18
8 4104 TE PA 02 87 SÉQUENCE 09 CHAPITRE 10 : L’ENTREPRISE ET L’ACTIVITE COMMERCIALE...................................................... 89 I. APPROCHE JURIDIQUE DE LA NOTION D’ENTREPRISE ................................................................... 89 A. NOTION JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE .......................................................................................................... 89 1. Absence de personnalité morale de l'entreprise..................................................................................................... 89 2. émergence d'un statut juridique de l'entreprise...................................................................................................... 90 B. TERMINOLOGIE JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE ............................................................................................ 90 1. Classification selon le mode d’exercice de l’activité ............................................................................................ 90 2. Classification fondée sur la nature de l’activité et la personne de l’entrepreneur ................................................. 91 II. L’ENTREPRISE COMMERCIALE ............................................................................................................ 96 A. LES CRITERES DE COMMERCIALITE ............................................................................................................... 96 1. Les conditions d’accès à la qualité de commerçant............................................................................................... 96 2. Les caractéristiques de l’activité commerciale ...................................................................................................... 97 3. La distinction entre le statut d’artisan et le statut de commerçant ......................................................................... 97 B. LE REGIME JURIDIQUE APPLICABLE A L’ENTREPRISE COMMERCIALE ................................................ 98 1. Le régime juridique des actes de commerce.......................................................................................................... 98 2. Les droits et obligations du commerçant ............................................................................................................... 98 EXERCICES D’ENTRAINEMENT A NE PAS ENVOYER A LA CORRECTION.................................... 103 CORRIGE DES EXERCICES D’ENTRAINEMENT .................................................................................... 104

8 4104 TE PA 02 07 seq09 - the.file.free.frthe.file.free.fr/1er-année BTS IG/Droit_Cours 1 et 2_4104... · Chapitre 10 Approche juridique de la notion d’entreprise Identifier les

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Séquence 9

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SÉQUENCE 09

CHAPITRE 10 : L’ENTREPRISE ET L’ACTIVITE COMMERCIALE...................................................... 89

I. APPROCHE JURIDIQUE DE LA NOTION D’ENTREPRISE................................................................... 89 A. NOTION JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE ..........................................................................................................89

1. Absence de personnalité morale de l'entreprise.....................................................................................................89 2. émergence d'un statut juridique de l'entreprise......................................................................................................90

B. TERMINOLOGIE JURIDIQUE DE L’ENTREPRISE ............................................................................................90 1. Classification selon le mode d’exercice de l’activité ............................................................................................90 2. Classification fondée sur la nature de l’activité et la personne de l’entrepreneur .................................................91

II. L’ENTREPRISE COMMERCIALE ............................................................................................................ 96 A. LES CRITERES DE COMMERCIALITE ...............................................................................................................96

1. Les conditions d’accès à la qualité de commerçant...............................................................................................96 2. Les caractéristiques de l’activité commerciale......................................................................................................97 3. La distinction entre le statut d’artisan et le statut de commerçant.........................................................................97

B. LE REGIME JURIDIQUE APPLICABLE A L’ENTREPRISE COMMERCIALE ................................................98 1. Le régime juridique des actes de commerce..........................................................................................................98 2. Les droits et obligations du commerçant...............................................................................................................98

EXERCICES D’ENTRAINEMENT A NE PAS ENVOYER A LA CORRECTION.................................... 103

CORRIGE DES EXERCICES D’ENTRAINEMENT.................................................................................... 104

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PRESENTATION DE LA SEQUENCE 09

NUMERO DU CHAPITRE ET DUREE D’ETUDE THEORIQUE MOYENNE COMPETENCES MOTS-CLES

Chapitre 10

Approche juridique de la notion d’entreprise

Identifier les conséquences de l’absence de personnalité morale de l’entreprise.

Différencier les notions d’établissement, d’entreprise, d’unité économique et sociale, de groupe.

Repérer l’émergence d’un statut juridique de l’entreprise dans les diverses branches du droit.

Acte de commerce Artisan Commerçant Établissement Filiale Groupe Personne morale Unité économique et sociale

L’entreprise commerciale

(5 heures)

Identifier les conditions à remplir pour acquérir la qualité de commerçant.

Caractériser l’activité commerciale.

Distinguer le commerçant de l’artisan.

Dégager les conséquences de la qualité de commerçant (compétence, preuve, obligations comptables, solidarité, etc.).

À retenir

Exercices d’entraînement à ne pas envoyer à la correction

QCM

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CHAPITRE 10 : L’ENTREPRISE ET L’ACTIVITE COMMERCIALE

Le droit français ne reconnaît pas l’entreprise en tant que telle.

L’entreprise est une notion économique qui désigne un regroupement de biens et d’hommes dont le but principal est la production de biens et de services vendus sur un marché en vue de réaliser des profits.

C’est un terme générique qui regroupe les entreprises individuelles et les sociétés.

Le droit a toutefois créé un régime spécifique pour l’entreprise commerciale. Des critères de commercialité ont été fixés pour délimiter l’activité de ce type particulier d’entreprise.

I. approche juridique de la notion d’entreprise

A. Notion juridique de l’entreprise

Être capable de

Identifier les conséquences de l’absence de personnalité morale de l’entreprise et repérer l’émergence d’un statut juridique de l’entreprise dans les diverses branches du droit.

1. Absence de personnalité morale de l’entreprise

a. Personnalité morale La personne morale est capable de détenir un patrimoine propre, de passer des contrats, de défendre ses droits devant la justice. Mais, l’identification de l’entreprise est nécessaire pour la reconnaître en droit et la distinguer des personnes physiques qui en ont souhaité la création. Si c’est le cas, l’entreprise disposera d’une dénomination sociale (le nom), d’un siège social (le domicile) et d’un capital social (le patrimoine).

b. Conséquences de l’absence de personnalité morale de l’entreprise L’entreprise est ainsi caractérisée en droit par l’absence de personnalité juridique : ce n’est donc pas un sujet de droit. Elle n’acquiert la personnalité juridique que lorsqu’elle prend la forme d’une société. Si elle n’est pas exploitée sous forme sociétaire, l’entreprise se confond avec la personnalité et le patrimoine de son exploitant.

L’entreprise n’a pas de patrimoine : elle n’a ni biens ni dettes. Elle est directement intégrée dans le patrimoine de l’entrepreneur. La responsabilité de l’entrepreneur s’exerce donc sur l’ensemble de ses biens propres. Si des difficultés financières de l’entreprise surgissent, l’ensemble des biens, y compris les biens personnels, familiaux de l’entrepreneur, pourront être saisis par les créanciers de l’entreprise.

L’entreprise ne peut agir en son nom propre : c’est l’entrepreneur qui passe les contrats.

L’entreprise ne peut défendre ses droits et agir en justice en son nom.

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L’entreprise n’est soumise à aucune formalité de création. Le chef d’entreprise est seul responsable de ses actes.

2. Émergence d’un statut juridique de l’entreprise L’entreprise ne peut toutefois exister que par la volonté de la ou des personnes qui la composent. Ainsi, elle se dote, par leur intermédiaire, de moyens humains, matériels et immatériels afin d’exercer une activité économique. Les tribunaux estiment que cette combinaison de moyens constitue une entreprise.

Mais de nombreux intérêts entrent alors en jeu : ceux, par exemple, des associés, des salariés, des consommateurs, etc., et il convient de sécuriser les transactions qui naissent entre eux. Cette protection est assurée par le droit communautaire et par le droit national. Bien que la personnalité juridique de l’entreprise ne soit pas reconnue par le droit, de nombreuses dispositions légales lui accordent une certaine autonomie.

Le droit fiscal reconnaît l’entreprise pour l’imposer (ex. : impôt sur les bénéfices).

Le droit du travail organise les relations de travail au sein de l’entreprise en permanence malgré le changement de l’entrepreneur. Les salariés sont liés à l’entreprise plus qu’à l’entrepreneur (l’acquéreur de l’entreprise doit continuer les contrats de travail).

Le droit commercial dissocie le sort de l’entreprise de celui de l’entrepreneur (en particulier en ce qui concerne les entreprises en difficulté).

Le droit de la concurrence s’applique aux entreprises en les protégeant, par exemple, contre la concurrence déloyale.

B. Terminologie juridique de l’entreprise

Être capable de

Différencier les notions d’établissement, d’entreprise, d’unité économique et sociale, de groupe.

Les entreprises peuvent être classées selon trois critères : le mode d’exercice de leur activité, la nature de l’activité et la personne de l’entrepreneur.

1. Classification selon le mode d’exercice de l’activité Les entreprises les moins importantes exercent une seule activité en un seul lieu ; par exemple, le commerçant à l’intérieur de sa boutique. Mais, si l’entreprise se développe, elle peut avoir plusieurs branches d’activités en plusieurs lieux. C’est alors que l’on distinguera l’entreprise et l’établissement, l’entreprise et la succursale, l’entreprise et l’unité économique et sociale, l’entreprise et le groupe, l’entreprise et la filiale.

L’établissement

C’est une unité d’exploitation dépendant d’une entreprise individuelle ou sociétaire. Il n’a pas la personnalité morale.

Cette notion d’établissement est utilisée notamment dans : – le registre du commerce et des sociétés où il est dit qu’une inscription complémentaire doit être prise au lieu de chaque établissement secondaire ; – la détermination du domicile : le Code civil le fixe au lieu du principal établissement ; – le respect de l’environnement : les établissements dangereux et insalubres sont réglementés ; – le droit du travail : un comité d’établissement joue le rôle du comité d’entreprise au niveau de chaque établissement.

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La succursale

C’est une unité d’exploitation rattachée à une entreprise individuelle ou sociétaire (elle n’a pas de clientèle propre et n’a pas de personnalité juridique) et disposant : – d’une autonomie matérielle : elle a ses propres installations et peut fonctionner par ses propres moyens ; – d’une autonomie juridique : le salarié ou le mandataire qui la dirige dispose d’une certaine liberté d’action et peut contracter avec les tiers ; elle fait aussi l’objet d’une inscription propre au RCS.

L’unité économique et sociale

C’est un ensemble d’entreprises juridiquement distinctes, mais présentant des liens sur le plan économique et social ; par exemple, services communs (comptabilité, achats, gestion du personnel…), activités identiques ou complémentaires, pouvoir de direction concentré entre les mêmes personnes…

Cette notion est essentiellement utilisée en droit du travail pour la mise en place de la représentation du personnel dans la mesure où l’effectif global des salariés doit être pris en compte.

Le groupe de sociétés

C’est un ensemble formé par une société dite société mère ou société dominante, ses filiales et les sociétés dans lesquelles elle détient une participation significative. Le groupe se caractérise par l’unité de direction, exercée par la société dominante sur les sociétés contrôlées.

Cet ensemble n’a pas la personnalité morale. Les sociétés contrôlées sont économiquement dépendantes puisque le choix des stratégies et des activités est décidé au niveau du groupe par la société dominante, et juridiquement indépendantes car elles conservent leur personnalité morale et leur patrimoine.

Le groupe de sociétés n’a pas la personnalité juridique.

La filiale C’est une société dont plus de 50 % du capital est détenu par une autre société appelée société mère. Elle exploite généralement une branche d’activité particulière. Elle a la personnalité juridique.

2. Classification fondée sur la nature de l’activité et la personne de l’entrepreneur

a. Selon la nature de l’activité On distinguera : – les entreprises civiles : agriculture, immobilier, professions artistiques et libérales… – les entreprises commerciales : commerçants et sociétés commerciales.

b. Selon la personne de l’entrepreneur On distinguera : – l’entrepreneur, personne physique : entreprise individuelle, commerçant, avocat… – l’entrepreneur, personne morale : sociétés.

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DOCUMENT 1

L’Entreprise, n° 232, mars 2005

Questions

1. Qu’est-ce que le CFE ? 2. Quel est son rôle principal ? 3. Quelle autre fonction remplit-il ?

Votre réponse

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Réponses

1. Le CFE est le Centre de Formalités des Entreprises. 2. Il centralise toutes les informations relatives à la création de l’entreprise puis les transmet aux organismes concernés (centre des impôts, caisses de protection sociale...) et remet un récépissé de dépôt de déclaration. 3. Il peut proposer également des prestations de conseil ou d’assistance.

DOCUMENT 2

Liquidation judiciaire et absence de personne morale

OUVERTURE DE LA PROCÉDURE

128. Société sans personnalité morale

Cass. com., 11 févr. 2004, Me F. Brucelle, ès qual. c/ SA Dalpes : Juris-Data n° 2004-022278

La procédure de liquidation judiciaire de la société Impériale a été étendue à la société créée de fait Royale II. L’un des associés de cette dernière, la société Dalpes, entend contester la décision d’extension.

1. – Une première remarque s’impose : la société Royale II est une société créée de fait. En l’occurrence, il s’agirait plutôt d’une société en participation puisqu’elle est pourvue d’un gérant. Mais la qualification exacte n’a pas d’incidence dès lors que seules les personnes morales de droit privé relèvent du domaine d’application des procédures collectives.

Aucune extension n’est possible à l’encontre d’une société dépourvue de personnalité morale, société en participation comme société créée de fait (V. A. Martin-Serf : J.-Cl. Sociétés Traité, Fasc. 41-10, n° 56 et les décisions analysées). En revanche, chaque associé pourrait être l’objet d’une procédure collective (en ce sens A. Martin-Serf, op. préc., n° 55).

De la même façon, si les effets du jugement d’ouverture s’étendent aux associés tenus indéfiniment et solidairement du passif social, l’application de l’article L. 624-1 du Code de commerce suppose la personnalité morale de la société elle-même (en ce sens, A. Cerati-Gauthier, op. préc., n° 16).

2. – L’associé de la société créée de fait entendait contester la décision d’ouverture. Selon les motifs retracés par le pourvoi, les juges ont considéré que la société Dalpes était directement concernée en tant qu’associé indéfiniment et solidairement responsable du passif social et aurait dû être attraite devant eux. La difficulté portait alors sur la nature de la voie de recours : appel ou tierce-opposition ?

3. – Les juges du fond ont exclu l’appel au motif que la société Dalpes n’avait pas la qualité de partie en première instance. Or l’appel suppose la qualité de partie en première instance (en matière contentieuse, NCPC, art. 547).

De surcroît, l’article L. 623-1 du Code de commerce réserve l’appel au débiteur, c’est-à-dire à la société à qui la procédure a été étendue et non à ses associés. Il va de soi que le débiteur, la société Royale II, n’ayant pas d’existence juridique ne peut faire appel, même si, par erreur, le tribunal a décidé de lui étendre une procédure de liquidation déjà ouverte. Son « associé de fait », la société Dalpes, ne le peut non plus pour les raisons déjà évoquées.

(...)

6. Les associés d’une société créée de fait sont censés se représenter mutuellement compte tenu de leur intérêt commun. Or le gérant qui a été convoqué en justice est en même temps associé. Donc le gérant a représenté en justice les autres associés.

Malgré les apparences, on ne peut convoquer une société sans personnalité morale. Dans ces sociétés, la gérance ne concerne que les relations entre les associés. Vis-à-vis des tiers le gérant n’engage que lui-même. Il n’a aucun pouvoir de représentation identique à celui des gérants de sociétés immatriculées (J. Derruppé : J.-Cl. Sociétés, Fasc. 47-30, n° 42. – A. Gauvin, Le gérant de la société en participation : Gaz. Pal. 1998, 2e sem., doct. p. 850 s.). La gérance présente donc

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des particularités qui excluent la représentation en justice de la société toujours pour la raison que la société est dépourvue de personnalité morale.

7. – L’argument tiré de la représentation des associés par leur gérant également associé n’est donc pas pertinent (en ce sens, D. Cholet, art. préc., n° 21). En conséquence, seule la tierce-opposition est ouverte aux associés d’une société créée de fait ou en participation qui entendent contester sa mise en liquidation judiciaire.

Droit des sociétés – Revue mensuelle du JurisClasseur, juillet 2004, p. 24

Questions

1. Quelle est la particularité de la société Royale II ? 2. Quelle est la conséquence sur l’application des procédures collectives ? 3. Pourquoi la société Royale II ne peut pas faire appel ? 4. Et la société Dalpes ? 5. Peut-on convoquer une société sans personnalité morale ? 6. Quelle est la position du gérant vis-à-vis des tiers ? 7. Quelle est la seule possibilité ouverte aux associés d’une société non immatriculée qui entendent contester sa mise en liquidation judiciaire ?

Votre réponse

Réponses

1. La société Royale II est une société créée de fait. 2. Elle ne relève pas du domaine d’application des procédures collectives. 3. Elle n’a pas d’existence juridique. 4. Dalpes, « associé de fait », n’a pas non plus d’existence juridique. 5. La convocation d’une société sans personnalité morale n’est pas possible. 6. Là, le gérant n’engage que lui-même. Seuls les gérants des sociétés immatriculées ont un pouvoir de représentation. 7. La tierce-opposition.

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DOCUMENT 3

Patrimoine et personne morale

PERSONNE MORALE

205. Affirmation du principe selon lequel le patrimoine est indissociablement lié à la personne

Cass. com., 12 juill. 2004, n° 03-12.683, GAEC des Villains/Assoc. L’interprofession des vins du Val-de-Loire : Juris-Data n° 2004-024789 Cet arrêt relatif à la fusion d’organisations interprofessionnelles est extrêmement important pour l’ensemble du droit des sociétés (deux autres arrêts ont été rendus le même jour à propos de la même opération). En l’espèce une organisation interprofessionnelle agricole habilitée à percevoir des cotisations auprès des membres des professions concernées a absorbé une autre organisation de même nature. L’absorbante entendait se faire communiquer les éléments nécessaires au calcul des cotisations mais s’est heurtée au refus d’un exploitant invoquant l’absence de dissolution de l’absorbée. Dans la mesure où une loi était nécessaire pour dissoudre l’absorbée la question de l’étendue des droits transférés se posait nécessairement (la Chambre commerciale a retenu, à propos d’une question voisine, que l’absorbante qui recueille par l’effet de la fusion l’intégralité du patrimoine de l’absorbée peut se voir opposer la chose jugée à l’égard de cette société : V. Cass. com., 18 févr. 2004 : Dr. sociétés 2004, comm. 84 note H. Hovasse ; JCP E 2004, 739, note F.-G. Trébulle). Cette décision est censurée par l’arrêt rapporté qui observe que « la transmission universelle à la personne morale absorbante du patrimoine de la personne morale absorbée est indissociable de la dissolution de cette dernière et ne peut se réaliser tant que cette personne morale n’est pas dissoute ». Ce faisant, la Cour replace les conséquences des opérations de fusion dans leur ordre chronologique : ce n’est que la dissolution de l’absorbée qui permet d’opérer le transfert universel de patrimoine à l’absorbante et tant que cette étape décisive n’a pas été franchie, il n’est pas possible à celle-ci de prétendre exercer les droits de celle-là. Par voie de conséquence, jusqu’à ce que la loi opérant la dissolution de l’organisation absorbée intervienne, elle seule peut agir en justice en vue de la perception des cotisations qui lui sont dues. Si la personne morale est dissoute à la suite de la fusion-absorption, ce n’est que lorsque la dissolution est acquise que le transfert s’opère. La solution est parfaitement satisfaisante et l’on peut être surpris que la Cour d’appel n’ait pas relevé la difficulté qu’il y a à admettre que le transfert de patrimoine soit opéré tant que la personne morale qui en est titulaire est toujours existante. L’intérêt majeur de cette décision réside dans le fait que la solution ainsi retenue l’a été au visa du « principe selon lequel le patrimoine est indissociablement lié à la personne » et c’est pour avoir violé ce principe que l’arrêt d’appel est cassé. De même que la personne physique ne peut céder son patrimoine de son vivant, la personne morale ne peut le faire tant que n’est pas survenue sa dissolution. Dans un cas comme dans l’autre, le transfert de l’universalité est possible, mais il est strictement subordonné à la disparition de la personne du titulaire du patrimoine en cause. Bien sûr, il est envisageable de transmettre certains biens, voire des ensembles de biens et de droits, notamment par la voie de l’apport partiel d’actif, mais le transfert de l’intégralité du patrimoine est irréductible à cette figure particulière de transfert d’une universalité que l’on rencontre également en cas de cession de fonds de commerce. « L’homme ne perd son patrimoine qu’en perdant sa personnalité, ce qui ne peut avoir lieu que par suite de son décès » (ibid.). Appliquée aux personnes morales, cette observation conduit effectivement au résultat auquel la Cour est arrivée : la personne ne perd son patrimoine qu’en perdant sa personnalité, c’est-à-dire par suite de sa dissolution.

F.-G. T. Droit des sociétés – Revue mensuelle du JurisClasseur, décembre 2004, p. 18

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Questions

1. À partir de quand le transfert de l’universalité du patrimoine est-il possible que ce soit pour une personne physique ou une personne morale ? 2. Pourquoi la transmission n’est-elle pas possible dans l’arrêt ci-dessus ? 3. Quel principe est affirmé par la décision de la Cour de cassation ?

Votre réponse

Réponses

1. À la disparition de la personne du titulaire du patrimoine en cause. 2. La personne morale n’est pas dissoute. 3. Le patrimoine est indissociablement lié à la personne.

II. L’ENTREPRISE COMMERCIALE

A. Les critères de commercialité

Être capable de

Identifier les conditions à remplir pour acquérir la qualité de commerçant, caractériser l’activité commerciale, distinguer le commerçant de l’artisan.

1. Les conditions d’accès à la qualité de commerçant

a. Les conditions relatives à l’état de personnes Ne peuvent devenir commerçants que ceux qui répondent à certaines conditions légales : – Le commerçant ne doit pas souffrir d’incompatibilité avec certaines autres professions (fonctionnaire,

profession libérale). – Le commerçant ne doit pas subir de déchéance d’exercer la profession commerciale (condamnations pour

vol, escroquerie, abus de confiance…). Cette condition a été imposée afin d’assainir et de moraliser la profession commerciale.

– Le commerçant doit être une personne physique majeure et capable dans la mesure où l’exercice d’une activité commerciale comporte de nombreux risques.

b. Les conditions relatives à l’activité Certaines activités commerciales sont interdites ou réglementées. – Activités interdites : celles qui sont contraires à la moralité publique, celles qui compromettent la santé

publique (commerce de drogue), celles qui pourraient concurrencer des monopoles publics (timbre-poste). – Activités réglementées : celles qui nécessitent une autorisation administrative (ex. : vente d’armes) et

celles qui sont soumises à l’obtention d’un diplôme (ex. : pharmacie).

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2. Les caractéristiques de l’activité commerciale Selon l’article L. 121-1 du Code de commerce : « Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle. »

Ainsi, deux critères permettant de déterminer une activité commerciale sont à retenir : – l’accomplissement d’actes de commerce, – l’exercice de la profession de commerçant à titre habituel.

a. La réalisation d’actes de commerce La loi ne définit pas l’acte de commerce en lui-même, mais elle en distingue deux catégories.

Actes de commerce par nature (ou objectifs)

L’article 632 du Code de commerce donne une énumération, non limitative, des actes de commerce par nature : – l’achat en vue de la revente de biens meubles ou

immeubles, – les opérations de banque, change et courtage, – les actes accomplis par les entreprises de location de

meubles, de manufactures, de fournitures de services, de transport, de vente aux enchères, de spectacles publics, d’exploitation des mines, d’agences et bureaux d’affaires,

– le crédit-bail et la franchise.

Actes de commerce par accessoire (ou subjectifs)

Un acte civil est présumé devenir un acte de commerce par accessoire à deux conditions : – son auteur doit être commerçant, – il doit être accompli pour les besoins du commerce.

Par exemple, il peut s’agir de l’achat d’un ordinateur par un commerçant pour effectuer sa comptabilité.

Actes de commerce par la forme

Ce sont toujours des actes commerciaux quelle que soit la personne qui les effectue (ex. : la lettre de change).

b. L’exercice des actes de commerce à titre de profession habituelle et indépendante L’acte de commerce doit être réalisé de manière répétée, dans un cadre organisé et dans le but d’obtenir un revenu régulier : « Il n’y a pas d’activité commerciale s’il n’y a pas de but lucratif. »

L’acte de commerce doit être réalisé au nom et pour le compte de son auteur. Ainsi, ne sont pas commerçants les salariés qui effectuent des actes de commerce pour le compte de leur employeur et les dirigeants qui agissent au nom et pour le compte d’une société commerciale.

3. La distinction entre le statut d’artisan et le statut de commerçant Un artisan est un travailleur manuel, indépendant (ce qui le distingue du salarié), assisté d’un nombre restreint de collaborateurs. Il a un statut particulier : il n’est pas soumis à certaines obligations du droit commercial, mais il bénéficie de certaines de ses règles qui lui sont favorables. Il doit participer personnellement à l’exécution du travail. Il vend le produit de son travail, source principale de ses revenus.

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Sont artisanales les activités de : – production : objets d’art ou de luxe exigeant une habileté manuelle ; – transformation des biens appartenant à autrui (ex. : couture) ; – réparation en matière immobilière (ex. : peinture) ou en matière mobilière (ex. : électricité) ; – prestation de services (ex. : coiffure).

L’artisan n’est pas commerçant : les actes qu’il accomplit (avec clients et fournisseurs) sont de nature civile et soumis à la compétence des tribunaux civils. Cependant, l’artisan bénéficie de l’application de dispositions du droit commercial qui lui sont favorables.

Enfin, il est soumis à un régime fiscal particulier : par exemple, il ne paie pas la taxe professionnelle ou la taxe d’apprentissage. Il est inscrit à la chambre des métiers.

B. Le régime juridique applicable à l’entreprise commerciale

Être capable de

Dégager les conséquences de la qualité de commerçant (compétence, preuve, obligations comptables, solidarité).

1. Le régime juridique des actes de commerce Les actes de commerce sont soumis au régime de la liberté de preuve : selon l’article L. 110-3 du Code de commerce, à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens. Ce principe de liberté de preuve ne s’applique pas si l’une des parties n’est pas commerçante.

Les dettes des commerçants sont présumées solidaires ; ce qui signifie qu’en cas de pluralité des débiteurs, le créancier peut exiger le paiement de l’intégralité de la dette à l’un quelconque des débiteurs. Le débiteur poursuivi pourra alors se retourner contre les codébiteurs pour obtenir le paiement de leur part dans la dette. C’est la présomption de solidarité.

Enfin, en cas de litige relatif à l’acte de commerce, il relève de la compétence du tribunal de commerce ; cela permet aux commerçants d’être jugés par leurs pairs selon une procédure rapide et simplifiée.

2. Les droits et obligations du commerçant Deux obligations essentielles s’imposent au commerçant.

a. L’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés (RCS) Toute personne physique ayant la qualité de commerçant doit demander son immatriculation au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la date du début de son activité au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel elle est située. Elle se traduit par l’attribution d’un numéro d’identification.

Cette inscription entraîne une présomption simple de commercialité : la personne est présumée avoir la qualité de commerçant. C’est aussi une mesure de publicité visant à informer les tiers.

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b. Les obligations comptables Le Code de commerce fixe des principes comptables (documents comptables réguliers et sincères) qui s’appliquent à tous les commerçants et des obligations comptables qui varient selon le régime fiscal et la taille de l’entreprise.

La comptabilité peut servir, entre commerçants, de moyen de preuve pour les actes de commerce. Elle facilite également le contrôle de l’administration fiscale.

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À RETENIR

Entreprise : de l’absence de personnalité juridique à son émergence.

Entreprise

Absence depersonnalité

juridique

Début dereconnaissance

Conséquences

Droit du travail : représentants dupersonnel, participation avecbénéfices, poursuite du contrat detravail ...

Droit fiscal : régime de l'impôt sur les bénéfices, taxe professionnelle

Droit commercial : régime juridiquedes entreprises en difficulté

Droit européen

pas de patrimoinepropre : les biensappartiennent àl'entrepreneur

entrepreneur : pouvoirde décision

entrepreneur responsabledevant créanciers

interdiction des ententes,des monopoles

statut juridique dessociétés européennes :associés nécessairementde nationalités différentes,capital social minimumde 100 000 €

Classification desentreprises

Par la naturede lʼactivité

Par la personnalitéjuridique de

lʼentrepreneur

Par le modedʼexercice de

lʼactivité

Personne physique

Personne morale

Entreprises civiles

Entreprisescommerciales

Subdivisiondʼune entreprise

Regroupementdʼentreprises

filiales

entreprises individuelles(artisans, commerçants,agriculteurs, professionslibérales)

entreprises sociétaires,GIE, associations

entreprises agricoles,professions libérales,sociétés civiles

commerçants etsociétés commerciales,industries

établissements

succursales

groupe

UES : unitééconomiqueet sociale

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Entreprisecommerciale

personne physique ou EURL

par la forme de la société

par l’objet de la société

individuellecommerciale

sociétairecommerciale

REMARQUE Naissance de la personnalité juridique : immatriculation au RCS.

àbut

lucratif

sansbut

lucratif

Sipersonnalité

juridique

Entrepriseunipersonnelle

Entreprise avecau moins1 associé

EURL, SASU, EARL

GIE

sociétés

syndicats

associations

commerciales

civiles(immobilière,

professionnelle)

sociétés de personnes : SNC,sociétés en commandite simple par actions

sociétés de capitaux : SA, SAS

SARL

REMARQUE Depuis la loi Madelin du 11 février 1994, en cas de difficulté, les créanciers doivent saisir en priorité les biens professionnels.

Lʼentreprise estcommerciale par

la naturede son activité

elle réalise desactes de commerce

caractère habituelde la profession

commerciale

elle doit accomplir lesactes de commerce

pour son propre compte

par nature : achat pour revente, activités industrielles, prestation de services...

quelle que soit son activitépour les SA, SAS, SARL et SNC

par accessoire : acte civil accompli par un commerçant pour son activité

sa forme juridique

Séquence 9

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être juridiquement capable

absence dʼinterdiction généraledʼexercer le commerce (condamnation)

étrangers hors UE :être titulaire dʼune carte de commerçant

Conditions dʼaccèsà la professioncommerciale

hors profession incompatible :fonctionnaire, officier ministériel, profession libérale

Immatriculation au RCS1 (donne la personnalité morale aux sociétés et fait présumer de la qualité de

commerçant pour les personnes physiques), mesure de publicité

tenir une comptabilitéObligations

autres : ouverture d'un compte bancaire, obligations fiscales, droit du travail,

législation commerciale, procédure collective en cas de cessation de paiement

1Toutes les formalités obligatoires consécutives à l'ouverture d'un commerce s'effectuent en un lieu unique : le centre de formalités des

entreprises (CFE). Les informations utiles aux tiers sont centralisées au RCS.

de défense : invoquer sa comptabilité, bénéficier

du régime juridique des actes de commerce

électoraux : chambres de commerce et dʼindustrie,

tribunaux de commerceDroits

au bail et au renouvellement du bail

(fonds de commerce)

Séquence 9

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EXERCICES D’ENTRAINEMENT A NE PAS ENVOYER A LA CORRECTION

QCM : La notion d’entreprise – L’entreprise commerciale Oui Non

1. L’entreprise a la personnalité juridique. 2. Une association est une personne morale. 3. L’existence d’une association date de son immatriculation au RCS.

4. Toute personne juridique a un patrimoine.

5. L’entreprise possède un patrimoine. 6. Le propriétaire d’une entreprise peut être une personne morale ou une personne

physique.

7. Seul le propriétaire de l’entreprise possède un patrimoine.

8. Le pouvoir est fondé sur la propriété. 9. Le propriétaire d’une entreprise est seulement responsable de son activité.

10. Dans une entreprise individuelle on peut distinguer le patrimoine professionnel du patrimoine extra-professionnel.

11. Une EURL est une entreprise utile à responsabilité limitée. 12. Un GIE est un groupement d’intérêt économique.

13. Une SASU est une Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle.

14. Un acte mixte est un acte commercial pour une partie et civil pour l’autre.

15. Pour intenter une action contre le commerçant dans le cas d’un acte mixte, seule la juridiction commerciale est compétente.

16. Une personne peut être commerçante uniquement du fait de son activité.

17. Pour être commerçant, il faut remplir deux conditions : réaliser des actes de commerce, exercer la profession de manière habituelle.

18. Le CFE est le centre de formalités des entreprises.

19. La preuve des actes juridiques se fait par tous moyens par le non-commerçant contre le commerçant.

20. Les avantages de l’arbitrage sont la confidentialité et la rapidité. 21. Pour le commerçant personne physique l’immatriculation doit se faire dans les

quinze jours qui suivent le début d’une activité commerciale.

22. La tenue d’une comptabilité est facultative.

23. Un litige entre deux commerçants est du ressort du tribunal de commerce.

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CORRIGE DES EXERCICES D’ENTRAINEMENT

QCM : La notion d’entreprise – L’entreprise commerciale 1. Non. 2. Oui. 3. Non, c’est le cas des sociétés. Pour une association c’est la date de parution de la constitution au JO. 4. Oui. 5. Non, ce n’est pas une personne juridique. 6. Oui. 7. Oui, c’est le principe de l’unicité du patrimoine. 8. Oui. 9. Non, il doit aussi assumer les risques. 10. Non, unicité du patrimoine. 11. Non, une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée. 12. Oui. 13. Oui. 14. Oui. 15. Non, la personne non commerçante peut choisir une juridiction civile ou commerciale. 16. Oui. 17. Non, 3 : il faut en plus accomplir les actes de commerce pour son propre compte. 18. Oui. 19. Oui. 20. Oui. 21. Oui. 22. Non, obligatoire ; elle peut seulement être simplifiée. 23. Oui.