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    Ils surgirent du bois. Je courus aussi vite que pos-

    sible, mais essayez d'y arriver avec une guitare sur le

    dos ! E l le rebondissait sans cesse sur l'a rr ire de mes

    cuisses.

    C'tait un samedi aprs-midi, et des chiens me pour-

    suivaient. Pourquoi y en a-t-il tant qui errent dans

    notre ville ? pensai-je en essayant de les semer. Et

    surtout, pourquoi en ont-ils toujours aprs moi ?

    Les btes froces avaient d se poster la lisire du

    bois, guettant mon passage, se rgalant l'avance enm'apercevant : Tiens, regarde qu i vient. C'est le

    petit blond, tu sais, Larry Boyd. Allons lui mordre

    les mollets !

    Je glissai sur la neige. M alheur ! Je les sentis juste

    derrire moi, prts m'attaquer. Ils aboyaient furieu-

    sement, sans doute pour me faire mourir de terreur.D'ailleurs, la peur me donnait des maux de ventre.

    Normalement, je ne crains pas les chiens, et mme je

    les aime bien ! Mais je ne supporte pas quand ils

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    sont en meute et qu'ils me prennent pour du gibier.

    salivant, aiguisant leurs crocs pour me dvorer...comme maintenant !

    Je trbuchai et m'enfonai jusqu'aux genoux dansune congre. Ils gagnrent du terrain.

    Ce n'est pas de jeu, rlai-je intrieurement. Ils ont

    quatre pattes, et moi deux. Et ils n'ont pas de guitare

    sur le dos, eux !

    Comme d'habitude, le molosse noir l 'air dmo-niaque menait la troupe. Les babines retrousses,

    grognant rageusement, il arriva si prs de moi que jepus voir ses dents blanches, terriblement pointues.

    - la niche, la niche , sales btes ! hurla i-je.

    Cet ordre tait d'autant plus stupide qu'ils n'avaient

    pas de niche !J'acclrai pour me dgager et drapai. Je repartis de

    plus belle, mon cur battant fort. J'tais couvert de

    sueur malgr le froid. C'tait la fin de l'hiver, mais il

    faisa it mo ins c inq degrs ! Les yeux fixs droitdevant moi, je fis des efforts dsesprs pour courir

    plus vite. Pas moyen. Je commenais avoir descrampes.

    En fait, je n'en pouvais plus. Je tournai la tte et vis

    les monstres qui traversaient les cours et les jardins

    en bondissant dans la poudreuse. peine dix mtresnous sparaient !

    - Al lez- vous -en ! F ic he z le camp ! hurlai-je. M a i s qu 'est-ce qu' i ls me veulent ? me l amen-

    tais-je. Je suis pourtant un gentil garon de douze

    ans, tout le monde le dit.

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    La dernire fois, je m'en tais sorti en me rfugiant

    dans une voiture en stationnement, juste au momento ils allaient me sauter dessus. Mais aujourd'hui, le

    temps que j'ouvre une portire, ils m'auraient dj

    aval !

    Heureusement, je n'tais plus trs loin de la maison

    de Lily. C'tait ma seule chance de leur chapper.Mais je butai sur une pierre dpassant de la neige !

    Nooo oon !La caisse de la guitare passa par-dessus moi et

    retomba avec un bruit mou. Je m'talai de tout mon

    long, la tte la premire. Et j' at tendi s, rsign :

    Cette fois, c'est bien fini. Ils vont m'avoir !

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    J'tais sonn ! Je n'y voyais plus rien. Je me redres-

    sai sur les genoux et secouai mes vtements tout

    blancs. Les chiens aboyaient, affams.

    - Taisez-vous ! ordonna une voix familire. Partez !Ils cessrent de hurler et se mirent grogner.

    - Lily ! fis-je en essuyant mon visage.

    Elle lana une boule de neige dans leur direction :

    - Al lez-vous-en !

    Les grognements se transformrent en un murmure

    et les chiens commencrent reculer. Le meneurbaissa la tte et s'loigna lentement, suivi par les

    autres.- Lily, mais... ils t'obissent ? m'exclamai-je en me

    relevant.

    - B i e n sr, Lar ry , tu sais b ien que je su is une

    dure !En fait, Lily Vonne n'a pas l'aspect d'une coriace.

    Nous avons le mme ge, mais elle parat plus jeune

    que moi. Petite, mince et mignonne, elle a les

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    cheveux mi-longs, avec une frange qui lui couvre lefront. Elle porte autour du cou une chane avec une

    pice d'or, un cadeau de son grand-pre. Le plus

    incroyable chez el le , ce sont ses yeux . Ils ne sont pas

    de la mme couleur ! L'un est bleu, l'autre vert.

    -J'espre que la caisse de la guitare est imper-mable, dit-elle en me la tendant. cet instant, la meute s'lana en aboyant aprs un

    cureuil.- Je t'ai vu par la fentre, m'expliqua Lily. Pourquoi

    en ont-ils toujours aprs toi ?

    Je haussai les paules :

    - Je me pose la mme question, tu sais. Mais je n'ai

    pas de rponse.

    Lily marcha devant moi. Nos bottes crissaient sur lesol enneig. Nous traversmes la route et arrivmeschez Li ly.

    - Pourquoi es-tu tellement en retard ? s'tonna-t-elle

    alors que nous entrions.

    - J'ai d aider papa dblayer devant le garage.

    J'tais tremp. Des flocons s'taient glisss sous machemise et l'eau coulait le long de mon dos. Je trem-

    blais de froid. Je n'avais qu'une envie : me retrouver

    bien au chaud dans la maison confortable de mon

    amie.

    J'enlevai ma parka et la suspendis dans l'entre.

    Ar r iv dans le salon, je saluai Mar t in , John et Chr is-tine, nos trois complices. Agenoui ll sur le plancher,

    Martin tripotait son ampli. Celui-ci mit un couine-

    ment aigu qui nous fit sursauter.

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    Martin est grand, trs maigre, avec un air espigle,

    un sourire coquin et une touffe de cheveux noirs bou-

    cls. Il a douze ans comme nous, mais il en parat

    huit, surtout avec la casquette argent et noir qu'il ne

    quitte jamais. Christ ine est un peu boulotte, et sa che-

    velure frise est rouge carotte. Elle a des lunettes cer-

    cles de plastique bleu. E nf in , John est b lond, petit etcostaud.

    Martin me jeta un coup d'oeil et s'exclama, hilare :- H, v isez un peu la coupe de cheveux de La rry.

    Vite, prenons une photo !

    videmment, ils clatrent de rire.

    Ils se moquent toujours de ma coiffure, de mes

    grandes orei lles, et j ' e n passe. Je n'a ime pas trop a.

    C'est sans doute pour cette raison qu'ils insistentautant. Ce n'est pas ma faute si j ' a i de beaux cheveux

    chtain clair, longs et onduls !

    La r ry le po il u ! lana L i l y .

    Ils s'esclaffrent.

    - Lar ry le po il u, L arr y le po il u ! chantonnrent-ils.

    Je fis une grimace et, comme chaque fois qu'ilsscandaient ce stupide surnom, je devins rouge

    comme une pivoine.

    Enfin, part a, nous sommes de vrais amis et on

    rigo le bi en . On a cr un groupe de musique qu i

    passe son temps changer de nom. Cette semaine,

    c'tait les Gants et, celle d'avant, les Esprits.En tout cas Gants sonnait mieux que Hu r -

    leurs , le titre de l'orchestre que nous devions ren-

    contrer en finale du concours, au collge. C'tait

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    celui de Herv Harper, le batteur, et de sa sur

    jumel le Mar issa, la chanteuse. Un jour, en classe, jeleur avais demand pourquoi ils ne s'appelaient pas

    Marissa et les Hurleurs ?

    - T u n'y comprends rien , m'avait rtorqu le frre.

    Marissa ne rime avec rien, alors que Harper et Hur-

    leurs, oui !

    - Et Herv , avec quo i a rime, d'aprs toi ? Avecnavet !

    Il m'avait rpondu en partant d'un grand clat de

    rire. Quel nul !

    Pers onne n' ai ma it les Ha rp er ! Po ur nous , les

    Gants, une seule chose comptait : les battre cettefinale.

    - Si seulement l'un de nous savait jouer de la basse !gmit John pendant qu'on s'accordait.

    - Ou bien de la trompette, ou n'importe quoi d'autre

    que de la guitare, dit Chr is tine en sortant la sienne de

    son tui.- Trois guitares, a sonne super bien, surtout quand

    on met le son fond ! dclara Martin.Christine, lui et moi tions guitaristes. Lily chantait

    et John jouait d'un synthtiseur qui possdait dix

    rythmes diffrents. a nous faisait une sorte de

    batterie.

    On s'entrana sur un air des Rolling Stones. Mais

    comme John n'arrivait pas trouver le bon tempo,on finit par continuer sans base rythmique.

    - A l l e z , on recommence depuis le dbut, dcidai-je

    lorsqu'on eut fini.

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    - M a i s pourquoi ? demanda Li ly . C'tait chouette,

    non ?- On n'tait pas ensemble.

    - C ' e s t plutt toi qui drail lais, intervint Ma rt in en

    m'adressant une grimace.

    - En f in , tu sais bien que Lar ry cherche toujours la

    perfection, ironisa Christine.

    - a, on est pays pour le savoir ! On ne peut jamaisaller au bout d'un morceau !

    Je rougis de nouveau. Je voulais juste que a soit un

    peu mieux. Et puis ce n'est pas un dfaut d'tre per-

    fectionniste, non ?

    - Le concours a lieu dans dix jours, fis-je remarquer.

    Il est hors de question qu'on ne soit pas au point !

    Je dteste tre mal l'aise. C'est ma hantise. Peut-tre mme plus que les brocolis bouillis ! Et ce n'est

    pas peu dire !

    On reprit donc le morceau. John joua l'introduction

    avec son synthtiseur. Martin se chargea du premier

    chorus, moi du second. Lily rata la note aigu, mais

    sa voix est si douce et si mlodieuse que c'tait bienquand mme.

    la f in , j 'aura is bien voulu qu 'on remette a, mais

    j ' ta is sr qu' i ls m'auraient hach menu. Je fis donc

    comme si c'tait gnial.

    On joua deux heures d'affile, et a finit par sonner

    juste, je dois avouer.Aprs la rpt i t ion, L i l y suggra qu 'on ai l le se

    dtendre dehors. Le soleil tait encore haut. Le man-

    teau neigeux tincelait dans la lumire dore.

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    Nous nous courmes aprs dans le jardin situdevant la maison. Martin balana une norme poi-

    gne de neige sur la casquette de John. Une fantas-

    tique bataille s'engagea. Nous fmes vite puiss,hors d'haleine. Nous avions mal au ventre force

    de rire.

    Tiens , si on faisait un bonhomme de neige, pro-posa Lily.

    - Bonne ide, il pourrait ressembler Larry, ajoutaChristine.

    - Qui a dj vu un bonhomme de neige avec des che-

    veux blonds ? plaisanta Lily.

    - Dites, a ne vous ferait rien de m'oublier un peu ?grondai-je.

    Ils faonnrent de grosses boules pour le corps. Johnessaya de faire monter Mar t in sur le sommet de l'une

    d'el les et de faire rouler l'ensemble. M a is la boule se

    dfit et Martin retomba lourdement.

    Moi, je profitai de ce moment pour aller me prome-

    ner dans la rue. Soudain, quelque chose attira mon

    attention. La maison d' ct tait en pleine rnova-tion. Devant le perron, des vieilleries attendaient

    qu'on les emporte la dcharge.

    Curieux, je me penchai l'intrieur de la benne o

    taient dposs les objets, et farfouillai dedans.

    J'cartai une pile de carreaux de salle de bains, un

    rideau chiffonn. Soudain, sous un tapis en jute, jevis une petite armoire pharmacie en mail blanc.- a alors, c'est chouette !

    Je la sortis et l'ouvris. Elle tait pleine de flacons et

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    de tubes en plastique. J'examinai tout a avec atten-

    tion quand, brusquement, je tombai sur une boutei lle

    orange.- Venez voi r un peu, criai-je mes amis . Venez vo ir

    ce que j'ai trouv !

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    - Venez admirer ma trouvai lle ! les appelai-je en

    agitant la bouteille.

    Mais ils taient trop occups terminer leur bon-

    homme dans le jardin de Lily. Sauf Christine quiessuyait ses verres embus, comme d'habitude. Je la

    rejoignis d'un pas dcid.

    - M o n t r e , me dem anda -t- el le en remettant les

    lunettes sur son nez.

    ce moment les autres se retournrent, soudain int-

    resss par mon flacon. Tout fier, je leur lus l'tiquette haute voix :

    - B R O N Z E + , appliquez cette lotion et vous serez

    bronzs en trois minutes.

    - O as-tu dnich a ? s'cria Lily, les joues rosiespar la temprature glaciale.

    Je montrai la benne du doigt :- Tes vo is ins ont fait le mnage. Ils ont je t cettebouteille alors qu'il reste encore du produit.

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    - Super, on l'essaie ? proposa Martin avec son sou-rire coquin.

    - Oui ! Lundi, on ira en classe tout bronzs, ajoutaChristine. Mlle Shilling en fera une tte ! On lui dira

    qu'on est alls en Floride !

    - N o n , aux Bahamas ! On fera croire Herv Harper

    que les Gants y sont alls pour rpter.

    L'clat de rire fut gnral.

    - Tu crois que ce truc agit ? s'inquita John, devenusrieux.

    - Il n 'y a pas de ra ison, estima L i l y . a ne se vendraitpas sinon !

    Et elle attrapa le flacon :

    - C'est vrai qu'il en reste. Gnial, on sera tous noirs.

    A l lons -y !Nous la suivmes chez elle et jetmes nos manteaux

    en tas dans l'entre. Une fois dans le salon, je

    commenai rflchir. Et si ce produit est prim ?Si on devient jaune v i f ou vert ? On aura l'a ir fin au

    collge ! Je me savais incapable d'aller au collgedans un tat pareil. Je prfrerais rester deux moiscach chez moi, jusqu' ce que a s'en aille.

    Dans la salle de ba ins, les autres ne semblaient pas se

    poser la moindre question. L i l y dvissa le bouchon etse remplit la main d'un liquide blanc et crmeux.

    - H u m ! a sent rudement bon, g loussa-t-elle enl'approchant de son nez.

    Elle se l'appliqua sur le cou, les joues et le front.

    Elle reprit un peu de produit qu'elle tala sur ses

    doigts.

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    Ensui te, Mar t in s'en mit aussi sur les joues. Christine

    fit pa re il et dclara que a procurait une agrablesensation de fracheur. Aprs elle, John vi da presque

    tout le flacon et s'enduisit le visage.

    Puis ce fut mon tour. Je pris la bouteille, pas trs ras-

    sur. J'hsitais. Les autres avaient les yeux fixs sur

    moi, attendant que je les imite.

    Mais tandis que j 'agitais le BRONZE+ pour fairedescendre quelques gouttes, je dcouvris que l'ti-

    quette comportait une phrase que je n'avais pas vue.

    Et ce que je lus me fit dresser les cheveux sur la tte !

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    - Larry, qu'est-ce qui t'arrive ? demanda Lily. Vas-y,

    prends-en.

    - Mais...

    - Est-ce que je suis dj bronze ? gloussa Christine.- Pas encore, rpondit L i ly. Enf in , La rr y, qu'est-ce

    que tu as ?

    Je me mis bgayer :

    -L ' t i qu et te .. . C'est cri t : Da te l imite d'ut i l isa-

    tion, 1991 . Et nous sommes en 1997 !

    Ils clatrent tous de rire. Dans la petite salle debains, a fit l'effet d'une bombe.

    - A l l ez , dit L i l y , impatiente. Mme si c'est un peu

    vieux, a ne va pas t'arracher la peau.

    - Ne te dgonfle pas, gronda Mar ti n . No us , on l 'a

    tous fait. toi maintenant !

    - J e sens que ma pea u br onz e d j , a f f i r maChristine.

    John et elle se regardaient dans la glace place au-

    dessus du lavabo.

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    - Allez, Larry, dpche-toi, m'ordonna-t-elle en me

    saisissant le bras. Les dates de premption, a neveut rien dire.

    Ils m'attendaient, et je commenais rougir. Je nevoulais pas qu'ils me prennent pour un lche. Alors,

    je secouai la bouteil le, versai quelques gouttes dans

    ma paume et m'enduisis soigneusement le visage etle dessus des mains.

    Effectivement, c'tait frais et a sentait bon, commel'eau de Cologne de mon pre.Les autres applaudirent.

    - Bravo ! fit John en me tapant dans le dos si fort queje fai l l is en lcher le f lacon.

    On se bagarra pour s'admirer dans le petit miroir de

    l'armoire pharmacie. Dans la bousculade, Martinpoussa John qui atterrit dans la douche.

    - En combien de temps a agit ? s'impatienta Chris-

    tine en s'examinant.

    - a ne marche pas du tout, soupira Lily, due.

    - C'est sr, dclarai-je, pensif. D'ailleurs l'tiquette

    affirme que l'effet est presque instantan. Mais jevous l'avais dit, ce truc est prim. On n'aurait pas

    d...

    Le hurlement de Martin me coupa la parole. On se

    retourna vers lui.

    - Ma figure ! cria-t-il, les traits dforms par la ter-

    reur. Elle s'en va en lambeaux.Ses mains leves devant ses yeux, il brandissait en

    tremblant un lambeau de sa peau !

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    - O h !

    Un faible gmissement venait de sortir de la bouche

    de Martin !Nous regardions ses mains dans un silence horrifi.

    - M a peau, ma peau..., murmura-t-i l plaintivement.

    Puis, tout coup, il sourit et partit d'un grand clatde rire !

    Ce qu'il tenait n'tait pas un morceau de peau, mais

    un petit bout de papier mouill.Il riait tellement qu'il le laissa tomber.

    - Pauvre idiot, s' ind igna L i l y .

    Furieux, nous le poussmes sous la douche et Lilys'apprtait ouvrir l'eau.

    - N o n , non, ne faites pas a ! cria- t- il en continuant

    pouffer et se dbattre. Stop ! Ce n'tait qu'uneblague.

    Lily changea d'avis et recula. Nous jetmes un der-

    nier coup d'oeil dans le miroir avant de sortir de la

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    salle de bains, sans le moindre bronzage ni la

    moindre couleur.Le produit n'avait pas agi.

    On remit nos manteaux et on courut dehors pourachever notre bonhomme de neige. J'emportai la

    bouteille et la lanai de l'autre ct de la rue.

    Dans le jardin, je trouvai deux cailloux noirs pourimiter les yeux. Mar t in attrapa la casquette de John et

    la plaa sur la tte de notre personnage, qui eut fireallure. C e la ne dura pas longtemps, car John la reprit

    tout de suite.- Martin, il te ressemble un peu, ce patapouf, plai-santa-t-il. Mais en plus lgant...

    Cette plaisanterie nous amusa beaucoup.

    Un brusque coup de vent fouetta notre bonhomme,faisant tomber la tte qui se brisa.

    - Maintenant, c'est vraiment to i, Mar t in ! renchrit

    John.

    Il prit une pleine poigne de neige et la balana sur

    Christine, qui rpliqua. Il s'ensuivit une nouvelle

    bagarre gnrale. Rapidement, le combat opposadeux camps : Lily et moi contre les trois autres.

    Pendant un bon moment, nous les tnmes en respect,

    parce que Lily tait trs rapide pour confectionner

    des boules. Elle en faisait trois pendant que j'en pr-

    parais une.

    Bientt, on ne prit mme plus cette peine et ce futune bataille range. On attrapait des brasses de

    neige q u 'on se jetait au visage. On se roulait par terre

    ou on se pourchassait dans les jardins voisins.

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    Nous rigolions comme des fous et nous avions chaud

    malgr le vent glac.

    Soudain, j'eus un malaise. La terre se droba sousmes pieds. Je tombai sur les genoux, ne pouvant

    presque plus respirer. Le paysage blanc se mit tin-

    celer. J'eus l'impression de m'vanouir.

    - M a i s qu'est-ce que j ' a i , qu'est-ce qui m'arr ive ?

    m'criai-je.

    Je me sentais perdu.

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    Le Dr Murkin tenait sa seringue hypodermique. Le

    mtal brillait dans la lumire. Une petite goutte de

    liquide vert s'coulait de la pointe effile.

    - Inspire profondment et retiens ton souffle , medit-il doucement. a ne fera pas mal.

    Il m'affirmait la mme chose chacune de mes

    visites, c'est--dire tous les quinze jours. Je savais

    bien que a n'tait pas vrai. C'tait toujours la mme

    douleur.

    De sa main libre, il me saisit gentiment le bras, le tintserr et se pencha si prs de moi que je pus sentir son

    haleine de menthe frache.Je me dtournai, ne supportant pas ce spectacle.

    Quand l'a igui lle pntra ma chair, je poussai un petit

    cr i .

    - a ne fait pas si mal, n'est-ce pas ? me questionnale docteur.- N o n , pas trop, rpondis-je bravement.

    J'observais ma mre. Elle se mordait la lvre, le

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    visage dform par l'angoisse. On aurait cru que

    c'tait elle qu'on piquait. Pour finir, le Dr Murkinm'appliqua un coton imbib d'alcool sur le petit trou

    laiss par l'aiguille.- a va aller , Lar ry . Tu peux remettre ta chemise.

    Puis il se tourna vers maman et lui adressa un sourirerconfortant.

    Le Dr Murkin a dans les cinquante ans. Il est trs dis-

    tingu avec ses cheveux blancs coiffs en arrire, son

    regard bleu et ses lunettes fumes carres. Bi en qu ' i l

    mente froidement quand il dit que la piqre est indo-

    lore, je pense que c'est un bon mdecin.

    - Ce sont encore ses glandes sudoripares qui ne tra-

    vaillent pas normalement, annona-t-il ma mre en

    gri ffonnant des notes dans mon dossier. Il sur-

    chauffe , et a n'est pas bon pour lu i. Pas vra i ,

    Larry ?

    - Ou i. .. , c'est vrai , bredouil lai- je.

    En fait, je ne pouvais pas transpirer. Quand j'avais

    trop chaud, je m'vanouissais brusquement. C'est

    pour a que je devais voir le Dr Murkin si souvent. Ilme soulageait grce ses injections.

    Notre bataille m'avait tellement captiv que je ne

    m'tais pas rendu compte quel point j'avais chaud.

    - Tu vas mieux , maintenant, mon chri ? s'enquit

    maman comme nous sortions de chez le docteur.

    - Oui, je suis en pleine forme.A r r i v la porte, je me retournai vers elle et lanai

    brle-pourpoint :

    - Maman, est-ce que tu me trouves chang ?

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    - Pardon ? fi t-el le en me regardant de ses grands

    yeux noirs.

    - Je n'ai pas l'air bronz, par exemple ? continuai-je,

    plein d'espoir.Elle m'examina avec soin.

    - T u sais, Larry , tu m'inquites, dclara-t-elle avec

    douceur. Je veux que tu te reposes quand on sera la

    maison, d'accord ?J'acquiesai sans dire un mot. Manifestement, ce

    B R O N Z E + tait pr im !

    - Tu sais , on ne bronze pas facilement en hiver, fi t

    remarquer maman tandis que nous traversions le par-

    king enneig.

    Lily m'appela aprs le dner :

    - Tu te sens mieux ?

    - a va, oui.

    - T u sais , Herv et Mar issa sont passs aprs ton

    dpart.

    - V o u s les avez massacrs coups de boules de

    neige, j 'espre !- Non, s'esclaffa-t-elle. Nous tions tous fatigus et

    tremps. Quand ils sont arrivs, on tremblait dj de

    froid.

    - Est-ce que Herv a dit quelque chose propos de

    son orchestre ?

    - Il a achet un manuel de guitare, celui d'ric Clap-ton. Il affirme qu'ils apprennent de nouveaux airs, et

    qu'ils vont nous battre plate couture !

    - Il ferait mieux de rester la batterie, c'est le pire

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    guitariste que j 'a ie jama is entendu ! Quand il joue, sa

    guitare met des sortes de chuintements. Commentpeut-on la faire couiner comme a !

    - Marissa couine aussi quand elle chante. Tu ne l'as

    pas remarqu ? a ne l'empche pas de continuer.Nous rmes de bon cur.

    - D is -mo i la vrit, repris-je, srieux. Tu crois queles Hurleurs sont bons ?

    - Je ne sais pas, rpondit-elle, pensive. Herv bluffetellement qu'il est difficile de le croire. Il prtend

    qu' il s pourraient enregistrer un C D . Et que son pre

    veut fabriquer une bande de dmonstration pour

    l'envoyer aux maisons de disques !

    - Eh bien ! On devrait se cacher sous leurs fentres

    pour les couter rpter et se rendre compte parnous-mmes !

    - Soyons honntes, nous devons reconnatre que

    Marissa chante bien. En fait, elle a mme une trsjo l ie vo ix .

    Pas aussi jolie que la tienne !

    - Bof ! Enfin, je crois qu'on s'amliore. Ce qui nousmanque, c'est un batteur !

    - a, je suis bien d'acco rd , parce que l'instrument de

    John est loin de jouer toujours au mme rythme quenous !

    Nous continumes parler du concours pendant un

    moment. Puis je raccrochai et m'assis mon bureaupour faire mes devoirs. J'eus fini vers neuf heures.

    Ensuite, j'allai dans la salle de bains avant de mecoucher. Sous la lumire crue du plafonnier, je me

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    contemplai longuement dans la glace. Elle me ren-

    voya l'image d'un garon ple, sans une trace debronzage.

    Je pris ma brosse dents, tendis une couche de den-

    tifrice. Je m'apprtai la mettre dans ma bouche

    quand je m'arrtai. Saisi d'horreur, je laissai tout

    tomber dans le lavabo.

    - N o n , ce n'est pas poss ible ! m'cr iai -je .

    Au dbut, je crus que j 'ava is une tache noire sur ledos de la main. Mais, en y regardant de plus prs, je

    me rendis compte que...

    C'tait une touffe paisse de poils noirs !

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    Choqu, je secouai ma main dans tous les sens, au

    cas o les poils s'en iraient tout seuls. Bien entendu,

    il ne se passa rien.

    Avec la gauche, qui tait lisse et normale, je les attra-pai et tirai dessus.

    - A e !

    Ils taient vrais !

    - Mais, qu'est-ce que a veut dire ? m'exclamai-je.

    Je m'approchai de la lampe et procdai un examen

    plus prcis.Ces poils noirs, brillants, piquants et hrisss mesu-

    raient environ un centimtre de long. En les tou-

    chant, j 'eus l' impression de toucher un paillasson.

    Larry le poilu !

    Le surnom idiot que Lily m'avait attribu devenait

    une ralit. Je suis sr qu'ils m'appelleront Larryle po i lu jusqu' la fi n de mes jours , pensai-je

    tristement.

    cette ide, je paniquai. N o n , je ne pouvais pas me

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    montrer dans cet tat. Je tirai sur les poils de toutes

    mes forces. Rien n'y fit. Je ne russis qu' me faire

    mal.Soudain, je me sentis faible. Ma bouche tait sche,

    et je tremblais de tous mes membres, sans arriver

    me matriser.

    - Mais que vais-je devenir ?

    Un sanglot me monta la gorge. Quel enfer !

    J'eus un mal fou me calmer. Essaie d'y voirclair , me dis-je. Je restais l, agripp au rebord du

    lavabo. Je le serrais si fort que j ' e n eus des crampes.

    Je relevai les manches de mon pyjama et soupirai.

    Ouf ! Mes bras taient intacts.

    Seul le dos de ma main droite semblait tre conta-

    min. Que pouvais-je faire ? ce moment- l, j 'en tend is mes parents monter

    l'escalier. Je fermai vite la porte clef.

    - Tu es encore debout, La r r y ? me demanda maman.

    - Je brosse mes cheveux, rpondis- je.

    Je les brossais tous les soirs avant d 'a l ler me coucher.

    J'avais beau savoir qu'une fois ma tte sur l'oreillerils seraient en dsordre, c'tait une habitude !

    Je les admi ra i. Ils taient si souples. Rien voir avec

    cette touffe serre qui avait surgi sur ma main. Elle

    me donnait la nause !

    En essayant de dissiper ce mala ise, j ' ouvr i s l 'armoire

    pharmacie, la recherche d'une crme pilerparmi les tubes et les bouteilles.Il doit bien y en avoir !

    Eh non, a n'existait pas chez nous.

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    C'est alors que j'eus une ide. Je saisis le rasoir de

    mon pre et pris du savon barbe, sur l'tagre du

    bas.- C'est simple, dis-je voix haute. J 'a i vu papa se

    raser des centaines de fois.

    Je fis couler l'eau chaude et m'enduisis la main

    droite de savon. Puis je pris le rasoir, le trempai

    comme le faisait mon pre, et commenai. Ce n'tait

    pas vident avec la main gauche ! Mais l'instrumentcoupait bien et j'enlevai tout. Ensuite, je me rinai

    sous le liquide chaud et apaisant. Je procdai alors

    un examen minutieux de ma peau rase.

    Elle tait toute douce...

    Il ne restait plus un seul de ces horribles crins noirs.

    Ragaillardi, je rangeai le matriel de papa avant defiler dans ma chambre. Fatigu mais satisfait, j 'tei-

    gnis la lumire et m'enfonai sous la couette.

    Seulement, une question revenait, lancinante : pour

    quelle raison ces horribles poils avaient-ils pouss

    tout d' un coup ? tait-ce parce que le B R O N Z E +

    tait prim ? Mes copains taient-ils aussi atteints ?Je me mis rire en imaginant Martin velu comme un

    goril le !

    Pourtant, ce n'tait pas drle, c'tait effrayant !

    Je caressai ma main redevenue normale. Rien ne

    paraissait y repousser. Je billai m'en dcrocher la

    mchoire, dj moiti endormi.Soudain, je sentis que a me dmangeait, de partout !

    Ce n'est pas vrai, pensai-je, cette affreuse fourrure

    me recouvre entirement !

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    - Tu as bien dormi ? me demanda maman lorsque

    j ' a r r i va i dans la cuisine pour prendre mon petitdjeuner. Tu es tout ple...

    Nous tions lundi matin, et j'avais pass un ex-crable dimanche cause de ma msaventure desamedi.

    Papa leva les yeux de son journal. Un grand bol de

    caf fumait devant lui.

    - Je ne lu i trouve pas mauvaise mine, murmura- t-i l

    en replongeant dans sa lecture.- a va, dis-je pour les rassurer.

    Je m'assis sur une chaise. D i x minutes avant, j' t a is

    tomb du lit lorsque ma mre m'avait appel. Je

    m'tais examin de la tte aux pieds dans la glace de

    ma chambre. J'avais pouss un soupir de soulage-

    ment en constatant que je n'avais plus un poil, ni noirni d'une autre couleur ! Juste mon petit duvet degaron.

    En entrant dans la cuisine, j'tais tellement content

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    que j'avais eu envie de chanter, d'embrasser mes

    parents et de danser !Mais la remarque de maman m'avait refroidi. J'ava-

    lai mes crales et mon jus d'orange d'un trait. coutez, il faut que je vous raconte quelque chose.

    J'ai fait une grosse btise avant-hier. J'ai trouv une

    vieille bouteille de produit bronzer dans une benne,

    du BRONZE+, et avec les copains, on s'en estenduits. Seulement le produit tait prim... et...

    samedi soir, un pelage noir s'est mis me pousser

    sur le dos de la main droite.

    C'est ce que j'aurais aim leur avouer. J'avais mme

    ouvert la bouche pour commencer. Malheureuse-

    ment, je ne pouvais pas prononcer une parole.

    Je m'tais soudain senti mal l'aise ! J'tais srqu'ils se seraient inquits. Ou alors ils m'auraient

    trait d'imbcile avant de me traner chez le Dr Mur-

    kin. Et lui aussi m'aurait dit que je n'tais qu'un

    inconscient. Donc je prfrai me taire.

    - Tu es vraiment bien sage, ce mat in , constata ma

    mre en mangeant son uf.- C'est que... je n 'a i pas grand-chose dire, c'est

    tout, murmurai-je.

    Avant d'aller au collge, je passai prendre Lily. Elle

    m'attendait devant chez elle, le col de son manteau

    relev. Ses cheveux blonds taient dissimuls sousun bonnet de ski, en laine rouge et bleu.- Tu as raison d'tre couverte, dis-je en trottinant

    ses cts.

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    - M a m a n m 'a prvenue qu ' i l al lait faire encoremoins cinq aujourd'hui.

    Juste au-dessus des maisons, le rouge soleil matinalbrillait dans le ciel tout ple. Le vent soufflait si fort

    que nous dmes nous courber pour avancer. La neige

    tait recouverte d'une crote de glace qui craquaitsous nos bottes.

    Je pris une profonde inspiration. J'avais dcid de

    poser Lily la question qui me brlait les lvres. Jeme lanai d'une voix hsitante :

    - Lily... dis-moi... euh ! Est-ce que, par hasard, des

    poils n'auraient pas pouss sur tes mains, avant-hiersoi r ?

    Elle s'arrta et me regarda dans les yeux, la mine

    grave.- Oui, avoua-t-elle dans un chuchotement.

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    - Q u o i ? m ' ex c l am ai - j e , mo n cur s 'a r r tan t

    presque de battre. Des poils ont pouss sur tes

    mains ?Lily acquiesa d'un air sinistre. Elle s'approcha de

    moi, ses yeux bleu et vert me scrutant par-dessous

    son bonnet.

    Elle murmurait presque inintell igiblement. Quand

    elle parlait, de la bue s'levait de sa bouche :

    - J ' e n avais sur les doigts... et sur les bras, lesjambes, le dos !

    Je laissai chapper un cri touff.

    - Puis, poursuivit-elle en continuant me fixer, ma

    figure s'est change en celle d'un loup ! Et je me suis

    mise courir dans les bois en hurlant la lune !

    Tiens, comme a.Elle rejeta sa tte en arrire et poussa une longue

    plainte lugubre.

    - Je me suis trouve nez nez avec trois personnes,

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    et je les ai manges. Tu sais pourquoi ? Parce que je

    suis un loup-garou !

    E l le grogna et claqua des dents... Pui s elle partit d 'ungrand clat de rire !

    Une fois de plus, je rougis. Lily me donna une tape

    vigoureuse dans le dos, qui me fit presque perdre

    l'quilibre. Elle en fut encore plus hilare !- Larry, tu ne m'as pas crue, quand mme ?

    - Tu me prends pour un imbcile ? videmment queje ne t 'a i pas crue.Mais, pour tre honnte, jusqu'au moment o elle

    avait voulu se faire passer pour un loup-garou,

    j 'avais tout aval !Il fallait que je me rende l'vidence : elle s'tait

    moque de moi, une fois de plus !- Lar ry le po il u, Lar ry le po il u ! chantonna-t-elle.

    - Arrte, tu veux, tu n'es pas drle. Pas du tout !

    - Et toi, tu crois que tu es drle ?Elle continua me traiter de Larry le poilu ! Si bienqu'au coin de sa rue j'essayai de la distancer.

    Seulement, je glissai sur une plaque de verglas. M o nsac dos m'chappa et atterrit dans la neige.

    Pendant que je le ramassais, Lily se planta devant

    moi .- C ' e s t vrai ? reprit-el le, srieuse. Des poils ont

    pouss sur ta main ?Je fis semblant de ne pas entendre. Elle se pencha

    vers moi et insista :- C'est vrai ? C'est pour a que tu m'as pos cette

    question ?

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    - Mais non, mais non, mentis-je tout en me relevant.

    Elle se remit rire.

    - Et toi, tu es vraiment un loup-garou ? lanai-je en

    faisant semblant de plaisanter.- Non, je suis un vampire.

    elle aussi, j 'aurais aim dire la vrit ! Ma is j ' ta is

    certain qu'elle ne tiendrait pas sa langue et que mon

    histoire ferait le tour de l'cole en un rien de temps.

    Tout le monde se mettrait chanter : Lar ry le

    poilu ! Larry le poilu !

    D'un autre ct, a m'ennuyait de lui mentir, c'tait

    ma meilleure copine, quand mme. Je ne savais pas

    quoi faire !

    Lorsque nous arrivmes la grille du collge, elle

    affichait un sourire trange que je ne lui connaissais

    pas.

    - Bon, dit Mlle Shilling, notre professeur de franais.

    Je suppose que vous tes prts me faire les comptes

    rendus des ouvrages que je vous ai donns lire ?

    Une sorte de brouhaha se propagea immdiatementdans la classe, fait de bruit de chaises repousses, d 'ou-

    verture et de fermeture de pupitres, de papiers froisss.

    Cet exercice qui consistait rsumer le livre que l' on

    avait lu rendait gnralement tout le monde nerveux.

    Surtout si vous dtestez qu'on ait les yeux braqus

    sur vous. Comme moi ! Si je prenais un mot pour unautre ou si j'oubliais une phrase, ils se mettaient tous

    rire et je devenais, videmment, rouge comme une

    brique !

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    La veille, j'avais rpt mon sujet devant la glace dema chambre et je ne m'en tais pas mal tir. Malgr

    cela, j'apprhendais mon tour.

    Herv, c'est toi qui commences, annona M l l eShi l l ing.

    - Ce n'est pas bien de faire passer les plus forts en

    premier, se vanta Herv, le sourire en biais.Certains se mirent ricaner, d'autres le hurent.

    En ral it , Herv ne plaisantait pas : i l se croyait

    vraiment le meilleur en tout.

    Il alla vers le tableau, sr de lui.

    C' tai t un garon grassouil let, assez grand, avec des

    cheveux bruns et pais. Sa face ronde tait couvertede taches de rousseur. Il tait toujours content de lui,

    affichant un air suprieur, du genre : Vous n'tesque de misrables insectes. En gnral, il portait

    des vieux jeans dlavs avec des poches aux genoux,

    un T-shirt manches longues et une veste noire en

    tissu bril lant.Il tenait la main le livre qu'il avait choisi : un texte

    sur les grands moments du football.Je rlai intrieurement. Je savais l'avance comment

    il alla it dbuter son expos : Je recommande ce

    livre tous ceux qui aiment... chaque fois, c'tait

    la mme chanson barbante. Ce qui ne l'empchait

    pas d'avoir de trs bonnes notes. Je n'arrivais pas

    comprendre ce que Mlle Shill ing lui trouvait, ceprtentieux.

    Herv s'claircit la voix et lui sourit. Puis il se tourna

    vers nous et pronona fort et distinctement :

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    - Je recommande ce livre tous ceux qui aiment le

    football !Je vous l'avais bien dit !

    Je billai sans que personne s'en aperoive.

    -C'est un bouquin trs excitant, continua Herv,

    imperturbable. L'intrigue...

    Je n'coutai pas le reste, prfrant me rpter mon

    expos.

    Quelques minutes plus tard, Mlle Shill ing me fitsigne :- Larry, c'est toi.

    Je pris une profonde inspiration et me levai. Reste

    calme, Lar ry , m'encourageai-je. Tu connais tout par

    cur, tu l'as rcit au moins dix fois. Ne t'en fais

    pas ! Je m'avanai vers l 'estrade. J'tais mi-chemin

    quand Herv me fit un croche-pied. J'avais bien

    remarqu sa grimace habituelle, mais pas sa jambe !

    Surpris, je poussai un cr i , trbuchai et m' talai sur le

    plancher.

    Toute la classe clata de rire. Mon cur battait serompre. Je m'apprtai me remettre debout, mais je

    m'arrtai tout net quand je vis mes mains !

    Elles taient couvertes de poils noirs et brillants !

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    - Larry ? a va, Larry ?

    J'entendais vaguement Mlle Shilling qui me parlait,

    derrire son bureau.

    J'tais tellement abasourdi que je ne pouvais pasrpondre.

    - Larry, tu n'es pas bless ?

    J'tais incapable de parler, de bouger, et mme de

    penser ! Recroquevill sur le sol, je ne faisais que

    fixer mes mains avec horreur.

    Au-dessus de mo i , les autres continuaient rire. Entemps normal , j' au ra is rougi de con fusion, mais l, je

    n'tais pas mal l'aise. J'tais simplement mort de

    peur !

    Toujours sur le sol, je jetais des coups d'oeil autour

    de moi. Personne ne me dsignait avec horreur.

    - Eh ! Lar ry est rouge comme une tomate ! lanaquelqu'un dans le fond.

    Toute la classe rit de plus belle.

    Je devins carlate. Seulement, ce n'tait pas l mon

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    problme. Je ne pouvais pas me montrer devant eux,

    velu comme un singe. Plutt mourir !

    Sans rflchir plus longtemps, j'enfonai les mains

    dans mes poches et filai vers la sortie.- Larry, o vas-tu ? Qu'est-ce qu'il y a ? s'inquita

    Ml le Shi l l ing.

    - R i e n , rien... Je reviens tout de suite, balbutiai-je.

    - Tu es certain que tu n'es pas malade ?

    - N o n , non , je reviens dans une minute.

    Je savais bien qu'ils m'observaient. Je m'en fichais.

    Il fallait que je sorte au plus vite... et que je trouve

    une solution pour cacher ces poils monstrueux.

    Lorsque j 'arrivai la porte, j 'entendis Mlle Shil l ing

    dire Herv :

    - En f in , tu aurais pu le blesser ! Combien de fo is

    faut-il te rpter la mme chose ?

    - Mais, Mademoiselle, s'indigna le faux jeton, je ne

    l'ai pas fait exprs.Je me glissai dans le long couloir. Aprs avoir vrifi

    que j'tais seul, je sortis les mains de mes poches.

    J'avais vaguement espr qu'elles seraient redeve-nues normales. Eh non ! Elles taient couvertes d'un

    pais pelage noir d'au moins deux centimtres

    d'paisseur. Il avait atteint aussi mes paumes. Et

    mme entre les phalanges. Comment avait-il pu

    pousser si vite ?

    Je frottai mes mains l'une contre l'autre pour essayerde faire partir cette maudite fourrure. En vain...

    -Non... non... Ce n'est pas vrai ! me dsesprai-je.

    Je pleurais sans m'en rendre compte, totalement

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    impuissant ! Impossib le de retourner en classe

    dans cet tat, pensai-je. Ils s'en apercevront. Et

    chaque fois que quelqu'un me verra, il chantera :

    La rr y le poi lu , Lar ry le poi lu ! Rappelle-toi le jou r

    o des poils ont pouss sur tes mains !

    Il fallait que je file d'ici, que je rentre la maison.

    Mais je n'avais pas le droit de quitter les cours enpleine journe. En plus, M l l e Schi ll ing m'attendait

    pour que je lui fasse mon compte rendu de lecture !Je restais l, fig par la peur, le dos contre le mur,

    contemplant mes mains velues.

    Brusquement, je sentis que je n'tais pas seul dans le

    hall. En levant les yeux, je vis M. Fosburg, le provi-

    seur. Il portait une pile de cahiers de texte. Il s'tait

    arrt en face de moi et fixait mes poils !

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    Je cachai rapidement mes mains derrire mon dos.

    Trop tard, M. Fosburg les avait dj vues. Il m'exa-minait curieusement.

    Je frissonnai. Qu'allait- i l dire ? Qu'allait- i l faire ?

    - T u as fro id ? me demanda-t-i l . Faut -i l monter le

    chauffage, Larry ?

    - E u h !...

    Pourquoi ces questions ? Je m'appuya i contre le mur.

    Les crins traversrent mon paisse chemise, mon

    T-shirt et me piqurent la peau.- Tu as donc froid au point de porter des gants ?

    continua M. Fosburg.

    - Des... des gants, balbutiai-je ! Oui... en effet, il fait

    un peu frais.

    Il pensait que je portais des gants ! Je commenai

    me sentir mieux. Je viens d'aller les chercher, mentis-je.

    Il me considra pensivement avant de s'loigner.

    - J 'en parle rai au gard ien ! lana- t-i l.

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    Je poussai un soupir de soulagement quand il tourna

    au coin du couloir. C'tait moins une , me dis-je.

    En attendant, il m'avait donn une ide ! Je courus

    jusqu' mon casier. J 'ouvr is le cadenas, non sanspeine, car ce n'tait pas vident de faire la combinai-

    son avec mes doigts poilus. Lorsque j'y parvins, je

    pris mes gants de cuir noir dans la poche de maparka.

    Une minute plus tard, j' ta is de retour en classe. L i l y

    tait sur l'estrade en train de rsumer son livre. Elleme jeta un coup d'oeil interrogateur tandis que je me

    glissais ma place.Quand mon amie eut fini, Mlle Shill ing me fit venir

    au tableau.

    - a va mieux, L ar ry ? me demanda-t-elle .

    - Ou i , euh... a va bien . J'avais seulement un peufroid aux mains !Des lves se moqurent de mes gants, mais a

    m' tai t gal. Personne ne pouvait voi r ce qu ' i l scachaient.

    J' insp irai profondment et commenai mon expos :

    - J 'a i lu un livre de Br uno Co v il le. Et je conseil le tous ceux qui aiment les histoires de science-fiction

    de le lire...

    Aprs les cours, je filai tte baisse jusqu' mon

    casier, sans regarder personne.Je portais mes gants depuis le matin et j'avais beau-

    coup trop chaud aux mains. Au fi l des heures, j 'a va is

    eu l ' impression qu' i ls rapet issaient . Seulement

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    j 'ava is trop peur de les enlever pour vrif ier si les

    poils continuaient pousser !

    J'enfilai ma parka et glissai mon sac sur une paule.

    Il fallait que je quitte le collge au plus vite. peine tais-je sorti que L i l y m'interpella. En me

    retournant, je la vis qui me rejoignait en courant. Elle

    portait un sweat jaune beaucoup trop grand.

    Je pressai le pas :- On se voi t plus tard, je suis dj en retard, lu i

    criai-je.Ma is elle arr iva ma hauteur et se planta face mo i :

    - Quoi ? Tu ne viens pas la rptition ?

    J'tais si inquiet que j'en avais oubli notre rendez-

    vous.

    -C'est chez moi, comme d'habitude, tu te sou-

    viens ? me dit-elle.Comme je continuais avancer, el le marcha

    reculons devant moi.

    Je me mis bgayer :

    - Je... je ne peux pas aujourd'hui. Je ne me sens pas

    bien !

    a, en revanche, c'tait vrai.- Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu as t bizarre toute la

    journe...

    - Je suis un peu malade, dsol pour la rptition. On

    pourrait la remettre demain ?

    - Sans doute...Elle ajouta quelque chose que je ne compris pas et

    me laissa.

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    Je fonai d'une traite jusque chez moi. Je ne pensais

    qu' ces poils horribles, noirs et piquants.

    Je pntrai dans la maison comme un ouragan et lais-

    sai tomber mon sac sur le plancher. Je m'apprtais gagner ma chambre quand ma mre m'appela.

    Elle tait assise dans le salon avec notre chatte

    Javotte sur les genoux. Elle se tenait prs de lagrande fentre et tlphonait. Elle posa sa main sur lecombin et parut tonne :

    - Comment se fait-il que tu rentres si tt ? Tu n'avaispas une rptition ?

    - Non, non, mentis-je. Et puis, j'ai plein de devoirs

    faire.

    Je n'en tais plus un mensonge prs !

    Tout comme le matin, je n'osais pas lui avouer lavrit, lui raconter que j'tais en train de me trans-

    former en singe cause de ce B R O N Z E + . M a i s , sans

    doute parce que j'tais puis par toutes ces mo-

    tions, finalement je me mis parler :

    - Tu ne me croiras pas, Maman, commenai-je d'une

    voix touffe. Avec les copains, on a trouv unevieille bouteille de produit pour bronzer. On s'en est

    mis sur la figure, le cou, les mains... Je sais bien que

    c'tait idiot. Et... aujourd'hui, l'cole, je me suis

    rendu compte que mes mains taient couvertes de

    longs poils noirs. Je ne savais plus o me mettre.

    J'ai... j 'ai vraiment peur, tu sais !Je haletais, attendant la raction de maman.

    Qu'allait-elle dire ? Pourrait-elle m'aider ?

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    Ma mre marmonna quelque chose d'inaudible. Je

    vis alors que ce n'tait pas moi qu'elle s'adressait.

    E l le continuait sa conversation tlphonique, l 'appa -

    reil coll contre son oreille, comme si de rien n'tait.Elle tait tellement concentre sur sa discussion

    qu'elle n'avait pas cout un mot de mon histoire !

    Je ne pus m'empcher de me plaindre sans que cela

    attire son attention. Du, je fonai au premier tage

    et fermai la porte de ma chambre clef.

    Javotte m'avait suivi et s'tait perche sur le rebordde la fentre, son endroit favori. J'ar rachai mes gants

    et les jetai sur une chaise. Javotte se retourna versmoi, ses yeux jaunes brillant de plaisir.

    Je la pris dans mes bras et m'assis avec elle sur ce

    rebord.

    - Javotte, tu es ma seule amie ! lui confiai-je en luicaressant le dos.

    Au l ieu de ronronner, elle hrissa ses poils et sauta

    sur le plancher. Elle s'loigna un peu avant de tour-

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    ner la tte et de me fixer. En une seconde, je compris

    ce qui avait provoqu sa raction. Je lui tendis mes

    mains :- Ce sont mes drles de pattes qu i t'ont fait peur,

    dis-je tristement.

    J'eus l' impression qu'elle acquiesait.

    - Tu sais, moi aussi , elles me terrorisent ! cont i-

    nuai-je.

    Je filai dans la salle de bains et entrepris de me raserune nouvelle fois.Les crins taient devenus pais, durs et drus, comme

    les soies d'une brosse habits. Ils rsistaient. Le plus

    pnible fut de passer entre les doigts. L, ils taient

    difficiles atteindre. Rsultat, je m'entaillai le des-

    sus d'une main et la paume de l'autre.

    Le lendemain matin, mardi, je me rveillai en nage.

    Mes parents dormaient encore.

    La nuit n'avait pas t reposante. Je venais de rver

    de poils. J'tais attabl la cuisine, devant une

    assiette de spaghettis. Mais lorsque j'en tournai unpaquet autour de ma fourchette, ils se transformrent

    en poils noirs, longs comme des cheveux. Il y en

    avait plein mon assiette. J'en approchais une grosse

    bouche de mes lvres, et...Q u e l ho r r ib le ca uc he ma r ! J ' e n ava is m a l

    l 'estomac.J 'a ll umai la lumire et me plantai devant mon miro ir.

    - Chouette ! criai-je, joyeux.

    Mes mains taient parfaitement lisses. Elles me fai-

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    saient seulement un peu mal, aux endroits o je

    m'tais coup. Pendant un bon moment, je les tour-

    nais devant moi comme des marionnettes.

    Puis je m'inspectai de la tte aux pieds. Je ne vis pasl'ombre d'une fourrure bizarre. J'tais tellement

    content d'tre redevenu normal !

    Maintenant, je n'avais plus rien craindre. Je pou-vais aller en classe l'esprit tranquille. Je me sentais

    heureux. Par scurit, j'allais quand mme garder

    mes gants dans mes poches !

    Aprs le petit djeuner, j'enfilai mon manteau, attra-

    pai mon sac et sortis.

    Tout en courant sur le trottoir, j'vitais les tas que la

    neige avait forms.J'tais bien , tellement mieux que la ve il le ! M a l -

    heureusement, ce fut de courte dure. peine

    avais-je tourn au coin de la rue que j'aperus la

    meute.Les chiens foncrent droit sur moi en grognant.

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    M o n sang se figea. Le s monstres se prcipitaient vers

    moi, attirs comme des aimants par mon petit corps.

    Ils aboyaient avec fureur.

    J'avais l ' impression que mes jambes taient enplomb. Je russis quand mme faire volte-face et

    m'lanai.

    J'essayais de les semer en traversant les cours et les

    jardins... S ' i ls m'attrapent, ils m'avalent tout cru !

    pensai-je. C'est sans doute parce qu'ils sentent

    l'odeur de Javotte qu'ils n'arrtent pas de me couriraprs. Elle me porte malchance. Mais qui appar-

    tiennent ces cabots vi ci eu x ? C om me nt se fait -i l

    qu'on les laisse ainsi en libert ?

    Un coup de klaxon furibond retentit. Des freins cris-

    srent sur la chausse. Une voiture drapa dans ma

    direction... J'tais tellement effray que j'en avaisoubli les autos. Je marmonnai de vagues excuses au

    conducteur tout en continuant dtaler.

    Aprs trois cents mtres, un point de ct doulou-

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    reux me fora ralentir. Je jetai un rapide coup d'oeil

    derrire moi. La meute me poursuivait toujours. Elletraversait la rue et se rapprochait dangereusement.

    - Hep ! Larry !Lily et John se tenaient sur le trottoir d'en face.

    - Fi chons le camp, leur cria i-je en les rejoignant,

    hors d'haleine. Attention...

    Mes deux amis ne bougrent pas d'un centimtre.

    Lily se retourna, fit face aux chiens, comme la der-

    nire fois. John s'avana tranquillement vers eux.Nous les regardmes approcher, immobiles. Voyant

    que nous tions dtermins, ils ralentirent. Ils s'arr-

    trent, ne sachant visiblement plus quoi faire. Ils

    taient essouffls et haletaient bruyamment, les

    langues pendantes.

    - la niche ! ordonna Lily, la main leve en signe de

    menace.

    Le molosse noir gmit tristement et pencha la tte.

    - A l l e z , al lez, ouste ! avions-nous cri ensemble.

    La douleur de mon point de ct s'estompa. Je mesentis mieux en me rendant compte que les chiens ne

    nous attaqueraient pas. Ils prfraient sans doute ne

    pas se mesurer trois adversaires. Ils nous tournrent

    le dos et s'en allrent en trottinant.

    John se mit soudain rire, montrant du doigt un ani-

    mal tout maigre, dcharn, au pelage fonc et fris :

    - Eh ! les gars, vous avez vu celui-l ! Il ressemblea... qui ? demandai-je.

    - Vous ne trouvez pas que c'est Martin tout crach ?

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    - Tout fait ! s'esclaffa Lily.

    Nous rmes de bon cur. C'est vrai, il avait les che-

    veux friss de Martin et les mmes grands yeux

    expressifs.- A l lons -y ! Sinon on sera en retard aux cours, dit

    Lily en donnant un coup de pied dans un amas de

    neige molle.

    Nous partmes d'un pas dcid vers le collge.

    - Comm ent se fait -il que ces chiens s 'en prennent

    toujours toi ? s'tonna John.- J e crois bien qu 'i ls sentent l 'odeur de Javotte,

    rpondis-je.- En tout cas, on ne devrait pas les laisser en libert,

    ajouta Lily qui marchait devant.

    - a, c'est sr ! approuvai-je.

    Une violente bourrasque souffla. La casquette deJohn faillit s'envoler.

    - Vi vement le printemps ! murmura-t-i l en l'en fon -

    ant sur sa tte.

    Nous retrouvmes Christine devant le collge. Sescheveux roux tourbillonnaient dans le vent.

    - On rpte cet aprs-midi ? demanda-t-elle tout en

    croquant dans une barre de crales.

    - Rptition chez mo i , confi rma Li ly . I l faut qu 'on

    travaille. On ne va quand mme pas laisser Hervgagner cette finale, non ?

    - propos de travail, o tais-tu, hier ? voulut savoirChristine.

    -J'tais chez moi, un peu patraque...

    Du coup, je pensai au B R O N Z E + . Me s amis taient-

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    ils contamins par ce produit infernal ? Il fallait que

    je le sache !- Dites... euh ! lanai-je d'un ton dtach. Vous vous

    souvenez de cette crme pour bronzer ?Christine se mit rire :

    - a n'a pas march. Tu avais raison, Larry. Ce pro-

    duit tait prim.- Il m 'a mme fait pl ir, renchrit John.

    - O n est tous b la ncs com me . . . ne ige ! C 'ta i t

    compltement bidon ! ajouta Lily.A ucun d'eux n'avait fait de remarque au sujet de

    poils suspects. Ils sont aussi velus et mal l'aise

    que moi, pensai-je. C'est pour a qu'ils ne veulent

    pas voquer le sujet. Ou alors... je suis le seul. Ce

    serait trop atroce. Je dois en tre sr.

    J'inspirai profondment, ouvris la bouche pour par-ler..., mais ils avaient dj chang de sujet de conver-

    sation. Ils discutaient de notre orchestre.

    - Christine, tu peux apporter ton ampli la maison ?

    demanda Lily. Martin viendra avec le sien, mais iln'a pas assez de prises pour les trois guitares.

    J'allais les interroger, quand un coup de vent releva

    la capuche de ma parka. Je l'attrapai pour la remettre

    sa place. Au passage, je touchai mon cou et... pous-

    sai une exclamation de surprise !

    Paniqu, je sentis sous la main ma nuque tapisse

    d'une paisse fourrure !

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    - Larry, qu'est-ce que tu as ? s'cria Lily, effraye.

    - Euh !... euh ! bredouillai-je, incapable de parler.

    -Regarde ton charpe, me signala John en tirant

    dessus. On dirait qu'elle est l'envers.C'tait une charpe de laine rugueuse. Maman

    m'obligeait la porter parce que ma grand-tante

    Hilda l'avait tricote pour moi !

    J'avais compltement oubli que je l'avais mise. En

    passant ma main dessus, j 'avais cru un instant que...

    - Larry, tu vas bien ? s'inquita Lily. Tu as l'air mortde peur.

    - Ou i , ou i, a va . M o n cache-col tait trop serr,

    c'est tout.

    Je devins rouge brique. Il avait bien fallu que je

    rponde quelque chose. Je ne pouvais quand mme

    pas leur avouer que j'avais cru toucher ces poils demalheur. coute-moi bien, Larry, me dis-je. Arrte

    d'tre obsd par cette histoire, sinon tu vas devenir

    fou, c'est sr ! Je me mis frissonner.

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    - A l l e z , rentrons en cours, ordonnai-je en m 'emmi -touflant dans ma parka.

    Le jeudi suivant, je filais aux toilettes pour me pei-

    gner avant que la cloche ne sonne. J'eus une pense

    horr ib le : Et si mes cheveux tombaient brusque-

    ment ? Si ces affreux cr ins no irs prena ient leurplace ? Si un beau matin je me rveillais avec lecorps couvert de cette immonde fourrure ?

    Je m'examinai longuement dans la glace.

    Haut le cur, Larry ! finis-je par me dire pour

    m'encourager. Et je tendis un doigt lisse vers mon

    image. Tout va bien ! Ce stupide produit ne te tor-turera plus.

    Cela faisait dj cinq jours que nous l'avions utiliset, depuis, j'avais pris au moins trois bains et deux

    douches. J'tais persuad que c'tait du pass. Ce

    n'tait plus la peine de me tracasser.

    Je jetai un dernier coup d'il mes cheveux. Ils

    taient un peu trop longs, c'est vrai. Mais je les

    aimais comme a, spars par une raie, tombant avecsouplesse sur mes oreilles...

    Je filai en classe.

    Tout se passa trs bien pendant cette journe. Enf in . . .

    jusqu' ce que M l l e Sh i l l ing nous rende nos devoirsde franais.

    En lisant les commentaires du professeur, je tombaisur un cheveu... noir ! Qu'est-ce que a veut dire,me demandai-je. C'est moi ou Mlle Shill ing ?

    Je l'examinai sans oser le toucher. Je commenais

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    me sentir ma l. Je ne pouvais pas m'empcher de

    repenser cette histoire de po il s, mme si j 'avais jurde l'oublier !

    J'en eus des frissons d'angoisse.

    Cet pisode m'avait perturb et je n'coutai pas un

    mot jusqu' la fin du cours. Quand la cloche retentit,

    je fus soulag. C'tait l'heure du sport. Un peud'exercice allait me faire du bien.

    -Aujourd'hui, basket, nous annona le professeur

    alors que nous entrions dans le gymnase. Allez vous

    mettre en short. Et vite !

    Gnralement, je n'aime pas trop le basket. C'est

    puisant, il faut tout le temps courir sur le terrain. En

    plus, je n'tais pas dou pour marquer des paniers.

    J'tais mme le plus mauvais tireur du collge !

    Mais aujourd'hui ce sport me sembla idal pour

    dtendre mes nerfs.

    Je suivis les autres dans le vestiaire. Arriv mon

    casier, je sortis un short et un T-shirt.

    l'autre bout de la salle, Herv criait tue-tte :- On va gagner ! On va gagner !

    Un lve lui balana une serviette la figure pour le

    faire taire. a, c'es t bien fait, pensai -je. Quel

    idiot ! Je m'assis sur le banc pour me changer. J'tais en

    train de retirer mon pantalon quand je m'arrtai net,laissant chapper un cri plaintif.

    Mes genoux taient couverts d'une paisse fourrure

    noire !

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    - Pourquoi as-tu gard ton jean pendant la partie de

    basket ? me demanda John le lendemain.

    Nous marchions sur le trottoir boueux, transportant

    nos instruments jusqu' chez Lily.

    - A lo rs ? insista-t-i l en changeant son synthtiseurde main.

    - J'avais un peu f ro id aux jambes. Je ne sais pas

    pourquoi le prof en a fait toute une histoire.

    - Tu sais, il a failli en avaler son sifflet quand il t'a vu

    marquer un panier depuis le centre du terrain !

    Je me mis rire. J'tais tellement choqu cause demes genoux que je m'tais dpass. J'avais jou

    comme jamais !

    Tu devrais toujours garder ton pantalon, avait

    plaisant le professeur.

    Je n'avais pas trouv a drle.

    En fin d'aprs-midi, j 'tais rentr chez moi en cou-

    rant. Je m'tais enferm dans la salle de bains pour

    raser ces maudits poils. Quand j'eus fini, ma peau

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    tait douloureuse et rouge. Mais au moins elle tait

    de nouveau lisse !Ensuite j'tais rest dans ma chambre, allong sur

    mon l i t , m' interrogeant sur ce qu' i l m'arr ivait . Pourquoi ces poils ont pouss sur mes genoux ? Je

    n'ai pas vers de B R O N Z E + dessus. Ou alors le pro-

    duit a travers ma peau pour passer dans le sang. Il

    s'est peut-tre rpandu dans mon corps ? Je vais metransformer en une sorte d'immonde crature velue !

    En King Kong ! Ces questions m'obsdaient encore le lendemain,

    pendant que John et moi traversions la rue. Nous

    arrivions la maison de Lily.

    Le soleil brillait au-dessus des deux rables dnuds

    qui encadraient le jardin. L'hiver touchant sa fin,

    l'air tait chaud. La neige avait presque entirement

    fondu, dcouvrant l'herbe par endroits.John frappa la porte. Lily nous ouvrit aprs quel-

    ques instants. Elle rptait dj depuis un moment

    avec Christine.- O est Martin ? s'tonna Lily en fermant derrire

    nous.- On l'a attendu chez moi. Il n'est pas venu, rpon-

    dis-je en essuyant mes baskets sur le paillasson. Il

    n'est pas l ?

    - N o n , et i l n'tait pas en classe aujourd'hui, ajouta

    Christ ine. J 'a i essay de lu i tlphoner, mais sa lignedoit tre en drangement. Il n'y a mme pas de

    sonnerie.

    - I l faut qu 'on soit srieux, quand mme, protesta

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    Lily en se mordant la lvre. Est-ce que tu as discut

    avec Herv, ce matin ? Il t'a parl du cadeau de sonpre ?

    - Ou i , c'est un nouveau synthtiseur, acquiesai-jetout en ouvrant mon tui guitare. Il a dit qu'il valait

    un orchestre entier !

    - a ne va pas arranger nos affaires. On aura l'air de

    quoi avec nos trois guitares et notre synthtiseurminable ? se plaignit Lily.

    - Mon synth n'est pas minable ! s'indigna John.

    - C ' e s t tout juste si tu ne le remontes pas avec une

    manivelle ! renchrit Lily.

    - D'accord, il est petit, mais il peut donner dix ryth-mes, protesta-t-il en le branchant.

    - Si on rptait au lieu de dire des btises ? intervint

    Christine en promenant ses doigts sur le manche de

    sa guitare rouge. Par quoi on commence ?- Comment veux- tu q u ' on rpte sans M a r t i n ?

    m'exclamai-je. Faisons un saut chez lui.- Ou i , bonne ide ! approuva L i ly . Ma i s il vaudrait

    mieux qu'on y aille juste tous les deux. Si Martinarrive , John et Chris tine seront l pour l'accuei lli r. Et

    puis, ils pourront commencer s'entraner.

    - Bon, si quelqu'un doit rester ici, je veux bien, sersigna John.

    J'enfilai ma parka, et Lily son manteau. Nous sor-

    tmes rapidement. Dans sa prcipitation, mon amieenfona sa botte dans une norme flaque de neige

    fondue.

    - Je dteste cette priode de l'anne, quand tout se

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    transforme en boue, se plaignit-elle. On n'entend que

    l'eau qui coule des toits, des arbres, de partout !

    C'est assourdissant, tu ne trouves pas ?

    L i l y tait trange par fois. Un jour, elle m'avait confiqu'elle crivait des pomes sur la nature, mais elle ne

    m'en a jamais montr.

    Nous avancions dans la gadoue. Au solei l , je

    commenai avoir chaud. J'ouvris ma parka.

    Au coin de la rue, nous apermes la maison de M a r -

    tin, une btisse carre en briques, perche au sommet

    d'une petite colline. Deux enfants essayaient de faire

    de la luge. Les pauvres, ils n'avanaient pas beau-

    coup dans cette boue !Ds que nous fmes arrivs sur le perron, Lily sonna.

    - E h ! Mar ti n, appelai-je. C'est nous ! Ouvre !Pas de rponse. Pas un bruit non plus, sauf celui de

    l'eau dgoulinant dans la gouttire.

    - Mar t in ! insistai-je.

    Nous sonnmes encore. Rien faire.

    - Il n'y a personne, constata Li ly .

    Nous essaymes de regarder par la fentre en noushissant sur la pointe des pieds.

    - a a l 'a i r sombre l ' intr ieur, nota L i l y en

    secouant la tte.

    Je frappai la porte, le plus fort possible. Elle

    s'ouvrit toute seule.

    - Il y a quelqu 'un ? demanda L i l y en la poussant.Votre porte n'est pas verrouille !

    Toujours pas de rponse. a devenait inquitant.

    Nous fmes quelques pas dans l'entre.

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    - Mar t in , tu es l ? cr ia Li l y .

    En pntrant dans le salon, je poussai une exclama-

    tion de surprise ! J'tais tellement stupfait que jerestai muet.

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    Effars, nous restions plants dans le salon. Lily me

    saisit le bras.

    La pice tait vide. Il n'y avait plus de meubles, de

    rideaux aux fentres, de tableaux aux murs. Mmeles tapis avaient t enlevs !

    - Mais o sont-ils passs ? parvins-je articuler.

    Nous fmes un tour dans la cuis ine. Tout tait par ti. Il

    ne restait que la trace noire l'endroit o le rfrigra-

    teur se trouvait il y a encore deux jours !

    - Ils ont dmnag ! s 'exc lama L i l y . Je n'a rri ve pas y croire.

    Nous inspectmes la maison. Elle tait totalement

    abandonne. C'tait assez effrayant de voir ces

    pices dsertes.

    -Pourquoi Martin ne nous a-t- i l pas avertis qu'i ldevait partir ?

    L i l y secoua tristement la tte, incapable de rpondre.

    - Ils ont d s'en aller prcipitamment ! finit-elle par

    conclure.

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    - Mais pourquoi dmnager aussi brusquement ?

    J'adore la course pied. Sauf, bien sr, quand je suispoursuivi par une meute de chiens agressifs. J'aime

    bien sentir mon cur battre, mes muscles fonction-

    ner comme les rouages d'une machine bien huile.

    Ce samedi matin, mo n pre et moi fais ions notre j og -

    ging habituel. Nous trottinions autour du lac, sur un

    ch em in qu ' i l apprcie beaucou p. C' es t un co i nagrable, joli, et surtout tranquille.

    Nous ne parlions pas, nous contentant de respirer

    pleins poumons l'air frais et de jouir du paysage.

    Cependant, j'avais envie de me confier lui. De lui

    raconter cette histoire de produit diabolique, de poils

    hirsutes !Je gardais les yeux fixs sur l' ho ri zo n. Des corbeaux

    volaient dans le ciel bleu, se perchant de temps

    autre sur des branches dnudes. Ils croassaient

    bruyamment, comme s'ils discutaient. Le lac brillaitsous le soleil. Des plaques de glace flottaient sur

    l 'eau bleu-vert.Je pris mo n courage deux mains et commenai lui

    raconter mon histoire. Papa diminua l'allure pour

    mieux m'couter. Lorsque j'eus fini de lui parler du

    BRONZE+, i l me fit un signe de tte pour me mon-

    trer qu'il comprenait. Il dclara d'une voix un peu

    hache par les foules :-Dsol, a n'a pas march. Tu n'es pas du tout

    bronz, Larry !

    - Non, a n'a pas agi parce que le liquide tait trop

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    vieux. a faisait un bon moment que la date limite

    d'utilisation tait dpasse !

    Je pris une grande inspiration pour lui parler de la

    suite. C'tait le plus difficile.

    - Ma is , Papa, il m'est arriv une drle de chose

    aprs. Des poils se sont mis pousser, poursuivis-je,

    craignant sa raction. D' abord sur le dessus d'une de

    mes mains, puis sur les deux, enfin sur mes genoux.

    Papa s'arrta net. Il se tourna vers moi, troubl :- Des quoi ?

    - D e s poils noi rs, rptai-je, essouffl. De grosses

    touffes, drues et piquantes.

    Il avala sa salive avec difficult. Il me fixa. tait-ce

    de surprise, de peur ou d'incomprhension ? J'tais

    incapable de le dire !Soudain, il me saisit par le bras et commena

    m'entraner :

    - Viens vite, Larry. Pressons-nous.

    - Enfin... Papa, bredouillai-je, essayant de le retenir.

    - Al lons-y, ordonna-t -il , les dents serres.

    Il me tirait si fort qu'il me souleva pratiquement deterre.

    - Ma is . . . ma is qu'est-ce qui se passe ? m' exc la -

    mai-je d'une petite voix suraigu.

    Il ne rpondit pas. Il me poussa de plus en plus vite

    sur le sentier. Son visage tait dform par une pro-

    fonde horreur.- Papa, o m'emmnes-tu ? O ?

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    Le Dr M ur k in leva son aiguil le hypodermique devantla lumire.

    - Tourne-toi, Larry, dit-il gentiment. Rassure-toi, tu

    n'auras pas mal.Quand l'aigu il le pera ma peau, je ressentis videm-

    ment une douleur. Je fermai les yeux et retins ma res-

    piration jusqu' ce que le docteur la retire.

    - Je sais que la dernire in ject ion remonte une

    semaine. Mais, puisque tu tais l, autant te faire ta

    piqre , conclut -i l en me frottant le bras avec un cotonimbib d'alcool.

    Mon pre tait assis sur une chaise pliante appuye

    contre le mur du cabinet. Il tait tendu, les bras croi-

    ss sur la poitrine.

    -Vous savez..., ces... ces poils, bgayai-je. C'est

    sans doute cette lotion...- Non, Larry, je ne pense pas, estima le Dr Murkin.

    Vois-tu, ce genre de produit agit uniquement sur les

    pigments de la peau. II...

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    - M a i s c'tait une trs viei ll e bouteille ! insistai-je.

    Peut-tre qu'en se dgradant les composants sont

    devenus acides... ou bien... je ne sais pas, moi...Il fit un geste de la main signifiant : a suffit !

    Puis il alla son bureau.

    - Dsol, Larry, reprit -il en crivant des notes. Ce

    n'est pas cette lotion, crois-moi...Il se retourna vers moi, me considrant derrire ses

    lunettes :- J e t'ai examin de la tte aux pieds. Tu as pass

    tous les tests. Je n'ai rien vu d'anormal. Pour moi, tu

    es en parfaite sant.

    Mon pre parut soulag.

    -Mais. . . mais ces poi ls ? m'exclamai- je.

    - Attendons, nous verrons bien, rpliqua le Dr Mur-kin en fixant papa.

    - Qu'est-ce que a veut dire, attendons ? Vous

    n'allez pas me donner de mdicaments pour emp-

    cher que a recommence ?

    -Peut-tre que a n'arrivera plus, rpondit-i l en

    refermant mon dossier.Il me fit descendre de la table d'examen et me tendit

    mes habits.- Ne t'en fa is pas, Lar ry . a va aller, maintenant.

    - M e r c i , Docteur, bredouil la papa en se levant.

    Il lui sourit, mais je vis bien que son sourire tait

    forc. Il tait toujours anxieux.

    Dans la voiture, nous restmes muets pendant une

    bonne partie du trajet.

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    - Tu te sens mieux ? me demanda-t- il enf in , sans

    quitter la route des yeux.

    - Pas vraiment, rpondis-je d'un ton sinistre.- Qu'est-ce que tu as ? Le docteur t'a examin et il a

    dit que tout allait bien, s'impatienta-t-il.

    - Oui, mais ces poils ? Tu penses qu'il ne m'a pas

    cru ?- N o n , au contraire, je suis sr qu 'i l t ' a cru .

    - Alors, pourquoi ne fait-il rien pour m'aider ?Je me mis pleurer.Mon pre se tut durant plusieurs minutes. Il regardait

    droit devant, mordant sa lvre infrieure. Finale-

    ment, il dclara trs calmement :

    - Quelquefois, le mieux est d'attendre.

    Notre groupe se retrouva chez Lily aprs le djeuner.On avait fait des progrs, mais Martin nous man-

    quait. Nous tions trs peins qu'il ait dmnag

    sans nous prvenir. La mre de Lily avait appel desamies qui connaissaient bien les parents de Martin

    pour essayer d'en savoir plus. Ce dmnagement lesavait surprises autant que nous. Personne ne savait o

    ils taient passs.Martin n'tant plus l, avec deux guitares au lieu de

    trois, on entendait mieux la voix de Lily. Malheu-reusement, ce jour -l je n 'arr iva is pas joue r juste la

    chanson des Beatles que nous rptions. Je n'taispas en mesure et je me trompais tout le temps !

    Je savais pourquoi a n'allait pas : je n'arrtais pas

    de penser au Dr Murk in . Je ne comprenais pas pour-

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    quo i i l ne croyait pas mo n histoire de B R O N Z E + . Je

    me sentais la fois abandonn et furieux.

    Pendant que nous recommencions pour la vingtimefois le morceau des Beatles, j' obse rvais mes copains.

    Ils ne semblaient pas avoir de problmes, ou plutt

    ne pas avoir le mme que le mien . Ce lu i dont j' ava is

    tellement honte. Quand j' avai s vou lu en parler Li l y ,

    elle s'tait moque de moi et avait cri : Salut, le

    poilu ! Peu importe, j'tais dcid revenir lacharge...

    J'attendis que nous ayons fini la rptition. Christine

    tait en train de ranger sa guitare dans son tui. Lily

    se tenait prs du canap, tripotant nerveusement son

    mdaillon. John tait all la cuisine se chercher un

    soda dans le rfrigrateur. Quand il revint dans lesalon, je me lanai :

    - J'ai une question vous poser.

    Il dcapsula la canette et un grand jet de soda l'cla-

    boussa. Christine clata de rire.- I l te faut un manuel pour ouvr ir une canette, se

    moqua Li ly.- T u es trs drle, gronda John en s'essuyant le

    visage.

    - Tu ne devrais boire que du lait, renchrit Christine

    en refermant sa caisse. Au moins, a ne gicle pas.

    Il lui tira la langue. Puis ils se mirent tous les deux

    se chahuter.

    - J 'a i une question vous poser, rptai-je, su ffi sam-

    ment fort pour les faire taire. Vous vous souvenez du

    B R O N Z E + ? Est-ce que l 'un d'entre vous a des poi ls

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    qui auraient pouss sur son corps, aprs ?

    Je devins tout rouge.

    - Tu veux dire des poils trs laids ? s'cria John.

    Il pouffa tellement que le soda lui sortit par le nez et

    manqua de l'touffer. Chr istine lui donna de grandes

    tapes dans le dos. Ds qu'il put parler de nouveau, il

    me montra du doigt :- La... Larry le poilu !

    - Je suis srieux. Je ne plaisante pas ! protestai-je.Ils rirent de plus belle.

    Je me tournai vers Lily qui tait reste prs du divan.

    Elle faisait une drle de tte et ne s'amusait pas dutout. Elle baissa mme les yeux quand elle constata

    que je la regardais.

    - Tu n'es qu'un loup-garou ! m'affirma John. Tu saismieux hurler que jouer de la guitare !

    - J'espre qu'on ne va pas chanter au moment de la

    pleine lune, ironisa Christine.

    Et ils s'esclaffrent, contents d'eux.

    - C'tait juste une blague, dis-je.

    J'aurais voulu disparatre sous le tapis. Leur ractionprouvait que John et Christ ine n'taient pas contami-

    ns ! Je suis le seul , me lamentai-je.

    De son ct, Lily continuait se taire, impassible.

    Elle commena ranger les partitions tales sur le

    plancher. Son silence m'intrigua. Elle adorait me

    taquiner et me faire rougir. Partageait-elle monsecret ?

    Je fis exprs de rassembler lentement mes affaires,

    attendant que Christine et John aient quitt la mai-

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    son. Je su ivis L i l y ju squ' au perron. L, je me tournai

    vers elle :

    -Li ly, dis-moi la vrit, f is- je en observant sonvisage. Tu as vu... ces horribles poils sur toi ?

    -Je... je ne veux pas en parler, f init-elle par lcher

    aprs avoir hsit un moment.

    Puis elle me claqua la porte au nez.

    Je restai fig . Pourquoi ma question l'avait-elle trou-

    ble ce point ? Si elle tait contamine, pourquoirefusait-elle d'en discuter ? Peut-tre tait-elle aussi

    mal l'a ise que mo i ? Ou alors c'est pour mo iqu'elle se faisait du souci ? Elle devait trouver ma

    conduite stupide. Voil ce qui la drangeait.

    Dsempar, je continuais errer dans les rues. Le

    soleil tait encore haut dans le ciel, mais il commen-ait faire frais. Un vent fort m'arriva droit dans le

    nez. Je voulus enfoncer davantage ma casquette.

    M a i s je n' y parvins pas. Comme si elle avait soudainrtrci. Je la retirai pour l'examiner. J'avais d trop

    serrer la sangle arrire.

    Non, ce n'tait pas a !

    Je caressai mon front. Un frisson d'horreur me par-

    courut. Je compris pourquoi ma casquette tait trop

    petite ! M o n front tait entirement recouvert decette fourrure paisse et piquante !

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    J'entrai en coup de vent dans la cuisine par la porte

    de derrire.

    - Maman, au secours !

    Malheureusement, ma mre n'tait pas l. Personne,il n'y avait personne !

    J'inspectai la maison toute vitesse. Il fallait pour-

    tant que mes parents me voient comme a. Ils

    seraient bien obligs de me croire. La fourrure

    paisse qui me barrait le front tait bien la preuve

    que j'avais dit la vrit.- Papa, Maman ?

    Non ! Ils taient sortis. Ils avaient juste laiss un mot

    sur la table du salon : N O U S S O M M E S PA RT IS

    F A I R E D E S C O U R S E S . N O U S R E V E N O N S

    D A N S U N E H E U R E .

    Je balanai ma casquette avec un cri de fureur. Jedfis ma parka et la laissai tomber sur le plancher.

    Les battements de mon cur s'acclrrent quand je

    me vis dans la grande glace de l'entre. Je ressem-

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    biais un mutant de bande dessine. Mon front tait

    travers d'un large ruban de fourrure. On aurait ditun bandeau de skieur. Seulement, il tait accroch

    ma peau. Je le touchai d'une main tremblante.J'avais envie de pleurer et de hurler la fo is . Ma poi-

    trine se soulevait comme un soufflet de forge.

    J'aurais voulu empoigner ces ignobles poils et les

    arracher. Ce spectacle dgotant tait trop insuppor-

    table. Finalement, il valait mieux que mes parents neme dcouvrent pas dans cet tat. Je fonai au premier

    tage pour me raser une fois de plus.

    Je coupais et coupais encore. J'avais ma l , mais celam'tait gal ! L'essentiel tait de me dbarrasser de

    cette horreur, qu'elle disparaisse dans le siphon du

    lavabo.Tou t en pestant, j ' e u s une ide : r et rouver le

    B R O N Z E + et le montrer au docteur. Si je lui

    apporte le flacon, il me croira peut-tre, pensai-je. Ilpourra le faire analyser et on trouvera bien pourquoi

    a fait cet effet. Ensuite, il me donnera un traitement

    pour me gurir. Allons-y ! Mais o avais-je jet ce produit diabolique ?

    Je fermai les yeux et fis un effort pour m'en souvenir.

    Aprs l 'avoir trouv, nous avions tous couru chez

    Lily, pour nous en mettre. Puis nous avions fait lesfous dans la neige. Avais-je remis la fiole dans la

    benne ordures ? La seule chose qui comptait taitde la rcuprer !

    Je griffonnai en vitesse un mot pour mes parents :

    J'ai oubli quelque chose chez Lily, je reviens tout

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    de suite. J'attrapai ma parka et filai dehors.

    Les nuages cachaient maintenant le soleil et le cieltait tout gris. Je mis ma capuche sur mon front

    encore brlant cause du rasage. J'tais nerveux, et

    les trois cents mtres entre chez moi et la maison de

    Lily me parurent des kilomtres !

    Il ne fallait pas qu'elle me prenne en train de fouiller

    dans la benne. Sinon elle ne manquerait pas de meposer des questions. Je n'avais aucune intent ion de la

    renseigner. Au lieu de me dire la vrit, elle m'avait

    ferm la porte au nez.

    En m'approchant, je vis de la lumire dans sa salle

    manger. Ils taient srement table. Parfait ! J'avais

    le temps d'inspecter les dtritus, de trouver la bou-

    teille et de m'en aller avant d'tre surpris.Mais, en arrivant sur les lieux, je m'arrtai net : la

    benne ordures n' ta it pl us l ! L e s boueurs

    l'avaient emmene. Dcourag, je soupirai, prt

    tomber genoux.

    Comm ent vais-je prouver au Dr M u r k i n que ce

    produit est bien le coupable ? me lamentai-je.Je scrutai les alentours. Le vent froid me fouettait le

    visage. Il souleva des feuilles mortes et humides.

    Cette ambiance lugubre me fit frissonner.

    A lo rs que j 'a l la is repartir chez moi , je me souvins

    que je n'avais pas remis le B R O N Z E + sa place ! Je

    l'avais jet au loin, de l'autre ct de la rue. Dans lesbuissons !

    - Youpi ! triomphai-je.

    Ou i , il tait forcment l ! Je passai comm e une

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    flche devant chez Lily, regardant les fentres pour

    tre sr que personne ne puisse m'apercevoir. Je

    m'avanai dans le petit bois, glissant sur la mousse

    dtrempe. Les branches dnudes s'entrecho-quaient sous l'effet des rafales.

    O avait atterri ce flacon ?Il ne pouvait pas tre trs

    loin. Peut-tre derrire les premiers arbres, c'est--

    dire... l'endroit o je me trouvais. O u i , mais o pr-cisment ? Il faisait sombre. Je cognai dans un objet

    gisant sous un tas de feuilles.

    Un objet dur ! Je m'accroupis et fouillai.

    Ce n'tait qu'un morceau de bois mort.

    Aprs avoir franchi un rideau d'herbes fol les, je mar-

    quai un temps d'arrt.Le flacon tait forcment tomb par ici. Je scrutai

    dsesprment l'obscurit.

    Je me baissai de nouveau, ttonnai et ne ramassai

    qu'une pierre. Je l'envoyai promener d'un coup de

    pied. Je fis un tour complet sur moi-mme, balayant

    le sol du regard.

    - Mais enfin, o se cache cette fichue bouteille ?Soudain, j 'entendis le craquement d'une brindille.

    J'ouvris toutes grandes mes oreilles et perus le frot-

    tement d'un corps sur un buisson... Puis une autre

    brindille brise ! J'eus du mal avaler ma salive.

    Je n'tais plus seul !

    - Qui est l ? appelai-je d'une voix angoisse.

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    - Mais qui est l ? rptai-je.Pas de rponse.

    Transi de froid, je restais sans bouger, comme une

    statue, attentif au moindre son.J'entendis alors des pas rapides et une respiration

    lourde.

    - Qui tes-vous ? demandai-je.

    Baissant les yeux, je reprai le BRONZE+. I l taitjuste devant moi , reposant sur un tas de fougres. Jeme penchai rapidement et m'en emparai. Mais il

    m'chappa. Je me redressai d'un bond, affol. Une

    forme noire s'avanait pesamment entre les arbres.

    Haletant, la langue pendante, un grand chien brun

    apparut. Malgr l'obscurit, je distinguai sa fourrure

    crpue et pele pendant sur ses flancs. Je fis un pasen arrire :- Tu es perdu, gros toutou ? lui dis-je, plutt effray.

    L 'an imal incl ina la tte en geignant tristement. J' in s-

    pectai les alentours pour m'assurer qu'il ne faisait

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    pas partie de la meute qui adorait me pourchasser.

    Non, il tait seul !

    - Brave toutou, lui dis-je , mfiant. Brave petit.Il me dvisagea, haletant toujours. Sa queue remua,

    puis retomba tristement.

    Je me baissai lentement, en continuant le surveiller.

    J'attrapai la bouteille glace. Je la soulevai devant

    moi, essayant de voir si elle contenait encore du

    liquide. Il faisait trop noir. Je me souvins alors quenous n'avions pas utilis toute la lotion. Il devait en

    rester suffisamment pour que le Dr Murkin puisse

    faire des analyses.

    Les arbres frissonnaient sous les bourrasques. Les

    branches s'entrechoquaient dans un grincement

    inquitant. Le chien poussa un autre cr i plaint if etmalheureux.

    - Au revoir ! lu i dis-je en reculant.

    Il s'broua et continua me fixer.

    - A l l e z , rentre chez toi. V it e.

    Il ne bougea pas, mit un nouveau gmissement, puis

    agita sa queue.Je reculai encore, tenant fermement la fiole. Seule-

    ment, en me retournant, j'aperus... la meute. Silen-cieux, les monstres sortaient de dessous les arbres. Il

    y en eut d'abord cinq ou six, leurs pupilles tincelant

    de colre, et, derrire eux, il en arrivait encore

    autant... Ils s'approchaient lentement, montrant leurscrocs, grognant.

    Je restai un moment paralys de terreur.

    Un cri m'chappa. Je fis volte-face et me mis cou-

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    rir. Je trbuchai sur une branche morte et m'affalai

    de tout mon long. Le BRONZE+ me gl issa des

    mains ! Il alla s'craser sur une pierre. Horreur, leflacon clata en mille morceaux. Le peu de liquide

    marron restant se rpandit sur le sol.

    J'tais tomb lourdement. Une douleur sourde irra-

    dia mon corps. Tchant de la surmonter, je me remis

    sur pied pour faire face mes agresseurs.

    Au l ieu de me sauter dessus, i ls m'vitrent etfilrent dans une autre d irect io n, aboyant aprs

    un pauvre lapin mort de peur. Je l'avais chapp

    belle !

    Le cur battant, les membres encore douloureux, je

    fixais les clats de verre parpills. J'en ramassai un

    et l'examinai soigneusement.- Et maintenant, qu'est-ce que je vais faire ?

    Les chiens continuaient hurler au loin.

    Ma seule pice conviction avait disparu. Je n'avais

    plus rien montrer au Dr Mu rk i n . Plus rien ! Je jeta i

    les dbris au loin. Il ne me restait plus qu' rentrer

    la maison.

    Aprs le dner, mon pre et ma mre partirent une

    runion de parents d'lves. Je montai directement

    dans ma chambre pour faire mes devoirs.

    Comme je n'avais pas envie d'tre seul, je pris

    Javotte sur mes genoux et la caressai. Mais ellen'tait pas d'humeur se faire dorloter. Elle me

    fusi lla de ses tranges yeux jaunes, me gri ffa la main ,

    puis sauta par terre et s'enfuit.

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    J'essayai ensuite de joindre Lily. J'attendis un long

    moment, mais personne ne rpondit.

    Dehors, le vent hurlait, faisant trembler les vitres.J'avais peur. Un frisson me parcourut le dos. Je dci-

    dai de lire un peu. Pench sur mon li vre, je ne parv ins

    pas me concentrer. Les mots et les pages deve-naient flous. Je pris ma guitare et la branchai sur

    l 'ampli. M'exercer allait me calmer et m'aider

    chasser ces penses qui me torturaient.Aprs avoir rgl le son au maximum, j 'entamai un

    blues. C omme j' t ai s seul la ma ison , je ne risquais

    pas de dranger quelqu'un. Au bout de deux

    minutes, je me rendis compte que quelque chose

    n'allait pas. Je me trompais de notes, et mme de

    corde ! Que se passe-t -il encore ? J 'a i jou cet air des

    milliers de fois. Je pourrais mme l'interprter endormant.

    Je jetai un coup d'il sur mes mains et compris tout

    de suite . Les horr ib les poil s taient revenus ! Jepoussai un cr i . Mes doigts, mes paumes taient enti-

    rement recouverts d'une fourrure noire et paisse.

    Je laissai tomber l'instrument sur le sol et me levai.

    Les paules me dmangeaient aussi. En tremblant, je

    dfis mes boutons de chemise et remontai mes

    manches.Nooon ! Mes bras taient atteints.

    Je restai l, immobile, les jambes flageolantes. Jefaillis m'vanouir ! J'avais la gorge serre et sche.

    J'en eus la nause.

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    Je me prcipitai dans la salle de bains pour vrifier.

    Me penchant au-dessus du lavabo, je contemplai le

    dsastre, les yeux rivs sur la glace. M o n visage, mes

    joues, mon menton... tout tait envahi ! Les poilspoussaient avec la rapidit de l'clair.

    Ils se rpandaient maintenant sur mon corps, une

    vitesse incroyable !Que pouvais-je faire pour empcher ce phnomne ?Y avait-il seulement quelque chose faire ?

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    Le lundi matin, je partis au collge bien avant les

    cours pour attendre Lily.

    Aprs des heures d'efforts, j ' ta is parvenu rasercette fourrure. Je m'tais habill avec un sweat

    manches trs