’il parle del’utilisation massive des tests dans les écoles et du rôle de psycho-technicien des conseillers d’orientation :

Combien de gens catalogués pour la vie, et par notrefaute ? Combien d’orientations douteuses, hasar-deuses, faites sur la foi d’un ou de quelques tests inter-prétés sommairement ?

L’utilisation des tests psychométriques comme principal outilde travail est de plus en plus contestée : on assiste à une mon-tée progressive de la place du counseling en orientation, alorsqu’une vague anti-psychométrie déferle sur la profession. Onpréfèrera donc les méthodes de grilles d’autoévaluation, d’exer-cice de connaissance de soi, d’introspection et d’entrevues nonstandardisées pour atteindre les objectifs de l’intervention. Parcontre, parallèlement à ce grand mouvement, il y a des recher-ches et des travaux importants qui se poursuivent pour ledéveloppement de la psychométrie au Québec.

Les approches humanistes gagnent en importance et on con-sidère de plus en plus l’être humain comme étant unique et pos-sédant toute la potentialité nécessaire pour se développer. Ilfaudra donc éviter de chercher à le mesurer, à l’évaluer et à l’éti-queter. Par ailleurs, on assiste à une montée de la notion dedroits de la personne. Tel qu’il est mentionné dans le texte « Lesdifférences individuelles » (http://www.dokimos.ca/Ia208.htm),les mouvements anti-ségrégationnistes auront un impact sur ladiscrimination dans l’emploi et plusieurs causes portées devantles tribunaux entraîneront des jugements sévères quant à l’utili-sation des tests de personnalité dans la sélection.

4. Les lumières et l’époque contemporaine des années 1980 à aujourd’hui

L’époque des lumières est caractérisée par une mise en valeurdu rationnel et de l’intelligence. Le parallèle est assez frappantavec notre époque qui est, entre autres, caractérisée par la

valorisation de tout ce qui est utilitaire et, surtout, performant.Que ce soit dans les organisations (contrats de performance)ou chez les individus, l’aspect de performance et de réductiondu risque est prépondérant. La demande de mesures préciseset quasi prédictives des comportements ou du fonctionnementdes personnes s’accroît. Le mouvement de balancier se pour-suit et il y a une remontée importante de l’utilisation des instru-ments psychométriques de plus en plus spécialisés, mais pastoujours adaptés à la réalité québécoise.

Les leçons tirées de notre histoire et l’évolution globale de lasociété ont sans doute permis le développement d’un souciéthique dans l’utilisation des instruments psychométriques envue d’évaluer les personnes. Il faut non seulement valider lesinstruments, mais également leur utilisation. Deux exemples,un français et l’autre québécois, viennent illustrer ce propos :

le dernier paragraphe de l’article L. 121-7 de Loifrançaise no. 92-1446 relative à l’emploi, au développe-ment du travail à temps partiel et à l’assurance chômagequi stipule que Les méthodes et techniques d’aide aurecrutement ou d’évaluation des salariés et des candidatsà un emploi doivent être pertinentes au regard de la fina-lité poursuivie.

l’adoption par le bureau de l’Ordre en mars 2004 desNormes de pratique du testing en psychologie et en éduca-tion, de l’American Psychological Association.

Problématiques actuelles et pistes de réflexion

Nous aurions pu emprunter d’autres avenues pour énoncer lesproblématiques actuelles, mais les trois suivantes semblent, ànotre avis, englober les principales : les tendances sociétalesquébécoises, les instruments mis à notre disposition et les com-pétences requises du professionnel de la mesure d’aujourd’huiet de demain.

1. Tendances sociétales

L’utilisation des tests psychométriques, après avoir suscité denombreuses réactions au cours des différentes périodes de l’his-toire, semble généralement reconnue aujourd’hui comme par-tie intégrante de la pratique du conseiller d’orientation. Nousfaisons cependant face à de nombreuses contraintes :

de nature économique tout d’abord : les coûts liés àl’utilisation et à l’interprétation des instruments psycho-métriques constituent un obstacle majeur dansplusieurs milieux de travail. Les diverses réductionsbudgétaires auxquelles le milieu scolaire, par exemple, aété exposé ne facilitent pas l’achat de matériel, ni

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

l’interprétation des résultats aux tests. Un personnelrestreint dans les établissements réduit souvent toutepossibilité d’interprétation correcte auprès de popula-tions nombreuses.

de nature démographique ensuite : la population fran-cophone du Québec, étant relativement petite, ne per-met pas toujours une normalisation appropriée de cer-tains instruments psychométriques qui seraient parailleurs très intéressants et utiles.

de nature culturelle et multiculturelle : l’arrivée denombreuses communautés culturelles a modifié levisage du Québec et les adaptations d’instruments vala-bles ailleurs ne sont pas toujours possibles.

2. Instrumentation

Alors que les conseillers d’orientation fran-cophones du Québec sont considérés par leurscollègues européens comme étant des chefs defile en raison de leurs recherches, il serait dif-ficile d’énoncer une affirmation semblable enmatière de psychométrie !

Même si nous possédons un éventail assezlarge d’instruments d’évaluation intellectuelle,scolaire, de personnalité et d’intérêts, il n’endemeure pas moins qu’un plus grand nombrepourrait être utilisé si des traductions et desnormes québécoises devenaient disponibles.Qu’on pense à la multiplicité des tests spécia-lisés offerts par les diverses maisons d’édition : tendances sui-cidaires, échelles de dépression, etc. Parce que nous vivons àl’intérieur d’une société à tendance dite « utilitaire », nousassistons souvent comme témoins impuissants à une utilisationgénéralisée de divers inventaires non validés, à une proliféra-tion de questionnaires pseudo-scientifiques (dans les maga-zines, sur Internet, etc.), ayant pour effet d’offrir une visionfaussée de l’évaluation formelle que nous pratiquons, qui, elle,est normalisée, standardisée. Les attentes du public pour desréponses immédiates et toutes prêtes provoquent ce glissement…En matière de psychométrie, nous constatons donc souvent unedifférence de langage entre le conseiller d’orientation et sonclient : le conseiller travaillant à l’intérieur d’un processus, leclient désirant obtenir la meilleure recette à suivre…

3. Professionnel de la mesure d’aujourd’hui et de demain

Avec les travaux du groupe de travail sur la réforme des pro-fessions en santé et en relations humaines, les conseillersd’orientation s’approcheront plus que jamais d’une « activité

réservée » en évaluation du fonctionnement psychologique –dont l’utilisation d’instruments psychométriques.

Notre formation de base devra donc être extrêmement solideet notre compétence sans failles. L’analyse que nous devronsnécessairement en faire nous obligera sans doute à poursuivrenotre formation fondamentale et à tirer parti de toutes lesressources disponibles.

Nous devrons également revoir ensemble toute l’éthique liéeaux nouvelles modalités d’utilisation de la psychométrie, notam-ment celle des tests en ligne. Notre ordre professionnel vientde mettre à la disposition des membres un excellent volume Lesnormes de pratique de testing en psychologie et en éducation, etnous aurions tout intérêt à le consulter. Cependant, les éléments

touchant la cyberéthique n’y sont pas encoredéfinis…

Des questions en guise de conclusion

Nous aimerions conclure ce tour d’horizon envous invitant à établir un dialogue avec voscollègues, afin qu’ensemble nous puissionsnous questionner sur nos pratiques respec-tives. L’activité de formation continue del’OCCOPPQ en juin 2005 sera une occasionunique de se regrouper autour du thème duprocessus d’évaluation comme acte profes-sionnel. En attendant, réfléchissons auxaspects suivants :

Les tendances sociétales ont un impact sur l’utilisation destests psychométriques. Comment envisageons-nous l’avenir à cet égard ? Pourrions-nous considérer des modalités d’évaluationcomplémentaires à celles que nous possédons ? Dans une société multiculturelle comme la nôtre, com-ment envisagerons-nous et surtout, comment utiliserons-nous l’évaluation psychométrique auprès d’une clientèle deplus en plus diversifiée ?

Le thème de la société multiculturelle qui fera l’objet duprochain dossier nous permettra sans doute de pousser notreréflexion sur le sujet. ❖

Références :DOKIMOS, Les différences individuelles, http://www.dokimos.ca/Ia208.htmDUVAL, R. « Les deux tentations de la pratique professionnelle dans le

monde moderne : la complaisance et l’utilitarisme », OrientationProfessionnelle, Corporation des conseillers d’orientation professionnelledu Québec, 1965, vol. 1 no. 5, pp. 209-214.

L’utilisation des testspsychométriques, aprèsavoir suscité de nombreusesréactions au cours desdifférentes périodes del’histoire, semble générale-ment reconnue aujourd’huicomme partie intégrante dela pratique du conseillerd’orientation.

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

L’art de l’évaluation

dans le secteur de l’employabilitéLaurent Matte, c.o., responsable régional, mesures et services d’emploi, Emploi-Québec

Dans tous les domaines,évaluer signifie attribuerune valeur à quelquechose, généralementdans le but de prendreune décision.

Dans la pratique de l’orien-tation en employabilité,l’évaluation de l’adéqua-tion entre les caractéris-

tiques individuelles et les options de réinsertionprofessionnelle s’avère, dans la réalité, passable-ment plus complexe – mais aussi plus riche –qu’une simple question de concordance.

D’abord, la personne qui nous rencontre est, dansbeaucoup de cas, plus ou moins contrainte : parun organisme payeur, lui-même encadré par desrègles et des priorités budgétaires ou politiques;par une situation délicate ou désagréable de chô-mage, de pauvreté ou de changement subit dansson mode de vie; par ses besoins concrets et immé-diats ou par un contexte pas toujours facilitant.D’autre part, puisque ce sont des adultes, nosclients n’en sont pas à leurs premières décisionset ont déjà pu vivre des choix heureux et moinsheureux dont ils peuvent apprendre. Ils ont vécudes expériences qui sont un bagage, une ressourceet parfois une direction. Ils portent leurs propresjugements sur eux-mêmes, sur le monde dutravail et, bien entendu, sur leur conseillerd’orientation !

Un tel contexte rend nécessaire la clarification, àchaque fois, du but et des enjeux de notre inter-vention. Ceux du client, les nôtres et, souvent, ceuxd’un tiers. Il crée aussi la possibilité de mettre àprofit l’expérience et la responsabilité du client,une invitation à dépasser la trop fréquente passi-vité de la psychométrie (comme de répondre à150 questions pour savoir « dans quoi on seraitbon ») qui est souvent l’unique attente du client.L’évaluation vise une décision s’inscrivant dans unsystème complexe d’influences plus ou moins

déterminantes, de significations plus ou moinsexplicites, à un moment donné d’un cheminemententre un passé plus ou moins édifiant, plus oumoins assumé, et un futur plus ou moins attirant.

Évaluer, c’est prendre en compte les caractéris-tiques de la personne qui feront en sorte qu’unchoix pourra s’avérer ou non adéquat et satis-faisant. Toutefois, ce n’est qu’une partie de l’éva-luation qui mène à la décision, car il y a encorel’autre aspect à évaluer, la profession : nature etconditions du travail, gains potentiels, impacts surles autres aspects de sa vie et perspectives profes-sionnelles. Il y a également les conditions de réali-sation : accès à la profession ou à la formation,subordination à la décision d’un tiers ainsi que lesressources et les limites personnelles et environ-nementales. Ici, notre professionnalisme est toutautant sollicité, même si aucun GROP ni MBTI nepeut parler à notre place.

Chacun de ces actes demande au conseillerd’orientation de tenir compte du niveau dedéveloppement personnel ou vocationel du client,des modes cognitifs et affectifs au cœur même deleur relation, parfois faussée par un système depensée erroné ou même, pathologique. On est loinde la plate lecture des résultats d’un Strong.

Évaluer, établir avec le client la valeur de chaqueélément d’une décision, évaluer la décision elle-même, c’est une pratique qui demande à la fois del’humilité face à la complexité et à l’inconnu, durespect pour une personne qui doit prendre unedécision difficile, de la rigueur, compte tenu desenjeux, ainsi que de la quantité et de la subtilité desfacteurs en cause, une pratique qui demande le findosage de détermination et de sensibilité qu’il fautpour accompagner quelqu’un au-delà de ce qu’ilpeut accomplir seul ou sans crainte. C’est aussi êtreassez conscient de soi-même pour arriver à ne pasbiaiser la relation ou toutes ces évaluations.

En fin de compte, c’est peut-être, surtout, savoirs’évaluer soi-même… ❖

P o i n t d e v u e

Quelle est votre

conception de

l’acte d’évalua-

tion dans votre

pratique profes-

sionnelle ?

C’est à cette

question qu’ont

répondu trois

conseillers

d’orientation. Ils

nous livrent leur

point de vue

dans les pages

suivantes.

en pratiquedossier 2

P o i n t d e v u e

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

L’évaluation en counseling d’orientation :deux perspectives complémentaires

Mireille Tesolin, conseillère d’orientation, psychothérapeute accréditée au Centre d’orientation et de consultation psychologique de l’Université Laval et en pratique privée

Je crois que la compétence diagnos-tique en orientation comporte deuxplans d’évaluation. Le premier planréfère à une position d’intervenant ensanté mentale. Le second s’appuiesur la spécificité inhérente à la pro-fession de conseiller d’orientation.

Dans un contexte d’intervention enorientation, l’évaluation est souvent entendue comme un acteprofessionnel posé essentiellement par l’intermédiaire de testspsychométriques. Dans la mesure où l’évaluation en orienta-tion repose sur des connaissances solides du développement etdu fonctionnement psychologiques, de la personnalité et de sestroubles de fonctionnement ainsi que sur les théories propresau champ de l’orientation et de l’identité, n’est-il pas pertinentpour nous d’utiliser ces connaissances dans un contexte rela-tionnel ? C’est à partir de cette position que je considère touteévaluation comme un moment privilégié pour favoriser lacoconstruction du lien de confiance et pour comprendre quiest cet Autre.

À mon avis, toute situation d’évaluation suppose a priori deuxhypothèses : d’une part, l’Autre est une personne unique et par-ticulière qui porte une expérience de la vie qui lui est propre;cette hypothèse illumine la perspective particulière au conseillerd’orientation. Par ailleurs, cet Autre a suffisamment de carac-téristiques communes aux autres êtres humains pour que jepuisse référer, au besoin, à ces caractéristiques communescomme repères : cette hypothèse est le fondement de la perspec-tive particulière à l’intervenant en santé mentale.

La présence de l’intervenant en santé mentale

La position d’intervenant en santé mentale découle de moncode de déontologie, lequel me confère une responsabilité depremier niveau qui consiste à évaluer le degré d’urgence et deconscience de la personne, notamment la conscience de sa

responsabilité dans ce qu’elle vit (locus of control). Cependant,au-delà des motifs de responsabilité professionnelle, la compé-tence diagnostique de l’intervenant en santé mentale concourtà mieux comprendre cet Autre afin de lui offrir le type de suivile plus approprié à ses besoins.

Je reconnais que l’évaluation exige, simultanément, une posi-tion où je suis en relation avec une personne, en même tempsque je laisse émerger un témoin en moi qui, de temps en temps,pose un regard sur l’Autre qui est descriptif. C’est dans cesmoments-là que j’ai recours aux connaissances (théoriques,cliniques, expérientielles) du développement humain, des crisesdéveloppementales et de leurs enjeux, de la santé et de lapathologie et que je réfère au besoin aux descriptions duDSM-IV. Cela peut paraître peu « humaniste » de prime abord,mais le DSM-IV présente l’avantage de répertorier des caté-gories de problématiques ou des caractéristiques d’une patho-logie qui donnent des repères souvent utiles pour clarifier uneproblématique présentée, à tort ou à raison, sous le couvertd’une problématique d’orientation. De plus, il présente aussil’avantage de constituer la base d’un langage commun entre laplupart des professionnels de la santé mentale.

La présence du conseiller d’orientation

Plus spécifiquement comme conseillère d’orientation, m’appuyersur les connaissances précitées pour comprendre qui est cet Autre,me permet de mieux évaluer la nature de la problématique, decomprendre plus aisément comment elle est vécue par cette per-sonne et enfin d’activer ses ressources internes en vue de la réso-lution de la problématique sous-jacente au motif de consultation.

Bien sûr, selon une perspective où la relation est centrale, l’éva-luation ne peut se réaliser en se conformant à une procédurelinéaire et stricte. Voilà pourquoi j’adopte plutôt le ton del’exploration, notamment au cours des premières entrevues.Dans cette optique, je suis particulièrement intéressée à com-prendre comment il se fait que la personne qui me consulte

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en pratique – exercice professionnel de l’orientation – décembre 2004

Évaluer les causes

de l’indécision

ou répondre techniquementà la demande ?

Érick Beaulieu, c.o., pratique privée conseiller à la vie étudiante pour les réseaux socioprofessionnels de l’UQAM

Un client nous présente souvent sa demande d’aide d’unefaçon directe, qui sous-entend presque déjà le résultatsouhaité. Ses attentes constituent l’espoir à son impasseet il souhaite obtenir une « cartographie » du parcoursscolaire ou professionnel dans lequel s’engager.

L’objectif souhaité, plus ou moins bien délimité, comportetoutefois des conditions de réalisation préalables, de natureplus implicite. Ce sont ces ingrédients (reliés à la manière decheminer) qui constituent l’angle mort du client, occasion-

nant son incapacité à s’établir lui-même un nouvel objectif. J’interpelle ici les varia-bles plus intrinsèques du savoir-être et des savoir-faire qui en découlent. Apprendreà comprendre comment le client en est venu à perdre de vue les variables intrinsèqueset extrinsèques clés, responsables de son impasse, devient mon objectif.

Retarder l’axe ISEP pour mieux y répondre

Je mets toujours un bémol sur l’attente de courtier de formation ou d’information quenotre expertise revêt généralement, parce que je crois que ça génère un préjugé quientrave le processus d’évaluation probant qu’implique mon service d’orientation. Laprédominance informative amplifie la croyance à une panacée extrinsèque (rhétoriquetendancielle qu’emprunte parfois Emploi-Québec ou Jobboom, par exemple), au détri-ment d’un regard sur soi soucieux de recadrer les véritables besoins. Je me considèrecomme un expert de la personne et de son processus de prise de décision avant d’êtreun expert de l’information scolaire et professionnelle. J’ai d’abord un rôle à jouer làoù la connaissance de soi rencontre une impasse dans sa volonté de s’articuler autourd’un projet de vie significatif. J’ai ensuite un rôle de « pisteur » informationnel. C’estd’ailleurs à mon client d’aller valider les pistes d’information scolaires ou profession-nelles soulevées, dans la mesure où je le convie à se responsabiliser face à sa démarche.Mon travail consiste donc à évaluer les causes de l’impasse décisionnelle pour mieuxfonder le résultat espéré.

Rétrospective probante

La rétrospective pointue des épisodes où la personne a déjà manifesté une certaineambiguïté dans son vécu est mon premier objet d’évaluation (le genre de circonstancesévocatrices d’impasses, leurs récurrences, les émotions reliées, etc.). C’est en inves-tiguant la nature des symptômes d’impasses ou d’indécision déjà vécues, avec le recul,que je vais permettre au client d’encore mieux s’approprier pourquoi il ne sait plus oùse diriger aujourd’hui. Les indices du passé sont révélateurs de la nature de l’impasseactuelle du client. Cette information est essentielle à dégager, puisque je souhaite

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n’ait pas l’impression d’avoir la capa-cité de répondre à son questionnementde manière autonome; à vérifier s’ils’agit d’un questionnement qui témoi-gne d’un manque d’information sur lemonde extérieur, d’une méconnais-sance de soi, de difficultés à faire deschoix ou d’un questionnement quiréactive des enjeux développementauxlaissés en friche par le passé.

L’évaluation en counseling d’orienta-tion invite à porter un focus sur lanature du questionnement, souventdépouillé de mots, sur l’expérience denon-sens propre à l’absence de pro-jet, ce qui génère chez la personnequi consulte une anxiété souvententremêlée d’une excitation de prisede contact avec soi. Il s’agit là d’unmoment privilégié pour recueillirl’information sur le fonctionnementde cette personne, sur ses ressourcesinternes et sur ses difficultés, et plusque tout, pour reconnaître ce sur quoielle s’appuie pour se soutenir danscette expérience de contact. À partirde là, les compétences affectives,réflexives et interactives du conseillerd’orientation seront mobilisées pourmener à bien la démarche de la per-sonne.

Vers une synthèse nuancée desdeux présences

Vous aurez compris, qu’à mes yeux,l’évaluation en orientation n’est pasune chose simple et que sa complexitéexige la maîtrise d’une gamme impor-tante de compétences hétérogènes.C’est en visant la maîtrise de cettegamme de compétences et de sonapplication nuancée que mon travaild’évaluation et d’intervention prendforme. ❖

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Marie-Chantal Guédon, Ph.D., c.o. et psychologue. Professeure au Département d’orientation professionnelle del’Université de Sherbrooke

Les conseillers d’orientation ont recours à l’évaluation dansdifférentes circonstances et pour des objectifs variés. Dans lecadre de l’orientation, l’évaluation a essentiellement l’objec-tif d’aider l’individu à améliorer sa connaissance ou sa compré-hension de soi pour qu’il puisse prendre des décisionsappropriées quant à son cheminement de carrière.

Ce regard qui doit être posé sur sa propre identité peut être soutenupar l’usage de méthodes facilitant le repérage d’éléments dont ilfaut tenir compte dans la décision. Par ailleurs, les conseillersd’orientation doivent parfois procéder à des évaluations dansd’autres contextes, par exemple, à des fins de sélection ou de classi-fication. L’évaluation des caractéristiques individuelles est doncreconnue, à juste titre, comme une fonction importante dans leurpratique.

Quelles que soient les circonstances, les enjeux majeurs de l’éva-luation restent les mêmes :

1) fournir une information pertinente, soit faire référence auxquestionnements que l’on doit avoir par rapport à l’utilité desdonnées de l’évaluation, après avoir défini les buts visés et lesbesoins en cause;

2) fournir une information exacte (dans la mesure du possible),soit évoquer la rigueur qui doit marquer toute la démarched’évaluation, depuis le choix des méthodes jusqu’à l’interpré-tation des résultats;

3) respecter les droits que notre société reconnaît aux individusévalués, qui commandent d’être sensible aux implications desmodalités d’évaluation choisies, notamment au plan de l’équité,de la confidentialité, de l’accès à l’information et du consente-ment des personnes évaluées.

Ces trois grands enjeux définissent, à mon avis, ce qu’est une utili-sation responsable des méthodes d’évaluation. Malgré les change-ments sociaux et technologiques et les modifications que ceux-ciont pu provoquer dans les modalités d’utilisation des outils d’éva-luation, ils restent d’actualité. C’est en les gardant à l’esprit quenous examinerons quelques questions se posant à l’heure

Quelques enjeux

actuels

liés à l’utilisation des tests

rendre mon client plus conscient et responsable de sonprocessus de prise de décision. Lorsqu’on néglige cet aspectavec un client ou qu’il ne veut pas assumer cette dimen-sion plus intrinsèque, on se fait tôt ou tard taxer d’orien-teur qui ne l’a pas dirigé à la bonne place. Ressortir uneévaluation des causes plus implicites du besoin d’orien-tation devient crucial pour éviter de résoudre l’impasse àcoups de réponses pensées pour lui.

Outils d’évaluation pour éclaircir les causes del’impasse, avant de préciser l’objectif voulu

Les outils d’évaluation que je peux utiliser contribuent àamener mon client vers une meilleure conscientisation desbesoins plus ou moins bien cernés derrière sa volonté desens scolaire ou professionnel. Pour la clientèle que j’accom-pagne dans ma pratique privée, à l’université ou au cégep,le profil d’intérêts et d’aptitudes s’évalue davantage à tra-vers une rétrospective probante de leur trajectoire de vie.Les divers investissements de vie significatifs me four-nissent habituellement suffisamment de renseignementspour bien cerner ce qui les anime. J’utilise donc rarementun outil d’évaluation pour rendre le tout plus explicite.Mon utilisation d’outils d’évaluation va plus se concentrerà repérer les comportements ou les dispositions problé-matiques, ainsi que les particularités du fonctionnementpsychologique de la personne. L’Épreuve Groupements,l’Inventaire des préférences professionnelles et le GROP (danssa manière sophistiquée de rendre le RIASEC) sont tousdes outils que je privilégie, sans les utiliser systématique-ment pour autant.

Mon approche vise à graduellement amener la personneà mieux se comprendre pour devenir plus efficace dans samanière de chercher la place qui convient le mieux à cequ’elle est en train de devenir. L’empressement du clientpervertit notre expertise en empruntant le penchant« réponses-toutes-faites-clés-en-main », si populaire ànotre époque de cadence et de consommation effrénées.L’ingrédient clé de ma démarche d’évaluation est latolérance à l’ambiguïté. C’est l’aptitude la plus importanteque j’ai à parfaire puisque je dois aussi l’inculquer à monclient, souvent précipité dans sa quête de sens.

En résumé, je me perçois dans un premier temps commeun médecin de l’indécision qui doit diagnostiquer les cau-ses de l’impasse décisionnelle. Ensuite comme un chirur-gien de la motivation qui doit recadrer les ingrédientspréalables à la remise en action. Et finalement comme unexpert de la prise de décision qui valide le plan d’action àpartir des aspirations extrinsèques maintenant mieuxdégagées et des défis personnels intrinsèques mieux cernés,dégagés de « l’angle mort » de mon client. ❖

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actuelle, par rapport à l’utilisation des instruments psycho-métriques, et touchant :

le choix des instruments,

la façon dont ces instruments sont utilisés,

l’interprétation des résultats et leur transmission auxpersonnes concernées.

Les remarques qui suivent s’appuient en grande partie sur lesrecommandations figurant dans l’ouvrage dirigé par GeorgesSarrazin, Normes de pratique du testing en psychologie et en édu-cation, publié en 2003 par l’Institut de recherches psycho-logiques. Les lecteurs sont invités à s’y référer pour avoir plusde détails sur les points évoqués dans le présent article ainsi quepour avoir une vue plus complète des différentes questions enjeu dans l’évaluation psychométrique. Par ailleurs, pour sim-plifier le texte, nous emploierons le terme « test » pour désignertout instrument standardisé, qu’il s’agisse de questionnaires,d’inventaires ou de tests proprement dits.

I – Choix des instruments

Le choix d’instruments psychométriques doit se faire en tenantcompte de plusieurs critères et entraîne, entre autres, les ques-tions suivantes :

Les dimensions que le test mesure sont-elles utiles par rap-port au contexte et aux objectifs visés ? Répondent-ellesaux besoins de l’évaluation ?

Le format du test (type de questions, conditions de passa-tion, matériel utilisé, langage…) est-il adapté aux person-nes qui auront à s’y soumettre et au contexte dans lequel ilsera utilisé ? Risque-t-il de pénaliser des personnes présen-tant des caractéristiques particulières ? Quelles mesuresdevrait-on prendre à ce sujet ?

Les normes, s’il y en a, sont-elles établies sur des échan-tillons suffisamment représentatifs des personnes testées ?

Les recherches faites sur le test permettent-elles de croirequ’il fournira des scores suffisamment précis ou stables(fidélité), pouvant être utilisés pour les objectifs envisagés(validité) ?

Enfin, possède-t-on la compétence requise pour utiliserl’instrument choisi ?

À l’heure actuelle, il m’apparaît assez difficile de trouver desinstruments psychométriques pour lesquels on pourra répon-dre sans hésitation par l’affirmative à toutes ces questions et qui

sont adaptés à la clientèle québé-coise. Souvent, les normes sontétablies pour des populationsaméricaines ou françaises, ousur de petits groupes d’individusdifférents de ceux à évaluer.D’autres fois, elles commencentà être sérieusement dépassées.De plus, les recherches rappor-tées dans le manuel en fait defidélité et de validité sont par-fois minimales… Si le choixd’instruments acceptables estassez varié pour les inventairesd’intérêts, il est actuellementplutôt restreint pour les testsd’aptitudes. Cette pénurie rela-tive de « bons » instruments constitue une difficulté importantepour plusieurs milieux de pratique. Parmi ses impacts négatifs,on constate l’utilisation répétée des mêmes tests aux mêmespersonnes (la Batterie Générale de Tests d’Aptitudes, notam-ment), à des fins différentes, ce qui cause certainement des effetssur la valeur des évaluations.

En ce qui a trait aux normes, nous travaillons parfois avec desinstruments dont les standards sont américains. Cette pratiquese défend dans la mesure où la traduction de l’instrument con-cerné aura été faite selon des modalités scientifiquement admi-ses et où il sera démontré que la dimension mesurée estrelativement peu affectée par les différences culturelles entreQuébécois et Américains. Cependant, il est probable que, dansbeaucoup de cas, l’utilisation de telles normes augmente l’incer-titude de l’interprétation. Par exemple, on utilise assez souventauprès des Québécois des inventaires d’intérêts dont les normessont américaines. Sachant que les réponses de ces personnessont comparées à des groupes différents d’elles au plan socio-culturel, on peut s’attendre à ce que les scores obtenus à certaineséchelles traduisent plus ou moins leur réalité : l’interprétationdoit donc être faite avec prudence. On rencontre un problèmedu même ordre avec les tests dont les normes commencent àdater. Les spécialistes de la psychométrie insistent sur le faitqu’il ne faut jamais baser une décision importante sur un seulrésultat de test. Cet impératif est d’autant plus vrai que l’instru-ment choisi est utilisé dans des circonstances qui augmententles risques d’erreur dans l’interprétation des scores qu’il fournit.Puisque les données obtenues sont discutables pour toutes sortesde raisons, il est d’autant plus nécessaire de les compléter pard’autres renseignements.

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Enfin, il faut admettre qu’il y a des situations pour lesquellesaucun instrument, parmi ceux qui sont disponibles, n’est vrai-ment approprié, et où il ne sera tout simplement pas possiblede se servir de tests. Cela peut être le cas, par exemple, lors del’évaluation de clientèles dont l’origine culturelle est très dif-férente de la nôtre.

II – Utilisation des tests

Une utilisation responsable des tests suppose qu’un ensemblede conditions soient respectées afin que toutes les étapes duprocessus contribuent à l’atteinte des trois exigences qui ont étéénoncées au début de ce texte. Nous n’entrerons pas ici dans ledétail de toutes ces mesures : l’ouvrage de Sarrazin, cité plushaut, fournit des précisions sur toutes lesquestions pouvant se poser quant à l’utilisa-tion des tests. Nous formulerons simplementquelques remarques sur des points par-ticuliers qui semblent parfois problé-matiques.

D’abord, avant de procéder à l’administra-tion d’un test, il convient de clarifier, auprèsde tous les individus qui s’y soumettent, lesobjectifs poursuivis et l’utilisation prévuedes résultats du test. Dans le cadre d’unprocessus individuel, cette exigence est assezsimple à respecter. C’est dans le testing col-lectif qu’il est parfois plus compliqué de s’yplier. Lorsque des tests doivent être admi-nistrés à des groupes d’individus dans lecadre de programmes comportant cetteforme d’évaluation (sélection, classification, formation, orien-tation, etc.), on devrait s’assurer que tous les participants saventpourquoi ils doivent les passer et quelle utilisation sera faite desrésultats. Cette précaution est nécessaire, non seulement pourmaintenir la motivation des personnes, mais aussi pour obtenirun consentement éclairé de leur part. En outre, sauf dans dessituations bien particulières, les personnes testées devraient êtreprévenues du genre de tests qu’elles vont avoir à effectuer, dutemps que cela va prendre, de la manière dont elles peuventéventuellement s’y préparer, etc. De tels renseignements peu-vent diminuer l’anxiété, contribuer à placer les individus dansde meilleures dispositions pour passer le test et, donc, donnentlieu à des résultats plus valables. Dans le cas du testing collec-tif, toujours, il est important de pouvoir repérer les individusprésentant des caractéristiques spécifiques et pour lesquels lestests choisis pourraient ne pas être valides (par exemple, despersonnes d’origine étrangère ou ayant un handicap risquantde poser un problème lors de la passation du test).

Au plan des modalités d’administration et de correction, larigueur reste une exigence incontournable. Suivre scrupuleuse-ment les indications fournies devient une nécessité pour obtenirdes résultats valables. Des questions peuvent cependant surgirquant aux possibilités d’adapter les conditions de passation àdes cas particuliers : lire les questions à quelqu’un qui a des dif-ficultés de vision, accorder plus de temps à un individu trèsanxieux, fournir des directives dans une autre langue que celledans laquelle le test a été fait, etc. Dans quelle mesure de tellesadaptations sont-elles permises ? La réponse à cette questionn’est guère facile. Il arrive que le concepteur du test ait déjàprévu des adaptations possibles (par exemple, une limite detemps différente dans certains cas, des consignes traduites dansune autre langue, du texte écrit en plus gros caractères pour les

personnes ayant des problèmes de vision)et présente des données sur l’impact de cesadaptations sur les résultats. Si ce genred’indication n’est pas disponible, il faut jon-gler avec un ensemble de considérationstouchant la valeur du résultat obtenu dansdes conditions différentes de celles prévueset le respect de normes concernant l’équitéde l’évaluation et la non-discrimination despersonnes ayant des caractéristiques parti-culières. Les ajustements possibles dépen-dent du contexte et des objectifs poursuivis.Dans tous les cas, on doit procéder à uneanalyse approfondie de la situation, du typede handicap en cause, de l’impact de celui-ci sur le test et des conséquences des modi-fications envisagées sur l’interprétation etl’utilisation des résultats du test, avant de

procéder à ces ajustements. Les chapitres 9 et 10 de l’ouvragede Sarrazin fournissent des balises utiles à ce sujet.

Le recours croissant à l’informatique, marque de notre époque,crée des conditions nouvelles pour l’administration et la correc-tion des tests. Ainsi, dans les tests administrés par ordinateur,on peut contrôler divers aspects de la passation (par exemple,le temps de réponse à chaque question) et obtenir rapidementun profil de résultats accompagné d’une interprétation.L’ordinateur facilite donc à plusieurs points de vue le travaild’administration et de correction d’un test. Cependant, nousdevons nous assurer que ce nouveau contexte est adapté auxindividus qui effectuent le test. En outre, s’il est maintenant pos-sible de faire passer des tests à distance grâce à Internet, il fauttoujours garder le contrôle des conditions de passation. À pro-pos des nombreux tests offerts sur Internet, la prudence exigequ’on en vérifie la valeur avant d’inciter un client à s’y soumettre.

Les spécialistes de

la psychométrie

insistent sur le fait

qu’il ne faut jamais

baser une décision

importante sur un

seul résultat de test.

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Un autre point qui mérite d’être rappelé est celui des droitsd’auteur relatifs aux tests, qui doivent être respectés. Le manquede ressources financières et le coût des tests ne constituentmalheureusement pas une excuse pour se servir de photocopiesde matériel sans l’autorisation de l’auteur ou de la maison d’édi-tion du test en question.

III – Interprétation des résultats

Le terme « interprétation », dans le cas de résultats de tests, aplusieurs sens et peut désigner plusieurs opérations, à différentsniveaux de complexité, liées au fait de dégager la significationdes scores obtenus à un test (voir à ce sujet Lichtenberg etGoodyear, 1999).

Dans son acception la plus simple, l’interprétation consiste àdécoder le sens des scores, en tenant compte de l’ensemble deséléments qui y contribuent : le type de score utilisé, l’erreur demesure qui s’y rattache, la nature des dimensions mesurées, lescaractéristiques du groupe normatif utilisé, s’il y a lieu, ainsique les conditions dans lesquelles le test a eu lieu. Ici, on se situesurtout sur le plan de la description du comportement reflétépar les résultats du test. Cette opération de base doit être effec-tuée avec la plus grande rigueur avant d’aller plus loin.

À un autre niveau, dans son acception la plus complète et laplus complexe, l’interprétation consiste à extrapoler, des résul-tats obtenus, des possibilités ou des hypothèses en lien avec lesobjectifs et le contexte du testing. À cette étape, la descriptionque reflètent les scores est mise en relation avec d’autres ren-seignements provenant d’autres sources, et doit être nuancéeet questionnée au besoin, parfois discutée avec la personne con-cernée, et utilisée pour fournir des éléments de réponse auxquestions qui ont provoqué le recours au testing. Ici, on se situeau plan de l’inférence. À cette étape, les données disponiblessur la précision et sur la validité des scores fournis par l’instru-ment devraient constituer une référence essentielle. Ce sont eneffet ces données (et non les croyances populaires qu’on voitparfois se développer autour de certains tests !) qui permettentde justifier la manière dont les scores peuvent être utilisés, lesconclusions qui sont formulées sur la base de ces scores et lesnuances qui y sont apportées. Parfois, l’information requise surla validité des scores n’est pas directement fournie dans lemanuel du test, mais peut être déduite de recherches faitesauprès d’instruments très semblables, avec des sujets semblables,dans des circonstances semblables. La rigueur, encore une fois,est indispensable. Il faut s’assurer que l’on pourra défendrel’interprétation qui est faite des résultats en nous appuyant surdes éléments de preuves scientifiquement admissibles.

De plus en plus de tests offrent la possibilité d’interprétationspréparées à l’aide de logiciels. Ces interprétations informatisées,qui combinent souvent description avec inférence comme nousvenons de les exposer, font gagner beaucoup de temps et per-mettent d’éviter les erreurs de correction. Cependant, il faudrait,avant de s’y fier, vérifier sur quelles bases elles reposent, queldegré d’imprécision s’y rattache et si elles sont bien valablespour les personnes qu’elles concernent. En outre, elles doiventtoujours être étudiées avec soin et nuancées selon les facteurspouvant influencer les résultats. Parfois, il ne convient pas deles transmettre telles quelles aux personnes concernées, maisplutôt d’en faire une synthèse, dans un langage clair et accessi-ble au destinataire.

Quelques mots, justement, pour terminer, sur la transmissiondes résultats de tests aux individus concernés. Dans un con-texte d’orientation, il s’agit d’une étape essentielle qui gagne àêtre bien intégrée au counseling. En effet, si la précision et larigueur restent de mise dans le langage utilisé, il est aussi néces-saire d’adapter l’information aux caractéristiques et aux besoinsde la personne et de pouvoir travailler avec celle-ci, non seule-ment sa compréhension des données, mais aussi l’impact émo-tif de ces dernières, leur effet sur l’image de soi et sur lesdécisions envisagées et la manière dont l’état qu’elles reflètents’inscrit dans le développement de la personne en question.

Conclusion

L’une des conclusions qui se dégagent des considérations quiprécèdent est que, pour utiliser des tests d’une façon efficace etresponsable, il faut y investir du temps : le temps de se mettreà jour en psychométrie et d’étudier la documentation perti-nente, le temps d’analyser les situations, le temps de réfléchirsur l’interprétation des résultats, le temps de rencontrer les indi-vidus pour leur expliquer la signification de leurs résultats detests et en travailler les implications avec eux. Or, et c’est l’undes drames de notre époque, le temps semble être ce quimanque le plus dans beaucoup de milieux de travail, contami-nés par la nécessité d’accomplir toujours plus en toujours moinsde temps. On a souvent recours aux tests en croyant justementqu’ils permettent de gagner du temps, et c’est une croyancefondée. N’oublions pas, cependant, que l’utilisation de cesinstruments reste un acte professionnel, et qu’à ce titre, elleexige au moins un minimum de réflexion. Donc, du temps ! Ilfaut souhaiter à tous les conseillers d’orientation de pouvoirprendre ce temps nécessaire à l’accomplissement d’un travailde qualité. ❖

Référence :LICHTENBERG, J.W. et R.K. GOODYEAR. Scientist-practitionerPerspectives on Test Interpretation, Toronto, Allyn & Bacon,1999.

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Vous recevrez le programme complet, accompagné du formulaire d’inscription, dans la semaine du 28 mars 2005

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Livres et liens utiles

American Educational Research Association, American Psycho-logical Association et National Council on Measurement inEducation. Normes de pratique du testing en psychologie et enéducation. Traduit par l’OCCOPPQ sous la direction de GeorgesSarrazin, Montréal, Institut de recherches psychologiques, 2003.

ANASTASIE, A. Introduction à la psychométrie, Montréal,Guérin Universitaire, 1994.

BERNIER J.-J. et B. PIETRULEWICZ. La psychométrie : traitéde mesure appliquée, Montréal, Gaétan Morin, 1997.

COSSETTE, J. et W. LAROCHELLE. Une méthode d’analyse detests d’intérêts, Sherbrooke, Les projets Alpha et Oméga inc.,1998.

GUÉDON, M.-C. et R. SAVARD. Tests à l’appui. Pour une inter-vention intégrée de la psychométrie en counseling d’orientation,Sainte-Foy, Les Éditions Septembre, 2000.

PETTERSEN, N. Évaluation du potentiel humain dans les organi-sations, Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 2000.

Des éditeurs de tests accessibles par Internet :

L’Institut de recherche psychologiquehttp://www.i-r-p.ca

Psychometric Canadahttp://www.psychometrics.com

Buros Center for Testinghttp://www.unl.edu/buros

Psychological Corporation devenu Harcourt Assessmenthttps://harcourtassessment.com/hai/International.aspx

Institut de Recherche et d’Évaluation Psychopédagogiquehttp://www3.sympatico.ca/irep

Le Réseau Psychotech inc.http://www.psychotech.qc.ca

Journée de formation continue de l’Ordre – 10 juin 2005

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Au menu du programme préliminaire :Série de conférences sur l’évaluation comme geste professionnel

Présentation de différents moyens propres à mener une évaluation rigoureuse

Présentations et échanges sur des pratiques concrètes d’évaluation : ateliers par secteurde travail (scolaire, employabilité et réadaptation, organisationnel)

Où : Centre des congrès de QuébecCoût : 125 $ (plus taxes)

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Nadine Descheneaux, journaliste

Quand le conseiller d’orientation Jean-Pierre Hick arrive àla Cour, l’air sérieux avec ses mallettes débordantes dedossiers et une pile de documents sous les bras, on le prendd’abord pour l’un des avocats venus plaider la cause. Onlui demande souvent « Pour quelle firme travaillez-vous ? »,encore persuadé d’avoir affaire à un défenseur de la jus-tice. « Je travaille pour moi, répond-il du tac au tac. Je suistémoin-expert dans ce dossier. »

Depuis plus de vingt ans, Jean-Pierre Hick, conseiller d’orien-tation et membre de l’Ordre depuis 1982, aide les personnes enquête de nouvelles orientations de carrière. Toutefois, son exper-tise ne s’arrête pas là. Un peu par hasard, comme il l’avoue, il aété amené à développer une expérience particulière dans ledomaine de l’expertise légale en agissant comme témoin-expert.En effet, depuis une vingtaine d’années, des bureaux d’avocatsfont appel à lui afin de mener à bien certaines causes impli-quant surtout des compagnies d’assurance. « Une personne apayé toute sa vie une assurance invalidité. Un jour, il lui arriveun accident ou une maladie, et là, c’est classique, la compagniene veut pas payer. Cette personne prend donc un avocat pourdéfendre sa cause devant la Cour. C’est ici que j’interviens. »Un témoin-expert doit donc produire des rapports d’expertiseétoffés sur lesquels les avocats se baseront pour faire triompherleur cause. « C’est un champ de pratique nouveau pour les con-seillers d’orientation, mais aussi pour les avocats qui recherchentdes expertises dans les domaines touchant l’emploi, le marchédu travail, les possibilités d’orientation d’une personne et sescapacités d’apprendre », note Jean-Pierre Hick qui est un desrares, à sa connaissance, à produire de tels rapports pour desavocats.

Dans des causes où il est question d’évaluation des capacitésintellectuelles et cognitives, d’habiletés physiques et fonction-nelles requises pour un métier spécifique, d’employabilité, decompétitivité face au marché du travail, de disponibilitésd’emplois, d’évaluations scolaires, d’aptitudes de base et d’éva-luations de bien d’autres facteurs interreliés, le conseillerd’orientation est la personne-ressource à consulter. Il devientparfois le témoin-expert principal de la cause. « Les avocatsplaidant de telles causes ne savaient pas vers qui se tourner.C’est un champ de pratique qui n’appartient pas aux psycho-

logues, mais bien aux conseillers d’orientation.Très souvent, quand ils apprennent que je peuxfaire de telles évaluations, ils trouvent que jeleur suis bien utile », constate Jean-Pierre Hickqui cumule une maîtrise en administrationscolaire et une autre en counseling, toutes deuxfaites à Ottawa. Il a aussi obtenu deux certifi-cats de l’UQAM, en insertion sociale et pro-fessionnelle des jeunes et un autre en sciencessociales.

Un parcours unique

La première fois qu’il a été appelé comme témoin-expert, Jean-Pierre Hick confie qu’il ne savait pas trop comment procéder.« Mais, au fil des ans, j’ai développé ma façon de faire. » Aprèsavoir pris connaissance de la cause, il rencontre le client –souvent plusieurs fois – afin de mieux le connaître et lui fairepasser plusieurs tests et évaluations afin de pouvoir présenterun rapport poussé aux avocats sur les possibilités de cette per-sonne à réintégrer le marché du travail. « Je fais des évaluationspsychométriques, des tests d’intelligence, des tests de capacités,des tests d’intérêts et des tests de personnalité, explique le spé-cialiste. Cependant, ce ne sont pas nécessairement toujours lesmêmes. Il faut d’abord voir lequel sera le plus justifié danschaque situation, selon chaque individu. Il est important detoujours être capable de justifier nos choix et surtout de prou-ver que ce test était nécessaire. En faire trop reviendrait à minernotre crédibilité. »

Un autre point que Jean-Pierre Hick juge comme étant trèsimportant est la qualité totale. C’est ce qu’il vise quand il pré-pare un dossier pour un avocat. « Je fais les tests deux fois cha-cun pour ne pas me faire reprocher qu’une fois, le client n’étaitpas dans les conditions idéales ou quoi que ce soit. Ainsi, le“ re-test ” doit confirmer les résultats du premier. De même, lestests sont donc scientifiquement valides. » Aussi, Jean-PierreHick prend soin de sélectionner des tests reconnus, valides etrécents. « Les populations ont changé, tout comme les valeurset les habitudes, donc les mesures en ont fait tout autant.J’effectue beaucoup de recherches afin de trouver les tests lesmieux adaptés. Ça demande du temps et de l’énergie, mais c’estdu travail bien fait. »

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Jean-Pierre Hick, passionné de l’évaluation Un expert qui témoigne

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Une fois tous les tests compilés, analysés et interprétés, unetâche bien ardue attend le témoin-expert. On aurait tort decroire que son rôle n’est que d’aller en Cour et de témoignerselon ses observations et ses rencontres. Jean-Pierre Hick, lesdonnées en main, s’attable à un travail plus difficile : la rédac-tion du rapport. « Il doit être clair et très précis. Il y a un tra-vail de vulgarisation à faire pour qu’il soit accessible à tous »,précise-t-il. Au fil des ans, il a transformé la garde-robe de sonbureau en un mini-centre de documentation bien personnel.Il a tout à portée de la main. S’il cherche une précision, il n’aqu’à se lever et à fouiller dans des porte-documents fort bienrangés d’où il sort l’information recherchée en un clin d’œil.Pour la rédaction de son rapport d’expertise, il ne lésine surrien. Il ajoute des annexes comprenant tableaux, graphiques,explications, précisions pour rendre le document – sa brique,comme il l’appelle parfois – le plus complet possible. La qua-lité totale, rien d’autre !

Devant la Cour

Une fois les dernières lignes durapport terminées, le travail sepoursuit pour un témoin-expert.Il doit aller en Cour. Bien sûr, letribunal est impressionnant. Il fautarriver là très convaincu et convain-cant. « Les avocats de la partie adverse vont tout faire pourminer ma crédibilité. Ils poseront des questions pointues sur lavalidation des tests ou sur certains critères pour prouver au jugequ’il ne doit pas se fier à mon rapport. C’est à moi d’arrivertotalement prêt », raconte monsieur Hick. Les matins où il doitse rendre au Palais de Justice, il se lève tôt, relit ses notes, prendun déjeuner léger et arrive à l’heure au rendez-vous. Rien n’estlaissé au hasard. Il connaît sur le bout des doigts son dossier.Franchement, un homme organisé ! À la suite des questions quilui ont été posées au cours des dernières années, il a noté surdes fiches les réponses aux interrogations le plus souventsoulevées. « Je dois avoir réponse à tout et ne jamais laisserparaître le moindre doute. »

Beaucoup d’énergie !

L’investissement, en temps et en énergie, est énorme, voiremême impressionnant, pour ce conseiller d’orientation à lavocation particulière. Surtout qu’il mène son bateau tout seul.Avantage ou inconvénient ? Un doute persiste. Toutefois, il resteque cette situation l’a déjà surpris. « Un jour, j’ai eu un appeld’une firme qui poursuivait une compagnie d’assurances pourune cause relevant d’un accident d’avion. Quelques jours plustard, les avocats de la défense pour la même cause me contac-taient pour être aussi leur témoin-expert dans l’affaire.Finalement, personne ne m’a eu, mais avouez que c’est ironi-que », se rappelle-t-il.

Dans les universités, aucun cours dans les programmes liés àl’orientation ne touche à la discipline des témoins-experts.« Pourtant, ce champ de pratique devrait faire partie du renou-veau de notre profession, croit Jean-Pierre Hick. D’abord, ledomaine scolaire, à cause de bien des circonstances, éliminepetit à petit le travail des conseillers. L’école devient orientanteet malheureusement, on demande aux enseignants de comblerleurs tâches en faisant de l’orientation. Les conseillers d’orien-tation doivent donc se repositionner dans d’autres secteurs,dont les industries et le domaine des assurances. Mais on devraitouvrir aussi vers l’expertise légale. » Pour les conseillers quivoudraient se lancer dans l’aventure, Jean-Pierre Hick n’a quequelques conseils à prodiguer. « Être fonceur et avoir le goûtdu défi ! Ensuite, il faut prendre une cause et ne pas hésiter àaller jusqu’au bout.

Il n’y a pas de compromis à faire. On est dans les liguesmajeures et il n’y a pas d’improvisation possible ! » Le regardvif et fier, il insiste sur le fait que « c’est exigeant, mais com-bien valorisant ». Personne ne le contredira, il y a unegrande part de stress, mais monsieur Hick précise que c’estun bon stress, celui qui stimule et non celui qui ronge l’éner-gie. Celui qui est animé par un esprit de recherches et

d’analyse trouvera sans doute cedomaine passionnant, comme l’aimeJean-Pierre Hick depuis toujours.« Mon travail en est un de défi,notamment à cause de la rigueurexigée et des échéances à respecter.Aussi, je repousse continuellementmes limites », indique le spécialiste.Aucun doute ne persiste, son travailn’est pas routinier.

De plus, ayant son bureau à la mai-son, il constate qu’il est agréable de

profiter d’une certaine flexibilité. « Je peux travailler quand lesenfants sont couchés. Mais, il m’arrive aussi de rencontrer desclients pendant la fin de semaine. Il suffit de s’organiser. »Finalement, le côté « humain » de son boulot lui donne des ailes,comme il le dit si bien. « Souvent, je rends service à un pauvrediable qui est ballotté et bafoué dans ses droits. Je l’aide à mafaçon en lui redonnant un but et de l’espoir », soutient l’hommedynamique au regard bien tendre. Aussi, pour Jean-Pierre Hick,qui a déjà songé à devenir avocat, il faut s’investir totalementdans ses causes. Bien sûr, il vise l’excellence et il promet queson rapport de béton fera gagner son client, mais plus encore,il choisit ses causes, n’embrassant pas n’importe quoi pour fairede l’argent. « Je suis mon propre patron. J’ai une conscience etje me permets de choisir », relève-t-il. Cet aspect lui permetsans doute de préserver son intégrité et sa crédibilité. ❖

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NDLR : Les universités ont le choix de présenterun survol de leurs recherches en cours ou uneseule.

A – Le projet de Marie-Lise Brunel, c.o.,(FQRSC 2002-2005) porte sur Les théoriesimplicites des émotions et sur la « théorie del’esprit » que se construisent les gens issusde différentes origines culturelles lorsqu’ilsinterprètent les mimiques d’autrui.(chercheure principale FQRSC : UrsulaHess, UQAM). Ce projet étudie lesthéories implicites des membres de dif-férents groupes culturels concernant l’af-fichage des émotions et leur théorie del’esprit pouvant faciliter ou inhiber la com-préhension des émotions d’autrui. Lesthéories implicites sont des croyances dontchacun se sert pour donner un sens à sonenvironnement. Une « théorie de l’esprit »est en lien avec l’empathie, car il s’agit làd’un phénomène qui opère lorsque quel-qu’un tente d’en comprendre un autre. Cesdeux types de théories influencent nonseulement l’affichage des émotions, maisaussi le processus de décodage des expres-sions émotionnelles. Pour réaliser ce pro-jet, des décodeurs issus de groupes ayantdes expériences différentes en décodage –tels des détectives, des comédiens, despsychothérapeutes, des professeurs de l’or-dre primaire, des étudiants en formationà la relation d’aide ainsi que des enfants –sont invités à décoder une centaine demimiques émotionnelles sur vidéo (il y aprise en charge de la dimension inter-culturelle et des rapports sociaux de sexe).Les meilleurs et les pires décodeurs sontconviés par la suite à une entrevue enre-gistrée sur vidéo où la technique d’obser-vation de la mimo-posturo-gestualitédéveloppée par Cosnier et Brunel pourl’étude des théories de l’esprit est utilisée.

Ce dispositif permet non seulementd’avoir accès aux stratégies de décodage età la théorie de l’esprit de chacun, maisaussi d’observer dans quelle mesure lessujets utilisent leur « analyseur corporel »(par exemple, faire preuve d’empathieprimitive) comme moyen de décoder lesémotions d’autrui. Les résultats de cetterecherche devraient aider à mieux com-prendre les sources de mésententes pou-vant avoir des conséquences graves dansle bon déroulement des interactions entrehommes et femmes et entre membres dedifférents groupes culturels. L’utilité decette recherche est aussi indéniable en for-mation au counseling interculturel.

B – Trois des projets de Cynthia Martiny,c.o., portent aussi sur l’interculturel. Voicideux demandes présentées en 2004 auFQRSC :

1) Les facteurs de réussite dans l’intégra-tion en emploi des migrants;

2) Le développement et l’éducation desémotions chez les jeunes enfants (cher-cheur principal : Michael Schleifer).

Deux financements antérieurs (reçus del’UQAM) ont permis d’identifier :

1) Les expériences des intervenants en for-mation au counseling de groupe auprèsde personnes d’origines culturellesvariées éprouvant des problèmes de vio-lence conjugale. Ce projet est en lienavec l’organisme ProGam (Centred’intervention et de recherche en vio-lence conjugale et familiale), membrede CentrAide;

2) Un deuxième projet portait sur Lesspécificités des pratiques en employabi-lité auprès des personnes réfugiées etimmigrantes. Ce dernier projet a étéconçu avec la Table de concertationdes organismes œuvrant auprès des

personnes réfugiées et immigrantes deMontréal (TCRI), membre du Centred’intégration en emploi (CIE Lauren-tides). Cette collaboration a débou-ché sur une invitation à participer àl’équipe de recherche et d’action ensanté mentale et culture (ÉRASME).

C – Les projets de Bernard Rivière, c.o.,portent tous sur la réussite scolaire au col-légial :

2004-2005 – Évaluation d’un outil multi-média d’encadrement (programmeFODAR) avec Evelyne Vallière (cher-cheure principale, TELUQ).

2003-2005 – La persévérance et la réussitescolaires des cégépiens. MEQ etFQRSC (chercheur principal : GillesTremblay, Université Laval).

2003 – Prix de l’orientation décerné parl’OCCOPPQ pour le livre : Les jeuneset les représentations sociales de laréussite, Montréal, Logiques.

1997 – Prix de la ministre de l’Éducationdu Québec (volet : recherche pédago-gique) décerné pour le livre : Le décro-chage au collégial, le comprendre et leprévenir, Montréal, Beauchemin.

D – Le projet principal d’Yves Chagnonest l’édition de la revue internationaleCarriérologie qu’il mène de main de maîtreet qui mobilise même tous ses loisirs.

E – Luc Bégin, c.o., a développé uneapproche psychogénétique de l’identité etfait de la formation en lien avec cetteapproche. Il a publié de nombreux ouvra-ges dont celui portant sur L’identité du moi.

F – Edwidge Desjardins, c.o., est une spé-cialiste du coaching, de l’approche centréesur les solutions et s’intéresse au conceptde « hardiesse cognitive ». ❖

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www.uqam.ca

Des recherches interculturelles à l’UQAM (2004-2005)

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NDLR : Les universités ont le choix de présenterun survol de leurs recherches en cours ou uneseule.

Compétence à s’orienter, approche orien-tante, santé émotionnelle au travail, inter-ventions auprès d’adultes sans diplômesont quelques-uns des dossiers chauds del’année 2004. Bref aperçu du dynamismede la recherche au sein de notre départe-ment.

Charles-Henri Amherdt travaille surl’opérationnalisation d’un nouveau con-cept, la « santé émotionnelle au travail »,résultat du mariage des émotions et descompétences, qui s’inspire du concept desanté psychologique et de celui de l’intel-ligence émotionnelle. Dans une rechercheportant sur 372 cadres et professionnelsdes secteurs de la santé et de l’éducationau Québec, on a observé une relationsignificative entre la santé émotionnelle etle prolongement de la vie professionnelle.Ce concept s’applique dans toutes lessphères de vie.

Rachel Bélisle a préparé pour la Directionde la formation générale des adultes duMEQ (DFGA) une étude précédant l’éla-boration du « bilan des acquis » destinéaux adultes sans diplôme. Toujours pourla DFGA, elle dirige une étude prépara-toire au développement d’outils de sensi-bilisation de conseillères et conseillers àl’importance de proposer aux adultes sansdiplôme des activités de lecture adaptées.Info. : http://erta.educ.usherbrooke.ca/

Sylvain Bourdon mène une étude sur lerôle de la famille et des réseaux sociauxdans la persévérance aux études collégialesavec Johanne Charbonneau de l’INRS ettrois chercheurs du collégial. Il termine un

projet visant à appuyer la mise en place deservices éducatifs adaptés aux jeunesadultes âgés entre 16 et 24 ans et qui a déjàdonné lieu à deux publications. Il colla-bore à la rédaction du rapport québécoisde l’Enquête internationale sur l’alphabéti-sation et les compétences des adultes(EIACA).Info. : http://erta.educ.usherbrooke.ca/

Marcelle Gingras, c.o. concentre ses effortssur le concept d’approche orientante des-tiné à mieux répondre aux besoins d’orien-tation des jeunes et des adultes. Avec sonéquipe, elle étudie les composantes,modalités d’implantation et d’évaluationde cette nouvelle approche éducative, et ce,tant aux ordres d’enseignement primaire,secondaire et collégial qu’à l’éducation desadultes. Info. : http://gpsao.educ.usher-brooke.ca Aussi, elle poursuit ses travauxde développement, validation et diffusiond’outils et d’instruments de mesure dontl’Inventaire visuel d’intérêts professionnelset l’Inventaire des préoccupations de car-rière pour les adultes.

Réginald Savard, c.o. s’intéresse au coun-seling comme outil privilégié pouraccompagner diverses clientèles aux prisesavec des problématiques d’exclusion, deréinsertion, de réadaptation et de réorien-tation. Ses dernières recherches portent surle counseling de réadaptation en considérantles facteurs psychosociaux contribuant à lachronicisation et sur le counseling deréinsertion par la mise en œuvre d’un dis-positif d’intervention auprès des person-nes identifiées comme étant en processusd’exclusion socioprofessionnelle.

Quelques publications récentes demembres de l’équipe professorale

AMHERDT, C.-H. « S’occuper de la santéémotionnelle des gens, c’est payant ! »,Revue de l’Association des infirmières etinfirmiers en santé du travail du Québec,vol 23, no 4, 2004, p. 3-23.

BOURDON, S. ET S. ROY. J’embarque quandça me ressemble. Cadre andragogique pourles services de formation et d’accompagne-ment adaptés visant les décrocheuses et lesdécrocheurs scolaires de 16 à 24 ans (coll.P. Dionne et M.-H. Leclerc). Québec : Gou-vernement du Québec, MEQ. http://www.meq.gouv.qc.ca/dfga/politique/16-24/pdf/cadreandragogique.pdf

GINGRAS, M., C. ST-LAURENT, ETD. MARCEAU. « Les rôles des enseignantsdans l’approche orientante », dans D.Pelletier et coll., L’approche orientante : laclé de la réussite scolaire et professionnelle,Sainte-Foy, Septembre éditeur, p. 48-61,http://gpsao.educ.usherbrooke.ca

BÉLISLE, R. (sous presse). « Valoriser lesacquis des adultes non diplômés », dans A.Mercier, M. Ettayebi et F. Medzo (dir.),Défis et perspectives de l’élaboration d’uncurriculum. Le cas de la formation généralede base des adultes, Montréal, Les Cahiersscientifiques de l’Association francophonepour le savoir, p. 128-141.

SAVARD, R., M. ROBIDOUX, ET R. LAHAIE,Le Projet Synchro : interventions auprès despersonnes en processus d’exclusion socio-professionnelle. Cadre conceptuel, cadred’intervention et résultats de recherche,(coll. A. Brien), Sherbrooke, Emploi-Québec, 2004. ❖

Qui fait quoi au département d’orientation professionnelle de l’Université de Sherbrooke

www.usherbrooke.ca

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