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A l’occasion du centième anniversaire de la Première Guerre Mondiale, nous entreprenons la publication de quatre numéros spéciaux. Il s’agit de proposer une autre approche de ce conflit. Au travers de récits et de documents d’époque, vous allez découvrir comment cette terrible guerre a été vécue en Charente en abordant quatre thèmes. 1. La mobilisation générale en Charente 2. Loin du front, proche de la guerre en 2 parties 3. L’école et la guerre en Charente 4. L’armistice et le retour des « gueules cassées ». Tous ces textes et photos, ces recherches ont été proposés par : Mireille HIRONDEAU ___________________________ 4 - Les Blessés – Les Oubliés Le retour des Gueules Cassées L’Armistice – La Victoire Les Hommages aux Héros Morts pour la France 14-18 fut un véritable massacre, il fallut trouver de la place, beaucoup de places, pour soigner les blessés et laisser se rétablir les convalescents et les infirmes. Le prix de la guerre Avec la Grande Guerre, pour la première fois dans l'Histoire de l'humanité, des peuples entiers ont été entraînés au combat par des généraux peu soucieux du sang versé. Le conflit a connu les excès habituels à toutes les guerres : viols et assassinats de civils. Mais il s'est signalé aussi par la disparition du code de l'honneur habituel aux guerres européennes. C'est ainsi que l'on n'a pas hésité à bombarder des ambulances et achever des blessés. Il n'a plus été question de trêves comme par le passé pour ramasser les blessés. 51 mois de guerre totale se soldent par un bilan humain catastrophique pour toute l'Europe. La Grande Guerre aura mobilisé un total de 65 millions d'hommes, dont 8 millions de Français, et fait plus de 8 millions de morts au combat, dont : Cybergroupe Généalogique de Charentes Poitou Bulletin de Liaison interne à l’Association Hors-série n°4 15 août 2019 Sommaire : Page 1 : Présentation Pages 1 & 2 : Le prix de la guerre Pages 2 à 8 : Le service de santé militaire Pages 9 & 10: Les visages défigurés Pages 10 & 11 : « Mort pour la France » Page 11 & 12 : Un autre fléau Page 12 à 18 : La fin de la guerre Page 18 & 19: Un hommage aux soldats morts Page 19 : Les sources Comité de rédaction : Bernard DION Hubert DUCLUSAUD Mireille HIRONDEAU Patrice LUCQUIAUD

4 - Les Blessés Les Oubliés Le retour des Gueules Cassées L ......L’Armistice – La Victoire Les Hommages aux Héros Morts pour la France 14-18 fut un véritable massacre, il

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A l’occasion du centième anniversaire de la Première Guerre Mondiale, nous entreprenons la publication de quatre numéros spéciaux.

Il s’agit de proposer une autre approche de ce conflit.

Au travers de récits et de documents d’époque, vous allez découvrir comment cette terrible guerre a été vécue en Charente en abordant quatre thèmes.

1. La mobilisation générale en Charente

2. Loin du front, proche de la guerre en 2 parties

3. L’école et la guerre en Charente

4. L’armistice et le retour des « gueules cassées ».

Tous ces textes et photos, ces recherches ont été proposés par :

Mireille HIRONDEAU

___________________________

4 - Les Blessés – Les Oubliés Le retour des Gueules Cassées

L’Armistice – La Victoire Les Hommages aux Héros Morts

pour la France

14-18 fut un véritable massacre, il fallut trouver de la place, beaucoup de places, pour soigner les blessés et laisser se rétablir les convalescents et les infirmes.

Le prix de la guerre Avec la Grande Guerre, pour la première fois dans l'Histoire de

l'humanité, des peuples entiers ont été entraînés au combat par des généraux peu soucieux du sang versé.

Le conflit a connu les excès habituels à toutes les guerres : viols et

assassinats de civils. Mais il s'est signalé aussi par la disparition du code de l'honneur habituel aux guerres européennes.

C'est ainsi que l'on n'a pas hésité à bombarder des ambulances et achever des blessés. Il n'a plus été question de trêves comme par le passé pour ramasser les blessés.

51 mois de guerre totale se soldent par un bilan humain catastrophique pour toute l'Europe.

La Grande Guerre aura mobilisé un total de 65 millions d'hommes, dont 8 millions de Français, et fait plus de 8 millions de morts au combat, dont :

Cybergroupe Généalogique de Charentes Poitou

Bulletin de Liaison interne à

l’Association

N° Hors-série n°4 15 août 2019

Sommaire :

Page 1 : Présentation Pages 1 & 2 :

Le prix de la guerre Pages 2 à 8 :

Le service de santé militaire Pages 9 & 10:

Les visages défigurés Pages 10 & 11 :

« Mort pour la France » Page 11 & 12 :

Un autre fléau Page 12 à 18 :

La fin de la guerre Page 18 & 19:

Un hommage aux soldats morts Page 19 :

Les sources

Comité de rédaction :

Bernard DION Hubert DUCLUSAUD Mireille HIRONDEAU Patrice LUCQUIAUD

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- 1,8 million Allemands, - 1,7 million Russes, - 1,4 million Français (dont 100.000 « poilus des colonies »), - 1,2 million Austro-Hongrois, - 908.000 Britanniques, - 650.000 Italiens - 335.000 Roumains, - 325.000 Turcs, - 117.000 Américains, - 88.000 Bulgares, - 45.000 Serbes...

Aux morts des champs de bataille s'ajoutent plus de 20 millions de blessés et de mutilés.

Des séquelles durables

Les séquelles économiques, humaines et psychologiques de la Grande Guerre vont peser pendant de nombreuses décennies sur les pays belligérants. La France du Nord et de l'Est, où se sont déroulées les principales batailles, est ravagée et se remet difficilement de ses ruines. Beaucoup de villages, dans toutes les régions du pays, ne vont quant à eux jamais se remettre de la mort au combat de nombre de leurs garçons et de la condamnation au célibat de nombreuses jeunes filles (les « veuves blanches »). Les populations civiles ont été relativement peu affectées dans leur chair par la guerre. Mais 4 millions de veuves de guerre et 8 millions d'orphelins ont aussi porté, pendant de longues décennies, le deuil des disparus. Les civils comme les combattants ont été, aussi, brutalement frappés par un mal inattendu, la grippe

espagnole, dont la propagation a été facilitée par les mouvements de population et l'affaiblissement physique des individus suite aux privations de toutes sortes. Notons que si la guerre a fait progresser l'armement, avec l'apparition des chars blindés et de l'aviation de guerre, elle a aussi eu des effets plus positifs, notamment les progrès de la radiologie, de la chirurgie réparatrice, mise au défi de soulager les « gueules cassées » (les mutilés de la face, au nombre de 15.000 en France), la création d’une Ecole de Médecine et de Chirurgie militaire au sein de l’Hôpital d’Origine d’Etapes de Bouleuse.

Le service de santé militaire pendant ce conflit mondial

La Première Guerre mondiale a demandé un effort exceptionnel en matière de santé militaire compte tenu de l'ampleur du nombre de blessés à traiter. Un peu plus de 20 000 médecins, toutes spécialités confondues, mobilisés au titre de l’active ou de la réserve. Avec un effectif supérieur à 2 200 hommes, les pharmaciens-chimistes sont affectés dans des groupes de brancardiers et dans les formations de traitement. Les infirmiers sont regroupés dans des sections d’infirmiers militaires (SIM), 6 000 hommes environ, répartis dans chaque corps d’armée. Marie Curie créa, avec le soutien de dames fortunées de la Croix-Rouge, une flottille de 20 véhicules dotés d'un appareil à rayons X qui aidèrent les médecins dans leurs diagnostics et leurs opérations d'urgence. Ces véhicules furent surnommés « les petites curies ». Dès 1915, une commission supérieure consultative des services de santé est formée afin de proposer des

Défilé des mutilés, 14 juillet 1919 (Jean Galtier-Boissière, Musée d’Histoire contemporaine de Paris)

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solutions pour rendre plus efficace la prise en charge des blessés et des malades. Était par ailleurs posée la question des compétences des infirmières (toutes n'étant pas diplômées) et du bienfondé de leur présence auprès des blessés. Aussi, la commission de 1915 exige la stricte application du décret de mai 1913 sur le port d'un costume identique (propriété de la Croix Rouge et garanti par l'autorité militaire) pour les infirmières des trois sociétés reconnues avec une marque distinctive pour chacune d'elles (les infirmières n'appartenant pas à une de ces trois sociétés ont l'interdiction de porter la coiffe blanche avec croix rouge). La Croix Rouge va trouver naturellement sa place dans ce dispositif, le rapporteur de la commission, Joseph Reinach, louant tout particulièrement le rôle des infir-mières auprès des malades, autant du point de vue médical que psychologique. En outre, le principe d'un livret individuel, déjà adopté par la S.S.B.M. (Société de Secours aux Blessés Militaires), est étendu aux deux autres sociétés, l'A.D.F. (Association des Dames Françaises) et l'U.F.F. (Union des Femmes de France). La S.S.B.M. était la plus importante des sociétés de Croix-Rouge. Elle fut autori-sée à prêter son concours au service de l'Armée. Elle accéda à la zone de l'avant (zone des combats), pouvait concourir au bon fonctionnement des trains sani-taires. Les infirmeries de gare dépendaient d'elle. L'U.F.F. et l'A.D.F. étaient cantonnées dans la zone de l'arrière, mais pas dans la

zone des Armées.

Livret d’Henriette DU CHOUCHET, Rochechouart.

« Ceux de chez nous Nos héros malgré eux » de José DESLIAS

Les hôpitaux : l’Arrière face à la réalité du conflit

La stratégie de « l’offensive à outrance », telle qu’elle se dessine dès la stabilisation du front, en octobre 1914, déverse des flots de blessés dont la prise en charge immédiate à proximité de la zone des combats se révèle impossible. Environ la moitié des huit millions de soldats français envoyés sur le front séjournent, à un moment ou un autre, dans un hôpital militaire au cours du conflit. Les principaux problèmes relevés après les premiers mois de guerre, outre l'importance du nombre de blessés à traiter, tient à la rapidité de leur évacuation et aux personnels compétents pour les prendre en charge. Pour simplifier, celle-ci se déroule selon les étapes suivantes:

1. Soins d'urgence 2. Premier tri effectué par les formations sanitaires de l'avant (postes de secours, ambulances). 3. Le transport des blessés est effectué en ambulances hippomobiles ou automobiles depuis les formations

sanitaires de première ligne vers les hôpitaux d’origine d’étape (H.O.E.). 4. Structures hospitalières intermédiaires entre l’Avant et l’Arrière, les H.O.E. assurent une triple fonction :

Ils accueillent tous les blessés et malades arrivant du front, opèrent les soldats intransportables et prépa-rent les évacuations par trains et parfois en péniche vers les hôpitaux permanents militaires mixtes ou

des hôpitaux temporaires de l’Arrière. En fonction de la gravité des blessures constatées seuls les blessés intransportables sont amenés à faire des séjours plus longs dans ces hôpitaux. 5. Gares d'évacuation de l'avant situées dans la zone des armées. Les militaires sont transférés par train sanitaire vers les lieux d'hospitalisation disséminés sur tout le territoire. Tableau Le train des blessés, par Henri Gervex. (Dans L’Illustration du 20 février 1915.)

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En 1914, la France comptait deux types d'hôpitaux: les hôpitaux militaires gérés par le service de santé des armées et les hôpitaux civils (à caractère public ou privé). Le nombre de soldats à traiter dès les premiers mois de la guerre va rendre indispensable la multiplication du nombre d'établissements d'où l'utilisation des hôpitaux civils qui deviennent "mixtes" (une partie de l'établissement est réservée aux militaires). Face à cet afflux de blessés, les Hôpitaux permanents, militaires ou civils, sont rapidement saturés et des établissements temporaires (pour la durée du conflit) vont ouvrir sur tout le territoire pour fournir des lits supplémentaires de taille variable et dans des locaux très divers (écoles, lycées, hôtels, couvents, usines, casinos, ...)

Tableau L’ambulance de la gare de Poitiers, par Henri Gervex.

Dans L’Illustration du 11 septembre 1915.) Des hôpitaux temporaires ou ambulances (le temps de la guerre) sont créés, ils se répartissent en :

Hôpitaux Complémentaires (HC) dont la gestion est directement assurée par la Direction du Service de Santé (sous-entendu militaire)

La Charente se trouve dans la circonscription de la 12ème Région Militaire de Limoges.

Hôpitaux Auxiliaires (HA) dont la gestion est assurée par l'une des 3 sociétés d'assistance de la Croix-Rouge, la Société de Secours aux Blessés Militaires ( S.S.B.M.), l'Union des Femmes de France (U.F.F.), ou l'Association des Dames Françaises (A.D.F.)

Hôpitaux bénévoles (HB) (initiatives privées) créés par l'arrêté du 21/8/1914

Les malades et blessés placés chez des particuliers (mode d'hospitalisation déconseillé et à éviter mais néanmoins autorisé dans des cas spécifiques et indispensables) et également répertoriés par les Directeurs du Service Santé des régions.

L’arrivée de blessés en Charente L’ouverture d’hôpitaux temporaires en Charente Journal La Charente du samedi 15 août 1914, AD16 cote 1per 44/59 :

Angoulême : « …L’hôpital du Collège de Jeunes Filles comptera 160 lits de blessés, plus 30 lits d’infirmiers. Bien qu’il soit une entreprise militaire, le matériel de toutes sortes, le linge nécessaire reste à la charge de l’initiative privée. Des dons très généreux en argent, en nature ont déjà été reçus. Mais lorsqu’on saura nous faut au moins 700 draps, 700 chemises, 400 taies d’oreillers, etc. Les personnes qui s’intéressent à cette œuvre comprendront la nécessité de ce deuxième appel très pressant. »

Cognac : « Un hôpital auxiliaire vient d’être installé par les soins de la Croix-Rouge dans les locaux du groupe scolaire de Cagouillet. 80 lits sont prêts à recevoir des blessés. Un hôpital militaire de 140 lits va également s’ouvrir dans les locaux du collège. Pour subvenir à l’entretien de ces diverses installation, un appel est adressé à tous les cœurs généreux. »

Châteauneuf-sur-Charente : «On procède à Châteauneuf à l’installation d’un hôpital pour recevoir les blessés. Les dons sont reçus par Mme Henri rousseau. »

Jarnac : « Un hôpital pour les blessés militaires est installé à Jarnac. Les dons doivent être adressés à Mme Maurice Laporte. » Journal La Charente du lundi 31 août 1914, AD16 cote 1per 44/59 :

Confolens : « Des dispositions sont prises par la municipalité en vue de l’arrivée éventuelle de blessés à Confolens. Journal La Charente du 3 septembre 1914 :

Barbezieux : « Un hôpital militaire complémentaire a été installé dans notre collège municipal : il comprend 50 lits répartis dans les dortoirs et les classes du rez-de-chaussée ; d’autres locaux ont été aménagés en salle d’opération, salle de bains pharmacie et bureaux.

Cet hôpital est placé sous le direction d’un charentais, M. le docteur Blanc-Fontenille, maire de Villebois-Lavalette, médecin-major de territoriale… »

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Journal La Charente du 14 août 1914

AD16 cote 1per 44/59 Deux hôpitaux Hôpital civil et militaire Angoulême - 64 rue de Beaulieu - 200 lits - Fonctionne durant toute la guerre Hôpital, clinique Sainte-Marthe Angoulême - 79 rue de Beaulieu - 90 lits - Fonctionne durant toute la guerre Des hôpitaux temporaires HC n°2 Angoulême Ecole Libre de garçons Saint-Paul, 38 rue d’Epernon 202 lits. Fonctionne du 5 août 1914 au 15 juin 1919. Une annexe à Aigre (18 lits) devenue par la suite hôpital bénévole n° 36 bis, hôpital chirurgical de catégorie B HB n°3 bis Ruelle-sur-Touvre. Maison particulière , route de Limoges. 30 lits. Fonctionne du 10 septembre 1914 au 31 juillet 1917 HA n°4 Angoulême.

Institution Sainte-Marie de Chavagnes. 171 rue de Paris.

204 lits. SSBM. Fonctionne du 25 août 1914 au 23

décembre 1918. Hôpital de chirurgie de catégorie B

HA n°5 Cognac. Ecole de Cagouillet, place du Champ de Foire. 350 lits. SSBM. Fonctionne du 23 août 1914 au 20 juin 1919. Soi-gnantes : Communauté des Filles de la Sagesse. Hôpital chirurgical de catégorie A. 5316 malades et blessés hospitalisés. Annexe : Dite de Beaulieu. Institution de jeunes filles de Beaulieu, 25 place Beaulieu. 100 lits . SSBM. Fonctionne du 5 septembre 1914 au 20 mai 1919. Soignantes : Communauté des Filles de la Sagesse. Maison Martell, 8 rue de Pons. 20 lits. SSBM. Fonctionne du 1er octobre 1914 au 30 juin 1919. Soignantes : Communauté des Filles de la Sagesse. HC n°8 Angoulême.

Hôpital n°8, Angoulême Archives municipales d’Angoulême Ecole normale d’Instituteurs et Ecole pratique de commerce et d’Industrie, route de Bordeaux. 263 lits. Fonctionne du 11 août 1914 au 1er avril 1919. A reçu 5751 malades et blessés. Présence d’infirmiers annamites parmi les infirmiers. Annexe : La Couronne. Pensionnat de jeunes filles. 20 lits. Fonctionne du 12 octobre 1914 au 14 janvier 1916 comme HB n°102 bis.

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Fléac. Pensionnat de jeunes filles. 20 lits. Fonctionne du 2 septembre 1914 au 10 janvier 1916 comme HB n°40 bis. HC n°9 Angoulême. Ecole normale d’Institutrices, Ma Campagne, route de Montmoreau. 140 lits. Fonctionne du 15 août 1914 au 1er septembre 1916. HA n°10 Chabanais. HA n°15 Salles-Lavalette. Château de Loches. 66 lits . SSBM. Fonctionne du8 octobre 1914 au 23 décembre 1918. Reçut 906 malades et blessés hospitalisés. HC n°20 Angoulême. Collège de jeunes filles, rue du Petit-Saint-Cybard. 175 lits. Fonctionne du 21 août 1914 au 31 août 1916. HC n°24 Cognac. Collège de garçons, rue Elysée Mounier. 325 lits. Fonctionne du 25 août 1914 au 31 août 1916. Annexe : Hôpital-Hospice. 80 lits. Fonctionne du 25 août 1914 au 30 novembre 1918. Réservé aux contagieux. HC n°27 La Rochefoucauld. Collège communal, place Gourville. 123 lits. Fonctionne du 16 août 1914 au 15 septembre 1919. Reçut 5575 malades et blessés hospitali-sés. Annexes : Hôpital civil, place Gourville. 97 lits. Fonctionne du 19 juillet 1915 au 10 juin 1919. Halles aux grains, place du Minage. 15 lits. Fonctionne du ? au 10 juin 1919. Ecole maternelle. Fonctionne du 5 novembre 1915 au 10 juin 1919. HB n°29 bis Chabanais. Salle des fêtes. 66 lits. Fonctionne du 22 septembre 1914 au 31 août 1916.

Hôpital bénévole n° 29 bis Chabanais. Collection José DELIAS

HC n°29 Barbezieux. Collège municipal, 7 avenue Thiers. 125 lits. Fonctionne du 14 août 1914 au 14 mars 1919. Reçut 2381 malades et blessés hospitalisés. HB n°30 bis Confolens. Pensionnat de jeunes filles. 40 lits. Fonctionne du 30 septembre 1914 au 19 septembre 1915. HC n°32 Angoulême. Lycée de garçons, place de Beaulieu. 110 lits. Fonctionne du 17 août 1914 au 1er février 1915. Puis s’installe Ecoles de garçons et de filles de Saint-Ausonne. Fonctionne du 1er février à octobre 1916. Et enfin à La Doyenné. Fonctionne d’octobre 1916 au 23 janvier 1919. Annexes : Ecole de garçons de La Bussatte. 88 lits. Fonctionne du 1er février 1915 à 1916. Ecole libre Denis Papin, faubourg de L’Houmeau. 35 lits. Fonctionne du 1er février 1915 au 3 janvier 1919. Anciennes annexes du Dépôt de Convalescents de la Caserne Taillefer, fermées en 1915 et devenues Centre d’ORL et de

dermatologie en 1916.

HB n°33 bis Chasseneuil-sur-Bonnieure. Maison particulière, Grande Rue. 15 lits. Fonctionne du 26 septembre 1914 au 5 mars 1915. HB n°34 bis Ruffec. Hospice communal et école communal de garçons. 55 et 55 lits. Fonctionne du 20 septembre 1914 au 2 novembre 1915. Reçut 586 malades et blessés hospitalisés. HB n°35 bis Loubert. Ecoles du Petit-Madieu, place du Champ de Foire. 30 lits. Fonctionne du 1er octobre 1914 à ? Annexe : Ecoles. 28 lits. Fonctionne du Fonctionne du 1er octobre 1914 au 31 août 1916. HB n°36 bis Aigre. Hospice. 12 lits. Fonctionne du 18 septembre 1914 au 10 janvier 1917. Annexe : école libre de filles. 18 lits. HB n°40 bis Fléac. Pensionnat de jeunes filles. 20 lits. Fonctionne du 2 septembre 1914 au 10 janvier 1916. Annexe de HC n°8 Angoulême

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HDC n°43 Angoulême. Lycée de garçons, place Beaulieu. 510 lits. Fonctionne du 1er février 1915 au 20 juillet 1916 puis devient l’HC n°43. HC n°43 Angoulême Lycée de garçons, place Beaulieu. 250 lits. Fonctionne d’octobre 1916 au 23 janvier 1919. Hôpital de spécialités : ORL, ophtalmologie, grande chirurgie, centre de prothèse dentaire. HDC 43 et HC 43 ont reçu 15671 malades et blessés hospitalisés. HC n°45 Cognac. Couvent de la Providence, 33 rue de la Providence. 150 lits. Fonctionne du 25 février 1915 au 20 juin 1916. Annexe : Maison de retraite Saint-Antoine. 90 lits. Fonctionne du 17 décembre 1916 au 31 décembre 1918. HB n°66 bis Châteauneuf-sur-Charente. Hospice civil cantonal. 80 lits. Fonctionne du 4 septembre 1914 au 31 décembre 1918. HB n°67 bis Mansle. Pension, place de l’Hôtel de ville. 41 lits. Fonctionne du 22 octobre 1914 au 20 août 1916. HB n°91 bis Chalais. Château. 30 lits. Fonctionne du 21 novembre 1914 au 31 décembre 1918. Hôpital chirurgical de catégorie C. HB n° 92 bis Aubeterre-sur-Dronne. Ecole communale de garçons. 50 lits. Fonctionne du 11 septembre 1914 au 10 janvier 1917. HB n° ? Angoulême. Saint-Martial. Communauté des Filles de la Sagesse. Fonctionne du 18 août 1914 à 1916. HB n° ? Barbezieux. Communauté des Filles de la Sagesse. Fonctionne en 1914. A ensuite reçu des orphelins des pays libérés. HA n° 101 Jarnac. Ecole primaire de garçons et de filles, 29 rue Burgaud-des-Marêts. 40 lits. UFF. Fonctionne du 11 août 1914 au 1er avril 1919. Fonctionna comme hôpital de grande chirurgie, catégorie A. Reçut 3 324 blessés hospitalisés. Annexes : Ecole Jeanne d’Arc, 22 rue des Fossés. 54 lits. UFF. Fonctionne de 1914 au 19 avril 1919. Ecole maternelle mixte, 29 rue Burgaud- des-Marêts. 46 lits. UFF. Fonctionne d1914 au ? Immeuble privé. 25 lits. UFF. Maisons Moreau-Lapointe, rue des Chabannes. 25 lits. UFF. Fonctionne de 1914 au 19 avril 1919. HB n° 102 bis La Couronne. Pensionnat de jeunes filles. 20 lits. Fonctionne du 12 octobre 1914 au 14 janvier 1916. Annexe de l’HC n° 8 d’Angoulême. HB n° 104 Rouillac. Hôpital privé, couvent des Sœurs de la Sagesse. 40 lits. UFF. Fonctionne du 4 septembre 1914 au 31 décembre 1918. HB n° 112 bis Montmoreau-Saint-Cybard.

Hôpital de Montmoreau, photographie de blessés convalescents,

AD16 cote 4 Tp 487

HB n° 113 bis Saint-Amand -de-Boixe.

Maison particulière. Fonctionne du 26 novembre 1914

au 9 décembre 1914.

HB n° 118 bis Reignac. Château. 20 lits. Fonctionne du Fonctionne du 13 avril 1915 au 7 septembre 1915. HB n° 119 bis Baignes-Sainte-Radegonde. Maison particulière. 20 lits. Fonctionne du 1er mai 1915 au 8 décembre 1915. HB n° 120 bis Villebois-Lavalette. Asile de vieillards et maison de retraite Gaucher. 25 lits. Fonctionne du 18 septembre 1914 au 20 aout 1916. HB n° 127 bis Angoulême. Immeuble privé Sainte-Marthe. 20 lits. Fonctionne du 2 septembre 1914 au 31 janvier 1919 HB n° 128 bis Cognac.

Hôpital-hospice. 80 lits. Fonctionne du 13 septembre 1914 au 30 novembre 1918. Reçoit des contagieux. Annexe de l’HC n° 24 de Cognac. HB n° 136 bis Confolens.

Hospice. 52 lits. Fonctionne du 20 août 1914 au 23 décembre 1918

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temporaire installé au Collège de jeunes filles, où ont été transportés une partie des blessés couchés, arrivés par le

deuxième convoi, l’hôpital mixte où sont soignés plusieurs officiers, ainsi que l’hôpital organisé par la section de la

Croix-Rouge de notre ville. »

Journal La Charente du 3 septembre 1914

AD16 cote 1per 44/59

Journal La Charente du 31 août 1914, AD16 cote 1per 44/59 :

Cognac : « Des blessés militaires arrivés jeudi à Cognac, ont été répartis entre l’hôpital militaire établi au collège et celui organisé par la Croix-Rouge, dans l’école de Cagouillet. La foule qui assistait à leur transfert de la gare aux hôpitaux leur a fait un chaleureux accueil. Au passage du convoi en gare de Châteauneuf, la population de cette généreuse localité avait offert aux blessés des fleurs, des fruits, du tabac, des rafraichissements, ainsi que le produit d’une collecte faite spontanément. »

Taizé-Aizie , cahier des écoliers, Secours aux blessés. AD16 cote 4 Tp 494 Un élan de générosité provoqué par la vue des trains de blessés revenant des champs de bataille s’est produit dans la population de la commune. Les habitants, aisés ou non, du bourg et des villages ont tous à de rares exception près donné leur obole pour secourir les blessés. Quelques uns ont remis leurs dons directement au personnel de la Croix-Rouge ; le plus grand nombre a remis du linge et de l’argent entre les mains d’un Comité placé sous le patronage de la municipalité et dirigé par l’instituteur. Le linge usagé a été mis en état par des dames de la commune qui ont travaillé dans l’ouvroir de l’école et ensuite ce linge a été transporté à l’hôpital temporaire de Ruffec. Il comprenait les articles suivants : 84 draps de lit 7 nappes 220 bandes de pansement 12 caleçons 162 chemises 15 serviettes 36 linges 32 paires de chaussettes usagés 75 mouchoirs 2 taies d’oreiller 24 essuie-mains 5 bonnets de nuit 206 torchons 5 gilets de coton 9 flanelles 15 pantalons usagés 1 couverte de laine 12 vestons 7 gilets Le montant de la souscription en argent, 253fr,95 a, suivant l’intention des généreux donateurs été employé à améliorer le sort des soldats blessés en traitement à l’hôpital temporaire de Ruffec. ……

Barro , cahier des écoliers, Ecole et hôpital Mme Changeant. AD16 cote 4 Tp 494 Cette pour cette œuvre que mes petits ont manifesté le plus d’intérêt et rivalité de générosité. L’hôpital temporaire de Ruffec qui recevait leurs dons n’était distant de notre commune que de 5km. Les enfants y étaient allés avec leurs parents et je chargeais parfois les plus grands de porter eux-mêmes, deux fois par mois, le produit des objets recueillis. …...

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Les visages défigurés de la Grande Guerre

Les « gueules cassées » Aucun des soldats engagés dans la Première Guerre mondiale ne revint indemne : le traumatisme fut intense pour les corps comme pour les esprits. Parmi les millions de blessés physiques, certains ne pouvaient même plus être reconnus par leurs proches, tant leurs visages étaient défigurés. L'expression « gueules cassées » a été inventée par le colonel Picot, le premier président de l’Union des Blessés de la Face et de la Tête. Elle fait référence également à des hommes profondément marqués psychologiquement par le conflit, qui ne purent regagner complètement une vie civile ou qui ont été internés à vie, pour les cas les plus graves. Ces « gueules cassées » sont devenues le symbole des douleurs provoquées par ce conflit.

Les Poilus, au cœur de la cible Dans la Grande Guerre, l'artillerie et les mitrailleuses infligèrent les 2/3 des blessures. On estime que 40% du contingent français fut touché de façon invalidante et que 11 à 14% de ces blessés l'ont été au visage. Lorsque la blessure arrive, il faut attendre la nuit pour que les brancardiers, guidés par les cris, puissent intervenir. Puis c'est le poste de pansement pour les premiers soins permettant de lutter contre l'asphyxie et l'hémorragie, avant l'acheminement au poste de secours du régiment où officie un médecin. Dès 1914 on met en place des ambulances chirurgicales : très rapidement en effet, on se rend compte qu'il est plus efficace de commencer à traiter directement sur le terrain au lieu de s'empresser de convoyer les blessés à l'arrière.

Reconstruire les corps Près de 15.000 grands blessés de la face parviennent dans les hôpitaux. Pris en charge par des centres spécialisés installés loin du champ de bataille, les blessés vont, à leur corps défendant, inaugurer une spécialité inédite, la chirurgie maxillo-faciale. Des prothèses à but médical ou esthétique furent aussi proposées, souvent avec peu de succès : beaucoup de blessés, ayant vu leurs camarades souffrir du poids ou des irritations provoquées, les refusèrent, tout comme furent refusées de nombreuses opérations de reconstruction.

« Sourire quand même »

L’expression « Gueules cassées » revient au colonel Yves-Émile Picot, premier président de « l’Union des mutilés de la face et de la tête », après qu’on lui ait refusé l’entrée à un séminaire de mutilés de guerre à la Sorbonne, lui-même grièvement blessé à la figure lors des combats en 1917. Comme lui, ils sont environ 15 000 recensés après la signature de l’armistice le 11 novembre 1918. Quand, à la fin de la guerre, le monde découvre l’ampleur des dégâts et les horreurs de la violence des combats, l’Europe compte ses morts. Les défigurés sont soignés grossièrement par une chirurgie faciale dont les résultats sont à la hauteur des moyens de l’époque. De nombreux soldats perdent ainsi leurs visages à jamais et le courage de retrouver leurs familles. Même si la devise de « l’Union des mutilés de la face et de la tête » était « sourire quand même », les « Gueules cassées » sombrent pour la plupart dans la dépression. Ceux qui ont bénéficié des soins du Studio for Portrait Mask ont pu recouvrer un visage d’avant-guerre ne serait-ce que pour affronter la société d’après-guerre. Même si, quelques années plus tard, les masques et la peinture émaillée qui les recouvre craquelaient jusqu’à ne plus servir.

Jane Poupelet Elle n’a ni rue en son nom, ni centre culturel, ni école. Née le 19 avril 1874 au château de la Gauterie à Clauzure, lieu-dit de Saint-Paul-Lizonne en Dordogne, Jane Poupelet est fille d’un avocat qui fut nommé sous-préfet de Ruffec. Marie Marcelle Jane Poupelet est une artiste méconnue qui, pour son époque au début du XXe siècle, a pourtant su faire preuve de féminisme militant et d’engagement humanitaire hors-norme. Son courage et son talent, elle les a mis au service des soldats gravement blessés au visage. La jeune périgourdine, formée à l’école des Beaux-arts de Bordeaux et reconnue dans le milieu artistique parisien, rejoint en mai 1918, la sculptrice américaine Anna Coleman Ladd au sein d’une initiative invraisemblable. Celle-ci vient d’ouvrir le « Studio for Portrait Mask » sous l’égide la Croix-Rouge américaine, un atelier qui fabrique des masques pour les « Gueules cassées » de la Première Guerre mondiale. Après sa période parisienne, de graves problèmes de santé la ramènent dans son sud-ouest natal, où elle décède à Talence en octobre 1932. Son dévouement humaniste lui vaut une reconnaissance discrète malgré le titre de chevalier de la Légion d’honneur qui lui sera remis en 1928. Dix ans plus tôt, en 1919, le romancier et critique d’art français André Salmon avait écrit :

« Durant la guerre Mlle Poupelet a sacrifié son avenir à l’humanité. Pour les mutilés de la face, elle a obscurément donné son talent, créant des modèles, se fatiguant à faire des moulages pour re-sculpter des visages humains aux misérables héros défigurés par la mitraille imbécile. »

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Que devenir ?

La guerre étant finie pour eux, que faire ? Comment parler de réinsertion à des hommes souvent très handicapés ?

Ils vont choisir de s'isoler en se regroupant dans l'Union des blessés de la face et de la tête, fondée en 1921 par des anciens de la Ve division du Val-de-Grâce.

Pour faire face aux frais, on multiplie les appels à souscription et les tombolas avant de créer en 1933 une grande loterie : la Loterie Nationale est née. Aujourd'hui, l'association, toujours très active, continue à venir en aide aux grands blessés de guerre et à leurs familles tout en multipliant les actions en faveur de la mémoire des broyés des combats.

« Mort pour la France »

L’attribution de la mention « mort pour la France» est une récompense morale honorant le sacrifice des combattants morts aux Champs d’Honneur et des victimes civiles de la guerre. Instituée par les lois du 2 juillet 1915 et du 22 février 1922, elle confère aux victimes une reconnaissance et un statut individuel, ainsi qu’à ses ayants-droits : sépulture individuelle et perpétuelle dans un cimetière militaire aux frais de l’Etat, création d’association de veuves de guerre, statut de pupilles de la Nation pour les enfants du mort pour la France. Largement attribuée pendant la Première Guerre Mondiale et dans les années qui suivent, cette mention ne fut pas attribuée à près de 100 000 décédés. Certains, orphelins ou combattants indigènes (Afrique, Algérie, Indochine), n’eurent personne pour apporter la preuve directe d’un fait de guerre. D’autres, bien que décédés pendant la guerre, étaient morts de maladie ou suicidés. D’autres enfin eurent des comportements incompatibles avec la reconnaissance nationale. Toutefois pour certains, la mention put être établie ultérieurement. Et peut l’être aujourd’hui, à la demande des descendants. La demande émane de l’autorité militaire ou administrative,, habilitée à accorder ou refuser la mention, mais aussi la famille du défunt. Autre-ment dit un ancien soldat mort d’une maladie imputable au service peut être déclaré mort pour la France à la demande de la famille, mais il faut que le certificat de décès établisse une relation directe entre la maladie et le décès.

Réformé « numéro 1 », réformé « numéro 2 » Un militaire réformé « numéro 1 » est un militaire pour lequel l’infirmité (qu’il s’agisse de blessure ou de maladie) est en relation avec le service. Un militaire réformé « numéro 2 » a été réformé pour une invalidité résultant d’une blessure ou d’une maladie sans rapport avec le service. Le réformé « numéro 1 » a droit à une pension militaire, du fait de blessure ou maladie contractée en service. Le réformé « numéro 2 » n’a pas droit à cette pension militaire du fait d’une blessure, maladie, infirmité, ne pouvant pas être imputée à un service commandé.

Le livre d’or Par la loi du 25 octobre 1919, « relative à la commémoration et à la glorification des mortes pour la France au cours de la Grande Guerre », l’Etat lance le projet d’un livre d’or comprenant les noms de tous ces héros jusqu’alors anonymes, qui serait déposé au Panthéon. Le ministère des Pensions, nouvellement créé, est chargé d’établir, à partir du fichier existant, la liste des Morts pour la France de chaque commune ; il l’adresse en 1929 aux maires qui la contrôlent et l’amendent. Toutefois, les décalages entre les noms figurant sur les monuments aux morts et ceux des livres d’or proviennent du fait que la liste du ministère est établie en 1929 alors que les monuments aux morts ont presque tous été érigés entre 1920 et 1925. Ces listes nominatives communales permettent de connaître pour chaque soldat les nom et prénom, date et lieu de nais-sance, grade et lieu de décès. Le lieu de sépulture, en revanche, n’est pas indiqué. Ces listes communales, établies pour la quasi-totalité des communes de France, présentent un très grand intérêt pour la généalogie.

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Journal La Charente Libre du 22 novembre 2018 La violence de la Grande Guerre les a rendus fous.

Ces soldats sont morts dans l’oubli à l’asile de La Couronne. La Ville et le Souvenir français veulent réhabiliter leur mémoire. Pierre N. était charcutier à Angoulême. Avant son départ pour

le front de la Grande Guerre, rien ne présageait un basculement dans la folie. Des archives retracent froidement l’éclatement d’un obus le 20

décembre 1914, son arrivée à La Couronne le 23 mars 1915 pour « des troubles mentaux ». A l’époque où le Centre hospitalier spécialisé Camille Claudel

s’appelait l’asile d’aliénés de Breuty. Il y meurt le 6 janvier 1917 après avoir été réformé par l’armée. Effacé de l’Histoire par la nation. Pleuré par une veuve et leur fille de 11ans.

« Son nom n’est pas écrit ici. » Philippe Morin se penche sur la stèle de pierre. Le délégué dé-partemental du Souvenir Français foule la terre humide parse-mée de feuilles d’automne, dans ce cimetière méconnu, non balisé, caché au fond du parking du campus de La Couronne. Sous ses pas reposent les corps de ces gueules cassées. Ils partagent l’éternité avec des dizaines de défunts de l’asile psychiatrique disparus plus récemment, que personne n’a réclamés. Eux sont identifiés. Philippe Morin est un peu tombé par hasard sur ce cimetière en déshérence.

…Un premier travail d’exhumation de la mémoire de ces hommes avait accouché d’une plaque, posée le 11 novembre 2011 sur le monument aux morts de La Couronne. Treize soldats morts à Breuty y retrouvent un nom. Mais de nouvelles recherches, initiées l’an dernier à la demande du Souvenir français et du maire de La Couronne, Jean-François Dauré, ont révélé une dizaine d’autres soldats. Charlotte Servant, chef du patrimoine à La Couronne et Marie Faure, historienne pour Pays d’art et d’histoire, ont pu accéder ces derniers mois aux archives de Camille-Claudel. Une source inestimable, des milliers de dossiers médicaux soigneusement conservés depuis la création de l’établissement en 1865. Pour retracer les parcours des soldats, elles ont exploité des registres de matricules militaires.

« On n’a aucune connaissance de la psychiatrie à cette époque, contextualise Marie Faure. On n’accepte pas que leur état soit dû à la peur, alors on les réforme « numéro 2 », et les familles n’obtiennent aucune pension. » Le cas de Pierre N., le charcutier d’Angoulême, est édifiant. Son dossier porte cette terrible sentence, que l’on retrouve dans presque tous ceux des autres gueules cassées de Breuty :

« Les causes du décès n’entrent pas dans l’application de l’article 488 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre. La mention « Mort pour la France » n’a pas pu être décernée. » « Sa femme avait écrit au médecin chef pour lui dire que son mari n’était pas fou, relate Marie Faure. Mais cela n’a pas suffi. »

« Ce sont des combattants inconnus des bases nationales et des communes qui sont morts dans les pires souffrances psychiques dans le cadre d’un conflit, » insiste Pierre Morin. Je veux qu’ils soient tous identifiés et qu’ils obtiennent la mention « Mort pour la France », un titre honorifique délivré par l’Office national des armées, ONAC, voir encadré. »

Un autre fléau : la grippe espagnole

Journal La Charente Libre du 8 janvier 2019, étude réalisée par M. Calvet Stéphane, historien charentais :

« …La Charente est touchée au son tour à la mi-septembre 1918 quand s’installent à Angoulême 1 100 soldats américains du 1er corps d’artillerie. Leur arrivée coïncide avec le début de l’hécatombe. Le 28 septembre, on inhume en grande pompe aux Bardines le premier officier américain mort sur le sol charentais, David Land. Atteint d’une affection respiratoire pendant la traversée, il s’éteint à l’hôpital de Beaulieu le 28 septembre. Personne ne le dit, mais c’est bien la grippe espagnole qui est à l’origine de sa mort.

L’état civil est à ce moment précis particulièrement éclairant. Le nombre de décès bondit d’un seul coup, le pic étant atteint entre la mi-septembre et fin octobre 1918. Un survol du département permet de voir que ce sont essentiellement les grandes agglomérations et les bourgs disposant d’un

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d’un hôpital militaire temporaire qui enregistrent une très forte élévation de la mortalité. Le record est détenu par Angoulême (302 décès supplémentaires), suivi de Cognac (70), Jarnac (32) et Ruffec (31). Affolées, les autorités locales ont pris des mesures draconiennes : fermeture des cafés, des salles de spectacle et des établissements scolaires. Alors qu’en octobre 1918 circule la rumeur d’un armistice, les rues se vident tandis que les charlatans se précipitent dans la presse locale pour affirmer qu’ils disposent du meilleur remède contre la grippe. Les services de santé sont dépassés. Les médecins sont sur le front et cette absence complique la mise en application des mesures. Le seul remède efficace reste le repos. Or à cette époque, on se repose très peu. Ce sont probablement un peu plus de 2 000 personnes qui ont été tués par le virus H1 N1 dans le département. Sa particularité est de frapper les hommes et les femmes dans la force de l’âge. Plus des deux tiers des malades sont âgés entre 20 et 50 ans. »

La fin de la guerre

L’armistice Le 11 novembre 1918, l'armistice signé à Rethondes (dans l'Oise) marque la suspension des hostilités sur le front.

Journal La Charente du 13 novembre 1918, AD16 cote 1per 44/64

Extrait du livre 1914-1918 « Ceux de chez nous Nos héros malgré eux » de José Délias « C’est de Nancy, en ce jour mémorable, que Jean GANTEILLE envoie ce courrier, cette lettre émouvante, d’une sensibilité rare, à sa famille à Etagnac : .. « Le 11 novembre Mes chers et biens aimés,

11 novembre, date mémorable s’il en fût, depuis 11h, heure historique, les hommes cessent de se donner la mort. De très bonne heure, ce matin, j’ai eu connaissance de la grande nouvelle, il semblait que c’était un rêve. Des larmes de joie ont coulé de mes paupières et ma première pensée a été pour ceux que j’ai là-bas et qu’il me sera permit de revoir.

Nancy est en fête, partout flottent les drapeaux, c’est du délire, nous sommes maintenant tous à l’abri du danger et nous voyons approcher la liberté.

Et dire que hier soir les avions sont venus survoler Nancy. Quand j’ai entendu les sirènes, cela m’a jeté un froid au cœur, j’avais non pas peur des avions mais je me disais l’armistice ne sera pas signé : enfin ils n’ont rien lâché et ce matin, heureux réveil.

La guerre est finie… Bientôt l’ordre viendra de rejoindre nos foyers, et après avoir connu l’angoisse du départ, les survivants connaîtront les

joies du retour. Que Dieu en soit mille fois béni, et à l’instant, je viens en compagnie de Dupuy, de faire une visite à l’église pour

remercier Dieu. Ah ! oui mon Dieu, merci de m’avoir protégé pendant cette grande tourmente, et de permettre ainsi que je revienne au

foyer au milieu de mes chères affections. Merci d’avoir préservé aussi ma chère Ida, mon cher Pierre, ma bonne mère et vous tous. Ah combien serait grande la joie du pauvre père s’il était encore de ce monde et cette pensée fait que mon bonheur n’est pas entièrement parfait.

Je vais te revenir. Je vais t’appartenir, cette vie un moment interrompue va reprendre. Nous allons être unis et la main dans la main, nous finirons nos vieux jours ensemble ; la deuxième partie séparée par un entracte de quatre ans de la première, va recommencer. Cette deuxième partie sera encore plus belle que la première ; l’épreuve l’aura scellée, elle lui aura donné cette force que rien ne pourrait faire chanceler et nous nous aimerons comme nous en serons dignes.

… Certes si la joie est grande, nous ne saurions nous montrer exubérant, car en regardant autour de nous, que de deuils

voyons-nous.

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Cette joie doit rester cachée, mais elle ne le peut, tellement les figures sont épanouies. Maintenant quand sera le retour, je l’ignore. Plus tôt ou plus tard que nous ne pensons ; mais du moment que le canon ne pète

plus, nous prendrons patience. Qui aurait dit il y a deux mois que nous serions là et que cette guerre finirait en beauté. Nous sommes vainqueurs, nous reviendront en vainqueurs. Quel délire pour notre pauvre France qui a été si éprouvée. Nos

situations de ce fait sont sauvegardées. Tendresse à vous De ton Jean »

A partir de la signature de l’armistice, le régiment est employé dans divers services de la zone de Nancy et aux services créés pour la démobilisation du 1er échelon. L’adjudant Jean Ganteille est « envoyé en congé illimité » le 1er février 1919. Il va retrouver son épouse Ida, son fils unique Pierre et sa « bonne mère » au moulin du Bouchaud à Etagnac, en Charente. Il allait recommencer à faire son huile de colza, mais gazé pendant cette sale guerre, sa santé n’allait pas lui permettre de vivre bien longtemps auprès des siens. Jean rendait son dernier soupir le 31 octobre 1928. »

Des rues rebaptisées Une délibération du conseil municipal de Ruffec

La victoire C'est le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919, qui instaure la paix et met fin à la Première Guerre mondiale.

Journal La Charente du 30 juin 1919, AD16 cote 1per 44/65

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Et à Angoulême … Les fêtes de la victoire et de la paix, journal La Charente 30 juin 1919 Samedi dans l’après-midi, le téléphone nous annonçait qu’à 3 heures ½ la paix avait signé avec l’Allemagne. Aussitôt notre dépêche fut affichée à la grille de l’imprimerie et un peu plus tard, notre édition de la Petite Charente répandait en ville l’heureuse nouvelle. Vers 4 heures, les cloches des églises sonnèrent à toute volée, pendant que nos merveilleux 75 tiraient du haut des remparts, des salves qui apportaient au loin, dans nos campagnes la fin du cauchemar qui durait depuis bientôt cinq ans. L’Allemagne, orgueilleuse, parjure et barbare, vaincue, venait d’apposer sa signature au bas du traité de paix, à coup sûr humiliant, mais le plus juste et le plus réfléchi qu’ait enregistré l’histoire. Nos morts glorieux des grandes guerres étaient vengés. Dès l’annonce de la nouvelle, et bien qu’elle fût attendue, la foule se porta vers l’hôtel de ville. Une automobile, dans laquelle avaient pris place M. Petiot, commissaire de police ; l’inspecteur Chapon, et l’agent Bécheresse, ce dernier décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre tenant à la main le drapeau des vaillants mobiles de la Charente de 1870-1871, était prêt à se mettre en marche ; un fort groupe de trompettes d’artillerie, avec leurs fanions, était groupé pour faire escorte avec la gendarmerie. MM. Mulac, sénateur, maire d’Angoulême ; le général Chéré, commandant d’armes et Petit, adjoint au maire,

assistaient du balcon de l’hôtel de ville à cette manifestation.

Après de joyeux refrains joués par les trompettes, lecture est donnée de la proclamation suivante : Le traité de paix imposé à l’Allemagne a été signé par ses plénipotentiaires, à Versailles, aujourd’hui

samedi 28 juin, à trois heures. La Nation Française, qui n’a jamais désespéré aux heures les plus tragiques, en ressentira un légitime

orgueil et une foi inébranlable en ses hautes destinées. Les agresseurs seront châtiés. Les pires violences, les cruautés, tous les forfaits d’un peuple à jamais

odieux ont été vains devant la conscience universelle. La force est abattue, le droit est restauré. Notre armée est entourée de gloire, nos héros tombés sont vengés. La France a repris ses frontières : il lui

reste à l’abri du traité de paix, signé et dont il faut assurer la sévère exécution, relever ses usines. Elle y parviendra avec l’effort de tous dans l’union intime.

Pour célébrer cette grande journée, nos concitoyens sont priés de pavoiser à toutes les fenêtres. Ce soir, à 9 heures ¼ une retraite aux flambeaux aura lieu et l’hôtel de ville sera illuminé. Vive la France ! Vive l’Armée ! Vive la République !

Les acclamations enthousiastes de la foule saluent cette lecture. Le cortège se met en route et à chaque carrefour, l’inspecteur de police Chapon donne lecture de la proclamation ; les trompettes font, à chaque halte, retentir leurs airs de triomphe. Il est six heures lorsque le cortège est de nouveau retour à l’hôtel de ville, après avoir parcouru chaque quartier.

Pendant ce temps, la foule a encore grossi dans les rues de la ville, dont les maisons sont abondamment pavoisées ; les préparatifs d’illuminations se poursuivent rapidement ; des jeunes gens ont formés des monômes ; ils conspuent Guillaume et ses complices et rendent un hommage à nos vaillants poilus, à ceux qui ont reconquis la liberté de la France, leur confiant à eux, les jeunes, le soin de la rendre, par leur travail et leur patriotisme, encore plus grande. La soirée de cette belle journée restera inoubliable ; la foule est immense dans les rues ; la préfecture , l’hôtel de ville, le palais de justice, le théâtre, l’hôtel des postes et des télégraphes, la chambre de commerce, la caisse d’épargne, les casernes, l’école d’artillerie, les gares, sont magnifiquement illuminés. Les illuminations particulières sont nombreuses, et sur tout le long parcours suivi par la retraite au flambeau organisée avec le concours des trompettes d’artillerie, sont allumés des feux de Bengale et retentissent les vivats de la population. Dimanche, l’animation a été grande aussi ; la ville pavoisée, gardait son air des grands jours de fête. Le soir, à 9 heures ½, une retraite aux flambeaux, organisée par la jeunesse, a parcouru les principales rues de la ville et le public, très nombreux, s’est associé à cette nouvelle manifestation patriotique.

Jour-nal La

Cha-

rente du dimanche 13 juillet 1919, AD16 cote 1per 44/65

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L’arrivée du 107e d’infanterie, journal La Charente du 16 juillet 1919, AD16 cote 1per 44/65 L’arrivée du 107e d’infanterie a débarqué mardi dans l’après-midi, à 2 heures 53, à la gare P. O d’Angoulême ; il est reçu à la gare par le général Chéré et le commandant Magord, chef du 2e bataillon. Comme la veille, le bataillon s’est formé dans la cour de la gare de l’Etat, où l’attendait la musique du régiment. A 3 heures 20 nos poilus, escortés d’un détachement d’artillerie, se mettent en marche suivant l’itinéraire que nous avons publié. Sur tout le parcours, et notamment dans l’avenue Gambetta, où la foule est compacte, nos braves sont l’objet de chaleureuses acclamations : des fleurs leur sont offertes à profusion. A 3 heures 30, le bataillon met pied à terre place de l’Hôtel-de-Ville, où son chef, le commandant Chabouty, est reçu par M. Mulac, sénateur, maire d’Angoulême, et son premier adjoint M. Petit. M. le Préfet, appelé à Paris, est représenté par son chef de cabinet. Le général Chéré et le commandant Magord

assistent à la réception.

Après l’exécution de la Marseillaise la musique joue plusieurs morceaux et il est près de 4 heures lorsqu’il se met en marche, aux acclamations de la foule pour rentrer à la caserne Taillefer, en passant par le rempart de l’Est et la rue de Périgueux. Sur tout le parcours, la foule, comme la veille, est enthousiaste. Le 1er bataillon est attendu demain mercredi, ainsi que le chef de corps, M. le commandant Beaucorps, actuellement

à Paris avec les drapeaux du 107e, du 307e et du 94e territorial.

Journal La Charente du samedi 19 juillet 1919,

AD16 cote 1per 44/65

La préparation du défilé

Journal La Charente du samedi 19 juillet 1919,

AD16 cote 1per 44/65

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Pour l’occasion un Arc de Triomphe a été érigé.

Archives municipales d’Angoulême

Le défilé, journal La Charente du lundi 21 juillet 1919, AD16 cote 1per 44/65 A 3 heures, le canon tonne sur le rempart de Beaulieu, les cloches des églises sonnent à toutes volée, la musique tchécoslovaque, placée à l’entrée de l’hôtel de ville, ouvre la fête en exécutant la Marseillaise, puis l’hymne national tchèque : Où est ma patrie ? Ces deux morceaux sont chaleureusement applaudis par la foule qui a envahi la place. Des gerbes de fleurs sont offertes aux chefs musiciens. A la même heure commence le défilé, précédé d’un détachement de gendarmes à cheval. Les troupes quittent la caserne Taillefer, ayant à leur tête le général Valentin, amputé du bras gauche, à cheval, le

commandant de Beaucorps et les officiers de l’état-major.

Archives municipales d’Angoulême

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Le détachement de Tchécoslovaquie précède nos poilus. La musique du 107e d’infanterie joue des airs si entrainants et si goûtés de la population angoumoisine. Sur tout le parcours, la foule est compacte, ce n’est qu’à grand peine qu’un service d’ordre organisé avec le concours de la troupe parvient à la contenir. De toutes parts, ce ne sont que des applaudissements, des vivats, des acclama-tions sans fin ; des fenêtres, des balcons, des fleurs pleuvent sur nos braves poilus dont les visages rayonnent de joie, malgré leur fatigue. Il est trois heures vingt lorsque la tête des troupes, arrivant par la rue des Halles-Centrales débouche sous l’arc de triomphe. La foule est immense, les fenêtres sont noires de monde, les acclamations redoublent , les fleurs tombent de toutes parts. C’est du délire.

Les sociétés militaires, avec leurs drapeaux déployés, sont massés devant l’hôtel de ville, ainsi que les socié-tés de gymnastique et des Alsaciens-Lorrains. Les mutilés et les veuves de guerre ont pris place dans la tribune qui leur est réservée.

Dans la tribune officielle ont pris place notamment : MM. Le préfet de la Charente, M. Mulac, les généraux

Chéré, Ladoux, Farsac et Wetzel. MM. Larroque, secrétaire général ; Marquais, conseiller de préfecture ; Lacroix,

président du tribunal civil ; Courrègelongue, procureur de la république ; Lucien Lacroix, président de la Chambre

de commerce ; Jacquard, inspecteur d’Académie, les conseillers municipaux, etc.

Archives municipales d’Angoulême

Dès que les troupes apparaissent, la musique tchécoslovaque joue la Marseillaise, le général Valentin et son

état-major vont se placer face au tribunes et le défilé, se poursuit sans que fléchisse un seul instant l’enthousiasme de

la foule. Des applaudissements nourris saluent le passage des mitrailleuses, dont les légers attelages sont recouverts

de verdure et de fleurs ; le train du régiment avec ses camouflages, les cuisines roulantes, enfin tout le matériel, dont

on a fait un si bon emploi contre l’ennemi.

Des batteries d’artillerie ferment le défilé ; nos valeureux artilleurs sont, à leur tour, justement fleuris et ac-clamés.

Vers 4 heures, les troupes regagnent leur caserne, sous une nouvelle pluie de fleurs, par les rues Marengo, Saint-Martial, et de Périgueux, accompagnées par une foule énorme.

Après le salut au drapeau, les troupes gagnent leurs réfectoires où un excellent repas, arrosé du précieux « pinard » cet élixir si français, les réconforte de leur fatigue.

. De 5 heures à 6 heures, place du Parc, la musique tchécoslovaque donne un concert très applaudi. A 6 heures les officiers sont reçus par la municipalité, dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville. Le soir, l’hôtel de ville est illuminé, ainsi qu’un certain nombre de maisons particulières et la musique

tchécoslovaque donne sur la place du Champ-de-Mars un nouveau concert. L’animation est grande jusqu’à une heure avancée.

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Nous ne saurions terminer le compte-rendu de ces belles fêtes patriotiques sans remercier M. le général Chérézon a pu tout particulièrement, en cette circonstance, apprécier le bon goût et l’heureuse initiative dans la conception de l’arc de triomphe qui a fait l’admiration de tous.

Un hommage aux soldats morts : un monument par commune La France a payé l'un des plus lourds tributs, avec 1,4 million de tués et de disparus. Rendre hommage au courage des soldats morts pendant le conflit est une nécessité pour la population française. C'est ainsi que le Parlement décide, par la loi du 25 octobre 1919, de faire ériger un monument aux morts dans chaque commune.

C’était le 11 novembre 1919. La fête de la victoire a été célébré à Villefagnan avec un état tout particulier. Indépendamment des nombreuses attractions inscrites au programme , la municipalité avait eu l’excellente idée de faire célébrer un service solennel en l’honneur des braves gens de la paroisse morts au champ d’honneur. Au cours de la cérémonie, M. Le Doyen annonça une touchante allocution qui alla droit au cœur des nombreux assistants qui se pressaient dans l’église. Il manifesta le désir qu’une plaque commémorative sur laquelle seraient gravés les noms des enfants de Villefagnan morts pour la France, soit placée dans l’église. Les personnes présentes donnèrent largement à la quête qui fut faite à cette attention.

« L’inauguration du monument élevé en la mémoire des enfants de Villefagnan morts au champ d’honneur a eu lieu dimanche 12 novembre 1922, en présence d’une foule considérable. M. Debenay, le sympathique maire, au milieu d’un profond recueillement, fit l’appel des noms gravés sur le marbre, puis prononça un discours emprunt d’une pa-ternelle bonté. M. le docteur Brothier, l’honorable prési-dent des vétérans, apporta aux héros de 1914 le salut de ceux de 1870. M. L’Abbé Leclerc, président de la section des mutilés de la Charente, rappela en termes émou-vants les sacrifices consentis puis, rappelant l’union qui régnait dans les tranchées pendant les années terribles, il invita ses camarades à ne jamais la rompre. Après un discours de M. Raoul Feuillet, conseiller général, M. le Sous-Préfet apporta aux morts l’hommage du gouvernement de la République. M. Poitou-Duplessis, député de la Charente, prononça

ensuite un magnifique discours. Avec son éloquence

coutumière, il invita lui aussi les anciens combattants

ses camarades, à ne pas rompre l’union qui avait fait

leur force pendant la guerre, puis brossant à grands

traits le hideux tableau des champs de bataille, il dit que

nous devions travailler de toutes nos forces pour

empêcher le retour de tels malheurs. Mais pour cela que

faire ? Désarmer complètement ? Utopie ! L’Allemagne

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nous a attaqués en 1914 parce qu’elle était plus forte que nous, aujourd’hui elle se refuse à désarmer, ne serait-ce

pas de la folie de lui donner l’exemple. Dans la voie du désarmement, suivons notre ennemie, ne marchons pas

avant elle.

Et M. Poitou-Duplessis termine au milieu des applaudissements de l’assistance tout entière. »

Entre 1920 et 1925, une véritable vague de monuments aux morts recouvre la France avec plus de 30 000

monuments construits, dont 1 500 pour les seuls départements de Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres et

Vienne.

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Sources : Archives Départementales de la Charente Archives municipales d’Angoulême Centenaire 14-18 Les archives nationales l’Office national des armées, ONAC Rue 89 Bordeaux José Délias : 14-18 « Ceux de chez nous Nos héros malgré eux » La Charente Libre Guerre 1914-1918 les dernières semaines en Ruffécois Villefagnan et son canton Filae

Tous ces textes et photos, ces recherches ont été proposés par Mireille HIRONDEAU